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ECHOS de territoires, le podcast du cap régénératif dans les territoires

#21 - Sébastien Godin - Comptoir des Signaux

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39min |28/05/2025|

38

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ECHOS de territoires, le podcast du cap régénératif dans les territoires

#21 - Sébastien Godin - Comptoir des Signaux

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Description

Comptoir des Signaux accompagne exclusivement les acteurs publics sur les enjeux d’aménagement numérique des territoires. En 2023, l’entreprise rejoint la CEC Alpes pour accélérer sa transformation, après un premier virage RSE jugé trop timide.

Son dirigeant Sébastien Godin insiste sur l’urgence à intégrer les enjeux de biodiversité, de souveraineté numérique et de résilience territoriale. Dans cet épisode, il parle d’intelligence artificielle comme levier pour les services publics, à condition d’en maîtriser les dérives. Il plaide pour une commande publique qui valorise les entreprises locales engagées, au-delà du seul critère prix.

Comptoir des Signaux milite pour des systèmes d’information souverains, éthiques et écoconçus. L’exemple de son propre cabinet démontre que des alternatives existent, même à petite échelle.


"La première question qu'un chef d'entreprise devrait se poser, c'est est-ce que son entreprise est utile et est-ce qu'elle est utile au territoire sur lequel il travaille ?"


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • SGz

    Bonjour, bienvenue sur Éco de Territoire, le podcast inspirant de la Convention des Entreprises pour le Climat, qui donne la parole aux acteurs engagés et passionnés qui construisent l'économie régénérative de demain. Je suis Stéphane Gonzalès, alumne de la promotion 2023, et je vous emmène sur les territoires du bassin lyonnais et des Alpes, à la rencontre de dirigeants et de dirigeantes qui contribuent à dessiner les contours d'un avenir durable. Alors aujourd'hui, j'ai dit je, mais je pourrais dire nous, nous avons la chance de vous partager le témoignage du dirigeant d'une belle TPE, de conseil d'ingénierie en aménagement numérique, établi à Groisy et je vous parle du Comptoir des Signaux. Le comptoir des Signaux. Et ce dirigeant, c'est Sébastien Godin, avec qui nous allons échanger sur son engagement vers l'économie dite régénérative. Alors Sébastien, bonjour.

  • SG

    Bonjour.

  • SGz

    Je te propose qu'on se tutoie.

  • SG

    Parfait.

  • SGz

    Et puis en plus, comme je sais que tu es très bavard, à mon avis, ça va être facile de t'enclencher sur les sujets. Et aujourd'hui, on a quand même la chance, c'est un peu un podcast exceptionnel, j'ai un peu la pression d'ailleurs, puisque nous avons la chance d'avoir une experte de choc avec nous, en la présence de Marianne Coudert. Salut Marianne. Salut. Allez, représente-nous qui tu es.

  • MC

    Moi, j'étais et je suis toujours pilote de territoire pour la Convention des Entreprises pour le Climat sur le bassin lyonnais et sur les Alpes, donc depuis le démarrage sur ce projet associatif et depuis 2022 en particulier sur le territoire lyonnais et alpin.

  • SGz

    Voilà, donc dans ce podcast, l'experte c'est Marianne et moi, je vais juste être celui qui anime. Alors Sébastien, revenons au Comptoir des Signaux, qui n'est pas né hier puisque ça fait 35 ans que le Comptoir des Signaux existe, pour apporter une expertise en télécommunication auprès des collectivités et des entités publiques, puisque c'est 100% de vos clients. Et alors, j'ai pris la phrase qui est sur le site, et puis on va débattre de ça : conseil en ingénierie et en aménagement numérique responsable du territoire. Je dis tiens, donc on va parler territoire, on va parler numérique responsable. Donc ce que je te propose, c'est de nous présenter la société.

  • SG

    Merci. Le Comptoir des Signaux, c'est un cabinet d'assistance à maîtrise d'ouvrage. Effectivement, on n'intervient que dans la sphère publique, uniquement dans la sphère publique. Depuis 1988, sa création, il n'y a pas un centime d'argent privé qui est rentré dans nos comptes. On accompagne les grandes collectivités, les services de l'État, les grands hôpitaux, les universités sur toutes les problématiques d'aménagement numérique du territoire, également de commandes publiques et de structuration des réseaux qui interconnectent l'ensemble des sites principaux de ces collectivités.

  • SGz

    D'accord, on parle data center, on parle fibre,on parle de ça

  • SG

    On parle d'essais, on parle beaucoup fibre, on parle aussi pas mal radio, puisqu'on a fait beaucoup d'aménagements radio. Et on parle toujours numérique responsable chez nous. On a la chance d'avoir suivi un parcours NR. Aujourd'hui, on est labellisé numérique responsable niveau 2 auprès de l'agence Lucie. Et on accompagne également les collectivités dans leur labellisation numérique responsable et également sur des thématiques très en vogue actuellement d'intelligence artificielle. On les apprend à mieux ou moins mal utiliser ces technologies qui, vu du numérique responsable, peuvent être vues comme un oxymore.

  • SGz

    Voilà ton parcours avant d'arriver.

  • SG

    Un parcours assez classique, ingénieur télécom en 1994. Il y avait de l'informatique en 1994 ? En 1994, oui.

  • SGz

    Il n'y avait pas Internet ?

  • SG

    Il y avait l'Internet. Forcément, en sortant en 1994, on a fait partie des premiers à avoir une adresse mail. J'ai eu la chance, dès mes premières années, de participer à l'arrivée de l'Internet en France. parce que j'ai travaillé pour quelques grands opérateurs qui se sont installés sur le territoire français à ce moment-là. Donc, est-ce qu'on a amené le diable dans les campagnes ? C'est bien possible. Donc, école d'ingénieurs chez les opérateurs. Je suis parti quelques années travailler en startup pour des startups essentiellement américaines, malheureusement, où j'ai appris quand même plein de choses. Et dès 1997, j'ai fait quelques premières missions pour Le Comptoir des Signaux, notamment sur l'ingénierie et le déploiement de gros réseaux fibres sur des métropoles françaises. Après, je suis donc parti en start-up et début des années 2000, 2003, 2004, j'ai reposé mes valises après être passé par plusieurs startups qui ne sont jamais devenues publiques. Donc, je ne suis pas devenu millionnaire à ce moment-là. J'ai reposé mes valises et j'ai remis un peu du sens dans mon travail. J'ai voulu me reconsacrer à l'intérêt général. Donc, je suis revenu voir le Comptoir des Signaux à cette époque-là. Et j'ai dit, comment moi je peux accompagner, avec ce que j'ai appris pendant une dizaine d'années, comment je peux accompagner les collectivités, les entités publiques ? Et Agnès Huet, présidente du Comptoir à l'époque, m'a ouvert la porte et m'a dit, Sébastien, vous commencez lundi. Et donc, cette histoire s'est plutôt bien terminée, puisque Agnès a pris sa retraite en 2019 en me laissant les clés du cabinet avec les quelques collaborateurs qui étaient là.

  • SGz

    C'est-à-dire les clés du camion, mais...

  • SG

    C'est pas mal.

  • SGz

    Justement, c'est sans transition. Comment toi tu découvres le régénératif ? Qu'est-ce que tu en as pensé la première fois que tu as entendu ce mot ?

  • SG

    Alors, la première fois que j'ai entendu ce mot, c'était Eric Duverger qui l'avait prononcé. J'ai eu la chance de croiser Eric au sommet du Digital à Annecy, ça devait être en mars 2023. Et j'étais avec mon associé principal, Alexandre, et on a écouté Eric intervenir à une tribune. Alors, une tribune dans laquelle il y avait du beau monde, parce qu'il y avait Fabrice Bonnifet qui était juste à côté de lui. Donc l'ambiance était bonne. Il y avait Clara Guaymard, ça c'était moins marrant. Et globalement, on a été voir Eric à la fin et on lui a dit « Et comment on fait, nous, toutes petites TPE haut-savoyarde, d'un peu moins de dix consultants, pour intégrer la Convention des entreprises pour le climat ? » Le premier parcours de la CEC était au trois quarts du parcours, mais il nous a dit « Vous verrez, il y a des choses qui vont démarrer en territoire. » Effectivement, six mois après... C'est CEC Alpes qui sort, le cabinet, quand on a dessiné au premier candidat, on est les premiers. C'est vrai. Les premiers. Je pense que le jour où c'est sorti, le lendemain, on avait déposé notre candidature. Pourquoi ? Parce qu'on avait commencé un peu à en parler en interne. On a un comité de gouvernance, nous, tous les collaborateurs du cabinet participent aux décisions. Et donc, on leur avait dit, quand on est revenu des sommets, on a dit, on a vu un truc super, on veut faire ça, nous. Alors, pourquoi on voulait faire ça ? En 2019-2020, on a tout de suite lancer une stratégie RSE, alors un peu à la papa puisqu'on n'avait jamais mis les mains dedans et numérique responsable. Et honnêtement, ça convenait à toute l'équipe. Moi, ça n'allait pas assez vite. Ça n'allait pas assez vite, ça n'allait pas assez loin. C'était très orienté, effectivement, sur l'humain. Pas assez sur les conséquences de notre business et puis pas de lien avec la biodiversité. Moi, j'ai la chance de vivre dans un petit hameau à Haute-Savoie, au milieu d'une forêt, et de travailler mon potager, ce que ne font peut-être pas tous les dirigeants d'entreprise. Et pour moi, ce qu'on faisait, c'était bien, c'était intéressant, mais on n'allait pas assez loin. Et j'ai vu dans l'approche CEC quelque chose qui allait nous permettre d'accélérer la transformation de l'entreprise. Et donc, du coup, c'est sorti octobre 2023, l'appel à candidature. On a dû répondre deux jours après, tout le monde était OK pour répondre. Et donc, ça nous parlait bien.

  • SGz

    Comment tu la vis cette CEC en particulier ?

  • SG

    Pas bien du tout en fait. Premier week-end de CEC, je suis rentré pendant 15 jours, j'étais à Social, je n'ai parlé à personne. J'ai annulé d'ailleurs la quasi-totalité de mes rendez-vous clients parce que je ne voulais voir personne. Donc en famille, c'était super. Et j'étais arrivé à une conclusion très saine, c'était qu'il fallait fermer la boîte pour faire des choses utiles. Deuxième week-end de CEC, je suis revenu moins associal, mais j'avais toujours dans l'idée de fermer la boîte. Et on a fait un truc bien, je pense, et je remercie mes collaborateurs pour l'avoir fait. Ils nous ont dit ce que vous avez vécu pendant deux jours, il faut le partager. Il faut commencer à embarquer. On réunit nos parties prenantes privées par contre, les plus proches, les cabinets avec lesquels on bossait. Pendant une journée, vous nous sortez tout ce que vous avez vu pendant deux week-end. Et les conclusions à laquelle vous en êtes arrivé. C'est sûr que quand on se met autour de la table avec des cabinets avec lesquels on travaille depuis 25 ans et qu'on leur dit, c'était bien ce bout de chemin qu'on a fait ensemble. Mais en fait, on va s'arrêter là, parce que globalement, ce qu'on fait, ça n'a pas de sens, on ne trouve pas le sens et ça ne va pas assez loin. Et globalement, à la question, est-ce que le cabinet est utile à la société ? On avait l'impression que non. Et bien, ils nous ont aidés en fait. Et ils ont réussi à nous faire prendre conscience au fil du temps, les collaborateurs qui n'avaient pas fait la CEC et nos partenaires, que finalement, ben si. On avait un rôle à jouer, qu'on pouvait être utile, notamment en essayant de dynamiser un écosystème local sur ces sujets-là. Et en fait, ça nous a permis déjà de mieux vivre la fin de l'année 2023. Ça s'est mieux passé. Et surtout, ça nous a permis de construire une feuille de route qui a été validée par tous les collaborateurs du cabinet et qu'on a fait relire aussi à nos principales parties prenantes privées en leur disant voilà, on va faire ça, vous en pensez quoi ? Est-ce que ça vous parle ? Puisque l'idée qu'on avait dès le départ, après le deuxième week-end, c'est de se dire, ce qu'on va faire pour nous, nous on est tout petits. Ce qu'on va faire pour nous, il faut que ça serve à d'autres et il faut qu'on essaye d'embarquer nos parties prenantes privées sur ces sujets-là et faire que finalement on ne soit pas les seuls à basculer dans le régénératif. Donc on a essayé de les embarquer le plus tôt possible. Et je pense que si on n'avait pas réussi à ce qu'elles nous disent, si en fait c'est bien votre truc, il y a une idée, vous allez plus loin. Je pense qu'effectivement, on aurait certainement jeté l'éponge. On pense qu'on n'est pas bête. On a fait deux, trois trucs dans notre vie et on s'est tous dit, si on ne fait plus ça, on saura faire autre chose. Mais du coup, on n'a pas fermé.

  • SGz

    Et concrètement, vous avez fait comment ?

  • SG

    Pour les embarquer ? On les a mis dans une salle pendant une journée et on leur a fait vivre en une journée ce qu'on avait vécu en deux week-end. Ça, c'est super bien passé ! Derrière, on a pris, deux mois après, on a repris une journée complète qu'avec les collaborateurs du cabinet. On sortait de la session 3. Et pareil, on leur a fait revivre un peu ce qu'on avait vécu. vécues pendant la session 3 et on les a vraiment, on les a fait travailler avec nous. Ça s'est plutôt bien passé. Et du coup, ce qui est ressorti de là, c'est qu'on s'est dit, il faut qu'on mette en place des événements avec toutes nos parties prenantes, publiques et privées, pour essayer de les embarquer. Donc, mars de l'année dernière, on a fait notre première journée partie prenante sur le thème des limites planétaires et de la résilience territoriale. Donc, on a fait intervenir sur les limites planétaires un cabinet qui a fait la CEC qui s'appelle InnovRH qui nous... nous accompagne sur notre RSE depuis 4 ans maintenant, et sur les limites planétaires, on a fait intervenir quelqu'un qui du coup maintenant est dans l'écosystème du cabinet et travaille avec nous sur tous nos projets de résilience, c'est Ilian Moundib, qui a intervenu également à la CEC, mais on a eu la primeur de le faire intervenir avant, et du coup maintenant Ilian bosse avec nous sur tous les schémas de résilience territoriale sur lesquels on travaille, puisqu'on a la chance d'avoir été retenu par un certain nombre de collectivités sur ces problématiques de schéma de résilience. Donc, on a mis tout le monde dans la salle. Au début, on s'est dit, bon, on va peut-être avoir 15, 20 parties prenantes, publics, privés qui viennent. On était une cinquantaine dans la salle. Il y avait peu d'élus, il y avait beaucoup d'agents de collectivité, des DG, des DGS, des DGAP, donc au bon niveau. Et là, on a parlé limites planétaires, résilience, on a parlé feuilles de route, on a parlé régénératif, on les a perdus, très clairement, sur ces sujets-là. Mais, ça a plutôt bien fonctionné parce que quand on a remis une pièce en disant dans six mois, on refait une demi-journée partie prenante sur des problèmes plutôt de souveraineté numérique, tout le monde est venu. Là, on en a fait une au mois de mars sur l'IA et l'impact de l'IA sur la souveraineté, la résilience des territoires. On ne l'a fait qu'en Ile-de-France, donc avec nos PP Ile-de-France et ils sont venus. Et là, on a une prochaine journée partie prenante au mois de juin dans laquelle on invite toutes nos parties prenantes. Privées ?

  • SGz

    privées ? Est-ce que ça marche plus bien que le public ?

  • SG

    On n'invite que les parties prenantes privées qu'on aime bien. On est assez sélectif. Dans les parties prenantes privées qu'on a invitées, on invite les collaborateurs des cabinets, les dirigeants des cabinets avec lesquels on travaille tous les jours. On invite aussi des parties prenantes avec lesquelles on intervient sur certains dossiers. Mais par contre, on n'invite pas les parties prenantes qui sont, par exemple, les opérateurs télécom ou les intégrateurs, peut-être parce qu'on considère qu'ils sont du côté obscur.

  • SGz

    Ils ne sont pas assez matures...?

  • SG

    Ils ne le seront jamais.

  • SGz

    Ils sont trop loin.

  • SG

    Ils sont trop loin et leur business model fait que c'est incompatible avec un business model régénératif. Et pourquoi on invite ces PP-là ? Parce qu'on a envie de les convaincre de faire comme nous. Et d'ailleurs, pour qu'ils puissent faire comme nous, tout ce qu'on a développé comme outil pour nous accompagner, on leur met à disposition.

  • SGz

    Bref. C'est la vraie coopération, en fait.

  • SG

    Voilà. C'est-à-dire que nous, on fait vraiment la différence entre la collaboration et la coopération. La collaboration, chez nous, c'est quand on collabore avec un cabinet, c'est pour que ça nous apporte aux deux. Et la coopération, c'est quand ça apporte au territoire. Et donc, l'idée, c'est de vraiment monter des coopérations qui fait que finalement, on est assez désintéressé, sauf qu'on vit sur un territoire. Et donc, ces coopérations, elles vont apporter au territoire. Ça a l'air de marcher un peu.

  • MC

    Pour revenir sur la feuille de route, il y a un aspect qui est assez important dans votre feuille de route, qui est le sujet de l'adaptation, qui est un sujet qu'on a aussi, même au sein de la CEC, plus de mal à aborder, parce qu'il y a plein de sujets à aborder dans l'enjeu régénératif. Et l'adaptation, évidemment, c'est le sujet d'Ilian Moundib aussi. Dans le numérique responsable, il y a cette partie-là. Et j'imagine que, évidemment, ça fait des années que vous travaillez sur la résilience des systèmes et des réseaux. Mais qu'est-ce que tu ressens qui change aujourd'hui dans le contexte actuel, avec les changements qui arrivent sur cet aspect-là ? Est-ce que la force publique a plus conscience de nos fragilités sur cet aspect-là ? Ou est-ce qu'ils sont encore loin des sujets ?

  • SG

    Côté agents, la réponse est oui. C'est-à-dire qu'à un bon niveau en collectivité, on a des gens qui, déjà qui sont intéressés à tous ces sujets-là, qui ont été sensibilisés, avec lesquels on discute régulièrement. On n'est, nous, qu'une petite pierre dans l'édifice, mais on sent qu'il y a une vraie prise de conscience. Du côté de nos élus, c'est beaucoup plus compliqué. Parce qu'ils doivent se projeter sur le long terme sur ces problématiques-là, même si on essaie quand même d'expliquer à tout le monde que des crises systémiques, on va en vivre à court terme. on verra. Mais, ils ont quand même une problématique de fin de mandat. Donc, globalement, c'est très compliqué pour eux d'intégrer ces problématiques-là dans leur approche. Typiquement, je prends un exemple tout bête. Sur le numérique aujourd'hui, la problématique principale d'un élu à une échelle départementale, c'est de s'assurer que tout le monde ait la fibre. Ce n'est pas de s'assurer que quand il y aura une crise systémique, finalement, elle continuera de fonctionner. Il faut d'abord apporter la fibre à tout le monde parce que c'est important que chaque entreprise, chaque citoyen du territoire puisse avoir accès à un accès Internet à très haut débit. À beaucoup trop très haut débit, d'ailleurs, entre nous. C'est-à-dire que globalement, on apporte des débits qui sont sans commune mesure par rapport au besoin. On devrait avoir, c'est un peu dur comme approche, mais on devrait limiter la bande passante. On n'a pas besoin de tout ça. Et donc, est-ce qu'il y a une prise de conscience ? La réponse est oui. Est-ce qu'il y a des réflexions approfondies sur le fait de se dire : on va peut-être avoir sur un territoire pendant qu'un jour, plus d'électricité. Et qu'est-ce qui va se passer ? Eh bien, il y a des entités publiques qui réfléchissent vraiment à ces problématiques-là. On peut prendre tous les SDIS de France et de Navarre, eux, ils ont conscience. Eux, ils savent ce qui va se passer.

  • MC

    Les SDIS : les pompiers, pour ceux qui sont moins habitués !

  • SG

    Les pompiers, ils savent. C'est-à-dire que pour discuter résilience territoriale, c'est les meilleurs interlocuteurs. Eux, ils savent exactement ce qui va se passer. Et surtout, eux, ils savent que quand ça va se passer, ils ne pourront pas résoudre tous les problèmes. Donc, ils sensibilisent énormément les collectivités au niveau des plans d'adaptation, justement pour dire qu'il faut diffuser la compétence, il faut diffuser le savoir pour que les gens puissent, et les entreprises, et les citoyens, quand il y aura un problème, ils aient des bons réflexes et qu'on ne vive pas effectivement ce que nos amis espagnols ont vécu à Valence. Parce qu'on va le vivre, mais il faudrait juste qu'on arrive à mieux réagir.

  • MC

    Et est-ce que tu te confrontes pas un petit peu à ce côté-là ? Tu mets la fibre d'un côté et la résilience de l'autre. Il y a un projet qui peut paraître plus enthousiasmant, la 5G, etc. Et puis, de l'autre côté, toi, tu arrives un peu avec ton bâton de pèlerin en disant, attention, quand on va avoir des coupures, il va falloir prévoir ci ou ça. Est-ce que tu as le sentiment, parfois, d'être un peu considéré Comptoir des Signaux, ou toi en particulier, je ne sais pas, comme, ouais, mais bon, cela... Enfin, quelqu'un qui va moins vers l'avant, qui est plus dans la précaution, le risque, l'évocation du risque, plutôt que l'évocation de quelque chose d'enthousiasmant, qui pourrait être enthousiasmant dans la culture connue aujourd'hui ?

  • SG

    Oui. Oui, c'est difficile. On peut avoir des discussions dans lesquelles on peut être vu comme pas avant-gardiste sur ces sujets-là. Néanmoins, on a la chance d'avoir des collectivités qui nous font confiance depuis longtemps, des collectivités pour lesquelles on a toujours eu des positions assez avant-gardistes. Je n'aime pas trop le terme de visionnaire. mais on est consultant, donc pour être consultant, il faut de l'ego, l'humilité, on n'en a pas toujours. Mais globalement, je pense qu'on a régulièrement eu sur des sujets raison avant tout le monde. On a mis en garde de nombreuses collectivités sur certaines problématiques technologiques et d'organisation qui aujourd'hui montrent que finalement, on n'avait pas tort. Donc aujourd'hui, on est écouté. Quand on présente un schéma de résilience télécom à une collectivité, en lui disant c'est bien, vous avez fibré tout le territoire. Oui mais, l'architecture, l'ingénierie que vous avez mis en place, le jour où il va y avoir tel aléa climatique, et il n'y en aura pas qu'un, parce que de toute façon, ce sera systémique. Donc, de toute façon, la composition, quand l'aléa va se produire, il y en a d'autres qui vont se produire en même temps, ça va être un château de cartes. Voilà comment ça va s'écrouler. Eh bien, il faut se préparer. Et là, je reparle des pompiers, parce qu'eux, ils sont incroyables. C'est-à-dire que tout le monde voit les pompiers comme les soldats du feu. Mais en fait, vous n'imaginez pas le niveau de compétences sur, par exemple, en télécommunication que peuvent avoir ces gens-là. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, à la direction réseau d'un SDIS, vous avez des gens qui ont le même niveau de compétence que nous. Pour moi, ce sont des experts en télécom. Et quand ils montent un réseau, la première question qu'ils se posent, c'est si pendant 15 jours, je n'ai pas d'électricité sur un territoire, comment je fais pour communiquer et assurer mes services de sécurité civile ? En fait, nous, on s'est toujours posé ces questions-là. Donc, on a toujours intégré dans nos ingénieries et dans nos préconisations ces éléments-là. Il y a 10 ans, 15 ans, quand on en parlait, on était les fous du labo. C'est-à-dire que globalement, tout le monde nous regardait en disant « Oui, mais ok, ça c'est pour apporter de la qualité de service aux entreprises. » Ben non, c'est juste fait pour que le territoire continue de fonctionner. Et là, aujourd'hui, on voit que quand on commence à mettre ça dans des cahiers des charges, on n'a plus de questions. C'est-à-dire qu'on le voit, là, on a écrit un cahier des charges d'une grosse délégation de services publics sur l'Ile-de-France qui concerne en gros toute la petite et la moyenne couronne parisienne. D'entrée de jeu dans le cahier des charges, on parle de résilience territoriale, on parle de réseau support de cette résilience territoriale. On parle de coopération, on parle de montée en compétence des territoires. Et en fait, quand on a déroulé ça, qu'on a présenté ça et aux élus et à la direction générale de ce syndicat, en fait, on ne nous a pas pris pour des fous. C'est-à-dire que le travail d'acculturation avait été fait. Et là, on vient de finir un schéma de résilience territoriale pour eux. Et en fait, ils s'aperçoivent que oui, il faut bien penser à tout ça. Et quand on aura une crue massive de la Seine, on a de grande chance que la Marne fasse pareil. Et que globalement, toutes ces infrastructures de télécommunications, communications, data centers, locaux techniques, câbles, qui sont dans ces environnements-là, elles vont fonctionner un peu moins bien. Et qu'il va quand même falloir assurer les services de sécurité civile sur le territoire. Donc, honnêtement, il y a dix ans, je ne t'aurais pas répondu de manière aussi positive. Après, c'est comme sur toutes les problématiques environnementales, c'est toujours les problématiques de fin du mois et fin du monde. Pour une collectivité, c'est fin du mandat et fin du monde. Donc, c'est compliqué.

  • SGz

    C'est un élu et pour un entrepreneur. entrepreneurs, c'est pas... Si elle est la branche sur laquelle on est, est-ce que toi, aujourd'hui, tu t'empêches des choses, des marchés que tu ne prends plus, est-ce qu'il y a des territoires que tu ne veux plus ?

  • SG

    Clairement, il y a des appels d'offres sur lesquels on ne répond plus. C'est-à-dire que, alors, nous, on fait, depuis plusieurs années, on a toujours fait notre bilan carbone, scope 1, scope 2, scope 3. Maintenant, on essaie de le faire sur les neuf limites planétaires. Bon courage, parce qu'on manque de littérature scientifique pour le faire, mais on arrive à le faire quand même sur certaines. Et donc, comme on a pris des engagements très forts de réduction ... carbone et O2, on est vite arrivé à la conclusion qu'il y avait des missions qu'on ne pouvait plus porter. Donc aujourd'hui, il y a des A.O., parce que nous, on ne fonctionne que sur des appels d'offres publiques, il y a des appels d'offres auxquels on ne répond plus, soit parce qu'ils auraient un impact sur nos bilans, et donc ils ne seraient pas compatibles avec nos engagements, soit parce que ce qu'on voit dans le cahier des charges de l'appel d'offres n'est pas aligné avec ce qu'on pense être bien. Et donc, dans ce cas-là, on ne répond pas à l'appel d'offres, mais par contre, on fait quand même une petite note à la collectivité en disant qu'on a bien bien pris connaissance de leur cahier des charges, on ne répondra pas à ce cahier des charges et on explique les raisons pour lesquelles on ne répond pas. C'est peut-être une bouteille à la mer, ça sert pas grand-chose. Je sais qu'il y a une chose à laquelle ça sert, c'est que pour fédérer et embarquer l'équipe, ça, c'est génial.

  • SGz

    C'était ma question, j'allais dire à l'inverse. Est-ce qu'un collaborateur, ça ne le fait pas paniquer ?

  • SG

    Est-ce que ça en a un inquiété certain ? La réponse est oui. Est-ce que j'ai la chance de travailler avec une équipe formidable ? La réponse est oui aussi. C'est-à-dire que globalement, ils n'étaient pas tous sensibilisés sur ces sujets-là. Ils ont embarqué. Ils sont quasiment tous fresqueurs climat, fresqueurs numériques. Quand on fait l'évaluation des compétences et de la volonté d'évolution des compétences pour les années qui viennent, ils ont tous coché la case "monter en compétence sur les problématiques de résilience, sur les problématiques environnementales". Ils se sont tous intéressés à ça. Donc ça, c'est assez incroyable. Après, est-ce que de temps en temps, ça ne doit pas aller travailler de se dire, mais où est-ce qu'ils nous emmènent ? Est-ce qu'il n'y a pas un risque ? Nous, on a la chance d'avoir une gouvernance qui est complètement partagée. On prend toutes les décisions ensemble. Après j'ai toujours tendance à dire que quand on pèse 110 kilos en général les autres écoutent la table mais globalement ça marche. Après oui, moi j'aimerais aller plus vite mais ils ont raison de temps en temps il faut freiner un peu est-ce qu'on prend des risques et est-ce qu'on a mis notre business model à risque à partir du moment où on commence à renoncer forcément il y a une part du business qui était sympa, qui était super rentable et qui faisait que ça ça roulait tout seul. Celui-là, on ne le fait plus. Et forcément, ça se voit dans les comptes.

  • SGz

    Vous avez fait un travail aussi en interne sur finalement de quoi j'ai besoin, au rapport à l'argent.

  • SG

    Oui, on a réussi à tous se questionner à notre rapport à l'argent. Et on a réussi à faire définir à chaque collaborateur, sans jugement aucun, de combien il avait besoin pour vivre tous les mois et à partir de combien ce serait déraisonnable qu'il gagne tous les mois. Parce qu'en fait, pour le Comptoir, c'est une entreprise étendue. On est tous indépendants. Néanmoins, on est tous associés du cabinet. Et en fait, pour faire simple, le cabinet rémunère les collaborateurs à due proportion de la valeur ajoutée qu'ils génèrent. Donc en gros, s'ils génèrent une somme d'argent X en facturation, ils récupèrent 80% de cette somme d'argent pour leur entreprise. Et ce qu'on a réussi à mettre en place, c'est que chacun a défini son plancher de rémunération. Et ce plancher, en fait, il est garanti par les copains. C'est-à-dire qu'on se débrouille avec ces 20% qu'on laisse dans le Comptoir. Ça permet de garantir le plancher à tout le monde et à tous les nouveaux qui arrivent. Ça, c'est important. Et puis, quand on dépasse le plafond, tout ce qui dépasse le plafond de rémunération... permet de garantir le plancher à nos petits camarades, mais surtout nous permet d'investir dans des projets en lien avec la biodiversité. On fait beaucoup de mécénat financier. On a fait un peu moins de 3% de notre chiffre d'affaires en mécénat financier l'année dernière. On avait fait 2-4 l'année d'avant. J'espère qu'on fera plus de 3 cette année. Et ça, on l'a fait malgré le fait que le chiffre d'affaires par collaborateur a baissé. Parce que forcément, quand on refuse des missions lucratives, le CA, il baisse. C'est automatique. et puis une boîte de conseil c'est pas compliqué compliqué, ça vend du jus de cerveau, donc ça vend du temps homme. Donc quand on travaille pour une collectivité, on est payé, quand on ne travaille plus pour elle, on n'est pas payé.

  • SGz

    Vous avez mis en place du mécénat de compétences, plus plus plus quand même !

  • SG

    Je ne sais pas, plus plus, non, moi j'aimerais faire encore plus, mais comme je l'ai dit tout à l'heure, on fait notre bilan carbone, notre bilan eau douce, ça, ça fait tant de tonnes de carbone, tant de mètres cubes d'eau douce. La tonne de carbone l'année dernière, on l'a valorisé à 1000 euros, et le mètre cube d'eau douce, d'eau bleue, à 50 euros. Ça, ça a fait un chiffre. Ce chiffre, on l'a réinvesti en mécénat financier sur les territoires où on avait eu de l'impact. Et donc, on travaille avec... On adore 1% pour la planète, donc on a tout fait au travers du 1% pour la planète. Mais en choisissant nos partenaires, donc les assos qu'on a choisis, on a signé avec elles des baux pour 7 ans. Parce que c'était vachement bien, on a fait ça en 2023, 2023, le 4, 2030,

  • SGz

    on s'arrête...!

  • SG

    On est carrés. C'est carré. Donc, en fait, on s'est engagé en long terme. Et donc, ça, c'est notre partie mécénat financier. Une fois qu'on a fait ça, ça, ça fait un chiffre, un nombre, pardon. Ce nombre, on le divise par le prix moyen du jour hommes. Et ça, ça donne un nombre de jours hommes. Et ce nombre de jours hommes, tous les collaborateurs se le sont répartis et l'ont investi en mécénat de compétences sur les territoires. Donc, on fresque, on fait de la fresque du numérique. On fait des ateliers numériques responsables. Là, on va commencer des ateliers d'adaptation au changement climatique parce qu'on voit que ça va de... D'ailleurs, à chaque fois qu'on fait un schéma de résilience pour une collectivité, on démarre avant l'étude, on fait un atelier d'adaptation au changement climatique pour qu'il s'approprie les éléments de langage, les problématiques et les risques. Parce que sinon, quand on arrive avec nos risques, ils nous regardent avec des grands yeux. Bon, ça, ça existe. Donc là, on fait ça. Et donc, du coup, là, on passe du temps en mécénat de compétences sur les ateliers de l'adaptation au changement climatique.

  • SGz

    Donc, votre lien avec la biodiversité, c'est principalement par, c'est pas une association, c'est une fondation, le 1% Planet

  • SG

    Alors, on fait un peu de... C'est compliqué quand on fait du numérique, le lien avec le vivant. C'est pas simple. D'ailleurs, c'est un des points qui nous a posé le plus de soucis pendant la CEC. C'est comment on recrée du lien avec le vivant. Parce que, bon, une fois qu'on a mis trois brebis pour faire l'éco-pâturage de nos espaces verts et qu'on a fait un diag biodiv. Oui, effectivement, on fait notre miel. OK, et puis on a... Alors, il y a un truc qui nous a bien plu. on a fait un diag biodiversité avec France Nature Environnement, de la parcelle sur laquelle se situe le siège du cabinet. Et on va dérouler un plan d'action sur 10 ans sur ce qu'il faut faire pour l'améliorer. Mais néanmoins, dans notre activité de tous les jours, créer du lien avec le vivant, à part s'en inspirer pour l'organisation de l'entreprise, c'est compliqué. Donc, ce qu'on essaye de faire, c'est d'intégrer du lien avec le vivant dans les projets qu'on emmène pour les collectivités, d'essayer de les sensibiliser sur ces sujets-là. Et notamment, on essaye soit d'imposer, soit d'offrir systématiquement une analyse de cycle de vie de tous les projets qu'on emmène en collectivité sur les 19 critères. Et donc, la biodiv, elle est dedans et on essaye de leur montrer qu'en fonction des choix qu'ils vont réaliser, ça aura un impact ou pas sur la biodiv, sur leur territoire. On n'arrive pas encore trop à pousser cette porte-là, mais je pense qu'on va y arriver.

  • MC

    Sur la partie feuilles de route et les enjeux qui sont liés à un cabinet qui travaille dans le numérique, le côté adaptation est vraiment le côté court terme. gestion du risque, etc. Vous devez aussi travailler sur des sujets d'intelligence artificielle qui sont un petit peu de l'autre côté du spectre, en tout cas c'est mon impression, se dire à la fois je traite sur des sujets court terme et à haut risque, et en même temps je suis dans un monde dans lequel l'intelligence artificielle explose, et donc quel acteur je suis dans ce monde-là, ça me fait un peu penser à l'équivalent de la fast fashion, avec le monde du textile qui essaye de se battre ensemble et de coopérer ensemble pour légiférer sur ce côté fast fashion. J'ai un peu l'impression que ce côté fast fashion est un peu l'équivalent de l'explosion des données, etc. Comment vous adressez ce sujet d'intelligence artificielle ?

  • SG

    Alors déjà, on a la chance de baigner dans ces problématiques-là, nous, depuis très longtemps, puisque un des fondateurs du Comptoir des Signaux, Jean Zeitoun, a été un des précurseurs de l'intelligence artificielle en France au début des années 70. Donc ça ne nous rajeunit pas. Mais globalement, on a toujours baigné dans ces problématiques-là et on utilise de l'intelligence artificielle adaptée à nos métiers, nous, depuis assez longtemps. En fait, la révolution principale de l'IA que l'on vit et qui est vue du citoyen, c'est l'intelligence artificielle générative. C'est celle-là qui pose le plus de problèmes, mais qui aussi peut apporter des solutions. Notre positionnement aujourd'hui sur l'IA, on a la chance d'être reconnu par un certain nombre de collectivités pour les accompagner sur ces problématiques-là. On doit être là, si je fais le relevé des compteurs, des collaborateurs, on doit être à près de 800 élus et agents de collectivités formés à l'IA générative depuis le début de l'année. On a mis en place un cycle de formation et de sensibilisation pour expliquer que, oui, une intelligence artificielle, souveraine, éthique et durable, c'est possible. Et qu'en fait, l'IA, elle doit être utilisée pour maintenir un service public de qualité sur le territoire, dans le respect du territoire. Et c'est sûr qu'effectivement, elle n'est pas là pour générer des photos très jolies où on met la tête d'une personne sur un animal. Ça, ça n'a absolument aucun sens. Par contre, l'IA, elle peut vraiment permettre de garder des services publics performants ou d'améliorer la performance de services publics justement en conservant les agents des collectivités pour leur faire faire des choses à valeur ajoutée et en faisant traiter le tout venant et le volume à une intelligence artificielle. Donc on travaille beaucoup là-dessus, on a des démonstrateurs, on forme, on sensibilise, on accompagne. Nous, on a une approche responsable de l'IA, elle est utilisable. Après, on a bien conscience que c'est la deuxième... enfin. Dans notre vie d'ingénieur télécom, c'est notre deuxième révolution. La première révolution, c'est l'arrivée d'Internet, la création d'Internet au début des années 90, parce que c'est vraiment là que ça a démarré. Et notre deuxième révolution, c'est celle-là. À la limite, j'aurais tendance à dire que le déploiement de la fibre optique, ce n'est pas une révolution. C'est une évolution logique d'une technologie. La fibre optique, ça fait 60 ans qu'on l'utilise, donc ce n'était pas une révolution. L'amener chez tout le monde, c'était peut-être une évolution, mais pas une révolution. Par contre l'IA c'est une révolution, et dans les révolutions il y a toujours des dommages collatéraux. Donc, il faut faire très attention à ce qui se passe.

  • MC

    Est-ce que tu as le sentiment que les acteurs du numérique ou que certains acteurs du numérique en France ont la volonté ou démarrent des sortes de coopérations pour lutter ou pour amener dans le bon sens ce sujet-là plutôt qu'il l'explose dans les mains de tout le monde un peu ?

  • SG

    Sur beaucoup de sujets, il faut faire confiance aux collectivités locales. Elles se sont regroupées en associations. Elles ont créé des opérateurs de services numériques publics. et elle travaille sur ces sujets-là depuis longtemps. Donc aujourd'hui, il y a un vrai mouvement de fond, de collectivités, pour travailler sur ces problématiques-là. L'État a fait aussi des choses très intéressantes, a sorti des guides pratiques, des recommandations, n'a pas encore fait des choix suffisamment stratégiques, notamment en matière de souveraineté, de mon point de vue, mais il travaille quand même sur ces sujets-là. Et puis on a des acteurs de l'open source, du libre. qui travaillent sur ces sujets-là depuis très longtemps, avec lesquels nous on coopère de temps en temps. On n'a jamais travaillé sur un projet client ensemble, mais par contre on a déjà réfléchi ensemble. Donc il y a des gens comme l'Inagora par exemple, desquels on est assez proches, et qui eux sont sur l'open source depuis 25 ans et la souveraineté. Donc est-ce qu'il y a des outils aujourd'hui qui permettent de se prémunir de certaines dérives ? La réponse est oui. Est-ce qu'il y a une prise de conscience ? Alors... Oui, et en plus, il y a une prise de conscience qui est aussi forcée par des éléments budgétaires. C'est-à-dire qu'à partir du moment où on se libère de la contrainte des GAFAM dans une entreprise ou dans une collectivité, on fait des sacrées économies. Par contre, une fois de plus, moi, je pars du principe qu'il faut toujours faire la démonstration par l'exemple. Donc, nous, on l'a fait au cabinet. Enfin, quand moi, j'ai repris le cabinet en 2019, ça a été un des premiers trucs, parce que les associés précédents n'avaient pas de problème avec Google. Moi non plus, tant que je ne l'utilise pas. Donc, globalement, on a fait cette démarche d'avoir un SI souverain, durable. On a cherché des hébergeurs chez qui on peut avoir confiance et qui hébergent dans des data centers à haute exigence environnementale. C'est des sujets qui nous animent. Donc, on a fait cette démarche-là. Et donc, aujourd'hui, on est capable de dire, il y a des solutions. Regardez, nous, on a réussi à le faire. Alors, on a réussi à le faire à notre toute petite échelle de petits cabinets de 10. Donc, est-ce qu'une collectivité dans laquelle il y a 4 500 agents qui gèrent des collèges ou il y a 16 000 collégiens par exemple, est-ce que c'est facile à faire ? La réponse c'est non. Mais il y a des outils pour le faire. Donc c'est faisable. Et de toute façon... Il va falloir le faire, parce que de toute façon, avec la raréfaction des ressources abiotiques et le fait qu'à un moment donné, il va falloir faire des arbitrages sur tel minerai rare, telle terre rare, on va l'utiliser. Est-ce qu'on l'utilisera pour la santé, pour la sécurité civile, ou est-ce qu'on l'utilisera pour continuer de tourner des vidéos de chat ? J'ai bien un avis sur la question.

  • MC

    L'eau même avant, d'ailleurs, pour refroidir les data centers, etc.

  • SG

    Oui, alors, on arrive à mieux gérer ça. C'est-à-dire qu'il y a un vrai travail qui a été fait sur l'utilisation de l'eau dans les DC. Ce n'est pas parfait, mais c'est moins pire qu'il y a une dizaine d'années. Sur le CO2, c'est pareil. Il suffit de regarder le bilan carbone et l'analyse de cycle de vie d'un DC. À partir du moment où on réserve ce data center à des usages qui sont vitaux, il n'y a pas de problème. La CV, elle est bonne. Le problème, c'est quand on stocke les données des vidéos.

  • SGz

    Je ne sais pas si c'est ce que j'allais dire, mais les données, elles sont stockées principalement ailleurs qu'en France ?

  • SG

    Ça dépend, pas les miennes, pas les nôtres. Oui, est-ce qu'il y a beaucoup de données ? Alors, nous, on n'intervient qu'en collectivité. Est-ce qu'il y a beaucoup de données de collectivités qui sont stockées de manière non souveraine ? La réponse est oui, la majorité. Et même quand elles sont stockées dans des hébergeurs qui ont des data centers en France, ces hébergeurs sont des hébergeurs à actionnariat étranger qui tombent sous le cloud act. Donc, aujourd'hui, les données, elles ne sont pas souveraines. Mais est-ce qu'on peut changer ça ? Est-ce qu'il y a des collectivités aujourd'hui qui se... préoccupe de ces problématiques-là et on va voir sortir des DC publics souverains, la réponse est oui.

  • SGz

    Oui, je pense, en effet. Bon, alors, j'accélère un peu le mouvement parce que là, on pourrait parler jusqu'à la fin de la journée. Donc, quand même, quelques questions pour terminer. Question pas forcément très simple, mais si tu avais une baguette magique et que tu pouvais changer avec du jeu économique, qu'est-ce que tu changerais ? Tu nous as déjà donné pas mal de pistes, mais...

  • SG

    Un vrai partage de la valeur et notamment le partage de la valeur utile. C'est-à-dire qu'il y a des... Je pense que la première question qu'un chef d'entreprise devrait se poser, c'est est-ce que son entreprise est utile et est-ce qu'elle est utile au territoire sur lequel il travaille ? Et donc, particulièrement en collectivité, l'une des baguettes magiques, si j'avais une baguette magique, je pense que je modifierais le code de la commande publique pour permettre de faire travailler des entreprises locales et des entreprises qui ont du sens. Et pas forcément les entreprises les moins chères, mais des entreprises qui ont du sens.

  • SGz

    C'est vrai qu'il y a beaucoup d'élus, alors moi je suis un peu élu aussi, mais il y a beaucoup d'élus qui se battent là-dessus. Parce que c'est vrai que c'est un critère qui ne rentre pas du tout en ligne de compte. Et voilà, donc ça, on peut espérer que ça va changer aussi.

  • SG

    Oui, et rentrer du circulaire, c'est fondamental, même dans nos métiers. Il faut vraiment mettre en place une économie circulaire qui tourne. Et la commande publique, c'est un levier énorme pour ça. Donc, oui, ça, je ferai ça.

  • SGz

    OK, et pour terminer, qu'est-ce qui te rend confiant en l'avenir ? L'entrepreneur, en général, il est toujours confiant.

  • SG

    Ça dépend des entrepreneurs. oui je pense que le métier de chef d'entreprise et le rôle de l'entrepreneur, c'est de pérenniser une activité sur un territoire. Moi, c'est ma vision des choses. C'est comme le maillot dans certains sports : le club a plus d'importance que le joueur. Et moi, je reste persuadé que les entreprises doivent toujours nous survivre. Donc, il faut qu'on crée des modèles si elles sont utiles, qu'elles soient encore là. J'ai le sentiment aujourd'hui que... et la CEC, moi, m'a énormément apporté là-dessus. J'ai vu des grandes, des petites. Je me suis dit, en fait, on n'est pas tout seul. Et on n'est pas tout seul et on est légitime. Et j'ai l'impression qu'il y a de plus en plus de chefs d'entreprise qui se disent finalement, on est légitime à intervenir sur ces sujets-là et on a un rôle à jouer. Donc ça, ça me rend un peu confiant. Après, j'ai des nuits compliquées quand même. Mais voilà.

  • MC

    Écoute, Sébastien, merci. C'est sincère, comme on l'aime, simple. Voilà, mais en même temps clair, net. Marianne, tu reviens quand tu veux ! Je veux dire, voilà. Donc, voilà. Et je finis toujours par une citation. Alors là, c'est une citation, attention, accrochez-vous, de Peter Drucker, qui a dit « Il n'y a certainement rien d'aussi inutile que de faire très efficacement ce qui ne devrait pas être fait du tout. » Voilà, vous avez 4 heures. Merci. Et encore une fois, bien sûr.

  • SG

    Merci et à bientôt.

Description

Comptoir des Signaux accompagne exclusivement les acteurs publics sur les enjeux d’aménagement numérique des territoires. En 2023, l’entreprise rejoint la CEC Alpes pour accélérer sa transformation, après un premier virage RSE jugé trop timide.

Son dirigeant Sébastien Godin insiste sur l’urgence à intégrer les enjeux de biodiversité, de souveraineté numérique et de résilience territoriale. Dans cet épisode, il parle d’intelligence artificielle comme levier pour les services publics, à condition d’en maîtriser les dérives. Il plaide pour une commande publique qui valorise les entreprises locales engagées, au-delà du seul critère prix.

Comptoir des Signaux milite pour des systèmes d’information souverains, éthiques et écoconçus. L’exemple de son propre cabinet démontre que des alternatives existent, même à petite échelle.


"La première question qu'un chef d'entreprise devrait se poser, c'est est-ce que son entreprise est utile et est-ce qu'elle est utile au territoire sur lequel il travaille ?"


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • SGz

    Bonjour, bienvenue sur Éco de Territoire, le podcast inspirant de la Convention des Entreprises pour le Climat, qui donne la parole aux acteurs engagés et passionnés qui construisent l'économie régénérative de demain. Je suis Stéphane Gonzalès, alumne de la promotion 2023, et je vous emmène sur les territoires du bassin lyonnais et des Alpes, à la rencontre de dirigeants et de dirigeantes qui contribuent à dessiner les contours d'un avenir durable. Alors aujourd'hui, j'ai dit je, mais je pourrais dire nous, nous avons la chance de vous partager le témoignage du dirigeant d'une belle TPE, de conseil d'ingénierie en aménagement numérique, établi à Groisy et je vous parle du Comptoir des Signaux. Le comptoir des Signaux. Et ce dirigeant, c'est Sébastien Godin, avec qui nous allons échanger sur son engagement vers l'économie dite régénérative. Alors Sébastien, bonjour.

  • SG

    Bonjour.

  • SGz

    Je te propose qu'on se tutoie.

  • SG

    Parfait.

  • SGz

    Et puis en plus, comme je sais que tu es très bavard, à mon avis, ça va être facile de t'enclencher sur les sujets. Et aujourd'hui, on a quand même la chance, c'est un peu un podcast exceptionnel, j'ai un peu la pression d'ailleurs, puisque nous avons la chance d'avoir une experte de choc avec nous, en la présence de Marianne Coudert. Salut Marianne. Salut. Allez, représente-nous qui tu es.

  • MC

    Moi, j'étais et je suis toujours pilote de territoire pour la Convention des Entreprises pour le Climat sur le bassin lyonnais et sur les Alpes, donc depuis le démarrage sur ce projet associatif et depuis 2022 en particulier sur le territoire lyonnais et alpin.

  • SGz

    Voilà, donc dans ce podcast, l'experte c'est Marianne et moi, je vais juste être celui qui anime. Alors Sébastien, revenons au Comptoir des Signaux, qui n'est pas né hier puisque ça fait 35 ans que le Comptoir des Signaux existe, pour apporter une expertise en télécommunication auprès des collectivités et des entités publiques, puisque c'est 100% de vos clients. Et alors, j'ai pris la phrase qui est sur le site, et puis on va débattre de ça : conseil en ingénierie et en aménagement numérique responsable du territoire. Je dis tiens, donc on va parler territoire, on va parler numérique responsable. Donc ce que je te propose, c'est de nous présenter la société.

  • SG

    Merci. Le Comptoir des Signaux, c'est un cabinet d'assistance à maîtrise d'ouvrage. Effectivement, on n'intervient que dans la sphère publique, uniquement dans la sphère publique. Depuis 1988, sa création, il n'y a pas un centime d'argent privé qui est rentré dans nos comptes. On accompagne les grandes collectivités, les services de l'État, les grands hôpitaux, les universités sur toutes les problématiques d'aménagement numérique du territoire, également de commandes publiques et de structuration des réseaux qui interconnectent l'ensemble des sites principaux de ces collectivités.

  • SGz

    D'accord, on parle data center, on parle fibre,on parle de ça

  • SG

    On parle d'essais, on parle beaucoup fibre, on parle aussi pas mal radio, puisqu'on a fait beaucoup d'aménagements radio. Et on parle toujours numérique responsable chez nous. On a la chance d'avoir suivi un parcours NR. Aujourd'hui, on est labellisé numérique responsable niveau 2 auprès de l'agence Lucie. Et on accompagne également les collectivités dans leur labellisation numérique responsable et également sur des thématiques très en vogue actuellement d'intelligence artificielle. On les apprend à mieux ou moins mal utiliser ces technologies qui, vu du numérique responsable, peuvent être vues comme un oxymore.

  • SGz

    Voilà ton parcours avant d'arriver.

  • SG

    Un parcours assez classique, ingénieur télécom en 1994. Il y avait de l'informatique en 1994 ? En 1994, oui.

  • SGz

    Il n'y avait pas Internet ?

  • SG

    Il y avait l'Internet. Forcément, en sortant en 1994, on a fait partie des premiers à avoir une adresse mail. J'ai eu la chance, dès mes premières années, de participer à l'arrivée de l'Internet en France. parce que j'ai travaillé pour quelques grands opérateurs qui se sont installés sur le territoire français à ce moment-là. Donc, est-ce qu'on a amené le diable dans les campagnes ? C'est bien possible. Donc, école d'ingénieurs chez les opérateurs. Je suis parti quelques années travailler en startup pour des startups essentiellement américaines, malheureusement, où j'ai appris quand même plein de choses. Et dès 1997, j'ai fait quelques premières missions pour Le Comptoir des Signaux, notamment sur l'ingénierie et le déploiement de gros réseaux fibres sur des métropoles françaises. Après, je suis donc parti en start-up et début des années 2000, 2003, 2004, j'ai reposé mes valises après être passé par plusieurs startups qui ne sont jamais devenues publiques. Donc, je ne suis pas devenu millionnaire à ce moment-là. J'ai reposé mes valises et j'ai remis un peu du sens dans mon travail. J'ai voulu me reconsacrer à l'intérêt général. Donc, je suis revenu voir le Comptoir des Signaux à cette époque-là. Et j'ai dit, comment moi je peux accompagner, avec ce que j'ai appris pendant une dizaine d'années, comment je peux accompagner les collectivités, les entités publiques ? Et Agnès Huet, présidente du Comptoir à l'époque, m'a ouvert la porte et m'a dit, Sébastien, vous commencez lundi. Et donc, cette histoire s'est plutôt bien terminée, puisque Agnès a pris sa retraite en 2019 en me laissant les clés du cabinet avec les quelques collaborateurs qui étaient là.

  • SGz

    C'est-à-dire les clés du camion, mais...

  • SG

    C'est pas mal.

  • SGz

    Justement, c'est sans transition. Comment toi tu découvres le régénératif ? Qu'est-ce que tu en as pensé la première fois que tu as entendu ce mot ?

  • SG

    Alors, la première fois que j'ai entendu ce mot, c'était Eric Duverger qui l'avait prononcé. J'ai eu la chance de croiser Eric au sommet du Digital à Annecy, ça devait être en mars 2023. Et j'étais avec mon associé principal, Alexandre, et on a écouté Eric intervenir à une tribune. Alors, une tribune dans laquelle il y avait du beau monde, parce qu'il y avait Fabrice Bonnifet qui était juste à côté de lui. Donc l'ambiance était bonne. Il y avait Clara Guaymard, ça c'était moins marrant. Et globalement, on a été voir Eric à la fin et on lui a dit « Et comment on fait, nous, toutes petites TPE haut-savoyarde, d'un peu moins de dix consultants, pour intégrer la Convention des entreprises pour le climat ? » Le premier parcours de la CEC était au trois quarts du parcours, mais il nous a dit « Vous verrez, il y a des choses qui vont démarrer en territoire. » Effectivement, six mois après... C'est CEC Alpes qui sort, le cabinet, quand on a dessiné au premier candidat, on est les premiers. C'est vrai. Les premiers. Je pense que le jour où c'est sorti, le lendemain, on avait déposé notre candidature. Pourquoi ? Parce qu'on avait commencé un peu à en parler en interne. On a un comité de gouvernance, nous, tous les collaborateurs du cabinet participent aux décisions. Et donc, on leur avait dit, quand on est revenu des sommets, on a dit, on a vu un truc super, on veut faire ça, nous. Alors, pourquoi on voulait faire ça ? En 2019-2020, on a tout de suite lancer une stratégie RSE, alors un peu à la papa puisqu'on n'avait jamais mis les mains dedans et numérique responsable. Et honnêtement, ça convenait à toute l'équipe. Moi, ça n'allait pas assez vite. Ça n'allait pas assez vite, ça n'allait pas assez loin. C'était très orienté, effectivement, sur l'humain. Pas assez sur les conséquences de notre business et puis pas de lien avec la biodiversité. Moi, j'ai la chance de vivre dans un petit hameau à Haute-Savoie, au milieu d'une forêt, et de travailler mon potager, ce que ne font peut-être pas tous les dirigeants d'entreprise. Et pour moi, ce qu'on faisait, c'était bien, c'était intéressant, mais on n'allait pas assez loin. Et j'ai vu dans l'approche CEC quelque chose qui allait nous permettre d'accélérer la transformation de l'entreprise. Et donc, du coup, c'est sorti octobre 2023, l'appel à candidature. On a dû répondre deux jours après, tout le monde était OK pour répondre. Et donc, ça nous parlait bien.

  • SGz

    Comment tu la vis cette CEC en particulier ?

  • SG

    Pas bien du tout en fait. Premier week-end de CEC, je suis rentré pendant 15 jours, j'étais à Social, je n'ai parlé à personne. J'ai annulé d'ailleurs la quasi-totalité de mes rendez-vous clients parce que je ne voulais voir personne. Donc en famille, c'était super. Et j'étais arrivé à une conclusion très saine, c'était qu'il fallait fermer la boîte pour faire des choses utiles. Deuxième week-end de CEC, je suis revenu moins associal, mais j'avais toujours dans l'idée de fermer la boîte. Et on a fait un truc bien, je pense, et je remercie mes collaborateurs pour l'avoir fait. Ils nous ont dit ce que vous avez vécu pendant deux jours, il faut le partager. Il faut commencer à embarquer. On réunit nos parties prenantes privées par contre, les plus proches, les cabinets avec lesquels on bossait. Pendant une journée, vous nous sortez tout ce que vous avez vu pendant deux week-end. Et les conclusions à laquelle vous en êtes arrivé. C'est sûr que quand on se met autour de la table avec des cabinets avec lesquels on travaille depuis 25 ans et qu'on leur dit, c'était bien ce bout de chemin qu'on a fait ensemble. Mais en fait, on va s'arrêter là, parce que globalement, ce qu'on fait, ça n'a pas de sens, on ne trouve pas le sens et ça ne va pas assez loin. Et globalement, à la question, est-ce que le cabinet est utile à la société ? On avait l'impression que non. Et bien, ils nous ont aidés en fait. Et ils ont réussi à nous faire prendre conscience au fil du temps, les collaborateurs qui n'avaient pas fait la CEC et nos partenaires, que finalement, ben si. On avait un rôle à jouer, qu'on pouvait être utile, notamment en essayant de dynamiser un écosystème local sur ces sujets-là. Et en fait, ça nous a permis déjà de mieux vivre la fin de l'année 2023. Ça s'est mieux passé. Et surtout, ça nous a permis de construire une feuille de route qui a été validée par tous les collaborateurs du cabinet et qu'on a fait relire aussi à nos principales parties prenantes privées en leur disant voilà, on va faire ça, vous en pensez quoi ? Est-ce que ça vous parle ? Puisque l'idée qu'on avait dès le départ, après le deuxième week-end, c'est de se dire, ce qu'on va faire pour nous, nous on est tout petits. Ce qu'on va faire pour nous, il faut que ça serve à d'autres et il faut qu'on essaye d'embarquer nos parties prenantes privées sur ces sujets-là et faire que finalement on ne soit pas les seuls à basculer dans le régénératif. Donc on a essayé de les embarquer le plus tôt possible. Et je pense que si on n'avait pas réussi à ce qu'elles nous disent, si en fait c'est bien votre truc, il y a une idée, vous allez plus loin. Je pense qu'effectivement, on aurait certainement jeté l'éponge. On pense qu'on n'est pas bête. On a fait deux, trois trucs dans notre vie et on s'est tous dit, si on ne fait plus ça, on saura faire autre chose. Mais du coup, on n'a pas fermé.

  • SGz

    Et concrètement, vous avez fait comment ?

  • SG

    Pour les embarquer ? On les a mis dans une salle pendant une journée et on leur a fait vivre en une journée ce qu'on avait vécu en deux week-end. Ça, c'est super bien passé ! Derrière, on a pris, deux mois après, on a repris une journée complète qu'avec les collaborateurs du cabinet. On sortait de la session 3. Et pareil, on leur a fait revivre un peu ce qu'on avait vécu. vécues pendant la session 3 et on les a vraiment, on les a fait travailler avec nous. Ça s'est plutôt bien passé. Et du coup, ce qui est ressorti de là, c'est qu'on s'est dit, il faut qu'on mette en place des événements avec toutes nos parties prenantes, publiques et privées, pour essayer de les embarquer. Donc, mars de l'année dernière, on a fait notre première journée partie prenante sur le thème des limites planétaires et de la résilience territoriale. Donc, on a fait intervenir sur les limites planétaires un cabinet qui a fait la CEC qui s'appelle InnovRH qui nous... nous accompagne sur notre RSE depuis 4 ans maintenant, et sur les limites planétaires, on a fait intervenir quelqu'un qui du coup maintenant est dans l'écosystème du cabinet et travaille avec nous sur tous nos projets de résilience, c'est Ilian Moundib, qui a intervenu également à la CEC, mais on a eu la primeur de le faire intervenir avant, et du coup maintenant Ilian bosse avec nous sur tous les schémas de résilience territoriale sur lesquels on travaille, puisqu'on a la chance d'avoir été retenu par un certain nombre de collectivités sur ces problématiques de schéma de résilience. Donc, on a mis tout le monde dans la salle. Au début, on s'est dit, bon, on va peut-être avoir 15, 20 parties prenantes, publics, privés qui viennent. On était une cinquantaine dans la salle. Il y avait peu d'élus, il y avait beaucoup d'agents de collectivité, des DG, des DGS, des DGAP, donc au bon niveau. Et là, on a parlé limites planétaires, résilience, on a parlé feuilles de route, on a parlé régénératif, on les a perdus, très clairement, sur ces sujets-là. Mais, ça a plutôt bien fonctionné parce que quand on a remis une pièce en disant dans six mois, on refait une demi-journée partie prenante sur des problèmes plutôt de souveraineté numérique, tout le monde est venu. Là, on en a fait une au mois de mars sur l'IA et l'impact de l'IA sur la souveraineté, la résilience des territoires. On ne l'a fait qu'en Ile-de-France, donc avec nos PP Ile-de-France et ils sont venus. Et là, on a une prochaine journée partie prenante au mois de juin dans laquelle on invite toutes nos parties prenantes. Privées ?

  • SGz

    privées ? Est-ce que ça marche plus bien que le public ?

  • SG

    On n'invite que les parties prenantes privées qu'on aime bien. On est assez sélectif. Dans les parties prenantes privées qu'on a invitées, on invite les collaborateurs des cabinets, les dirigeants des cabinets avec lesquels on travaille tous les jours. On invite aussi des parties prenantes avec lesquelles on intervient sur certains dossiers. Mais par contre, on n'invite pas les parties prenantes qui sont, par exemple, les opérateurs télécom ou les intégrateurs, peut-être parce qu'on considère qu'ils sont du côté obscur.

  • SGz

    Ils ne sont pas assez matures...?

  • SG

    Ils ne le seront jamais.

  • SGz

    Ils sont trop loin.

  • SG

    Ils sont trop loin et leur business model fait que c'est incompatible avec un business model régénératif. Et pourquoi on invite ces PP-là ? Parce qu'on a envie de les convaincre de faire comme nous. Et d'ailleurs, pour qu'ils puissent faire comme nous, tout ce qu'on a développé comme outil pour nous accompagner, on leur met à disposition.

  • SGz

    Bref. C'est la vraie coopération, en fait.

  • SG

    Voilà. C'est-à-dire que nous, on fait vraiment la différence entre la collaboration et la coopération. La collaboration, chez nous, c'est quand on collabore avec un cabinet, c'est pour que ça nous apporte aux deux. Et la coopération, c'est quand ça apporte au territoire. Et donc, l'idée, c'est de vraiment monter des coopérations qui fait que finalement, on est assez désintéressé, sauf qu'on vit sur un territoire. Et donc, ces coopérations, elles vont apporter au territoire. Ça a l'air de marcher un peu.

  • MC

    Pour revenir sur la feuille de route, il y a un aspect qui est assez important dans votre feuille de route, qui est le sujet de l'adaptation, qui est un sujet qu'on a aussi, même au sein de la CEC, plus de mal à aborder, parce qu'il y a plein de sujets à aborder dans l'enjeu régénératif. Et l'adaptation, évidemment, c'est le sujet d'Ilian Moundib aussi. Dans le numérique responsable, il y a cette partie-là. Et j'imagine que, évidemment, ça fait des années que vous travaillez sur la résilience des systèmes et des réseaux. Mais qu'est-ce que tu ressens qui change aujourd'hui dans le contexte actuel, avec les changements qui arrivent sur cet aspect-là ? Est-ce que la force publique a plus conscience de nos fragilités sur cet aspect-là ? Ou est-ce qu'ils sont encore loin des sujets ?

  • SG

    Côté agents, la réponse est oui. C'est-à-dire qu'à un bon niveau en collectivité, on a des gens qui, déjà qui sont intéressés à tous ces sujets-là, qui ont été sensibilisés, avec lesquels on discute régulièrement. On n'est, nous, qu'une petite pierre dans l'édifice, mais on sent qu'il y a une vraie prise de conscience. Du côté de nos élus, c'est beaucoup plus compliqué. Parce qu'ils doivent se projeter sur le long terme sur ces problématiques-là, même si on essaie quand même d'expliquer à tout le monde que des crises systémiques, on va en vivre à court terme. on verra. Mais, ils ont quand même une problématique de fin de mandat. Donc, globalement, c'est très compliqué pour eux d'intégrer ces problématiques-là dans leur approche. Typiquement, je prends un exemple tout bête. Sur le numérique aujourd'hui, la problématique principale d'un élu à une échelle départementale, c'est de s'assurer que tout le monde ait la fibre. Ce n'est pas de s'assurer que quand il y aura une crise systémique, finalement, elle continuera de fonctionner. Il faut d'abord apporter la fibre à tout le monde parce que c'est important que chaque entreprise, chaque citoyen du territoire puisse avoir accès à un accès Internet à très haut débit. À beaucoup trop très haut débit, d'ailleurs, entre nous. C'est-à-dire que globalement, on apporte des débits qui sont sans commune mesure par rapport au besoin. On devrait avoir, c'est un peu dur comme approche, mais on devrait limiter la bande passante. On n'a pas besoin de tout ça. Et donc, est-ce qu'il y a une prise de conscience ? La réponse est oui. Est-ce qu'il y a des réflexions approfondies sur le fait de se dire : on va peut-être avoir sur un territoire pendant qu'un jour, plus d'électricité. Et qu'est-ce qui va se passer ? Eh bien, il y a des entités publiques qui réfléchissent vraiment à ces problématiques-là. On peut prendre tous les SDIS de France et de Navarre, eux, ils ont conscience. Eux, ils savent ce qui va se passer.

  • MC

    Les SDIS : les pompiers, pour ceux qui sont moins habitués !

  • SG

    Les pompiers, ils savent. C'est-à-dire que pour discuter résilience territoriale, c'est les meilleurs interlocuteurs. Eux, ils savent exactement ce qui va se passer. Et surtout, eux, ils savent que quand ça va se passer, ils ne pourront pas résoudre tous les problèmes. Donc, ils sensibilisent énormément les collectivités au niveau des plans d'adaptation, justement pour dire qu'il faut diffuser la compétence, il faut diffuser le savoir pour que les gens puissent, et les entreprises, et les citoyens, quand il y aura un problème, ils aient des bons réflexes et qu'on ne vive pas effectivement ce que nos amis espagnols ont vécu à Valence. Parce qu'on va le vivre, mais il faudrait juste qu'on arrive à mieux réagir.

  • MC

    Et est-ce que tu te confrontes pas un petit peu à ce côté-là ? Tu mets la fibre d'un côté et la résilience de l'autre. Il y a un projet qui peut paraître plus enthousiasmant, la 5G, etc. Et puis, de l'autre côté, toi, tu arrives un peu avec ton bâton de pèlerin en disant, attention, quand on va avoir des coupures, il va falloir prévoir ci ou ça. Est-ce que tu as le sentiment, parfois, d'être un peu considéré Comptoir des Signaux, ou toi en particulier, je ne sais pas, comme, ouais, mais bon, cela... Enfin, quelqu'un qui va moins vers l'avant, qui est plus dans la précaution, le risque, l'évocation du risque, plutôt que l'évocation de quelque chose d'enthousiasmant, qui pourrait être enthousiasmant dans la culture connue aujourd'hui ?

  • SG

    Oui. Oui, c'est difficile. On peut avoir des discussions dans lesquelles on peut être vu comme pas avant-gardiste sur ces sujets-là. Néanmoins, on a la chance d'avoir des collectivités qui nous font confiance depuis longtemps, des collectivités pour lesquelles on a toujours eu des positions assez avant-gardistes. Je n'aime pas trop le terme de visionnaire. mais on est consultant, donc pour être consultant, il faut de l'ego, l'humilité, on n'en a pas toujours. Mais globalement, je pense qu'on a régulièrement eu sur des sujets raison avant tout le monde. On a mis en garde de nombreuses collectivités sur certaines problématiques technologiques et d'organisation qui aujourd'hui montrent que finalement, on n'avait pas tort. Donc aujourd'hui, on est écouté. Quand on présente un schéma de résilience télécom à une collectivité, en lui disant c'est bien, vous avez fibré tout le territoire. Oui mais, l'architecture, l'ingénierie que vous avez mis en place, le jour où il va y avoir tel aléa climatique, et il n'y en aura pas qu'un, parce que de toute façon, ce sera systémique. Donc, de toute façon, la composition, quand l'aléa va se produire, il y en a d'autres qui vont se produire en même temps, ça va être un château de cartes. Voilà comment ça va s'écrouler. Eh bien, il faut se préparer. Et là, je reparle des pompiers, parce qu'eux, ils sont incroyables. C'est-à-dire que tout le monde voit les pompiers comme les soldats du feu. Mais en fait, vous n'imaginez pas le niveau de compétences sur, par exemple, en télécommunication que peuvent avoir ces gens-là. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, à la direction réseau d'un SDIS, vous avez des gens qui ont le même niveau de compétence que nous. Pour moi, ce sont des experts en télécom. Et quand ils montent un réseau, la première question qu'ils se posent, c'est si pendant 15 jours, je n'ai pas d'électricité sur un territoire, comment je fais pour communiquer et assurer mes services de sécurité civile ? En fait, nous, on s'est toujours posé ces questions-là. Donc, on a toujours intégré dans nos ingénieries et dans nos préconisations ces éléments-là. Il y a 10 ans, 15 ans, quand on en parlait, on était les fous du labo. C'est-à-dire que globalement, tout le monde nous regardait en disant « Oui, mais ok, ça c'est pour apporter de la qualité de service aux entreprises. » Ben non, c'est juste fait pour que le territoire continue de fonctionner. Et là, aujourd'hui, on voit que quand on commence à mettre ça dans des cahiers des charges, on n'a plus de questions. C'est-à-dire qu'on le voit, là, on a écrit un cahier des charges d'une grosse délégation de services publics sur l'Ile-de-France qui concerne en gros toute la petite et la moyenne couronne parisienne. D'entrée de jeu dans le cahier des charges, on parle de résilience territoriale, on parle de réseau support de cette résilience territoriale. On parle de coopération, on parle de montée en compétence des territoires. Et en fait, quand on a déroulé ça, qu'on a présenté ça et aux élus et à la direction générale de ce syndicat, en fait, on ne nous a pas pris pour des fous. C'est-à-dire que le travail d'acculturation avait été fait. Et là, on vient de finir un schéma de résilience territoriale pour eux. Et en fait, ils s'aperçoivent que oui, il faut bien penser à tout ça. Et quand on aura une crue massive de la Seine, on a de grande chance que la Marne fasse pareil. Et que globalement, toutes ces infrastructures de télécommunications, communications, data centers, locaux techniques, câbles, qui sont dans ces environnements-là, elles vont fonctionner un peu moins bien. Et qu'il va quand même falloir assurer les services de sécurité civile sur le territoire. Donc, honnêtement, il y a dix ans, je ne t'aurais pas répondu de manière aussi positive. Après, c'est comme sur toutes les problématiques environnementales, c'est toujours les problématiques de fin du mois et fin du monde. Pour une collectivité, c'est fin du mandat et fin du monde. Donc, c'est compliqué.

  • SGz

    C'est un élu et pour un entrepreneur. entrepreneurs, c'est pas... Si elle est la branche sur laquelle on est, est-ce que toi, aujourd'hui, tu t'empêches des choses, des marchés que tu ne prends plus, est-ce qu'il y a des territoires que tu ne veux plus ?

  • SG

    Clairement, il y a des appels d'offres sur lesquels on ne répond plus. C'est-à-dire que, alors, nous, on fait, depuis plusieurs années, on a toujours fait notre bilan carbone, scope 1, scope 2, scope 3. Maintenant, on essaie de le faire sur les neuf limites planétaires. Bon courage, parce qu'on manque de littérature scientifique pour le faire, mais on arrive à le faire quand même sur certaines. Et donc, comme on a pris des engagements très forts de réduction ... carbone et O2, on est vite arrivé à la conclusion qu'il y avait des missions qu'on ne pouvait plus porter. Donc aujourd'hui, il y a des A.O., parce que nous, on ne fonctionne que sur des appels d'offres publiques, il y a des appels d'offres auxquels on ne répond plus, soit parce qu'ils auraient un impact sur nos bilans, et donc ils ne seraient pas compatibles avec nos engagements, soit parce que ce qu'on voit dans le cahier des charges de l'appel d'offres n'est pas aligné avec ce qu'on pense être bien. Et donc, dans ce cas-là, on ne répond pas à l'appel d'offres, mais par contre, on fait quand même une petite note à la collectivité en disant qu'on a bien bien pris connaissance de leur cahier des charges, on ne répondra pas à ce cahier des charges et on explique les raisons pour lesquelles on ne répond pas. C'est peut-être une bouteille à la mer, ça sert pas grand-chose. Je sais qu'il y a une chose à laquelle ça sert, c'est que pour fédérer et embarquer l'équipe, ça, c'est génial.

  • SGz

    C'était ma question, j'allais dire à l'inverse. Est-ce qu'un collaborateur, ça ne le fait pas paniquer ?

  • SG

    Est-ce que ça en a un inquiété certain ? La réponse est oui. Est-ce que j'ai la chance de travailler avec une équipe formidable ? La réponse est oui aussi. C'est-à-dire que globalement, ils n'étaient pas tous sensibilisés sur ces sujets-là. Ils ont embarqué. Ils sont quasiment tous fresqueurs climat, fresqueurs numériques. Quand on fait l'évaluation des compétences et de la volonté d'évolution des compétences pour les années qui viennent, ils ont tous coché la case "monter en compétence sur les problématiques de résilience, sur les problématiques environnementales". Ils se sont tous intéressés à ça. Donc ça, c'est assez incroyable. Après, est-ce que de temps en temps, ça ne doit pas aller travailler de se dire, mais où est-ce qu'ils nous emmènent ? Est-ce qu'il n'y a pas un risque ? Nous, on a la chance d'avoir une gouvernance qui est complètement partagée. On prend toutes les décisions ensemble. Après j'ai toujours tendance à dire que quand on pèse 110 kilos en général les autres écoutent la table mais globalement ça marche. Après oui, moi j'aimerais aller plus vite mais ils ont raison de temps en temps il faut freiner un peu est-ce qu'on prend des risques et est-ce qu'on a mis notre business model à risque à partir du moment où on commence à renoncer forcément il y a une part du business qui était sympa, qui était super rentable et qui faisait que ça ça roulait tout seul. Celui-là, on ne le fait plus. Et forcément, ça se voit dans les comptes.

  • SGz

    Vous avez fait un travail aussi en interne sur finalement de quoi j'ai besoin, au rapport à l'argent.

  • SG

    Oui, on a réussi à tous se questionner à notre rapport à l'argent. Et on a réussi à faire définir à chaque collaborateur, sans jugement aucun, de combien il avait besoin pour vivre tous les mois et à partir de combien ce serait déraisonnable qu'il gagne tous les mois. Parce qu'en fait, pour le Comptoir, c'est une entreprise étendue. On est tous indépendants. Néanmoins, on est tous associés du cabinet. Et en fait, pour faire simple, le cabinet rémunère les collaborateurs à due proportion de la valeur ajoutée qu'ils génèrent. Donc en gros, s'ils génèrent une somme d'argent X en facturation, ils récupèrent 80% de cette somme d'argent pour leur entreprise. Et ce qu'on a réussi à mettre en place, c'est que chacun a défini son plancher de rémunération. Et ce plancher, en fait, il est garanti par les copains. C'est-à-dire qu'on se débrouille avec ces 20% qu'on laisse dans le Comptoir. Ça permet de garantir le plancher à tout le monde et à tous les nouveaux qui arrivent. Ça, c'est important. Et puis, quand on dépasse le plafond, tout ce qui dépasse le plafond de rémunération... permet de garantir le plancher à nos petits camarades, mais surtout nous permet d'investir dans des projets en lien avec la biodiversité. On fait beaucoup de mécénat financier. On a fait un peu moins de 3% de notre chiffre d'affaires en mécénat financier l'année dernière. On avait fait 2-4 l'année d'avant. J'espère qu'on fera plus de 3 cette année. Et ça, on l'a fait malgré le fait que le chiffre d'affaires par collaborateur a baissé. Parce que forcément, quand on refuse des missions lucratives, le CA, il baisse. C'est automatique. et puis une boîte de conseil c'est pas compliqué compliqué, ça vend du jus de cerveau, donc ça vend du temps homme. Donc quand on travaille pour une collectivité, on est payé, quand on ne travaille plus pour elle, on n'est pas payé.

  • SGz

    Vous avez mis en place du mécénat de compétences, plus plus plus quand même !

  • SG

    Je ne sais pas, plus plus, non, moi j'aimerais faire encore plus, mais comme je l'ai dit tout à l'heure, on fait notre bilan carbone, notre bilan eau douce, ça, ça fait tant de tonnes de carbone, tant de mètres cubes d'eau douce. La tonne de carbone l'année dernière, on l'a valorisé à 1000 euros, et le mètre cube d'eau douce, d'eau bleue, à 50 euros. Ça, ça a fait un chiffre. Ce chiffre, on l'a réinvesti en mécénat financier sur les territoires où on avait eu de l'impact. Et donc, on travaille avec... On adore 1% pour la planète, donc on a tout fait au travers du 1% pour la planète. Mais en choisissant nos partenaires, donc les assos qu'on a choisis, on a signé avec elles des baux pour 7 ans. Parce que c'était vachement bien, on a fait ça en 2023, 2023, le 4, 2030,

  • SGz

    on s'arrête...!

  • SG

    On est carrés. C'est carré. Donc, en fait, on s'est engagé en long terme. Et donc, ça, c'est notre partie mécénat financier. Une fois qu'on a fait ça, ça, ça fait un chiffre, un nombre, pardon. Ce nombre, on le divise par le prix moyen du jour hommes. Et ça, ça donne un nombre de jours hommes. Et ce nombre de jours hommes, tous les collaborateurs se le sont répartis et l'ont investi en mécénat de compétences sur les territoires. Donc, on fresque, on fait de la fresque du numérique. On fait des ateliers numériques responsables. Là, on va commencer des ateliers d'adaptation au changement climatique parce qu'on voit que ça va de... D'ailleurs, à chaque fois qu'on fait un schéma de résilience pour une collectivité, on démarre avant l'étude, on fait un atelier d'adaptation au changement climatique pour qu'il s'approprie les éléments de langage, les problématiques et les risques. Parce que sinon, quand on arrive avec nos risques, ils nous regardent avec des grands yeux. Bon, ça, ça existe. Donc là, on fait ça. Et donc, du coup, là, on passe du temps en mécénat de compétences sur les ateliers de l'adaptation au changement climatique.

  • SGz

    Donc, votre lien avec la biodiversité, c'est principalement par, c'est pas une association, c'est une fondation, le 1% Planet

  • SG

    Alors, on fait un peu de... C'est compliqué quand on fait du numérique, le lien avec le vivant. C'est pas simple. D'ailleurs, c'est un des points qui nous a posé le plus de soucis pendant la CEC. C'est comment on recrée du lien avec le vivant. Parce que, bon, une fois qu'on a mis trois brebis pour faire l'éco-pâturage de nos espaces verts et qu'on a fait un diag biodiv. Oui, effectivement, on fait notre miel. OK, et puis on a... Alors, il y a un truc qui nous a bien plu. on a fait un diag biodiversité avec France Nature Environnement, de la parcelle sur laquelle se situe le siège du cabinet. Et on va dérouler un plan d'action sur 10 ans sur ce qu'il faut faire pour l'améliorer. Mais néanmoins, dans notre activité de tous les jours, créer du lien avec le vivant, à part s'en inspirer pour l'organisation de l'entreprise, c'est compliqué. Donc, ce qu'on essaye de faire, c'est d'intégrer du lien avec le vivant dans les projets qu'on emmène pour les collectivités, d'essayer de les sensibiliser sur ces sujets-là. Et notamment, on essaye soit d'imposer, soit d'offrir systématiquement une analyse de cycle de vie de tous les projets qu'on emmène en collectivité sur les 19 critères. Et donc, la biodiv, elle est dedans et on essaye de leur montrer qu'en fonction des choix qu'ils vont réaliser, ça aura un impact ou pas sur la biodiv, sur leur territoire. On n'arrive pas encore trop à pousser cette porte-là, mais je pense qu'on va y arriver.

  • MC

    Sur la partie feuilles de route et les enjeux qui sont liés à un cabinet qui travaille dans le numérique, le côté adaptation est vraiment le côté court terme. gestion du risque, etc. Vous devez aussi travailler sur des sujets d'intelligence artificielle qui sont un petit peu de l'autre côté du spectre, en tout cas c'est mon impression, se dire à la fois je traite sur des sujets court terme et à haut risque, et en même temps je suis dans un monde dans lequel l'intelligence artificielle explose, et donc quel acteur je suis dans ce monde-là, ça me fait un peu penser à l'équivalent de la fast fashion, avec le monde du textile qui essaye de se battre ensemble et de coopérer ensemble pour légiférer sur ce côté fast fashion. J'ai un peu l'impression que ce côté fast fashion est un peu l'équivalent de l'explosion des données, etc. Comment vous adressez ce sujet d'intelligence artificielle ?

  • SG

    Alors déjà, on a la chance de baigner dans ces problématiques-là, nous, depuis très longtemps, puisque un des fondateurs du Comptoir des Signaux, Jean Zeitoun, a été un des précurseurs de l'intelligence artificielle en France au début des années 70. Donc ça ne nous rajeunit pas. Mais globalement, on a toujours baigné dans ces problématiques-là et on utilise de l'intelligence artificielle adaptée à nos métiers, nous, depuis assez longtemps. En fait, la révolution principale de l'IA que l'on vit et qui est vue du citoyen, c'est l'intelligence artificielle générative. C'est celle-là qui pose le plus de problèmes, mais qui aussi peut apporter des solutions. Notre positionnement aujourd'hui sur l'IA, on a la chance d'être reconnu par un certain nombre de collectivités pour les accompagner sur ces problématiques-là. On doit être là, si je fais le relevé des compteurs, des collaborateurs, on doit être à près de 800 élus et agents de collectivités formés à l'IA générative depuis le début de l'année. On a mis en place un cycle de formation et de sensibilisation pour expliquer que, oui, une intelligence artificielle, souveraine, éthique et durable, c'est possible. Et qu'en fait, l'IA, elle doit être utilisée pour maintenir un service public de qualité sur le territoire, dans le respect du territoire. Et c'est sûr qu'effectivement, elle n'est pas là pour générer des photos très jolies où on met la tête d'une personne sur un animal. Ça, ça n'a absolument aucun sens. Par contre, l'IA, elle peut vraiment permettre de garder des services publics performants ou d'améliorer la performance de services publics justement en conservant les agents des collectivités pour leur faire faire des choses à valeur ajoutée et en faisant traiter le tout venant et le volume à une intelligence artificielle. Donc on travaille beaucoup là-dessus, on a des démonstrateurs, on forme, on sensibilise, on accompagne. Nous, on a une approche responsable de l'IA, elle est utilisable. Après, on a bien conscience que c'est la deuxième... enfin. Dans notre vie d'ingénieur télécom, c'est notre deuxième révolution. La première révolution, c'est l'arrivée d'Internet, la création d'Internet au début des années 90, parce que c'est vraiment là que ça a démarré. Et notre deuxième révolution, c'est celle-là. À la limite, j'aurais tendance à dire que le déploiement de la fibre optique, ce n'est pas une révolution. C'est une évolution logique d'une technologie. La fibre optique, ça fait 60 ans qu'on l'utilise, donc ce n'était pas une révolution. L'amener chez tout le monde, c'était peut-être une évolution, mais pas une révolution. Par contre l'IA c'est une révolution, et dans les révolutions il y a toujours des dommages collatéraux. Donc, il faut faire très attention à ce qui se passe.

  • MC

    Est-ce que tu as le sentiment que les acteurs du numérique ou que certains acteurs du numérique en France ont la volonté ou démarrent des sortes de coopérations pour lutter ou pour amener dans le bon sens ce sujet-là plutôt qu'il l'explose dans les mains de tout le monde un peu ?

  • SG

    Sur beaucoup de sujets, il faut faire confiance aux collectivités locales. Elles se sont regroupées en associations. Elles ont créé des opérateurs de services numériques publics. et elle travaille sur ces sujets-là depuis longtemps. Donc aujourd'hui, il y a un vrai mouvement de fond, de collectivités, pour travailler sur ces problématiques-là. L'État a fait aussi des choses très intéressantes, a sorti des guides pratiques, des recommandations, n'a pas encore fait des choix suffisamment stratégiques, notamment en matière de souveraineté, de mon point de vue, mais il travaille quand même sur ces sujets-là. Et puis on a des acteurs de l'open source, du libre. qui travaillent sur ces sujets-là depuis très longtemps, avec lesquels nous on coopère de temps en temps. On n'a jamais travaillé sur un projet client ensemble, mais par contre on a déjà réfléchi ensemble. Donc il y a des gens comme l'Inagora par exemple, desquels on est assez proches, et qui eux sont sur l'open source depuis 25 ans et la souveraineté. Donc est-ce qu'il y a des outils aujourd'hui qui permettent de se prémunir de certaines dérives ? La réponse est oui. Est-ce qu'il y a une prise de conscience ? Alors... Oui, et en plus, il y a une prise de conscience qui est aussi forcée par des éléments budgétaires. C'est-à-dire qu'à partir du moment où on se libère de la contrainte des GAFAM dans une entreprise ou dans une collectivité, on fait des sacrées économies. Par contre, une fois de plus, moi, je pars du principe qu'il faut toujours faire la démonstration par l'exemple. Donc, nous, on l'a fait au cabinet. Enfin, quand moi, j'ai repris le cabinet en 2019, ça a été un des premiers trucs, parce que les associés précédents n'avaient pas de problème avec Google. Moi non plus, tant que je ne l'utilise pas. Donc, globalement, on a fait cette démarche d'avoir un SI souverain, durable. On a cherché des hébergeurs chez qui on peut avoir confiance et qui hébergent dans des data centers à haute exigence environnementale. C'est des sujets qui nous animent. Donc, on a fait cette démarche-là. Et donc, aujourd'hui, on est capable de dire, il y a des solutions. Regardez, nous, on a réussi à le faire. Alors, on a réussi à le faire à notre toute petite échelle de petits cabinets de 10. Donc, est-ce qu'une collectivité dans laquelle il y a 4 500 agents qui gèrent des collèges ou il y a 16 000 collégiens par exemple, est-ce que c'est facile à faire ? La réponse c'est non. Mais il y a des outils pour le faire. Donc c'est faisable. Et de toute façon... Il va falloir le faire, parce que de toute façon, avec la raréfaction des ressources abiotiques et le fait qu'à un moment donné, il va falloir faire des arbitrages sur tel minerai rare, telle terre rare, on va l'utiliser. Est-ce qu'on l'utilisera pour la santé, pour la sécurité civile, ou est-ce qu'on l'utilisera pour continuer de tourner des vidéos de chat ? J'ai bien un avis sur la question.

  • MC

    L'eau même avant, d'ailleurs, pour refroidir les data centers, etc.

  • SG

    Oui, alors, on arrive à mieux gérer ça. C'est-à-dire qu'il y a un vrai travail qui a été fait sur l'utilisation de l'eau dans les DC. Ce n'est pas parfait, mais c'est moins pire qu'il y a une dizaine d'années. Sur le CO2, c'est pareil. Il suffit de regarder le bilan carbone et l'analyse de cycle de vie d'un DC. À partir du moment où on réserve ce data center à des usages qui sont vitaux, il n'y a pas de problème. La CV, elle est bonne. Le problème, c'est quand on stocke les données des vidéos.

  • SGz

    Je ne sais pas si c'est ce que j'allais dire, mais les données, elles sont stockées principalement ailleurs qu'en France ?

  • SG

    Ça dépend, pas les miennes, pas les nôtres. Oui, est-ce qu'il y a beaucoup de données ? Alors, nous, on n'intervient qu'en collectivité. Est-ce qu'il y a beaucoup de données de collectivités qui sont stockées de manière non souveraine ? La réponse est oui, la majorité. Et même quand elles sont stockées dans des hébergeurs qui ont des data centers en France, ces hébergeurs sont des hébergeurs à actionnariat étranger qui tombent sous le cloud act. Donc, aujourd'hui, les données, elles ne sont pas souveraines. Mais est-ce qu'on peut changer ça ? Est-ce qu'il y a des collectivités aujourd'hui qui se... préoccupe de ces problématiques-là et on va voir sortir des DC publics souverains, la réponse est oui.

  • SGz

    Oui, je pense, en effet. Bon, alors, j'accélère un peu le mouvement parce que là, on pourrait parler jusqu'à la fin de la journée. Donc, quand même, quelques questions pour terminer. Question pas forcément très simple, mais si tu avais une baguette magique et que tu pouvais changer avec du jeu économique, qu'est-ce que tu changerais ? Tu nous as déjà donné pas mal de pistes, mais...

  • SG

    Un vrai partage de la valeur et notamment le partage de la valeur utile. C'est-à-dire qu'il y a des... Je pense que la première question qu'un chef d'entreprise devrait se poser, c'est est-ce que son entreprise est utile et est-ce qu'elle est utile au territoire sur lequel il travaille ? Et donc, particulièrement en collectivité, l'une des baguettes magiques, si j'avais une baguette magique, je pense que je modifierais le code de la commande publique pour permettre de faire travailler des entreprises locales et des entreprises qui ont du sens. Et pas forcément les entreprises les moins chères, mais des entreprises qui ont du sens.

  • SGz

    C'est vrai qu'il y a beaucoup d'élus, alors moi je suis un peu élu aussi, mais il y a beaucoup d'élus qui se battent là-dessus. Parce que c'est vrai que c'est un critère qui ne rentre pas du tout en ligne de compte. Et voilà, donc ça, on peut espérer que ça va changer aussi.

  • SG

    Oui, et rentrer du circulaire, c'est fondamental, même dans nos métiers. Il faut vraiment mettre en place une économie circulaire qui tourne. Et la commande publique, c'est un levier énorme pour ça. Donc, oui, ça, je ferai ça.

  • SGz

    OK, et pour terminer, qu'est-ce qui te rend confiant en l'avenir ? L'entrepreneur, en général, il est toujours confiant.

  • SG

    Ça dépend des entrepreneurs. oui je pense que le métier de chef d'entreprise et le rôle de l'entrepreneur, c'est de pérenniser une activité sur un territoire. Moi, c'est ma vision des choses. C'est comme le maillot dans certains sports : le club a plus d'importance que le joueur. Et moi, je reste persuadé que les entreprises doivent toujours nous survivre. Donc, il faut qu'on crée des modèles si elles sont utiles, qu'elles soient encore là. J'ai le sentiment aujourd'hui que... et la CEC, moi, m'a énormément apporté là-dessus. J'ai vu des grandes, des petites. Je me suis dit, en fait, on n'est pas tout seul. Et on n'est pas tout seul et on est légitime. Et j'ai l'impression qu'il y a de plus en plus de chefs d'entreprise qui se disent finalement, on est légitime à intervenir sur ces sujets-là et on a un rôle à jouer. Donc ça, ça me rend un peu confiant. Après, j'ai des nuits compliquées quand même. Mais voilà.

  • MC

    Écoute, Sébastien, merci. C'est sincère, comme on l'aime, simple. Voilà, mais en même temps clair, net. Marianne, tu reviens quand tu veux ! Je veux dire, voilà. Donc, voilà. Et je finis toujours par une citation. Alors là, c'est une citation, attention, accrochez-vous, de Peter Drucker, qui a dit « Il n'y a certainement rien d'aussi inutile que de faire très efficacement ce qui ne devrait pas être fait du tout. » Voilà, vous avez 4 heures. Merci. Et encore une fois, bien sûr.

  • SG

    Merci et à bientôt.

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Comptoir des Signaux accompagne exclusivement les acteurs publics sur les enjeux d’aménagement numérique des territoires. En 2023, l’entreprise rejoint la CEC Alpes pour accélérer sa transformation, après un premier virage RSE jugé trop timide.

Son dirigeant Sébastien Godin insiste sur l’urgence à intégrer les enjeux de biodiversité, de souveraineté numérique et de résilience territoriale. Dans cet épisode, il parle d’intelligence artificielle comme levier pour les services publics, à condition d’en maîtriser les dérives. Il plaide pour une commande publique qui valorise les entreprises locales engagées, au-delà du seul critère prix.

Comptoir des Signaux milite pour des systèmes d’information souverains, éthiques et écoconçus. L’exemple de son propre cabinet démontre que des alternatives existent, même à petite échelle.


"La première question qu'un chef d'entreprise devrait se poser, c'est est-ce que son entreprise est utile et est-ce qu'elle est utile au territoire sur lequel il travaille ?"


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Transcription

  • SGz

    Bonjour, bienvenue sur Éco de Territoire, le podcast inspirant de la Convention des Entreprises pour le Climat, qui donne la parole aux acteurs engagés et passionnés qui construisent l'économie régénérative de demain. Je suis Stéphane Gonzalès, alumne de la promotion 2023, et je vous emmène sur les territoires du bassin lyonnais et des Alpes, à la rencontre de dirigeants et de dirigeantes qui contribuent à dessiner les contours d'un avenir durable. Alors aujourd'hui, j'ai dit je, mais je pourrais dire nous, nous avons la chance de vous partager le témoignage du dirigeant d'une belle TPE, de conseil d'ingénierie en aménagement numérique, établi à Groisy et je vous parle du Comptoir des Signaux. Le comptoir des Signaux. Et ce dirigeant, c'est Sébastien Godin, avec qui nous allons échanger sur son engagement vers l'économie dite régénérative. Alors Sébastien, bonjour.

  • SG

    Bonjour.

  • SGz

    Je te propose qu'on se tutoie.

  • SG

    Parfait.

  • SGz

    Et puis en plus, comme je sais que tu es très bavard, à mon avis, ça va être facile de t'enclencher sur les sujets. Et aujourd'hui, on a quand même la chance, c'est un peu un podcast exceptionnel, j'ai un peu la pression d'ailleurs, puisque nous avons la chance d'avoir une experte de choc avec nous, en la présence de Marianne Coudert. Salut Marianne. Salut. Allez, représente-nous qui tu es.

  • MC

    Moi, j'étais et je suis toujours pilote de territoire pour la Convention des Entreprises pour le Climat sur le bassin lyonnais et sur les Alpes, donc depuis le démarrage sur ce projet associatif et depuis 2022 en particulier sur le territoire lyonnais et alpin.

  • SGz

    Voilà, donc dans ce podcast, l'experte c'est Marianne et moi, je vais juste être celui qui anime. Alors Sébastien, revenons au Comptoir des Signaux, qui n'est pas né hier puisque ça fait 35 ans que le Comptoir des Signaux existe, pour apporter une expertise en télécommunication auprès des collectivités et des entités publiques, puisque c'est 100% de vos clients. Et alors, j'ai pris la phrase qui est sur le site, et puis on va débattre de ça : conseil en ingénierie et en aménagement numérique responsable du territoire. Je dis tiens, donc on va parler territoire, on va parler numérique responsable. Donc ce que je te propose, c'est de nous présenter la société.

  • SG

    Merci. Le Comptoir des Signaux, c'est un cabinet d'assistance à maîtrise d'ouvrage. Effectivement, on n'intervient que dans la sphère publique, uniquement dans la sphère publique. Depuis 1988, sa création, il n'y a pas un centime d'argent privé qui est rentré dans nos comptes. On accompagne les grandes collectivités, les services de l'État, les grands hôpitaux, les universités sur toutes les problématiques d'aménagement numérique du territoire, également de commandes publiques et de structuration des réseaux qui interconnectent l'ensemble des sites principaux de ces collectivités.

  • SGz

    D'accord, on parle data center, on parle fibre,on parle de ça

  • SG

    On parle d'essais, on parle beaucoup fibre, on parle aussi pas mal radio, puisqu'on a fait beaucoup d'aménagements radio. Et on parle toujours numérique responsable chez nous. On a la chance d'avoir suivi un parcours NR. Aujourd'hui, on est labellisé numérique responsable niveau 2 auprès de l'agence Lucie. Et on accompagne également les collectivités dans leur labellisation numérique responsable et également sur des thématiques très en vogue actuellement d'intelligence artificielle. On les apprend à mieux ou moins mal utiliser ces technologies qui, vu du numérique responsable, peuvent être vues comme un oxymore.

  • SGz

    Voilà ton parcours avant d'arriver.

  • SG

    Un parcours assez classique, ingénieur télécom en 1994. Il y avait de l'informatique en 1994 ? En 1994, oui.

  • SGz

    Il n'y avait pas Internet ?

  • SG

    Il y avait l'Internet. Forcément, en sortant en 1994, on a fait partie des premiers à avoir une adresse mail. J'ai eu la chance, dès mes premières années, de participer à l'arrivée de l'Internet en France. parce que j'ai travaillé pour quelques grands opérateurs qui se sont installés sur le territoire français à ce moment-là. Donc, est-ce qu'on a amené le diable dans les campagnes ? C'est bien possible. Donc, école d'ingénieurs chez les opérateurs. Je suis parti quelques années travailler en startup pour des startups essentiellement américaines, malheureusement, où j'ai appris quand même plein de choses. Et dès 1997, j'ai fait quelques premières missions pour Le Comptoir des Signaux, notamment sur l'ingénierie et le déploiement de gros réseaux fibres sur des métropoles françaises. Après, je suis donc parti en start-up et début des années 2000, 2003, 2004, j'ai reposé mes valises après être passé par plusieurs startups qui ne sont jamais devenues publiques. Donc, je ne suis pas devenu millionnaire à ce moment-là. J'ai reposé mes valises et j'ai remis un peu du sens dans mon travail. J'ai voulu me reconsacrer à l'intérêt général. Donc, je suis revenu voir le Comptoir des Signaux à cette époque-là. Et j'ai dit, comment moi je peux accompagner, avec ce que j'ai appris pendant une dizaine d'années, comment je peux accompagner les collectivités, les entités publiques ? Et Agnès Huet, présidente du Comptoir à l'époque, m'a ouvert la porte et m'a dit, Sébastien, vous commencez lundi. Et donc, cette histoire s'est plutôt bien terminée, puisque Agnès a pris sa retraite en 2019 en me laissant les clés du cabinet avec les quelques collaborateurs qui étaient là.

  • SGz

    C'est-à-dire les clés du camion, mais...

  • SG

    C'est pas mal.

  • SGz

    Justement, c'est sans transition. Comment toi tu découvres le régénératif ? Qu'est-ce que tu en as pensé la première fois que tu as entendu ce mot ?

  • SG

    Alors, la première fois que j'ai entendu ce mot, c'était Eric Duverger qui l'avait prononcé. J'ai eu la chance de croiser Eric au sommet du Digital à Annecy, ça devait être en mars 2023. Et j'étais avec mon associé principal, Alexandre, et on a écouté Eric intervenir à une tribune. Alors, une tribune dans laquelle il y avait du beau monde, parce qu'il y avait Fabrice Bonnifet qui était juste à côté de lui. Donc l'ambiance était bonne. Il y avait Clara Guaymard, ça c'était moins marrant. Et globalement, on a été voir Eric à la fin et on lui a dit « Et comment on fait, nous, toutes petites TPE haut-savoyarde, d'un peu moins de dix consultants, pour intégrer la Convention des entreprises pour le climat ? » Le premier parcours de la CEC était au trois quarts du parcours, mais il nous a dit « Vous verrez, il y a des choses qui vont démarrer en territoire. » Effectivement, six mois après... C'est CEC Alpes qui sort, le cabinet, quand on a dessiné au premier candidat, on est les premiers. C'est vrai. Les premiers. Je pense que le jour où c'est sorti, le lendemain, on avait déposé notre candidature. Pourquoi ? Parce qu'on avait commencé un peu à en parler en interne. On a un comité de gouvernance, nous, tous les collaborateurs du cabinet participent aux décisions. Et donc, on leur avait dit, quand on est revenu des sommets, on a dit, on a vu un truc super, on veut faire ça, nous. Alors, pourquoi on voulait faire ça ? En 2019-2020, on a tout de suite lancer une stratégie RSE, alors un peu à la papa puisqu'on n'avait jamais mis les mains dedans et numérique responsable. Et honnêtement, ça convenait à toute l'équipe. Moi, ça n'allait pas assez vite. Ça n'allait pas assez vite, ça n'allait pas assez loin. C'était très orienté, effectivement, sur l'humain. Pas assez sur les conséquences de notre business et puis pas de lien avec la biodiversité. Moi, j'ai la chance de vivre dans un petit hameau à Haute-Savoie, au milieu d'une forêt, et de travailler mon potager, ce que ne font peut-être pas tous les dirigeants d'entreprise. Et pour moi, ce qu'on faisait, c'était bien, c'était intéressant, mais on n'allait pas assez loin. Et j'ai vu dans l'approche CEC quelque chose qui allait nous permettre d'accélérer la transformation de l'entreprise. Et donc, du coup, c'est sorti octobre 2023, l'appel à candidature. On a dû répondre deux jours après, tout le monde était OK pour répondre. Et donc, ça nous parlait bien.

  • SGz

    Comment tu la vis cette CEC en particulier ?

  • SG

    Pas bien du tout en fait. Premier week-end de CEC, je suis rentré pendant 15 jours, j'étais à Social, je n'ai parlé à personne. J'ai annulé d'ailleurs la quasi-totalité de mes rendez-vous clients parce que je ne voulais voir personne. Donc en famille, c'était super. Et j'étais arrivé à une conclusion très saine, c'était qu'il fallait fermer la boîte pour faire des choses utiles. Deuxième week-end de CEC, je suis revenu moins associal, mais j'avais toujours dans l'idée de fermer la boîte. Et on a fait un truc bien, je pense, et je remercie mes collaborateurs pour l'avoir fait. Ils nous ont dit ce que vous avez vécu pendant deux jours, il faut le partager. Il faut commencer à embarquer. On réunit nos parties prenantes privées par contre, les plus proches, les cabinets avec lesquels on bossait. Pendant une journée, vous nous sortez tout ce que vous avez vu pendant deux week-end. Et les conclusions à laquelle vous en êtes arrivé. C'est sûr que quand on se met autour de la table avec des cabinets avec lesquels on travaille depuis 25 ans et qu'on leur dit, c'était bien ce bout de chemin qu'on a fait ensemble. Mais en fait, on va s'arrêter là, parce que globalement, ce qu'on fait, ça n'a pas de sens, on ne trouve pas le sens et ça ne va pas assez loin. Et globalement, à la question, est-ce que le cabinet est utile à la société ? On avait l'impression que non. Et bien, ils nous ont aidés en fait. Et ils ont réussi à nous faire prendre conscience au fil du temps, les collaborateurs qui n'avaient pas fait la CEC et nos partenaires, que finalement, ben si. On avait un rôle à jouer, qu'on pouvait être utile, notamment en essayant de dynamiser un écosystème local sur ces sujets-là. Et en fait, ça nous a permis déjà de mieux vivre la fin de l'année 2023. Ça s'est mieux passé. Et surtout, ça nous a permis de construire une feuille de route qui a été validée par tous les collaborateurs du cabinet et qu'on a fait relire aussi à nos principales parties prenantes privées en leur disant voilà, on va faire ça, vous en pensez quoi ? Est-ce que ça vous parle ? Puisque l'idée qu'on avait dès le départ, après le deuxième week-end, c'est de se dire, ce qu'on va faire pour nous, nous on est tout petits. Ce qu'on va faire pour nous, il faut que ça serve à d'autres et il faut qu'on essaye d'embarquer nos parties prenantes privées sur ces sujets-là et faire que finalement on ne soit pas les seuls à basculer dans le régénératif. Donc on a essayé de les embarquer le plus tôt possible. Et je pense que si on n'avait pas réussi à ce qu'elles nous disent, si en fait c'est bien votre truc, il y a une idée, vous allez plus loin. Je pense qu'effectivement, on aurait certainement jeté l'éponge. On pense qu'on n'est pas bête. On a fait deux, trois trucs dans notre vie et on s'est tous dit, si on ne fait plus ça, on saura faire autre chose. Mais du coup, on n'a pas fermé.

  • SGz

    Et concrètement, vous avez fait comment ?

  • SG

    Pour les embarquer ? On les a mis dans une salle pendant une journée et on leur a fait vivre en une journée ce qu'on avait vécu en deux week-end. Ça, c'est super bien passé ! Derrière, on a pris, deux mois après, on a repris une journée complète qu'avec les collaborateurs du cabinet. On sortait de la session 3. Et pareil, on leur a fait revivre un peu ce qu'on avait vécu. vécues pendant la session 3 et on les a vraiment, on les a fait travailler avec nous. Ça s'est plutôt bien passé. Et du coup, ce qui est ressorti de là, c'est qu'on s'est dit, il faut qu'on mette en place des événements avec toutes nos parties prenantes, publiques et privées, pour essayer de les embarquer. Donc, mars de l'année dernière, on a fait notre première journée partie prenante sur le thème des limites planétaires et de la résilience territoriale. Donc, on a fait intervenir sur les limites planétaires un cabinet qui a fait la CEC qui s'appelle InnovRH qui nous... nous accompagne sur notre RSE depuis 4 ans maintenant, et sur les limites planétaires, on a fait intervenir quelqu'un qui du coup maintenant est dans l'écosystème du cabinet et travaille avec nous sur tous nos projets de résilience, c'est Ilian Moundib, qui a intervenu également à la CEC, mais on a eu la primeur de le faire intervenir avant, et du coup maintenant Ilian bosse avec nous sur tous les schémas de résilience territoriale sur lesquels on travaille, puisqu'on a la chance d'avoir été retenu par un certain nombre de collectivités sur ces problématiques de schéma de résilience. Donc, on a mis tout le monde dans la salle. Au début, on s'est dit, bon, on va peut-être avoir 15, 20 parties prenantes, publics, privés qui viennent. On était une cinquantaine dans la salle. Il y avait peu d'élus, il y avait beaucoup d'agents de collectivité, des DG, des DGS, des DGAP, donc au bon niveau. Et là, on a parlé limites planétaires, résilience, on a parlé feuilles de route, on a parlé régénératif, on les a perdus, très clairement, sur ces sujets-là. Mais, ça a plutôt bien fonctionné parce que quand on a remis une pièce en disant dans six mois, on refait une demi-journée partie prenante sur des problèmes plutôt de souveraineté numérique, tout le monde est venu. Là, on en a fait une au mois de mars sur l'IA et l'impact de l'IA sur la souveraineté, la résilience des territoires. On ne l'a fait qu'en Ile-de-France, donc avec nos PP Ile-de-France et ils sont venus. Et là, on a une prochaine journée partie prenante au mois de juin dans laquelle on invite toutes nos parties prenantes. Privées ?

  • SGz

    privées ? Est-ce que ça marche plus bien que le public ?

  • SG

    On n'invite que les parties prenantes privées qu'on aime bien. On est assez sélectif. Dans les parties prenantes privées qu'on a invitées, on invite les collaborateurs des cabinets, les dirigeants des cabinets avec lesquels on travaille tous les jours. On invite aussi des parties prenantes avec lesquelles on intervient sur certains dossiers. Mais par contre, on n'invite pas les parties prenantes qui sont, par exemple, les opérateurs télécom ou les intégrateurs, peut-être parce qu'on considère qu'ils sont du côté obscur.

  • SGz

    Ils ne sont pas assez matures...?

  • SG

    Ils ne le seront jamais.

  • SGz

    Ils sont trop loin.

  • SG

    Ils sont trop loin et leur business model fait que c'est incompatible avec un business model régénératif. Et pourquoi on invite ces PP-là ? Parce qu'on a envie de les convaincre de faire comme nous. Et d'ailleurs, pour qu'ils puissent faire comme nous, tout ce qu'on a développé comme outil pour nous accompagner, on leur met à disposition.

  • SGz

    Bref. C'est la vraie coopération, en fait.

  • SG

    Voilà. C'est-à-dire que nous, on fait vraiment la différence entre la collaboration et la coopération. La collaboration, chez nous, c'est quand on collabore avec un cabinet, c'est pour que ça nous apporte aux deux. Et la coopération, c'est quand ça apporte au territoire. Et donc, l'idée, c'est de vraiment monter des coopérations qui fait que finalement, on est assez désintéressé, sauf qu'on vit sur un territoire. Et donc, ces coopérations, elles vont apporter au territoire. Ça a l'air de marcher un peu.

  • MC

    Pour revenir sur la feuille de route, il y a un aspect qui est assez important dans votre feuille de route, qui est le sujet de l'adaptation, qui est un sujet qu'on a aussi, même au sein de la CEC, plus de mal à aborder, parce qu'il y a plein de sujets à aborder dans l'enjeu régénératif. Et l'adaptation, évidemment, c'est le sujet d'Ilian Moundib aussi. Dans le numérique responsable, il y a cette partie-là. Et j'imagine que, évidemment, ça fait des années que vous travaillez sur la résilience des systèmes et des réseaux. Mais qu'est-ce que tu ressens qui change aujourd'hui dans le contexte actuel, avec les changements qui arrivent sur cet aspect-là ? Est-ce que la force publique a plus conscience de nos fragilités sur cet aspect-là ? Ou est-ce qu'ils sont encore loin des sujets ?

  • SG

    Côté agents, la réponse est oui. C'est-à-dire qu'à un bon niveau en collectivité, on a des gens qui, déjà qui sont intéressés à tous ces sujets-là, qui ont été sensibilisés, avec lesquels on discute régulièrement. On n'est, nous, qu'une petite pierre dans l'édifice, mais on sent qu'il y a une vraie prise de conscience. Du côté de nos élus, c'est beaucoup plus compliqué. Parce qu'ils doivent se projeter sur le long terme sur ces problématiques-là, même si on essaie quand même d'expliquer à tout le monde que des crises systémiques, on va en vivre à court terme. on verra. Mais, ils ont quand même une problématique de fin de mandat. Donc, globalement, c'est très compliqué pour eux d'intégrer ces problématiques-là dans leur approche. Typiquement, je prends un exemple tout bête. Sur le numérique aujourd'hui, la problématique principale d'un élu à une échelle départementale, c'est de s'assurer que tout le monde ait la fibre. Ce n'est pas de s'assurer que quand il y aura une crise systémique, finalement, elle continuera de fonctionner. Il faut d'abord apporter la fibre à tout le monde parce que c'est important que chaque entreprise, chaque citoyen du territoire puisse avoir accès à un accès Internet à très haut débit. À beaucoup trop très haut débit, d'ailleurs, entre nous. C'est-à-dire que globalement, on apporte des débits qui sont sans commune mesure par rapport au besoin. On devrait avoir, c'est un peu dur comme approche, mais on devrait limiter la bande passante. On n'a pas besoin de tout ça. Et donc, est-ce qu'il y a une prise de conscience ? La réponse est oui. Est-ce qu'il y a des réflexions approfondies sur le fait de se dire : on va peut-être avoir sur un territoire pendant qu'un jour, plus d'électricité. Et qu'est-ce qui va se passer ? Eh bien, il y a des entités publiques qui réfléchissent vraiment à ces problématiques-là. On peut prendre tous les SDIS de France et de Navarre, eux, ils ont conscience. Eux, ils savent ce qui va se passer.

  • MC

    Les SDIS : les pompiers, pour ceux qui sont moins habitués !

  • SG

    Les pompiers, ils savent. C'est-à-dire que pour discuter résilience territoriale, c'est les meilleurs interlocuteurs. Eux, ils savent exactement ce qui va se passer. Et surtout, eux, ils savent que quand ça va se passer, ils ne pourront pas résoudre tous les problèmes. Donc, ils sensibilisent énormément les collectivités au niveau des plans d'adaptation, justement pour dire qu'il faut diffuser la compétence, il faut diffuser le savoir pour que les gens puissent, et les entreprises, et les citoyens, quand il y aura un problème, ils aient des bons réflexes et qu'on ne vive pas effectivement ce que nos amis espagnols ont vécu à Valence. Parce qu'on va le vivre, mais il faudrait juste qu'on arrive à mieux réagir.

  • MC

    Et est-ce que tu te confrontes pas un petit peu à ce côté-là ? Tu mets la fibre d'un côté et la résilience de l'autre. Il y a un projet qui peut paraître plus enthousiasmant, la 5G, etc. Et puis, de l'autre côté, toi, tu arrives un peu avec ton bâton de pèlerin en disant, attention, quand on va avoir des coupures, il va falloir prévoir ci ou ça. Est-ce que tu as le sentiment, parfois, d'être un peu considéré Comptoir des Signaux, ou toi en particulier, je ne sais pas, comme, ouais, mais bon, cela... Enfin, quelqu'un qui va moins vers l'avant, qui est plus dans la précaution, le risque, l'évocation du risque, plutôt que l'évocation de quelque chose d'enthousiasmant, qui pourrait être enthousiasmant dans la culture connue aujourd'hui ?

  • SG

    Oui. Oui, c'est difficile. On peut avoir des discussions dans lesquelles on peut être vu comme pas avant-gardiste sur ces sujets-là. Néanmoins, on a la chance d'avoir des collectivités qui nous font confiance depuis longtemps, des collectivités pour lesquelles on a toujours eu des positions assez avant-gardistes. Je n'aime pas trop le terme de visionnaire. mais on est consultant, donc pour être consultant, il faut de l'ego, l'humilité, on n'en a pas toujours. Mais globalement, je pense qu'on a régulièrement eu sur des sujets raison avant tout le monde. On a mis en garde de nombreuses collectivités sur certaines problématiques technologiques et d'organisation qui aujourd'hui montrent que finalement, on n'avait pas tort. Donc aujourd'hui, on est écouté. Quand on présente un schéma de résilience télécom à une collectivité, en lui disant c'est bien, vous avez fibré tout le territoire. Oui mais, l'architecture, l'ingénierie que vous avez mis en place, le jour où il va y avoir tel aléa climatique, et il n'y en aura pas qu'un, parce que de toute façon, ce sera systémique. Donc, de toute façon, la composition, quand l'aléa va se produire, il y en a d'autres qui vont se produire en même temps, ça va être un château de cartes. Voilà comment ça va s'écrouler. Eh bien, il faut se préparer. Et là, je reparle des pompiers, parce qu'eux, ils sont incroyables. C'est-à-dire que tout le monde voit les pompiers comme les soldats du feu. Mais en fait, vous n'imaginez pas le niveau de compétences sur, par exemple, en télécommunication que peuvent avoir ces gens-là. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, à la direction réseau d'un SDIS, vous avez des gens qui ont le même niveau de compétence que nous. Pour moi, ce sont des experts en télécom. Et quand ils montent un réseau, la première question qu'ils se posent, c'est si pendant 15 jours, je n'ai pas d'électricité sur un territoire, comment je fais pour communiquer et assurer mes services de sécurité civile ? En fait, nous, on s'est toujours posé ces questions-là. Donc, on a toujours intégré dans nos ingénieries et dans nos préconisations ces éléments-là. Il y a 10 ans, 15 ans, quand on en parlait, on était les fous du labo. C'est-à-dire que globalement, tout le monde nous regardait en disant « Oui, mais ok, ça c'est pour apporter de la qualité de service aux entreprises. » Ben non, c'est juste fait pour que le territoire continue de fonctionner. Et là, aujourd'hui, on voit que quand on commence à mettre ça dans des cahiers des charges, on n'a plus de questions. C'est-à-dire qu'on le voit, là, on a écrit un cahier des charges d'une grosse délégation de services publics sur l'Ile-de-France qui concerne en gros toute la petite et la moyenne couronne parisienne. D'entrée de jeu dans le cahier des charges, on parle de résilience territoriale, on parle de réseau support de cette résilience territoriale. On parle de coopération, on parle de montée en compétence des territoires. Et en fait, quand on a déroulé ça, qu'on a présenté ça et aux élus et à la direction générale de ce syndicat, en fait, on ne nous a pas pris pour des fous. C'est-à-dire que le travail d'acculturation avait été fait. Et là, on vient de finir un schéma de résilience territoriale pour eux. Et en fait, ils s'aperçoivent que oui, il faut bien penser à tout ça. Et quand on aura une crue massive de la Seine, on a de grande chance que la Marne fasse pareil. Et que globalement, toutes ces infrastructures de télécommunications, communications, data centers, locaux techniques, câbles, qui sont dans ces environnements-là, elles vont fonctionner un peu moins bien. Et qu'il va quand même falloir assurer les services de sécurité civile sur le territoire. Donc, honnêtement, il y a dix ans, je ne t'aurais pas répondu de manière aussi positive. Après, c'est comme sur toutes les problématiques environnementales, c'est toujours les problématiques de fin du mois et fin du monde. Pour une collectivité, c'est fin du mandat et fin du monde. Donc, c'est compliqué.

  • SGz

    C'est un élu et pour un entrepreneur. entrepreneurs, c'est pas... Si elle est la branche sur laquelle on est, est-ce que toi, aujourd'hui, tu t'empêches des choses, des marchés que tu ne prends plus, est-ce qu'il y a des territoires que tu ne veux plus ?

  • SG

    Clairement, il y a des appels d'offres sur lesquels on ne répond plus. C'est-à-dire que, alors, nous, on fait, depuis plusieurs années, on a toujours fait notre bilan carbone, scope 1, scope 2, scope 3. Maintenant, on essaie de le faire sur les neuf limites planétaires. Bon courage, parce qu'on manque de littérature scientifique pour le faire, mais on arrive à le faire quand même sur certaines. Et donc, comme on a pris des engagements très forts de réduction ... carbone et O2, on est vite arrivé à la conclusion qu'il y avait des missions qu'on ne pouvait plus porter. Donc aujourd'hui, il y a des A.O., parce que nous, on ne fonctionne que sur des appels d'offres publiques, il y a des appels d'offres auxquels on ne répond plus, soit parce qu'ils auraient un impact sur nos bilans, et donc ils ne seraient pas compatibles avec nos engagements, soit parce que ce qu'on voit dans le cahier des charges de l'appel d'offres n'est pas aligné avec ce qu'on pense être bien. Et donc, dans ce cas-là, on ne répond pas à l'appel d'offres, mais par contre, on fait quand même une petite note à la collectivité en disant qu'on a bien bien pris connaissance de leur cahier des charges, on ne répondra pas à ce cahier des charges et on explique les raisons pour lesquelles on ne répond pas. C'est peut-être une bouteille à la mer, ça sert pas grand-chose. Je sais qu'il y a une chose à laquelle ça sert, c'est que pour fédérer et embarquer l'équipe, ça, c'est génial.

  • SGz

    C'était ma question, j'allais dire à l'inverse. Est-ce qu'un collaborateur, ça ne le fait pas paniquer ?

  • SG

    Est-ce que ça en a un inquiété certain ? La réponse est oui. Est-ce que j'ai la chance de travailler avec une équipe formidable ? La réponse est oui aussi. C'est-à-dire que globalement, ils n'étaient pas tous sensibilisés sur ces sujets-là. Ils ont embarqué. Ils sont quasiment tous fresqueurs climat, fresqueurs numériques. Quand on fait l'évaluation des compétences et de la volonté d'évolution des compétences pour les années qui viennent, ils ont tous coché la case "monter en compétence sur les problématiques de résilience, sur les problématiques environnementales". Ils se sont tous intéressés à ça. Donc ça, c'est assez incroyable. Après, est-ce que de temps en temps, ça ne doit pas aller travailler de se dire, mais où est-ce qu'ils nous emmènent ? Est-ce qu'il n'y a pas un risque ? Nous, on a la chance d'avoir une gouvernance qui est complètement partagée. On prend toutes les décisions ensemble. Après j'ai toujours tendance à dire que quand on pèse 110 kilos en général les autres écoutent la table mais globalement ça marche. Après oui, moi j'aimerais aller plus vite mais ils ont raison de temps en temps il faut freiner un peu est-ce qu'on prend des risques et est-ce qu'on a mis notre business model à risque à partir du moment où on commence à renoncer forcément il y a une part du business qui était sympa, qui était super rentable et qui faisait que ça ça roulait tout seul. Celui-là, on ne le fait plus. Et forcément, ça se voit dans les comptes.

  • SGz

    Vous avez fait un travail aussi en interne sur finalement de quoi j'ai besoin, au rapport à l'argent.

  • SG

    Oui, on a réussi à tous se questionner à notre rapport à l'argent. Et on a réussi à faire définir à chaque collaborateur, sans jugement aucun, de combien il avait besoin pour vivre tous les mois et à partir de combien ce serait déraisonnable qu'il gagne tous les mois. Parce qu'en fait, pour le Comptoir, c'est une entreprise étendue. On est tous indépendants. Néanmoins, on est tous associés du cabinet. Et en fait, pour faire simple, le cabinet rémunère les collaborateurs à due proportion de la valeur ajoutée qu'ils génèrent. Donc en gros, s'ils génèrent une somme d'argent X en facturation, ils récupèrent 80% de cette somme d'argent pour leur entreprise. Et ce qu'on a réussi à mettre en place, c'est que chacun a défini son plancher de rémunération. Et ce plancher, en fait, il est garanti par les copains. C'est-à-dire qu'on se débrouille avec ces 20% qu'on laisse dans le Comptoir. Ça permet de garantir le plancher à tout le monde et à tous les nouveaux qui arrivent. Ça, c'est important. Et puis, quand on dépasse le plafond, tout ce qui dépasse le plafond de rémunération... permet de garantir le plancher à nos petits camarades, mais surtout nous permet d'investir dans des projets en lien avec la biodiversité. On fait beaucoup de mécénat financier. On a fait un peu moins de 3% de notre chiffre d'affaires en mécénat financier l'année dernière. On avait fait 2-4 l'année d'avant. J'espère qu'on fera plus de 3 cette année. Et ça, on l'a fait malgré le fait que le chiffre d'affaires par collaborateur a baissé. Parce que forcément, quand on refuse des missions lucratives, le CA, il baisse. C'est automatique. et puis une boîte de conseil c'est pas compliqué compliqué, ça vend du jus de cerveau, donc ça vend du temps homme. Donc quand on travaille pour une collectivité, on est payé, quand on ne travaille plus pour elle, on n'est pas payé.

  • SGz

    Vous avez mis en place du mécénat de compétences, plus plus plus quand même !

  • SG

    Je ne sais pas, plus plus, non, moi j'aimerais faire encore plus, mais comme je l'ai dit tout à l'heure, on fait notre bilan carbone, notre bilan eau douce, ça, ça fait tant de tonnes de carbone, tant de mètres cubes d'eau douce. La tonne de carbone l'année dernière, on l'a valorisé à 1000 euros, et le mètre cube d'eau douce, d'eau bleue, à 50 euros. Ça, ça a fait un chiffre. Ce chiffre, on l'a réinvesti en mécénat financier sur les territoires où on avait eu de l'impact. Et donc, on travaille avec... On adore 1% pour la planète, donc on a tout fait au travers du 1% pour la planète. Mais en choisissant nos partenaires, donc les assos qu'on a choisis, on a signé avec elles des baux pour 7 ans. Parce que c'était vachement bien, on a fait ça en 2023, 2023, le 4, 2030,

  • SGz

    on s'arrête...!

  • SG

    On est carrés. C'est carré. Donc, en fait, on s'est engagé en long terme. Et donc, ça, c'est notre partie mécénat financier. Une fois qu'on a fait ça, ça, ça fait un chiffre, un nombre, pardon. Ce nombre, on le divise par le prix moyen du jour hommes. Et ça, ça donne un nombre de jours hommes. Et ce nombre de jours hommes, tous les collaborateurs se le sont répartis et l'ont investi en mécénat de compétences sur les territoires. Donc, on fresque, on fait de la fresque du numérique. On fait des ateliers numériques responsables. Là, on va commencer des ateliers d'adaptation au changement climatique parce qu'on voit que ça va de... D'ailleurs, à chaque fois qu'on fait un schéma de résilience pour une collectivité, on démarre avant l'étude, on fait un atelier d'adaptation au changement climatique pour qu'il s'approprie les éléments de langage, les problématiques et les risques. Parce que sinon, quand on arrive avec nos risques, ils nous regardent avec des grands yeux. Bon, ça, ça existe. Donc là, on fait ça. Et donc, du coup, là, on passe du temps en mécénat de compétences sur les ateliers de l'adaptation au changement climatique.

  • SGz

    Donc, votre lien avec la biodiversité, c'est principalement par, c'est pas une association, c'est une fondation, le 1% Planet

  • SG

    Alors, on fait un peu de... C'est compliqué quand on fait du numérique, le lien avec le vivant. C'est pas simple. D'ailleurs, c'est un des points qui nous a posé le plus de soucis pendant la CEC. C'est comment on recrée du lien avec le vivant. Parce que, bon, une fois qu'on a mis trois brebis pour faire l'éco-pâturage de nos espaces verts et qu'on a fait un diag biodiv. Oui, effectivement, on fait notre miel. OK, et puis on a... Alors, il y a un truc qui nous a bien plu. on a fait un diag biodiversité avec France Nature Environnement, de la parcelle sur laquelle se situe le siège du cabinet. Et on va dérouler un plan d'action sur 10 ans sur ce qu'il faut faire pour l'améliorer. Mais néanmoins, dans notre activité de tous les jours, créer du lien avec le vivant, à part s'en inspirer pour l'organisation de l'entreprise, c'est compliqué. Donc, ce qu'on essaye de faire, c'est d'intégrer du lien avec le vivant dans les projets qu'on emmène pour les collectivités, d'essayer de les sensibiliser sur ces sujets-là. Et notamment, on essaye soit d'imposer, soit d'offrir systématiquement une analyse de cycle de vie de tous les projets qu'on emmène en collectivité sur les 19 critères. Et donc, la biodiv, elle est dedans et on essaye de leur montrer qu'en fonction des choix qu'ils vont réaliser, ça aura un impact ou pas sur la biodiv, sur leur territoire. On n'arrive pas encore trop à pousser cette porte-là, mais je pense qu'on va y arriver.

  • MC

    Sur la partie feuilles de route et les enjeux qui sont liés à un cabinet qui travaille dans le numérique, le côté adaptation est vraiment le côté court terme. gestion du risque, etc. Vous devez aussi travailler sur des sujets d'intelligence artificielle qui sont un petit peu de l'autre côté du spectre, en tout cas c'est mon impression, se dire à la fois je traite sur des sujets court terme et à haut risque, et en même temps je suis dans un monde dans lequel l'intelligence artificielle explose, et donc quel acteur je suis dans ce monde-là, ça me fait un peu penser à l'équivalent de la fast fashion, avec le monde du textile qui essaye de se battre ensemble et de coopérer ensemble pour légiférer sur ce côté fast fashion. J'ai un peu l'impression que ce côté fast fashion est un peu l'équivalent de l'explosion des données, etc. Comment vous adressez ce sujet d'intelligence artificielle ?

  • SG

    Alors déjà, on a la chance de baigner dans ces problématiques-là, nous, depuis très longtemps, puisque un des fondateurs du Comptoir des Signaux, Jean Zeitoun, a été un des précurseurs de l'intelligence artificielle en France au début des années 70. Donc ça ne nous rajeunit pas. Mais globalement, on a toujours baigné dans ces problématiques-là et on utilise de l'intelligence artificielle adaptée à nos métiers, nous, depuis assez longtemps. En fait, la révolution principale de l'IA que l'on vit et qui est vue du citoyen, c'est l'intelligence artificielle générative. C'est celle-là qui pose le plus de problèmes, mais qui aussi peut apporter des solutions. Notre positionnement aujourd'hui sur l'IA, on a la chance d'être reconnu par un certain nombre de collectivités pour les accompagner sur ces problématiques-là. On doit être là, si je fais le relevé des compteurs, des collaborateurs, on doit être à près de 800 élus et agents de collectivités formés à l'IA générative depuis le début de l'année. On a mis en place un cycle de formation et de sensibilisation pour expliquer que, oui, une intelligence artificielle, souveraine, éthique et durable, c'est possible. Et qu'en fait, l'IA, elle doit être utilisée pour maintenir un service public de qualité sur le territoire, dans le respect du territoire. Et c'est sûr qu'effectivement, elle n'est pas là pour générer des photos très jolies où on met la tête d'une personne sur un animal. Ça, ça n'a absolument aucun sens. Par contre, l'IA, elle peut vraiment permettre de garder des services publics performants ou d'améliorer la performance de services publics justement en conservant les agents des collectivités pour leur faire faire des choses à valeur ajoutée et en faisant traiter le tout venant et le volume à une intelligence artificielle. Donc on travaille beaucoup là-dessus, on a des démonstrateurs, on forme, on sensibilise, on accompagne. Nous, on a une approche responsable de l'IA, elle est utilisable. Après, on a bien conscience que c'est la deuxième... enfin. Dans notre vie d'ingénieur télécom, c'est notre deuxième révolution. La première révolution, c'est l'arrivée d'Internet, la création d'Internet au début des années 90, parce que c'est vraiment là que ça a démarré. Et notre deuxième révolution, c'est celle-là. À la limite, j'aurais tendance à dire que le déploiement de la fibre optique, ce n'est pas une révolution. C'est une évolution logique d'une technologie. La fibre optique, ça fait 60 ans qu'on l'utilise, donc ce n'était pas une révolution. L'amener chez tout le monde, c'était peut-être une évolution, mais pas une révolution. Par contre l'IA c'est une révolution, et dans les révolutions il y a toujours des dommages collatéraux. Donc, il faut faire très attention à ce qui se passe.

  • MC

    Est-ce que tu as le sentiment que les acteurs du numérique ou que certains acteurs du numérique en France ont la volonté ou démarrent des sortes de coopérations pour lutter ou pour amener dans le bon sens ce sujet-là plutôt qu'il l'explose dans les mains de tout le monde un peu ?

  • SG

    Sur beaucoup de sujets, il faut faire confiance aux collectivités locales. Elles se sont regroupées en associations. Elles ont créé des opérateurs de services numériques publics. et elle travaille sur ces sujets-là depuis longtemps. Donc aujourd'hui, il y a un vrai mouvement de fond, de collectivités, pour travailler sur ces problématiques-là. L'État a fait aussi des choses très intéressantes, a sorti des guides pratiques, des recommandations, n'a pas encore fait des choix suffisamment stratégiques, notamment en matière de souveraineté, de mon point de vue, mais il travaille quand même sur ces sujets-là. Et puis on a des acteurs de l'open source, du libre. qui travaillent sur ces sujets-là depuis très longtemps, avec lesquels nous on coopère de temps en temps. On n'a jamais travaillé sur un projet client ensemble, mais par contre on a déjà réfléchi ensemble. Donc il y a des gens comme l'Inagora par exemple, desquels on est assez proches, et qui eux sont sur l'open source depuis 25 ans et la souveraineté. Donc est-ce qu'il y a des outils aujourd'hui qui permettent de se prémunir de certaines dérives ? La réponse est oui. Est-ce qu'il y a une prise de conscience ? Alors... Oui, et en plus, il y a une prise de conscience qui est aussi forcée par des éléments budgétaires. C'est-à-dire qu'à partir du moment où on se libère de la contrainte des GAFAM dans une entreprise ou dans une collectivité, on fait des sacrées économies. Par contre, une fois de plus, moi, je pars du principe qu'il faut toujours faire la démonstration par l'exemple. Donc, nous, on l'a fait au cabinet. Enfin, quand moi, j'ai repris le cabinet en 2019, ça a été un des premiers trucs, parce que les associés précédents n'avaient pas de problème avec Google. Moi non plus, tant que je ne l'utilise pas. Donc, globalement, on a fait cette démarche d'avoir un SI souverain, durable. On a cherché des hébergeurs chez qui on peut avoir confiance et qui hébergent dans des data centers à haute exigence environnementale. C'est des sujets qui nous animent. Donc, on a fait cette démarche-là. Et donc, aujourd'hui, on est capable de dire, il y a des solutions. Regardez, nous, on a réussi à le faire. Alors, on a réussi à le faire à notre toute petite échelle de petits cabinets de 10. Donc, est-ce qu'une collectivité dans laquelle il y a 4 500 agents qui gèrent des collèges ou il y a 16 000 collégiens par exemple, est-ce que c'est facile à faire ? La réponse c'est non. Mais il y a des outils pour le faire. Donc c'est faisable. Et de toute façon... Il va falloir le faire, parce que de toute façon, avec la raréfaction des ressources abiotiques et le fait qu'à un moment donné, il va falloir faire des arbitrages sur tel minerai rare, telle terre rare, on va l'utiliser. Est-ce qu'on l'utilisera pour la santé, pour la sécurité civile, ou est-ce qu'on l'utilisera pour continuer de tourner des vidéos de chat ? J'ai bien un avis sur la question.

  • MC

    L'eau même avant, d'ailleurs, pour refroidir les data centers, etc.

  • SG

    Oui, alors, on arrive à mieux gérer ça. C'est-à-dire qu'il y a un vrai travail qui a été fait sur l'utilisation de l'eau dans les DC. Ce n'est pas parfait, mais c'est moins pire qu'il y a une dizaine d'années. Sur le CO2, c'est pareil. Il suffit de regarder le bilan carbone et l'analyse de cycle de vie d'un DC. À partir du moment où on réserve ce data center à des usages qui sont vitaux, il n'y a pas de problème. La CV, elle est bonne. Le problème, c'est quand on stocke les données des vidéos.

  • SGz

    Je ne sais pas si c'est ce que j'allais dire, mais les données, elles sont stockées principalement ailleurs qu'en France ?

  • SG

    Ça dépend, pas les miennes, pas les nôtres. Oui, est-ce qu'il y a beaucoup de données ? Alors, nous, on n'intervient qu'en collectivité. Est-ce qu'il y a beaucoup de données de collectivités qui sont stockées de manière non souveraine ? La réponse est oui, la majorité. Et même quand elles sont stockées dans des hébergeurs qui ont des data centers en France, ces hébergeurs sont des hébergeurs à actionnariat étranger qui tombent sous le cloud act. Donc, aujourd'hui, les données, elles ne sont pas souveraines. Mais est-ce qu'on peut changer ça ? Est-ce qu'il y a des collectivités aujourd'hui qui se... préoccupe de ces problématiques-là et on va voir sortir des DC publics souverains, la réponse est oui.

  • SGz

    Oui, je pense, en effet. Bon, alors, j'accélère un peu le mouvement parce que là, on pourrait parler jusqu'à la fin de la journée. Donc, quand même, quelques questions pour terminer. Question pas forcément très simple, mais si tu avais une baguette magique et que tu pouvais changer avec du jeu économique, qu'est-ce que tu changerais ? Tu nous as déjà donné pas mal de pistes, mais...

  • SG

    Un vrai partage de la valeur et notamment le partage de la valeur utile. C'est-à-dire qu'il y a des... Je pense que la première question qu'un chef d'entreprise devrait se poser, c'est est-ce que son entreprise est utile et est-ce qu'elle est utile au territoire sur lequel il travaille ? Et donc, particulièrement en collectivité, l'une des baguettes magiques, si j'avais une baguette magique, je pense que je modifierais le code de la commande publique pour permettre de faire travailler des entreprises locales et des entreprises qui ont du sens. Et pas forcément les entreprises les moins chères, mais des entreprises qui ont du sens.

  • SGz

    C'est vrai qu'il y a beaucoup d'élus, alors moi je suis un peu élu aussi, mais il y a beaucoup d'élus qui se battent là-dessus. Parce que c'est vrai que c'est un critère qui ne rentre pas du tout en ligne de compte. Et voilà, donc ça, on peut espérer que ça va changer aussi.

  • SG

    Oui, et rentrer du circulaire, c'est fondamental, même dans nos métiers. Il faut vraiment mettre en place une économie circulaire qui tourne. Et la commande publique, c'est un levier énorme pour ça. Donc, oui, ça, je ferai ça.

  • SGz

    OK, et pour terminer, qu'est-ce qui te rend confiant en l'avenir ? L'entrepreneur, en général, il est toujours confiant.

  • SG

    Ça dépend des entrepreneurs. oui je pense que le métier de chef d'entreprise et le rôle de l'entrepreneur, c'est de pérenniser une activité sur un territoire. Moi, c'est ma vision des choses. C'est comme le maillot dans certains sports : le club a plus d'importance que le joueur. Et moi, je reste persuadé que les entreprises doivent toujours nous survivre. Donc, il faut qu'on crée des modèles si elles sont utiles, qu'elles soient encore là. J'ai le sentiment aujourd'hui que... et la CEC, moi, m'a énormément apporté là-dessus. J'ai vu des grandes, des petites. Je me suis dit, en fait, on n'est pas tout seul. Et on n'est pas tout seul et on est légitime. Et j'ai l'impression qu'il y a de plus en plus de chefs d'entreprise qui se disent finalement, on est légitime à intervenir sur ces sujets-là et on a un rôle à jouer. Donc ça, ça me rend un peu confiant. Après, j'ai des nuits compliquées quand même. Mais voilà.

  • MC

    Écoute, Sébastien, merci. C'est sincère, comme on l'aime, simple. Voilà, mais en même temps clair, net. Marianne, tu reviens quand tu veux ! Je veux dire, voilà. Donc, voilà. Et je finis toujours par une citation. Alors là, c'est une citation, attention, accrochez-vous, de Peter Drucker, qui a dit « Il n'y a certainement rien d'aussi inutile que de faire très efficacement ce qui ne devrait pas être fait du tout. » Voilà, vous avez 4 heures. Merci. Et encore une fois, bien sûr.

  • SG

    Merci et à bientôt.

Description

Comptoir des Signaux accompagne exclusivement les acteurs publics sur les enjeux d’aménagement numérique des territoires. En 2023, l’entreprise rejoint la CEC Alpes pour accélérer sa transformation, après un premier virage RSE jugé trop timide.

Son dirigeant Sébastien Godin insiste sur l’urgence à intégrer les enjeux de biodiversité, de souveraineté numérique et de résilience territoriale. Dans cet épisode, il parle d’intelligence artificielle comme levier pour les services publics, à condition d’en maîtriser les dérives. Il plaide pour une commande publique qui valorise les entreprises locales engagées, au-delà du seul critère prix.

Comptoir des Signaux milite pour des systèmes d’information souverains, éthiques et écoconçus. L’exemple de son propre cabinet démontre que des alternatives existent, même à petite échelle.


"La première question qu'un chef d'entreprise devrait se poser, c'est est-ce que son entreprise est utile et est-ce qu'elle est utile au territoire sur lequel il travaille ?"


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • SGz

    Bonjour, bienvenue sur Éco de Territoire, le podcast inspirant de la Convention des Entreprises pour le Climat, qui donne la parole aux acteurs engagés et passionnés qui construisent l'économie régénérative de demain. Je suis Stéphane Gonzalès, alumne de la promotion 2023, et je vous emmène sur les territoires du bassin lyonnais et des Alpes, à la rencontre de dirigeants et de dirigeantes qui contribuent à dessiner les contours d'un avenir durable. Alors aujourd'hui, j'ai dit je, mais je pourrais dire nous, nous avons la chance de vous partager le témoignage du dirigeant d'une belle TPE, de conseil d'ingénierie en aménagement numérique, établi à Groisy et je vous parle du Comptoir des Signaux. Le comptoir des Signaux. Et ce dirigeant, c'est Sébastien Godin, avec qui nous allons échanger sur son engagement vers l'économie dite régénérative. Alors Sébastien, bonjour.

  • SG

    Bonjour.

  • SGz

    Je te propose qu'on se tutoie.

  • SG

    Parfait.

  • SGz

    Et puis en plus, comme je sais que tu es très bavard, à mon avis, ça va être facile de t'enclencher sur les sujets. Et aujourd'hui, on a quand même la chance, c'est un peu un podcast exceptionnel, j'ai un peu la pression d'ailleurs, puisque nous avons la chance d'avoir une experte de choc avec nous, en la présence de Marianne Coudert. Salut Marianne. Salut. Allez, représente-nous qui tu es.

  • MC

    Moi, j'étais et je suis toujours pilote de territoire pour la Convention des Entreprises pour le Climat sur le bassin lyonnais et sur les Alpes, donc depuis le démarrage sur ce projet associatif et depuis 2022 en particulier sur le territoire lyonnais et alpin.

  • SGz

    Voilà, donc dans ce podcast, l'experte c'est Marianne et moi, je vais juste être celui qui anime. Alors Sébastien, revenons au Comptoir des Signaux, qui n'est pas né hier puisque ça fait 35 ans que le Comptoir des Signaux existe, pour apporter une expertise en télécommunication auprès des collectivités et des entités publiques, puisque c'est 100% de vos clients. Et alors, j'ai pris la phrase qui est sur le site, et puis on va débattre de ça : conseil en ingénierie et en aménagement numérique responsable du territoire. Je dis tiens, donc on va parler territoire, on va parler numérique responsable. Donc ce que je te propose, c'est de nous présenter la société.

  • SG

    Merci. Le Comptoir des Signaux, c'est un cabinet d'assistance à maîtrise d'ouvrage. Effectivement, on n'intervient que dans la sphère publique, uniquement dans la sphère publique. Depuis 1988, sa création, il n'y a pas un centime d'argent privé qui est rentré dans nos comptes. On accompagne les grandes collectivités, les services de l'État, les grands hôpitaux, les universités sur toutes les problématiques d'aménagement numérique du territoire, également de commandes publiques et de structuration des réseaux qui interconnectent l'ensemble des sites principaux de ces collectivités.

  • SGz

    D'accord, on parle data center, on parle fibre,on parle de ça

  • SG

    On parle d'essais, on parle beaucoup fibre, on parle aussi pas mal radio, puisqu'on a fait beaucoup d'aménagements radio. Et on parle toujours numérique responsable chez nous. On a la chance d'avoir suivi un parcours NR. Aujourd'hui, on est labellisé numérique responsable niveau 2 auprès de l'agence Lucie. Et on accompagne également les collectivités dans leur labellisation numérique responsable et également sur des thématiques très en vogue actuellement d'intelligence artificielle. On les apprend à mieux ou moins mal utiliser ces technologies qui, vu du numérique responsable, peuvent être vues comme un oxymore.

  • SGz

    Voilà ton parcours avant d'arriver.

  • SG

    Un parcours assez classique, ingénieur télécom en 1994. Il y avait de l'informatique en 1994 ? En 1994, oui.

  • SGz

    Il n'y avait pas Internet ?

  • SG

    Il y avait l'Internet. Forcément, en sortant en 1994, on a fait partie des premiers à avoir une adresse mail. J'ai eu la chance, dès mes premières années, de participer à l'arrivée de l'Internet en France. parce que j'ai travaillé pour quelques grands opérateurs qui se sont installés sur le territoire français à ce moment-là. Donc, est-ce qu'on a amené le diable dans les campagnes ? C'est bien possible. Donc, école d'ingénieurs chez les opérateurs. Je suis parti quelques années travailler en startup pour des startups essentiellement américaines, malheureusement, où j'ai appris quand même plein de choses. Et dès 1997, j'ai fait quelques premières missions pour Le Comptoir des Signaux, notamment sur l'ingénierie et le déploiement de gros réseaux fibres sur des métropoles françaises. Après, je suis donc parti en start-up et début des années 2000, 2003, 2004, j'ai reposé mes valises après être passé par plusieurs startups qui ne sont jamais devenues publiques. Donc, je ne suis pas devenu millionnaire à ce moment-là. J'ai reposé mes valises et j'ai remis un peu du sens dans mon travail. J'ai voulu me reconsacrer à l'intérêt général. Donc, je suis revenu voir le Comptoir des Signaux à cette époque-là. Et j'ai dit, comment moi je peux accompagner, avec ce que j'ai appris pendant une dizaine d'années, comment je peux accompagner les collectivités, les entités publiques ? Et Agnès Huet, présidente du Comptoir à l'époque, m'a ouvert la porte et m'a dit, Sébastien, vous commencez lundi. Et donc, cette histoire s'est plutôt bien terminée, puisque Agnès a pris sa retraite en 2019 en me laissant les clés du cabinet avec les quelques collaborateurs qui étaient là.

  • SGz

    C'est-à-dire les clés du camion, mais...

  • SG

    C'est pas mal.

  • SGz

    Justement, c'est sans transition. Comment toi tu découvres le régénératif ? Qu'est-ce que tu en as pensé la première fois que tu as entendu ce mot ?

  • SG

    Alors, la première fois que j'ai entendu ce mot, c'était Eric Duverger qui l'avait prononcé. J'ai eu la chance de croiser Eric au sommet du Digital à Annecy, ça devait être en mars 2023. Et j'étais avec mon associé principal, Alexandre, et on a écouté Eric intervenir à une tribune. Alors, une tribune dans laquelle il y avait du beau monde, parce qu'il y avait Fabrice Bonnifet qui était juste à côté de lui. Donc l'ambiance était bonne. Il y avait Clara Guaymard, ça c'était moins marrant. Et globalement, on a été voir Eric à la fin et on lui a dit « Et comment on fait, nous, toutes petites TPE haut-savoyarde, d'un peu moins de dix consultants, pour intégrer la Convention des entreprises pour le climat ? » Le premier parcours de la CEC était au trois quarts du parcours, mais il nous a dit « Vous verrez, il y a des choses qui vont démarrer en territoire. » Effectivement, six mois après... C'est CEC Alpes qui sort, le cabinet, quand on a dessiné au premier candidat, on est les premiers. C'est vrai. Les premiers. Je pense que le jour où c'est sorti, le lendemain, on avait déposé notre candidature. Pourquoi ? Parce qu'on avait commencé un peu à en parler en interne. On a un comité de gouvernance, nous, tous les collaborateurs du cabinet participent aux décisions. Et donc, on leur avait dit, quand on est revenu des sommets, on a dit, on a vu un truc super, on veut faire ça, nous. Alors, pourquoi on voulait faire ça ? En 2019-2020, on a tout de suite lancer une stratégie RSE, alors un peu à la papa puisqu'on n'avait jamais mis les mains dedans et numérique responsable. Et honnêtement, ça convenait à toute l'équipe. Moi, ça n'allait pas assez vite. Ça n'allait pas assez vite, ça n'allait pas assez loin. C'était très orienté, effectivement, sur l'humain. Pas assez sur les conséquences de notre business et puis pas de lien avec la biodiversité. Moi, j'ai la chance de vivre dans un petit hameau à Haute-Savoie, au milieu d'une forêt, et de travailler mon potager, ce que ne font peut-être pas tous les dirigeants d'entreprise. Et pour moi, ce qu'on faisait, c'était bien, c'était intéressant, mais on n'allait pas assez loin. Et j'ai vu dans l'approche CEC quelque chose qui allait nous permettre d'accélérer la transformation de l'entreprise. Et donc, du coup, c'est sorti octobre 2023, l'appel à candidature. On a dû répondre deux jours après, tout le monde était OK pour répondre. Et donc, ça nous parlait bien.

  • SGz

    Comment tu la vis cette CEC en particulier ?

  • SG

    Pas bien du tout en fait. Premier week-end de CEC, je suis rentré pendant 15 jours, j'étais à Social, je n'ai parlé à personne. J'ai annulé d'ailleurs la quasi-totalité de mes rendez-vous clients parce que je ne voulais voir personne. Donc en famille, c'était super. Et j'étais arrivé à une conclusion très saine, c'était qu'il fallait fermer la boîte pour faire des choses utiles. Deuxième week-end de CEC, je suis revenu moins associal, mais j'avais toujours dans l'idée de fermer la boîte. Et on a fait un truc bien, je pense, et je remercie mes collaborateurs pour l'avoir fait. Ils nous ont dit ce que vous avez vécu pendant deux jours, il faut le partager. Il faut commencer à embarquer. On réunit nos parties prenantes privées par contre, les plus proches, les cabinets avec lesquels on bossait. Pendant une journée, vous nous sortez tout ce que vous avez vu pendant deux week-end. Et les conclusions à laquelle vous en êtes arrivé. C'est sûr que quand on se met autour de la table avec des cabinets avec lesquels on travaille depuis 25 ans et qu'on leur dit, c'était bien ce bout de chemin qu'on a fait ensemble. Mais en fait, on va s'arrêter là, parce que globalement, ce qu'on fait, ça n'a pas de sens, on ne trouve pas le sens et ça ne va pas assez loin. Et globalement, à la question, est-ce que le cabinet est utile à la société ? On avait l'impression que non. Et bien, ils nous ont aidés en fait. Et ils ont réussi à nous faire prendre conscience au fil du temps, les collaborateurs qui n'avaient pas fait la CEC et nos partenaires, que finalement, ben si. On avait un rôle à jouer, qu'on pouvait être utile, notamment en essayant de dynamiser un écosystème local sur ces sujets-là. Et en fait, ça nous a permis déjà de mieux vivre la fin de l'année 2023. Ça s'est mieux passé. Et surtout, ça nous a permis de construire une feuille de route qui a été validée par tous les collaborateurs du cabinet et qu'on a fait relire aussi à nos principales parties prenantes privées en leur disant voilà, on va faire ça, vous en pensez quoi ? Est-ce que ça vous parle ? Puisque l'idée qu'on avait dès le départ, après le deuxième week-end, c'est de se dire, ce qu'on va faire pour nous, nous on est tout petits. Ce qu'on va faire pour nous, il faut que ça serve à d'autres et il faut qu'on essaye d'embarquer nos parties prenantes privées sur ces sujets-là et faire que finalement on ne soit pas les seuls à basculer dans le régénératif. Donc on a essayé de les embarquer le plus tôt possible. Et je pense que si on n'avait pas réussi à ce qu'elles nous disent, si en fait c'est bien votre truc, il y a une idée, vous allez plus loin. Je pense qu'effectivement, on aurait certainement jeté l'éponge. On pense qu'on n'est pas bête. On a fait deux, trois trucs dans notre vie et on s'est tous dit, si on ne fait plus ça, on saura faire autre chose. Mais du coup, on n'a pas fermé.

  • SGz

    Et concrètement, vous avez fait comment ?

  • SG

    Pour les embarquer ? On les a mis dans une salle pendant une journée et on leur a fait vivre en une journée ce qu'on avait vécu en deux week-end. Ça, c'est super bien passé ! Derrière, on a pris, deux mois après, on a repris une journée complète qu'avec les collaborateurs du cabinet. On sortait de la session 3. Et pareil, on leur a fait revivre un peu ce qu'on avait vécu. vécues pendant la session 3 et on les a vraiment, on les a fait travailler avec nous. Ça s'est plutôt bien passé. Et du coup, ce qui est ressorti de là, c'est qu'on s'est dit, il faut qu'on mette en place des événements avec toutes nos parties prenantes, publiques et privées, pour essayer de les embarquer. Donc, mars de l'année dernière, on a fait notre première journée partie prenante sur le thème des limites planétaires et de la résilience territoriale. Donc, on a fait intervenir sur les limites planétaires un cabinet qui a fait la CEC qui s'appelle InnovRH qui nous... nous accompagne sur notre RSE depuis 4 ans maintenant, et sur les limites planétaires, on a fait intervenir quelqu'un qui du coup maintenant est dans l'écosystème du cabinet et travaille avec nous sur tous nos projets de résilience, c'est Ilian Moundib, qui a intervenu également à la CEC, mais on a eu la primeur de le faire intervenir avant, et du coup maintenant Ilian bosse avec nous sur tous les schémas de résilience territoriale sur lesquels on travaille, puisqu'on a la chance d'avoir été retenu par un certain nombre de collectivités sur ces problématiques de schéma de résilience. Donc, on a mis tout le monde dans la salle. Au début, on s'est dit, bon, on va peut-être avoir 15, 20 parties prenantes, publics, privés qui viennent. On était une cinquantaine dans la salle. Il y avait peu d'élus, il y avait beaucoup d'agents de collectivité, des DG, des DGS, des DGAP, donc au bon niveau. Et là, on a parlé limites planétaires, résilience, on a parlé feuilles de route, on a parlé régénératif, on les a perdus, très clairement, sur ces sujets-là. Mais, ça a plutôt bien fonctionné parce que quand on a remis une pièce en disant dans six mois, on refait une demi-journée partie prenante sur des problèmes plutôt de souveraineté numérique, tout le monde est venu. Là, on en a fait une au mois de mars sur l'IA et l'impact de l'IA sur la souveraineté, la résilience des territoires. On ne l'a fait qu'en Ile-de-France, donc avec nos PP Ile-de-France et ils sont venus. Et là, on a une prochaine journée partie prenante au mois de juin dans laquelle on invite toutes nos parties prenantes. Privées ?

  • SGz

    privées ? Est-ce que ça marche plus bien que le public ?

  • SG

    On n'invite que les parties prenantes privées qu'on aime bien. On est assez sélectif. Dans les parties prenantes privées qu'on a invitées, on invite les collaborateurs des cabinets, les dirigeants des cabinets avec lesquels on travaille tous les jours. On invite aussi des parties prenantes avec lesquelles on intervient sur certains dossiers. Mais par contre, on n'invite pas les parties prenantes qui sont, par exemple, les opérateurs télécom ou les intégrateurs, peut-être parce qu'on considère qu'ils sont du côté obscur.

  • SGz

    Ils ne sont pas assez matures...?

  • SG

    Ils ne le seront jamais.

  • SGz

    Ils sont trop loin.

  • SG

    Ils sont trop loin et leur business model fait que c'est incompatible avec un business model régénératif. Et pourquoi on invite ces PP-là ? Parce qu'on a envie de les convaincre de faire comme nous. Et d'ailleurs, pour qu'ils puissent faire comme nous, tout ce qu'on a développé comme outil pour nous accompagner, on leur met à disposition.

  • SGz

    Bref. C'est la vraie coopération, en fait.

  • SG

    Voilà. C'est-à-dire que nous, on fait vraiment la différence entre la collaboration et la coopération. La collaboration, chez nous, c'est quand on collabore avec un cabinet, c'est pour que ça nous apporte aux deux. Et la coopération, c'est quand ça apporte au territoire. Et donc, l'idée, c'est de vraiment monter des coopérations qui fait que finalement, on est assez désintéressé, sauf qu'on vit sur un territoire. Et donc, ces coopérations, elles vont apporter au territoire. Ça a l'air de marcher un peu.

  • MC

    Pour revenir sur la feuille de route, il y a un aspect qui est assez important dans votre feuille de route, qui est le sujet de l'adaptation, qui est un sujet qu'on a aussi, même au sein de la CEC, plus de mal à aborder, parce qu'il y a plein de sujets à aborder dans l'enjeu régénératif. Et l'adaptation, évidemment, c'est le sujet d'Ilian Moundib aussi. Dans le numérique responsable, il y a cette partie-là. Et j'imagine que, évidemment, ça fait des années que vous travaillez sur la résilience des systèmes et des réseaux. Mais qu'est-ce que tu ressens qui change aujourd'hui dans le contexte actuel, avec les changements qui arrivent sur cet aspect-là ? Est-ce que la force publique a plus conscience de nos fragilités sur cet aspect-là ? Ou est-ce qu'ils sont encore loin des sujets ?

  • SG

    Côté agents, la réponse est oui. C'est-à-dire qu'à un bon niveau en collectivité, on a des gens qui, déjà qui sont intéressés à tous ces sujets-là, qui ont été sensibilisés, avec lesquels on discute régulièrement. On n'est, nous, qu'une petite pierre dans l'édifice, mais on sent qu'il y a une vraie prise de conscience. Du côté de nos élus, c'est beaucoup plus compliqué. Parce qu'ils doivent se projeter sur le long terme sur ces problématiques-là, même si on essaie quand même d'expliquer à tout le monde que des crises systémiques, on va en vivre à court terme. on verra. Mais, ils ont quand même une problématique de fin de mandat. Donc, globalement, c'est très compliqué pour eux d'intégrer ces problématiques-là dans leur approche. Typiquement, je prends un exemple tout bête. Sur le numérique aujourd'hui, la problématique principale d'un élu à une échelle départementale, c'est de s'assurer que tout le monde ait la fibre. Ce n'est pas de s'assurer que quand il y aura une crise systémique, finalement, elle continuera de fonctionner. Il faut d'abord apporter la fibre à tout le monde parce que c'est important que chaque entreprise, chaque citoyen du territoire puisse avoir accès à un accès Internet à très haut débit. À beaucoup trop très haut débit, d'ailleurs, entre nous. C'est-à-dire que globalement, on apporte des débits qui sont sans commune mesure par rapport au besoin. On devrait avoir, c'est un peu dur comme approche, mais on devrait limiter la bande passante. On n'a pas besoin de tout ça. Et donc, est-ce qu'il y a une prise de conscience ? La réponse est oui. Est-ce qu'il y a des réflexions approfondies sur le fait de se dire : on va peut-être avoir sur un territoire pendant qu'un jour, plus d'électricité. Et qu'est-ce qui va se passer ? Eh bien, il y a des entités publiques qui réfléchissent vraiment à ces problématiques-là. On peut prendre tous les SDIS de France et de Navarre, eux, ils ont conscience. Eux, ils savent ce qui va se passer.

  • MC

    Les SDIS : les pompiers, pour ceux qui sont moins habitués !

  • SG

    Les pompiers, ils savent. C'est-à-dire que pour discuter résilience territoriale, c'est les meilleurs interlocuteurs. Eux, ils savent exactement ce qui va se passer. Et surtout, eux, ils savent que quand ça va se passer, ils ne pourront pas résoudre tous les problèmes. Donc, ils sensibilisent énormément les collectivités au niveau des plans d'adaptation, justement pour dire qu'il faut diffuser la compétence, il faut diffuser le savoir pour que les gens puissent, et les entreprises, et les citoyens, quand il y aura un problème, ils aient des bons réflexes et qu'on ne vive pas effectivement ce que nos amis espagnols ont vécu à Valence. Parce qu'on va le vivre, mais il faudrait juste qu'on arrive à mieux réagir.

  • MC

    Et est-ce que tu te confrontes pas un petit peu à ce côté-là ? Tu mets la fibre d'un côté et la résilience de l'autre. Il y a un projet qui peut paraître plus enthousiasmant, la 5G, etc. Et puis, de l'autre côté, toi, tu arrives un peu avec ton bâton de pèlerin en disant, attention, quand on va avoir des coupures, il va falloir prévoir ci ou ça. Est-ce que tu as le sentiment, parfois, d'être un peu considéré Comptoir des Signaux, ou toi en particulier, je ne sais pas, comme, ouais, mais bon, cela... Enfin, quelqu'un qui va moins vers l'avant, qui est plus dans la précaution, le risque, l'évocation du risque, plutôt que l'évocation de quelque chose d'enthousiasmant, qui pourrait être enthousiasmant dans la culture connue aujourd'hui ?

  • SG

    Oui. Oui, c'est difficile. On peut avoir des discussions dans lesquelles on peut être vu comme pas avant-gardiste sur ces sujets-là. Néanmoins, on a la chance d'avoir des collectivités qui nous font confiance depuis longtemps, des collectivités pour lesquelles on a toujours eu des positions assez avant-gardistes. Je n'aime pas trop le terme de visionnaire. mais on est consultant, donc pour être consultant, il faut de l'ego, l'humilité, on n'en a pas toujours. Mais globalement, je pense qu'on a régulièrement eu sur des sujets raison avant tout le monde. On a mis en garde de nombreuses collectivités sur certaines problématiques technologiques et d'organisation qui aujourd'hui montrent que finalement, on n'avait pas tort. Donc aujourd'hui, on est écouté. Quand on présente un schéma de résilience télécom à une collectivité, en lui disant c'est bien, vous avez fibré tout le territoire. Oui mais, l'architecture, l'ingénierie que vous avez mis en place, le jour où il va y avoir tel aléa climatique, et il n'y en aura pas qu'un, parce que de toute façon, ce sera systémique. Donc, de toute façon, la composition, quand l'aléa va se produire, il y en a d'autres qui vont se produire en même temps, ça va être un château de cartes. Voilà comment ça va s'écrouler. Eh bien, il faut se préparer. Et là, je reparle des pompiers, parce qu'eux, ils sont incroyables. C'est-à-dire que tout le monde voit les pompiers comme les soldats du feu. Mais en fait, vous n'imaginez pas le niveau de compétences sur, par exemple, en télécommunication que peuvent avoir ces gens-là. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, à la direction réseau d'un SDIS, vous avez des gens qui ont le même niveau de compétence que nous. Pour moi, ce sont des experts en télécom. Et quand ils montent un réseau, la première question qu'ils se posent, c'est si pendant 15 jours, je n'ai pas d'électricité sur un territoire, comment je fais pour communiquer et assurer mes services de sécurité civile ? En fait, nous, on s'est toujours posé ces questions-là. Donc, on a toujours intégré dans nos ingénieries et dans nos préconisations ces éléments-là. Il y a 10 ans, 15 ans, quand on en parlait, on était les fous du labo. C'est-à-dire que globalement, tout le monde nous regardait en disant « Oui, mais ok, ça c'est pour apporter de la qualité de service aux entreprises. » Ben non, c'est juste fait pour que le territoire continue de fonctionner. Et là, aujourd'hui, on voit que quand on commence à mettre ça dans des cahiers des charges, on n'a plus de questions. C'est-à-dire qu'on le voit, là, on a écrit un cahier des charges d'une grosse délégation de services publics sur l'Ile-de-France qui concerne en gros toute la petite et la moyenne couronne parisienne. D'entrée de jeu dans le cahier des charges, on parle de résilience territoriale, on parle de réseau support de cette résilience territoriale. On parle de coopération, on parle de montée en compétence des territoires. Et en fait, quand on a déroulé ça, qu'on a présenté ça et aux élus et à la direction générale de ce syndicat, en fait, on ne nous a pas pris pour des fous. C'est-à-dire que le travail d'acculturation avait été fait. Et là, on vient de finir un schéma de résilience territoriale pour eux. Et en fait, ils s'aperçoivent que oui, il faut bien penser à tout ça. Et quand on aura une crue massive de la Seine, on a de grande chance que la Marne fasse pareil. Et que globalement, toutes ces infrastructures de télécommunications, communications, data centers, locaux techniques, câbles, qui sont dans ces environnements-là, elles vont fonctionner un peu moins bien. Et qu'il va quand même falloir assurer les services de sécurité civile sur le territoire. Donc, honnêtement, il y a dix ans, je ne t'aurais pas répondu de manière aussi positive. Après, c'est comme sur toutes les problématiques environnementales, c'est toujours les problématiques de fin du mois et fin du monde. Pour une collectivité, c'est fin du mandat et fin du monde. Donc, c'est compliqué.

  • SGz

    C'est un élu et pour un entrepreneur. entrepreneurs, c'est pas... Si elle est la branche sur laquelle on est, est-ce que toi, aujourd'hui, tu t'empêches des choses, des marchés que tu ne prends plus, est-ce qu'il y a des territoires que tu ne veux plus ?

  • SG

    Clairement, il y a des appels d'offres sur lesquels on ne répond plus. C'est-à-dire que, alors, nous, on fait, depuis plusieurs années, on a toujours fait notre bilan carbone, scope 1, scope 2, scope 3. Maintenant, on essaie de le faire sur les neuf limites planétaires. Bon courage, parce qu'on manque de littérature scientifique pour le faire, mais on arrive à le faire quand même sur certaines. Et donc, comme on a pris des engagements très forts de réduction ... carbone et O2, on est vite arrivé à la conclusion qu'il y avait des missions qu'on ne pouvait plus porter. Donc aujourd'hui, il y a des A.O., parce que nous, on ne fonctionne que sur des appels d'offres publiques, il y a des appels d'offres auxquels on ne répond plus, soit parce qu'ils auraient un impact sur nos bilans, et donc ils ne seraient pas compatibles avec nos engagements, soit parce que ce qu'on voit dans le cahier des charges de l'appel d'offres n'est pas aligné avec ce qu'on pense être bien. Et donc, dans ce cas-là, on ne répond pas à l'appel d'offres, mais par contre, on fait quand même une petite note à la collectivité en disant qu'on a bien bien pris connaissance de leur cahier des charges, on ne répondra pas à ce cahier des charges et on explique les raisons pour lesquelles on ne répond pas. C'est peut-être une bouteille à la mer, ça sert pas grand-chose. Je sais qu'il y a une chose à laquelle ça sert, c'est que pour fédérer et embarquer l'équipe, ça, c'est génial.

  • SGz

    C'était ma question, j'allais dire à l'inverse. Est-ce qu'un collaborateur, ça ne le fait pas paniquer ?

  • SG

    Est-ce que ça en a un inquiété certain ? La réponse est oui. Est-ce que j'ai la chance de travailler avec une équipe formidable ? La réponse est oui aussi. C'est-à-dire que globalement, ils n'étaient pas tous sensibilisés sur ces sujets-là. Ils ont embarqué. Ils sont quasiment tous fresqueurs climat, fresqueurs numériques. Quand on fait l'évaluation des compétences et de la volonté d'évolution des compétences pour les années qui viennent, ils ont tous coché la case "monter en compétence sur les problématiques de résilience, sur les problématiques environnementales". Ils se sont tous intéressés à ça. Donc ça, c'est assez incroyable. Après, est-ce que de temps en temps, ça ne doit pas aller travailler de se dire, mais où est-ce qu'ils nous emmènent ? Est-ce qu'il n'y a pas un risque ? Nous, on a la chance d'avoir une gouvernance qui est complètement partagée. On prend toutes les décisions ensemble. Après j'ai toujours tendance à dire que quand on pèse 110 kilos en général les autres écoutent la table mais globalement ça marche. Après oui, moi j'aimerais aller plus vite mais ils ont raison de temps en temps il faut freiner un peu est-ce qu'on prend des risques et est-ce qu'on a mis notre business model à risque à partir du moment où on commence à renoncer forcément il y a une part du business qui était sympa, qui était super rentable et qui faisait que ça ça roulait tout seul. Celui-là, on ne le fait plus. Et forcément, ça se voit dans les comptes.

  • SGz

    Vous avez fait un travail aussi en interne sur finalement de quoi j'ai besoin, au rapport à l'argent.

  • SG

    Oui, on a réussi à tous se questionner à notre rapport à l'argent. Et on a réussi à faire définir à chaque collaborateur, sans jugement aucun, de combien il avait besoin pour vivre tous les mois et à partir de combien ce serait déraisonnable qu'il gagne tous les mois. Parce qu'en fait, pour le Comptoir, c'est une entreprise étendue. On est tous indépendants. Néanmoins, on est tous associés du cabinet. Et en fait, pour faire simple, le cabinet rémunère les collaborateurs à due proportion de la valeur ajoutée qu'ils génèrent. Donc en gros, s'ils génèrent une somme d'argent X en facturation, ils récupèrent 80% de cette somme d'argent pour leur entreprise. Et ce qu'on a réussi à mettre en place, c'est que chacun a défini son plancher de rémunération. Et ce plancher, en fait, il est garanti par les copains. C'est-à-dire qu'on se débrouille avec ces 20% qu'on laisse dans le Comptoir. Ça permet de garantir le plancher à tout le monde et à tous les nouveaux qui arrivent. Ça, c'est important. Et puis, quand on dépasse le plafond, tout ce qui dépasse le plafond de rémunération... permet de garantir le plancher à nos petits camarades, mais surtout nous permet d'investir dans des projets en lien avec la biodiversité. On fait beaucoup de mécénat financier. On a fait un peu moins de 3% de notre chiffre d'affaires en mécénat financier l'année dernière. On avait fait 2-4 l'année d'avant. J'espère qu'on fera plus de 3 cette année. Et ça, on l'a fait malgré le fait que le chiffre d'affaires par collaborateur a baissé. Parce que forcément, quand on refuse des missions lucratives, le CA, il baisse. C'est automatique. et puis une boîte de conseil c'est pas compliqué compliqué, ça vend du jus de cerveau, donc ça vend du temps homme. Donc quand on travaille pour une collectivité, on est payé, quand on ne travaille plus pour elle, on n'est pas payé.

  • SGz

    Vous avez mis en place du mécénat de compétences, plus plus plus quand même !

  • SG

    Je ne sais pas, plus plus, non, moi j'aimerais faire encore plus, mais comme je l'ai dit tout à l'heure, on fait notre bilan carbone, notre bilan eau douce, ça, ça fait tant de tonnes de carbone, tant de mètres cubes d'eau douce. La tonne de carbone l'année dernière, on l'a valorisé à 1000 euros, et le mètre cube d'eau douce, d'eau bleue, à 50 euros. Ça, ça a fait un chiffre. Ce chiffre, on l'a réinvesti en mécénat financier sur les territoires où on avait eu de l'impact. Et donc, on travaille avec... On adore 1% pour la planète, donc on a tout fait au travers du 1% pour la planète. Mais en choisissant nos partenaires, donc les assos qu'on a choisis, on a signé avec elles des baux pour 7 ans. Parce que c'était vachement bien, on a fait ça en 2023, 2023, le 4, 2030,

  • SGz

    on s'arrête...!

  • SG

    On est carrés. C'est carré. Donc, en fait, on s'est engagé en long terme. Et donc, ça, c'est notre partie mécénat financier. Une fois qu'on a fait ça, ça, ça fait un chiffre, un nombre, pardon. Ce nombre, on le divise par le prix moyen du jour hommes. Et ça, ça donne un nombre de jours hommes. Et ce nombre de jours hommes, tous les collaborateurs se le sont répartis et l'ont investi en mécénat de compétences sur les territoires. Donc, on fresque, on fait de la fresque du numérique. On fait des ateliers numériques responsables. Là, on va commencer des ateliers d'adaptation au changement climatique parce qu'on voit que ça va de... D'ailleurs, à chaque fois qu'on fait un schéma de résilience pour une collectivité, on démarre avant l'étude, on fait un atelier d'adaptation au changement climatique pour qu'il s'approprie les éléments de langage, les problématiques et les risques. Parce que sinon, quand on arrive avec nos risques, ils nous regardent avec des grands yeux. Bon, ça, ça existe. Donc là, on fait ça. Et donc, du coup, là, on passe du temps en mécénat de compétences sur les ateliers de l'adaptation au changement climatique.

  • SGz

    Donc, votre lien avec la biodiversité, c'est principalement par, c'est pas une association, c'est une fondation, le 1% Planet

  • SG

    Alors, on fait un peu de... C'est compliqué quand on fait du numérique, le lien avec le vivant. C'est pas simple. D'ailleurs, c'est un des points qui nous a posé le plus de soucis pendant la CEC. C'est comment on recrée du lien avec le vivant. Parce que, bon, une fois qu'on a mis trois brebis pour faire l'éco-pâturage de nos espaces verts et qu'on a fait un diag biodiv. Oui, effectivement, on fait notre miel. OK, et puis on a... Alors, il y a un truc qui nous a bien plu. on a fait un diag biodiversité avec France Nature Environnement, de la parcelle sur laquelle se situe le siège du cabinet. Et on va dérouler un plan d'action sur 10 ans sur ce qu'il faut faire pour l'améliorer. Mais néanmoins, dans notre activité de tous les jours, créer du lien avec le vivant, à part s'en inspirer pour l'organisation de l'entreprise, c'est compliqué. Donc, ce qu'on essaye de faire, c'est d'intégrer du lien avec le vivant dans les projets qu'on emmène pour les collectivités, d'essayer de les sensibiliser sur ces sujets-là. Et notamment, on essaye soit d'imposer, soit d'offrir systématiquement une analyse de cycle de vie de tous les projets qu'on emmène en collectivité sur les 19 critères. Et donc, la biodiv, elle est dedans et on essaye de leur montrer qu'en fonction des choix qu'ils vont réaliser, ça aura un impact ou pas sur la biodiv, sur leur territoire. On n'arrive pas encore trop à pousser cette porte-là, mais je pense qu'on va y arriver.

  • MC

    Sur la partie feuilles de route et les enjeux qui sont liés à un cabinet qui travaille dans le numérique, le côté adaptation est vraiment le côté court terme. gestion du risque, etc. Vous devez aussi travailler sur des sujets d'intelligence artificielle qui sont un petit peu de l'autre côté du spectre, en tout cas c'est mon impression, se dire à la fois je traite sur des sujets court terme et à haut risque, et en même temps je suis dans un monde dans lequel l'intelligence artificielle explose, et donc quel acteur je suis dans ce monde-là, ça me fait un peu penser à l'équivalent de la fast fashion, avec le monde du textile qui essaye de se battre ensemble et de coopérer ensemble pour légiférer sur ce côté fast fashion. J'ai un peu l'impression que ce côté fast fashion est un peu l'équivalent de l'explosion des données, etc. Comment vous adressez ce sujet d'intelligence artificielle ?

  • SG

    Alors déjà, on a la chance de baigner dans ces problématiques-là, nous, depuis très longtemps, puisque un des fondateurs du Comptoir des Signaux, Jean Zeitoun, a été un des précurseurs de l'intelligence artificielle en France au début des années 70. Donc ça ne nous rajeunit pas. Mais globalement, on a toujours baigné dans ces problématiques-là et on utilise de l'intelligence artificielle adaptée à nos métiers, nous, depuis assez longtemps. En fait, la révolution principale de l'IA que l'on vit et qui est vue du citoyen, c'est l'intelligence artificielle générative. C'est celle-là qui pose le plus de problèmes, mais qui aussi peut apporter des solutions. Notre positionnement aujourd'hui sur l'IA, on a la chance d'être reconnu par un certain nombre de collectivités pour les accompagner sur ces problématiques-là. On doit être là, si je fais le relevé des compteurs, des collaborateurs, on doit être à près de 800 élus et agents de collectivités formés à l'IA générative depuis le début de l'année. On a mis en place un cycle de formation et de sensibilisation pour expliquer que, oui, une intelligence artificielle, souveraine, éthique et durable, c'est possible. Et qu'en fait, l'IA, elle doit être utilisée pour maintenir un service public de qualité sur le territoire, dans le respect du territoire. Et c'est sûr qu'effectivement, elle n'est pas là pour générer des photos très jolies où on met la tête d'une personne sur un animal. Ça, ça n'a absolument aucun sens. Par contre, l'IA, elle peut vraiment permettre de garder des services publics performants ou d'améliorer la performance de services publics justement en conservant les agents des collectivités pour leur faire faire des choses à valeur ajoutée et en faisant traiter le tout venant et le volume à une intelligence artificielle. Donc on travaille beaucoup là-dessus, on a des démonstrateurs, on forme, on sensibilise, on accompagne. Nous, on a une approche responsable de l'IA, elle est utilisable. Après, on a bien conscience que c'est la deuxième... enfin. Dans notre vie d'ingénieur télécom, c'est notre deuxième révolution. La première révolution, c'est l'arrivée d'Internet, la création d'Internet au début des années 90, parce que c'est vraiment là que ça a démarré. Et notre deuxième révolution, c'est celle-là. À la limite, j'aurais tendance à dire que le déploiement de la fibre optique, ce n'est pas une révolution. C'est une évolution logique d'une technologie. La fibre optique, ça fait 60 ans qu'on l'utilise, donc ce n'était pas une révolution. L'amener chez tout le monde, c'était peut-être une évolution, mais pas une révolution. Par contre l'IA c'est une révolution, et dans les révolutions il y a toujours des dommages collatéraux. Donc, il faut faire très attention à ce qui se passe.

  • MC

    Est-ce que tu as le sentiment que les acteurs du numérique ou que certains acteurs du numérique en France ont la volonté ou démarrent des sortes de coopérations pour lutter ou pour amener dans le bon sens ce sujet-là plutôt qu'il l'explose dans les mains de tout le monde un peu ?

  • SG

    Sur beaucoup de sujets, il faut faire confiance aux collectivités locales. Elles se sont regroupées en associations. Elles ont créé des opérateurs de services numériques publics. et elle travaille sur ces sujets-là depuis longtemps. Donc aujourd'hui, il y a un vrai mouvement de fond, de collectivités, pour travailler sur ces problématiques-là. L'État a fait aussi des choses très intéressantes, a sorti des guides pratiques, des recommandations, n'a pas encore fait des choix suffisamment stratégiques, notamment en matière de souveraineté, de mon point de vue, mais il travaille quand même sur ces sujets-là. Et puis on a des acteurs de l'open source, du libre. qui travaillent sur ces sujets-là depuis très longtemps, avec lesquels nous on coopère de temps en temps. On n'a jamais travaillé sur un projet client ensemble, mais par contre on a déjà réfléchi ensemble. Donc il y a des gens comme l'Inagora par exemple, desquels on est assez proches, et qui eux sont sur l'open source depuis 25 ans et la souveraineté. Donc est-ce qu'il y a des outils aujourd'hui qui permettent de se prémunir de certaines dérives ? La réponse est oui. Est-ce qu'il y a une prise de conscience ? Alors... Oui, et en plus, il y a une prise de conscience qui est aussi forcée par des éléments budgétaires. C'est-à-dire qu'à partir du moment où on se libère de la contrainte des GAFAM dans une entreprise ou dans une collectivité, on fait des sacrées économies. Par contre, une fois de plus, moi, je pars du principe qu'il faut toujours faire la démonstration par l'exemple. Donc, nous, on l'a fait au cabinet. Enfin, quand moi, j'ai repris le cabinet en 2019, ça a été un des premiers trucs, parce que les associés précédents n'avaient pas de problème avec Google. Moi non plus, tant que je ne l'utilise pas. Donc, globalement, on a fait cette démarche d'avoir un SI souverain, durable. On a cherché des hébergeurs chez qui on peut avoir confiance et qui hébergent dans des data centers à haute exigence environnementale. C'est des sujets qui nous animent. Donc, on a fait cette démarche-là. Et donc, aujourd'hui, on est capable de dire, il y a des solutions. Regardez, nous, on a réussi à le faire. Alors, on a réussi à le faire à notre toute petite échelle de petits cabinets de 10. Donc, est-ce qu'une collectivité dans laquelle il y a 4 500 agents qui gèrent des collèges ou il y a 16 000 collégiens par exemple, est-ce que c'est facile à faire ? La réponse c'est non. Mais il y a des outils pour le faire. Donc c'est faisable. Et de toute façon... Il va falloir le faire, parce que de toute façon, avec la raréfaction des ressources abiotiques et le fait qu'à un moment donné, il va falloir faire des arbitrages sur tel minerai rare, telle terre rare, on va l'utiliser. Est-ce qu'on l'utilisera pour la santé, pour la sécurité civile, ou est-ce qu'on l'utilisera pour continuer de tourner des vidéos de chat ? J'ai bien un avis sur la question.

  • MC

    L'eau même avant, d'ailleurs, pour refroidir les data centers, etc.

  • SG

    Oui, alors, on arrive à mieux gérer ça. C'est-à-dire qu'il y a un vrai travail qui a été fait sur l'utilisation de l'eau dans les DC. Ce n'est pas parfait, mais c'est moins pire qu'il y a une dizaine d'années. Sur le CO2, c'est pareil. Il suffit de regarder le bilan carbone et l'analyse de cycle de vie d'un DC. À partir du moment où on réserve ce data center à des usages qui sont vitaux, il n'y a pas de problème. La CV, elle est bonne. Le problème, c'est quand on stocke les données des vidéos.

  • SGz

    Je ne sais pas si c'est ce que j'allais dire, mais les données, elles sont stockées principalement ailleurs qu'en France ?

  • SG

    Ça dépend, pas les miennes, pas les nôtres. Oui, est-ce qu'il y a beaucoup de données ? Alors, nous, on n'intervient qu'en collectivité. Est-ce qu'il y a beaucoup de données de collectivités qui sont stockées de manière non souveraine ? La réponse est oui, la majorité. Et même quand elles sont stockées dans des hébergeurs qui ont des data centers en France, ces hébergeurs sont des hébergeurs à actionnariat étranger qui tombent sous le cloud act. Donc, aujourd'hui, les données, elles ne sont pas souveraines. Mais est-ce qu'on peut changer ça ? Est-ce qu'il y a des collectivités aujourd'hui qui se... préoccupe de ces problématiques-là et on va voir sortir des DC publics souverains, la réponse est oui.

  • SGz

    Oui, je pense, en effet. Bon, alors, j'accélère un peu le mouvement parce que là, on pourrait parler jusqu'à la fin de la journée. Donc, quand même, quelques questions pour terminer. Question pas forcément très simple, mais si tu avais une baguette magique et que tu pouvais changer avec du jeu économique, qu'est-ce que tu changerais ? Tu nous as déjà donné pas mal de pistes, mais...

  • SG

    Un vrai partage de la valeur et notamment le partage de la valeur utile. C'est-à-dire qu'il y a des... Je pense que la première question qu'un chef d'entreprise devrait se poser, c'est est-ce que son entreprise est utile et est-ce qu'elle est utile au territoire sur lequel il travaille ? Et donc, particulièrement en collectivité, l'une des baguettes magiques, si j'avais une baguette magique, je pense que je modifierais le code de la commande publique pour permettre de faire travailler des entreprises locales et des entreprises qui ont du sens. Et pas forcément les entreprises les moins chères, mais des entreprises qui ont du sens.

  • SGz

    C'est vrai qu'il y a beaucoup d'élus, alors moi je suis un peu élu aussi, mais il y a beaucoup d'élus qui se battent là-dessus. Parce que c'est vrai que c'est un critère qui ne rentre pas du tout en ligne de compte. Et voilà, donc ça, on peut espérer que ça va changer aussi.

  • SG

    Oui, et rentrer du circulaire, c'est fondamental, même dans nos métiers. Il faut vraiment mettre en place une économie circulaire qui tourne. Et la commande publique, c'est un levier énorme pour ça. Donc, oui, ça, je ferai ça.

  • SGz

    OK, et pour terminer, qu'est-ce qui te rend confiant en l'avenir ? L'entrepreneur, en général, il est toujours confiant.

  • SG

    Ça dépend des entrepreneurs. oui je pense que le métier de chef d'entreprise et le rôle de l'entrepreneur, c'est de pérenniser une activité sur un territoire. Moi, c'est ma vision des choses. C'est comme le maillot dans certains sports : le club a plus d'importance que le joueur. Et moi, je reste persuadé que les entreprises doivent toujours nous survivre. Donc, il faut qu'on crée des modèles si elles sont utiles, qu'elles soient encore là. J'ai le sentiment aujourd'hui que... et la CEC, moi, m'a énormément apporté là-dessus. J'ai vu des grandes, des petites. Je me suis dit, en fait, on n'est pas tout seul. Et on n'est pas tout seul et on est légitime. Et j'ai l'impression qu'il y a de plus en plus de chefs d'entreprise qui se disent finalement, on est légitime à intervenir sur ces sujets-là et on a un rôle à jouer. Donc ça, ça me rend un peu confiant. Après, j'ai des nuits compliquées quand même. Mais voilà.

  • MC

    Écoute, Sébastien, merci. C'est sincère, comme on l'aime, simple. Voilà, mais en même temps clair, net. Marianne, tu reviens quand tu veux ! Je veux dire, voilà. Donc, voilà. Et je finis toujours par une citation. Alors là, c'est une citation, attention, accrochez-vous, de Peter Drucker, qui a dit « Il n'y a certainement rien d'aussi inutile que de faire très efficacement ce qui ne devrait pas être fait du tout. » Voilà, vous avez 4 heures. Merci. Et encore une fois, bien sûr.

  • SG

    Merci et à bientôt.

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