Speaker #0Vous vous êtes déjà enflammé devant une finale du 100 mètres et les podiums des Jeux vous procurent des frissons. Le sport vous galvanise et les sportifs vous font rêver. Mais derrière les médailles, le chemin vers le jour de gloire est un long parcours semé d'embûches et de challenges. Alors quant à cela s'ajoute le handicap, la route peut s'annoncer encore plus sinueuse. Je m'appelle Milena Suro, je suis sportive de haut niveau en para-badminton. Le but de ce podcast est de vous parler de la vie d'une sportive en quête des Jeux, entre exigence du haut niveau et galère du handicap. afin de mieux comprendre le quotidien de ces sportifs à part et de cerner les enjeux de l'accessibilité. Alors si vous aimez le sport, le développement personnel ou que vous êtes touché de près ou de loin par le handicap, ce podcast est fait pour vous. Bonjour à tous et bienvenue dans l'épisode 13 de mon podcast Journal d'une parabadiste. Aujourd'hui, un épisode en lien avec mon actualité sportive toute fraîche puisque... Je viens de décrocher ce week-end le titre de championne de France de para-badminton en classe SL4-SU5. Alors c'était le moment de partager cette nouvelle, mais surtout de vous éclairer sur les dessous d'un titre sportif majeur. Comment on arrive à cette performance et qu'est-ce qu'on doit mettre en place pour maximiser les chances de pouvoir ajouter cette ligne à son palmarès quand on pratique un sport à bon niveau ? C'est ma deuxième médaille d'or sur un championnat de France. Et cette fois-ci, elle a un goût encore plus particulier puisque du coup, on était regroupés avec les classes SU5. Alors le prochain épisode sera sur les classifications. Donc vous pourrez vite comprendre un peu mieux ces histoires de classes en parasport. Mais là, pour faire très simple, j'ai un handicap au niveau des jambes et je jouais contre des filles qui ont un handicap au niveau du bras, tout simplement. parce qu'il n'y avait pas assez de monde pour faire deux tableaux. Donc sur le papier, ça paraît un peu injuste. En soi, c'est le cas, mais il vaut mieux ça que de ne pas pouvoir jouer par manque de joueuse. Alors, ce que la plupart des gens s'imaginent, c'est que pour gagner un titre majeur, on s'entraîne, on joue et on repart, ou pas, avec une médaille. Dans la réalité, le chemin est un peu plus sinueux que ça. C'est sûr que ce serait, je pense, le rêve de tout sportif de pouvoir juste se concentrer à fond sur son sport et de devenir le meilleur comme ça. Mais malheureusement, il y a beaucoup d'autres choses à faire et à organiser pour pouvoir grimper jusqu'au titre de champion de France et donc, en quelque sorte, de devenir la meilleure personne du pays dans cette discipline. Et généralement, un titre de champion de France, il commence tout bêtement par choisir un sport quand on est enfant et aller tous les mercredis après-midi à l'entraînement pour découvrir les règles, la technique, la tactique, faire des jeux autour de tout ça et commencer petit à petit à faire ses premières compétitions. Commencer à découvrir la compétition quand on est jeune, ce n'est pas obligatoire. Et d'ailleurs, tout ce que je vous dis là, c'est une généralité. Alors que dans les faits, il y a mille façons de performer dans son sport. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas commencé à 6 ans qu'on ne va pas pouvoir devenir le meilleur. Moi, typiquement, j'ai commencé le badminton il y a 3 ans. Donc, comme quoi, on voit bien qu'il y a des trajectoires atypiques parfois. Mais malgré tout, la performance vient avec la répétition et le nombre d'heures de pratique. Donc, c'est sûr que plus on commence tôt, plus on va emmagasiner. des heures de pratique et donc potentiellement pouvoir faire partie des meilleurs de la discipline. Et si j'ai pu atteindre ce niveau en trois ans de badminton, c'est aussi parce que derrière moi, j'avais dix ans de tennis en compétition, sept ans de sport études avec toutes les exigences que ça nécessite. Donc même si ce n'était pas exactement le même sport, j'avais déjà un gros bagage derrière moi. Donc effectivement... remporter des titres majeurs à l'âge adulte, ça vient souvent par une pratique depuis l'enfance et tous les champions que vous croisez dans les médias ou sur les réseaux sociaux, il faut quand même avoir à l'esprit qu'ils ont dédié toute leur vie à leur discipline et que ça ne vient pas en un claquement de doigts comme ça. Surtout, ceux qui ont le mieux réussi dans le sport. sont ceux qui ont souvent le plus travaillé dans l'ombre. Les footballeurs qui sont restés après l'entraînement tirer des coups francs, les joueurs de tennis qui ont pris des sauts de balle pour pratiquer le service tout seuls. Chaque sportif qui n'attend pas qu'on le pousse ou qu'on lui mette la pression pour se donner à 300% et finir totalement rassasié à la fin de chaque entraînement. Si tu veux devenir le meilleur, il faut travailler plus que les autres et aussi travailler plus intelligemment. À côté de la pratique de son sport en tant que tel, il y a aussi tout un volet sur la préparation physique. C'est extrêmement important non seulement pour performer, mais aussi éviter les blessures. Donc ça, ça va être une à plusieurs fois par semaine, des séances soit en salle à pousser de la fonte, faire du gainage. des exercices pour renforcer la musculature en lien avec son sport et ses exigences, mais aussi des séances plus cardio avec du running, du vélo, de la natation et tous ces sports qui permettent de gagner en endurance et en récupération. Et enfin, des séances basées sur l'explosivité, la proprioception, le jeu de jambes, la motricité et tout ce qui va servir la technique sur le terrain. À côté de la prépa physique, il y a l'inévitable préparation mentale. C'est quelque chose qui, jusqu'à très récemment, était vraiment sous-estimé. Beaucoup d'athlètes et de fédérations faisaient l'impasse là-dessus. Il y avait parfois des idées reçues comme faire de la prépa mentale, c'est être faible, etc. Mais je pense que désormais, tout le monde est unanime pour dire qu'un résultat... Passe tout autant par la performance technique, que physique, que mentale. Et que c'est quelque chose à ne surtout pas négliger. Tu peux être le meilleur du monde techniquement, si t'es pas bien mentalement, t'iras pas bien loin dans tes perfs et dans ta carrière. Donc la prépa mentale, c'est un élément clé dans le quotidien d'un sportif, mais pourtant c'est pas toujours simple à mettre en place. Il faut trouver l'approche qui te convient. le préparateur avec qui tu vas bien t'entendre et qui va te comprendre. Et c'est parfois l'étape la plus longue et compliquée dans la prépa mentale, trouver la bonne personne. Et après, comme je le disais au début, il n'y a pas que la pratique qui mène au plus haut niveau et pour la simple et bonne raison qu'une carrière sportive de haut niveau, ça coûte cher. Et à moins de remporter le jackpot au loto à un moment de sa vie qui permettrait effectivement de se concentrer que sur le sport, il y a tout un tas de boulots annexes à prévoir pour se hisser parmi les meilleurs français et pouvoir suffisamment s'entraîner, avoir le bon matériel, avoir un coach et s'aligner sur toutes les compétitions. Et un sportif qui veut financer une carrière, il doit avoir des sponsors. Et un sportif qui veut avoir des sponsors, il doit exister aux yeux du monde. Et pour ça, aujourd'hui, ça passe par les réseaux sociaux. Alors, pour avoir une chance de convaincre un partenaire de financer notre championnat de France, il faut déjà exister sur les réseaux sociaux tout au long de l'année. Ça, ça passe déjà par avoir du contenu à publier, donc tourner des vidéos, faire des shootings photos. Publier régulièrement pour nourrir ses réseaux, avoir des choses à raconter, des nouvelles à donner. Ça, c'est un boulot qui prend quand même du temps. Il faut adapter le contenu à chaque plateforme, poster aux heures de meilleure audience, répondre aux commentaires et aux messages pour fidéliser une audience et avoir des soutiens précieux. Un deuxième volet d'activation et non des moindres, ça va être la presse et les médias. Parce que quand on fait un sport de niche, ça ne va pas tomber du ciel et on ne va pas parler de nous entre guillemets sans notre consentement. comme on peut le voir pour les joueurs de foot, etc. Nous, pour faire parler de notre sport, de nos résultats, de nos objectifs, on va devoir donner de notre personne et de notre temps et aller à la rencontre des journalistes, des médias, les démarcher, leur proposer notre projet. Et sur les dizaines de dossiers qu'on va envoyer, on aura peut-être quelques retours. Donc c'est aussi quelque chose qui prend du temps. mais qui est très important parce que c'est un des moyens les plus efficaces pour se faire connaître, que notre nom et notre image existent dans les esprits et que donc au final des entreprises veuillent miser sur nous. Construire son image et exister aux yeux du monde, ça va donc permettre d'aller démarcher les entreprises pour trouver le budget inhérent à notre championnat de France et à notre carrière en général. On n'a toujours pas joué le moindre point dans ce championnat, qu'on voit déjà tout le travail que ça a nécessité en amont. La recherche d'un sponsor peut aller très vite comme être laborieuse. Il y a comme dans toute chose un petit facteur chance, mais généralement ça ne tombe pas simplement du ciel comme ça, et c'est vraiment grâce à tout ce qu'on a mis en place avant qu'on va maximiser nos chances de trouver les bons partenaires. Il y a beaucoup de façons de trouver du sponsoring, le bouche-à-oreille étant, je pense, la principale façon d'y parvenir. Dans tous les cas, il faut aller parler de son projet sportif partout où c'est possible, sur les réseaux sociaux bien sûr, mais aussi et surtout en direct. Alors tout ça, ça passe par faire un dossier, repérer les entreprises, envoyer des mails, des relances, écrire des posts, répondre à... toutes les sollicitations, y compris celles qui ne vont pas forcément t'aider ou qui paraissent fantaisistes, etc. pour finalement avoir des rendez-vous pour finaliser les partenariats et pouvoir partir sur ce championnat de France avec la certitude de faire face aux frais confortablement et surtout avoir un membre de plus dans l'équipe qui te soutient et qui te permet de performer. Parce que comme on dit, tout seul on va plus vite, mais ensemble on va plus loin. On est déjà souvent... très seuls face à notre pratique. Alors avoir des soutiens et une équipe derrière soi, ça pousse vraiment vers le haut et notamment dans les moments plus difficiles. Après tout ça, vient enfin un peu plus le concret, c'est-à-dire la compétition en elle-même. Là aussi, il y a des choix à faire sur les moyens de s'y rendre. Est-ce qu'on fait le trajet en voiture pour que ce soit direct et facile, mais en même temps, ça cause beaucoup de fatigue si c'est loin ? Est-ce qu'on va prendre le train ? et pouvoir se reposer, mais galère avec les potentiels retards, les annulations, les bagages et tout ça ? Où est-ce qu'on fait le choix de l'avion, mais en augmentant encore un peu le bilan carbone qui est souvent déjà très élevé quand on est sportif de haut niveau ? Ça encore, ce sont des leviers de décision qui vont avoir un impact sur la performance et c'est vraiment propre à chacun et à chaque projet. Sur la compétition, bien sûr, l'important, c'est de pouvoir donner le meilleur de son jeu. Et c'est là que le fruit de tout le travail technique, physique, mental, cognitif va payer ou pas. Et que ceux qui ont mis en place le système correspondant le mieux à leur façon de fonctionner vont ressortir grands gagnants. Parce qu'il n'y a pas qu'une seule recette pour devenir champion. On est tous différents et on a tous des approches différentes et adaptées à nous-mêmes. Certains vont se concentrer sur travailler leurs points forts à fond quand d'autres vont limiter leurs points faibles. Certains vont être exigeants sur la nutrition quand d'autres ne feront jamais la moindre entorse sur leur sommeil. Donc, ce n'est pas nécessairement obligatoire d'aller copier un tel ou un tel parce qu'on se dit voilà comment il fait lui et voilà comment il faut faire pour performer. Il y a plein de systèmes qui correspondent ou pas à chaque individu. Parce que même là, sur des facteurs qui paraissent aussi basiques que la nourriture et le sommeil, il y a encore plein de profils d'athlètes et il n'y a pas qu'une seule façon de faire, un seul régime alimentaire, un seul timing de coucher et de lever qui s'applique à tous, et notamment pour la simple et bonne raison qu'on reste des humains, on n'est pas des robots et on ne peut pas enlever la notion de plaisir et d'événement de la vie de l'équation. L'important, c'est de bien identifier tous les facteurs de plaisir et de l'événement de la vie de l'équation. performance et de pouvoir les ajuster au mieux à son profil en s'entourant évidemment de personnes qui ont également compris ça. Après la médaille, on n'a toujours pas fini notre compétition puisqu'on en revient encore à la même chose. Il y a toute la communication autour qui va jouer un rôle essentiel. Donc faire un récap, une newsletter, un format vidéo, un post sur chaque réseau social, raconter son histoire aux journalistes une nouvelle fois. On pourrait se dire en un sens que tout ça, ça freine la performance parce que ça fait une charge énorme de travail. Et c'est un fait. Effectivement, ça peut être très lourd en termes d'énergie et de temps que ça prend. Mais une carrière sportive, c'est à construire sur du long terme. Et à part quelques athlètes qui ont soit des sports très médiatisés, soit qui ont réussi par leur performance exceptionnelle à avoir un système solide sans avoir besoin de passer par tout ça. La clé de la réussite d'un projet réside dans sa solidité sur le moyen, le long terme. Et pour ça, il n'y a malheureusement pas d'autre solution que d'avoir une santé financière stable et solide afin de pouvoir avoir une vision d'avenir de son sport et de ses performances. Parce que sans moyens, pas de carrière possible. Pour les jeunes qui veulent performer dans un sport ou les plus âgés qui se lancent dans un sport de niche où il y a la place de performer un peu plus tard, et je vais même extrapoler parce que je pense que le sport c'est le reflet de beaucoup de domaines de la société et que tout ça s'applique au final à n'importe quelle ambition. Je résume les points clés de la réussite à mes yeux. S'imposer une discipline et ne pas attendre qu'on nous pousse derrière pour être rigoureux. Le travail de l'ombre finit toujours par payer. Repérer les facteurs de performance et les adapter à son propre profil et à son propre fonctionnement. Mettre en place un travail de fond qui permet d'exister même dans les moments les plus calmes et ne pas attendre les grandes échéances pour se mettre à communiquer et tenter de surnager dans la masse. S'entourer de partenaires au long cours afin de bâtir un système solide et avoir une vision à moyen terme au minimum de sa carrière en n'étant pas seule. Merci d'avoir écouté cet épisode jusqu'à la fin. J'imagine donc que le contenu vous a plu, alors je compte sur vous pour le faire savoir autour de vous et vous abonner pour ne louper aucun épisode à venir. Tous les liens utiles sont dans la description, alors allez y jeter un coup d'œil et moi je vous dis à la prochaine !