Speaker #0La France parce que je crois l'Alliance Israélite en Turquie, il y avait des cours de français et vantaient énormément la France. C'était le pays de la liberté, on ne rêvait que de la France. Et mon père, il faisait le va-et-vient entre Smyrne et Marseille, et à chaque fois il faisait un enfant, entre parenthèses. Et donc en 1929, mon père a rapatrié toute la famille, c'est-à-dire ma mère, qui avait à l'époque je crois 36 ans. mon frère David qui avait 8 ans, moi 6 ans et Rebecca 2 ans. Et on est allé s'installer à l'Estac Gare, c'est-à-dire à 11 kilomètres du centre-ville de Marseille, dans un quartier ouvrier espagnol, italien, provençal, très mitigé, mais où on a vécu. heureux pendant des années. C'est un quartier qui était très vivant. Dans la rue principale où nous avions le magasin, il devait y avoir au moins 20 commerces différents. Il y avait une gendarmerie, un commissariat de police, un cinéma. L'école communale, on avait toute la blouse grise, il n'y avait jamais aucun signe religieux. On a joué comme tous les garçons chrétiens, on nous appelait Isaac, David, sans aucun problème. Jamais, jamais je n'ai entendu un geste ou un mot d'antisémitisme. Mon père alors, il faut que je parle de lui parce que c'était un gros travailleur. En plus du magasin, il partait plusieurs fois par semaine avec un énorme ballon à l'épaule et une énorme valise à la main. Il se tapait des kilomètres jusqu'au quartier village de Rio Tiento, où il allait vendre à crédit à toute une clientèle d'ouvriers. Il n'a jamais eu de voiture. Et moi, j'avais 16 ans. Je l'ai accompagné. Et je me souviens de lui au retour en fin de matinée. au retour à la gare, en nageant, le visage brûlé par le soleil, en train de se sécher. Elle se souvenait de mon père. Ma mère, elle tenait le magasin pendant que mon père n'était pas là, mais elle ne savait ni lire ni écrire, mais elle savait compter. Ma mère ne parlait que le dino, elle ne parlait pas français, elle comprenait. Mon père devait avoir appris le français puisqu'il avait vécu quand même plusieurs années en France, mais il ne savait pas écrire et je crois qu'il ne savait même pas lire le français. Tout ce qu'il savait lire et écrire, c'était les lettres hébraïques. Et son livre crédit, tout était écrit en lettres hébraïques. Donc au début de la guerre, tant qu'il n'y a pas eu les décrets antisémites de Pétain, il n'y avait aucun problème, on vivait heureux à l'Estac-Gare. Je me souviens de « Maréchal nous voilà » , ça qu'on a chanté tous ensemble, très heureux. J'étais même descendu en Marseille pour aller le voir. Ah, qui nous a rendu n'est l'espoir croissancement obligatoire israélite, mon père avec un ami est allé se déclarer. Comment ne pas se déclarer lorsque dans un quartier comme l'Estac, trois familles juives connues de tout le quartier, parce que mon père ne sachant ni lire ni écrire, sur un magasin il n'y avait aucune duventure, aucun nom, alors quand les clients venaient, ils venaient chez le juif. Ma tante, qui était la femme d'Isaac, était rebouteuse. Elle habitait derrière la gendarmerie. Mais des tas de gens venaient se faire soigner chez la juive. Donc, obligés de se déclarer, ça ne faisait aucun problème. Et puis, on était français. On était français depuis 1933. Alors, qu'est-ce qu'on risquait ? On était français, on risquait rien. Donc tout le monde est allé se faire déclarer. Peut-être que des juifs plus évolués à Paris étaient au courant de ce qui se passait. À Marseille, peut-être, je ne sais pas, mais nous on était à 11 kilomètres du centre-ville. On était totalement, je ne dirais pas oubliés, mais enfin, on était tranquilles. On se croyait à l'abri, on ignorait tout. On savait que le vieux port allait être évacué. Et moi, je prends ma tenue de défense passive et je m'en vais à Marseille, au vieux port, pour essayer d'aider comme j'ai pu. Je n'ai rien eu, ni rafle, ni rien. Je suis rentré à la maison. Les rafles qui ont eu lieu justement au moment de l'évacuation du vieux port, moi je n'ai rien su du tout. Entrer à la maison, je n'ai même pas su qu'il y avait des rafles, on n'en parlait pas. Je ne sais pas, on ne lisait pas les journaux, on n'avait pas de radio. Alors comment savoir ? On a entendu parler de Paris, de Veldiv, mais on en a entendu parler par les actualités. au cinéma. Alors mon frère et moi, au cinéma, on avait une vague idée de ce qui se passait. Mes parents, eux, n'étaient au courant de rien. Tant qu'il n'y avait pas le tampon juif, on y va tranquillement. Et à partir du tampon juif, alors là, on s'inquiétait des contrôles. D'ailleurs, mon frère, en 1942, avait 20 ans, il a fallu faire le chantier de jeunesse, il a passé trois mois ailleurs, et puis on l'a renvoyé parce que juif, on ne voulait pas de juif au chantier de jeunesse. Vous savez que Pétain avait décrété que les jeunes Français de 20 ans allaient travailler en Allemagne obligatoirement. Alors mon frère, pour éviter le STO, c'était... inscrit au chantier naval de la Ciutat. Et tous les matins, il prenait le train, il allait à la Ciutat, le samedi, il revenait à la maison, il passait le week-end et il repartait le lundi. Et c'est comme ça, avec sa carte à tamponner juive, que dans le train qu'il a mené un lundi, qu'il a mené à La Ciutat, il a été arrêté par la Guiseppe. On a reçu une lettre de chantier naval de La Ciutat, trois jours après, me disant « Monsieur Alphandar et David ne s'est pas présenté » . On ne savait rien. Alors, qu'est-ce qu'il est devenu ? On était totalement affolés, jusqu'à ce qu'on reçoive cette carte, enfin ce bout de papier, qui a été envoyé à nos amis qui habitaient en face de chez nous, et qui nous ont porté cette lettre. apporté contre forte récompense à cette adresse. Monsieur Puget, Vincent Rue-Le-Paletier, qui que vous soyez, si vous avez du cœur, vous porterez ce message. Demandez aux consulatures d'interviewer, n'étant pas encore majeur, j'oublie pour la nationalité turque mon frère, là, il rêvait. Ne voyagez pas, j'ai été arrêté comme les autres entre la Ciutat et Marseille. Je suis interné secrètement dans la prison de Saint-Pierre à Marseille avec des compatriotes français. Je me porte bien, on parle de nous mettre dans la camp de Drancy à Paris dans une quinzaine de jours. Je crois qu'on relâche le sujet turc. Bon moral, avertissez avec précaution mes parents. Je crois que vous pouvez envoyer petit... colis David Alfandari. Il était parti déjà vers Drancy quand on a reçu cette carte, je suppose, je suppose parce que on ne savait pas du tout où il était. Il n'y a pas de date, vous voyez, c'est une carte, ce n'est même pas une lettre. Comment elle est parvenue chez M. Puget, je n'en sais rien. M. Puget habitait en face de chez nous et son fils Henri était un copain. On a reçu par la suite pas mal de lettres venant directement du camp de Drancy, 22 juin 1943. Je vous prie, M. Puget, de remettre la carte postale à mes parents. Merci beaucoup, chers parents. Je vous fais savoir que je me porte bien. Je pars pour une destination inconnue. Aussi, je vous demande de ne pas vous inquiéter si vous ne recevez pas de nouvelles, car je ne pourrai certainement pas vous écrire. Ne vous en faites pas pour moi. J'espère que ces quelques moments passés, si ponibles soient-ils, bientôt suivis de joie profonde. Ce n'est pas la peine d'envoyer de colis car je ne serai pas là. Je ne pourrai pas savoir le résultat du bac d'Albert. Je devais passer mon baccalauréat à l'époque. J'espère que les enfants et maman sont partis en vacances. Je vous embrasserai fort et je vous remercie pour toutes ces gentillesses que j'ai toujours reçues dans les colis. N'en expédiez plus votre fils qui vous embrasse. Et croire que la réunion, si Dieu veut, très poche. Et puis le 23e, je vous fais savoir que je pars. que je suis en bonne santé. C'est du train qui me porte vers la frontière que je vous envoie ces deux mots. On dit qu'on va à Metz, d'où on outrira, expédiera les hommes dans les usines en Allemagne, en Pologne. Je ne pourrai donc plus ni envoyer ni recevoir de colis, ne vous inquiétez pas pour moi, je vois la Réunion. C'est la prochaine. Vous voyez, ils partaient travailler en Allemagne. Ils ne savaient absolument pas qu'ils allaient à la mort. À l'hypocrisie, justement, de ces salauds de Pétain et Laval, ça a été de nous faire ignorer ce qui se passait totalement.