Speaker #0Aujourd'hui, en bref, le podcast du Céreq aborde le thème des emplois peu qualifiés et explique comment ces emplois ont changé de visage en 40 ans. Loin de disparaître, comme prédit depuis les années 60, les emplois dits peu qualifiés représentent encore plus d'un salarié sur six en France, soit un peu plus de 17% de l'emploi total en 2023. Basé sur une analyse de statistiques publiques et sur 20 ans d'enquête génération, cette nouvelle étude du Céreq expose les transformations dont l'emploi peu qualifié est porteur. Elle révèle que ces emplois ne diminuent pas mais se transforment. Ils sont moins industriels, davantage tournés vers les services et marqués par une précarité croissante qui touche particulièrement les femmes, les jeunes et les immigrés. Contrairement à l'hypothèse d'une polarisation du marché du travail, L'étude révèle une relative stabilité des emplois peu qualifiés depuis les années 2000. Leur visage a cependant changé. Ces emplois se sont déplacés de l'usine vers l'hôtellerie-restauration, l'aide à domicile, la logistique ou encore le commerce. Entre les jeunes entrants sur le marché du travail en 1998 et ceux de 2017, la part des ouvriers peu qualifiés après trois années de vie active a chuté de 14% à 8%, tandis que celle des employés peu qualifiés a progressé de 9% à 12%. Cette recomposition témoigne d'un basculement majeur de l'industrie vers les services aux particuliers et aux entreprises. L'étude met en évidence une précarité qui se concentre sur certaines populations. Elle met en lumière une féminisation marquée de ces emplois. En 2020, 23% des femmes occupent un emploi peu qualifié, contre 14% des hommes. Cette évolution s'accompagne d'une dégradation des conditions d'emploi. Contrat court, Sous-emploi, bas salaire, alternance avec le chômage et faible accès à la formation. Les personnes immigrées et les jeunes sont également surreprésentés dans ces emplois. Pour ces derniers, l'emploi peu qualifié représente 22% des premiers emplois, créant une concurrence accrue entre diplômés et non-diplômés sur ces postes. Autre constat de l'étude, des métiers essentiels sont invisibilisés. Les travaux du projet ANR Scapin, qui ont alimenté cette recherche, révèlent le paradoxe de ces métiers. Essentiels au fonctionnement de la société, ils demeurent sous-valorisés. Déménageurs, aides à domicile, trieurs de déchets, ouvriers d'abattoir, tous ces métiers requièrent autonomie, polyvalence, habileté manuelle et précision technique, des compétences souvent invisibilisées. Face à la précarisation de ces emplois, Les salariés qui les occupent sont spécifiquement exposés aux politiques publiques, multipliant les dispositifs incitant les salariés à devenir entrepreneurs de leur parcours. L'étude souligne que cette injonction à la liberté ne peut porter ses fruits sans une transformation profonde de l'environnement. Institutions publiques, actions des branches professionnelles, politiques des entreprises, soutien des organisations syndicales et des collectifs de travail. En conclusion, la possibilité de prendre en main son avenir ne dépend pas seulement du volontarisme ni des qualités individuelles. Agir sur les compétences ne suffit pas si des facteurs sociaux, institutionnels, organisationnels et managériaux ne sont pas pris en compte.