- Speaker #0
Dans ce monde où beaucoup de gens ne trouvent pas beaucoup de sens dans leur travail, j'ai le privilège de faire, depuis le début de mon activité professionnelle, un métier qui correspond à mes convictions. Notre pays, la France, s'est engagée, il y a 40 ans, à consacrer 0,7% de sa richesse nationale à la solidarité internationale. Et bien ça, ça représente des milliards et des milliards. Là , dernièrement, le Secours catholique, avec un certain nombre d'autres associations. On est venu à porter plainte contre l'État. Et le Secours catholique, ce n'est pas son habitude de faire ça.
- Speaker #1
Qui sont ceux qui font la loi ? Je m'appelle Pierre, fondateur de la plateforme de veille institutionnelle Légit Watch, et je rencontre celles et ceux qui font les coulisses de notre vie politique. Aujourd'hui, j'ai le plaisir de recevoir Jean Mercard, directeur à Action plaidoyer au Secours catholique. Salut Jean !
- Speaker #0
Salut !
- Speaker #1
Est-ce que tu peux te présenter de la façon dont tu le souhaites ?
- Speaker #0
Alors c'est marrant parce que qui font ceux qui font la loi, c'est vraiment pas la façon dont je me présenterais. Moi je suis d'abord un gars du Nord, un citoyen du monde, et aussi un privilégié, parce que dans ce monde où beaucoup de gens ne trouvent pas beaucoup de sens dans leur travail, j'ai le privilège de faire, depuis le début de mon activité professionnelle, un métier qui correspond à mes convictions, et ça c'est une vraie chance. C'est celui de se battre pour le monde auquel je crois. Je m'estime particulièrement chanceux.
- Speaker #1
Et justement, tu parles de ton parcours. J'ai regardé un petit peu ce que tu as fait et on a l'impression que tu es habité par un combat. Tu as travaillé à la CCFD Terre Solidaire. Tu as été rédacteur en chef de la revue Projet, dont le slogan est « Comprendre pour agir » . Et puis là , te voilà au Secours catholique. Qu'est-ce qui t'anime ?
- Speaker #0
Ce qui m'anime, c'est peut-être trois choses. La première, c'est une forme de gratitude. J'ai l'impression d'avoir beaucoup reçu. Une planète, des paysages, la vie. Et que c'est quand même... drôlement chouette, d'avoir aussi beaucoup reçu de mes parents, de mon entourage, beaucoup d'amour, et puis d'être né aussi dans un milieu où je n'ai pas eu trop de problèmes. Et donc d'abord cette gratitude qui m'anime, et donc l'envie aussi de donner. La deuxième chose, c'est un sentiment très fort d'injustice. Je dirais qu'assez jeune, j'ai pris conscience par mon entourage familial, du privilège que j'avais d'être né en France, alors que dans le monde à l'époque, les chiffres ne se sont pas tellement améliorés, il y avait chaque jour 40 000 enfants qui... mourait de faim alors qu'on a assez de nourriture pour pour nourrir la planète entière et que en france même ben voilà moi j'avais pas de difficultés particulières et j'avais bien conscience que c'est pas le cas de tout le monde ce sentiment de d'injustice en fait m'habite fortement dans le sens où on a tendance aujourd'hui à considérer que les personnes qui ont des galères dans la vie et passer leur faute C'est leur faute, ils n'ont qu'à s'en prendre qu'à eux, ils n'ont qu'à traverser la rue, ils n'ont qu'à démontrer qu'ils méritent de recevoir ce minima social qu'est le RSA de 600 euros à peine par mois. Pour moi, c'est une injustice très forte, c'est-à -dire que c'est une négation du fait que la place qu'on occupe dans la société, elle doit beaucoup de là où on a grandi. En fait, quand on est grandi au Niger, au Malawi, aux États-Unis, au Koweït ou en France, forcément on ne part pas tout à fait avec les mêmes chances. Et puis en France, on sait bien que suivant la famille, le territoire dans lequel on grandit, on n'a pas exactement les mêmes chances non plus. Et donc vouloir nous faire croire qu'il suffit de le vouloir pour le pouvoir, en fait c'est un discours qui ne vise qu'à figer les inégalités. Et à nous faire croire que les gens qui gagnent des milliards, c'est parce que c'est des génies. alors que la plupart d'entre eux en fait ont hérité. Donc ça, c'est un sentiment d'injustice qui m'habite, c'est la deuxième chose. Gratitude, injustice. Et puis la troisième chose, c'est un sentiment de responsabilité. J'ai eu aussi la chance à travers mon parcours familial, et puis derrière les études, etc., de comprendre qu'il n'y avait pas du tout de fatalité à cette injustice, et à ces 40 000 enfants qui meurent de faim par jour. Il y a des causes politiques. très profonde et que alors on peut le prendre comme une donnée en se disant de toute façon le monde est injuste et comme ça on n'y peut rien mais en réalité c'est précisément parce qu'une majorité de gens pensent qu'on n'y peut rien et qu'il vaut mieux rester à se tourner les pouces dans son canapé que ça reste comme ça et en fait c'est quand même des leçons très fortes des événements des moments forts de notre histoire on peut penser évidemment à la résistance pendant la Deuxième Guerre mondiale, mais aussi aux formes de résistance face à la torture en Algérie. Tous ces événements quand même marquants de notre histoire nous font dire que c'est parce qu'il y a eu des voix, à un moment donné, qui ont dit non, qu'autre chose est devenue possible. Et que le pire, en fait, n'est possible que parce qu'une majorité l'accepte. Et donc, le fait de... Prendre conscience de ça m'a fait prendre conscience aussi de l'immense responsabilité qu'on avait comme citoyen. Très concrètement, par exemple, comme citoyen français, on peut regarder la question de la pauvreté dans le monde comme une affaire individuelle en se disant « Ah bah tiens, je pourrais donner 100 euros à une association qui va faire du parrainage d'enfants dans un pays africain » . Et c'est très bien de le faire. Bravo à toutes celles et ceux qui le font. Mais en même temps, notre pays, la France... Il s'est engagé, il y a 40 ans, à consacrer 0,7% de sa richesse nationale à la solidarité internationale. Et bien ça, ça représente des milliards et des milliards d'euros. Et ça, ça permet de financer non pas seulement une bourse éducative pour un enfant, mais un système éducatif entier pour un pays, ou en tout cas de le soutenir très largement, ou un système de santé. Et c'est là que la responsabilité de citoyen de notre pays, de ce qui est fait en notre nom, en fait, intervient fortement. Et ça, moi, j'ai grandi dans cette idée-là , avec notamment le compagnonnage de l'association Survie, qui est une association qui était née sur ce combat-là , d'une loi pour la survie et le développement, qui voulait que notre pays honore cet engagement de solidarité internationale. Petit à petit, c'est une association qui est devenue de plus en plus critique de ce que la France, au nom de la solidarité internationale, faisait en Afrique, avec beaucoup de relents néocolonialistes, dont on n'est pas encore complètement revenus.
- Speaker #1
Tu disais tout à l'heure, tu as parlé du problème, le constat, l'injustice, et ensuite ce que tu essayes de faire pour en venir justement à ton travail et à comment tu essayes d'agir à ton niveau. Comment est-ce que tu expliquerais ton travail de manière la plus simple possible, si tu devais l'expliquer à un enfant, ou qu'est-ce que tu lui dirais ?
- Speaker #0
Si tu le permets, je veux bien revenir un tout petit peu sur mon parcours pour dire que... J'ai passé 8 ans au comité catholique contre la faim et pour le développement, le CCFD Terre solidaire, où on m'a confié la tâche de mener la bataille, le plaidoyer, sur les inégalités économiques nord-sud, et notamment les enjeux de régulation financière. Les enjeux de régulation financière, tout de suite, ça doit faire peur à la plupart des auditeurs qui disent « Oulala, on n'y peut rien » . Et en fait, on était mobilisés sur des combats. pré-cibler la question de la dette des pays pauvres, avec ce constat qu'en réalité, on avait une dette qui était inhumaine, puisque parfois on demandait à des pays très pauvres de consacrer 40, 50, 60% de leur budget à rembourser la dette à des pays riches, ce qui les empêchait évidemment de subvenir aux besoins essentiels de leur population. On avait une dette qui était bien souvent... Injuste aussi, parce qu'elle résultait de prêts qui avaient été accordés par les pays riches, non pas du tout pour soutenir le développement des pays en question, mais plutôt pour soutenir tel ou tel dictateur, parce qu'il était dans le bloc de l'Ouest face à la menace soviétique. Donc ce combat-là , il a été assez important, il s'est inscrit dans une dynamique mondiale. C'était pas que... que la France, le CCFD, il coordonnait la campagne en France, la plateforme dette et développement. Et donc c'était une campagne mondiale jubilée 2000, qui a abouti quand même à des mesures importantes d'annulation de la dette des pays pauvres à l'époque. Il y a eu une première mesure, une salve d'annulation à hauteur de 200 milliards d'euros, puis une deuxième à peu près équivalente en 2005. Donc ça, ça a été des combats quand même très importants. Et puis derrière, sur ces questions de régulation financière, on s'est attaqué à un autre sujet, parce qu'on s'est rendu compte que c'était bien de vouloir aider les pays du Sud, mais comme dans le serment d'Hippocrate, il s'agit d'abord de ne pas nuire. Et donc on a voulu s'attaquer aux flux sortants des pays en développement. C'est-à -dire qu'on s'est aperçu que pour un euro qui entrait dans ces pays, notamment au titre de l'aide au développement, il y en avait dix dans le même temps qui sortaient. Alors ça pouvait être du remboursement de la dette, mais c'était aussi beaucoup de l'évasion fiscale ou de l'argent de la corruption qui sortaient. Et c'est pour ça qu'avec d'autres, j'ai contribué à fonder la plateforme contre les paradis fiscaux et judiciaires. Donc ça, c'était à l'époque du CCFD. Et là aussi, c'est des combats. On peut se dire, nous, citoyens français, que peut-on face à des données de la mondialisation qui semblent tellement nous échapper ? Et en réalité, on savait pas que c'était impossible. Et donc on a réussi en fait quand même à faire bouger des lignes. Alors on est encore loin du compte, évidemment. Mais on a réussi à faire bouger des lignes assez significatives. On a maintenant en place... une obligation qui est faite aux multinationales de dire où elles allouent leurs bénéfices, pays par pays. Avant, cette transparence-là , on ne l'avait pas du tout. Et ça, ça nous permet quand même de voir les multinationales qui mettent l'essentiel de leur profit au Bahamas ou au Luxembourg ou en Irlande. pour ne pas payer d'impôts ou pour ne pas payer des salaires trop mirobolants en France, en Allemagne ou dans les pays en développement. On a emporté aussi une bataille d'échange automatique d'informations entre administrations fiscales, qui fait que vous ne pouvez plus mettre votre argent en Suisse sans que l'administration fiscale française soit au courant. Ça, c'est des vraies avancées. Et donc ça, ça a quand même été le combat de... d'acteurs de la société civile, alors du CCFD, mais aussi du Secours catholique, d'Attaque, de Transparency internationale, d'Oxfam. Enfin voilà , on était quelques associations comme ça un peu leaders sur le sujet, des syndicats aussi qui se sont mobilisés. Donc ça, moi, ça a été, je dirais, un moment très fort de mon parcours et de mon engagement, parce que j'ai pris conscience que, en fait, nous avions la capacité, nous, acteurs de la société civile, avec nos petits bras, parce que quand même, on est... pas très nombreux en fait à se mobiliser sur ces enjeux là mais à force de d'explications de convictions de documentation de mobilisation de médiatisation de faire bouger les lignes réellement et des lignes qui ont des impacts très concret et tangible parce que ça se traduit quand même en milliards et milliards d'euros de dollars qui rentrent dans les caisses de différents états pour financer le bien public en fait quand même notre capacité à financer les dépenses tant sociales qu'aussi régaliennes de justice, sécurité ou autres. Derrière, je suis parti effectivement à la revue projet. Alors, j'ai fait ça pendant huit ans, rédacteur en chef de cette revue, qui servait d'espace de dialogue entre des acteurs engagés dans la société, associations engagées sur la lutte contre la pauvreté, mais aussi les droits de l'homme, la lutte contre la corruption, la démocratie, la situation des étrangers, l'environnement, le droit des travailleurs ou d'autres. Donc beaucoup de gens qui ont souvent le nez dans le guidon et qui, à un moment donné, ont besoin quand même de buts et ont besoin de réfléchir. Donc nous, on servait un peu de cet espace de réflexion et d'aller mobiliser ce que la recherche de différentes disciplines pouvait leur apporter à leur réflexion. Ça peut paraître un petit peu éloigné du plaidoyer, mais en réalité, c'est un peu l'arrière-boutique, c'est-à -dire ce que l'on va défendre comme cause auprès des parlementaires, auprès des gouvernements. ça s'enracine quand même dans beaucoup de réflexions derrière, de documentation. Et les propositions qu'on a à faire d'amélioration, elles viennent aussi d'un travail de maturation. Et donc, j'étais plutôt dans cette étape de maturation, avec un travail à la fois passionnant et puis aussi un petit peu frustrant parce qu'on voit les choses mûrir, mais pas toujours atterrir. Donc, je trouvais qu'on publiait des idées absolument géniales. Je ne voyais pas grand monde forcément sans saisir. Et donc j'étais heureux de rejoindre le Secours catholique il y a six ans, justement pour revenir davantage dans l'action. Aujourd'hui, j'occupe un poste de directeur de l'action et du plaidoyer France du Secours catholique, puisque le Secours catholique a à la fois un volet essentiel d'action en France, avec 60 000 bénévoles, 900 salariés, et puis un volet d'action à l'international, où il soutient des partenaires engagés dans le développement de... de leur pays, le développement social, sur tous les continents.
- Speaker #1
C'est hyper clair. Tu parlais de ton combat pour la transparence. Quelle est la suite idéale, dans le sens où maintenant, on a plus de visibilité sur ce qui se passe, mais est-ce qu'on a vraiment les moyens de mettre en place des mesures coercitives pour les entreprises qui ont de l'optimisation ou de l'évasion fiscale ? Est-ce qu'il y a déjà des combats qui sont en cours à ce sujet, des choses que tu suis ?
- Speaker #0
Il y a des sujets sur lesquels J'ai été fortement mobilisé d'abord à titre professionnel avec le CCFD, et puis j'ai continué à suivre parce que ça dépasse l'engagement professionnel. Et donc quand j'étais à la revue Projet, on a continué à publier des cartes du monde pour établir la présence des multinationales, les principales multinationales françaises et européennes dans les paradis fiscaux, en comptabilisant. C'est un travail un peu de... de fourmis, mais les filiales qu'elle détenait un peu partout dans le monde. Et bon, tout ça était plutôt un exercice de mise en lumière du fait qu'on était encore loin du compte en termes de transparence, ou les entreprises multinationales qui, en fait, pensent à l'échelle du monde et non pas à l'échelle des territoires étatiques, comme le font nos États et donc nos acteurs politiques, pour l'essentiel. Tout ça nous a amené à progresser dans le champ de la transparence. C'est-à -dire qu'aujourd'hui, on peut, parce que la loi française d'abord, puis la loi européenne, ensuite, grâce à la mobilisation de la société civile, a obligé les multinationales. Pas toutes, celles dont le chiffre d'affaires dépasse 700 millions d'euros. Donc on est quand même sur des acteurs d'une certaine taille. Mais en tout cas, ça nous donne cette plus grande transparence. En revanche, ce n'est pas la fin de l'optimisation fiscale pour autant. On en est encore très très loin. Il est clair qu'au sein de l'Union européenne, des pays comme les Pays-Bas, l'Irlande, Chypre, le Luxembourg... sont des pays qui, en fait, par des politiques fiscales agressives vis-à -vis de leurs partenaires européens, attirent soit les sièges sociaux, soit les holdings, soit les filiales qui sont chargées de la propriété intellectuelle ou en tout cas un certain nombre d'entités juridiques qui permettent de concentrer le chiffre d'affaires ou le bénéfice sur leur territoire d'une façon qui n'a absolument rien à voir avec la réalité de l'activité. À l'époque, ce qu'on avait mis en évidence, c'est qu'il y a un peu deux géographies parallèles dans l'activité des multinationales. C'est-à -dire qu'il y a la géographie de l'activité réelle, là où elles ont leurs usines, là où elles ont leurs salariés, là où elles ont leurs consommateurs. Ça, c'est l'activité économique réelle telle qu'on se la représente. Et puis, elles ont la géographie comptable, qui est la façon dont il est le plus rentable pour elles d'allouer leurs bénéfices et leurs chiffres d'affaires. Voilà , une fois encore pour payer le moins d'impôts possible, mais aussi pour ne pas avoir à trop augmenter les salaires des salariés. On se souvient par exemple de McDonald's qui a été mené en justice par Eva Joly sur ce terrain-là , parce qu'en lien avec les syndicats de McDonald's, ils se sont rendus compte que l'argument de l'entreprise McDonald's France pour ne pas augmenter les salaires était qu'ils ne gagnaient pas d'argent. Sauf que si, il gagnait de l'argent, sauf que l'argent, il le gagnait dans un autre pays. On est quand même dans, je pense, le pays européen dans lequel McDonald's fait l'essentiel de son chiffre d'affaires.
- Speaker #1
Est-ce qu'il faudrait une réponse européenne ? Comment ça pourrait fonctionner ? On se met tous autour d'une table, on dit bon, maintenant, on s'accorde sur des minima sociaux, sur la taxation des entreprises. Quel est pour toi le...
- Speaker #0
Tu m'emmènes, à vrai dire, sur un terrain qui est quand même moins le mien aujourd'hui. C'est-à -dire que c'est un sujet qui est... Toujours très suivi par le CCFD, Terre Solidaire, mais aussi par Oxfam, par Solidaire Finance Publique, par Attaque, par un certain nombre d'associations. J'avoue que je suis quand même le sujet d'un tout petit peu plus loin aujourd'hui. Ce qui a quand même progressé, c'est la mise en place d'un taux minimum d'imposition des sociétés, 15%. La grande difficulté de ce type d'avancée, c'est leur fragilité. C'est-à -dire qu'on met des années et des années à obtenir une avancée. qui n'est jamais suffisante par rapport à ce qu'on voudrait, mais c'est quand même une avancée. Et boum, Trump arrive et dit rien à foutre des engagements qui ont été pris par mes prédécesseurs. C'est un peu la même chose sur la loi de devoir de vigilance où on a obtenu de hautes luttes, notamment après l'effondrement d'Urana Plaza au Bangladesh. Que les sociétés maires des entreprises multinationales soient tenues pour responsables du respect des droits humains sur toute leur chaîne d'approvisionnement. Donc ça, c'était une sacrée avancée. Merci, cher... Merci à Amnesty, CCFD, Oxfam et d'autres amis de la terre pour leur engagement sur le sujet. C'est la directive Omnibus qui est en train d'être passée au niveau européen, qui vise à rayer d'un trait de plume, ou pas tout à fait, mais c'était quand même l'intention d'un certain nombre d'acteurs, cette loi devoir de vigilance. C'est des combats qui, à la fois, peuvent prospérer. Je pense qu'il faut quand même... garder en mémoire cette expérience-là . Oui, les combats citoyens peuvent l'emporter, mais aussi ne jamais relâcher complètement la bride, parce que en face, on sait bien qu'on a des acteurs qui ont tout intérêt à n'avoir de comptes à rendre à personne.
- Speaker #1
Du coup, Jean, tu as choisi les affaires publiques, le plaidoyer. Quels sont actuellement les sujets que tu défends ? Pourquoi ? Et vers quelle société tu voudrais qu'on tende ?
- Speaker #0
Je dirais que la société ... vers laquelle je voudrais qu'on tende. Je n'ai pas la prétention de la définir, c'est-à -dire que la société vers laquelle je voudrais qu'on tende, c'est une société à laquelle nous puissions collectivement adhérer, construire, et qui serait marquée quand même par quelques fondamentaux. Rien de très original à ça, notamment quand on est imprégné par la pensée sociale de l'Église, mais c'est un héritage qui dépasse largement le christianisme. Dans les fondamentaux, il y a évidemment la dignité humaine. La dignité humaine c'est bien plus que de satisfaire les besoins essentiels, alimentaires, logements, vestimentaires des êtres humains. La dignité humaine c'est aussi la... la liberté que les êtres humains ont de choisir la vie qu'ils veulent mener. Et ça, on sait que pour beaucoup, ce n'est pas le cas. La dignité, c'est aussi la cohérence avec soi-même. C'est Cynthia Fleury qui parle dans la clinique de la dignité de la souffrance qui est expérimentée par beaucoup de professionnels qui sont chargés du soin à autrui et qui... parce que les cadences sont infernales, parce qu'ils n'arrivent plus à faire humainement leur travail, en fait, ont l'impression de ne plus vivre dignement. Et je pense que c'est aussi le sentiment qu'ont beaucoup de personnes que nous rencontrons au Secours catholique, des personnes en précarité, des personnes qui ont des pouvoirs d'achat très faibles, très récracs, et qui n'arrivent pas à offrir à leurs enfants l'avenir qu'elles rêveraient pour eux, qui n'arrivent pas à ... à les alimenter de façon saine ou bio ou respectueuse de la planète. Et donc, ils en veulent leur propre dignité aussi. Et donc, c'est tout ça que je mets derrière le mot dignité. Un autre fondamental, c'est aussi une forme d'humilité. Humilité de nous, les êtres humains, par rapport à la planète Terre qui nous est confiée, qu'on emprunte aux générations futures. Pour moi, on sait qu'on a dépassé déjà largement les... 6 des 9 limites planétaires. Pour moi, l'un des principes fondamentaux de la vision de société que je me fais, c'est qu'on a une planète que l'on maintient habitable pour nous autres êtres humains, mais pas que. Il y a beaucoup d'autres espèces qui ont quelque chose de magique et qui ont une valeur intrinsèque. Et puis un troisième fondamental, parce que je dirais que cette dignité humaine et puis ce respect des limites planétaires dessinent quelque chose de... de ce que Kate Raworth, cette économiste britannique, a pu figurer comme la théorie du donut, cette espèce de roue qui dessine un plafond extérieur, qui sont les limites planétaires à ne pas dépasser pour maintenir une planète habitable, et puis un rond intérieur qui représente une forme de socle de la dignité humaine. Et donc ça dessine une roue qui est cet espace juste et sûr pour l'humanité vers lequel... nous devons tendre. Donc ça c'est quelque chose dans lequel je me retrouve assez. Mais au-delà de cette vision, il y a un troisième élément qui me semble essentiel, c'est la dimension relationnelle, interpersonnelle. Les êtres humains, en fait, ce qui fait quand même la beauté de la vie humaine, ce qui fait notre humanité, c'est à la fois notre vulnérabilité, notre dépendance, mais aussi sa contrepartie, c'est-à -dire le lien social, ce sentiment de pouvoir compter. sur d'autres, le sentiment de compter pour d'autres. Et nous, c'est sûr qu'au Secours catholique, beaucoup des personnes qu'on rencontre, et des personnes les plus vulnérables de notre pays, elles nous attendent sur ce terrain-là , en fait. Le sentiment de ne plus compter pour personne, le sentiment qu'on ne s'appuie pas sur elles, cette déconsidération et une violence énorme, en fait, qui est ressentie par les personnes. Donc, pour moi, en fait, la vision que je me fais de... de la société vers laquelle on doit tendre. C'est une société dans laquelle la voix de chacun est reconnue, est attendue, et le meilleur étalon pour ça, c'est d'abord de prêter attention au sort des plus vulnérables, ceux à côté de qui on risque le plus de passer à côté. Ça, ça a une valeur interpersonnelle, mais ça a aussi une valeur démocratique, c'est-à -dire que cette qualité relationnelle, elle passe à l'échelle politique, à l'échelle sociétale. nécessairement pour la démocratie, qui n'est sans doute pas un système parfait, mais qui est sans doute le meilleur système pour organiser une humanité qui prend soin de ses liens et qui a une forme de modestie et d'humilité sur le sens de sa présence sur Terre, qui sait s'autoréguler par rapport à son hubris, à sa démesure, à sa tentation que l'on voit chez tant de dirigeants aujourd'hui de vouloir... maîtriser, détruire, exploiter, comme si nous étions Dieu en réalité. Et donc mes combats principaux du moment, en fait ce n'est pas mes combats, je parle à la première personne, mais c'est les combats du Secours catholique. On s'en est choisi cinq. En fait le Secours catholique rencontre un million de personnes par an en France et soutient des partenaires un peu partout dans le monde. Et donc on serait appelé à mener à peu près... tous les combats et donc c'est toujours un peu un crève-cœur de ne pas être partout où on pourrait être, mais on s'est choisi cinq enjeux sur lesquels on est mobilisés. Le premier c'est... l'accueil et les droits des personnes étrangères. Le deuxième, c'est l'accès digne à une alimentation saine et durable. Pour nous, au Secours catholique, il ne suffit pas que chacun ait à manger. Encore faut-il que les personnes, et c'est ce qu'elles nous disent, ne se sentent pas humiliées. On n'a pas des ventres à gaver. On a des personnes qui veulent, comme tout le monde dans la société, pouvoir choisir leur alimentation, pouvoir offrir à leurs enfants une alimentation saine et durable. Aujourd'hui, c'est une violence et une humiliation qui est faite à des millions et des millions de personnes que de les obliger à devoir faire la queue à l'aide alimentaire pour pouvoir nourrir leurs enfants. C'est une honte qui est vécue par beaucoup de personnes. Et de fait, au Secours catholique, on chiffre le reste à vivre des personnes une fois qu'elles ont payé leur facture de loyer, leur facture énergétique, toutes les dépenses récurrentes et un peu préengagées, contractuelles. les personnes que nous on rencontre, il leur reste à la fin du mois, quelque chose comme 5 euros par jour, donc 150 euros par mois, par personne. Et 5 euros par jour, avec ça, il vous faut vous nourrir, payer toutes les dépenses du quotidien, payer vos loisirs. Donc évidemment... C'est mission impossible. Et ça fait que les personnes qu'on rencontre, elles sont dans des formes de privation, des formes d'humiliation du quotidien, des formes de devoir demander de l'aide. Et demander de l'aide, c'est toujours en fait difficile. Voilà , et donc ça, c'est le deuxième combat sur l'accès digne à l'alimentation saine et durable. On a évidemment un combat sur l'accès à l'hébergement et au logement. Là , dernièrement, le Secours catholique, avec un certain nombre d'autres associations, On est venu à porter plainte contre l'État. Et le Secours catholique, ce n'est pas son habitude de faire ça. Nous, on est plutôt une association qui prône d'abord le dialogue, l'influence, la conviction. Mais voilà , ça fait des années, des années, des années qu'on va voir les députés, qu'on va voir les ministères, qu'on leur dit que ce n'est simplement pas possible, que dans notre pays, l'un des plus riches du monde, on est des centaines de milliers de personnes qui vivent à la rue. Et pourtant, les chiffres ne cessent d'augmenter. On est à 350 000 personnes. Cette année, selon le dernier rapport de la Fondation pour le logement des défavorisés, c'est une fondation bépierre, pour nous, c'est simplement une négation de la dignité des personnes. Et au Secours catholique, souvent, nos bénévoles, ils ont une forme de sentiment d'impuissance, en fait, quand ils voient des mamans, des enfants, même des hommes seuls, parce que c'est une violence aussi pour les hommes, qui se retrouvent sans aucune solution de logement. et qu'ils appellent le 115, qui est le numéro pour l'hébergement d'urgence, et que ça ne répond pas ou c'est saturé, il n'y a plus de place. Et ça, c'est une violence à laquelle on ne s'habitue pas, et c'est la raison pour laquelle on appelle l'État à tenir ses engagements, les engagements qui sont dans la loi, le droit au logement, le droit à l'hébergement, qui sont des droits opposables. Et aujourd'hui, l'État ne se donne clairement pas les moyens de respecter ses engagements fondamentaux. Quatrième combat, il tourne autour de la... La transition écologique juste, alors je l'évoquais dans la vision du monde, mais de fait cet enjeu-là il est très clair pour nous, c'est-à -dire que quand la planète se dégrade, ceux qui trinquent les premiers c'est les plus fragiles, il suffit de voir à Mayotte dernièrement, ou dans le Pas-de-Calais avec les inondations, en fait ceux qui ne peuvent pas s'adapter, ceux qui sont frappés de plein fouet, c'est d'abord les plus fragiles. Et ça passe aussi par... des transformations d'ampleur sur des domaines du quotidien, que sont l'alimentation, j'en ai parlé, mais aussi le logement. On est engagé sur la lutte contre la précarité énergétique, et donc pour la rénovation thermique du bâtiment. On est engagé aussi sur des formes de mobilité qui soient à la fois accessibles, mais aussi moins émettrices de carbone. Et puis, dernier enjeu phare et prioritaire pour nous, c'est l'accueil et droit des personnes étrangères. Je n'ai sans doute pas besoin de faire un dessin, mais c'est une... population que on rencontre en proportion croissante. La raison, ce n'est pas du tout qu'il y a plus de personnes étrangères en France, c'est que les politiques publiques à l'égard des étrangers ne cessent de se durcir. Et donc on en arrive à des situations absolument absurdes, où des personnes qui ont toute légitimité à rester sur le sol français et qui ont beaucoup à nous apporter, une énergie de fou, des compétences, en viennent à ne pas... pouvoir avoir un rendez-vous avec la préfecture avant. 6 mois, 1 an, 2 ans, parce que l'administration s'est organisée pour les maintenir en précarité administrative, en état de non-existence sur le sol français. Et le résultat, c'est qu'on a des personnes qui n'ont pas le droit de travailler, donc pas le droit d'accéder à des revenus. Et voilà , c'est des personnes qu'on retrouve souvent comme livreurs, délivreurs ou autres. parce qu'il faut bien casser la croûte, mais en présentant des fausses identités, et derrière qu'ils se font pénaliser. On est quand même dans une absurdité absolument totale, et je ne parle même pas des violences qui sont subies par les personnes étrangères aux frontières. On est très présent à Calais, on est présent à la frontière avec l'Italie. Et malheureusement, notre pays demande à ses forces de l'ordre d'avoir une politique qui vise à rendre La vie de ces personnes impossibles. Ça, c'est le mot de notre ancien ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, aujourd'hui ministre de la Justice. Rendre la vie des personnes étrangères impossibles.
- Speaker #1
Donc oui, ce que tu dis, c'est que c'est une volonté politique de rendre l'administratif dysfonctionnel pour ces personnes qui devraient être accueillies.
- Speaker #0
En tout cas, il n'y a pas qu'en France qu'on observe ce mouvement-là . Mais il y a une espèce de... de surenchère et de facilité, de lâcheté je dirais, à vouloir expliquer tous les problèmes de notre société, le chômage, les problèmes de logement, l'insécurité, le déficit public, que sais-je, par la faute d'un coupable. Ça c'est très commode parce que s'il y a un seul coupable, il suffit de le désigner et puis on a tout résolu. Et le coupable le plus simple à désigner, Et ça a toujours été vrai. À toutes les époques, c'est celui qui est dans l'incapacité de se défendre et de démontrer son innocence. Et donc, à qui on s'attaque ? On s'attaque aux plus pauvres, en réalité. Les plus pauvres, ils n'ont pas de syndicats, ils n'ont pas accès aux médias. Ils n'ont que le Secours catholique et d'autres associations pour essayer de faire valoir leur voix. Et donc, la lâcheté d'un certain nombre de responsables politiques et de leur relais médiatique leur vaut de s'attaquer à ces populations. les plus vulnérables en les désignant comme étant coupables. On leur fait porter, encore une fois, tous les problèmes de la France à des personnes qu'on désigne comme des migrants indésirables, criminels, comme des assistés, des personnes... Et donc, on est quand même dans ce mouvement-là , et par facilité, beaucoup de... de dirigeants politiques cèdent en fait à ces sirènes-là de l'extrême droite en réalité. Et ça, ça se traduit de fait dans les politiques qui sont menées. On a eu quand même au cours des 40 ou 50 dernières années, pratiquement tous les gouvernements de droite ou de gauche ont procédé parce que c'était ce qu'il y avait de plus pragmatique et avec un accord assez large des forces sociales du pays, côté patronal, côté syndical, côté associatif. côté collectivité locale, sur des vagues de régularisation assez larges, des personnes étrangères, parce que c'est des personnes qui sont là , qui jouent un rôle souvent utile, qui ont commencé à s'insérer, qui pour une bonne partie ne sont pas expulsables. Mais voilà , depuis 10 ans, depuis 10-15 ans, on n'a plus de telles vagues de régularisation, et au contraire, on a un durcissement continu, et il devient de plus en plus difficile pour des personnes... étrangères qui sont venues soit rejoindre leur famille, soit travailler, soit étudier dans notre pays, d'avoir ne serait-ce qu'un rendez-vous pour demander à obtenir un titre de séjour.
- Speaker #1
Et quelle est justement la marge de manœuvre du Secours catholique pour avoir un impact ? Pour te rejoindre, je me souviens par exemple sur le mal-logement, en 2017 c'était une promesse de campagne d'Emmanuel Macron, il avait dit à la fin de mon mandat il n'y aura plus personne dehors. On voit que maintenant ce n'est même plus un sujet... ... Ça paraît complètement hors de l'hémicycle. On entend qu'on n'a plus d'argent, les dépenses sociales, c'est trop. Vous, en tant qu'organisation, mais toi aussi, qu'est-ce que tu peux faire ? Est-ce qu'il y a encore des députés qui peuvent porter vos combats ? Et comment est-ce que vous positionnez ? C'est quoi la vision que vous proposez dans ce contexte qui se durcit en effet ?
- Speaker #0
Alors nous, au Secours catholique, on est une association non-partisane. Et donc on... On investit volontiers le champ politique, parce que le mot politique ne nous fait pas peur, c'est un mot noble. Je vais citer encore les papes, parce qu'on est secours catholiques et que... On est inspiré par cette pensée sociale de l'Église. Mais pour les différents papes, l'engagement dans le domaine politique est une des formes les plus nobles de la charité. Le mot charité est un mot un peu galvaudé, mais la charité au sens de l'engagement pour autrui, de l'amour pour l'humanité. À partir de cette base non-partisane, notre association, son rôle, elle est précisément parce qu'on rencontre des personnes qui... dont la voix n'est jamais entendue et qui bien souvent ont aussi perdu confiance que leur voix avait une valeur, c'est d'abord d'être une présence. Et donc ce que font nos dizaines de milliers de bénévoles sur le terrain, c'est d'abord d'apporter une écoute de la chère air humaine, de partager un café. En fait, c'est essentiel pour que des personnes qui se sentent en échec dans leur vie puissent redresser la tête. et aller jusqu'à exprimer ce qu'elles attendent pour elles-mêmes, mais aussi pour les autres et pour le pays. Et nous, Secours catholique, notre rôle, il est d'être témoin de ces réalités qu'on rencontre. Donc chaque année, on publie ce rapport État de la pauvreté qui s'appuie sur des visages que l'on rencontre. On a un appareil statistique propre à l'association qui est assez unique dans le paysage associatif français qui nous permet de donner à voir, en fait, Comment évolue la pauvreté en France à partir des millions de personnes qu'on rencontre chaque année ? Et ça, en soi, c'est déjà ouvrir les yeux pour un certain nombre de responsables politiques, quelle que soit leur appartenance partisane. Et donc on a mis en place, depuis 2022, un groupe d'amitié parlementaire où on a invité un certain nombre de parlementaires de différentes sensibilités, mais qui pouvaient se retrouver dans les valeurs du secours catholique. et qui font des enjeux de pauvreté, des enjeux importants pour leur mandat. On les invite à des déjeuners plusieurs fois par an, où on fait intervenir des personnes en précarité. On leur expose aussi les constats de façon un peu plus générique que l'on fait, les propositions qu'on a apportées. Et on ne désespère pas de ça. C'est-à -dire que, évidemment, le jeu politique français, il est marqué par des appartenances partisanes et que... On sait bien qu'il y a une forme de discipline de parti qui peut l'emporter dans l'adoption de certains textes à l'Assemblée ou au Sénat. Mais nous, on continue à penser que d'entretenir des lieux, justement, où ce qui s'échange n'a pas destiné à être porté nécessairement sur la place publique, mais où les parlementaires peuvent, en dehors de leurs appartenances partisanes, parler à partir des constats. et de la parole des personnes en précarité qu'on met en présence, ça déplace. Et si on parle de l'accès au logement, il n'y a quand même pas grand monde en France pour défendre l'idée qu'il serait normal que des enfants dorment à la rue. C'est à peu près indéfendable pour tout le monde. La question c'est, ok, maintenant qu'est-ce qu'on fait ? Quelle politique on mène ? Et c'est là -dessus qu'il y a des formes de... Il y a des acteurs politiques qui s'accommodent de compromis entre des questions de budget, des questions aussi de servir certaines clientèles électorales. Il faut quand même se souvenir de ce projet de loi assez abjecte qui avait été présenté il y a deux ans par le député Kasbarian, qui visait quand même dans sa première mouture à infliger une peine de prison. à des locataires en impayés de loyer. Des personnes qui sont en fait en telle situation de précarité qu'elles n'arrivent plus à payer leur loyer. Et nous, on sait au Secours catholique que les ménages qu'on rencontre, la dernière chose qu'elles font, c'est d'arrêter de payer leur loyer. Elles préfèrent crever la dalle plutôt que de risquer de perdre leur toit. Et M. Casbarian et Mme Berger, à l'époque, ont eu la bonne idée de présenter une proposition de loi où il s'agissait... de punir d'une peine de prison les personnes en impayés de loyer. Tout ça pourquoi ? Pour servir une clientèle électorale de propriétaires qui estiment que c'est vraiment trop injuste, qu'on ne sanctionne pas plus durement leurs locataires quand ils sont en difficulté financière et qu'ils n'arrivent plus à honorer leur loyer. Donc on est quand même dans ce jeu-là . Finalement, la loi n'a pas été adoptée telle qu'elle, même si elle durcit quand même le sort des locataires et encore plus celui des squatteurs. Mais voilà , on est quand même dans un... dans un combat, on est dans un jeu de force, le monde politique n'est pas un monde de bisounours. Nous, au Secours catholique, on continue à penser que d'apporter la réalité qui est quand même souvent méconnue, c'est-à -dire que... Notre personnel politique, nos parlementaires, en fait, ils ne voient qu'un pan de la réalité. Ils ne voient que ce que leur famille politique, les analystes qu'ils connaissent, les journaux qu'ils lisent, etc., leur apportent. Et bien souvent, la réalité des plus vulnérables, elle est assez invisibilisée. Et donc, on pense quand même que nous, on a un rôle déjà majeur de donner à voir ce qui est invisible.
- Speaker #1
C'est super intéressant. Et si je grossis un peu le trait de tout ce que tu décris depuis le début de cet entretien, tu as parlé de beaucoup de souffrance, de précarité. de besoin de transparence, de mettre en avant ces réalités-là . Et tu as aussi parlé, du coup, d'espérance, en rapport avec aussi le catholicisme et ce qui était porté ici. On croit quand même qu'on peut faire changer les choses et qu'on peut y arriver. Est-ce qu'il y a des moments aussi de grande joie, des moments de fierté où vous vous dites, là , nous, on a réussi à débloquer une situation en particulier, on a réussi à faire une différence peut-être législative, mais... peut-être juste sur le terrain, parce que j'ai l'impression que tu décris quelque chose de... Tu parles beaucoup du mot combat, finalement, de la difficulté de mettre en avant cette population qui est invisibilisée. Est-ce qu'il y a des moments où on peut souffler et se dire « Ok, là , on a fait quelque chose, on peut regarder ça quelques secondes, c'est incroyable, on est fiers de ça. »
- Speaker #0
Tu soulignes, à mon avis, quelque chose qui est absolument essentiel et sans doute assez essentiel à ... à celles et ceux qui, à titre bénévole ou à titre professionnel, s'engagent pour rendre le monde plus juste, ou du moins un peu moins injuste, c'est prendre le temps de célébrer. On va pas se mentir, dans une période où le sort des plus vulnérables, c'est manifestement pas la préoccupation politique numéro 1, ni en France, ni ailleurs dans le monde. Les raisons de... de pleurer, de crier, d'angoisser, elles sont nombreuses. Et donc, dans ces moments-là , il faut aussi savoir reconnaître les avancées. Et ces avancées, en fait, elles sont parfois petites, et elles s'inscrivent toujours dans le temps long. C'est-à -dire que le plaidoyer, c'est jamais le grand soir. C'est toujours des combats qui s'inscrivent dans la durée. Je prendrais un exemple, et c'est jamais le combat d'une seule personne aussi. C'est toujours des combats collectifs, en tout cas, c'est mon expérience. La lutte contre la précarité énergétique. Je dirais que le fait que les personnes les plus modestes dans notre pays vivent dans des logements mieux isolés, en fait, c'est bon pour tout le monde. C'est bon pour eux, c'est bon pour leur portefeuille, parce que cela leur coûtera moins cher en facture d'énergie. C'est bon pour leur santé, parce qu'il y a quand même beaucoup de problèmes de santé pour les gens qui vivent dans des logements mal isolés. C'est bon pour l'emploi, parce que... Tout ce marché de la rénovation thermique du bâtiment, ça crée de l'emploi. C'est bon pour l'environnement, parce que ça fait des logements qui sont moins émetteurs de gaz à effet de serre. C'est bon aussi pour la balance commerciale, parce que ça fait qu'on a moins besoin d'importer de l'énergie, et notamment de l'énergie gaz de l'étranger. Ça nous rend aussi moins dépendants d'un point de vue géopolitique, de puissance dont on n'a pas forcément très envie d'être dépendants, comme la Russie ou d'autres. Bref. C'est une espèce de combat évident. Il n'y a pas grand monde pour le contester. Et pourtant, sur ce combat-là , le Secours Catholique est investi depuis maintenant une vingtaine d'années sur cet enjeu-là . Pourquoi ? Parce que nous, on a commencé à avoir monté le nombre de demandes de ménages en précarité qui nous disaient qu'on n'arrive plus à payer notre facture d'énergie. On a commencé par aller voir EDF et d'autres pour leur dire « Attendez, avant de couper, on peut peut-être s'arranger. » On a des arrangements comme ça. Première démarche, on aide aussi, on a aidé un peu au paiement des factures, certains ménages en galère pour pas qu'ils se retrouvent privés d'électricité ou de gaz du jour au lendemain. Mais la démarche intelligente du point de vue politique, c'était d'aller de façon beaucoup plus massive et déterminée vers une rénovation thermique systématique du logement des personnes modestes. Sauf que, ça avait beau nous paraître une évidence, les lignes politiques ne bougeaient pas tellement sur le sujet. D'abord, ce qu'on fait dans ce type de cas, c'est que... On se rapproche d'autres acteurs qui pensent comme nous. Et donc, on a créé un collectif qui s'appelle Rénovons, qui rassemble à la fois des entreprises du secteur de la rénovation, mais aussi beaucoup d'associations pour mener le combat. Et puis nous, du côté du secours catholique, on s'est dit, il faut qu'on démontre aussi par la preuve. Et donc, on a encouragé à sa naissance une petite... entreprise qui s'appelle le réseau Ecohabitat sur une expérimentation dans la région Picarde qui visait à faire la preuve qu'il y avait un véritable intérêt d'accompagner des personnes. modeste dans la rénovation de leur logement, mais aussi pour montrer ce que ça supposait comme conditions. Notamment, il y a deux choses qu'on voulait démontrer, c'est qu'il y a des conditions financières, ça coûte très cher, et quand vous avez les beaux jours 500 euros sur votre compte en banque, en fait, vous êtes dans l'incapacité d'aligner 5 000, 10 000, 20 000 ou 50 000 euros parfois pour des travaux de rénovation thermique. La deuxième chose, c'est que ce n'est pas du tout anodin de faire des travaux comme ça chez vous, quand vous êtes en galère, que vous avez honte de votre logement, que vous n'invitez même plus des copains de vos enfants aux anniversaires parce que vous n'êtes pas prêts à montrer où vous vivez. Et donc, ça demande un accompagnement social pour que les ménages comprennent, qu'ils peuvent avoir confiance. Et on a des expériences très belles de ménages qui ont retrouvé une forme de fierté, de vie sociale. parce que le réseau Cohabita et le Secours catholique les ont accompagnés en Picardie dans la rénovation de leur logement. Pour faire ça, le Secours catholique a investi 2 millions d'euros pour la rénovation de son logement dans la région Picarde avec un engagement de la part de l'État, de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANA, qui dépend de l'État, une agence publique, de nous rembourser à mesure des travaux effectués. Et en fait, cette action démonstratrice, elle a reçu la visite de plein d'acteurs politiques, à la fois locaux, mais aussi nationaux, des ministres, des députés. Et elle a réussi à convaincre que oui, il était important d'accompagner ces ménages modestes prioritairement dans la rénovation de leur logement. Que oui, il fallait avancer la trésorerie et avec des montants importants de façon à ce que le reste à charge pour les ménages modestes soit à leur portée en réalité. Et que oui, il fallait un accompagnement non seulement technique et financier, mais aussi un accompagnement social de ces ménages. Tout ça, ça a été inclus dans la loi à l'automne 2023 avec ce qu'on appelle MaPrimeRénov' Sérénité, donc une prime pour la rénovation qui est en fait un peu augmentée pour les ménages en précarité. Donc ça, pour nous, c'est une vraie victoire, une vraie satisfaction. C'est-à -dire qu'on s'est investi, nos acteurs bénévoles, l'association financièrement, etc. Et on a réussi à faire la preuve vis-à -vis des responsables politiques. Ça, à la fois, on peut s'en réjouir. Et puis comme je le disais, c'est toujours un combat de longue haleine parce qu'à ce moment-là , on avait Elisabeth Borne au gouvernement qui avait décidé d'y mettre aussi les moyens. Et donc dans le projet de loi de finances pour 2024, il y a d'abord eu 4 milliards d'euros qui ont été alloués à la rénovation thermique du bâtiment. Et puis ensuite, Gabriel Tal est arrivé. Il a décidé qu'il fallait couper de 1 milliard. pour tenir dans les clous. Et puis là , dans le budget qui vient d'être adopté, on a encore enlevé près d'un milliard. Donc on voit bien que malgré l'évidence du sens de cet investissement pour le bien-être de nos populations, de notre planète, etc., en fait, on a quand même des responsables politiques qui se gouvernent souvent à courte vue. Et donc si on n'est pas là pour leur rappeler l'importance de ces orientations politiques-là , malheureusement, elles risquent souvent d'être oubliées.
- Speaker #1
Pour conclure, Jean, qu'est-ce qui te plaît le plus dans ton quotidien, dans ton travail ? Et aussi, si tu pouvais te donner un conseil, si tu te rencontrais maintenant, toi, ton toi du début de carrière, qu'est-ce que tu lui dirais ?
- Speaker #0
Ce qui me plaît le plus dans mon travail, c'est à la fois le sens que j'y trouve, mais j'ai bien conscience que j'ai beaucoup d'amis, et puis je vois bien dans le débat public l'espèce de souffrance qu'éprouvent beaucoup de gens à faire un métier dans lequel finalement... ils ne se retrouvent pas complètement ou ils se retrouvent en opposition avec leurs valeurs. Ça, c'est quelque chose d'assez privilégié. La deuxième chose que j'apprécie dans mon travail, ou en tout cas dans le travail de plaidoyer, c'est sa dimension artisanale et créative. On est quand même invité, quand on fait cette activité, à être en permanence dans à la fois la recherche d'informations, la documentation, la réflexion. Donc déjà , ça nourrit beaucoup la curiosité intellectuelle, et ça c'est quand même très plaisant. Et puis de devoir le mettre en forme, lui donner une forme, c'est là où je vois quelque chose de très artisanal, un peu comme le potier qui façonne sa céramique. On donne une forme de façon à ce que les propositions, les constats qu'on pose, les propositions que l'on fait, soient à la fois justes sur le fond, parce qu'elles vont changer quelque chose dans la vie des personnes qu'on rencontre, qu'elles vont rendre le monde un peu plus juste, un peu plus... durable, un peu plus viable, un peu plus démocratique, mais aussi qu'elle soit audible, qu'elle ait une chance de prospérer. Ce travail-là , en fait, de transformation de constats en propositions, et puis aussi, ça suppose beaucoup d'adaptation, en fait, parce qu'on est dans un contexte politique qui est mouvant, on a des acteurs et des jeux d'acteurs qui changent beaucoup, et donc il faut à la fois bien identifier qui est en capacité de prendre les décisions compte, mais aussi ces acteurs-là , si on n'arrive pas à les convaincre directement, ou à les atteindre directement, qui est-ce qu'ils écoutent ? Et donc se rapprocher des... de leur entourage, de leur sphère d'influence, ou parfois aussi leur tendre le bras quand ils ne veulent pas entendre. Et ça, ça suppose de médiatiser, ça suppose de leur faire courir des risques, que ce soit coûteux politiquement, en fait, de ne pas agir sur le terrain du mal-logement, sur le terrain de la malbouffe, etc. Tout ça, je trouve ça très stimulant, et puis à travers mon parcours, j'avoue que les... Les fois où je me suis le plus amusé, c'est à la fois dans l'écriture, dans l'écriture de rapports, parce qu'on en vient à façonner quand même un peu le débat public et la façon dont on se représente les sujets. Je prends le dernier gros rapport que le Secours catholique a sorti, qui s'appelle « L'injuste prix de notre alimentation » . On voit bien que sur la question alimentaire, on est en France sur un terrain miné. C'est-à -dire qu'il faudrait choisir entre la sauvegarde de la planète, zéro pesticide, zéro artiste spécialisation net, etc. Le revenu des paysans, pour que les producteurs de notre alimentation puissent vivre dignement, et la santé des consommateurs, et l'accessibilité de l'alimentation pour tous. Comme si, en fait, c'était l'un ou l'autre. Et donc, on voit bien les déferlements de violences, au moins verbales, mais aussi physiques, auxquelles ça donne lieu. On a tous en tête les polémiques autour de l'Office français de la biodiversité, qui hérissent les poils des agriculteurs. Et nous, Secours Catholique, on dit en fait c'est pas possible, on peut pas nous opposer les uns aux autres. Donc qu'est-ce qu'on a décidé de faire ? On a décidé de mener une enquête, une enquête très fournie, très étayée, budgétairement, mais pas tout seul. Une enquête avec des personnes qui ont le souci qu'une alimentation de qualité soit accessible aux personnes les plus précaires, ça c'est notre expérience, notre expertise. Des personnes qui ont le souhait et le souci de la santé des consommateurs, on a travaillé avec la Fédération des Diabétiques. Des personnes qui ont le souci de pratiques agroécologiques, de pratiques agricoles plus respectueuses du vivant, on travaille avec les CIVAM, et puis aussi avec Solidarité Paysan, qui est aux côtés des paysans qui sont en grande difficulté financière. Et on a travaillé ensemble, en faisant appel à un bureau d'études, le BASIC, qui nous a accompagnés là -dedans, pour regarder, finalement, nous, Français, combien on dépense globalement dans notre alimentation, à qui ça va, à quels acteurs économiques, est-ce que tout ça c'est juste, est-ce qu'on ne pourrait pas faire autrement, et l'état là -dedans ? Combien il met ? Et tout ça, ça dessine quoi ? C'est un rapport qui est plein d'espoir, parce qu'il montre qu'en fait, on pourrait faire autrement. On n'est pas du tout condamnés à l'impasse qu'on veut nous faire croire. On pourrait très bien utiliser les milliards d'argent public qu'on met aujourd'hui, non pas pour faire financer l'agro-business et l'agro-industrie que l'on connaît aujourd'hui, avec une captation des marges aussi par des acteurs de transformation et de distribution qu'on connaît bien. On pourrait financer un modèle... qui réconcilierait davantage les agriculteurs et les consommateurs dans le respect du travail des uns, de la santé des autres et de l'environnement. Moi, contribuer à ce type de rapport, c'est une forme de fierté. Alors évidemment, les dernières lois, les lois d'orientation agricole, etc., ne vont pas forcément dans le sens qu'on préconise, mais on a quand même le sentiment de marquer des pierres qui donnent à entendre que d'autres voies sont possibles. Et puis peut-être un... Un autre exemple et un mot pour finir, c'est qu'on a un métier, le métier de plaidoyer, ce qu'on dit dans le monde associatif, affaires publiques, ou influence, ce qu'on dit dans le monde plus du business, qui s'est beaucoup professionnalisé. À la fois, c'est bien. Et en même temps, moi, je dis quand même attention. C'est-à -dire que finalement, moi, parfois, les plus grandes victoires que j'ai obtenues, on n'a pas fait exprès. C'est-à -dire que pour un sujet qui m'a pas mal mobilisé, là , il y a... une bonne quinzaine d'années maintenant, la question des biens mal acquis, des avoirs détournés par un certain nombre de dictateurs latino-américains, africains et autres. On a voulu, au démarrage, documenter ça. Et donc j'avais embauché un stagiaire, Antoine Dulin, pour documenter ça au CCFD. On a chiffré que ça représentait des centaines de milliards qui étaient détournés au pays du Sud et qui, derrière, dormaient soit dans les paradis fiscaux, soit étaient investis dans des yachts ou des palaces en France et ailleurs. Et puis... Par le hasard des rencontres, on a discuté avec l'avocat William Bourdon et l'association Sherpa à l'époque. Et puis finalement, il y a peut-être moyen de les attaquer en fait, ces chefs d'État, ces dictateurs. On était très solidaires d'acteurs de ces pays-là qui se battaient pour que le pétrole qui coule à flot au Congo-Brazzaville ou au Gabon, ils puissent profiter non pas à une seule famille mais à l'ensemble de la population, mais qui faisaient face à des pouvoirs autoritaires et répressifs. Et bien nous, qui avons la liberté quand même en France de pouvoir nous exprimer sur le sujet, mais aussi de pouvoir agir en justice, de poursuivre en justice ces chefs d'État, leur entourage, parce qu'ils avaient acquis sur le sol français des biens immobiliers, parfois des hôtels particuliers de grande valeur dans le 16e arrondissement, à Neuilly et ailleurs, sur le dos de leur population, en ayant volé leur propre pays. Et toute cette saga judiciaire a pris un peu de temps, mais finalement nous a donné raison. C'est-à -dire que... en le cas de la Guinée équatoriale, le fils du dictateur équato-guinéen qui est au pouvoir depuis... 40 ans pratiquement, Théodoro Obiang Nguema, son fils Théodorine, a été condamné en France. Son hôtel particulier, Avenue Foch, a été saisi par la justice française, une valeur de 150 millions d'euros. Tous ses bolides ont été saisis aussi. Et tout ça va maintenant financer des projets de développement en Guinée équatoriale. Voilà , je dirais que ce type d'aboutissement-là , quand on a commencé à vouloir simplement documenter le fait que l'argent qu'on voulait réclamer aux pays du Sud pour rembourser leurs dettes, c'était quand même souvent de l'argent. qui dormaient chez nous ou dans les paradis fiscaux, ça a mené à ce type d'avancée forte contre l'impunité des puissants. Et donc le message, moi, que je voudrais passer, c'est que faisons... Ne perdons jamais de vue, en fait, ce qui nous guide, c'est-à -dire qu'aujourd'hui, on a tout un tas de mémos pour bien faire du plaidoyer, du lobbying, tout ça, c'est très bien, c'est très important. Mais ce qui fait la force, et notamment pour les citoyens et les associations qui... font un travail d'influence pas du tout à l'ombre et dans les coulisses, comme le dit le titre du podcast, mais qui le font de façon parfaitement transparente, leur force, c'est justement la lumière. C'est justement d'inventer, de créer, de donner à voir, de donner à savoir. Et les façons de donner à voir et à savoir, elles font appel à beaucoup de créativité, à des actions de rue, à des façons de se mobiliser. Ça peut être très festif, en fait. Et je pense que dans la période actuelle, il ne faut pas oublier... de se faire plaisir aussi en militant.
- Speaker #1
Merci Jean, merci beaucoup.
- Speaker #0
Je t'en prie.
- Speaker #1
Merci d'avoir écouté Hémicycle, le podcast qui décrypte la fabrique de la loi. Je m'appelle Pierre, je suis le cofondateur de l'EG Watch, la plateforme qui vous aide dans votre veille institutionnelle. À bientôt.