- Speaker #0
Bienvenue sur le podcast Enfance en Nature, le podcast qui parle d'éducation en plein air. Je m'appelle Claire et chaque semaine, je reçois ici un ou une pédagogue qui nous partage son expérience en matière d'éducation hors des murs. Famille, professeur des écoles, éducateur, animatrice, ces conversations... ont pour but de transmettre et diffuser des pratiques diverses et variées qui tendent toutes vers un objectif, permettre aux enfants de passer un maximum de temps en extérieur et plus particulièrement au contact de la nature. Si vous souhaitez soutenir le podcast, n'hésitez pas à laisser un avis ou 5 étoiles sur votre plateforme d'écoute et surtout, surtout, à le partager autour de vous pour disséminer les graines de l'éducation en plein air. Je vous souhaite une très belle écoute. Aujourd'hui, je vous retrouve pour la suite de la discussion que nous avons eue avec Anna qui est, pour rappel, psychomotricienne et qui, depuis plusieurs années, exerce son activité en partie en forêt. Si ce n'est pas déjà fait, je vous invite vivement à écouter la première partie de l'échange parce que ça permettra de savoir d'abord qui est Anna, mais aussi de comprendre ce qu'est la psychomotricité et je pense que c'est essentiel d'avoir tous les éléments en tête pour comprendre la suite de l'échange et notamment saisir la pratique d'Anna dans sa globalité. Je ne vous détaille pas davantage ce qui s'est dit dans la suite de cette conversation. Je vous laisse le plaisir de le découvrir. Je vous souhaite une très belle écoute. Et alors, c'est quoi cette forêt ? C'est une forêt qui t'appartient ? C'est un lieu... Quel est le cadre un peu de ce lieu en extérieur ?
- Speaker #1
Alors cette forêt, j'ai eu la chance, elle ne m'appartient pas même, j'ai eu la chance de rencontrer quelqu'un, un propriétaire du coup. qui a été tout à fait emballée par mon projet quand j'ai cherché. Parce que du coup, quand j'ai cherché au début ce projet, j'avais vraiment besoin, je sentais que j'avais besoin d'avoir une base et que me balader d'un espace à un autre, d'une forêt à une autre, en fonction des projets, c'était pour moi un peu compliqué d'être nomade moi-même. Et j'avais besoin d'un lieu physique. pour pouvoir me lancer dans cette aventure. Et du coup, au fil de mes recherches, pour essayer de me dire, mais alors, où est-ce que je pourrais faire ça ? J'ai été en contact avec un propriétaire qui a été vraiment emballé par mon projet et qui m'a mis à disposition sa forêt, qui devient dans la narration ma forêt, depuis quelques temps. Et cette forêt, elle est située dans un... Elle n'est pas tout à fait proche du cabinet dans lequel j'exerce. Elle est dans un massif montagneux qui est quand même à peu près 45 minutes de route. C'est une forêt de montagne, du coup, qui est située à 1100 mètres d'altitude, un petit peu entre une vallée de montagne et le lac. Du coup, elle est accessible par la route, mais ça reste quand même un espace qui est... qui est assez isolé, il n'y a pas de village autour, c'est vraiment sur une crête d'un massif, tout au bout de cette route il y a un monastère, et avant du coup il y a cette forêt. Et donc ce massif c'est un petit peu une sorte de barrière géographique entre deux vallées, et de fait je me suis rendu compte, maintenant que je la pratique depuis quelques années, que cet endroit, il accroche beaucoup les nuages, et du coup il lui donne une ambiance très particulière. surtout au printemps et à l'automne, où il y a une ambiance, il y a vraiment à la fois une faune et une flore déjà de montagne, avec des épicéas, des hêtres. On n'est vraiment pas sur une forêt de... C'est vraiment assez différent par rapport aux forêts qu'il y a vraiment là où je vis, par exemple, qui sont plus proches du lac, qui sont plus en vallée. Et là, il y a aussi beaucoup de mousse. Elle est très préservée parce qu'il n'y a pas d'activité humaine, ce n'est pas un bois où il y a des parcours santé, il n'y a pas de GR qui passe dessus, donc du coup il n'y a pas de chemin de randonnée. Donc elle est assez préservée, avec une présence humaine qui est assez limitée. Et ce qui est vraiment très chouette, moi ce qui m'a vraiment... Quand j'ai visité cette forêt pour la première fois, je suis tombée amoureuse de cet endroit, parce que vraiment, il y a des ambiances, des biotopes qui sont très diversifiées. On peut passer d'une clairière assez lumineuse, avec des trembles aux écorces blanches, un petit peu comme on voit dans le Nord, il y a un peu ces frétillements de... de branches et cette ambiance sonore où ça reste du coup assez lumineux et puis après on passe dans des sous bois où il y a des épicéas et des tapis de mousse incroyables de lichens, des buissons de myrtilles où les enfants passent dans des petits sentiers très étroits que les animaux utilisent et où les buissons leur arrivent à la taille où du coup ils se transforment un petit peu en lutins dans cet endroit Et puis après, on arrive dans des haies-traies où du coup, au sol, il y a moins de végétation où du coup, on a plus de place pour bouger, pour ne pas forcément être à la queue leu-leu, pour pouvoir construire des cabanes, pour pouvoir faire des jeux moteurs. Et puis, il y a des champs et quelques jeux. Il y a deux ou trois champs de fougères géantes qui disparaissent l'hiver et qui réapparaissent au printemps. On peut faire des jeux de cache-cache. où il y a tout un écosystème d'insectes aussi, dans ces fougères. Il y a des ruisseaux aussi, donc ça c'est incroyable, parce qu'il y a aussi de l'eau et tout ce que ça peut amener, l'eau comme richesse d'exploration, comme ambiance sonore, comme possibilité de voir des traces d'animaux aussi. Et ce qui est vraiment incroyable dans cet endroit, c'est que pour un massif... En montagne, il y a quand même beaucoup d'endroits suffisamment plats pour pouvoir occuper cet espace, jouer, explorer. Et quand même d'autres qui sont un peu plus accidentés aux abords du ruisseau, où du coup on peut favoriser d'autres modes de déplacement. En tout cas, travailler ça vraiment au niveau moteur avec les enfants. Et puis dans cette forêt, j'ai installé une tente. depuis cette année au début je faisais vraiment sans rien si ce n'est d'avoir une bâche pour nous abriter et puis depuis cette année j'ai installé une grande tente qui me rappelle un petit peu les tentes de mes camps d'enfance mais une tente beaucoup plus grande qui permet de proposer quand même un espace qui sert de base qui sert autant de base physique que psychique. Donc cette tente, je l'ai installée à l'entrée de la forêt. Il y a vraiment le ruisseau qui permet de délimiter la forêt vierge, avec des gros guillemets, et l'espace entre le parking et cette entrée avec le ruisseau. Il y a la tente qui est déjà à 300 mètres du parking et qui est déjà bien immergée dans la forêt, mais qui n'est pas non plus au fin fond de la forêt. Et du coup cette tente, elle me permet déjà de pouvoir stocker du matériel, d'avoir un espace avec des tapis, un espace un peu confortable, pour que quand il y a besoin, soit parce qu'on veut faire une pause au sec au bout de plusieurs heures sous la pluie, soit parce que tout d'un coup il y a un orage assez soudain et qu'il faut qu'on s'abrite, soit parce que les enfants manifestent aussi parfois le besoin. d'avoir cet espace qui sert un peu d'entre-deux, entre du connu, avec des petits jeux qu'ils peuvent parfois retrouver, des livres. Il y a quand même des petites choses qu'ils peuvent retrouver. Et puis parfois, juste, c'est un endroit où on ramène du matériel de la forêt et on va continuer nos explorations, mais dans cet espace-là. Voilà, cet espace, c'est un lieu magique. Et en même temps, elle a plein d'inconvénients, dont l'accessibilité. Donc, je ne sais pas si... Elle sera là pour toutes mes aventures, mais en tout cas cet espace de kanuka aujourd'hui.
- Speaker #0
Habitant en zone montagneuse, l'accessibilité est effectivement la première difficulté dans les recherches de lieux. C'est un critère assez complexe. Qu'est-ce qui t'a poussé il y a quelques années à vouloir intégrer dans ta pratique des séances en forêt particulièrement ?
- Speaker #1
Oui, c'est vrai que c'est vraiment la forêt qui m'a marquée, mais alors le début de ce projet, il vient vraiment d'une perte de sens pour moi, dans ma vie, de façon assez générale, qui a coïncidé avec... la période de confinement et de déconfinement. Je pense que cette période vraiment de rupture avec l'extérieur, en tout cas à ce moment-là, moi je vivais en appartement et je n'ai pas eu la chance de pouvoir vraiment être dehors. Et ça m'a vraiment mise dans un grand questionnement très large de perte de sens de ma vie. et aussi de créativité et de perte de sens dans ma pratique professionnelle. J'ai vraiment eu un espèce de post-confinement, c'est-à-dire que quand je sentais autour de moi tout ce qui reprenait vie, moi je me suis rendue compte à quel point à ce moment-là j'étais déprimée en fait, et que j'allais au travail le matin en me disant Oh, qu'est-ce que je vais faire avec cet enfant ? Et là je me suis dit ça ne va pas du tout, ce n'est pas possible Donc j'ai commencé vraiment, à la fois j'ai commencé une formation, dans les mois qui ont suivi, de reconnexion au corps, à travers le Sensitive Gestalt Massage, qui est une approche de massage qui fait vraiment résonance aux valeurs et à l'approche de la psychomotricité, et qui du coup, je me suis dit, mais oui, il faut que je retrouve comment... Comment être au plus près du corps ? Parce que parfois dans les propositions que je faisais, je me sentais très déconnectée du corps. Et puis en parallèle, j'ai aussi participé à un programme de développement personnel qui est passé par une expérience groupale d'une semaine d'immersion en nature. C'était en février et c'était dans le Vercors. Ça a duré une semaine, on était dehors nuit et jour pendant cette semaine de février. Et là, ça a été vraiment le déclic de me dire, mais en fait, toute cette semaine, il y a eu des énormes résonances avec mon enfance, du coup, avec ces camps Jeunes et Nature. Je crois vraiment là que ça m'a remise dedans et ça a réveillé quelque chose d'essentiel pour moi et dans une joie de l'enfance qui a refait surface et qui était oubliée quelque part en fond de moi. Et je me suis dit, non mais bien sûr. Enfin, en tout cas, c'était tellement une évidence à ce moment-là pour moi que je me suis dit qu'il fallait que j'en fasse quelque chose. Peut-être d'abord en premier lieu pour moi, je crois. Et puis, je me disais aussi, mais en fait, ces expériences sensorimotrices que je propose, à ce moment-là, j'avais une salle de cabinet qui était toute petite, enfin qui faisait 20 mètres carrés, qui est souvent la taille qu'on a, mais que je trouvais toute petite, qui est un environnement artificiel. Et je me disais, mais quelle pauvreté alors qu'il y a tant de richesses dehors. Enfin voilà, je pense que tu dois souvent entendre ça dans tes podcasts parce que quand on y est, ça semble, en tout cas pour ceux pour qui ça résonne, une vraie évidence, en tout cas ça a résonné pour moi comme ça. Et je me suis dit, mais si je pouvais partager cette joie qui m'anime moi avec ces enfants parce qu'en fond ça m'a animée, et bien allons-y. Voilà, donc ça, ça a été vraiment le point de départ. Puis après, du coup, j'ai embarqué une collègue du cabinet avec moi qui m'a accompagnée un bout de chemin. Et puis ensuite, j'ai fait d'autres rencontres. Et puis Kanuka, il était une forêt aînée. Et puis ce cheminement, c'est que le début parce que je suis encore en tâtonnement, en expérimentation, en recherche, en affinement. Voilà comment ça a débuté.
- Speaker #0
Alors oui, on entend effectivement ce besoin pour toi de passer du temps dehors et de te connecter à tout ça. D'un point de vue psychomoteur, est-ce que tu peux nous dire en quoi être dehors, et en particulier en forêt puisque c'est l'environnement que tu as choisi, en quoi c'est bénéfique pour les enfants ? C'est quoi... Quels sont les plus par rapport à des séances en intérieur ?
- Speaker #1
Alors peut-être pour commencer, je vais reprendre déjà un consensus de recherche qui est unanime maintenant, et à savoir que d'un point de vue de la santé et de la santé mentale, il y a beaucoup d'études qui ont montré les bienfaits de la nature, donc pour les enfants et aussi pour les adultes. Alors je vais juste les citer très rapidement parce que... C'est des études qu'on peut trouver assez facilement, en tout cas ces écrits-là, pas les études en elles-mêmes, mais en tout cas les bienfaits de la nature, c'est quelque chose qui est assez largement reconnu aujourd'hui. tant sur le système immunitaire que sur le système cardiovasculaire, mais aussi la régulation émotionnelle et la régulation des troubles psychiques, tels que l'anxiété, la dépression, et aussi les capacités intentionnelles, dont on a beaucoup parlé tout à l'heure, avec la théorie de la restauration de l'attention. Après, d'un point de vue plus psychomoteur, l'approche de la psychomotricité et celle de la pédagogie par la nature sur laquelle je m'appuie aussi, dont je n'ai pas encore parlé, ces deux approches, elles ont vraiment des sous-bassements communs, avec par exemple l'importance du processus avant le résultat, la libre initiative, le jeu libre, la posture de l'adulte qui vient en soutien pour aider l'enfant à faire seul, et en soutien de réassurance dans ce lien émotionnel. Donc ça, c'est vraiment des choses qui... Je me suis dit, en fait, tout ça, je le fais déjà, mais je ne le fais juste pas dehors, en fait. Et ce qui est aussi très important dans ces deux approches, ce sont les aspects sensorimoteurs qui sont au premier plan. Pour donner une première réponse à ta question, à laquelle je vais répondre après plus avec des exemples, mais je vais commencer par un petit détour, par une approche qui est un peu complexe, mais qui est très riche pour comprendre comment la forêt peut être un cadre. bénéfique aux enfants, avec l'approche sensorimotrice d'André Boulanger, qui est un monsieur qui est maintenant décédé en 2015, qui était psychologue, neuropsychologue, qui a fait des sciences de l'éducation, et qui était dans la lignée de Piaget sur le développement de l'enfant, et qui s'appuie vraiment sur le développement de l'enfant en tant que processus pour comprendre comment l'enfant il intègre. justement ces différents espaces du corps dont j'ai un petit peu parlé tout à l'heure et cette approche elle est sensorimotrice et donc forcément à un moment ou à un autre tu verras on va arriver à la forêt et donc dans cette approche neurodéveloppementale dont j'ai parlé il y a des espaces corporels qui s'intègrent qui s'intègrent physiologiquement qui s'intègrent dans les compétences motrices et qui s'intègrent aussi au niveau des représentations du corps et de la pensée Il y a l'espace oral, il y a l'espace du buste, ensuite il y a l'espace du torse, ensuite il y a l'espace du corps avec vraiment les membres inférieurs. Ces différents espaces s'emboîtent à travers la dynamique et les expériences que font les enfants au cours de leur enfance. Et à chaque étape, ces acquisitions se font à la fois au niveau postural, au niveau de l'organisation de l'espace. et au niveau de la représentation du corps. Et pour ensuite construire une activité psychique, des représentations et des capacités d'instrumentation du corps, c'est-à-dire comment on va pouvoir se servir de notre corps dans des actions intentionnelles et dans des manipulations et vraiment d'un point de vue fonctionnel. Et ces interactions qui va y avoir avec trois éléments qui s'articulent en parallèle. Et c'est d'abord, et en premier lieu, enfin en premier, en tout cas d'abord, les flux sensoriels que l'organisme, d'abord tout petit, puis ensuite l'enfant, va percevoir. Donc ces flux sensoriels, ils sont là et ils vont organiser une dimension posturale. C'est comment l'enfant, il va pouvoir mettre son corps en forme avec des conduites motrices pour... s'ajuster à ce milieu sensoriel et pour agir dans ce milieu sensoriel. Et ça, ça se fait avec le troisième axe qui est le soutien du milieu humain. C'est dans l'interaction et dans la relation que ces expériences sensorimotrices, elles vont prendre sens, elles vont s'élaborer, elles vont devenir des conduites, des représentations, et du coup elles vont participer à ce développement. Donc ça pour moi c'est vraiment le point de départ de me dire mais alors en fait ok je sais ça en tant que psychomotricienne, ben ça tombe bien la forêt dis donc c'est un milieu d'une richesse incroyable pour offrir justement ce milieu sensorimoteur aux enfants. Et donc moi si j'accompagne ou les parents ce sous-bassement humain, et ben du coup on réunit les trois éléments pour... proposer des explorations qui vont soutenir le développement des enfants. Après, la forêt, justement, elle propose une intensité par rapport à une aire de jeu ou à une salle de psychomotricité qui sont beaucoup plus neutres. Moi, j'ai remarqué que... il y avait tout de suite beaucoup, beaucoup de choses à voir, beaucoup de choses à sentir, il y a à la fois quelque chose de calme, mais en même temps il y a une grande intensité et c'est très engageant, et ça fait réagir les enfants, que ce soit au niveau des sensations ou de leurs émotions, et ça du coup ça donne vraiment de la matière à travailler et à venir soutenir, parce que du coup dans le processus, dans le... de processus thérapeutique, c'est vraiment l'idée de repasser par l'expérience du corps pour accéder à l'élaboration et à la pensée. Donc du coup, on a déjà tout qui est là pour venir inscrire nos expériences sensibles dans une meilleure conscience de soi. Et là, j'ai un exemple que j'ai trouvé très riche, que j'ai vécu au printemps dernier avec un binôme d'enfants que... que j'accompagnais, donc ils étaient deux avec moi, et on était partis assez loin, assez loin dans la forêt, pour, j'avais l'idée, j'ai toujours des idées, mais après ça dépend de comment les enfants s'en emparent. J'avais l'idée aujourd'hui de proposer des constructions à deux de cabane. Et puis en fait le vent s'est levé, Et le ciel s'est couvert, mais vraiment, très rapidement, et en l'espace de quelques minutes, on avait l'impression d'avoir éteint la lumière. Et ça a commencé à être assez inquiétant pour ces deux enfants. On voyait les éclairs, et là je me suis dit, bon, là c'est une question de minutes, mais on va se prendre un orage. Et du coup, il y a vraiment la peur qui est apparue chez ces enfants qui avaient 6 ans. Donc des enfants encore un peu jeunes. Et ils ont réclamé la tente. Et on est... Alors au début, j'ai essayé de soutenir que ça pouvait être chouette d'expérimenter cet orage et comment on allait trouver de la sécurité dans l'endroit où on était à ce moment-là. Et puis ensuite, j'ai rapidement vu que non, en fait, là, il n'y aurait pas assez. Et puis on allait prendre l'orage et se prendre la pluie et ça allait être trop pour eux. Donc il fallait qu'on retrouve justement cette base sécure dont j'ai parlé tout à l'heure, qui là a été vraiment très intéressante parce que du coup on est retourné dans la tente, donc on a eu cette balade pour repartir avec tous nos tissus et puis ce qu'on avait à ce moment-là. Et là l'orage il a vraiment éclaté, on était en train d'arriver à la tente. Et c'était vraiment intéressant de pouvoir les accompagner, d'en traverser ces émotions qui étaient fortes, parce qu'il y avait de la trouille, il y avait de la peur à ce moment-là vraiment réelle, parce que ça fiche la trouille, cet orage en tout cas à eux. Et du coup comment transformer et symboliser, et quoi en faire ? Parce que si on reste juste dans la trouille, ben là on se dit bon en fait c'est pas du tout thérapeutique, et là on n'en fait rien du tout de cette expérience. Et en fait, d'avoir pu les aider et les rassurer et être moi dans ma posture et dans ce que j'ai pu leur proposer, d'accueillir que oui, c'est vrai que ça fait peur et c'est là maintenant. Et comment on va faire pour traverser ça ? Et après, ces enfants, ils ont pu, donc il y avait le tembrunement de la pluie, on voyait les éclairs à travers la tente et puis c'était un orage assez rapide qui a traversé et qui s'est calmé. Et les enfants ont pu, pendant ce temps-là, dessiner leur peur dans le petit carnet de la forêt que je leur propose. Et ensuite, ils ont pu retrouver une sécurité interne et raconter à leurs parents ce qu'ils avaient vécu et que c'était trop chouette. Et voilà, au final, c'était ça dans leur narration, qu'ils avaient eu très peur, mais que c'était trop chouette. Voilà, donc ça, c'était un exemple où je me dis, mais la forêt m'a... permis de les accompagner à traverser et à vivre cette émotion et il y en a d'autres alors on n'est pas toujours, je ne les emmène pas toujours à traverser la trouille mais il y a aussi d'autres choses que je leur propose et donc les émotions qu'elles soient agréables ou désagréables c'est déjà un lieu qui vient vraiment les convoquer les chercher dans cette intensité émotionnelle la dimension du groupe rajoute aussi vraiment cette dimension là Dans les aspects sensoriels, il y a une richesse mais illimitée, que ce soit l'humidité de l'herbe qui vient chatouiller les mollets le matin quand on a mis un short ce jour-là. La température de l'air qui peut être variable, parfois il fait froid, parfois il fait chaud et on va aller s'abriter à l'ombre. Les odeurs, le rugueux des écorces, le chant des oiseaux, le bruissement des feuilles, le contact de la mousse, le chatouillement des fourmis. Il y a aussi la motricité globale et la motricité fine qui permettent de repasser par la quadrupédie. de retrouver aussi une confiance dans ses appuis, une confiance dans, du coup, si je veux escalader cet arbre, un tronc d'arbre qui est couché, qui va être un peu glissant, qui va être un peu en pente, comment je vais faire ? Et moi, je vais juste les aider à avoir conscience, juste, je vais les aider à avoir conscience de, du coup, comment tu vas mettre tes mains, où est-ce que tu vas porter ton regard, voilà, toutes ces choses-là pour qu'ils puissent... réaliser ou pas ce challenge là qu'ils auront décidé de faire ce jour parfois ça va juste être de monter sur une petite souche et puis de sauter pour certains enfants pour qui la confiance dans leur corps est pas si présente on va être on peut grader l'idée ce sont aussi que ce soit les enfants qui puissent définir ce qu'ils ont envie Alors moi, des fois, je leur dis ça, je trouve que là, c'est un peu facile, parce qu'on peut essayer de s'engager un peu plus. Mais en tout cas, ce sont eux qui vont mesurer ce qu'ils ont envie d'explorer, là où ils ont envie de s'aventurer, comment ils vont faire, comment ils vont faire aussi quand il y a beaucoup de pentes, de ne pas aller forcément chercher la main de l'adulte. Parce que ça, c'est des choses que je remarque très souvent. d'un enfant qui commence à perdre l'équilibre, du coup il se sent insécurisé, et son premier réflexe va être de chercher à me prendre la main, et du coup moi je vais les inviter à pouvoir dire, regarde toi quelle ressource tu peux avoir dans cet endroit-là, qui est peut-être très pentu, très glissant, est-ce que tu repasses par le 4 pattes, est-ce que tu cherches des appuis autour de toi, où est-ce que tu mets tes mains, où est-ce que tu mets tes pieds, est-ce que tu ralentis, est-ce que tu te tournes ? voilà toutes ces choses là la forêt c'est une source d'émerveillement et de créativité et d'imaginaire même si je fais de la psychomotricité et que j'ai en tête un petit peu des objectifs pour des enfants il y a une grande part d'autodétermination qui est pour moi essentielle et je vais les inviter aussi à eux à plonger alors moi je vais proposer un super port d'imaginaire qui me sert aussi de cadre, un petit peu, peut-être je reparlerai plus tard, mais de cadre avec le gardien de la forêt je vais amener déjà des éléments d'un imaginaire pour porter aussi des valeurs qui me semblent importantes de transmettre mais après, je les invite eux à pouvoir se questionner à pouvoir rêver, à pouvoir imaginer à pouvoir... créer des jeux, et puis moi avec les objectifs que j'ai, je vais forcément à un moment ou à un autre les inviter à explorer, mais parfois ce sont eux qui y vont, explorer des choses dont ils ont besoin. Pour moi la forêt par rapport aussi au cabinet, c'est un milieu qui vient vraiment révéler et soutenir l'empathie. Et cette empathie, elle est au monde du vivant, aux autres aussi, avec la gestion du risque. Et la richesse de toutes les propositions, elles s'inscrivent et elles sont connectées au monde du vivant. Et ça ouvre l'enfant sur cette dimension de faire partie d'un ensemble, d'un écosystème dans lequel on a aussi une responsabilité. On écrase ou pas la fourmilière, on se protège ou pas d'éthique. ou plutôt oui, on observe ce qui vit ici et qu'est-ce qu'on en fait et moi je trouve que vraiment ça c'est quelque chose que je vois entre un début de prise en charge et un peu plus tard au début il y a des mouvements très défensifs des enfants qui peuvent avoir peur des insectes par exemple et qui vont rapidement écraser pour se protéger et puis petit à petit Les enfants, il y a une habituation au milieu et puis il y a aussi de prendre en compte. Et je vois des enfants qui me disent, ah bah là, tu vois, je me suis éloignée.
- Speaker #0
Parce que la fourmilière, elle est là. Et puis, je ne vais pas écraser cette colonne de fourmis que je vois passer devant moi. Mais du coup, je vais juste faire un détour, par exemple, si ça fait peur. Ou là, j'ai pris ce petit scarabée et je l'ai remis là parce que là, on va jouer ici. Et puis sur la souche, il n'y a pas la place. Voilà, donc cette empathie-là, c'est prendre soin aussi des autres, des enfants, des rythmes de chacun. Savoir. qu'il y a d'autres animaux qu'on verra peut-être jamais mais dont on voit les traces dans la boue ou les troncs les traces d'oiseaux qui font des trous dans les troncs morts ça c'est vraiment aussi prendre conscience qu'il y a quelque chose de très essentiel aussi du cycle de la vie du coup de ce qui vit de ce qui meurt et de comment on fait partie de tout ça en fait et comment on peut prendre soin de soi pour pas déjà se blesser prendre soin des copains dans le groupe parce que jouer avec des bâtons, c'est chouette, mais comment on fait pour que ça fonctionne ? Et puis, de tout ce qui est là. Et que quand on n'est pas là, ça continue de vivre. Et quand on revient la fois suivante, qu'est-ce qui s'est transformé ? Le petit champignon qui a commencé de manger par une souris la dernière fois, il reste plus qu'un petit bout, il n'y a plus rien. Les cabanes qu'on avait commencé à faire, il s'est passé quelques semaines. Il y a eu des orages, il y a eu du vent et ça a changé de forme, par exemple. Donc ça, je trouve que c'est vraiment quelque chose qui est concret et que les enfants peuvent vivre dans leur corps, dans leurs expériences. Et ça, je trouve que c'est très en lien avec la structuration dans le temps, où je vois assez régulièrement des enfants qui sont assez déconnectés. Ils peuvent me réciter qu'à l'automne, les feuilles tombent et à l'hiver, c'est Noël et il y a de la neige. que quand on vit en bas la neige on n'a pas si souvent que ça d'ailleurs mais mais c'est quelque chose de très appris et qui est pas très connecté et là bas du coup d'être en forêt et d'être en extérieur ça permet enfin de vraiment sentir balaouais on met un bonnet en fait parce que c'est l'automne ou ou là bas on remarque que c'est la saison des champignons il y en a partout on en voit plein parce que c'est l'automne et là au contraire et ben C'est la fin de l'hiver et on sent qu'on est en montagne et le printemps, il arrive un peu plus. On voit que, par exemple, autour de la maison, il y a déjà des fleurs et là, on va en forêt, il n'y a pas encore des fleurs parce que c'est plus tard. Et de prendre conscience de ce temps qui passe et de qu'est-ce qu'une saison, en tout cas en France, ça, je trouve que c'est très important. La structuration spatiale, elle est aussi expérimentée de façon... Comment on s'oriente ? dans cette grande forêt et de voir qu'après les enfants sont capables d'emmener leurs parents sans moi d'un endroit à un autre et qu'eux ils savent maintenant et qu'ils ont pris des repères et qu'on a travaillé ça aussi, que les notions de grandeur microscopiques aux très très grands, ça c'est des choses, à chaque fois c'est inscrit dans quelque chose de très concret. Je trouve aussi que ce qu'il y a de vraiment riche par rapport à un engagement, parfois en cabinet ou pas toujours, les enfants sont… en général assez contentes de venir au cabinet, de venir jouer, de venir travailler en psychomotricité. Mais là, je trouve qu'en forêt, il y a vraiment cette dimension du flot dont parle la pédagogie par la nature où il y a vraiment une vraie motivation qui vient soutenir des apprentissages qui sont parfois très loin du milieu scolaire mais qui, en fait, travaillent les mêmes choses. Et par contre, quand on a envie de... faire un feu, on va aller travailler plein de domaines qui sont des domaines utiles à l'école, qui sont des domaines utiles dans la vie déjà. Mais en fait, on va le faire autrement. On va le faire parce qu'on va faire une cabane, parce qu'on a envie de faire un feu, parce qu'on a envie de griller les chamallows sur le feu, parce qu'il y a cette motivation-là. Et puis parce que moi, je ne fais pas au cabinet, en tout cas pas actuellement, je ne fais pas de groupe. Et alors là, du coup, pour moi, c'est rêver. de pouvoir justement faire du groupe.
- Speaker #1
Ok. Est-ce que cet accompagnement en forêt, tu le proposes à tous les enfants, à toutes les familles que tu as en cabinet ou c'est vraiment dans des cas spécifiques ?
- Speaker #0
Alors, il est vrai qu'au début de ce projet, j'avais vraiment envie que tous les enfants bénéficient de la forêt et de l'extérieur. et que j'ai même plus de cabinet en fait. Dans la réalité, ce n'est pas possible aujourd'hui et de ce fait... Quand les enfants viennent me voir, ils passent d'abord par la porte d'entrée du cabinet. Et là, du coup, je vais d'abord proposer un bilan psychomoteur qui sert de rencontre aussi, qui va être quelques rendez-vous au cours desquels je vais affiner quels sont leurs besoins et observer où ils en sont. Et puis, une fois que j'ai rencontré ces enfants, Je vais me demander, mais alors du coup, qu'est-ce que je propose ? Et dans ce qu'est-ce que je propose, il y a encore assez classiquement du cabinet, mais il y a vraiment pour certains, et de plus en plus dans ma pratique, déjà cette idée de ah mais ça pourrait être chouette pour lui qu'il puisse aller en forêt Alors après, il y a la réalité parfois organisationnelle et d'accessibilité de cette forêt, qui est quand même loin et que du coup, ce n'est pas toujours faisable. Il y a aussi vraiment la question du lien que j'ai avec la famille et de l'engagement que je vais sentir. Donc parfois, ce n'est pas tout de suite. C'est au bout d'un temps, d'une année d'accompagnement. Je veux dire, maintenant, on pourrait vraiment aller travailler la dimension du groupe, par exemple. Ça arrive assez fréquemment. Ou chez des enfants pour qui je sens qu'au niveau de la confiance dans leur capacité à explorer, à oser. à créer, à inventer, à être à l'initiative, qu'il y a quelque chose d'un peu fragile, d'un peu coincé. Là, je vais dire, vous savez, il existe ça, ça pourrait être chouette, les mercredis en forêt, pour votre enfant. Et du coup, je propose. Après, j'essaye aussi de proposer pour créer un groupe qui soit harmonieux. Pas forcément avec des enfants qui ont le même profil, pour le coup, mais des enfants où je me dis, eh bien... ils pourraient être bien ensemble. Il y a quelque chose d'une rêverie de ma part où je rêve en amont quelque chose pour l'enfant. Donc, ce n'est pas systématique. Ça s'inscrit dans un lien de confiance avec la famille. Il faut qu'eux aussi se disent qu'on s'aventure là-bas parce qu'on vous fait confiance. Une réalité. Et puis, parfois, c'est une alternance aussi entre cabinet et forêt en fonction soit des saisons parce que c'est pas une forêt dans laquelle je travaille toute l'année l'hiver c'est trop compliqué voilà donc c'est une forêt un peu saisonnière donc c'est un peu des sessions ça dépend aussi de si je coanime si j'ai une collègue avec qui coanimer là on va plutôt faire des groupes et si je suis toute seule comme c'est arrivé sur ces trois dernières saisons où j'avais plus de collègues disponibles et emballés par ce projet. Du coup, là, je ne pouvais plus faire des groupes comme de 5-6 enfants comme avant, mais du coup, je proposais soit des suivis en binôme, soit des suivis individuels. Les suivis individuels, je les propose aussi si je vois que ce sont des enfants qui n'en sont pas à être en groupe, pour qui la gestion des émotions, c'est souvent ça, a besoin du... de ma disponibilité à 100% et qu'en groupe, ça va être trop, trop à gérer. Qu'il y a déjà des choses qu'on doit travailler dans un environnement moins insécurisant finalement. Parce que les relations, ça peut être très insécurisant pour certains enfants. Donc voilà comment je fais. Ça se fait un peu au feeling, je dirais.
- Speaker #1
T'en as déjà un petit peu... T'as déjà donné des exemples puisque... Tu nous as raconté quelques anecdotes. Est-ce que, plus concrètement, tu peux nous donner des exemples d'activités, peut-être de jeux, d'invitations que tu proposes aux enfants, aux groupes ? Des rituels aussi, tu parlais tout à l'heure, tu as évoqué quelques éléments que tu mets en place. pour qu'on ait un petit peu une idée, un paysage de ce que tu fais en forêt avec les enfants.
- Speaker #0
C'est déjà dans ma posture, plus que dans les activités, même si j'ai plein d'activités en tête, mais c'est vraiment dans ma posture et dans le comment et à quel moment je propose les choses, que vraiment j'essaye de réfléchir à ça, avec vraiment l'idée d'offrir un cadre d'expérimentation en étant un appui. M'enthousiasmer, donner envie à l'enfant d'expérimenter, de dépasser ses appréhensions, lui faire confiance, le rendre acteur dans ses explorations. Je pars du postulat que c'est lui qui sait ce qu'il est capable de faire. Et quand parfois, comme je disais tout à l'heure, je sens qu'il est capable de plus, je lui dis que moi j'ai l'impression qu'il est capable de plus, mais en tout cas je le laisse avec ce contrôle-là qui est important. Et c'est lui qui gère son degré de risque et moi je les aide à percevoir leurs limites, soit en les encourageant vers plus d'expérimentation, soit en vérifiant avec eux le degré de prudence à mettre en place. Il pourrait y avoir des mises en danger, par exemple. Je les aide vraiment à mettre en place leur propre capacité d'autorégulation. Ça, c'est pour moi vraiment la base. Ensuite, plus que des activités spécifiques qui peuvent... Peut-être que toi, tu proposes aussi. En tout cas, il y a peut-être plein de jeux qui sont, je dirais, universels et plein d'activités. C'est plutôt à quel moment et comment. Et là je veux vraiment partir des besoins de l'enfant Par exemple au début d'un cycle Quand je commence soit un nouveau groupe Soit un binôme, soit même un suivi individuel Le besoin fondamental des enfants C'est de se sentir en confiance et en sécurité Et du coup à partir de là Je me dis qu'est-ce que je vais pouvoir proposer Pour que cette confiance de base et cette sécurité Elle soit vraiment un sous-bassement à partir duquel je vais pouvoir dérouler d'autres propositions. Et ce que j'ai expérimenté à plusieurs reprises, et maintenant presque toujours, c'est de faire le premier atelier avec un parent, et du coup de proposer, quand c'est du groupe, un groupe de binôme parents-enfants. Et ça je trouve que c'est une source de réassurance dans un environnement qui est nouveau, qui est inconnu, qui est... hyper important, autant pour les enfants, mais aussi pour les parents, pour qu'ils puissent être tranquilles, qu'ils puissent voir où est-ce que ça se passe, et qu'ensuite, ils aient l'esprit tranquille de déléguer cette confiance-là, de me déléguer cette confiance, et de la déléguer à leurs enfants aussi. Et ce que je propose dans ce premier atelier parents-enfants, du coup, qui est devenu fréquent, c'est d'avoir un temps C'est d'avoir déjà des temps de partage entre eux pour se connecter dans cet endroit. Et ça, je trouve déjà, c'est d'une richesse incroyable pour le lien par enfant, pour ce qui peut se vivre de magique. Mais après, ce qui reste, c'est que l'enfant, il a le souvenir de la cabane avec papa là-bas. Je m'en rappelle, c'était chouette, on avait fait ça dedans. Et puis, je propose souvent un temps aussi pour les parents, soit un temps pour qu'ils puissent créer un objet symbolique. Soit eux, juste eux, soit entre parents, un objet du groupe des parents, soit avec leur enfant, mais qu'il y a souvent quand même cette création d'un objet symbolique qui va symboliser leur présence et leur intention de leur transmettre leur confiance pour la suite, pour quand ils ne seront plus là. Ensuite, je propose souvent au début de cycle aussi d'avoir pour toujours, dans ce besoin de sécurité, de proposer aux enfants d'avoir leur espace à eux. Alors parfois, ça commence dans ce temps avec leurs parents, parfois pas. Et vraiment, pour moi, c'est l'idée qu'ils puissent avoir un lieu ressource. C'est pas toujours, je propose pas une cabane, en l'occurrence, je propose d'avoir un endroit. Et justement, je trouve ça très intéressant de voir, à partir de cette consigne qui est assez vaste, de voir quelle forme ça peut prendre pour les enfants, comment ils vont investir ce lieu. et de voir que régulièrement c'est un lieu dont ils vont reparler, qu'on va retourner voir, qu'on va continuer, poursuivre, ou parfois pas, mais qui reste là comme une base sécure de si un jour on en a besoin, cet endroit il existe Ensuite en début de cycle, ce qui me semble aussi important, c'est que les enfants y puissent faire connaissance avec le milieu et avec les autres. Donc avec la forêt, et avec le groupe. Donc là, je vais plutôt proposer beaucoup de jeux pour se relier, des jeux collaboratifs, où on va faire équipe, où on va aller à la découverte des ambiances de la forêt, où on va repérer au niveau spatial. Et là, je vais plutôt passer par le mouvement, un peu pour briser la glace et pour favoriser la dynamique de joie d'être ensemble et de joie de jouer ensemble. Et de finalement, ce... Cette personne qui m'a intimidée un petit peu en début, la fois d'avant ou au début de la séance, à la fin... ça va être chouette de pouvoir se dépatouiller, se débrouiller pour aller collecter des objets ou pour aller s'attraper. Ensuite, au fil des ateliers, ça dépend vraiment des besoins du groupe et de chaque enfant. Et je garde cette idée de s'adapter. Donc à chaque fin de groupe ou fin de séance, moi je prends des notes et puis je me dis, la prochaine fois, qu'est-ce qui... pourrait être intéressant de suggérer. Par exemple, les besoins, si un enfant manque de confiance dans sa capacité motrice, je vais avoir en tête à chaque fois, et même si on est juste en train de se déplacer d'un endroit à un autre, de me dire, je vais profiter le plus possible de l'environnement pour lui proposer des petits défis moteurs. Tiens, là, est-ce qu'il va avoir envie de marcher sur un tronc, passer dessous, passer dessus, grimper, sauter ? passer devant les autres dans la pente et guider le groupe. Voilà, prendre du plaisir à être dans un engagement moteur. Pour les enfants qui, au contraire, sont plus dans une dynamique d'agitation et qui foncent à toute allure et dans tous les sens, comme il y en a quand même souvent, je vais être attentive au contraire à leur proposer des moments où ils peuvent courir et bouger dans le vite et dans le fort. mais aussi des opportunités pour ralentir, pour observer, pour écouter, pour toucher, pour s'asseoir. Donc je vais créer des supports, par exemple, de missions à remplir, des petites choses comme ça, où je vais confier la roue des lichens à l'un, et puis c'est lui qui a cet objet et qui peut comparer quand il passe d'un trou. à un autre. Il est un peu plus en charge de cet objet que peut-être le groupe pourrait avoir envie d'avoir et donc il va avoir une attention à ce qu'il y a autour de lui parce qu'il a la roue des lichens par exemple. Pour des enfants par exemple qui ont plein d'idées mais qui ont du mal à les concrétiser, je vais orienter mes propositions sur des projets plus concrets. Comme des constructions, comme scier du bois pour faire le feu, comme transporter des éléments, comme assembler, comme fabriquer. Là, je vais essayer de prévoir dans mes propositions où il va y avoir des manipulations, il va y avoir des choses concrètes pour qu'on ne reste pas que dans la connaissance du milieu, parce que les enfants sont très dans le mental. Par contre, quand il s'agit de devoir faire dans la matière, ça peut être plus difficile. Alors, je vais avoir cette... attention là. Et puis j'essaye à chaque fois surtout de conserver un équilibre entre des temps dynamiques, des temps plus calmes, soit avec des explorations sensorielles, soit des moments de relaxation. Et puis quand le format de ce que je propose le permet d'avoir aussi des temps de jeu libre. Quand c'est sur des journées, sur des stages, ça c'est plus facile. Quand c'est sur des séances un peu plus classiques entre guillemets, en tout cas sur des temps de groupe un peu plus courts, où on a que... Une heure et demie, deux heures ou trois heures. Là, ça va dépendre. Quand on a trois heures, oui. En tout cas, ce qui est important, c'est que je vais surtout être tout le temps attentive à voir comment les enfants se saisissent de mes propositions. Si je sens que ça prend, on déroule. Si ça prend carrément et que j'avais prévu de faire trois choses, en fait, peu importe ce que ça prend, on va rester dans cette proposition. Par exemple, récemment, J'ai accompagné des enfants et on est passé près de dire au revoir au ruisseau. C'était la dernière séance de la saison. Et ce jour-là, il y avait beaucoup de courant à un endroit où il y avait beaucoup de pentes, beaucoup de courant et ça faisait de la mousse, une mousse incroyable. Et ces enfants, en fait, ils ont joué un très grand moment avec la mousse. Et en fait, on a discuté de, en fait, on ne va pas pouvoir aller dire au revoir. tous les endroits qui étaient sur la carte que j'avais préparé. Mais qu'est-ce qu'on préfère faire ? Est-ce qu'on joue encore un moment et c'est chouette parce que c'est trop chouette aujourd'hui, on a la chance d'avoir cette mousse et on ne va pas aller voir tel et tel endroit pour dire au revoir ? Ou est-ce qu'on fait le circuit et que c'est important pour vous de retourner dans ces endroits ? Ça, ça se discute pour moi vraiment quand je sens que c'est possible. Mais la plupart du temps, ça l'est. Et puis, ce qui me semble aussi important, c'est d'avoir des temps de mise en mots, de symbolisation de ce qui s'est vécu, soit à travers un cercle de paroles, à la fin, où on peut exprimer et écouter ce que les autres ont vécu, soit dans les carnets de la forêt, permettre de dessiner, moi j'écris. Et ça, c'est vraiment des choses qui laissent une trace. Alors quand on fait le cercle de paroles, c'est oral, c'est un moment instanté, mais ça vient aussi finir ce temps-là. Et puis quand c'est dans le carnet, il y a aussi quelque chose de toutes ces expériences qui à un moment repartira avec eux, ils repartiront avec la fin du cycle par exemple. Donc ça, c'est un petit peu dans ma posture. Et quand j'ai des profils d'enfants, je me dis tiens, là lui on va les soutenir plus ça ou ça. Dans le comment, je vais m'appuyer aussi sur différents outils concrets et des rituels. Effectivement, je ritualise. Il y a de la souplesse à l'intérieur, mais il y a une structure quand même dans mes séances qui est prévisible, que les enfants peuvent retrouver. Par exemple, on commence toujours un temps de début dans un endroit qui est toujours le même pour se dire bonjour. et écouter la lettre du gardien de la forêt qu'il a laissé dans cet endroit chaque fois. Et dans cette lettre, le gardien de la forêt, il y a un imaginaire du gardien de la forêt qui vient aussi susciter des questionnements chez les enfants. Et puis, il y a aussi, du coup, les règles, les règles de sécurité que je peux rappeler dans ce cadre-là, et puis le programme. Donc ça, c'est vraiment le rituel du début. Donc, il y a les enfants qui disent... Ah, mais c'est encore la lettre du gardien de la forêt. Il y a ceux qui peuvent commencer à m'accompagner dans la narration parce qu'ils savent, ils retrouvent, c'est du connu. Il y a ceux qui vont dire, mais moi, je crois vraiment que le gardien de la forêt, il n'existe pas. Mais si, moi, je t'assure, on l'a vu dans le nuage la dernière fois. Enfin, voilà. Donc, ça vient susciter des questionnements. Et puis, surtout, ça vient ritualiser. de retrouver du connu. À chaque fois, on retrouve du connu et on rajoute du nouveau. Et pour moi, ça c'est aussi important pour que l'enfant puisse dérouler et s'aventurer de plus en plus et grandir quelque part, grandir dans sa capacité à s'engager et à oser de plus en plus parmi les propositions. Donc il y a le rituel du début et le rituel de fin. Et puis après, il arrive parfois aussi qu'à certains moments au cours de la séance ou de l'atelier, j'arrête pour dire là on va reprendre un temps pour se parler. Mais ça c'est plus quand je sens qu'il y en a besoin. J'ai avec moi mes échelles des émotions qui se baladent dans mon sac à dos, qui justement que je dégaine un petit peu quand je sens qu'il y a besoin. Soit elles sont là à disposition dans les cercles. de début et de fin, soit quand je sens qu'un enfant traverse une émotion intense ou que je veux juste tâter la température, je sors cette échelle des émotions qui leur permet visuellement de pouvoir se placer sur l'intensité. Est-ce qu'il y a de la peur ou pas ? Est-ce qu'il y en a beaucoup ? Est-ce qu'il y a de la joie ? Est-ce qu'il y a de la tristesse ? Est-ce qu'il y a de la colère ? Donc à partir de ces quatre là, ça permet de situer ou ça permet aussi de dire, Regarde, lui là, il est en train de traverser ça, donc c'est pour ça qu'il t'a parlé comme ça, donc peut-être tu peux pendant un temps le laisser tranquille ou le laisser redescendre. J'utilise globalement pas mal d'outils quand même visuels, parce qu'avec des enfants qui ont des troubles du langage ou des troubles du spectre de l'autisme, ça vient vraiment soutenir mes propositions. Par exemple, dans les consignes, dans certaines consignes où il y a des choix à faire. Est-ce qu'aujourd'hui, les constructions, on les fait plutôt les enfants d'un côté, les parents de l'autre ? Est-ce que chacun veut faire sa cabane ou est-ce qu'on la fait collective ? C'est des choses qui parfois semblent très simples, mais selon le groupe que j'ai ou selon les enfants que j'ai, ça mérite d'avoir des soutiens pour être sûr que ce soit un choix éclairé de leur part. En tout cas, j'ai des outils visuels quand il y a, par exemple, plusieurs étapes à dérouler. Quand on a travaillé sur un projet en amont, la fois d'avant, et puis qu'il y a des... D'abord, il faut faire ça, ensuite, il va falloir faire ça, et après, il faudra faire ça. Pas que ça reste juste des mots et qu'ils se perdent là-dedans. Moi, j'utilise beaucoup d'outils visuels pour les aider à gérer dans la planification. pour qu'ils soient aussi en autonomie. Après, il y a des carnets, des bâtons de parole, des cartes de mission, des galets des émotions. Ça se crée aussi au fur et à mesure du groupe avec lequel je travaille. Mais j'ai beaucoup de... J'ai beaucoup, sachant que je ne me trimballe pas non plus avec une brouette, donc j'ai beaucoup, mais sur moi. Ça m'est arrivé aussi d'avoir vraiment des pictos pour une enfant non-verbale, pour essayer, en partenariat avec le travail qu'elle faisait dans son institution, d'essayer de soutenir le langage. Et du coup, ça, c'est un peu plus acrobatique, mais d'essayer de sortir... Le picto de ce qu'elle est en train de vivre maintenant. Elle est en train de marcher sur un tronc. Je vais essayer de lui montrer les pictos. On est en train de marcher, on est sur. Et c'est dans le tronc. Enfin, c'est le tronc. Et là, je vais le soutenir gestuellement. Je vais le soutenir aussi verbalement. Et je vais le soutenir qu'elle puisse aussi, elle, me dire à des moments, là, qu'est-ce que tu as aimé faire aujourd'hui ? Ah, j'ai aimé marcher sur le tronc. Plutôt que, je ne sais pas...
- Speaker #1
ramasser de la mousse par exemple voilà un petit peu en moyenne est-ce que tu saurais dire combien de séances c'est une moyenne vraiment de tu accompagnes pendant combien de séances tu accompagnes les enfants et c'est toi je suppose que ça s'intègre dans le monde que ce soit en forêt ou en cabinet, c'est un accompagnement global, non, que tu fais ? Est-ce que c'est aussi toi qui décides de la fin de l'accompagnement ? Elle est où la fin, en fait ? Comment elle se passe, cette fin d'accompagnement ?
- Speaker #0
C'est une vraie bonne question, parce que c'est jamais très délimité. On ne part pas sur une prescription de 10 séances et puis c'est fini. Comme ça peut arriver par exemple avec d'autres professionnels, tels que l'orthoptiste par exemple. Mais là, c'est vraiment une co-construction qui se fait avec les parents et les enfants au fur et à mesure. Et c'est vraiment très variable d'un enfant à un autre. Je dirais qu'en moyenne, j'accompagne les enfants à peu près entre un an au minimum et deux ans et demi, je dirais. Souvent, au bout d'un moment, il y a un petit peu soit... Soit les axes sur lesquels on a travaillé, il y a des choses qui ont bougé, soit il y a d'autres prises en charge qui prennent le relais. Par exemple, l'ergothérapie, qui parfois, chez des enfants plus grands, va venir prendre le relais. Et que du coup, ça fait beaucoup pour l'enfant de faire les deux. Donc voilà, ça se discute en tout cas toujours avec les familles. Moi, je n'ai parfois pas de définition. Parfois, vraiment, je vois et je dis, là, il me semble qu'il y a encore beaucoup de choses qu'on peut travailler. Alors... J'inviterais, en tout cas pour moi, il y a encore du sens à ce qu'on continue. Et puis, avec certains enfants, j'ai l'impression que ça fait un moment qu'on chemine ensemble, qu'il y a des choses qui se sont apaisées, tranquillisées. Comment ça résonne aussi ? Comment ça se passe ailleurs ? Pour moi, c'est vraiment important d'avoir le retour des familles. Du coup, à l'école, est-ce qu'il y a encore des difficultés ou pas ? Et si oui, de quel ordre ? Est-ce que c'est toujours de mon registre ? à la maison comment ça se passe, avec les copains comment ça se passe. Et quand je vois qu'il y a des choses aussi qui s'améliorent globalement dans tous les domaines, même si parfois ils restent dans le cadre de troubles, vraiment par exemple d'une dyspraxie, je n'ai pas l'ambition de régler toutes les difficultés de l'enfant. Il restera avec des difficultés, mais par contre à un moment, mon coup de pouce va s'arrêter aussi. Donc je dirais entre un an et trois ans. C'est une fourchette qui est très large, mais c'est à peu près les suivis que je fais.
- Speaker #1
Ok. Alors Anna, nous arrivons à la fin de notre échange. Est-ce qu'il y a encore un sujet qu'on n'aurait pas abordé qui te paraît important ? Ou est-ce qu'il y a un message que tu aimerais faire passer aux familles ou aux professionnels, quels qu'ils soient, de l'éducation, de la santé, par rapport à tous les sujets qu'on a abordés ?
- Speaker #0
Moi j'encourage tous les professionnels de l'éducation nationale et tous ceux qui peuvent à aller le plus possible dehors si c'est quelque chose qui résonne pour eux. Ça me semble vraiment être quelque chose d'une base importante et pas de le faire parce qu'on sait que c'est bien juste, pas uniquement en tout cas. Et en tout cas moi j'ai à cœur de continuer de proposer... aux parents, aux autres professionnels, ce que j'ai un petit peu commencé, de pouvoir leur partager mes pistes, mes astuces, mes trucs, mon positionnement pour qu'ils puissent s'en emparer pour eux, pour le faire, le continuer avec leur manière de faire. Et puis, pour les familles, je rêverais que tous les parents puissent avoir ce réflexe de pouvoir se dire, tiens... Aujourd'hui, on est mercredi, il fait un peu gris, mais ce n'est pas grave, on va aller voir ce qui se passe dehors, qu'est-ce qu'on peut vivre, qu'est-ce qu'on peut partager comme moment dehors, avec les enfants, déjà pour soi, et puis avec les enfants. L��, je trouve que ce serait vraiment, je me réjouirais que ça participe aussi. Il y a aussi un petit peu derrière moi l'idée que plus on va pouvoir connaître, plus on va pouvoir... aimer et plus on va pouvoir prendre soin et que il y a urgence à préserver ce qui existe encore, ce qui vit encore, ce qui est là et que c'est une richesse qui est merveilleuse, enfin qui est incroyable et qu'on peut en profiter et qu'on peut le savourer et qu'on peut le protéger. Ouais, je crois que je finirais comme ça.
- Speaker #1
Eh ben, merci beaucoup Anna pour tous ces partages et au revoir. appris plein de choses. Et écoute, si à l'occasion, tu proposes des formations, tu te lances dans les formations, moi, je crois que ça serait avec grand plaisir que je viendrais te voir. Parce que c'est vrai qu'à ce niveau-là, je crois que tu le disais, ce n'est pas encore une profession qui est très connue. Et ce n'est pas un sujet qu'on aborde tant que ça. De plus en plus, on le fait. Mais je crois qu'on... autant les enseignants que les pédagogues par la nature, vraiment toute personne qui accompagne des enfants. Et encore plus quand ça se fait en nature, je pense qu'on a plein de choses à apprendre du côté de la psychomotricité. Donc voilà, si à l'occasion tu proposes des formations, tu te lances là-dedans, parmi toutes tes casquettes déjà. Après, il ne faut pas en faire trop, on croule vite sous le travail. Mais voilà, j'ai appris plein de choses et j'ai passé un super moment. Donc, merci beaucoup pour tout ça.
- Speaker #0
Mais avec plaisir. En tout cas, c'est vrai que c'est peut-être un projet qui, quand je me sentirai encore plus assise dans ma pratique pour l'ouvrir au monde, je crois que j'aimerais beaucoup transmettre à d'autres. Donc, avec plaisir. Et merci à toi, Claire, pour cette opportunité de partager un peu ce que je fais un petit peu avec quelques autres depuis quelques années.
- Speaker #1
merci beaucoup et ben je vais mettre de toute façon dans les ressources de l'épisode ton site internet et ton compte Instagram mais voilà je vais continuer à suivre tes aventures avec plaisir à
- Speaker #2
bientôt Anna à bientôt merci à toutes et à tous pour votre écoute j'espère que cette discussion vous a plu et qu'elle éveille en vous une certaine curiosité pour l'éducation en plein air voire même peut-être une envie de militer pour qu'elle se répande davantage. Pour en savoir plus sur mon invité du jour, je vous invite à vous rendre sur le site pédagogieduvivant.fr. Vous y trouverez toutes les infos à son sujet, ainsi que ses recommandations. Sur ce, je vous donne rendez-vous la semaine prochaine pour un nouvel épisode, et d'ici là, n'oubliez pas, sortir, ça ne doit être que du kiff !
- Speaker #1
Allez, ciao ciao, à bientôt !