- Speaker #0
Flamme des années 80.
- Speaker #1
Le podcast qui allume la femme.
- Speaker #0
Bonjour ! Alors, je suis très heureuse aujourd'hui parce qu'on fait un peu une émission spéciale. On a un peu tout chamboulé les emplois du temps de tout le monde et surtout d'Hélène. Parce que je reçois donc Hélène Merlin aujourd'hui, qui est la réalisatrice et l'autrice de ce film, moi, que je trouve vraiment fantastique et fabuleux, qui est d'utilité même publique, je vais aller jusque là, qui s'appelle Cassandre. Et je suis hyper heureuse en plus de retrouver Hélène grâce à cette émission. Donc merci Hélène d'être avec moi aujourd'hui. Merci. Alors Hélène, est-ce que tu veux te présenter un petit peu déjà directement pour parler de toi un petit peu, ton parcours ? Enfin nous on se connaît depuis quand même un petit peu, un petit temps, un petit moment.
- Speaker #1
Oui, donc j'ai commencé par être comédienne et donc j'étais à l'école de théâtre, le Sédène Théâtre avec Sarah, il y a une vingtaine d'années. Et puis j'ai tourné un peu dans des courts métrages. Après j'ai repris des études de médiation culturelle. Après, j'ai bossé en radio, j'ai fait une formation de journaliste, reporter d'image aussi. Et puis, à un moment, cette histoire m'est venue et elle s'est un peu imposée à moi avec la nécessité de la raconter pour le cinéma. Et donc, voilà, et neuf ans plus tard, le film sort.
- Speaker #0
Oui, parce que le film est sorti il y a déjà quelques... Il y a une semaine. Il y a une semaine. Et c'est vrai que c'est un film qui est fantastique et que vraiment, on a envie que les gens... Et surtout, c'est vraiment dans... Pour les auditrices qui écoutent, c'est exactement des choses qui peuvent correspondre à des questionnements du moment. C'est vraiment sociétal en plus. Comment ça t'est venu cette idée qui t'est imposée à toi ? Comment elle est arrivée ?
- Speaker #1
Je me suis rendue compte que dans ma vie, j'étais confrontée de manière très régulière à des violences sexistes et sexuelles. Quand j'étais comédienne, je me suis fait tripoter par des acteurs. J'ai un des courts-métrages dans lequel j'avais tourné, c'est retrouvé sur un site de BDSM américain. Je recevais chez moi pendant dix ans des photos pour des demandes de dédicaces. Ou, je ne sais pas, à la radio, il y avait des relations un peu de pouvoir et hyper sexistes. J'ai été violée par un prof de la Sorbonne, enfin bref, il y a une quinzaine d'années. Et à force, je me suis dit qu'il y a forcément quelque chose que je porte en moi. qui fait que je me retrouve dans des situations compliquées, où je suis en « danger » , en insécurité et que je ne me rends pas compte. Je dois être « attirée » par des personnes qui vont facilement pouvoir abuser de moi, etc. Et donc, je me suis dit qu'il fallait vraiment que je règle mon problème, entre guillemets, et que j'autopsie, on va dire, mon histoire de famille, que je retourne un peu visiter toute mon adolescence. Et que, aussi, je me documente sur tous les livres féministes qui décryptent un peu la société dans laquelle on est et en quoi elle est le terreau de ce type de violence. Et donc, j'ai démissionné de Radio France à l'époque. J'étais chroniqueuse radio à Mouv'. Et puis, je me suis mise à écrire cette histoire avec ce désir de comprendre en moi et dans la société ce qui se jouait.
- Speaker #0
Ça se ressent vachement dans le film, en fait. Je trouve que ça... Alors, c'est un film qui parle... On ne va pas spoiler l'histoire, mais... Il ne faut pas avoir peur. On sort de là avec... On rit. L'image est sublime. C'est un vrai film de cinéma où on rentre complètement dans une histoire et ça se sent en fait que... On sent un travail. En tout cas, moi, je l'ai senti. J'ai senti un travail personnel, un travail abouti. Une femme prête justement à... Mais on est dans le podcast qui allume la flamme. Donc, à transmettre... ce flambeau et cette lumière et d'éclairer aussi cette part, moi, que je trouve aussi assez sombre de l'adolescence, cette part, ce début de sexualité, ce début de changement de corps, ce début, en fait, qu'on a tous vécu parce qu'on a tous, mais dont personne ne parle et qui peut avoir des dérives. Et je trouve que tu en parles d'une façon très fine, très intelligente et très lumineuse. Et n'ayez pas peur d'aller voir ce film, au contraire, parce que c'est un rayon de soleil. Les actrices que tu as choisies, elles sont d'une lumière folle.
- Speaker #1
C'est vrai qu'évidemment, le film est nourri de 15 ans de thérapie, de stages divers et variés, de chamanisme, de CNV, de thérapie MDR. Il y a eu vraiment un gros travail aussi sur le transgénérationnel et j'avais envie de transmettre un peu des solutions, moi ce qui m'avait fait du bien, ce qui m'avait fait comprendre des choses. Et effectivement, dans le film, il y a une chouette histoire d'amitié, donc de sororité. Il y a la présence des chevaux qui, moi, m'ont fait beaucoup de bien aussi. J'ai travaillé beaucoup en équithérapie pour un peu explorer, on va dire, mes émotions et mon histoire. Il y a un moment aussi où il y a un passage dansé. La danse a été, comment dire, très...
- Speaker #0
Salvatrice ?
- Speaker #1
Ouais, pour moi, c'est vraiment un moyen d'être dans le... le corps, de ne pas être dans la tête, de lâcher les mouvements, de lâcher les tensions du corps, d'être dans la musique et en même temps d'être dans, quand je danse du rock, du tango, de la salsa, du fourreau, enfin beaucoup de danses de couple et aussi dans la relation au partenaire, en fait, d'être dans une relation de confiance, de lâcher prise. En fait, tout ce qui dans ma vie m'a permis, moi, de transcender des choses, de m'ouvrir, de me libérer de plein de choses, j'ai essayé de le distiller comme ça dans le film. le rapport à la nature. Et voilà. Et je pense que tout ce film est nourri de... de toutes les solutions, de tout ce qui m'a aidée dans le film. Et donc, je suis très contente que tu trouves qu'il est lumineux parce qu'il y a quelque chose, un mouvement de vie, je trouve, qui est plus fort que tout et qui nous emporte et qui nous mène vers une libération. Oui,
- Speaker #0
et c'est vrai que ce que tu dis sur le transgénérationnel, pour moi, ça transe parce qu'en fait, je suis assez... Avec les émissions, forcément, je fais des émissions sur le transgénérationnel, sur les constellations familiales, sur le MDR. Et ça se sent, en fait. Il y a des références, il y a des passages. Il y a un passage fabuleux que je trouve sur... Il y a beaucoup de métaphores aussi dans ce film. Les métaphores sur les loups, le loup blanc et le loup noir. On ne vous en dit pas plus. Pour moi, j'ai trouvé que c'était une vraie façon d'écrire la vie, mais d'une façon très profonde. Et c'est un film, je pense, on a besoin aujourd'hui d'aller dans d'autres niveaux de conscience. Et je trouve que si on ne les a pas, ce n'est pas grave, le film est super. Mais quand on les a, ça m'a sauté aux yeux. Les histoires, les références, le travail que tu as fait intérieur. pour pouvoir arriver justement à tout ça, ça se ressent énormément.
- Speaker #1
Je suis ravie et c'est marrant que tu parles des constellations parce que j'en ai fait avec un troupeau de chevaux, en fait, où on était au milieu d'une carrière avec un troupeau en liberté et donc tout un travail de constellation. En fait, il y a des émotions qui remontent, des images qui remontent et du coup, tu vas pouvoir associer, par exemple, une jument dominante dans le troupeau. Moi, je l'ai associée à ma mère et elle est venue au galop vers moi, hyper agressive et tout, ça fait remonter des trucs. où il y avait une ponette qui était blessée par exemple dans ce jour-là. Et donc ça me rappelait moi adolescente en fait, je me voyais moi adolescente en elle. En fait c'est fou, j'ai fait aussi beaucoup de constellations familiales avec des hommes, avec des humains. Mais avec les chevaux il y a quelque chose de complètement fou parce qu'on n'est pas dans du verbal, on n'est pas dans l'interprétation psychologique ou toute la part qu'on peut mettre dans ça, la part consciente. et donc je trouvais ça assez fort et je suis très contente que ça se sente parce qu'évidemment pour le grand public ceux qui ne sont pas sensibilisés à tout ça je pense qu'ils reçoivent des choses mais ils ne perçoivent pas dans le détail tout ce qui est présent mais du coup toi en experte en fait je pense que oui ça se sent effectivement même à la fin la scène de libération où on la voit à cheval, où sa copine joue du tam-tam et tout. Pour moi, c'est clairement relié à mes stages que j'ai faits en chamanisme, avec les chevaux. Donc, je suis hyper touchée que ça se sente et que tu le traverses.
- Speaker #0
Je l'ai vu hier soir, le film, et moi, j'ai mis du temps à en sortir parce que je me suis ressentie transportée dans cette ambiance aussi qu'il peut y avoir dans une famille qui peut être assez lourde, même si moi, je suis très loin de... Ce n'est pas une référence par rapport à moi, à ce que j'ai vécu, mais... Mais ces énergies qu'on sent, en fait, et qu'on sent quand on rentre quelque part et comment ça peut nous envahir, ce manoir qui est la reine, entre guillemets, du film, c'est aussi une espèce de... Ces scènes avec ces grilles que tu fermes, c'est un... Pour moi, il y a vraiment ce truc de... Il y a beaucoup de subtilités, de prison dorée, d'images, de symboles, de métaphores qui sont super belles et hyper fortes. Et c'est bien dosé, en fait. C'est-à-dire que c'est très, très bien dosé. Et tout ce rapport aux chevaux. Et c'est marrant parce que... Quand moi, je suis ordée du film hier soir, j'étais bouleversée. Et en même temps, ça allait plus loin que ça, parce que je n'arrivais pas à en vouloir non plus. Il n'y a pas de méchant et il n'y a pas de gentil, en fait. Je n'arrivais pas à en vouloir. Alors, je suis désolée peut-être de dire ça, mais ni au père, ni à la mère. En fait, je sentais que c'était pris dans quelque chose vraiment de transgénérationnel. Et c'était des codes qui étaient différents à l'époque. On n'avait pas forcément les mots et les choses. Et je sentais tout le monde qui pataugeait dans cette Ausha. Et c'est tout. petite Cassandre qui, elle, sans le faire exprès, entre guillemets, cette naïveté, cette force, entre guillemets, de tout envoyer balader, en fait, de mettre le gros coup de pied dans la fourmière et je trouve que en tout cas, moi, je vous invite vraiment à y aller. Oui,
- Speaker #1
c'est vrai que, évidemment, tout ce qui est histoire de famille, je pense que déjà, ça peut résonner avec plein de gens, même si t'es pas immédiatement confronté à la thématique qui est abordée dans le film, mais toutes les histoires de famille, entre guillemets, se ressemblent à des degrés différents. Il y a toujours dans notre famille un oncle un peu fou, une tante un peu excentrique, un cousin bizarre. Je pense que ça peut parler à toutes les familles. Effectivement, je n'ai pas du tout voulu faire un procès aux parents du film ou cibler des gens, accuser des gens. Il y a une problématique familiale, il y a une problématique de société derrière qui est très grande. Et évidemment, quand on regarde une famille sur plusieurs générations ou une époque, aussi les années 70, 80, 90 qui sont quand même des époques très particulières où Mads Neff était reçu à la télé où on avait Depardieu, Jaco, Doyon qui régnaient sur les plateaux de cinéma où PPDa était à la télé etc enfin c'est quand même une époque très particulière et donc de voir aussi comment dans l'infiniment petit d'une famille on peut dire, il y a des résonances avec la société entière et sur l'héritage des violences de guerre en fait, la seconde guerre mondiale J'allais y venir,
- Speaker #0
c'est exactement ça ... Je trouve que c'est très intelligent d'avoir mis ces violences de guerre. Et pour moi, dans tout le travail que j'ai fait, à la fois personnellement et dans le podcast, on a fait beaucoup d'émissions sur les violences faites aux femmes. Moi, je m'y intéresse énormément. Et c'est vrai qu'une espèce de voir que l'homme prend tellement de violences. Et c'est intéressant que ce personnage du père soit justement militaire et qu'il soit dans ce truc de violences très fortes. Et en fait, ces violences-là, à un moment donné, elles se répercutent. Et dans les années 70, 80, 90, c'est les après-guerres. C'est ce qui reste des violences qui ont été faites, qui font en sorte que ça se répercutait. C'est sociétal, en fait. C'est-à-dire qu'en vouloir aux hommes, en vouloir aux femmes qui ont accepté... Enfin, c'est en vouloir à personne. C'est juste que la vie, elle est faite comme ça et ça se voit très bien. En tout cas, je l'ai vachement ressenti. Oui,
- Speaker #1
oui, je ne suis pas là pour juger les personnages, mais pour observer une époque et pour observer sur le temps long d'une société comment l'époque évolue. Et quels sont les défis aussi de chaque génération ? Parce que la génération de nos parents post-mai 68, avec mai 68 justement, ils ont envoyé valser un cadre hyper rigide de la génération précédente. C'est la libération sexuelle entre guillemets, mais qui est allée très loin jusqu'à l'objectivation de la femme, l'hypersexualisation des femmes, des jeunes filles, des adolescentes, etc. Donc de dire en fait, c'est oui, la génération qui nous a précédés a, on va dire, bouleversé les mœurs. Il y a eu le droit de vote, il y a eu le droit des comptes en banque pour les femmes, etc. Les femmes se sont mises à travailler, à avoir une autonomie financière. Et avec Mai 68, on est allé très loin dans la libération des corps et des mœurs. Et aujourd'hui, c'est quelque chose qu'on requestionne, qu'on remet en perspective. Et notre génération a d'autres enjeux, d'autres défis à relever. Et c'est important, je pense, d'observer cette évolution de société pour évoluer dans le bon sens.
- Speaker #0
Mais ça, ça se ressent énormément, je trouve. Et c'est très intelligent, en fait, de l'avoir amené de cette manière-là. Donc moi, je trouve que c'est un film vraiment hyper intelligent, hyper brillant, ce rapport aux chevaux aussi, par rapport à tout ce qui est l'équithérapie. J'invite les auditrices à écouter ou auditeurs. On a fait une émission sur, justement, l'équithérapie. Comment réussir à avoir, en fait, cette vision plus large pour aller se connecter au fait qu'on est tous interconnectés. C'est-à-dire, c'est ça qu'on ressent. On peut ressentir ça dans ton film, on ressent ça aussi quand on fait des constellations familiales, tu sais, cet inconscient collectif en fait, qui fait en sorte que dans les années 70, 80, 90, cet inconscient collectif va nous pousser à ça. Aujourd'hui, je pense que notre inconscient collectif nous pousse à une réparation, à le fait de grandir, de plus s'entendre, s'écouter. Et je trouve que ce film, entre guillemets, tu es vraiment dans l'air du temps et la force que tu en dégages, moi je trouve ça hyper beau. De voir cette petite Cassandre qui a une force incroyable de parler. Et toi, Hélène, la force incroyable d'avoir fait ce film. Parce que ce n'est pas rien, tu vois ce que je veux dire. Je ne sais pas si tu t'en rends compte.
- Speaker #1
Je ne sais pas trop parce que ce qui me reste là encore, c'est encore Fred. Donc il y a tout ce que j'ai raté, tout ce que j'ai mal fait, tout ce que j'aurais voulu faire différemment, tous les petits défauts du film que moi je vois qui évidemment... sont invisibles pour la plupart des gens, mais qui, moi, me font encore beaucoup souffrir. Donc, j'ai encore pas mal de choses à libérer. Mais par rapport à l'équithérapie, c'est ce que tu dis, c'est une méthode qui est employée aussi beaucoup pour les traumatisés de guerre, en fait, pour ceux qui sont en syndrome post-traumatique suite à des guerres, à la guerre du Golfe, la guerre en Afghanistan, et toutes les guerres qu'il y a eues. C'est une pratique qui se fait, qui se fait aussi dans les EHPAD, dans les hôpitaux. auprès des enfants handicapés, des enfants autistes, etc. Il y a tout un travail qui peut être fait et on se rend compte qu'en fait, on est tous, entre guillemets, traumatisés. Et c'est ce qu'on montre aussi le film, que chaque personnage, dans sa trajectoire, a été heurté à un moment, a subi des violences. Et comment on fait ? Et aussi, comme tu dis, selon l'époque à laquelle on appartient, aujourd'hui, c'est plus facile d'aller voir un psy, c'est plus facile de parler, de se confier, de trouver des manières de guérir. Donc, on a cette Ausha aujourd'hui de pouvoir être... à une époque où la parole se libère et où on peut peut-être prendre soin davantage les uns des autres. Oui,
- Speaker #0
et ça, tu le fais très bien, je trouve, dans ce film parce que c'est vraiment, on sent qu'il y a beaucoup de soin. Et ce personnage de l'ami aussi, cette amie qui est importante, la sororité qui ressort énormément avec cette... C'est un peu comme cet élément extérieur qui arrive dans une famille, tu sais, quand t'es toujours dans le même endroit, tu vois plus vraiment grand-chose et puis elle, elle arrive avec ce... C'est un peu comme nous, le spectateur. On vient, on rentre dans cette maison, on voit ce qui se passe. Est-ce que ça fait peut-être un peu partie de la prise de conscience peut-être aussi de Cassandre à ce moment-là, quand son amie... Oui,
- Speaker #1
bien sûr. L'adolescence, déjà, c'est un âge vraiment clé dans la construction identitaire. Parce que quand on grandit dans sa famille, on pense que sa famille est normale, que toutes les familles fonctionnent comme la nôtre, que les relations et tout ça sont les mêmes partout ailleurs. Et puis, quand notre cercle social s'ouvre à l'adolescence, c'est là qu'on a des copains, c'est là qu'on va dormir chez les uns, chez les autres, qu'on part en vacances avec nos potes. Vraiment, le cercle social s'agrandit et du coup, on est confronté à d'autres modèles, d'autres familles, d'autres modes de relations. Et donc, à cet âge vraiment clé, c'est là qu'Ascende va rencontrer effectivement cette jeune adolescente qui a aussi une histoire de famille un peu compliquée. On n'en parle pas vraiment, mais on l'évoque. Et puis le fait qu'elle arrive dans sa maison, ça va être un moyen de revoir à travers ses yeux ce qui peut paraître dysfonctionnel dans sa famille. Et ça va être vraiment cette prise de conscience aussi dans sa relation aux chevaux, dans la relation au moniteur d'équitation, où elle va vraiment changer de regard sur sa famille parce qu'elle découvre une autre manière d'être au monde, une autre manière d'être en relation avec les humains, avec les animaux. Et surtout, j'ai construit vraiment les deux écosystèmes, les deux univers en parallèle. C'est que dans le manoir, il y a beaucoup, beaucoup de logoré verbal. C'est envahi par la parole, par des théories, etc. Alors que l'espace au centre équestre est très silencieux. Le moniteur est à l'écoute. Il parle peu. Il accueille ses émotions, même la colère. Il ne la rejette pas dans sa colère. Il ne la juge pas dans sa colère. Il lui pose des limites fermes, mais il l'accompagne. Il est présent, il est là. Donc c'est vraiment faire une construction en parallèle de ces deux univers et voir ce petit personnage de Cassandre qui évolue de l'un à l'autre et qui va changer de regard, oui, absolument.
- Speaker #0
Je trouve ça hyper intéressant quand elle est dans l'équitation, elle lui dit beaucoup de fois « respire » .
- Speaker #1
Oui, parce qu'on est tous en apnée dans nos sociétés. On est tous en apnée en vrai. Et la respiration, c'est quelque chose d'extrêmement intime et qui libère déjà, si on prend le soin de respirer soi, mais ça libère déjà énormément de choses. Ça nous fait redescendre dans notre corps, dans notre chair, dans notre intérieur.
- Speaker #0
Respirons. Une petite méditation de respiration.
- Speaker #1
Non, mais c'est vrai.
- Speaker #0
Non, mais c'est vrai. On n'en peut plus sous les mois de méditation. Mais c'est vrai que c'est tout bête, mais c'est vrai que respirer, ça permet de changer énormément de choses dans le cours, ne serait-ce que d'une journée. Puis dans le cours d'une vie, si on le fait au quotidien. Oui,
- Speaker #1
ralentir.
- Speaker #0
Ralentir,
- Speaker #1
faire baisser la pression.
- Speaker #0
Nous, on est au taquet,
- Speaker #1
on parle comme... Mais oui, mais... Oh là là, je suis venue, il y avait tellement de monde dans Paris, je me faufilais en scooter comme une dingue pour arriver à l'heure. On est dans nos villes citadines et notamment à Paris. C'est dingue comme on est dans une sorte d'électricité pression permanente. Et du coup, moi, j'ai énormément besoin de me ressourcer dans la nature et auprès des animaux comme ton petit chat trop mignon. Les animaux ont une intelligence, une intuition, quelque chose qu'on a perdu en fait. C'est comment essayer de retrouver ça, aussi bête que ce soit. Comme les bébés, mais quand un bébé vient au monde, il est tout ouvert. Je ne sais pas, il y a un truc qu'on perd avec l'éducation. Et c'est retrouver le chemin. Oui,
- Speaker #0
alors nous, on fait beaucoup d'émissions pour essayer justement de retrouver le chemin. Et la respiration fait partie. Mais il y a plein de petits types, l'équithérapie. C'est génial parce que dans le film, tu donnes plein d'infos de pouvoir justement... Et puis c'est un film sur la guérison dans un sens. C'est comment est-ce que... Parce que c'est toi qui l'as fait. Et comment est-ce que tu arrives ? C'est un énorme message d'espoir pour dire, je suis debout, j'arrive à en parler, je vais bien, je me suis renseignée. J'ai trouvé plein de petits cailloux sur la route pour retrouver mon chemin et j'ai réussi. Et je trouve ça super, je trouve ça assez incroyable.
- Speaker #1
C'est marrant que tu fasses cette analogie, on dit, avec les petits cailloux. Pour moi, j'ai vraiment construit ce film comme un conte noir, avec l'idée de cette famille dans ce château un peu hanté, de ce manoir un peu hanté de fantômes, et puis l'idée d'un petit paradis au milieu de la forêt. Le personnage de Cassandre part un peu toute seule à travers la forêt pour aller à la rencontre de gens qui vont l'aider, un peu comme dans les contes. Et puis dans le manoir, il y a aussi les personnages des parents qui sont... qui sont pour moi comme des archétypes, on va dire, du roi hyper puissant et un peu ridicule, et de la vieille marâtre un peu méchante, comme dans Blanche-Neige ou ces choses-là. Donc de travailler un peu sur ces figures archétypales, et puis sur l'idée d'un cheminement exactement comme le petit poussé avec ses petits cailloux qui va à travers la forêt, c'est tout à fait ça.
- Speaker #0
On le ressent, et on ressent beaucoup de poésie avec cette marionnette aussi. Il y a quand même des... On ne vous spoile pas, mais on vous donne envie d'y aller. Et je trouve ça très joli, en fait. Et c'est marrant, peut-être parce que j'ai le chaton depuis pas longtemps, mais cette marionnette avec cette douceur et cette petite main, elle m'a vraiment fait penser à la petite main de Flamme qui me fait du bien, tu sais. Qui, le soir, me fait une petite caresse. C'est très doux. Et donc, du coup, ce qui est génial avec cette marionnette, c'est qu'on peut mettre ce qu'on veut aussi. Et c'est ça qui est intéressant. Donc, moi, j'ai mis Flamme. mon petit chat parce que j'ai trouvé que c'était très joli et en même temps ce côté marionnette en fait à un moment donné tu fais les choses mais c'est toi qui guide mais est-ce que c'est toi vraiment qui guide quand t'es adolescente enfin tu vois moi il y a une phrase que j'ai retenue dans le film et vraiment je pense qu'elle peut résonner ça m'émeut énormément de la dire elle peut résonner avec beaucoup de femmes je pense c'est à un moment donné tu dis voilà je l'ai fait pour qu'il m'en parle plus et qu'il arrête d'en parler oui Et ça fait 30 ans que j'en parle encore. Oui, c'est ça. Mais j'ai trouvé que ça résumait extrêmement bien des milliards de situations où des femmes, des fois, se disent « Allez, c'est bon, comme ça, on n'en parle plus. » Mais sauf qu'après, il faut mesurer ce tact. Et je trouve ça sublime. Cette phrase, vraiment, je trouve que ça fait un écho. C'est vraiment une balle en plein cœur qu'on peut recevoir. Et c'est surtout... Par rapport aux jeunes filles, surtout, aux jeunes femmes, c'est très important de l'avoir en tête.
- Speaker #1
J'entends tout ce que tu dis et ça m'émeut, parce que c'est vrai que parfois, pour clore une situation ou se sortir d'une situation, on a tendance à se trahir soi d'abord. On va se dire, pour ne pas blesser l'autre, ne pas rejeter l'autre, ne pas être désagréable, ne pas être impoli. Pour mille raisons, on va soi-même se trahir. quelque chose, poser un acte, poser des gestes qui vont à l'encontre de ce qu'on est nous, au plus profond. Et on le fait pour, en gros, effectivement, comme tu dis, ne plus en entendre parler. Et en fait, force sacrée des séquelles. Voilà, légère. Et donc, c'est de ça aussi dont il faut revenir et avoir conscience qu'à chaque instant, on a... Peut-être le choix, la possibilité, la responsabilité individuelle de décider et de faire en sorte d'essayer avant tout de se respecter soi et pour être respecté des autres. Il y a une part de responsabilité, je pense, mais pas dans l'idée de la responsabilité culpabilité, c'est-à-dire de la responsabilité comme on peut être responsable d'un animal ou d'une petite fille, d'un enfant dont on aurait la garde, se dire j'ai la responsabilité de prendre soin de lui. Et réussir à trouver en soi cette responsabilité-là de se parentaliser soi, de prendre soin de soi, de se protéger soi, pour se sortir de situations ou juste avancer dans la vie, mais en se respectant soi d'abord avant toute chose.
- Speaker #0
Et ça, je trouve que tu l'expliques très très bien, parce que toute cette culpabilité que justement Cassandre peut ressentir, ou ce truc de des fois aller faire un pas, ou aller vers quelque chose pour que ça s'arrête, en fait, parce qu'il n'y a plus de solution. Enfin, tout est très bien. Enfin, vraiment, moi, je vous crois qu'on va arrêter de rentrer dans les détails du film, parce que j'espère qu'on vous a donné, en tout cas, envie d'aller le voir, parce que c'est hyper important. D'ailleurs, ton film est passé à l'Assemblée nationale.
- Speaker #1
Oui, tout à fait. Le 1er avril, on a eu la chance d'être soutenus, du coup, par une députée qui a trouvé que c'était important d'aborder... le sujet du film à travers le prisme d'une œuvre d'art qui permet de sensibiliser mais en racontant une histoire, il n'y a pas une approche théorique ou politique vraiment, il y a une approche sensible et donc je pense que ça peut aider les politiques à prendre des décisions sur la protection de l'enfant, sur l'accompagnement des victimes des agresseurs, sur tout ce qui est le travail pédagogique qu'on devrait faire à l'école dès l'enfance, l'apprentissage du consentement de ces notions. toute simple mais qu'on n'apprend pas. Et puis il y avait aussi beaucoup de médecins, on a sollicité énormément d'assos et moi j'ai sollicité beaucoup de médecins, des psychiatres spécialisés en psychotrauma, en... en toute chose quoi. Et tous m'ont dit que c'était vraiment un outil pédagogique ce film pour eux, pour leurs élèves. Donc ils ont envoyé leurs élèves voir le film, ils vont l'étudier en classe et ça va être vraiment pour eux une source émotive. référence en fait, une référence pour former les futurs médecins, les futurs psychologues, les futurs psychiatres, comprendre aussi la spécificité du psychotrauma, de tous les phénomènes de sidération, dissociation, qui sont aussi un peu illustrés dans le film.
- Speaker #0
Qui sont très bien expliqués. En tout cas,
- Speaker #1
j'ai vraiment essayé de mettre toute la technique cinématographique au service de l'histoire, de ce que je raconte, de comment je veux toucher le spectateur, à quel endroit je veux le mettre au plus proche du personnage de Cassandre et j'ai travaillé avec un chef opérateur incroyable qui s'appelle David Caillet, qui a eu le César l'an dernier pour le règne animal
- Speaker #0
qui est un homme extrêmement sensible, attentif, qui a essayé vraiment d'écouter toutes les références que j'ai pu lui donner, tout ce que je pouvais lui raconter sur le film, sur les émotions que je voulais transmettre. Et avec toute son équipe, ça a été incroyable le travail. Vraiment, on était extrêmement reliés, en connivence, et on se comprenait, on n'avait pas besoin de se parler. Il y avait quelque chose d'extrêmement fluide. Et il a sublimé cette histoire. L'image est sublime. Il y a un photographe qui me disait « à chaque plan, j'avais envie de prendre une photo » tellement il trouvait ça beau. Donc je suis très heureuse que ce soit un film qui soit à la fois utile et artistique. Ça montre combien la culture est importante dans nos pays et combien c'est alarmant de voir les budgets qui sont sucrés. Au niveau politique, je pense que les artistes et la créativité, la création en général, est très salvatrice dans ce trajet de transcendance de nos blessures, de compréhension, de questionner nos humanités, de questionner la complexité de la vie. Je suis heureuse que ce film puisse être à la fois beau et utile.
- Speaker #1
C'est vrai que je me suis posé la question en sortant, parce que je suis allée avec une amie qui a une fille adolescente, qui a 14 ans, donc l'âge de Cassandre. Elle a pleuré à la fin. Elle était très émue. Elle est très sensible. C'est vrai qu'on s'est posé la question. Je lui ai dit que ce serait chouette qu'elle aille voir le film. Je pense que pour les adolescentes, je trouve que c'est hyper important. Ou adolescents. Parce que ça se passe dans les deux ans.
- Speaker #0
Bien sûr.
- Speaker #1
Pour moi, je trouve que c'est un film qui peut complètement... Ce week-end, je vous invite toutes les mamans, parents d'ados à prendre vos ados, à aller au ciné. Ce que j'ai trouvé très, très, très... Vraiment, je trouve ça génial. C'est qu'il n'y a pas... Enfin, ce n'est pas des scènes de violence, entre guillemets. Oui, il y a des choses qui ressortent. Qui sont confrontantes. Mais en fait, elles sont confrontantes. Et surtout, je trouve que tu nous fais une leçon de cinéma. C'est-à-dire qu'on peut montrer des choses. On voit que ce n'est pas forcément filmé, entre guillemets, comme ça devrait l'être. Mais ça suffit largement, en fait. Tu vois, dans ce moment-là, avec les ados. Et ça, j'ai trouvé ça fabuleux, en tout cas.
- Speaker #0
J'ai toujours veillé à ne pas confronter ni les acteurs ni les spectateurs à une brutalité gratuite. Donc je confronte à des scènes qui sont complexes dans ce qui se joue, mais il n'y a pas de brutalité. Et on voit comment le glissement se fait de façon imperceptible et ça arrive comme ça dans les familles. Et aussi dans ma manière de filmer, jamais je n'ai voulu être intrusive, impudique. Donc il y a beaucoup de pudeur, on ne voit rien de ce qui se passe, on comprend ce qui se passe. On ne voit rien et les acteurs sont protégés, habillés. Il y a des draps qui les protègent. Il y a une mise en scène qui fait qu'ils ne sont pas en contact ou vraiment très peu. De toute façon, il y avait une coordinatrice d'intimité qui a accompagné ces scènes plus intimes. Mais il y a beaucoup de pudeur dans la manière de filmer. C'est suggestif, mais en même temps, ça confronte. La mise en scène permet d'être vraiment à l'endroit. de l'abstraction à certains moments. Et donc, je pense que c'est là qu'on est au plus juste, parce que je ne suis pas pour la brutalité et la violence gratuite. Et voilà, donc je suis contente qu'on y soit arrivés. Oui,
- Speaker #1
et puis ça nous fait même ce sentiment de dissociation. Je trouve qu'il est vachement bien amené d'une façon artistique. On le ressent. Il y a plein de choses très, très belles avec... Je ne sais pas comment ça s'appelle, tu sais, le court-tube. Il y a toutes les images qui se mettent.
- Speaker #0
Ah, le caléidoscope.
- Speaker #1
Voilà, j'ai juste dit qu'elle dure, mais comme je suis sexy. Et je trouve ça vachement joli parce qu'en fait, c'est un film vraiment très poétique avec des belles images qui peuvent donner... On a à la fois une histoire qui est racontée, mais on a aussi la place, je trouve que tu laisses la place au spectateur d'être intelligent et de pouvoir avoir des respirations et de se raconter les choses qui vont faire écho à sa propre histoire et que lui peut peut-être potentiellement avoir la place de se le raconter.
- Speaker #0
Tout à fait.
- Speaker #1
Et ça, c'est très juste.
- Speaker #0
C'était très important pour moi de ne pas imposer une vision, de ne pas imposer un jugement ou quoi que ce soit, et de laisser le spectateur aussi avec des moments de respiration où lui-même peut revisiter son histoire, ou en tout cas ses émotions, et laisser émerger des choses qui viennent de lui. Je pense que vraiment, c'est le spectateur qui termine le film. Et donc, il y a ces espaces-là pour moi où je n'impose rien. ces temps de silence, notamment avec la marionnette ou avec les chevaux, quand on est dans des moments de connexion entre Cassandre et le cheval, d'être dans quelque chose de silencieux, de non théorique, qui laisse l'espace à autre chose. Je suis heureuse que ça se ressente aussi.
- Speaker #1
En tout cas, c'était génial. On arrive déjà à la fin. Prendre un train ! Est-ce que tu veux rajouter quelque chose, un petit mot ? À part dire aux gens, allez-y, parce qu'on va absolument aller-y.
- Speaker #0
Si le film vous plaît, parlez-en autour de vous un maximum. L'industrie du cinéma, c'est une industrie qui est complexe. Il y a des gros enjeux financiers. Et évidemment, il y a des blockbusters qui sont en face. Il y a des comédies. Et puis, faire exister un petit film d'auteur comme ça, d'une inconnue. ce n'est pas évident dans le paysage cinématographique aujourd'hui. Il a besoin de soutien le plus possible sur Allociné, sur les réseaux sociaux. Si le film vous a touché, n'hésitez pas. Le Bouchaouaï, c'est ce qui marche le mieux aussi, entre vos amis, votre famille, etc. J'espère qu'on saura le défendre tous ensemble, parce que je pense que c'est un film important.
- Speaker #1
C'est un film super important. En tout cas, moi, j'étais ravie de pouvoir avoir le privilège de passer ce temps avec toi. Et on vous mettra toutes les infos. Et voilà, je vous invite vraiment à y aller ce week-end en famille, avec vos ados et d'en parler.
- Speaker #0
Merci.
- Speaker #1
Moi, je vous dis à la semaine prochaine. Bonne route à vous. Flamme des années 80.
- Speaker #0
Le podcast qui allume la femme.