- Speaker #0
Dans cet épisode de Minute Papillon, nous retrouvons Yannick Roudot, ancien journaliste financier devenu auteur et conférencier et le cofondateur de la maison d'édition La Mer Salée. La semaine dernière, il nous partageait dans un grand entretien sa vision de l'économie qu'il souhaite régénérative et respectueuse des limites planétaires. Aujourd'hui, il se prête au jeu de minutes papillon. Quels sont les événements marquants qui ont transformé son regard sur le monde ? Quelles figures ou œuvres ont nourri sa réflexion sur un modèle économique durable ? Je vous souhaite une bonne écoute. Qu'est-ce qui vous indigne ?
- Speaker #1
Actuellement le traitement des femmes en Iran, en Afghanistan et même dans d'autres sociétés, je ne comprends pas.
- Speaker #0
Un événement... ou une expérience qui a créé un déclic écologique ?
- Speaker #1
Difficile parce que je fais partie des gens qui n'ont pas vécu des choses graves, qui ont changé leur vie brutalement. Je pense que c'est un cheminement. Si, il y a comme un événement, j'ai eu un petit voisin qui a déclenché un cancer très jeune, à 10 ans, et ça m'a vraiment mis en colère et j'ai écrit un livre, Zéro Pollution, en disant quelle honte de sacrifier nos enfants sur l'autel de la croissance Ça m'a obligé à mettre des mots sur quelque chose qui me dépassait, c'est-à-dire le fait qu'on pollue, on tue, 80 000 personnes en France mourraient d'insuffisance respiratoire du fait de la pollution atmosphérique, des enfants ont des cancers pédiatriques, il y en a de plus en plus, et on continue. Et j'avais du mal à l'avaler. Le fait d'écrire ce livre m'a permis de le digérer, de mettre des mots, et de pouvoir passer à quelque chose de plus constructif que la colère, parce que j'étais en colère à l'époque, c'était en 2016.
- Speaker #0
Une rencontre qui vous a marqué ?
- Speaker #1
Il y en a eu beaucoup. Il y a eu Hubert Reeves, que j'ai eu la chance de rencontrer, de partager la scène avec lui pour une conférence. Edgar Morin m'a beaucoup interpellé aussi et aidé. Et le monsieur qui m'a aidé à prendre confiance en moi, c'est Joël Deronais, en 2009, au Palais de Chaillot à Paris. Je faisais une conférence, il prenait des notes au premier rang, je lui ai dit il va me démonter à la sortie, il va me laminer Et en fait, il est venu en me disant oh extraordinaire Yannick ce que t'as fait, ce que t'as fait c'est génial personne n'avait fait avant toi, faut que tu continues donc ça m'a vraiment mis en confiance que Joël Dornay qui est un monsieur que je respecte beaucoup pour ses travaux qui me disent ça, j'avais à peine 40 ans ça donne confiance donc je le remercie
- Speaker #0
Un livre, un documentaire un film, un podcast qui vous a influencé ?
- Speaker #1
Un livre qui m'a beaucoup marqué, c'est Edgar Morin, La Voix, où il explique la complexité et la nécessaire transversalité. Ça, ça m'a permis de voir le monde différemment et de comprendre que l'un sans l'autre n'existe pas, que le vide n'existe pas sans le plein, l'intérieur sans l'extérieur n'existe pas. Et que donc, il faut être complexe dans son approche. Tout est lié, tout est tissé. Il n'y a pas de binarité, ça n'existe pas. Ça n'empêche pas d'avoir des convictions.
- Speaker #0
Si vous étiez un animal en voie de disparition, lequel seriez-vous et pourquoi ?
- Speaker #1
Peut-être une baleine. Je ne sais pas, c'est le mot qui me vient. Je pensais au pauvre Paul Watson qui est enfermé parce qu'il essaie de défendre la vie. Une baleine parce que c'est tellement paisible comme animal. C'est une force tranquille. En plus, elle est végétarienne. Elle ne mange que du plancton. Elle pourrait faire du mal avec ses queues. Elle n'en fait jamais. Ce sont des animaux qui sont extrêmement gentils. On les tue, on les massacre pour manger. Alors qu'il y a d'autres sources d'alimentation aujourd'hui, on n'a pas plus besoin de les tuer. On ne fait même plus d'huile avec pour le... pour allumer les lampes à pétrole de l'époque.
- Speaker #0
Imaginez que vous avez le pouvoir de donner la parole à une plante, laquelle choisiriez-vous et quel serait son message à l'humanité ?
- Speaker #1
Alors c'est un sujet qui m'interpelle beaucoup, parce que dans les Utopiennes 2044, j'ai écrit un article où je donne la parole aux animaux. Et je pense que les plantes, on arrivera aussi à communiquer plus en plus avec elles dans les prochaines décennies grâce aux algorithmes. et des scientifiques qui ont identifié le cri de la tomate, ça fait toujours rire quand je dis ça, mais les tomates crient, elles appellent à l'aide quand elles ont soif. Et voilà, je pense que les végétaux de manière générale, s'ils s'expriment, nous diraient mais pourquoi vous nous massacrez comme ça, allez-y mollo, qu'est-ce qui justifie un tel massacre ? Parce qu'il y a une offrande dans la nature, la nature c'est de l'amour quelque part, elle s'offre à nous, elle offre leurs fruits, elle offre leurs matières, les légumes par exemple, et nous on n'en prend pas précaution, on n'en prend pas soin, donc ça remettrait les pendules à l'heure.
- Speaker #0
Si vous pouviez organiser un dîner avec trois figures emblématiques de l'écologie, vivantes ou décédées, qui inviteriez-vous et quel serait le menu ?
- Speaker #1
C'est difficile ça. Lesquels j'invite ? Je pense des jeunes, des jeunes hommes et des jeunes femmes. Surtout des jeunes femmes, parce qu'il y a beaucoup plus de jeunes femmes très engagées que de jeunes hommes. Les femmes sont toujours plus engagées. Et quel menu ? Un menu végétarien de toute façon, puisqu'on n'a pas besoin de manger de la viande tous les jours. Je leur ferai quelque chose avec, je ne sais pas moi, du pois chiche, des lentilles, du quinoa, du dalle, des lentilles, un truc sympa. Malheureusement, je ne cuisine pas très bien tout ça, mais je sais que pour l'avoir goûté dans des bonnes cantines végétariennes, on mange très très bien.
- Speaker #0
Quel est votre péché mignon non écolo dont vous avez du mal à vous passer ?
- Speaker #1
Le chocolat. J'aurais beaucoup de mal à arrêter le cacao, parce que j'adore le chocolat. Alors, c'est pas écolo, mais c'est équitable. En ce sens que je suis allé dans des plantations il y a très longtemps, et ces gens-là, ils ont bien besoin de nous pour qu'on achète leur cacao. Le problème, c'est qu'effectivement, on en consomme trop, au niveau mondial, et que ça vient de loin. Donc il faut acheter du cacao qui vient en bateau, qui prend le temps. Et ça commence à venir, on en trouve, notamment dans certaines enseignes engagées. Et le transport à la voile revient en force. Donc se concentrer sur ce type de cacao. mais pas chez un cacao élevé en monoculture avec des pesticides et voyage en malle.
- Speaker #0
Depuis novembre 2002, avec Audrey Ranchin, nous menons une expérience intitulée Au creux de mon arbre, l'écho du vivant Nous avons fabriqué un arbre cabane dans lequel nous invitons les gens à venir raconter leurs souvenirs de nature. Alors je vais vous demander, à votre tour, un souvenir de nature qui a laissé une trace importante dans votre vie.
- Speaker #1
Ah oui, moi c'est très simple, quand on pose la question, c'est l'océan. Glisser sur l'eau ou dans les vagues, l'un ou l'autre, ça me procure une telle joie, une telle... Ça me donne tellement d'énergie d'être sur l'eau ou dans l'eau, dans l'océan, dans les vagues, la force de la vague qui te frappe le visage quand tu te baignes, c'est tellement puissant que ça pour moi c'est vraiment, ça fait partie de ma personnalité, de ma vie. Je pourrais pas mener ce combat entre guillemets si j'allais pas régulièrement sur l'eau ou dans l'eau. Ça me nourrit et c'est la matrice, c'est le liquide matriciel et ça j'en ai besoin et sans cet océan vraiment ça serait très compliqué. Minute papillon. Non. Minute papillon.