undefined cover
undefined cover
Confiance et coopération : comment s'associer entre organisations face aux défis de la transition ? Avec Pascale Boissier cover
Confiance et coopération : comment s'associer entre organisations face aux défis de la transition ? Avec Pascale Boissier cover
La Fluence - explorer la coopération

Confiance et coopération : comment s'associer entre organisations face aux défis de la transition ? Avec Pascale Boissier

Confiance et coopération : comment s'associer entre organisations face aux défis de la transition ? Avec Pascale Boissier

51min |25/07/2024
Play
undefined cover
undefined cover
Confiance et coopération : comment s'associer entre organisations face aux défis de la transition ? Avec Pascale Boissier cover
Confiance et coopération : comment s'associer entre organisations face aux défis de la transition ? Avec Pascale Boissier cover
La Fluence - explorer la coopération

Confiance et coopération : comment s'associer entre organisations face aux défis de la transition ? Avec Pascale Boissier

Confiance et coopération : comment s'associer entre organisations face aux défis de la transition ? Avec Pascale Boissier

51min |25/07/2024
Play

Description

La Fluence, le podcast qui explore la coopération 🔎


Aujourd’hui, nous explorons la vision de Pascale Boissier sur la coopération, notamment lorsqu’elle se met en place entre les organisations. Les entreprises, les collectivités, les associations et autres collectifs ont tout intérêt à se faire confiance pour relever les défis de la transition écologique et sociale. 


Influencée par la lecture de l’ouvrage "Coopérer et se faire confiance" d'Eloi Laurent, Pascale considère que la coopération va au-delà de l'action collective vers un objectif commun. Elle serait mue par une dynamique d'amour, de confiance et d’une envie de savoir plutôt que de faire. 

Elle souligne l'importance de la confiance, tant en soi qu'au sein d'un groupe. Son défi en tant que co-fondatrice de Silbo est de créer cette confiance entre plusieurs organisations. 

Également impliquée avec B corp et B Lab France, Pascale travaille pour soutenir la communication, animer la communauté d’entreprises engagées et faciliter les synergies. Elle participe à des initiatives comme le festival "Agir pour le vivant", visant à créer une dynamique collective en faveur de la transition écologique et sociale. 

Cette conversation se poursuit sur des enjeux plus philosophiques : comment se détacher des injonctions à faire et à produire, comment laisser venir et advenir, avoir confiance, repérer les signaux faibles… 


En savoir plus sur Silbo : https://silbo.fr/

En savoir plus sur B Corp : https://www.bcorporation.net/en-us/

En savoir plus sur B Lab France : https://bcorporation.fr/le-mouvement/b-lab-france/


Coopérer et se faire confiance, Eloi Laurent : https://www.ruedelechiquier.net/essais/486-cooperer-et-se-faire-confiance.html

Conférence : La robustesse du vivant comme antidote au culte de la performance - Olivier Hamant : https://www.youtube.com/watch?v=DvU4jKnzT1I


Musiques par Vito Bendinelli : https://www.instagram.com/vito.bendinelli/


Pour retrouver les prochains épisodes : 

Instagram : https://www.instagram.com/holomea.insta/

Linked In : https://www.linkedin.com/company/holomea/

Site Holomea : https://holomea.com/


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Bérénice d'Holomea

    Bonjour à toutes et à tous, je m'appelle Bérénice, je travaille chez Holomea et je suis passionnée par la bio-inspiration et la manière dont fonctionnent les humains entre eux. Bienvenue sur La Fluence, le podcast qui explore la coopération. Aujourd'hui je suis avec Pascale Boissier, cofondatrice de Silbo, une société à mission dédiée à l'accompagnement aux transitions. Elle est aussi activement engagée auprès de l'association B Lab France pour développer l'écosystème B corp en France. Je la retrouve à Montmartre et nous entamons la discussion tout en contemplant les toits parisiens. Bonjour Pascale.

  • Pascale Boissier

    Bonjour Bérénice.

  • Bérénice d'Holomea

    Bienvenue dans la Fluence, le podcast qui explore la coopération. Est-ce que tu veux bien te présenter en quelques mots ?

  • Pascale Boissier

    En quelques mots, alors je suis Pascale Boissier, je suis franco-chilienne avec des attaches importantes dans les Cévennes. Ça me détermine beaucoup et aujourd'hui mon activité principale c'est d'accompagner des organisations, des entreprises, des collectivités, des associations sur le chemin exigeant des transitions. Et je fais ça depuis environ huit ans au sein d'un cabinet qui s'appelle Silbo, avec mon associé Sylvain Page et toute une série de camarades aussi avec lesquels on travaille sur tous ces sujets.

  • Bérénice d'Holomea

    Donc dans ce cabinet Silbo, vous accompagnez les collectifs à se transformer, à aller dans le sens de la transition. C'était surtout par le biais de la communication, c'est ça ? Ou il y a d'autres choses que vous mettez en place pour accompagner les collectifs ?

  • Pascale Boissier

    C'est vrai que mon métier depuis 25 ans maintenant, c'est la communication. C'est là où je suis née, c'est là où j'ai grandi. Et en même temps, il y a environ une quinzaine d'années, la conscience que la communication pouvait avoir un rôle important dans les transformations que connaît notre société, que connaît l'économie, à la fois dans les prises de conscience, à la fois dans le fait d'embarquer des individus et des collectifs, d'animer des écosystèmes autour des projets. Donc effectivement, moi je suis partie, et mon associé Sylvain aussi, de ce monde-là, pour depuis quelques années, être venue explorer les chemins plus dans le dur, on va dire, du conseil sur tous ces sujets-là, de l'accompagnement humain sur toutes ces questions-là, et de l'accompagnement à la mise en action aussi, au-delà de la mobilisation des individus et des collectifs à travers la communication. C'est vrai que quand on dit communication, les gens... Alors déjà, la communication n'a pas toujours bonne réputation. Quand on, avec les expressions, c'est de la com ou c'est juste de la com, on peut comprendre aussi pourquoi on a cette vision-là de la communication. Mais comme on le dit souvent, nous, la com, ce n'est pas juste faire des petits dépliants ou des jolis sites web pour raconter des choses bien polissées. C'est bien plus profond que ça. Moi, je viens d'une famille d'enseignants. C'est vrai que pour moi, la communication a beaucoup à voir avec l'éducation et la pédagogie. Et c'est ça qu'on essaye effectivement de développer.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, même une forme de vulgarisation aussi, de s'adapter finalement à l'audience, trouver les bons mots, le bon vocabulaire. Et je trouve que ce n'est même pas facile aussi de retransmettre, réellement de mettre des mots sur des choses qu'on peut mettre en pratique dans des collectifs, dans des organisations. Parce que des fois, on a l'impression que finalement, il y a peut-être... plusieurs autres collectifs qui pourraient utiliser les mêmes mots que nous, alors qu'en fait, ça veut dire peut-être des choses totalement différentes et des actions qui ne se ressemblent pas forcément. Donc, effectivement, l'importance de mettre les bons mots.

  • Pascale Boissier

    Et peut-être qu'on peut partir du principe qu'il n'y a pas de bons mots, mais c'est vrai que le pouvoir des mots, les mots forgent nos représentations, forgent nos imaginaires, forgent ce qu'on met derrière. D'ailleurs, les communicants, on parle passé, continuent encore, ont beaucoup utilisé la transformation des mots pour aussi réagir. déformer des réalités, les rendre plus acceptables ou les rendre plus douces. Mais c'est vrai que le sens qu'on met derrière les mots... J'étais cette semaine dans une conférence d'Olivier Hamann qui ne divisait que le mot résilience qui était vraiment polysémique, qui avait plusieurs sens. C'était un mot qu'il n'aimait pas beaucoup, par exemple, parce qu'il n'avait pas le même sens dans le monde scientifique, dans le monde de l'écologie, dans le monde de la psychologie. Du coup, ça devenait un peu un mot fourni. surtout derrière lequel on mettait beaucoup de choses différentes. Et on peut dire que dans le contexte dans lequel on est, c'est un vrai enjeu de mettre du sens commun derrière les mêmes mots. En tout cas, c'est ça qui est susceptible de créer aussi... une forme de vision commune, où on parlait tout à l'heure de destin commun, de choses qui font sens pour les collectifs.

  • Bérénice d'Holomea

    J'aimerais que tu nous donnes ta définition, ta vision de la coopération. Qu'est-ce que c'est pour toi ? Qu'est-ce que ça t'évoque ?

  • Pascale Boissier

    Ouh là, ça ! C'est une très large question, mais c'est celle qui nous réunit aujourd'hui. Alors, je suis très là, Je termine la lecture du dernier ouvrage d'Éloi Laurent qui s'appelle Coopérer et se faire confiance J'ai été marquée par sa vision de la coopération qui ne réside pas dans l'intention de résultat ou forcément dans le but commun, comme pourrait l'être la collaboration. Il fait une distinction entre les deux. Il y a quelque chose qui sera à la fois mu par une dynamique d'amour et j'ai trouvé ça particulièrement... étonnant chez un économiste de nous parler d'Anne Mour et par une envie de savoir et j'aime bien cette définition finalement de la coopération qui nous sort du côté faire ensemble pour un but commun qui est la vision communément admise et que je partage aussi, mais pour sortir seulement de la logique du faire mais aussi du sens et de la manière dont on le fait Et moi, cette dynamique d'amour dans les liens de coopération, elle me parle beaucoup. Et encore une fois, venant d'un économiste, je la trouve très intéressante. Donc, je recommande la lecture de cet ouvrage.

  • Bérénice d'Holomea

    Et c'est rigolo parce que c'est vrai que tout à l'heure, je l'avais compris comme se faire confiance à soi. Et finalement, là, quand tu énonces les interactions, la dynamique d'amour et tout ça, je le comprends aussi comme se faire confiance aussi entre membres d'un collectif. Et je pense que les deux ont leur place aussi dans la coopération, parce que finalement, quand on travaille avec d'autres personnes, quand on cherche à collaborer, à coopérer, finalement, il y a toujours un moment où on a une part de responsabilité sur un sujet, plus ou moins seul. Et d'où, moi, je trouve que se faire confiance aussi à soi va impacter finalement toute la dynamique collective. Du coup, c'est rigolo ce double sens qu'on pourrait observer dans le titre.

  • Pascale Boissier

    Mais c'est intéressant que tu les pries comme ça et en même temps ils sont absolument indissociables. De toute façon, toute mécanique du soi est une mécanique en interaction avec les autres et toute mécanique d'interaction avec les autres nous renvoie aussi à nous-mêmes. C'est ce qui fait qu'on est des espèces interconnectées et on partage ça avec l'entièreté du monde vivant. Et c'est vrai que cette dynamique-là, elle est très importante, là pour le coup, dans le concret. de la coopération au sein de collectifs. Alors on l'appelle confiance en soi, on l'appelle conscience de soi, d'autres parlent de la boussole intérieure ou de toutes ces qualités qu'on peut cultiver en soi. Mais elles sont au service aussi de cette dimension, encore une fois, connectée et interagissante qu'on a avec les autres. Et donc c'est forcément les deux. Alors dans le propos des lois Laurent, je crois que c'est une problématique de société. Comment on arrive à retrouver, à reconstruire de la confiance dans une société qui a perdu cette membrane de confiance, alors si tant est qu'elle est déjà opérée dans la confiance, mais voilà, on est au cœur des sujets de coopération pour le coup.

  • Bérénice d'Holomea

    Il n'y a pas longtemps, j'écoutais un podcast de philosophie justement sur la confiance en soi, mais du coup, la personne explorait tout ce qui était la confiance, de l'étymologie du mot, etc. Et en fait, c'est vrai qu'il y a... À un moment, elle parlait du fait qu'à une époque où on vivait dans des sociétés avec nos voisins, avec des personnes qui étaient proches géographiquement, en fait, on avait peu de problèmes de confiance parce qu'on était très proches à la fois physiquement et même émotionnellement. Enfin, on était toujours avec nos voisins, avec nos familles, etc. Donc finalement, la confiance n'était pas forcément un problème parce qu'on était toujours côte à côte. Donc on pouvait toujours voir si la personne était... dignes de notre confiance. Et du coup, maintenant, c'est vrai qu'avec les éloignements géographiques, relationnels, en fait, même là, nos voisins, on ne les connaît pas forcément, ou alors on a quelques bribes d'informations, mais ce n'est pas de là à accorder une confiance aveugle. Et donc, elle reliait ça avec la confiance en soi, en disant finalement, comme on a perdu cette confiance en les autres, du coup, à l'intérieur de soi, il faut qu'on réussisse à cultiver cette confiance en soi. pour pouvoir justement après aller vers la confiance en les autres.

  • Pascale Boissier

    C'est d'autant plus intéressant que c'est quelque chose que décrit très bien Pablo Servigne dans un autre bouquin que je trouve absolument fondamental si vous ne l'avez pas encore lu je vous invite à le faire. qui s'appelle l'entraide de l'autre loi de la jungle, où justement, avec Gauthier-Chapelle, ils font la somme un petit peu des connaissances et de ce que les sciences et les sciences sociales savent de la coopération, et où la confiance et le sentiment de confiance et le cadre de sécurité dans lequel on opère pour la coopération est essentiel. Et effectivement, lui, il parle de la réciprocité directe avec les gens qu'on connaît. C'est effectivement... Plus facile de savoir à qui on a affaire, ce sur quoi on peut compter, le fait qu'on est dans ces logiques réciproques aussi, quand on fait des choses les uns pour les autres. Qu'est-ce qui se passe quand c'est avec des gens qu'on ne connaît plus ? Là, il y a d'autres mécaniques qui se mettent en place. Et puis, ce qui prend le relais au niveau global de nos sociétés, c'est la qualité de nos institutions, et c'est la qualité des règles de société qui nous régissent. Et qu'effectivement, quand elles, et je pense que c'est ce qui se passe en ce moment, quand ces conditions ne sont pas susceptibles de créer de la confiance dans les citoyens, la confiance en eux-mêmes, dans leurs propres capacités, la confiance dans le système, la confiance dans les règles du jeu avec lesquelles on joue, c'est évident que c'est très très compliqué de pouvoir faire ensemble. Et effectivement, c'est ce qui sans doute met à mal... aujourd'hui les comportements que l'on lui qualifie de pro-sociaux et notre capacité à pouvoir faire avec les autres sereinement.

  • Bérénice d'Holomea

    Et justement je trouve que du coup ça fait une bonne transition avec ton projet. Toi tu accompagnes aussi des collectifs à coopérer et notamment des collectifs à coopérer entre eux j'ai envie de dire, voilà, entre plusieurs collectifs différents. Et je pense que cette notion d'entraide et de confiance ça doit être un peu au cœur des enjeux aussi. Pour réussir à faire coopérer des entreprises peut-être concurrentes ou des collectivités avec d'autres entreprises, est-ce que tu pourrais nous raconter un petit peu comment ça se passe ? Quels sont tes enjeux ?

  • Pascale Boissier

    Alors c'est vrai que la coopération, on y travaille beaucoup au sein de l'entreprise. La question fondamentale aujourd'hui, elle est comment des entreprises peuvent coopérer entre elles pour arriver à relever des défis qu'elles ne pourront pas relever toutes seules. Et que sortir du paradigme de l'impact individuel, alors aujourd'hui on est encore beaucoup là-dessus, les entreprises travaillent pour certaines, pas toutes, à changer leurs pratiques, à réduire leur impact, mais il y a un certain nombre de choses qu'elles ne pourront pas faire seules, qu'elles devront faire parfois avec leurs concurrents, qu'elles devront faire avec d'autres entreprises dans d'autres secteurs d'activité aussi. Et un monde économique en mouvement, c'est effectivement des entreprises qui coopèrent. entre elles, et moi ça m'intéresse beaucoup de travailler là-dessus.

  • Bérénice d'Holomea

    Est-ce que tu as un exemple de sujet qu'une entreprise ne peut pas forcément réussir seule et qui peut être résolue avec d'autres parties prenantes ?

  • Pascale Boissier

    Si on prend seulement la question climatique, par exemple, nous on travaille par exemple dans l'industrie du tourisme et dans l'hôtellerie, par exemple, dont on sait dans le tourisme que 80% de l'impact... carbone, c'est le transport. C'est la manière dont on va et dont on repart des lieux touristiques, que ce soit des sites, que ce soit des hôtels. On peut bien imaginer que sur cette question des mobilités, une entreprise hôtelière ne va pas vraiment pouvoir faire toute seule pour résoudre la problématique de comment on arrive sur ces sites, par exemple. Nous, on travaille pour un réseau de thalassothérapie, par exemple, qui est situé sur des littoraux un peu excentrés. Aujourd'hui, on y arrive essentiellement en voiture. Demain, pour pouvoir y arriver par d'autres moyens, c'est évident qu'il y a de la collaboration avec les collectivités territoriales, avec les acteurs de transports locaux, avec d'autres entreprises qui peuvent être aussi concernées et qui devraient pouvoir bénéficier de tout ça. Typiquement, les mobilités sont un exemple très concret sur lequel on ne peut pas faire tout seul.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, et non seulement il y a une coopération inter... entre les collectivités, les entreprises, même les particuliers finalement qui sont consommateurs de ce service-là. Et en plus, du coup, il y a aussi une coopération interfilière. Mobilité, c'est un sujet, c'est toute une filière avec énormément d'acteurs. Et j'imagine que l'hôtellerie aussi. Et c'est des mondes qui sont totalement différents. Donc, il y a besoin peut-être aussi de personnes qui font la traduction, le lien en fait entre ces deux mondes qui ont... Des vocabulaires assez différents, j'imagine.

  • Pascale Boissier

    C'est évident que la question des interfaces, comme dans le vivant d'ailleurs, les interfaces entre des écosystèmes, ça devient vital de se dire comment on arrive déjà à se parler, comment on arrive à dialoguer, c'est un premier niveau. Comment on arrive à se comprendre, c'est déjà un autre niveau. Et puis comment on arrive à faire ensemble. Alors là, on est vraiment au cœur des gros défis de la coopération multipartie prenante auxquels sont confrontés aujourd'hui pas mal de territoires. Il y a des expérimentations un peu partout. Je pense à la Drôme notamment, un petit coucou à l'association Biovalet qui essaie justement de faire travailler des parties prenantes très différentes autour de problématiques communes. Là, on touche à des choses qui... culturellement sont très nouvelles, en tout cas dans nos sociétés actuelles. Et donc, ça implique effectivement une capacité de coopération étendue. Et là, la communication vient jouer aussi un rôle très important dans l'animation de ces écosystèmes qui travaillent ensemble. Après, l'enjeu de travailler entre entreprises aussi. Alors, ça peut être des liens liés à la proximité dans le cadre de la mobilité. forcément ça joue. On a des intérêts communs quand on est situé sur un même territoire, on a aussi des intérêts communs quand on est dans un même secteur d'activité et on a aussi des intérêts communs quand on essaie d'avancer sur tous ces sujets là. C'est le sens de notre engagement auprès d'un collectif d'entreprises, d'un mouvement d'entreprises qui s'appelle Bicorp, qui est né en fait... aux États-Unis en 2006 de la volonté à la fois de changer les pratiques du monde de l'entreprise et d'intégrer les questions environnementales et sociales dans les pratiques et les modèles des entreprises, mais aussi de changer les règles du jeu économique et la manière dont le système fonctionne, un système qui est aujourd'hui essentiellement actionnarial, puisque c'est aujourd'hui la partie prenante qui a la primauté. de passer à des logiques partenariales où l'ensemble des parties prenantes sont prises en compte dans la manière dont l'entreprise opère. Et en fait, on se rend compte que d'avoir cette volonté commune de progresser sur ces questions, d'être conscient qu'il faut dépasser l'impact individuel pour de l'impact collectif, ça crée un mouvement d'entreprises qui sont prêtes à travailler ensemble, très concrètement sur des thématiques... précises sur des problématiques sectorielles aussi qu'elles ont à relever ensemble et de sortir de la compétition pure pour aller vers des nouvelles logiques de travail en commun. Et ça, c'est très enthousiasmant.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, j'imagine. Ça doit être assez satisfaisant et enthousiasmant d'être auprès d'entreprises qui ont une volonté de s'engager. et qui ont cette volonté de faire collectif autour de sujets. Moi, du coup, j'étais pendant un petit moment au Cébios et je travaillais notamment avec le Cosmimétiques Group, qui rassemble plusieurs acteurs des cosmétiques en France, qui sont concurrents ou clients-fournisseurs. Et c'était extrêmement intéressant d'animer ce groupe-là. En plus, souvent, ils ont travaillé ensemble à certains moments de leur carrière dans les mêmes entreprises. et de les voir se retrouver et de se dire ouais là on sent que le biomimétisme ça peut avoir un impact sur des enjeux communs, des enjeux concurrentiels et non concurrentiels et du coup comment on fait, comment on montre aussi que c'est des sujets qui nous importent et qu'on a cet engagement là et que ça nous tient à coeur et qu'on le fait ensemble et c'est super intéressant de voir qu'il y a vraiment cette volonté aussi de de montrer presque l'exemple, en toute humilité, mais de montrer que c'est possible et que finalement, ce modèle-là, très structuré, filière, entreprise, etc., peut aussi fonctionner en logique partenariale et en logique au moins de réflexion commune. Après, comment ça va s'incarner dans l'entreprise, chacun aura sa manière de le faire. Mais au moins sur les grandes lignes, de réfléchir et d'être dans une cohérence, c'est extrêmement intéressant, je trouve.

  • Pascale Boissier

    C'est intéressant que ce soit le monde de la cosmétique. Je ne savais pas qu'il y avait ce type de coalition côté monde du biomimétisme. Mais par exemple, dans Bicorp, la plus grande coalition sectorielle qui existe aujourd'hui dans le mouvement, c'est la Beauty Coalition. C'est une coalition des acteurs du monde de la cosmétique et de la beauté, où il y a une soixantaine d'entreprises Bicorp. au niveau international, qui ont décidé de pouvoir réfléchir et œuvrer ensemble sur un certain nombre de sujets qui ont trait au secteur. Alors pourquoi le monde de la cosmétique et de la beauté ? Alors ils sont dépendants, ils ont beaucoup de dépendance à nos problématiques actuelles.

  • Bérénice d'Holomea

    Ils sont beaucoup dans l'innovation aussi. C'est vrai que je pense que c'est un monde où la R&D a beaucoup d'importance.

  • Pascale Boissier

    Où la R&D a beaucoup d'importance et où effectivement le... Le réflexe de pouvoir s'entrenourrir, s'entranspirer, etc. est peut-être un tout petit peu plus présent que dans d'autres secteurs d'activité très très habitués à... à fonctionner de manière beaucoup plus silotée.

  • Bérénice d'Holomea

    Et donc toi, tu travailles aux côtés de Bicorp, c'est bien ça, pour accompagner des entreprises engagées sur des sujets de coopération, c'est ça ? Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus ?

  • Pascale Boissier

    Alors, c'est plus spécifique que ça, même si on va en parler, la coopération joue un rôle important. Moi, j'accompagne depuis la création de l'association B lab France les équipes sur tous les sujets de communication. Et c'est vrai que très rapidement, les sujets de communication, ça a beaucoup à voir avec l'animation de la communauté, avec la manière de favoriser les synergies, avec la manière d'embarquer des bicorps dans des expériences communes. Et c'est vrai que depuis l'année dernière, notamment avec Louise Seguin, que je salue, et Sarah Serange, la responsable communauté de B corps, a été mise en place une initiative sur le Festival Agir pour le Vivant, qui est un festival à Arles qui se tient chaque année fin août et qui agrège un écosystème très très riche de scientifiques, de chercheurs, de penseurs, d'activistes, d'entreprises aussi, même si le monde économique est un tout petit peu moins présent, mais c'est ce qui nous a intéressés aussi. Et l'idée de se dire sur ces questions du vivant, qui aujourd'hui sont complexes à embarquer, dans le monde de l'entreprise, parce qu'il y a un concept pareil, comment on embarque une question dans le monde de l'entreprise. Ça peut être vu à l'aune 2, on va s'occuper de notre impact biodiversité, on va se former à ces questions, on va comprendre nos dépendances aux vivants, parce que maintenant on se rend compte que tout ça présente des risques aussi pour beaucoup d'activités. Mais comment, globalement, on prend de la hauteur et on fait un pas de côté sur ces questions ? en tant qu'entreprise, et on le fait avec d'autres, et on décide ensemble de pouvoir non seulement apprendre, mais pouvoir aussi partager sur ces questions, et puis essayer de se mettre en action de la manière la plus cohérente possible. Donc ça, c'est un exemple concret de comment, progressivement, on pose les petites graines d'actions collectives, de coalitions sur un certain nombre de sujets. Et pour nous, ça passe par ces moments où on peut se retrouver, encore une fois, apprendre ensemble. Et là, je rejoins la logique d'Eloi Laurent qui dit que finalement, la coopération, l'intention est de savoir. Je trouve qu'il y a quelque chose de très fort là-dedans. Mais on est aussi dans un moment où il faut faire. Alors, il y a l'injonction à faire, on peut la questionner, mais il y a quand même des choses qu'on doit mettre en place et faire. Et les entreprises ont cette forte capacité à faire. C'est peut-être même l'un des acteurs de la société qui est peut-être l'un des mieux armés pour pouvoir faire, apporter des solutions et proposer des choses concrètes qui nous permettent de changer de mode de vie, de pratiques, etc. Donc voilà, mettre tous ces acteurs autour de la table. L'année dernière, on était une douzaine d'entreprises qui se sont mobilisées. Et cette année, on le fait sur un format plus apprenant, autour d'une idée de B-Université. Encore une fois, apprendre ensemble, co-apprendre, ça fait partie des clés pour pouvoir coopérer. Et on réitère l'expérience cette année, fin août à Arles.

  • Bérénice d'Holomea

    Et du coup, en quoi ça consiste la B-Université ?

  • Pascale Boissier

    Alors la B-Université, c'est trois choses. La première, c'est aller aussi s'ouvrir un peu les chakras. le cœur, l'esprit, auprès de gens qui réfléchissent à ces questions, qui expérimentent, qui ont d'autres visions du monde et d'autres points de vue. Parce que le monde économique, parfois, on peut manquer de diversité et de pluralisme dans les points de vue. Donc ça, c'est un point important. Le deuxième, c'est de pouvoir approfondir, au contact d'experts, un certain nombre de sujets. Cette année... On aimerait aller plus loin sur les questions d'écologie du travail. Ça fait partie aussi des thématiques autour du vivant. La dimension sociale est importante. Ou d'un grand mot du moment, qui est celui de la régénération, par exemple. Comment on peut approfondir ces questions ? Et puis, enfin, comment on arrive à faire alliance ? Donc, ce sera l'occasion pour des bicorps d'être déjà entre bicorps, mais aussi d'aller rencontrer... des gens qui œuvrent dans d'autres pays, notamment cette année, des rencontres avec nos homologues d'Amérique latine, puisque la Colombie est très présente à Agir pour le vivant, ils ont une édition à Medellín. Donc de rencontrer à la fois des acteurs qui œuvrent dans ce sens ailleurs dans le monde et aussi sur le territoire, puisque sur le pays d'Arles, il se passe aussi beaucoup de choses. Donc de faire cette connexion entre le local, le territorial et l'international. Donc c'est un programme... qui promet de nous faire vivre plein de choses géniales. On a hâte.

  • Bérénice d'Holomea

    C'est génial d'avoir à la fois le côté très local et en même temps ce côté presque inspiration de comment ça se fait ailleurs. Et finalement, je pense que le but, ce n'est pas de faire la même chose, mais c'est de se dire qu'est-ce qu'on peut ramener, quelles sont nos contraintes communes, là cet enjeu, comment ils ont répondu. Et du coup, ce métissage finalement de solutions, c'est ça qui crée la richesse et la pertinence d'une solution, j'ai l'impression.

  • Pascale Boissier

    En tout cas, créer des liens, créer des ponts, croiser des regards, des expériences, alors on le sait, c'est fondamental. Après, il faut prendre le temps pour le faire. Et ça, encore une fois, je reviens aux spécificités du monde économique, c'est parfois compliqué de pouvoir mettre le nez dehors, de pouvoir prendre du temps pour faire tout ça. On n'est pas dans des systèmes qui permettent de le faire. On est souvent dans des entreprises, en ce moment particulièrement dans un contexte un peu tendu sur le plan économique, social et géopolitique, où prendre ce temps du recul, de la reliance avec d'autres, de l'inspiration, d'aller voir autre chose, voire même de se mettre en jachère à certains moments. pour laisser émerger des choses, parce que malgré tout, d'être tout le temps dans le faire peut parfois nous couper d'un certain nombre de choses qui pourraient émerger si on leur laissait seulement le temps de venir, de pousser. Voilà, c'est vrai qu'on est dans des mondes, et notamment dans le monde des transitions aujourd'hui, de l'impact, ça prend des noms variés. dans quand même la volonté d'action, d'être très agissant et d'obtenir des résultats. Mais d'être agissant tout le temps, ça ne nous aide pas toujours. Donc de prendre le temps aussi de ne pas faire, pour nous c'est aussi une voie. Et c'est celle-là qu'on a envie aussi de faire expérimenter à des entreprises et des collaborateurs qui n'ont pas forcément l'habitude de le faire.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, de le laisser venir. C'est un sujet, ça. C'est pas facile.

  • Pascale Boissier

    Laisser venir et advenir, je pense que c'est un des trucs les plus difficiles qu'on ait à faire, à la fois individuellement, parce que je pense qu'on est tous concernés par cette difficulté aussi à faire confiance. On appelle ça faire confiance à la vie, faire confiance au destin. Chacun y mettra ce qu'il veut. Mais de laisser advenir et de se dire que... Alors, il y a des traditions où c'est très présent. notamment orientale, où le non-agir est une forme d'action. Mais elle vient nous confronter beaucoup culturellement, intellectuellement et même émotionnellement dans nos cultures à nous. Clairement, le non-agir ne fait pas vraiment partie de notre logiciel. Et pourtant, qu'est-ce qu'il peut être intéressant d'explorer ? Évidemment, rien ne s'exclut. Il ne s'agit pas d'arrêter d'agir, mais de se dire...... être toujours dans l'action, c'est toujours la clé, surtout face à ce qui nous attend.

  • Bérénice d'Holomea

    Surtout que je trouve que ça peut créer un sentiment de culpabilité aussi. Finalement, il y a des fois où on produit, puis juste après, on est un peu fatigué, on a moins d'idées, on sent qu'on a besoin de souffler. On peut se sentir finalement mal à l'aise et se dire mais je ne fais rien en ce moment, je ne suis pas productive, je ne suis pas productive Et ça peut créer de la peur, de l'angoisse. L'envie de combler, de se rajouter d'autres choses. Parce que d'être un peu plus lent, un peu plus détendu, un peu plus improductif, ça fait peur. On a peur de ne pas réussir à se remettre. Je ne sais pas de quoi on a peur, mais ça peut faire peur.

  • Pascale Boissier

    C'est intéressant de demander de quoi on a peur. Mais c'est vrai qu'on est dans nos sociétés dans une injonction absolument défastatrice à cet endroit-là. Oui, on est dans des cultures de la productivité, on est dans des cultures de la performance de manière générale. On parlait du monde économique, mais cette performance s'étend à tous les domaines. Même le développement personnel est devenu performatif d'une certaine manière. Même des pratiques qui ne nécessitent aucun résultat, je pense au yoga par exemple, c'est devenu aussi des résultats à atteindre et des niveaux à dépasser, etc. et qu'effectivement, cette peur de loisiveté dans nos sociétés, de la paresse, je ne vais pas refaire toute la liste de ce que pas mal de philosophes et d'auteurs d'ailleurs ont exploré. La question aujourd'hui, c'est comment, dans nos manières de faire, sur des sujets de transition, sur des sujets aussi complexes, sur la coopération, on arrive petit à petit à déconstruire ces logiques-là pour entrer dans autre chose. Alors, je te l'ai dit, j'étais avec eux, j'assistais à la conférence d'Olivier Hamand sur, justement, l'antidote occulte de la performance, qui était absolument ébouriffante, parce que d'un coup, de valoriser la sous-optimalité, de valoriser la lenteur, de valoriser l'incohérence, de valoriser l'inachevé, toutes ces notions qui sont tellement antinomiques avec notre mode. culturelle actuelle, d'un coup, il y a quelque chose qui vient à la fois nous bousculer et à la fois nous faire du bien. Je crois qu'on a tous cette aspiration à pouvoir articuler, équilibrer davantage les choses, y compris dans nos milieux de la transition et de l'engagement, même si je n'aime pas beaucoup ce mot. Parce qu'on le voit aujourd'hui, il peut y avoir beaucoup d'épuisement, il y a des burn-out, il y a des gens qui, dans cette recherche, encore une fois, qui est toujours dans le logiciel de la productivité, de la performance, il peut tout à fait s'appliquer à nos sujets de transition écologique et sociale. Et c'est ça aujourd'hui qu'on doit questionner. Mais ce n'est pas facile, effectivement.

  • Bérénice d'Holomea

    Je suis totalement d'accord. En plus, on parlait tout à l'heure d'innovation. Il y a un côté aussi où on essaye de sortir du cadre. d'emmener vers autre chose et où en fait des personnes qui auraient besoin de se faire convaincre demandent des résultats. Et donc c'est pas forcément possible. D'où cet épuisement aussi parce qu'on essaye de tirer vers quelque chose où peut-être il n'y en a pas encore des résultats ou qui ne sont pas encore vraiment observables, qui ne sont pas suffisants sur une ancienne logique, qui ne peuvent pas être observés avec les mêmes indicateurs. Et ça peut provoquer beaucoup de frustration et de colère je pense aussi. de se retrouver dans ces situations-là. Et puis, moi, ce que j'ai observé aussi, c'est que parfois, il y a un côté un peu sacrificiel. Comme je travaille pour la bonne cause, je fais des heures sans les compter. Peut-être que dans mon équipe, ça se passe mal, mais ce n'est pas grave parce qu'on travaille pour la bonne cause. Donc, il faut continuer. Et c'est tellement dommage. Et moi, ça me parle aussi de la coopération comme logique d'amour, parce que... Moi, je crois profondément que si on aime ce qu'on fait et qu'on est heureux dans ce qu'on fait, alors on va forcément produire des choses qui sont dans le sens d'une transition et d'un avenir qu'on a envie de faire advenir. Et oui, c'est vrai que ce côté sacrificiel, ça empêche finalement même, j'ai l'impression, de potentiels résultats peut-être d'avoir lieu, puisqu'il y a ce désengagement, il y a cette colère, il y a cette fatigue qui sont présentes et qui... qui en fait épuisent des personnes qui auraient l'envie profonde de s'investir.

  • Pascale Boissier

    Et je crois que tu as raison de le souligner, parce que je pense que l'intérêt général et nos problématiques n'excluent pas au contraire des problématiques d'exploitation, des problématiques de violence dans les relations et dans les rapports. Ma conviction, c'est que parce qu'on est toujours dans ce logiciel du résultat, donc le résultat... résultat qu'il y ait, que ce soit de changer le monde ou que ce soit de le conserver tel qu'il est, la mécanique elle est la même. Si en tout cas il n'y a pas d'attention portée à la manière dont on le fait, alors beaucoup de gens évoquent les questions d'écologie de la relation, d'écologie humaine etc. Moi c'est fondamental et d'ailleurs je fais partie des gens qui pensent que l'intention première c'est d'abord la qualité. des relations, des connexions et de la manière dont tu fais les choses. Parce que je fais partie des gens qui pensent que c'est à cette condition-là qu'on pourra aller vers le monde qu'on appelle de nos vœux, mais sans soin et sans attention portée à tout ça. Je crois qu'on n'a pas vraiment renversé la table dans la manière de faire. Et on reproduit, je crois que c'est ce que... peut faire parfois le monde de l'impact. Déjà, rien que ce mot, impact, Il peut être jugé positivement, justement, quand on parle d'impact positif. Mais pour moi, on n'est pas vraiment sortis du vieux logiciel économique de la performance. Donc, on peut faire de l'impact tout en étant violent dans les relations sociales. C'était Pierre Rabhi qui disait on peut manger bio, exploiter son prochain On peut décarboner en exploitant son prochain, on peut être des boîtes à impact tout en exploitant, on va dire, les personnes qui justement se donnent sans compter pour ces sujets-là. Pour l'anecdote, moi, la première fois que j'ai pris conscience de ça, c'est en discutant avec une personne d'un syndicat, d'un vieux syndicat, dont on se dit aujourd'hui, ils sont complètement... à la rue, etc., mais qui me racontait comment, au moment du Covid, des bonnes volontés avaient été récupérées sous forme d'exploitation pure et simple. Par exemple, des femmes qui faisaient des masques en tissu, qui au début le faisaient pour contribuer à la solidarité, à l'entraide qui s'est mise en place à ce moment-là. Mais très vite, c'est devenu des obligations, des heures à faire, des attentes sur le nombre de masques qu'il fallait faire. Et très vite, un système informel d'entraide est devenu un système d'exploitation de bénévoles qui fabriquaient à la chaîne ces masques en tissu, dont en plus, après, on s'est rendu compte qu'ils n'allaient pas forcément être utiles. Et donc, ces logiques d'exploitation, de violence sociale, ils ne sont malheureusement pas incompatibles avec la recherche d'un impact environnemental positif. Et c'est ça qu'il va falloir arriver à réconcilier aujourd'hui.

  • Bérénice d'Holomea

    Et donc justement, tu parles de soins, d'attention portée, de qualité de relation. Comment est-ce que tu crées ce cadre ou ce climat quand tu as justement des acteurs qui ne se connaissent pas ? qui ne travaillent pas du tout dans les mêmes domaines, et qui, peut-être même eux, en interne, n'ont peut-être pas forcément les réflexes de coopération. Comment est-ce que tu arrives à créer ce climat d'attention et de soins dans les relations ?

  • Pascale Boissier

    Je crois qu'il y a deux choses. La première, c'est le cadre de... Mais là, on revient à des fondamentaux sur la coopération. C'est le cadre de protection et de sécurité que tu mets en place. au sein duquel les échanges, les dialogues ou le travail ensemble peut se faire. S'il n'y a pas de cadre clair, s'il n'y a pas de confiance dans les personnes qui posent le cadre, c'est vrai que c'est très compliqué de pouvoir opérer. Ensuite, dans la qualité des relations qui peuvent se mettre en place, là, il faut faire avec là où en sont les gens. Et assumer aussi qu'il puisse y avoir... des émotions qu'on juge parfois négativement. Je pense que déjà, si on pouvait un peu moins connoter et juger nos émotions ou réactions socialement pas acceptées, on ferait peut-être un grand pas. Donc accepter la colère, accepter le conflit, accepter le désaccord, accepter parfois aussi qu'il y ait de la violence dans la manière d'exprimer les choses. Mais en revanche, de pouvoir petit à petit favoriser des modes de fonctionnement. Alors, comment on fait concrètement ? Alors, il y a déjà comment on incarne nous-mêmes les choses. Moi, je pense que ça commence par nous, évidemment. Tu parlais de confiance en soi. Je pense que c'est aussi notre capacité à nous déconstruire notre mode de relation, nos modes de communication. Et dans des groupes, dans des collectifs, d'arriver à pouvoir à la fois incarner ça du mieux qu'on peut, et c'est pas facile, et accepter aussi que ça marche pas toujours de manière apaisée, et que ça, on doit aussi faire avec. Et parfois, dans le non-apaisement, il y a aussi des choses utiles à prendre et qui peuvent nous aider à avancer. Je crois pas dans les collectifs... pacifié à 100%, je ne suis pas sûre. En revanche, dans une dynamique qui cherche à prendre soin des autres, je pense qu'on peut y arriver. C'est même essentiel, les conflits sont toujours le signe de besoins qui ne sont pas nourris. Et du coup, de comprendre ce qui n'est pas nourri, c'est déjà la première clé pour se dire comment on arrive à nourrir davantage. Alors, il y a ce qui est de notre responsabilité personnelle, dans notre capacité aussi à... à avoir conscience de nos besoins, notamment en interaction avec les autres, à savoir ce dont on a besoin, à savoir aussi comment en prendre soin, enfin prendre soin de soi, ça passe par là. Mais ce faisant, on le fait aussi pour les autres. Et un conflit est toujours l'expression de besoins, ça c'est très CNV, mais de besoins qui ne sont pas compris ou qui ne sont pas reconnus. Et oui, ça peut être très utile à un moment donné pour... pour pouvoir exprimer, dénouer des choses. On souhaiterait que ça ne passe pas forcément par le conflit pour arriver à se parler, à se comprendre. Mais parfois, c'est comme ça. Et on fait avec ce qui est vivant là. Et on l'accompagne au mieux. Parfois, ça marche. Parfois, ça ne marche pas. Mais c'est ça qui fait aussi l'intérêt de ces jeux collectifs. C'est qu'on apprend tout le temps sur soi et sur les autres. Après, il faut avoir envie. Et ça, pour le coup, qu'est-ce qui fait que l'envie est là ? Je ne suis pas persuadée qu'on donne envie. Je crois qu'il y a ce mythe aussi où on pourrait donner envie. Je pense que les flammes s'allument en chacun de manière très intime. C'est quelque chose qui relève vraiment de... très personnelles au fond, même si ça peut être stimulé par plein d'autres choses, mais je pense que ça vient vraiment de soi. De la même manière, pour des collectifs, pour moi, c'est jamais exogène. Il y a toujours quelque chose qui vient du corps collectif, quel qu'il soit, et puis il y a des moments où ça vient, et des moments où ça prend plus de temps pour l'accepter.

  • Bérénice d'Holomea

    Moi, je crois aussi beaucoup que ça vient par étapes. Des fois, ça vient, puis peut-être que ça repart. mais ça a nourri quelque chose. Et du coup, la fois d'après, et moi, là c'est plus un témoignage personnel, mais il y a des questions sur lesquelles j'ai beaucoup évolué, et ça m'a pris des années. Moi je ne crois pas au basculement du jour au lendemain. Je crois à des petits événements, des expériences, des vécus, des rencontres, des témoignages, des signes, peut-être qu'on a vu quelque part, un mot, une image, quelque chose. Et qui vont provoquer ce basculement ? Et moi, je trouve que regarder que ce basculement, c'est finalement exclure tout le chemin qui a été parcouru avant.

  • Pascale Boissier

    Je rejoins complètement. Moi, je pense que tout ce tissage de choses, alors on n'a pas toujours le recul pour se rendre compte de ce qui est en train de se passer, mais c'est là où la notion de confiance revient. Moi, je suis quelqu'un qui a... Après, j'ai eu beaucoup de chances dans ma vie. pour pouvoir avoir cette confiance dans la vie. Mais la confiance, les choses se tissent, tu ne les comprends pas forcément, tu ne vois pas forcément où ça va. Mais à un moment donné, il y a quelque chose, un déclic, une bascule. Je suis comme toi, mais je ne crois pas aux grandes bascules. C'est forcément l'alliance de plein de dynamiques et de plein de choses qui, à un moment donné, pouf, s'éclairent, du sens où nous font passer à l'action sur quelque chose. Et au fond, c'est très beau et réconfortant de se dire qu'on n'a pas besoin comme ça de grandes épiphanies dans nos vies. D'ailleurs, merci de me le rappeler là, parce que je crois qu'on est tous dans des moments où on a besoin que des choses se passent. Et on ne les voit pas forcément arriver, mais c'est de faire confiance à des process invisibles dans lesquels on est partie prenante avec d'autres. Et de se dire que le sens de tout ça se révélera. petit à petit ou pas complètement. J'aime bien cette part de mystère aussi dans ce qui se joue. Mais c'est important de se le rappeler.

  • Bérénice d'Holomea

    Moi, ça me rassure beaucoup de me dire que des fois, on est un peu dans l'attente. On se dit en ce moment, il ne se passe pas grand-chose. Et moi, souvent, je me dis si, mais c'est juste que tu ne le sais pas encore. Et j'aime bien me dire ça. Ça me rassure. Je me dis, mais si, mais dans un an, deux ans, trois ans, je regarderai ce moment et je me dirai c'est là, en fait, qu'il s'est dépassé des choses et que ça... Ça a nourri l'action ou la chose que j'attendais. Et je pense que ça s'applique dans le monde personnel, professionnel. On ne sait pas quand les choses vont se dénouer. Et voilà, on rejoint encore cette innovation et cette inconnue et cette confiance. Ça a un côté angoissant, mais finalement, assez chouette aussi, assez rassurante de se dire que tout peut encore arriver.

  • Pascale Boissier

    Je pense que cette... peur ou ses angoisses ou ses appréhensions, c'est des moteurs aussi. Je crois que tout concourt à un moment donné tout à sa place et à son rôle. Alors on n'a pas envie de se laisser submerger par l'angoisse, même si parfois ça peut arriver. Mais en même temps, dans la conscience que quelque chose se lit, se relie, qu'on n'est pas forcément à la bonne échelle pour voir ce qui se passe, qu'on n'a pas forcément le recul. Ça vaut pour nos vies, comme tu disais, peut-être dans trois ans, on se dira, tiens, en fait, c'était ce moment-là. Mais ça vaut aussi pour nos sociétés. Et dans 20 ans, on se dira, mais si, mais là, cette année hyper relou 2024, il y avait déjà ça qui était à l'œuvre et il y a ça qui était en train de... de monter. Ça nous aide à aussi apparaisser trop le nez dans le court terme qui peut être effectivement un peu effrayant pour essayer de voir un peu plus large. Ce que disait Olivier Hamann, ça fait du bien d'entendre ça, c'est que lui il parle des marges et il prend l'exemple des murmurations, tu sais ces danses des oiseaux qui évoluent dans le ciel en groupe de manière totalement fluide coordonnée. Et en fait, il expliquait que c'est les oiseaux qui sont aux marges, qui sont sur les bordures, qui font passer, qui gèrent en fait l'information qui circule dans le groupe. Ce n'est pas le cœur du système. Et pour lui, les marges ont déjà basculé. Alors quand on est au cœur du système, on ne voit pas forcément que les marges ont basculé. Quand on est à la marge, on se dit mais le cœur du système, il est toujours comme avant. Donc où qu'on soit, on a peut-être... pas exactement la meilleure vue sur ce qui se passe, donc seul le temps nous le dira.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, je suis tout à fait d'accord. Merci beaucoup pour cet échange, pour ce partage.

  • Pascale Boissier

    Merci à toi Bérénice. Indépendamment de ce qu'on arrivera ou pas à réaliser tous ensemble, la qualité de ces moments et de ces conversations elle est essentielle, donc merci beaucoup pour cette invitation.

  • Bérénice d'Holomea

    La définition de Pascal concernant la coopération, le vient de sa lecture de l'ouvrage Coopérer et se faire confiance écrit par Éloi Laurent. Pour Pascal, la coopération ne réside pas seulement dans l'action vers un but commun, mais elle serait plutôt mue par une dynamique d'amour et par une envie de savoir plutôt que de faire. Donc coopérer n'est pas seulement faire ensemble, mais c'est aussi s'accorder sur le sens et la manière dont on le fait. Un des ingrédients qui est essentiel à la coopération qu'on a identifié dans la discussion avec Pascal, c'est la confiance. à la fois la confiance en soi et aussi la confiance dans le groupe, dans le collectif. Et en fait, le cadre de sécurité qu'on va instaurer et le climat de confiance qui va être présent dans le collectif, ce sont deux choses qui sont absolument essentielles à cette coopération. Et on sait qu'il est plus facile de faire confiance lorsqu'on connaît une personne, une situation. Et donc, dans le cas des accompagnements de Pascal, qui sont en général des coopérations multiparties prenantes entre plusieurs organisations de types différents, et aussi parfois qui travaillent dans des secteurs d'activité distincts. Donc là, la question, c'est finalement, comme ces interlocuteurs finalement ne se connaissent pas, n'ont pas connaissance des enjeux de chacun, comment on crée ce climat de confiance ? Comment faire pour que ces organisations, elles arrivent déjà à dialoguer, parce que parfois le vocabulaire peut être différent, mais aussi à se comprendre et à faire ensemble, à agir ensemble autour d'enjeux communs ? Pascal, dans ces activités d'accompagnement, Elle travaille justement sur ces enjeux de coopération entre plusieurs organisations. Et elle le fait aussi de par son engagement auprès de B corp et de B lab France. Et donc, Pascal est notamment impliqué dans l'association Bilab France au niveau de la communication, qui est liée aussi avec l'animation de communautés, qui sont en fait des entreprises qui sont engagées dans la démarche B corp et qui n'ont pas forcément les mêmes secteurs d'activité, les mêmes enjeux. Et donc, c'est pour ça aussi, dans ce cadre-là, Pascal est aussi... facilitatrice de synergie, de liens et de coopération dans des organisations diverses. Et ça, en fait, ça peut passer par différents moyens. Et un des moyens de faire cette animation-là, c'est justement d'organiser des événements. Comme par exemple, elle nous parle du festival Agir pour le Vivant qui a lieu la dernière semaine d'août à Arles. Et donc, ce festival, c'est vraiment une opportunité pour les entreprises de créer une dynamique collective. coalition aussi, à la fois d'entreprises et aussi de personnes qui ont envie de s'investir sur le sujet. Ce genre d'événement et ce genre de rassemblement, c'est vraiment une occasion pour sortir aussi de cette culture très agissante qui est très présente dans notre société et qui est aussi présente dans les engagements on va dire de transition. Il y a toujours un enjeu à faire, à montrer, à avoir des résultats et en fait on se laisse prendre finalement dans cette culture-là qu'on essaye justement de changer. Et donc, participer à des événements comme ça, où en fait, le but c'est vraiment d'aller créer du lien, d'aller s'inspirer, d'aller voir ce qui se fait ailleurs, d'exprimer peut-être sa créativité. C'est un moyen de laisser venir, de laisser advenir, de laisser émerger et de pas tout le temps être dans le faire, mais justement être dans cette dynamique d'amour dont parlait Pascal au début pour aller créer des liens et finalement prendre ce temps-là aussi pour poser un petit peu ses réflexions et ses actions. Donc justement voilà, ce modèle de productivité et de performance qu'on essaye de déconstruire parfois quand on s'engage dans des entreprises à mission, dans... des associations, dans des organisations, dans le sens de la transition écologique et sociale. On essaye vraiment de sortir de ce modèle-là qui a des externalités extrêmement négatives, mais en fait, on remarque que ce modèle-là, il s'applique toujours. Et c'est intéressant de comprendre pourquoi, parce qu'en fait, on essaye de changer quelque chose et finalement, ça devient quelque chose qui est appliqué à nous-mêmes. Et ça, c'est aussi lié à la manière dont on s'organise, parce que si on ne change pas nos fonctionnements collectifs, en fait, on va répéter les anciens schémas Et on va produire exactement les mêmes externalités du stress, de l'épuisement, du désengagement, de la colère. C'est en allant créer des nouvelles interactions avec de l'attention, avec du soin qui est porté aux membres d'un collectif et aussi au collectif en lui-même, avec ce climat de confiance qu'on va pouvoir créer dans les collectifs. Et ça, ça va pouvoir permettre de générer un fonctionnement différent. Et ce fonctionnement différent va pouvoir soutenir une production qui est différente et qui est en lien avec la transition écologique et sociale. Ça, c'est une loi qui s'appelle la loi de Conway qui dit que ce qu'on produit ressemble à la manière dont on est organisé. Et donc forcément, si on essaye de produire autre chose, si on essaye de produire de nouveaux produits, de nouveaux fonctionnements, de nouveaux services en lien avec la transition, eh bien, on a besoin de modifier nos modes de fonctionnement aussi. Retrouvez les épisodes de l'affluence une fois par mois. Il forme un recueil de témoignages, de vécus liés aux transformations des pratiques qui vous permettra d'avoir des clés pour faire évoluer à votre échelle votre environnement professionnel. Pour ne rater aucun épisode et pour faire grandir ce podcast, vous pouvez en parler autour de vous, vous abonner sur votre plateforme d'écoute préférée et nous laisser des étoiles si vous nous écoutez depuis Spotify ou Apple Podcast. Merci pour votre écoute et à bientôt pour un nouvel épisode de la Fluence. Sous-titrage Société Radio-

Description

La Fluence, le podcast qui explore la coopération 🔎


Aujourd’hui, nous explorons la vision de Pascale Boissier sur la coopération, notamment lorsqu’elle se met en place entre les organisations. Les entreprises, les collectivités, les associations et autres collectifs ont tout intérêt à se faire confiance pour relever les défis de la transition écologique et sociale. 


Influencée par la lecture de l’ouvrage "Coopérer et se faire confiance" d'Eloi Laurent, Pascale considère que la coopération va au-delà de l'action collective vers un objectif commun. Elle serait mue par une dynamique d'amour, de confiance et d’une envie de savoir plutôt que de faire. 

Elle souligne l'importance de la confiance, tant en soi qu'au sein d'un groupe. Son défi en tant que co-fondatrice de Silbo est de créer cette confiance entre plusieurs organisations. 

Également impliquée avec B corp et B Lab France, Pascale travaille pour soutenir la communication, animer la communauté d’entreprises engagées et faciliter les synergies. Elle participe à des initiatives comme le festival "Agir pour le vivant", visant à créer une dynamique collective en faveur de la transition écologique et sociale. 

Cette conversation se poursuit sur des enjeux plus philosophiques : comment se détacher des injonctions à faire et à produire, comment laisser venir et advenir, avoir confiance, repérer les signaux faibles… 


En savoir plus sur Silbo : https://silbo.fr/

En savoir plus sur B Corp : https://www.bcorporation.net/en-us/

En savoir plus sur B Lab France : https://bcorporation.fr/le-mouvement/b-lab-france/


Coopérer et se faire confiance, Eloi Laurent : https://www.ruedelechiquier.net/essais/486-cooperer-et-se-faire-confiance.html

Conférence : La robustesse du vivant comme antidote au culte de la performance - Olivier Hamant : https://www.youtube.com/watch?v=DvU4jKnzT1I


Musiques par Vito Bendinelli : https://www.instagram.com/vito.bendinelli/


Pour retrouver les prochains épisodes : 

Instagram : https://www.instagram.com/holomea.insta/

Linked In : https://www.linkedin.com/company/holomea/

Site Holomea : https://holomea.com/


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Bérénice d'Holomea

    Bonjour à toutes et à tous, je m'appelle Bérénice, je travaille chez Holomea et je suis passionnée par la bio-inspiration et la manière dont fonctionnent les humains entre eux. Bienvenue sur La Fluence, le podcast qui explore la coopération. Aujourd'hui je suis avec Pascale Boissier, cofondatrice de Silbo, une société à mission dédiée à l'accompagnement aux transitions. Elle est aussi activement engagée auprès de l'association B Lab France pour développer l'écosystème B corp en France. Je la retrouve à Montmartre et nous entamons la discussion tout en contemplant les toits parisiens. Bonjour Pascale.

  • Pascale Boissier

    Bonjour Bérénice.

  • Bérénice d'Holomea

    Bienvenue dans la Fluence, le podcast qui explore la coopération. Est-ce que tu veux bien te présenter en quelques mots ?

  • Pascale Boissier

    En quelques mots, alors je suis Pascale Boissier, je suis franco-chilienne avec des attaches importantes dans les Cévennes. Ça me détermine beaucoup et aujourd'hui mon activité principale c'est d'accompagner des organisations, des entreprises, des collectivités, des associations sur le chemin exigeant des transitions. Et je fais ça depuis environ huit ans au sein d'un cabinet qui s'appelle Silbo, avec mon associé Sylvain Page et toute une série de camarades aussi avec lesquels on travaille sur tous ces sujets.

  • Bérénice d'Holomea

    Donc dans ce cabinet Silbo, vous accompagnez les collectifs à se transformer, à aller dans le sens de la transition. C'était surtout par le biais de la communication, c'est ça ? Ou il y a d'autres choses que vous mettez en place pour accompagner les collectifs ?

  • Pascale Boissier

    C'est vrai que mon métier depuis 25 ans maintenant, c'est la communication. C'est là où je suis née, c'est là où j'ai grandi. Et en même temps, il y a environ une quinzaine d'années, la conscience que la communication pouvait avoir un rôle important dans les transformations que connaît notre société, que connaît l'économie, à la fois dans les prises de conscience, à la fois dans le fait d'embarquer des individus et des collectifs, d'animer des écosystèmes autour des projets. Donc effectivement, moi je suis partie, et mon associé Sylvain aussi, de ce monde-là, pour depuis quelques années, être venue explorer les chemins plus dans le dur, on va dire, du conseil sur tous ces sujets-là, de l'accompagnement humain sur toutes ces questions-là, et de l'accompagnement à la mise en action aussi, au-delà de la mobilisation des individus et des collectifs à travers la communication. C'est vrai que quand on dit communication, les gens... Alors déjà, la communication n'a pas toujours bonne réputation. Quand on, avec les expressions, c'est de la com ou c'est juste de la com, on peut comprendre aussi pourquoi on a cette vision-là de la communication. Mais comme on le dit souvent, nous, la com, ce n'est pas juste faire des petits dépliants ou des jolis sites web pour raconter des choses bien polissées. C'est bien plus profond que ça. Moi, je viens d'une famille d'enseignants. C'est vrai que pour moi, la communication a beaucoup à voir avec l'éducation et la pédagogie. Et c'est ça qu'on essaye effectivement de développer.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, même une forme de vulgarisation aussi, de s'adapter finalement à l'audience, trouver les bons mots, le bon vocabulaire. Et je trouve que ce n'est même pas facile aussi de retransmettre, réellement de mettre des mots sur des choses qu'on peut mettre en pratique dans des collectifs, dans des organisations. Parce que des fois, on a l'impression que finalement, il y a peut-être... plusieurs autres collectifs qui pourraient utiliser les mêmes mots que nous, alors qu'en fait, ça veut dire peut-être des choses totalement différentes et des actions qui ne se ressemblent pas forcément. Donc, effectivement, l'importance de mettre les bons mots.

  • Pascale Boissier

    Et peut-être qu'on peut partir du principe qu'il n'y a pas de bons mots, mais c'est vrai que le pouvoir des mots, les mots forgent nos représentations, forgent nos imaginaires, forgent ce qu'on met derrière. D'ailleurs, les communicants, on parle passé, continuent encore, ont beaucoup utilisé la transformation des mots pour aussi réagir. déformer des réalités, les rendre plus acceptables ou les rendre plus douces. Mais c'est vrai que le sens qu'on met derrière les mots... J'étais cette semaine dans une conférence d'Olivier Hamann qui ne divisait que le mot résilience qui était vraiment polysémique, qui avait plusieurs sens. C'était un mot qu'il n'aimait pas beaucoup, par exemple, parce qu'il n'avait pas le même sens dans le monde scientifique, dans le monde de l'écologie, dans le monde de la psychologie. Du coup, ça devenait un peu un mot fourni. surtout derrière lequel on mettait beaucoup de choses différentes. Et on peut dire que dans le contexte dans lequel on est, c'est un vrai enjeu de mettre du sens commun derrière les mêmes mots. En tout cas, c'est ça qui est susceptible de créer aussi... une forme de vision commune, où on parlait tout à l'heure de destin commun, de choses qui font sens pour les collectifs.

  • Bérénice d'Holomea

    J'aimerais que tu nous donnes ta définition, ta vision de la coopération. Qu'est-ce que c'est pour toi ? Qu'est-ce que ça t'évoque ?

  • Pascale Boissier

    Ouh là, ça ! C'est une très large question, mais c'est celle qui nous réunit aujourd'hui. Alors, je suis très là, Je termine la lecture du dernier ouvrage d'Éloi Laurent qui s'appelle Coopérer et se faire confiance J'ai été marquée par sa vision de la coopération qui ne réside pas dans l'intention de résultat ou forcément dans le but commun, comme pourrait l'être la collaboration. Il fait une distinction entre les deux. Il y a quelque chose qui sera à la fois mu par une dynamique d'amour et j'ai trouvé ça particulièrement... étonnant chez un économiste de nous parler d'Anne Mour et par une envie de savoir et j'aime bien cette définition finalement de la coopération qui nous sort du côté faire ensemble pour un but commun qui est la vision communément admise et que je partage aussi, mais pour sortir seulement de la logique du faire mais aussi du sens et de la manière dont on le fait Et moi, cette dynamique d'amour dans les liens de coopération, elle me parle beaucoup. Et encore une fois, venant d'un économiste, je la trouve très intéressante. Donc, je recommande la lecture de cet ouvrage.

  • Bérénice d'Holomea

    Et c'est rigolo parce que c'est vrai que tout à l'heure, je l'avais compris comme se faire confiance à soi. Et finalement, là, quand tu énonces les interactions, la dynamique d'amour et tout ça, je le comprends aussi comme se faire confiance aussi entre membres d'un collectif. Et je pense que les deux ont leur place aussi dans la coopération, parce que finalement, quand on travaille avec d'autres personnes, quand on cherche à collaborer, à coopérer, finalement, il y a toujours un moment où on a une part de responsabilité sur un sujet, plus ou moins seul. Et d'où, moi, je trouve que se faire confiance aussi à soi va impacter finalement toute la dynamique collective. Du coup, c'est rigolo ce double sens qu'on pourrait observer dans le titre.

  • Pascale Boissier

    Mais c'est intéressant que tu les pries comme ça et en même temps ils sont absolument indissociables. De toute façon, toute mécanique du soi est une mécanique en interaction avec les autres et toute mécanique d'interaction avec les autres nous renvoie aussi à nous-mêmes. C'est ce qui fait qu'on est des espèces interconnectées et on partage ça avec l'entièreté du monde vivant. Et c'est vrai que cette dynamique-là, elle est très importante, là pour le coup, dans le concret. de la coopération au sein de collectifs. Alors on l'appelle confiance en soi, on l'appelle conscience de soi, d'autres parlent de la boussole intérieure ou de toutes ces qualités qu'on peut cultiver en soi. Mais elles sont au service aussi de cette dimension, encore une fois, connectée et interagissante qu'on a avec les autres. Et donc c'est forcément les deux. Alors dans le propos des lois Laurent, je crois que c'est une problématique de société. Comment on arrive à retrouver, à reconstruire de la confiance dans une société qui a perdu cette membrane de confiance, alors si tant est qu'elle est déjà opérée dans la confiance, mais voilà, on est au cœur des sujets de coopération pour le coup.

  • Bérénice d'Holomea

    Il n'y a pas longtemps, j'écoutais un podcast de philosophie justement sur la confiance en soi, mais du coup, la personne explorait tout ce qui était la confiance, de l'étymologie du mot, etc. Et en fait, c'est vrai qu'il y a... À un moment, elle parlait du fait qu'à une époque où on vivait dans des sociétés avec nos voisins, avec des personnes qui étaient proches géographiquement, en fait, on avait peu de problèmes de confiance parce qu'on était très proches à la fois physiquement et même émotionnellement. Enfin, on était toujours avec nos voisins, avec nos familles, etc. Donc finalement, la confiance n'était pas forcément un problème parce qu'on était toujours côte à côte. Donc on pouvait toujours voir si la personne était... dignes de notre confiance. Et du coup, maintenant, c'est vrai qu'avec les éloignements géographiques, relationnels, en fait, même là, nos voisins, on ne les connaît pas forcément, ou alors on a quelques bribes d'informations, mais ce n'est pas de là à accorder une confiance aveugle. Et donc, elle reliait ça avec la confiance en soi, en disant finalement, comme on a perdu cette confiance en les autres, du coup, à l'intérieur de soi, il faut qu'on réussisse à cultiver cette confiance en soi. pour pouvoir justement après aller vers la confiance en les autres.

  • Pascale Boissier

    C'est d'autant plus intéressant que c'est quelque chose que décrit très bien Pablo Servigne dans un autre bouquin que je trouve absolument fondamental si vous ne l'avez pas encore lu je vous invite à le faire. qui s'appelle l'entraide de l'autre loi de la jungle, où justement, avec Gauthier-Chapelle, ils font la somme un petit peu des connaissances et de ce que les sciences et les sciences sociales savent de la coopération, et où la confiance et le sentiment de confiance et le cadre de sécurité dans lequel on opère pour la coopération est essentiel. Et effectivement, lui, il parle de la réciprocité directe avec les gens qu'on connaît. C'est effectivement... Plus facile de savoir à qui on a affaire, ce sur quoi on peut compter, le fait qu'on est dans ces logiques réciproques aussi, quand on fait des choses les uns pour les autres. Qu'est-ce qui se passe quand c'est avec des gens qu'on ne connaît plus ? Là, il y a d'autres mécaniques qui se mettent en place. Et puis, ce qui prend le relais au niveau global de nos sociétés, c'est la qualité de nos institutions, et c'est la qualité des règles de société qui nous régissent. Et qu'effectivement, quand elles, et je pense que c'est ce qui se passe en ce moment, quand ces conditions ne sont pas susceptibles de créer de la confiance dans les citoyens, la confiance en eux-mêmes, dans leurs propres capacités, la confiance dans le système, la confiance dans les règles du jeu avec lesquelles on joue, c'est évident que c'est très très compliqué de pouvoir faire ensemble. Et effectivement, c'est ce qui sans doute met à mal... aujourd'hui les comportements que l'on lui qualifie de pro-sociaux et notre capacité à pouvoir faire avec les autres sereinement.

  • Bérénice d'Holomea

    Et justement je trouve que du coup ça fait une bonne transition avec ton projet. Toi tu accompagnes aussi des collectifs à coopérer et notamment des collectifs à coopérer entre eux j'ai envie de dire, voilà, entre plusieurs collectifs différents. Et je pense que cette notion d'entraide et de confiance ça doit être un peu au cœur des enjeux aussi. Pour réussir à faire coopérer des entreprises peut-être concurrentes ou des collectivités avec d'autres entreprises, est-ce que tu pourrais nous raconter un petit peu comment ça se passe ? Quels sont tes enjeux ?

  • Pascale Boissier

    Alors c'est vrai que la coopération, on y travaille beaucoup au sein de l'entreprise. La question fondamentale aujourd'hui, elle est comment des entreprises peuvent coopérer entre elles pour arriver à relever des défis qu'elles ne pourront pas relever toutes seules. Et que sortir du paradigme de l'impact individuel, alors aujourd'hui on est encore beaucoup là-dessus, les entreprises travaillent pour certaines, pas toutes, à changer leurs pratiques, à réduire leur impact, mais il y a un certain nombre de choses qu'elles ne pourront pas faire seules, qu'elles devront faire parfois avec leurs concurrents, qu'elles devront faire avec d'autres entreprises dans d'autres secteurs d'activité aussi. Et un monde économique en mouvement, c'est effectivement des entreprises qui coopèrent. entre elles, et moi ça m'intéresse beaucoup de travailler là-dessus.

  • Bérénice d'Holomea

    Est-ce que tu as un exemple de sujet qu'une entreprise ne peut pas forcément réussir seule et qui peut être résolue avec d'autres parties prenantes ?

  • Pascale Boissier

    Si on prend seulement la question climatique, par exemple, nous on travaille par exemple dans l'industrie du tourisme et dans l'hôtellerie, par exemple, dont on sait dans le tourisme que 80% de l'impact... carbone, c'est le transport. C'est la manière dont on va et dont on repart des lieux touristiques, que ce soit des sites, que ce soit des hôtels. On peut bien imaginer que sur cette question des mobilités, une entreprise hôtelière ne va pas vraiment pouvoir faire toute seule pour résoudre la problématique de comment on arrive sur ces sites, par exemple. Nous, on travaille pour un réseau de thalassothérapie, par exemple, qui est situé sur des littoraux un peu excentrés. Aujourd'hui, on y arrive essentiellement en voiture. Demain, pour pouvoir y arriver par d'autres moyens, c'est évident qu'il y a de la collaboration avec les collectivités territoriales, avec les acteurs de transports locaux, avec d'autres entreprises qui peuvent être aussi concernées et qui devraient pouvoir bénéficier de tout ça. Typiquement, les mobilités sont un exemple très concret sur lequel on ne peut pas faire tout seul.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, et non seulement il y a une coopération inter... entre les collectivités, les entreprises, même les particuliers finalement qui sont consommateurs de ce service-là. Et en plus, du coup, il y a aussi une coopération interfilière. Mobilité, c'est un sujet, c'est toute une filière avec énormément d'acteurs. Et j'imagine que l'hôtellerie aussi. Et c'est des mondes qui sont totalement différents. Donc, il y a besoin peut-être aussi de personnes qui font la traduction, le lien en fait entre ces deux mondes qui ont... Des vocabulaires assez différents, j'imagine.

  • Pascale Boissier

    C'est évident que la question des interfaces, comme dans le vivant d'ailleurs, les interfaces entre des écosystèmes, ça devient vital de se dire comment on arrive déjà à se parler, comment on arrive à dialoguer, c'est un premier niveau. Comment on arrive à se comprendre, c'est déjà un autre niveau. Et puis comment on arrive à faire ensemble. Alors là, on est vraiment au cœur des gros défis de la coopération multipartie prenante auxquels sont confrontés aujourd'hui pas mal de territoires. Il y a des expérimentations un peu partout. Je pense à la Drôme notamment, un petit coucou à l'association Biovalet qui essaie justement de faire travailler des parties prenantes très différentes autour de problématiques communes. Là, on touche à des choses qui... culturellement sont très nouvelles, en tout cas dans nos sociétés actuelles. Et donc, ça implique effectivement une capacité de coopération étendue. Et là, la communication vient jouer aussi un rôle très important dans l'animation de ces écosystèmes qui travaillent ensemble. Après, l'enjeu de travailler entre entreprises aussi. Alors, ça peut être des liens liés à la proximité dans le cadre de la mobilité. forcément ça joue. On a des intérêts communs quand on est situé sur un même territoire, on a aussi des intérêts communs quand on est dans un même secteur d'activité et on a aussi des intérêts communs quand on essaie d'avancer sur tous ces sujets là. C'est le sens de notre engagement auprès d'un collectif d'entreprises, d'un mouvement d'entreprises qui s'appelle Bicorp, qui est né en fait... aux États-Unis en 2006 de la volonté à la fois de changer les pratiques du monde de l'entreprise et d'intégrer les questions environnementales et sociales dans les pratiques et les modèles des entreprises, mais aussi de changer les règles du jeu économique et la manière dont le système fonctionne, un système qui est aujourd'hui essentiellement actionnarial, puisque c'est aujourd'hui la partie prenante qui a la primauté. de passer à des logiques partenariales où l'ensemble des parties prenantes sont prises en compte dans la manière dont l'entreprise opère. Et en fait, on se rend compte que d'avoir cette volonté commune de progresser sur ces questions, d'être conscient qu'il faut dépasser l'impact individuel pour de l'impact collectif, ça crée un mouvement d'entreprises qui sont prêtes à travailler ensemble, très concrètement sur des thématiques... précises sur des problématiques sectorielles aussi qu'elles ont à relever ensemble et de sortir de la compétition pure pour aller vers des nouvelles logiques de travail en commun. Et ça, c'est très enthousiasmant.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, j'imagine. Ça doit être assez satisfaisant et enthousiasmant d'être auprès d'entreprises qui ont une volonté de s'engager. et qui ont cette volonté de faire collectif autour de sujets. Moi, du coup, j'étais pendant un petit moment au Cébios et je travaillais notamment avec le Cosmimétiques Group, qui rassemble plusieurs acteurs des cosmétiques en France, qui sont concurrents ou clients-fournisseurs. Et c'était extrêmement intéressant d'animer ce groupe-là. En plus, souvent, ils ont travaillé ensemble à certains moments de leur carrière dans les mêmes entreprises. et de les voir se retrouver et de se dire ouais là on sent que le biomimétisme ça peut avoir un impact sur des enjeux communs, des enjeux concurrentiels et non concurrentiels et du coup comment on fait, comment on montre aussi que c'est des sujets qui nous importent et qu'on a cet engagement là et que ça nous tient à coeur et qu'on le fait ensemble et c'est super intéressant de voir qu'il y a vraiment cette volonté aussi de de montrer presque l'exemple, en toute humilité, mais de montrer que c'est possible et que finalement, ce modèle-là, très structuré, filière, entreprise, etc., peut aussi fonctionner en logique partenariale et en logique au moins de réflexion commune. Après, comment ça va s'incarner dans l'entreprise, chacun aura sa manière de le faire. Mais au moins sur les grandes lignes, de réfléchir et d'être dans une cohérence, c'est extrêmement intéressant, je trouve.

  • Pascale Boissier

    C'est intéressant que ce soit le monde de la cosmétique. Je ne savais pas qu'il y avait ce type de coalition côté monde du biomimétisme. Mais par exemple, dans Bicorp, la plus grande coalition sectorielle qui existe aujourd'hui dans le mouvement, c'est la Beauty Coalition. C'est une coalition des acteurs du monde de la cosmétique et de la beauté, où il y a une soixantaine d'entreprises Bicorp. au niveau international, qui ont décidé de pouvoir réfléchir et œuvrer ensemble sur un certain nombre de sujets qui ont trait au secteur. Alors pourquoi le monde de la cosmétique et de la beauté ? Alors ils sont dépendants, ils ont beaucoup de dépendance à nos problématiques actuelles.

  • Bérénice d'Holomea

    Ils sont beaucoup dans l'innovation aussi. C'est vrai que je pense que c'est un monde où la R&D a beaucoup d'importance.

  • Pascale Boissier

    Où la R&D a beaucoup d'importance et où effectivement le... Le réflexe de pouvoir s'entrenourrir, s'entranspirer, etc. est peut-être un tout petit peu plus présent que dans d'autres secteurs d'activité très très habitués à... à fonctionner de manière beaucoup plus silotée.

  • Bérénice d'Holomea

    Et donc toi, tu travailles aux côtés de Bicorp, c'est bien ça, pour accompagner des entreprises engagées sur des sujets de coopération, c'est ça ? Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus ?

  • Pascale Boissier

    Alors, c'est plus spécifique que ça, même si on va en parler, la coopération joue un rôle important. Moi, j'accompagne depuis la création de l'association B lab France les équipes sur tous les sujets de communication. Et c'est vrai que très rapidement, les sujets de communication, ça a beaucoup à voir avec l'animation de la communauté, avec la manière de favoriser les synergies, avec la manière d'embarquer des bicorps dans des expériences communes. Et c'est vrai que depuis l'année dernière, notamment avec Louise Seguin, que je salue, et Sarah Serange, la responsable communauté de B corps, a été mise en place une initiative sur le Festival Agir pour le Vivant, qui est un festival à Arles qui se tient chaque année fin août et qui agrège un écosystème très très riche de scientifiques, de chercheurs, de penseurs, d'activistes, d'entreprises aussi, même si le monde économique est un tout petit peu moins présent, mais c'est ce qui nous a intéressés aussi. Et l'idée de se dire sur ces questions du vivant, qui aujourd'hui sont complexes à embarquer, dans le monde de l'entreprise, parce qu'il y a un concept pareil, comment on embarque une question dans le monde de l'entreprise. Ça peut être vu à l'aune 2, on va s'occuper de notre impact biodiversité, on va se former à ces questions, on va comprendre nos dépendances aux vivants, parce que maintenant on se rend compte que tout ça présente des risques aussi pour beaucoup d'activités. Mais comment, globalement, on prend de la hauteur et on fait un pas de côté sur ces questions ? en tant qu'entreprise, et on le fait avec d'autres, et on décide ensemble de pouvoir non seulement apprendre, mais pouvoir aussi partager sur ces questions, et puis essayer de se mettre en action de la manière la plus cohérente possible. Donc ça, c'est un exemple concret de comment, progressivement, on pose les petites graines d'actions collectives, de coalitions sur un certain nombre de sujets. Et pour nous, ça passe par ces moments où on peut se retrouver, encore une fois, apprendre ensemble. Et là, je rejoins la logique d'Eloi Laurent qui dit que finalement, la coopération, l'intention est de savoir. Je trouve qu'il y a quelque chose de très fort là-dedans. Mais on est aussi dans un moment où il faut faire. Alors, il y a l'injonction à faire, on peut la questionner, mais il y a quand même des choses qu'on doit mettre en place et faire. Et les entreprises ont cette forte capacité à faire. C'est peut-être même l'un des acteurs de la société qui est peut-être l'un des mieux armés pour pouvoir faire, apporter des solutions et proposer des choses concrètes qui nous permettent de changer de mode de vie, de pratiques, etc. Donc voilà, mettre tous ces acteurs autour de la table. L'année dernière, on était une douzaine d'entreprises qui se sont mobilisées. Et cette année, on le fait sur un format plus apprenant, autour d'une idée de B-Université. Encore une fois, apprendre ensemble, co-apprendre, ça fait partie des clés pour pouvoir coopérer. Et on réitère l'expérience cette année, fin août à Arles.

  • Bérénice d'Holomea

    Et du coup, en quoi ça consiste la B-Université ?

  • Pascale Boissier

    Alors la B-Université, c'est trois choses. La première, c'est aller aussi s'ouvrir un peu les chakras. le cœur, l'esprit, auprès de gens qui réfléchissent à ces questions, qui expérimentent, qui ont d'autres visions du monde et d'autres points de vue. Parce que le monde économique, parfois, on peut manquer de diversité et de pluralisme dans les points de vue. Donc ça, c'est un point important. Le deuxième, c'est de pouvoir approfondir, au contact d'experts, un certain nombre de sujets. Cette année... On aimerait aller plus loin sur les questions d'écologie du travail. Ça fait partie aussi des thématiques autour du vivant. La dimension sociale est importante. Ou d'un grand mot du moment, qui est celui de la régénération, par exemple. Comment on peut approfondir ces questions ? Et puis, enfin, comment on arrive à faire alliance ? Donc, ce sera l'occasion pour des bicorps d'être déjà entre bicorps, mais aussi d'aller rencontrer... des gens qui œuvrent dans d'autres pays, notamment cette année, des rencontres avec nos homologues d'Amérique latine, puisque la Colombie est très présente à Agir pour le vivant, ils ont une édition à Medellín. Donc de rencontrer à la fois des acteurs qui œuvrent dans ce sens ailleurs dans le monde et aussi sur le territoire, puisque sur le pays d'Arles, il se passe aussi beaucoup de choses. Donc de faire cette connexion entre le local, le territorial et l'international. Donc c'est un programme... qui promet de nous faire vivre plein de choses géniales. On a hâte.

  • Bérénice d'Holomea

    C'est génial d'avoir à la fois le côté très local et en même temps ce côté presque inspiration de comment ça se fait ailleurs. Et finalement, je pense que le but, ce n'est pas de faire la même chose, mais c'est de se dire qu'est-ce qu'on peut ramener, quelles sont nos contraintes communes, là cet enjeu, comment ils ont répondu. Et du coup, ce métissage finalement de solutions, c'est ça qui crée la richesse et la pertinence d'une solution, j'ai l'impression.

  • Pascale Boissier

    En tout cas, créer des liens, créer des ponts, croiser des regards, des expériences, alors on le sait, c'est fondamental. Après, il faut prendre le temps pour le faire. Et ça, encore une fois, je reviens aux spécificités du monde économique, c'est parfois compliqué de pouvoir mettre le nez dehors, de pouvoir prendre du temps pour faire tout ça. On n'est pas dans des systèmes qui permettent de le faire. On est souvent dans des entreprises, en ce moment particulièrement dans un contexte un peu tendu sur le plan économique, social et géopolitique, où prendre ce temps du recul, de la reliance avec d'autres, de l'inspiration, d'aller voir autre chose, voire même de se mettre en jachère à certains moments. pour laisser émerger des choses, parce que malgré tout, d'être tout le temps dans le faire peut parfois nous couper d'un certain nombre de choses qui pourraient émerger si on leur laissait seulement le temps de venir, de pousser. Voilà, c'est vrai qu'on est dans des mondes, et notamment dans le monde des transitions aujourd'hui, de l'impact, ça prend des noms variés. dans quand même la volonté d'action, d'être très agissant et d'obtenir des résultats. Mais d'être agissant tout le temps, ça ne nous aide pas toujours. Donc de prendre le temps aussi de ne pas faire, pour nous c'est aussi une voie. Et c'est celle-là qu'on a envie aussi de faire expérimenter à des entreprises et des collaborateurs qui n'ont pas forcément l'habitude de le faire.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, de le laisser venir. C'est un sujet, ça. C'est pas facile.

  • Pascale Boissier

    Laisser venir et advenir, je pense que c'est un des trucs les plus difficiles qu'on ait à faire, à la fois individuellement, parce que je pense qu'on est tous concernés par cette difficulté aussi à faire confiance. On appelle ça faire confiance à la vie, faire confiance au destin. Chacun y mettra ce qu'il veut. Mais de laisser advenir et de se dire que... Alors, il y a des traditions où c'est très présent. notamment orientale, où le non-agir est une forme d'action. Mais elle vient nous confronter beaucoup culturellement, intellectuellement et même émotionnellement dans nos cultures à nous. Clairement, le non-agir ne fait pas vraiment partie de notre logiciel. Et pourtant, qu'est-ce qu'il peut être intéressant d'explorer ? Évidemment, rien ne s'exclut. Il ne s'agit pas d'arrêter d'agir, mais de se dire...... être toujours dans l'action, c'est toujours la clé, surtout face à ce qui nous attend.

  • Bérénice d'Holomea

    Surtout que je trouve que ça peut créer un sentiment de culpabilité aussi. Finalement, il y a des fois où on produit, puis juste après, on est un peu fatigué, on a moins d'idées, on sent qu'on a besoin de souffler. On peut se sentir finalement mal à l'aise et se dire mais je ne fais rien en ce moment, je ne suis pas productive, je ne suis pas productive Et ça peut créer de la peur, de l'angoisse. L'envie de combler, de se rajouter d'autres choses. Parce que d'être un peu plus lent, un peu plus détendu, un peu plus improductif, ça fait peur. On a peur de ne pas réussir à se remettre. Je ne sais pas de quoi on a peur, mais ça peut faire peur.

  • Pascale Boissier

    C'est intéressant de demander de quoi on a peur. Mais c'est vrai qu'on est dans nos sociétés dans une injonction absolument défastatrice à cet endroit-là. Oui, on est dans des cultures de la productivité, on est dans des cultures de la performance de manière générale. On parlait du monde économique, mais cette performance s'étend à tous les domaines. Même le développement personnel est devenu performatif d'une certaine manière. Même des pratiques qui ne nécessitent aucun résultat, je pense au yoga par exemple, c'est devenu aussi des résultats à atteindre et des niveaux à dépasser, etc. et qu'effectivement, cette peur de loisiveté dans nos sociétés, de la paresse, je ne vais pas refaire toute la liste de ce que pas mal de philosophes et d'auteurs d'ailleurs ont exploré. La question aujourd'hui, c'est comment, dans nos manières de faire, sur des sujets de transition, sur des sujets aussi complexes, sur la coopération, on arrive petit à petit à déconstruire ces logiques-là pour entrer dans autre chose. Alors, je te l'ai dit, j'étais avec eux, j'assistais à la conférence d'Olivier Hamand sur, justement, l'antidote occulte de la performance, qui était absolument ébouriffante, parce que d'un coup, de valoriser la sous-optimalité, de valoriser la lenteur, de valoriser l'incohérence, de valoriser l'inachevé, toutes ces notions qui sont tellement antinomiques avec notre mode. culturelle actuelle, d'un coup, il y a quelque chose qui vient à la fois nous bousculer et à la fois nous faire du bien. Je crois qu'on a tous cette aspiration à pouvoir articuler, équilibrer davantage les choses, y compris dans nos milieux de la transition et de l'engagement, même si je n'aime pas beaucoup ce mot. Parce qu'on le voit aujourd'hui, il peut y avoir beaucoup d'épuisement, il y a des burn-out, il y a des gens qui, dans cette recherche, encore une fois, qui est toujours dans le logiciel de la productivité, de la performance, il peut tout à fait s'appliquer à nos sujets de transition écologique et sociale. Et c'est ça aujourd'hui qu'on doit questionner. Mais ce n'est pas facile, effectivement.

  • Bérénice d'Holomea

    Je suis totalement d'accord. En plus, on parlait tout à l'heure d'innovation. Il y a un côté aussi où on essaye de sortir du cadre. d'emmener vers autre chose et où en fait des personnes qui auraient besoin de se faire convaincre demandent des résultats. Et donc c'est pas forcément possible. D'où cet épuisement aussi parce qu'on essaye de tirer vers quelque chose où peut-être il n'y en a pas encore des résultats ou qui ne sont pas encore vraiment observables, qui ne sont pas suffisants sur une ancienne logique, qui ne peuvent pas être observés avec les mêmes indicateurs. Et ça peut provoquer beaucoup de frustration et de colère je pense aussi. de se retrouver dans ces situations-là. Et puis, moi, ce que j'ai observé aussi, c'est que parfois, il y a un côté un peu sacrificiel. Comme je travaille pour la bonne cause, je fais des heures sans les compter. Peut-être que dans mon équipe, ça se passe mal, mais ce n'est pas grave parce qu'on travaille pour la bonne cause. Donc, il faut continuer. Et c'est tellement dommage. Et moi, ça me parle aussi de la coopération comme logique d'amour, parce que... Moi, je crois profondément que si on aime ce qu'on fait et qu'on est heureux dans ce qu'on fait, alors on va forcément produire des choses qui sont dans le sens d'une transition et d'un avenir qu'on a envie de faire advenir. Et oui, c'est vrai que ce côté sacrificiel, ça empêche finalement même, j'ai l'impression, de potentiels résultats peut-être d'avoir lieu, puisqu'il y a ce désengagement, il y a cette colère, il y a cette fatigue qui sont présentes et qui... qui en fait épuisent des personnes qui auraient l'envie profonde de s'investir.

  • Pascale Boissier

    Et je crois que tu as raison de le souligner, parce que je pense que l'intérêt général et nos problématiques n'excluent pas au contraire des problématiques d'exploitation, des problématiques de violence dans les relations et dans les rapports. Ma conviction, c'est que parce qu'on est toujours dans ce logiciel du résultat, donc le résultat... résultat qu'il y ait, que ce soit de changer le monde ou que ce soit de le conserver tel qu'il est, la mécanique elle est la même. Si en tout cas il n'y a pas d'attention portée à la manière dont on le fait, alors beaucoup de gens évoquent les questions d'écologie de la relation, d'écologie humaine etc. Moi c'est fondamental et d'ailleurs je fais partie des gens qui pensent que l'intention première c'est d'abord la qualité. des relations, des connexions et de la manière dont tu fais les choses. Parce que je fais partie des gens qui pensent que c'est à cette condition-là qu'on pourra aller vers le monde qu'on appelle de nos vœux, mais sans soin et sans attention portée à tout ça. Je crois qu'on n'a pas vraiment renversé la table dans la manière de faire. Et on reproduit, je crois que c'est ce que... peut faire parfois le monde de l'impact. Déjà, rien que ce mot, impact, Il peut être jugé positivement, justement, quand on parle d'impact positif. Mais pour moi, on n'est pas vraiment sortis du vieux logiciel économique de la performance. Donc, on peut faire de l'impact tout en étant violent dans les relations sociales. C'était Pierre Rabhi qui disait on peut manger bio, exploiter son prochain On peut décarboner en exploitant son prochain, on peut être des boîtes à impact tout en exploitant, on va dire, les personnes qui justement se donnent sans compter pour ces sujets-là. Pour l'anecdote, moi, la première fois que j'ai pris conscience de ça, c'est en discutant avec une personne d'un syndicat, d'un vieux syndicat, dont on se dit aujourd'hui, ils sont complètement... à la rue, etc., mais qui me racontait comment, au moment du Covid, des bonnes volontés avaient été récupérées sous forme d'exploitation pure et simple. Par exemple, des femmes qui faisaient des masques en tissu, qui au début le faisaient pour contribuer à la solidarité, à l'entraide qui s'est mise en place à ce moment-là. Mais très vite, c'est devenu des obligations, des heures à faire, des attentes sur le nombre de masques qu'il fallait faire. Et très vite, un système informel d'entraide est devenu un système d'exploitation de bénévoles qui fabriquaient à la chaîne ces masques en tissu, dont en plus, après, on s'est rendu compte qu'ils n'allaient pas forcément être utiles. Et donc, ces logiques d'exploitation, de violence sociale, ils ne sont malheureusement pas incompatibles avec la recherche d'un impact environnemental positif. Et c'est ça qu'il va falloir arriver à réconcilier aujourd'hui.

  • Bérénice d'Holomea

    Et donc justement, tu parles de soins, d'attention portée, de qualité de relation. Comment est-ce que tu crées ce cadre ou ce climat quand tu as justement des acteurs qui ne se connaissent pas ? qui ne travaillent pas du tout dans les mêmes domaines, et qui, peut-être même eux, en interne, n'ont peut-être pas forcément les réflexes de coopération. Comment est-ce que tu arrives à créer ce climat d'attention et de soins dans les relations ?

  • Pascale Boissier

    Je crois qu'il y a deux choses. La première, c'est le cadre de... Mais là, on revient à des fondamentaux sur la coopération. C'est le cadre de protection et de sécurité que tu mets en place. au sein duquel les échanges, les dialogues ou le travail ensemble peut se faire. S'il n'y a pas de cadre clair, s'il n'y a pas de confiance dans les personnes qui posent le cadre, c'est vrai que c'est très compliqué de pouvoir opérer. Ensuite, dans la qualité des relations qui peuvent se mettre en place, là, il faut faire avec là où en sont les gens. Et assumer aussi qu'il puisse y avoir... des émotions qu'on juge parfois négativement. Je pense que déjà, si on pouvait un peu moins connoter et juger nos émotions ou réactions socialement pas acceptées, on ferait peut-être un grand pas. Donc accepter la colère, accepter le conflit, accepter le désaccord, accepter parfois aussi qu'il y ait de la violence dans la manière d'exprimer les choses. Mais en revanche, de pouvoir petit à petit favoriser des modes de fonctionnement. Alors, comment on fait concrètement ? Alors, il y a déjà comment on incarne nous-mêmes les choses. Moi, je pense que ça commence par nous, évidemment. Tu parlais de confiance en soi. Je pense que c'est aussi notre capacité à nous déconstruire notre mode de relation, nos modes de communication. Et dans des groupes, dans des collectifs, d'arriver à pouvoir à la fois incarner ça du mieux qu'on peut, et c'est pas facile, et accepter aussi que ça marche pas toujours de manière apaisée, et que ça, on doit aussi faire avec. Et parfois, dans le non-apaisement, il y a aussi des choses utiles à prendre et qui peuvent nous aider à avancer. Je crois pas dans les collectifs... pacifié à 100%, je ne suis pas sûre. En revanche, dans une dynamique qui cherche à prendre soin des autres, je pense qu'on peut y arriver. C'est même essentiel, les conflits sont toujours le signe de besoins qui ne sont pas nourris. Et du coup, de comprendre ce qui n'est pas nourri, c'est déjà la première clé pour se dire comment on arrive à nourrir davantage. Alors, il y a ce qui est de notre responsabilité personnelle, dans notre capacité aussi à... à avoir conscience de nos besoins, notamment en interaction avec les autres, à savoir ce dont on a besoin, à savoir aussi comment en prendre soin, enfin prendre soin de soi, ça passe par là. Mais ce faisant, on le fait aussi pour les autres. Et un conflit est toujours l'expression de besoins, ça c'est très CNV, mais de besoins qui ne sont pas compris ou qui ne sont pas reconnus. Et oui, ça peut être très utile à un moment donné pour... pour pouvoir exprimer, dénouer des choses. On souhaiterait que ça ne passe pas forcément par le conflit pour arriver à se parler, à se comprendre. Mais parfois, c'est comme ça. Et on fait avec ce qui est vivant là. Et on l'accompagne au mieux. Parfois, ça marche. Parfois, ça ne marche pas. Mais c'est ça qui fait aussi l'intérêt de ces jeux collectifs. C'est qu'on apprend tout le temps sur soi et sur les autres. Après, il faut avoir envie. Et ça, pour le coup, qu'est-ce qui fait que l'envie est là ? Je ne suis pas persuadée qu'on donne envie. Je crois qu'il y a ce mythe aussi où on pourrait donner envie. Je pense que les flammes s'allument en chacun de manière très intime. C'est quelque chose qui relève vraiment de... très personnelles au fond, même si ça peut être stimulé par plein d'autres choses, mais je pense que ça vient vraiment de soi. De la même manière, pour des collectifs, pour moi, c'est jamais exogène. Il y a toujours quelque chose qui vient du corps collectif, quel qu'il soit, et puis il y a des moments où ça vient, et des moments où ça prend plus de temps pour l'accepter.

  • Bérénice d'Holomea

    Moi, je crois aussi beaucoup que ça vient par étapes. Des fois, ça vient, puis peut-être que ça repart. mais ça a nourri quelque chose. Et du coup, la fois d'après, et moi, là c'est plus un témoignage personnel, mais il y a des questions sur lesquelles j'ai beaucoup évolué, et ça m'a pris des années. Moi je ne crois pas au basculement du jour au lendemain. Je crois à des petits événements, des expériences, des vécus, des rencontres, des témoignages, des signes, peut-être qu'on a vu quelque part, un mot, une image, quelque chose. Et qui vont provoquer ce basculement ? Et moi, je trouve que regarder que ce basculement, c'est finalement exclure tout le chemin qui a été parcouru avant.

  • Pascale Boissier

    Je rejoins complètement. Moi, je pense que tout ce tissage de choses, alors on n'a pas toujours le recul pour se rendre compte de ce qui est en train de se passer, mais c'est là où la notion de confiance revient. Moi, je suis quelqu'un qui a... Après, j'ai eu beaucoup de chances dans ma vie. pour pouvoir avoir cette confiance dans la vie. Mais la confiance, les choses se tissent, tu ne les comprends pas forcément, tu ne vois pas forcément où ça va. Mais à un moment donné, il y a quelque chose, un déclic, une bascule. Je suis comme toi, mais je ne crois pas aux grandes bascules. C'est forcément l'alliance de plein de dynamiques et de plein de choses qui, à un moment donné, pouf, s'éclairent, du sens où nous font passer à l'action sur quelque chose. Et au fond, c'est très beau et réconfortant de se dire qu'on n'a pas besoin comme ça de grandes épiphanies dans nos vies. D'ailleurs, merci de me le rappeler là, parce que je crois qu'on est tous dans des moments où on a besoin que des choses se passent. Et on ne les voit pas forcément arriver, mais c'est de faire confiance à des process invisibles dans lesquels on est partie prenante avec d'autres. Et de se dire que le sens de tout ça se révélera. petit à petit ou pas complètement. J'aime bien cette part de mystère aussi dans ce qui se joue. Mais c'est important de se le rappeler.

  • Bérénice d'Holomea

    Moi, ça me rassure beaucoup de me dire que des fois, on est un peu dans l'attente. On se dit en ce moment, il ne se passe pas grand-chose. Et moi, souvent, je me dis si, mais c'est juste que tu ne le sais pas encore. Et j'aime bien me dire ça. Ça me rassure. Je me dis, mais si, mais dans un an, deux ans, trois ans, je regarderai ce moment et je me dirai c'est là, en fait, qu'il s'est dépassé des choses et que ça... Ça a nourri l'action ou la chose que j'attendais. Et je pense que ça s'applique dans le monde personnel, professionnel. On ne sait pas quand les choses vont se dénouer. Et voilà, on rejoint encore cette innovation et cette inconnue et cette confiance. Ça a un côté angoissant, mais finalement, assez chouette aussi, assez rassurante de se dire que tout peut encore arriver.

  • Pascale Boissier

    Je pense que cette... peur ou ses angoisses ou ses appréhensions, c'est des moteurs aussi. Je crois que tout concourt à un moment donné tout à sa place et à son rôle. Alors on n'a pas envie de se laisser submerger par l'angoisse, même si parfois ça peut arriver. Mais en même temps, dans la conscience que quelque chose se lit, se relie, qu'on n'est pas forcément à la bonne échelle pour voir ce qui se passe, qu'on n'a pas forcément le recul. Ça vaut pour nos vies, comme tu disais, peut-être dans trois ans, on se dira, tiens, en fait, c'était ce moment-là. Mais ça vaut aussi pour nos sociétés. Et dans 20 ans, on se dira, mais si, mais là, cette année hyper relou 2024, il y avait déjà ça qui était à l'œuvre et il y a ça qui était en train de... de monter. Ça nous aide à aussi apparaisser trop le nez dans le court terme qui peut être effectivement un peu effrayant pour essayer de voir un peu plus large. Ce que disait Olivier Hamann, ça fait du bien d'entendre ça, c'est que lui il parle des marges et il prend l'exemple des murmurations, tu sais ces danses des oiseaux qui évoluent dans le ciel en groupe de manière totalement fluide coordonnée. Et en fait, il expliquait que c'est les oiseaux qui sont aux marges, qui sont sur les bordures, qui font passer, qui gèrent en fait l'information qui circule dans le groupe. Ce n'est pas le cœur du système. Et pour lui, les marges ont déjà basculé. Alors quand on est au cœur du système, on ne voit pas forcément que les marges ont basculé. Quand on est à la marge, on se dit mais le cœur du système, il est toujours comme avant. Donc où qu'on soit, on a peut-être... pas exactement la meilleure vue sur ce qui se passe, donc seul le temps nous le dira.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, je suis tout à fait d'accord. Merci beaucoup pour cet échange, pour ce partage.

  • Pascale Boissier

    Merci à toi Bérénice. Indépendamment de ce qu'on arrivera ou pas à réaliser tous ensemble, la qualité de ces moments et de ces conversations elle est essentielle, donc merci beaucoup pour cette invitation.

  • Bérénice d'Holomea

    La définition de Pascal concernant la coopération, le vient de sa lecture de l'ouvrage Coopérer et se faire confiance écrit par Éloi Laurent. Pour Pascal, la coopération ne réside pas seulement dans l'action vers un but commun, mais elle serait plutôt mue par une dynamique d'amour et par une envie de savoir plutôt que de faire. Donc coopérer n'est pas seulement faire ensemble, mais c'est aussi s'accorder sur le sens et la manière dont on le fait. Un des ingrédients qui est essentiel à la coopération qu'on a identifié dans la discussion avec Pascal, c'est la confiance. à la fois la confiance en soi et aussi la confiance dans le groupe, dans le collectif. Et en fait, le cadre de sécurité qu'on va instaurer et le climat de confiance qui va être présent dans le collectif, ce sont deux choses qui sont absolument essentielles à cette coopération. Et on sait qu'il est plus facile de faire confiance lorsqu'on connaît une personne, une situation. Et donc, dans le cas des accompagnements de Pascal, qui sont en général des coopérations multiparties prenantes entre plusieurs organisations de types différents, et aussi parfois qui travaillent dans des secteurs d'activité distincts. Donc là, la question, c'est finalement, comme ces interlocuteurs finalement ne se connaissent pas, n'ont pas connaissance des enjeux de chacun, comment on crée ce climat de confiance ? Comment faire pour que ces organisations, elles arrivent déjà à dialoguer, parce que parfois le vocabulaire peut être différent, mais aussi à se comprendre et à faire ensemble, à agir ensemble autour d'enjeux communs ? Pascal, dans ces activités d'accompagnement, Elle travaille justement sur ces enjeux de coopération entre plusieurs organisations. Et elle le fait aussi de par son engagement auprès de B corp et de B lab France. Et donc, Pascal est notamment impliqué dans l'association Bilab France au niveau de la communication, qui est liée aussi avec l'animation de communautés, qui sont en fait des entreprises qui sont engagées dans la démarche B corp et qui n'ont pas forcément les mêmes secteurs d'activité, les mêmes enjeux. Et donc, c'est pour ça aussi, dans ce cadre-là, Pascal est aussi... facilitatrice de synergie, de liens et de coopération dans des organisations diverses. Et ça, en fait, ça peut passer par différents moyens. Et un des moyens de faire cette animation-là, c'est justement d'organiser des événements. Comme par exemple, elle nous parle du festival Agir pour le Vivant qui a lieu la dernière semaine d'août à Arles. Et donc, ce festival, c'est vraiment une opportunité pour les entreprises de créer une dynamique collective. coalition aussi, à la fois d'entreprises et aussi de personnes qui ont envie de s'investir sur le sujet. Ce genre d'événement et ce genre de rassemblement, c'est vraiment une occasion pour sortir aussi de cette culture très agissante qui est très présente dans notre société et qui est aussi présente dans les engagements on va dire de transition. Il y a toujours un enjeu à faire, à montrer, à avoir des résultats et en fait on se laisse prendre finalement dans cette culture-là qu'on essaye justement de changer. Et donc, participer à des événements comme ça, où en fait, le but c'est vraiment d'aller créer du lien, d'aller s'inspirer, d'aller voir ce qui se fait ailleurs, d'exprimer peut-être sa créativité. C'est un moyen de laisser venir, de laisser advenir, de laisser émerger et de pas tout le temps être dans le faire, mais justement être dans cette dynamique d'amour dont parlait Pascal au début pour aller créer des liens et finalement prendre ce temps-là aussi pour poser un petit peu ses réflexions et ses actions. Donc justement voilà, ce modèle de productivité et de performance qu'on essaye de déconstruire parfois quand on s'engage dans des entreprises à mission, dans... des associations, dans des organisations, dans le sens de la transition écologique et sociale. On essaye vraiment de sortir de ce modèle-là qui a des externalités extrêmement négatives, mais en fait, on remarque que ce modèle-là, il s'applique toujours. Et c'est intéressant de comprendre pourquoi, parce qu'en fait, on essaye de changer quelque chose et finalement, ça devient quelque chose qui est appliqué à nous-mêmes. Et ça, c'est aussi lié à la manière dont on s'organise, parce que si on ne change pas nos fonctionnements collectifs, en fait, on va répéter les anciens schémas Et on va produire exactement les mêmes externalités du stress, de l'épuisement, du désengagement, de la colère. C'est en allant créer des nouvelles interactions avec de l'attention, avec du soin qui est porté aux membres d'un collectif et aussi au collectif en lui-même, avec ce climat de confiance qu'on va pouvoir créer dans les collectifs. Et ça, ça va pouvoir permettre de générer un fonctionnement différent. Et ce fonctionnement différent va pouvoir soutenir une production qui est différente et qui est en lien avec la transition écologique et sociale. Ça, c'est une loi qui s'appelle la loi de Conway qui dit que ce qu'on produit ressemble à la manière dont on est organisé. Et donc forcément, si on essaye de produire autre chose, si on essaye de produire de nouveaux produits, de nouveaux fonctionnements, de nouveaux services en lien avec la transition, eh bien, on a besoin de modifier nos modes de fonctionnement aussi. Retrouvez les épisodes de l'affluence une fois par mois. Il forme un recueil de témoignages, de vécus liés aux transformations des pratiques qui vous permettra d'avoir des clés pour faire évoluer à votre échelle votre environnement professionnel. Pour ne rater aucun épisode et pour faire grandir ce podcast, vous pouvez en parler autour de vous, vous abonner sur votre plateforme d'écoute préférée et nous laisser des étoiles si vous nous écoutez depuis Spotify ou Apple Podcast. Merci pour votre écoute et à bientôt pour un nouvel épisode de la Fluence. Sous-titrage Société Radio-

Share

Embed

You may also like

Description

La Fluence, le podcast qui explore la coopération 🔎


Aujourd’hui, nous explorons la vision de Pascale Boissier sur la coopération, notamment lorsqu’elle se met en place entre les organisations. Les entreprises, les collectivités, les associations et autres collectifs ont tout intérêt à se faire confiance pour relever les défis de la transition écologique et sociale. 


Influencée par la lecture de l’ouvrage "Coopérer et se faire confiance" d'Eloi Laurent, Pascale considère que la coopération va au-delà de l'action collective vers un objectif commun. Elle serait mue par une dynamique d'amour, de confiance et d’une envie de savoir plutôt que de faire. 

Elle souligne l'importance de la confiance, tant en soi qu'au sein d'un groupe. Son défi en tant que co-fondatrice de Silbo est de créer cette confiance entre plusieurs organisations. 

Également impliquée avec B corp et B Lab France, Pascale travaille pour soutenir la communication, animer la communauté d’entreprises engagées et faciliter les synergies. Elle participe à des initiatives comme le festival "Agir pour le vivant", visant à créer une dynamique collective en faveur de la transition écologique et sociale. 

Cette conversation se poursuit sur des enjeux plus philosophiques : comment se détacher des injonctions à faire et à produire, comment laisser venir et advenir, avoir confiance, repérer les signaux faibles… 


En savoir plus sur Silbo : https://silbo.fr/

En savoir plus sur B Corp : https://www.bcorporation.net/en-us/

En savoir plus sur B Lab France : https://bcorporation.fr/le-mouvement/b-lab-france/


Coopérer et se faire confiance, Eloi Laurent : https://www.ruedelechiquier.net/essais/486-cooperer-et-se-faire-confiance.html

Conférence : La robustesse du vivant comme antidote au culte de la performance - Olivier Hamant : https://www.youtube.com/watch?v=DvU4jKnzT1I


Musiques par Vito Bendinelli : https://www.instagram.com/vito.bendinelli/


Pour retrouver les prochains épisodes : 

Instagram : https://www.instagram.com/holomea.insta/

Linked In : https://www.linkedin.com/company/holomea/

Site Holomea : https://holomea.com/


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Bérénice d'Holomea

    Bonjour à toutes et à tous, je m'appelle Bérénice, je travaille chez Holomea et je suis passionnée par la bio-inspiration et la manière dont fonctionnent les humains entre eux. Bienvenue sur La Fluence, le podcast qui explore la coopération. Aujourd'hui je suis avec Pascale Boissier, cofondatrice de Silbo, une société à mission dédiée à l'accompagnement aux transitions. Elle est aussi activement engagée auprès de l'association B Lab France pour développer l'écosystème B corp en France. Je la retrouve à Montmartre et nous entamons la discussion tout en contemplant les toits parisiens. Bonjour Pascale.

  • Pascale Boissier

    Bonjour Bérénice.

  • Bérénice d'Holomea

    Bienvenue dans la Fluence, le podcast qui explore la coopération. Est-ce que tu veux bien te présenter en quelques mots ?

  • Pascale Boissier

    En quelques mots, alors je suis Pascale Boissier, je suis franco-chilienne avec des attaches importantes dans les Cévennes. Ça me détermine beaucoup et aujourd'hui mon activité principale c'est d'accompagner des organisations, des entreprises, des collectivités, des associations sur le chemin exigeant des transitions. Et je fais ça depuis environ huit ans au sein d'un cabinet qui s'appelle Silbo, avec mon associé Sylvain Page et toute une série de camarades aussi avec lesquels on travaille sur tous ces sujets.

  • Bérénice d'Holomea

    Donc dans ce cabinet Silbo, vous accompagnez les collectifs à se transformer, à aller dans le sens de la transition. C'était surtout par le biais de la communication, c'est ça ? Ou il y a d'autres choses que vous mettez en place pour accompagner les collectifs ?

  • Pascale Boissier

    C'est vrai que mon métier depuis 25 ans maintenant, c'est la communication. C'est là où je suis née, c'est là où j'ai grandi. Et en même temps, il y a environ une quinzaine d'années, la conscience que la communication pouvait avoir un rôle important dans les transformations que connaît notre société, que connaît l'économie, à la fois dans les prises de conscience, à la fois dans le fait d'embarquer des individus et des collectifs, d'animer des écosystèmes autour des projets. Donc effectivement, moi je suis partie, et mon associé Sylvain aussi, de ce monde-là, pour depuis quelques années, être venue explorer les chemins plus dans le dur, on va dire, du conseil sur tous ces sujets-là, de l'accompagnement humain sur toutes ces questions-là, et de l'accompagnement à la mise en action aussi, au-delà de la mobilisation des individus et des collectifs à travers la communication. C'est vrai que quand on dit communication, les gens... Alors déjà, la communication n'a pas toujours bonne réputation. Quand on, avec les expressions, c'est de la com ou c'est juste de la com, on peut comprendre aussi pourquoi on a cette vision-là de la communication. Mais comme on le dit souvent, nous, la com, ce n'est pas juste faire des petits dépliants ou des jolis sites web pour raconter des choses bien polissées. C'est bien plus profond que ça. Moi, je viens d'une famille d'enseignants. C'est vrai que pour moi, la communication a beaucoup à voir avec l'éducation et la pédagogie. Et c'est ça qu'on essaye effectivement de développer.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, même une forme de vulgarisation aussi, de s'adapter finalement à l'audience, trouver les bons mots, le bon vocabulaire. Et je trouve que ce n'est même pas facile aussi de retransmettre, réellement de mettre des mots sur des choses qu'on peut mettre en pratique dans des collectifs, dans des organisations. Parce que des fois, on a l'impression que finalement, il y a peut-être... plusieurs autres collectifs qui pourraient utiliser les mêmes mots que nous, alors qu'en fait, ça veut dire peut-être des choses totalement différentes et des actions qui ne se ressemblent pas forcément. Donc, effectivement, l'importance de mettre les bons mots.

  • Pascale Boissier

    Et peut-être qu'on peut partir du principe qu'il n'y a pas de bons mots, mais c'est vrai que le pouvoir des mots, les mots forgent nos représentations, forgent nos imaginaires, forgent ce qu'on met derrière. D'ailleurs, les communicants, on parle passé, continuent encore, ont beaucoup utilisé la transformation des mots pour aussi réagir. déformer des réalités, les rendre plus acceptables ou les rendre plus douces. Mais c'est vrai que le sens qu'on met derrière les mots... J'étais cette semaine dans une conférence d'Olivier Hamann qui ne divisait que le mot résilience qui était vraiment polysémique, qui avait plusieurs sens. C'était un mot qu'il n'aimait pas beaucoup, par exemple, parce qu'il n'avait pas le même sens dans le monde scientifique, dans le monde de l'écologie, dans le monde de la psychologie. Du coup, ça devenait un peu un mot fourni. surtout derrière lequel on mettait beaucoup de choses différentes. Et on peut dire que dans le contexte dans lequel on est, c'est un vrai enjeu de mettre du sens commun derrière les mêmes mots. En tout cas, c'est ça qui est susceptible de créer aussi... une forme de vision commune, où on parlait tout à l'heure de destin commun, de choses qui font sens pour les collectifs.

  • Bérénice d'Holomea

    J'aimerais que tu nous donnes ta définition, ta vision de la coopération. Qu'est-ce que c'est pour toi ? Qu'est-ce que ça t'évoque ?

  • Pascale Boissier

    Ouh là, ça ! C'est une très large question, mais c'est celle qui nous réunit aujourd'hui. Alors, je suis très là, Je termine la lecture du dernier ouvrage d'Éloi Laurent qui s'appelle Coopérer et se faire confiance J'ai été marquée par sa vision de la coopération qui ne réside pas dans l'intention de résultat ou forcément dans le but commun, comme pourrait l'être la collaboration. Il fait une distinction entre les deux. Il y a quelque chose qui sera à la fois mu par une dynamique d'amour et j'ai trouvé ça particulièrement... étonnant chez un économiste de nous parler d'Anne Mour et par une envie de savoir et j'aime bien cette définition finalement de la coopération qui nous sort du côté faire ensemble pour un but commun qui est la vision communément admise et que je partage aussi, mais pour sortir seulement de la logique du faire mais aussi du sens et de la manière dont on le fait Et moi, cette dynamique d'amour dans les liens de coopération, elle me parle beaucoup. Et encore une fois, venant d'un économiste, je la trouve très intéressante. Donc, je recommande la lecture de cet ouvrage.

  • Bérénice d'Holomea

    Et c'est rigolo parce que c'est vrai que tout à l'heure, je l'avais compris comme se faire confiance à soi. Et finalement, là, quand tu énonces les interactions, la dynamique d'amour et tout ça, je le comprends aussi comme se faire confiance aussi entre membres d'un collectif. Et je pense que les deux ont leur place aussi dans la coopération, parce que finalement, quand on travaille avec d'autres personnes, quand on cherche à collaborer, à coopérer, finalement, il y a toujours un moment où on a une part de responsabilité sur un sujet, plus ou moins seul. Et d'où, moi, je trouve que se faire confiance aussi à soi va impacter finalement toute la dynamique collective. Du coup, c'est rigolo ce double sens qu'on pourrait observer dans le titre.

  • Pascale Boissier

    Mais c'est intéressant que tu les pries comme ça et en même temps ils sont absolument indissociables. De toute façon, toute mécanique du soi est une mécanique en interaction avec les autres et toute mécanique d'interaction avec les autres nous renvoie aussi à nous-mêmes. C'est ce qui fait qu'on est des espèces interconnectées et on partage ça avec l'entièreté du monde vivant. Et c'est vrai que cette dynamique-là, elle est très importante, là pour le coup, dans le concret. de la coopération au sein de collectifs. Alors on l'appelle confiance en soi, on l'appelle conscience de soi, d'autres parlent de la boussole intérieure ou de toutes ces qualités qu'on peut cultiver en soi. Mais elles sont au service aussi de cette dimension, encore une fois, connectée et interagissante qu'on a avec les autres. Et donc c'est forcément les deux. Alors dans le propos des lois Laurent, je crois que c'est une problématique de société. Comment on arrive à retrouver, à reconstruire de la confiance dans une société qui a perdu cette membrane de confiance, alors si tant est qu'elle est déjà opérée dans la confiance, mais voilà, on est au cœur des sujets de coopération pour le coup.

  • Bérénice d'Holomea

    Il n'y a pas longtemps, j'écoutais un podcast de philosophie justement sur la confiance en soi, mais du coup, la personne explorait tout ce qui était la confiance, de l'étymologie du mot, etc. Et en fait, c'est vrai qu'il y a... À un moment, elle parlait du fait qu'à une époque où on vivait dans des sociétés avec nos voisins, avec des personnes qui étaient proches géographiquement, en fait, on avait peu de problèmes de confiance parce qu'on était très proches à la fois physiquement et même émotionnellement. Enfin, on était toujours avec nos voisins, avec nos familles, etc. Donc finalement, la confiance n'était pas forcément un problème parce qu'on était toujours côte à côte. Donc on pouvait toujours voir si la personne était... dignes de notre confiance. Et du coup, maintenant, c'est vrai qu'avec les éloignements géographiques, relationnels, en fait, même là, nos voisins, on ne les connaît pas forcément, ou alors on a quelques bribes d'informations, mais ce n'est pas de là à accorder une confiance aveugle. Et donc, elle reliait ça avec la confiance en soi, en disant finalement, comme on a perdu cette confiance en les autres, du coup, à l'intérieur de soi, il faut qu'on réussisse à cultiver cette confiance en soi. pour pouvoir justement après aller vers la confiance en les autres.

  • Pascale Boissier

    C'est d'autant plus intéressant que c'est quelque chose que décrit très bien Pablo Servigne dans un autre bouquin que je trouve absolument fondamental si vous ne l'avez pas encore lu je vous invite à le faire. qui s'appelle l'entraide de l'autre loi de la jungle, où justement, avec Gauthier-Chapelle, ils font la somme un petit peu des connaissances et de ce que les sciences et les sciences sociales savent de la coopération, et où la confiance et le sentiment de confiance et le cadre de sécurité dans lequel on opère pour la coopération est essentiel. Et effectivement, lui, il parle de la réciprocité directe avec les gens qu'on connaît. C'est effectivement... Plus facile de savoir à qui on a affaire, ce sur quoi on peut compter, le fait qu'on est dans ces logiques réciproques aussi, quand on fait des choses les uns pour les autres. Qu'est-ce qui se passe quand c'est avec des gens qu'on ne connaît plus ? Là, il y a d'autres mécaniques qui se mettent en place. Et puis, ce qui prend le relais au niveau global de nos sociétés, c'est la qualité de nos institutions, et c'est la qualité des règles de société qui nous régissent. Et qu'effectivement, quand elles, et je pense que c'est ce qui se passe en ce moment, quand ces conditions ne sont pas susceptibles de créer de la confiance dans les citoyens, la confiance en eux-mêmes, dans leurs propres capacités, la confiance dans le système, la confiance dans les règles du jeu avec lesquelles on joue, c'est évident que c'est très très compliqué de pouvoir faire ensemble. Et effectivement, c'est ce qui sans doute met à mal... aujourd'hui les comportements que l'on lui qualifie de pro-sociaux et notre capacité à pouvoir faire avec les autres sereinement.

  • Bérénice d'Holomea

    Et justement je trouve que du coup ça fait une bonne transition avec ton projet. Toi tu accompagnes aussi des collectifs à coopérer et notamment des collectifs à coopérer entre eux j'ai envie de dire, voilà, entre plusieurs collectifs différents. Et je pense que cette notion d'entraide et de confiance ça doit être un peu au cœur des enjeux aussi. Pour réussir à faire coopérer des entreprises peut-être concurrentes ou des collectivités avec d'autres entreprises, est-ce que tu pourrais nous raconter un petit peu comment ça se passe ? Quels sont tes enjeux ?

  • Pascale Boissier

    Alors c'est vrai que la coopération, on y travaille beaucoup au sein de l'entreprise. La question fondamentale aujourd'hui, elle est comment des entreprises peuvent coopérer entre elles pour arriver à relever des défis qu'elles ne pourront pas relever toutes seules. Et que sortir du paradigme de l'impact individuel, alors aujourd'hui on est encore beaucoup là-dessus, les entreprises travaillent pour certaines, pas toutes, à changer leurs pratiques, à réduire leur impact, mais il y a un certain nombre de choses qu'elles ne pourront pas faire seules, qu'elles devront faire parfois avec leurs concurrents, qu'elles devront faire avec d'autres entreprises dans d'autres secteurs d'activité aussi. Et un monde économique en mouvement, c'est effectivement des entreprises qui coopèrent. entre elles, et moi ça m'intéresse beaucoup de travailler là-dessus.

  • Bérénice d'Holomea

    Est-ce que tu as un exemple de sujet qu'une entreprise ne peut pas forcément réussir seule et qui peut être résolue avec d'autres parties prenantes ?

  • Pascale Boissier

    Si on prend seulement la question climatique, par exemple, nous on travaille par exemple dans l'industrie du tourisme et dans l'hôtellerie, par exemple, dont on sait dans le tourisme que 80% de l'impact... carbone, c'est le transport. C'est la manière dont on va et dont on repart des lieux touristiques, que ce soit des sites, que ce soit des hôtels. On peut bien imaginer que sur cette question des mobilités, une entreprise hôtelière ne va pas vraiment pouvoir faire toute seule pour résoudre la problématique de comment on arrive sur ces sites, par exemple. Nous, on travaille pour un réseau de thalassothérapie, par exemple, qui est situé sur des littoraux un peu excentrés. Aujourd'hui, on y arrive essentiellement en voiture. Demain, pour pouvoir y arriver par d'autres moyens, c'est évident qu'il y a de la collaboration avec les collectivités territoriales, avec les acteurs de transports locaux, avec d'autres entreprises qui peuvent être aussi concernées et qui devraient pouvoir bénéficier de tout ça. Typiquement, les mobilités sont un exemple très concret sur lequel on ne peut pas faire tout seul.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, et non seulement il y a une coopération inter... entre les collectivités, les entreprises, même les particuliers finalement qui sont consommateurs de ce service-là. Et en plus, du coup, il y a aussi une coopération interfilière. Mobilité, c'est un sujet, c'est toute une filière avec énormément d'acteurs. Et j'imagine que l'hôtellerie aussi. Et c'est des mondes qui sont totalement différents. Donc, il y a besoin peut-être aussi de personnes qui font la traduction, le lien en fait entre ces deux mondes qui ont... Des vocabulaires assez différents, j'imagine.

  • Pascale Boissier

    C'est évident que la question des interfaces, comme dans le vivant d'ailleurs, les interfaces entre des écosystèmes, ça devient vital de se dire comment on arrive déjà à se parler, comment on arrive à dialoguer, c'est un premier niveau. Comment on arrive à se comprendre, c'est déjà un autre niveau. Et puis comment on arrive à faire ensemble. Alors là, on est vraiment au cœur des gros défis de la coopération multipartie prenante auxquels sont confrontés aujourd'hui pas mal de territoires. Il y a des expérimentations un peu partout. Je pense à la Drôme notamment, un petit coucou à l'association Biovalet qui essaie justement de faire travailler des parties prenantes très différentes autour de problématiques communes. Là, on touche à des choses qui... culturellement sont très nouvelles, en tout cas dans nos sociétés actuelles. Et donc, ça implique effectivement une capacité de coopération étendue. Et là, la communication vient jouer aussi un rôle très important dans l'animation de ces écosystèmes qui travaillent ensemble. Après, l'enjeu de travailler entre entreprises aussi. Alors, ça peut être des liens liés à la proximité dans le cadre de la mobilité. forcément ça joue. On a des intérêts communs quand on est situé sur un même territoire, on a aussi des intérêts communs quand on est dans un même secteur d'activité et on a aussi des intérêts communs quand on essaie d'avancer sur tous ces sujets là. C'est le sens de notre engagement auprès d'un collectif d'entreprises, d'un mouvement d'entreprises qui s'appelle Bicorp, qui est né en fait... aux États-Unis en 2006 de la volonté à la fois de changer les pratiques du monde de l'entreprise et d'intégrer les questions environnementales et sociales dans les pratiques et les modèles des entreprises, mais aussi de changer les règles du jeu économique et la manière dont le système fonctionne, un système qui est aujourd'hui essentiellement actionnarial, puisque c'est aujourd'hui la partie prenante qui a la primauté. de passer à des logiques partenariales où l'ensemble des parties prenantes sont prises en compte dans la manière dont l'entreprise opère. Et en fait, on se rend compte que d'avoir cette volonté commune de progresser sur ces questions, d'être conscient qu'il faut dépasser l'impact individuel pour de l'impact collectif, ça crée un mouvement d'entreprises qui sont prêtes à travailler ensemble, très concrètement sur des thématiques... précises sur des problématiques sectorielles aussi qu'elles ont à relever ensemble et de sortir de la compétition pure pour aller vers des nouvelles logiques de travail en commun. Et ça, c'est très enthousiasmant.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, j'imagine. Ça doit être assez satisfaisant et enthousiasmant d'être auprès d'entreprises qui ont une volonté de s'engager. et qui ont cette volonté de faire collectif autour de sujets. Moi, du coup, j'étais pendant un petit moment au Cébios et je travaillais notamment avec le Cosmimétiques Group, qui rassemble plusieurs acteurs des cosmétiques en France, qui sont concurrents ou clients-fournisseurs. Et c'était extrêmement intéressant d'animer ce groupe-là. En plus, souvent, ils ont travaillé ensemble à certains moments de leur carrière dans les mêmes entreprises. et de les voir se retrouver et de se dire ouais là on sent que le biomimétisme ça peut avoir un impact sur des enjeux communs, des enjeux concurrentiels et non concurrentiels et du coup comment on fait, comment on montre aussi que c'est des sujets qui nous importent et qu'on a cet engagement là et que ça nous tient à coeur et qu'on le fait ensemble et c'est super intéressant de voir qu'il y a vraiment cette volonté aussi de de montrer presque l'exemple, en toute humilité, mais de montrer que c'est possible et que finalement, ce modèle-là, très structuré, filière, entreprise, etc., peut aussi fonctionner en logique partenariale et en logique au moins de réflexion commune. Après, comment ça va s'incarner dans l'entreprise, chacun aura sa manière de le faire. Mais au moins sur les grandes lignes, de réfléchir et d'être dans une cohérence, c'est extrêmement intéressant, je trouve.

  • Pascale Boissier

    C'est intéressant que ce soit le monde de la cosmétique. Je ne savais pas qu'il y avait ce type de coalition côté monde du biomimétisme. Mais par exemple, dans Bicorp, la plus grande coalition sectorielle qui existe aujourd'hui dans le mouvement, c'est la Beauty Coalition. C'est une coalition des acteurs du monde de la cosmétique et de la beauté, où il y a une soixantaine d'entreprises Bicorp. au niveau international, qui ont décidé de pouvoir réfléchir et œuvrer ensemble sur un certain nombre de sujets qui ont trait au secteur. Alors pourquoi le monde de la cosmétique et de la beauté ? Alors ils sont dépendants, ils ont beaucoup de dépendance à nos problématiques actuelles.

  • Bérénice d'Holomea

    Ils sont beaucoup dans l'innovation aussi. C'est vrai que je pense que c'est un monde où la R&D a beaucoup d'importance.

  • Pascale Boissier

    Où la R&D a beaucoup d'importance et où effectivement le... Le réflexe de pouvoir s'entrenourrir, s'entranspirer, etc. est peut-être un tout petit peu plus présent que dans d'autres secteurs d'activité très très habitués à... à fonctionner de manière beaucoup plus silotée.

  • Bérénice d'Holomea

    Et donc toi, tu travailles aux côtés de Bicorp, c'est bien ça, pour accompagner des entreprises engagées sur des sujets de coopération, c'est ça ? Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus ?

  • Pascale Boissier

    Alors, c'est plus spécifique que ça, même si on va en parler, la coopération joue un rôle important. Moi, j'accompagne depuis la création de l'association B lab France les équipes sur tous les sujets de communication. Et c'est vrai que très rapidement, les sujets de communication, ça a beaucoup à voir avec l'animation de la communauté, avec la manière de favoriser les synergies, avec la manière d'embarquer des bicorps dans des expériences communes. Et c'est vrai que depuis l'année dernière, notamment avec Louise Seguin, que je salue, et Sarah Serange, la responsable communauté de B corps, a été mise en place une initiative sur le Festival Agir pour le Vivant, qui est un festival à Arles qui se tient chaque année fin août et qui agrège un écosystème très très riche de scientifiques, de chercheurs, de penseurs, d'activistes, d'entreprises aussi, même si le monde économique est un tout petit peu moins présent, mais c'est ce qui nous a intéressés aussi. Et l'idée de se dire sur ces questions du vivant, qui aujourd'hui sont complexes à embarquer, dans le monde de l'entreprise, parce qu'il y a un concept pareil, comment on embarque une question dans le monde de l'entreprise. Ça peut être vu à l'aune 2, on va s'occuper de notre impact biodiversité, on va se former à ces questions, on va comprendre nos dépendances aux vivants, parce que maintenant on se rend compte que tout ça présente des risques aussi pour beaucoup d'activités. Mais comment, globalement, on prend de la hauteur et on fait un pas de côté sur ces questions ? en tant qu'entreprise, et on le fait avec d'autres, et on décide ensemble de pouvoir non seulement apprendre, mais pouvoir aussi partager sur ces questions, et puis essayer de se mettre en action de la manière la plus cohérente possible. Donc ça, c'est un exemple concret de comment, progressivement, on pose les petites graines d'actions collectives, de coalitions sur un certain nombre de sujets. Et pour nous, ça passe par ces moments où on peut se retrouver, encore une fois, apprendre ensemble. Et là, je rejoins la logique d'Eloi Laurent qui dit que finalement, la coopération, l'intention est de savoir. Je trouve qu'il y a quelque chose de très fort là-dedans. Mais on est aussi dans un moment où il faut faire. Alors, il y a l'injonction à faire, on peut la questionner, mais il y a quand même des choses qu'on doit mettre en place et faire. Et les entreprises ont cette forte capacité à faire. C'est peut-être même l'un des acteurs de la société qui est peut-être l'un des mieux armés pour pouvoir faire, apporter des solutions et proposer des choses concrètes qui nous permettent de changer de mode de vie, de pratiques, etc. Donc voilà, mettre tous ces acteurs autour de la table. L'année dernière, on était une douzaine d'entreprises qui se sont mobilisées. Et cette année, on le fait sur un format plus apprenant, autour d'une idée de B-Université. Encore une fois, apprendre ensemble, co-apprendre, ça fait partie des clés pour pouvoir coopérer. Et on réitère l'expérience cette année, fin août à Arles.

  • Bérénice d'Holomea

    Et du coup, en quoi ça consiste la B-Université ?

  • Pascale Boissier

    Alors la B-Université, c'est trois choses. La première, c'est aller aussi s'ouvrir un peu les chakras. le cœur, l'esprit, auprès de gens qui réfléchissent à ces questions, qui expérimentent, qui ont d'autres visions du monde et d'autres points de vue. Parce que le monde économique, parfois, on peut manquer de diversité et de pluralisme dans les points de vue. Donc ça, c'est un point important. Le deuxième, c'est de pouvoir approfondir, au contact d'experts, un certain nombre de sujets. Cette année... On aimerait aller plus loin sur les questions d'écologie du travail. Ça fait partie aussi des thématiques autour du vivant. La dimension sociale est importante. Ou d'un grand mot du moment, qui est celui de la régénération, par exemple. Comment on peut approfondir ces questions ? Et puis, enfin, comment on arrive à faire alliance ? Donc, ce sera l'occasion pour des bicorps d'être déjà entre bicorps, mais aussi d'aller rencontrer... des gens qui œuvrent dans d'autres pays, notamment cette année, des rencontres avec nos homologues d'Amérique latine, puisque la Colombie est très présente à Agir pour le vivant, ils ont une édition à Medellín. Donc de rencontrer à la fois des acteurs qui œuvrent dans ce sens ailleurs dans le monde et aussi sur le territoire, puisque sur le pays d'Arles, il se passe aussi beaucoup de choses. Donc de faire cette connexion entre le local, le territorial et l'international. Donc c'est un programme... qui promet de nous faire vivre plein de choses géniales. On a hâte.

  • Bérénice d'Holomea

    C'est génial d'avoir à la fois le côté très local et en même temps ce côté presque inspiration de comment ça se fait ailleurs. Et finalement, je pense que le but, ce n'est pas de faire la même chose, mais c'est de se dire qu'est-ce qu'on peut ramener, quelles sont nos contraintes communes, là cet enjeu, comment ils ont répondu. Et du coup, ce métissage finalement de solutions, c'est ça qui crée la richesse et la pertinence d'une solution, j'ai l'impression.

  • Pascale Boissier

    En tout cas, créer des liens, créer des ponts, croiser des regards, des expériences, alors on le sait, c'est fondamental. Après, il faut prendre le temps pour le faire. Et ça, encore une fois, je reviens aux spécificités du monde économique, c'est parfois compliqué de pouvoir mettre le nez dehors, de pouvoir prendre du temps pour faire tout ça. On n'est pas dans des systèmes qui permettent de le faire. On est souvent dans des entreprises, en ce moment particulièrement dans un contexte un peu tendu sur le plan économique, social et géopolitique, où prendre ce temps du recul, de la reliance avec d'autres, de l'inspiration, d'aller voir autre chose, voire même de se mettre en jachère à certains moments. pour laisser émerger des choses, parce que malgré tout, d'être tout le temps dans le faire peut parfois nous couper d'un certain nombre de choses qui pourraient émerger si on leur laissait seulement le temps de venir, de pousser. Voilà, c'est vrai qu'on est dans des mondes, et notamment dans le monde des transitions aujourd'hui, de l'impact, ça prend des noms variés. dans quand même la volonté d'action, d'être très agissant et d'obtenir des résultats. Mais d'être agissant tout le temps, ça ne nous aide pas toujours. Donc de prendre le temps aussi de ne pas faire, pour nous c'est aussi une voie. Et c'est celle-là qu'on a envie aussi de faire expérimenter à des entreprises et des collaborateurs qui n'ont pas forcément l'habitude de le faire.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, de le laisser venir. C'est un sujet, ça. C'est pas facile.

  • Pascale Boissier

    Laisser venir et advenir, je pense que c'est un des trucs les plus difficiles qu'on ait à faire, à la fois individuellement, parce que je pense qu'on est tous concernés par cette difficulté aussi à faire confiance. On appelle ça faire confiance à la vie, faire confiance au destin. Chacun y mettra ce qu'il veut. Mais de laisser advenir et de se dire que... Alors, il y a des traditions où c'est très présent. notamment orientale, où le non-agir est une forme d'action. Mais elle vient nous confronter beaucoup culturellement, intellectuellement et même émotionnellement dans nos cultures à nous. Clairement, le non-agir ne fait pas vraiment partie de notre logiciel. Et pourtant, qu'est-ce qu'il peut être intéressant d'explorer ? Évidemment, rien ne s'exclut. Il ne s'agit pas d'arrêter d'agir, mais de se dire...... être toujours dans l'action, c'est toujours la clé, surtout face à ce qui nous attend.

  • Bérénice d'Holomea

    Surtout que je trouve que ça peut créer un sentiment de culpabilité aussi. Finalement, il y a des fois où on produit, puis juste après, on est un peu fatigué, on a moins d'idées, on sent qu'on a besoin de souffler. On peut se sentir finalement mal à l'aise et se dire mais je ne fais rien en ce moment, je ne suis pas productive, je ne suis pas productive Et ça peut créer de la peur, de l'angoisse. L'envie de combler, de se rajouter d'autres choses. Parce que d'être un peu plus lent, un peu plus détendu, un peu plus improductif, ça fait peur. On a peur de ne pas réussir à se remettre. Je ne sais pas de quoi on a peur, mais ça peut faire peur.

  • Pascale Boissier

    C'est intéressant de demander de quoi on a peur. Mais c'est vrai qu'on est dans nos sociétés dans une injonction absolument défastatrice à cet endroit-là. Oui, on est dans des cultures de la productivité, on est dans des cultures de la performance de manière générale. On parlait du monde économique, mais cette performance s'étend à tous les domaines. Même le développement personnel est devenu performatif d'une certaine manière. Même des pratiques qui ne nécessitent aucun résultat, je pense au yoga par exemple, c'est devenu aussi des résultats à atteindre et des niveaux à dépasser, etc. et qu'effectivement, cette peur de loisiveté dans nos sociétés, de la paresse, je ne vais pas refaire toute la liste de ce que pas mal de philosophes et d'auteurs d'ailleurs ont exploré. La question aujourd'hui, c'est comment, dans nos manières de faire, sur des sujets de transition, sur des sujets aussi complexes, sur la coopération, on arrive petit à petit à déconstruire ces logiques-là pour entrer dans autre chose. Alors, je te l'ai dit, j'étais avec eux, j'assistais à la conférence d'Olivier Hamand sur, justement, l'antidote occulte de la performance, qui était absolument ébouriffante, parce que d'un coup, de valoriser la sous-optimalité, de valoriser la lenteur, de valoriser l'incohérence, de valoriser l'inachevé, toutes ces notions qui sont tellement antinomiques avec notre mode. culturelle actuelle, d'un coup, il y a quelque chose qui vient à la fois nous bousculer et à la fois nous faire du bien. Je crois qu'on a tous cette aspiration à pouvoir articuler, équilibrer davantage les choses, y compris dans nos milieux de la transition et de l'engagement, même si je n'aime pas beaucoup ce mot. Parce qu'on le voit aujourd'hui, il peut y avoir beaucoup d'épuisement, il y a des burn-out, il y a des gens qui, dans cette recherche, encore une fois, qui est toujours dans le logiciel de la productivité, de la performance, il peut tout à fait s'appliquer à nos sujets de transition écologique et sociale. Et c'est ça aujourd'hui qu'on doit questionner. Mais ce n'est pas facile, effectivement.

  • Bérénice d'Holomea

    Je suis totalement d'accord. En plus, on parlait tout à l'heure d'innovation. Il y a un côté aussi où on essaye de sortir du cadre. d'emmener vers autre chose et où en fait des personnes qui auraient besoin de se faire convaincre demandent des résultats. Et donc c'est pas forcément possible. D'où cet épuisement aussi parce qu'on essaye de tirer vers quelque chose où peut-être il n'y en a pas encore des résultats ou qui ne sont pas encore vraiment observables, qui ne sont pas suffisants sur une ancienne logique, qui ne peuvent pas être observés avec les mêmes indicateurs. Et ça peut provoquer beaucoup de frustration et de colère je pense aussi. de se retrouver dans ces situations-là. Et puis, moi, ce que j'ai observé aussi, c'est que parfois, il y a un côté un peu sacrificiel. Comme je travaille pour la bonne cause, je fais des heures sans les compter. Peut-être que dans mon équipe, ça se passe mal, mais ce n'est pas grave parce qu'on travaille pour la bonne cause. Donc, il faut continuer. Et c'est tellement dommage. Et moi, ça me parle aussi de la coopération comme logique d'amour, parce que... Moi, je crois profondément que si on aime ce qu'on fait et qu'on est heureux dans ce qu'on fait, alors on va forcément produire des choses qui sont dans le sens d'une transition et d'un avenir qu'on a envie de faire advenir. Et oui, c'est vrai que ce côté sacrificiel, ça empêche finalement même, j'ai l'impression, de potentiels résultats peut-être d'avoir lieu, puisqu'il y a ce désengagement, il y a cette colère, il y a cette fatigue qui sont présentes et qui... qui en fait épuisent des personnes qui auraient l'envie profonde de s'investir.

  • Pascale Boissier

    Et je crois que tu as raison de le souligner, parce que je pense que l'intérêt général et nos problématiques n'excluent pas au contraire des problématiques d'exploitation, des problématiques de violence dans les relations et dans les rapports. Ma conviction, c'est que parce qu'on est toujours dans ce logiciel du résultat, donc le résultat... résultat qu'il y ait, que ce soit de changer le monde ou que ce soit de le conserver tel qu'il est, la mécanique elle est la même. Si en tout cas il n'y a pas d'attention portée à la manière dont on le fait, alors beaucoup de gens évoquent les questions d'écologie de la relation, d'écologie humaine etc. Moi c'est fondamental et d'ailleurs je fais partie des gens qui pensent que l'intention première c'est d'abord la qualité. des relations, des connexions et de la manière dont tu fais les choses. Parce que je fais partie des gens qui pensent que c'est à cette condition-là qu'on pourra aller vers le monde qu'on appelle de nos vœux, mais sans soin et sans attention portée à tout ça. Je crois qu'on n'a pas vraiment renversé la table dans la manière de faire. Et on reproduit, je crois que c'est ce que... peut faire parfois le monde de l'impact. Déjà, rien que ce mot, impact, Il peut être jugé positivement, justement, quand on parle d'impact positif. Mais pour moi, on n'est pas vraiment sortis du vieux logiciel économique de la performance. Donc, on peut faire de l'impact tout en étant violent dans les relations sociales. C'était Pierre Rabhi qui disait on peut manger bio, exploiter son prochain On peut décarboner en exploitant son prochain, on peut être des boîtes à impact tout en exploitant, on va dire, les personnes qui justement se donnent sans compter pour ces sujets-là. Pour l'anecdote, moi, la première fois que j'ai pris conscience de ça, c'est en discutant avec une personne d'un syndicat, d'un vieux syndicat, dont on se dit aujourd'hui, ils sont complètement... à la rue, etc., mais qui me racontait comment, au moment du Covid, des bonnes volontés avaient été récupérées sous forme d'exploitation pure et simple. Par exemple, des femmes qui faisaient des masques en tissu, qui au début le faisaient pour contribuer à la solidarité, à l'entraide qui s'est mise en place à ce moment-là. Mais très vite, c'est devenu des obligations, des heures à faire, des attentes sur le nombre de masques qu'il fallait faire. Et très vite, un système informel d'entraide est devenu un système d'exploitation de bénévoles qui fabriquaient à la chaîne ces masques en tissu, dont en plus, après, on s'est rendu compte qu'ils n'allaient pas forcément être utiles. Et donc, ces logiques d'exploitation, de violence sociale, ils ne sont malheureusement pas incompatibles avec la recherche d'un impact environnemental positif. Et c'est ça qu'il va falloir arriver à réconcilier aujourd'hui.

  • Bérénice d'Holomea

    Et donc justement, tu parles de soins, d'attention portée, de qualité de relation. Comment est-ce que tu crées ce cadre ou ce climat quand tu as justement des acteurs qui ne se connaissent pas ? qui ne travaillent pas du tout dans les mêmes domaines, et qui, peut-être même eux, en interne, n'ont peut-être pas forcément les réflexes de coopération. Comment est-ce que tu arrives à créer ce climat d'attention et de soins dans les relations ?

  • Pascale Boissier

    Je crois qu'il y a deux choses. La première, c'est le cadre de... Mais là, on revient à des fondamentaux sur la coopération. C'est le cadre de protection et de sécurité que tu mets en place. au sein duquel les échanges, les dialogues ou le travail ensemble peut se faire. S'il n'y a pas de cadre clair, s'il n'y a pas de confiance dans les personnes qui posent le cadre, c'est vrai que c'est très compliqué de pouvoir opérer. Ensuite, dans la qualité des relations qui peuvent se mettre en place, là, il faut faire avec là où en sont les gens. Et assumer aussi qu'il puisse y avoir... des émotions qu'on juge parfois négativement. Je pense que déjà, si on pouvait un peu moins connoter et juger nos émotions ou réactions socialement pas acceptées, on ferait peut-être un grand pas. Donc accepter la colère, accepter le conflit, accepter le désaccord, accepter parfois aussi qu'il y ait de la violence dans la manière d'exprimer les choses. Mais en revanche, de pouvoir petit à petit favoriser des modes de fonctionnement. Alors, comment on fait concrètement ? Alors, il y a déjà comment on incarne nous-mêmes les choses. Moi, je pense que ça commence par nous, évidemment. Tu parlais de confiance en soi. Je pense que c'est aussi notre capacité à nous déconstruire notre mode de relation, nos modes de communication. Et dans des groupes, dans des collectifs, d'arriver à pouvoir à la fois incarner ça du mieux qu'on peut, et c'est pas facile, et accepter aussi que ça marche pas toujours de manière apaisée, et que ça, on doit aussi faire avec. Et parfois, dans le non-apaisement, il y a aussi des choses utiles à prendre et qui peuvent nous aider à avancer. Je crois pas dans les collectifs... pacifié à 100%, je ne suis pas sûre. En revanche, dans une dynamique qui cherche à prendre soin des autres, je pense qu'on peut y arriver. C'est même essentiel, les conflits sont toujours le signe de besoins qui ne sont pas nourris. Et du coup, de comprendre ce qui n'est pas nourri, c'est déjà la première clé pour se dire comment on arrive à nourrir davantage. Alors, il y a ce qui est de notre responsabilité personnelle, dans notre capacité aussi à... à avoir conscience de nos besoins, notamment en interaction avec les autres, à savoir ce dont on a besoin, à savoir aussi comment en prendre soin, enfin prendre soin de soi, ça passe par là. Mais ce faisant, on le fait aussi pour les autres. Et un conflit est toujours l'expression de besoins, ça c'est très CNV, mais de besoins qui ne sont pas compris ou qui ne sont pas reconnus. Et oui, ça peut être très utile à un moment donné pour... pour pouvoir exprimer, dénouer des choses. On souhaiterait que ça ne passe pas forcément par le conflit pour arriver à se parler, à se comprendre. Mais parfois, c'est comme ça. Et on fait avec ce qui est vivant là. Et on l'accompagne au mieux. Parfois, ça marche. Parfois, ça ne marche pas. Mais c'est ça qui fait aussi l'intérêt de ces jeux collectifs. C'est qu'on apprend tout le temps sur soi et sur les autres. Après, il faut avoir envie. Et ça, pour le coup, qu'est-ce qui fait que l'envie est là ? Je ne suis pas persuadée qu'on donne envie. Je crois qu'il y a ce mythe aussi où on pourrait donner envie. Je pense que les flammes s'allument en chacun de manière très intime. C'est quelque chose qui relève vraiment de... très personnelles au fond, même si ça peut être stimulé par plein d'autres choses, mais je pense que ça vient vraiment de soi. De la même manière, pour des collectifs, pour moi, c'est jamais exogène. Il y a toujours quelque chose qui vient du corps collectif, quel qu'il soit, et puis il y a des moments où ça vient, et des moments où ça prend plus de temps pour l'accepter.

  • Bérénice d'Holomea

    Moi, je crois aussi beaucoup que ça vient par étapes. Des fois, ça vient, puis peut-être que ça repart. mais ça a nourri quelque chose. Et du coup, la fois d'après, et moi, là c'est plus un témoignage personnel, mais il y a des questions sur lesquelles j'ai beaucoup évolué, et ça m'a pris des années. Moi je ne crois pas au basculement du jour au lendemain. Je crois à des petits événements, des expériences, des vécus, des rencontres, des témoignages, des signes, peut-être qu'on a vu quelque part, un mot, une image, quelque chose. Et qui vont provoquer ce basculement ? Et moi, je trouve que regarder que ce basculement, c'est finalement exclure tout le chemin qui a été parcouru avant.

  • Pascale Boissier

    Je rejoins complètement. Moi, je pense que tout ce tissage de choses, alors on n'a pas toujours le recul pour se rendre compte de ce qui est en train de se passer, mais c'est là où la notion de confiance revient. Moi, je suis quelqu'un qui a... Après, j'ai eu beaucoup de chances dans ma vie. pour pouvoir avoir cette confiance dans la vie. Mais la confiance, les choses se tissent, tu ne les comprends pas forcément, tu ne vois pas forcément où ça va. Mais à un moment donné, il y a quelque chose, un déclic, une bascule. Je suis comme toi, mais je ne crois pas aux grandes bascules. C'est forcément l'alliance de plein de dynamiques et de plein de choses qui, à un moment donné, pouf, s'éclairent, du sens où nous font passer à l'action sur quelque chose. Et au fond, c'est très beau et réconfortant de se dire qu'on n'a pas besoin comme ça de grandes épiphanies dans nos vies. D'ailleurs, merci de me le rappeler là, parce que je crois qu'on est tous dans des moments où on a besoin que des choses se passent. Et on ne les voit pas forcément arriver, mais c'est de faire confiance à des process invisibles dans lesquels on est partie prenante avec d'autres. Et de se dire que le sens de tout ça se révélera. petit à petit ou pas complètement. J'aime bien cette part de mystère aussi dans ce qui se joue. Mais c'est important de se le rappeler.

  • Bérénice d'Holomea

    Moi, ça me rassure beaucoup de me dire que des fois, on est un peu dans l'attente. On se dit en ce moment, il ne se passe pas grand-chose. Et moi, souvent, je me dis si, mais c'est juste que tu ne le sais pas encore. Et j'aime bien me dire ça. Ça me rassure. Je me dis, mais si, mais dans un an, deux ans, trois ans, je regarderai ce moment et je me dirai c'est là, en fait, qu'il s'est dépassé des choses et que ça... Ça a nourri l'action ou la chose que j'attendais. Et je pense que ça s'applique dans le monde personnel, professionnel. On ne sait pas quand les choses vont se dénouer. Et voilà, on rejoint encore cette innovation et cette inconnue et cette confiance. Ça a un côté angoissant, mais finalement, assez chouette aussi, assez rassurante de se dire que tout peut encore arriver.

  • Pascale Boissier

    Je pense que cette... peur ou ses angoisses ou ses appréhensions, c'est des moteurs aussi. Je crois que tout concourt à un moment donné tout à sa place et à son rôle. Alors on n'a pas envie de se laisser submerger par l'angoisse, même si parfois ça peut arriver. Mais en même temps, dans la conscience que quelque chose se lit, se relie, qu'on n'est pas forcément à la bonne échelle pour voir ce qui se passe, qu'on n'a pas forcément le recul. Ça vaut pour nos vies, comme tu disais, peut-être dans trois ans, on se dira, tiens, en fait, c'était ce moment-là. Mais ça vaut aussi pour nos sociétés. Et dans 20 ans, on se dira, mais si, mais là, cette année hyper relou 2024, il y avait déjà ça qui était à l'œuvre et il y a ça qui était en train de... de monter. Ça nous aide à aussi apparaisser trop le nez dans le court terme qui peut être effectivement un peu effrayant pour essayer de voir un peu plus large. Ce que disait Olivier Hamann, ça fait du bien d'entendre ça, c'est que lui il parle des marges et il prend l'exemple des murmurations, tu sais ces danses des oiseaux qui évoluent dans le ciel en groupe de manière totalement fluide coordonnée. Et en fait, il expliquait que c'est les oiseaux qui sont aux marges, qui sont sur les bordures, qui font passer, qui gèrent en fait l'information qui circule dans le groupe. Ce n'est pas le cœur du système. Et pour lui, les marges ont déjà basculé. Alors quand on est au cœur du système, on ne voit pas forcément que les marges ont basculé. Quand on est à la marge, on se dit mais le cœur du système, il est toujours comme avant. Donc où qu'on soit, on a peut-être... pas exactement la meilleure vue sur ce qui se passe, donc seul le temps nous le dira.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, je suis tout à fait d'accord. Merci beaucoup pour cet échange, pour ce partage.

  • Pascale Boissier

    Merci à toi Bérénice. Indépendamment de ce qu'on arrivera ou pas à réaliser tous ensemble, la qualité de ces moments et de ces conversations elle est essentielle, donc merci beaucoup pour cette invitation.

  • Bérénice d'Holomea

    La définition de Pascal concernant la coopération, le vient de sa lecture de l'ouvrage Coopérer et se faire confiance écrit par Éloi Laurent. Pour Pascal, la coopération ne réside pas seulement dans l'action vers un but commun, mais elle serait plutôt mue par une dynamique d'amour et par une envie de savoir plutôt que de faire. Donc coopérer n'est pas seulement faire ensemble, mais c'est aussi s'accorder sur le sens et la manière dont on le fait. Un des ingrédients qui est essentiel à la coopération qu'on a identifié dans la discussion avec Pascal, c'est la confiance. à la fois la confiance en soi et aussi la confiance dans le groupe, dans le collectif. Et en fait, le cadre de sécurité qu'on va instaurer et le climat de confiance qui va être présent dans le collectif, ce sont deux choses qui sont absolument essentielles à cette coopération. Et on sait qu'il est plus facile de faire confiance lorsqu'on connaît une personne, une situation. Et donc, dans le cas des accompagnements de Pascal, qui sont en général des coopérations multiparties prenantes entre plusieurs organisations de types différents, et aussi parfois qui travaillent dans des secteurs d'activité distincts. Donc là, la question, c'est finalement, comme ces interlocuteurs finalement ne se connaissent pas, n'ont pas connaissance des enjeux de chacun, comment on crée ce climat de confiance ? Comment faire pour que ces organisations, elles arrivent déjà à dialoguer, parce que parfois le vocabulaire peut être différent, mais aussi à se comprendre et à faire ensemble, à agir ensemble autour d'enjeux communs ? Pascal, dans ces activités d'accompagnement, Elle travaille justement sur ces enjeux de coopération entre plusieurs organisations. Et elle le fait aussi de par son engagement auprès de B corp et de B lab France. Et donc, Pascal est notamment impliqué dans l'association Bilab France au niveau de la communication, qui est liée aussi avec l'animation de communautés, qui sont en fait des entreprises qui sont engagées dans la démarche B corp et qui n'ont pas forcément les mêmes secteurs d'activité, les mêmes enjeux. Et donc, c'est pour ça aussi, dans ce cadre-là, Pascal est aussi... facilitatrice de synergie, de liens et de coopération dans des organisations diverses. Et ça, en fait, ça peut passer par différents moyens. Et un des moyens de faire cette animation-là, c'est justement d'organiser des événements. Comme par exemple, elle nous parle du festival Agir pour le Vivant qui a lieu la dernière semaine d'août à Arles. Et donc, ce festival, c'est vraiment une opportunité pour les entreprises de créer une dynamique collective. coalition aussi, à la fois d'entreprises et aussi de personnes qui ont envie de s'investir sur le sujet. Ce genre d'événement et ce genre de rassemblement, c'est vraiment une occasion pour sortir aussi de cette culture très agissante qui est très présente dans notre société et qui est aussi présente dans les engagements on va dire de transition. Il y a toujours un enjeu à faire, à montrer, à avoir des résultats et en fait on se laisse prendre finalement dans cette culture-là qu'on essaye justement de changer. Et donc, participer à des événements comme ça, où en fait, le but c'est vraiment d'aller créer du lien, d'aller s'inspirer, d'aller voir ce qui se fait ailleurs, d'exprimer peut-être sa créativité. C'est un moyen de laisser venir, de laisser advenir, de laisser émerger et de pas tout le temps être dans le faire, mais justement être dans cette dynamique d'amour dont parlait Pascal au début pour aller créer des liens et finalement prendre ce temps-là aussi pour poser un petit peu ses réflexions et ses actions. Donc justement voilà, ce modèle de productivité et de performance qu'on essaye de déconstruire parfois quand on s'engage dans des entreprises à mission, dans... des associations, dans des organisations, dans le sens de la transition écologique et sociale. On essaye vraiment de sortir de ce modèle-là qui a des externalités extrêmement négatives, mais en fait, on remarque que ce modèle-là, il s'applique toujours. Et c'est intéressant de comprendre pourquoi, parce qu'en fait, on essaye de changer quelque chose et finalement, ça devient quelque chose qui est appliqué à nous-mêmes. Et ça, c'est aussi lié à la manière dont on s'organise, parce que si on ne change pas nos fonctionnements collectifs, en fait, on va répéter les anciens schémas Et on va produire exactement les mêmes externalités du stress, de l'épuisement, du désengagement, de la colère. C'est en allant créer des nouvelles interactions avec de l'attention, avec du soin qui est porté aux membres d'un collectif et aussi au collectif en lui-même, avec ce climat de confiance qu'on va pouvoir créer dans les collectifs. Et ça, ça va pouvoir permettre de générer un fonctionnement différent. Et ce fonctionnement différent va pouvoir soutenir une production qui est différente et qui est en lien avec la transition écologique et sociale. Ça, c'est une loi qui s'appelle la loi de Conway qui dit que ce qu'on produit ressemble à la manière dont on est organisé. Et donc forcément, si on essaye de produire autre chose, si on essaye de produire de nouveaux produits, de nouveaux fonctionnements, de nouveaux services en lien avec la transition, eh bien, on a besoin de modifier nos modes de fonctionnement aussi. Retrouvez les épisodes de l'affluence une fois par mois. Il forme un recueil de témoignages, de vécus liés aux transformations des pratiques qui vous permettra d'avoir des clés pour faire évoluer à votre échelle votre environnement professionnel. Pour ne rater aucun épisode et pour faire grandir ce podcast, vous pouvez en parler autour de vous, vous abonner sur votre plateforme d'écoute préférée et nous laisser des étoiles si vous nous écoutez depuis Spotify ou Apple Podcast. Merci pour votre écoute et à bientôt pour un nouvel épisode de la Fluence. Sous-titrage Société Radio-

Description

La Fluence, le podcast qui explore la coopération 🔎


Aujourd’hui, nous explorons la vision de Pascale Boissier sur la coopération, notamment lorsqu’elle se met en place entre les organisations. Les entreprises, les collectivités, les associations et autres collectifs ont tout intérêt à se faire confiance pour relever les défis de la transition écologique et sociale. 


Influencée par la lecture de l’ouvrage "Coopérer et se faire confiance" d'Eloi Laurent, Pascale considère que la coopération va au-delà de l'action collective vers un objectif commun. Elle serait mue par une dynamique d'amour, de confiance et d’une envie de savoir plutôt que de faire. 

Elle souligne l'importance de la confiance, tant en soi qu'au sein d'un groupe. Son défi en tant que co-fondatrice de Silbo est de créer cette confiance entre plusieurs organisations. 

Également impliquée avec B corp et B Lab France, Pascale travaille pour soutenir la communication, animer la communauté d’entreprises engagées et faciliter les synergies. Elle participe à des initiatives comme le festival "Agir pour le vivant", visant à créer une dynamique collective en faveur de la transition écologique et sociale. 

Cette conversation se poursuit sur des enjeux plus philosophiques : comment se détacher des injonctions à faire et à produire, comment laisser venir et advenir, avoir confiance, repérer les signaux faibles… 


En savoir plus sur Silbo : https://silbo.fr/

En savoir plus sur B Corp : https://www.bcorporation.net/en-us/

En savoir plus sur B Lab France : https://bcorporation.fr/le-mouvement/b-lab-france/


Coopérer et se faire confiance, Eloi Laurent : https://www.ruedelechiquier.net/essais/486-cooperer-et-se-faire-confiance.html

Conférence : La robustesse du vivant comme antidote au culte de la performance - Olivier Hamant : https://www.youtube.com/watch?v=DvU4jKnzT1I


Musiques par Vito Bendinelli : https://www.instagram.com/vito.bendinelli/


Pour retrouver les prochains épisodes : 

Instagram : https://www.instagram.com/holomea.insta/

Linked In : https://www.linkedin.com/company/holomea/

Site Holomea : https://holomea.com/


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Bérénice d'Holomea

    Bonjour à toutes et à tous, je m'appelle Bérénice, je travaille chez Holomea et je suis passionnée par la bio-inspiration et la manière dont fonctionnent les humains entre eux. Bienvenue sur La Fluence, le podcast qui explore la coopération. Aujourd'hui je suis avec Pascale Boissier, cofondatrice de Silbo, une société à mission dédiée à l'accompagnement aux transitions. Elle est aussi activement engagée auprès de l'association B Lab France pour développer l'écosystème B corp en France. Je la retrouve à Montmartre et nous entamons la discussion tout en contemplant les toits parisiens. Bonjour Pascale.

  • Pascale Boissier

    Bonjour Bérénice.

  • Bérénice d'Holomea

    Bienvenue dans la Fluence, le podcast qui explore la coopération. Est-ce que tu veux bien te présenter en quelques mots ?

  • Pascale Boissier

    En quelques mots, alors je suis Pascale Boissier, je suis franco-chilienne avec des attaches importantes dans les Cévennes. Ça me détermine beaucoup et aujourd'hui mon activité principale c'est d'accompagner des organisations, des entreprises, des collectivités, des associations sur le chemin exigeant des transitions. Et je fais ça depuis environ huit ans au sein d'un cabinet qui s'appelle Silbo, avec mon associé Sylvain Page et toute une série de camarades aussi avec lesquels on travaille sur tous ces sujets.

  • Bérénice d'Holomea

    Donc dans ce cabinet Silbo, vous accompagnez les collectifs à se transformer, à aller dans le sens de la transition. C'était surtout par le biais de la communication, c'est ça ? Ou il y a d'autres choses que vous mettez en place pour accompagner les collectifs ?

  • Pascale Boissier

    C'est vrai que mon métier depuis 25 ans maintenant, c'est la communication. C'est là où je suis née, c'est là où j'ai grandi. Et en même temps, il y a environ une quinzaine d'années, la conscience que la communication pouvait avoir un rôle important dans les transformations que connaît notre société, que connaît l'économie, à la fois dans les prises de conscience, à la fois dans le fait d'embarquer des individus et des collectifs, d'animer des écosystèmes autour des projets. Donc effectivement, moi je suis partie, et mon associé Sylvain aussi, de ce monde-là, pour depuis quelques années, être venue explorer les chemins plus dans le dur, on va dire, du conseil sur tous ces sujets-là, de l'accompagnement humain sur toutes ces questions-là, et de l'accompagnement à la mise en action aussi, au-delà de la mobilisation des individus et des collectifs à travers la communication. C'est vrai que quand on dit communication, les gens... Alors déjà, la communication n'a pas toujours bonne réputation. Quand on, avec les expressions, c'est de la com ou c'est juste de la com, on peut comprendre aussi pourquoi on a cette vision-là de la communication. Mais comme on le dit souvent, nous, la com, ce n'est pas juste faire des petits dépliants ou des jolis sites web pour raconter des choses bien polissées. C'est bien plus profond que ça. Moi, je viens d'une famille d'enseignants. C'est vrai que pour moi, la communication a beaucoup à voir avec l'éducation et la pédagogie. Et c'est ça qu'on essaye effectivement de développer.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, même une forme de vulgarisation aussi, de s'adapter finalement à l'audience, trouver les bons mots, le bon vocabulaire. Et je trouve que ce n'est même pas facile aussi de retransmettre, réellement de mettre des mots sur des choses qu'on peut mettre en pratique dans des collectifs, dans des organisations. Parce que des fois, on a l'impression que finalement, il y a peut-être... plusieurs autres collectifs qui pourraient utiliser les mêmes mots que nous, alors qu'en fait, ça veut dire peut-être des choses totalement différentes et des actions qui ne se ressemblent pas forcément. Donc, effectivement, l'importance de mettre les bons mots.

  • Pascale Boissier

    Et peut-être qu'on peut partir du principe qu'il n'y a pas de bons mots, mais c'est vrai que le pouvoir des mots, les mots forgent nos représentations, forgent nos imaginaires, forgent ce qu'on met derrière. D'ailleurs, les communicants, on parle passé, continuent encore, ont beaucoup utilisé la transformation des mots pour aussi réagir. déformer des réalités, les rendre plus acceptables ou les rendre plus douces. Mais c'est vrai que le sens qu'on met derrière les mots... J'étais cette semaine dans une conférence d'Olivier Hamann qui ne divisait que le mot résilience qui était vraiment polysémique, qui avait plusieurs sens. C'était un mot qu'il n'aimait pas beaucoup, par exemple, parce qu'il n'avait pas le même sens dans le monde scientifique, dans le monde de l'écologie, dans le monde de la psychologie. Du coup, ça devenait un peu un mot fourni. surtout derrière lequel on mettait beaucoup de choses différentes. Et on peut dire que dans le contexte dans lequel on est, c'est un vrai enjeu de mettre du sens commun derrière les mêmes mots. En tout cas, c'est ça qui est susceptible de créer aussi... une forme de vision commune, où on parlait tout à l'heure de destin commun, de choses qui font sens pour les collectifs.

  • Bérénice d'Holomea

    J'aimerais que tu nous donnes ta définition, ta vision de la coopération. Qu'est-ce que c'est pour toi ? Qu'est-ce que ça t'évoque ?

  • Pascale Boissier

    Ouh là, ça ! C'est une très large question, mais c'est celle qui nous réunit aujourd'hui. Alors, je suis très là, Je termine la lecture du dernier ouvrage d'Éloi Laurent qui s'appelle Coopérer et se faire confiance J'ai été marquée par sa vision de la coopération qui ne réside pas dans l'intention de résultat ou forcément dans le but commun, comme pourrait l'être la collaboration. Il fait une distinction entre les deux. Il y a quelque chose qui sera à la fois mu par une dynamique d'amour et j'ai trouvé ça particulièrement... étonnant chez un économiste de nous parler d'Anne Mour et par une envie de savoir et j'aime bien cette définition finalement de la coopération qui nous sort du côté faire ensemble pour un but commun qui est la vision communément admise et que je partage aussi, mais pour sortir seulement de la logique du faire mais aussi du sens et de la manière dont on le fait Et moi, cette dynamique d'amour dans les liens de coopération, elle me parle beaucoup. Et encore une fois, venant d'un économiste, je la trouve très intéressante. Donc, je recommande la lecture de cet ouvrage.

  • Bérénice d'Holomea

    Et c'est rigolo parce que c'est vrai que tout à l'heure, je l'avais compris comme se faire confiance à soi. Et finalement, là, quand tu énonces les interactions, la dynamique d'amour et tout ça, je le comprends aussi comme se faire confiance aussi entre membres d'un collectif. Et je pense que les deux ont leur place aussi dans la coopération, parce que finalement, quand on travaille avec d'autres personnes, quand on cherche à collaborer, à coopérer, finalement, il y a toujours un moment où on a une part de responsabilité sur un sujet, plus ou moins seul. Et d'où, moi, je trouve que se faire confiance aussi à soi va impacter finalement toute la dynamique collective. Du coup, c'est rigolo ce double sens qu'on pourrait observer dans le titre.

  • Pascale Boissier

    Mais c'est intéressant que tu les pries comme ça et en même temps ils sont absolument indissociables. De toute façon, toute mécanique du soi est une mécanique en interaction avec les autres et toute mécanique d'interaction avec les autres nous renvoie aussi à nous-mêmes. C'est ce qui fait qu'on est des espèces interconnectées et on partage ça avec l'entièreté du monde vivant. Et c'est vrai que cette dynamique-là, elle est très importante, là pour le coup, dans le concret. de la coopération au sein de collectifs. Alors on l'appelle confiance en soi, on l'appelle conscience de soi, d'autres parlent de la boussole intérieure ou de toutes ces qualités qu'on peut cultiver en soi. Mais elles sont au service aussi de cette dimension, encore une fois, connectée et interagissante qu'on a avec les autres. Et donc c'est forcément les deux. Alors dans le propos des lois Laurent, je crois que c'est une problématique de société. Comment on arrive à retrouver, à reconstruire de la confiance dans une société qui a perdu cette membrane de confiance, alors si tant est qu'elle est déjà opérée dans la confiance, mais voilà, on est au cœur des sujets de coopération pour le coup.

  • Bérénice d'Holomea

    Il n'y a pas longtemps, j'écoutais un podcast de philosophie justement sur la confiance en soi, mais du coup, la personne explorait tout ce qui était la confiance, de l'étymologie du mot, etc. Et en fait, c'est vrai qu'il y a... À un moment, elle parlait du fait qu'à une époque où on vivait dans des sociétés avec nos voisins, avec des personnes qui étaient proches géographiquement, en fait, on avait peu de problèmes de confiance parce qu'on était très proches à la fois physiquement et même émotionnellement. Enfin, on était toujours avec nos voisins, avec nos familles, etc. Donc finalement, la confiance n'était pas forcément un problème parce qu'on était toujours côte à côte. Donc on pouvait toujours voir si la personne était... dignes de notre confiance. Et du coup, maintenant, c'est vrai qu'avec les éloignements géographiques, relationnels, en fait, même là, nos voisins, on ne les connaît pas forcément, ou alors on a quelques bribes d'informations, mais ce n'est pas de là à accorder une confiance aveugle. Et donc, elle reliait ça avec la confiance en soi, en disant finalement, comme on a perdu cette confiance en les autres, du coup, à l'intérieur de soi, il faut qu'on réussisse à cultiver cette confiance en soi. pour pouvoir justement après aller vers la confiance en les autres.

  • Pascale Boissier

    C'est d'autant plus intéressant que c'est quelque chose que décrit très bien Pablo Servigne dans un autre bouquin que je trouve absolument fondamental si vous ne l'avez pas encore lu je vous invite à le faire. qui s'appelle l'entraide de l'autre loi de la jungle, où justement, avec Gauthier-Chapelle, ils font la somme un petit peu des connaissances et de ce que les sciences et les sciences sociales savent de la coopération, et où la confiance et le sentiment de confiance et le cadre de sécurité dans lequel on opère pour la coopération est essentiel. Et effectivement, lui, il parle de la réciprocité directe avec les gens qu'on connaît. C'est effectivement... Plus facile de savoir à qui on a affaire, ce sur quoi on peut compter, le fait qu'on est dans ces logiques réciproques aussi, quand on fait des choses les uns pour les autres. Qu'est-ce qui se passe quand c'est avec des gens qu'on ne connaît plus ? Là, il y a d'autres mécaniques qui se mettent en place. Et puis, ce qui prend le relais au niveau global de nos sociétés, c'est la qualité de nos institutions, et c'est la qualité des règles de société qui nous régissent. Et qu'effectivement, quand elles, et je pense que c'est ce qui se passe en ce moment, quand ces conditions ne sont pas susceptibles de créer de la confiance dans les citoyens, la confiance en eux-mêmes, dans leurs propres capacités, la confiance dans le système, la confiance dans les règles du jeu avec lesquelles on joue, c'est évident que c'est très très compliqué de pouvoir faire ensemble. Et effectivement, c'est ce qui sans doute met à mal... aujourd'hui les comportements que l'on lui qualifie de pro-sociaux et notre capacité à pouvoir faire avec les autres sereinement.

  • Bérénice d'Holomea

    Et justement je trouve que du coup ça fait une bonne transition avec ton projet. Toi tu accompagnes aussi des collectifs à coopérer et notamment des collectifs à coopérer entre eux j'ai envie de dire, voilà, entre plusieurs collectifs différents. Et je pense que cette notion d'entraide et de confiance ça doit être un peu au cœur des enjeux aussi. Pour réussir à faire coopérer des entreprises peut-être concurrentes ou des collectivités avec d'autres entreprises, est-ce que tu pourrais nous raconter un petit peu comment ça se passe ? Quels sont tes enjeux ?

  • Pascale Boissier

    Alors c'est vrai que la coopération, on y travaille beaucoup au sein de l'entreprise. La question fondamentale aujourd'hui, elle est comment des entreprises peuvent coopérer entre elles pour arriver à relever des défis qu'elles ne pourront pas relever toutes seules. Et que sortir du paradigme de l'impact individuel, alors aujourd'hui on est encore beaucoup là-dessus, les entreprises travaillent pour certaines, pas toutes, à changer leurs pratiques, à réduire leur impact, mais il y a un certain nombre de choses qu'elles ne pourront pas faire seules, qu'elles devront faire parfois avec leurs concurrents, qu'elles devront faire avec d'autres entreprises dans d'autres secteurs d'activité aussi. Et un monde économique en mouvement, c'est effectivement des entreprises qui coopèrent. entre elles, et moi ça m'intéresse beaucoup de travailler là-dessus.

  • Bérénice d'Holomea

    Est-ce que tu as un exemple de sujet qu'une entreprise ne peut pas forcément réussir seule et qui peut être résolue avec d'autres parties prenantes ?

  • Pascale Boissier

    Si on prend seulement la question climatique, par exemple, nous on travaille par exemple dans l'industrie du tourisme et dans l'hôtellerie, par exemple, dont on sait dans le tourisme que 80% de l'impact... carbone, c'est le transport. C'est la manière dont on va et dont on repart des lieux touristiques, que ce soit des sites, que ce soit des hôtels. On peut bien imaginer que sur cette question des mobilités, une entreprise hôtelière ne va pas vraiment pouvoir faire toute seule pour résoudre la problématique de comment on arrive sur ces sites, par exemple. Nous, on travaille pour un réseau de thalassothérapie, par exemple, qui est situé sur des littoraux un peu excentrés. Aujourd'hui, on y arrive essentiellement en voiture. Demain, pour pouvoir y arriver par d'autres moyens, c'est évident qu'il y a de la collaboration avec les collectivités territoriales, avec les acteurs de transports locaux, avec d'autres entreprises qui peuvent être aussi concernées et qui devraient pouvoir bénéficier de tout ça. Typiquement, les mobilités sont un exemple très concret sur lequel on ne peut pas faire tout seul.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, et non seulement il y a une coopération inter... entre les collectivités, les entreprises, même les particuliers finalement qui sont consommateurs de ce service-là. Et en plus, du coup, il y a aussi une coopération interfilière. Mobilité, c'est un sujet, c'est toute une filière avec énormément d'acteurs. Et j'imagine que l'hôtellerie aussi. Et c'est des mondes qui sont totalement différents. Donc, il y a besoin peut-être aussi de personnes qui font la traduction, le lien en fait entre ces deux mondes qui ont... Des vocabulaires assez différents, j'imagine.

  • Pascale Boissier

    C'est évident que la question des interfaces, comme dans le vivant d'ailleurs, les interfaces entre des écosystèmes, ça devient vital de se dire comment on arrive déjà à se parler, comment on arrive à dialoguer, c'est un premier niveau. Comment on arrive à se comprendre, c'est déjà un autre niveau. Et puis comment on arrive à faire ensemble. Alors là, on est vraiment au cœur des gros défis de la coopération multipartie prenante auxquels sont confrontés aujourd'hui pas mal de territoires. Il y a des expérimentations un peu partout. Je pense à la Drôme notamment, un petit coucou à l'association Biovalet qui essaie justement de faire travailler des parties prenantes très différentes autour de problématiques communes. Là, on touche à des choses qui... culturellement sont très nouvelles, en tout cas dans nos sociétés actuelles. Et donc, ça implique effectivement une capacité de coopération étendue. Et là, la communication vient jouer aussi un rôle très important dans l'animation de ces écosystèmes qui travaillent ensemble. Après, l'enjeu de travailler entre entreprises aussi. Alors, ça peut être des liens liés à la proximité dans le cadre de la mobilité. forcément ça joue. On a des intérêts communs quand on est situé sur un même territoire, on a aussi des intérêts communs quand on est dans un même secteur d'activité et on a aussi des intérêts communs quand on essaie d'avancer sur tous ces sujets là. C'est le sens de notre engagement auprès d'un collectif d'entreprises, d'un mouvement d'entreprises qui s'appelle Bicorp, qui est né en fait... aux États-Unis en 2006 de la volonté à la fois de changer les pratiques du monde de l'entreprise et d'intégrer les questions environnementales et sociales dans les pratiques et les modèles des entreprises, mais aussi de changer les règles du jeu économique et la manière dont le système fonctionne, un système qui est aujourd'hui essentiellement actionnarial, puisque c'est aujourd'hui la partie prenante qui a la primauté. de passer à des logiques partenariales où l'ensemble des parties prenantes sont prises en compte dans la manière dont l'entreprise opère. Et en fait, on se rend compte que d'avoir cette volonté commune de progresser sur ces questions, d'être conscient qu'il faut dépasser l'impact individuel pour de l'impact collectif, ça crée un mouvement d'entreprises qui sont prêtes à travailler ensemble, très concrètement sur des thématiques... précises sur des problématiques sectorielles aussi qu'elles ont à relever ensemble et de sortir de la compétition pure pour aller vers des nouvelles logiques de travail en commun. Et ça, c'est très enthousiasmant.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, j'imagine. Ça doit être assez satisfaisant et enthousiasmant d'être auprès d'entreprises qui ont une volonté de s'engager. et qui ont cette volonté de faire collectif autour de sujets. Moi, du coup, j'étais pendant un petit moment au Cébios et je travaillais notamment avec le Cosmimétiques Group, qui rassemble plusieurs acteurs des cosmétiques en France, qui sont concurrents ou clients-fournisseurs. Et c'était extrêmement intéressant d'animer ce groupe-là. En plus, souvent, ils ont travaillé ensemble à certains moments de leur carrière dans les mêmes entreprises. et de les voir se retrouver et de se dire ouais là on sent que le biomimétisme ça peut avoir un impact sur des enjeux communs, des enjeux concurrentiels et non concurrentiels et du coup comment on fait, comment on montre aussi que c'est des sujets qui nous importent et qu'on a cet engagement là et que ça nous tient à coeur et qu'on le fait ensemble et c'est super intéressant de voir qu'il y a vraiment cette volonté aussi de de montrer presque l'exemple, en toute humilité, mais de montrer que c'est possible et que finalement, ce modèle-là, très structuré, filière, entreprise, etc., peut aussi fonctionner en logique partenariale et en logique au moins de réflexion commune. Après, comment ça va s'incarner dans l'entreprise, chacun aura sa manière de le faire. Mais au moins sur les grandes lignes, de réfléchir et d'être dans une cohérence, c'est extrêmement intéressant, je trouve.

  • Pascale Boissier

    C'est intéressant que ce soit le monde de la cosmétique. Je ne savais pas qu'il y avait ce type de coalition côté monde du biomimétisme. Mais par exemple, dans Bicorp, la plus grande coalition sectorielle qui existe aujourd'hui dans le mouvement, c'est la Beauty Coalition. C'est une coalition des acteurs du monde de la cosmétique et de la beauté, où il y a une soixantaine d'entreprises Bicorp. au niveau international, qui ont décidé de pouvoir réfléchir et œuvrer ensemble sur un certain nombre de sujets qui ont trait au secteur. Alors pourquoi le monde de la cosmétique et de la beauté ? Alors ils sont dépendants, ils ont beaucoup de dépendance à nos problématiques actuelles.

  • Bérénice d'Holomea

    Ils sont beaucoup dans l'innovation aussi. C'est vrai que je pense que c'est un monde où la R&D a beaucoup d'importance.

  • Pascale Boissier

    Où la R&D a beaucoup d'importance et où effectivement le... Le réflexe de pouvoir s'entrenourrir, s'entranspirer, etc. est peut-être un tout petit peu plus présent que dans d'autres secteurs d'activité très très habitués à... à fonctionner de manière beaucoup plus silotée.

  • Bérénice d'Holomea

    Et donc toi, tu travailles aux côtés de Bicorp, c'est bien ça, pour accompagner des entreprises engagées sur des sujets de coopération, c'est ça ? Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus ?

  • Pascale Boissier

    Alors, c'est plus spécifique que ça, même si on va en parler, la coopération joue un rôle important. Moi, j'accompagne depuis la création de l'association B lab France les équipes sur tous les sujets de communication. Et c'est vrai que très rapidement, les sujets de communication, ça a beaucoup à voir avec l'animation de la communauté, avec la manière de favoriser les synergies, avec la manière d'embarquer des bicorps dans des expériences communes. Et c'est vrai que depuis l'année dernière, notamment avec Louise Seguin, que je salue, et Sarah Serange, la responsable communauté de B corps, a été mise en place une initiative sur le Festival Agir pour le Vivant, qui est un festival à Arles qui se tient chaque année fin août et qui agrège un écosystème très très riche de scientifiques, de chercheurs, de penseurs, d'activistes, d'entreprises aussi, même si le monde économique est un tout petit peu moins présent, mais c'est ce qui nous a intéressés aussi. Et l'idée de se dire sur ces questions du vivant, qui aujourd'hui sont complexes à embarquer, dans le monde de l'entreprise, parce qu'il y a un concept pareil, comment on embarque une question dans le monde de l'entreprise. Ça peut être vu à l'aune 2, on va s'occuper de notre impact biodiversité, on va se former à ces questions, on va comprendre nos dépendances aux vivants, parce que maintenant on se rend compte que tout ça présente des risques aussi pour beaucoup d'activités. Mais comment, globalement, on prend de la hauteur et on fait un pas de côté sur ces questions ? en tant qu'entreprise, et on le fait avec d'autres, et on décide ensemble de pouvoir non seulement apprendre, mais pouvoir aussi partager sur ces questions, et puis essayer de se mettre en action de la manière la plus cohérente possible. Donc ça, c'est un exemple concret de comment, progressivement, on pose les petites graines d'actions collectives, de coalitions sur un certain nombre de sujets. Et pour nous, ça passe par ces moments où on peut se retrouver, encore une fois, apprendre ensemble. Et là, je rejoins la logique d'Eloi Laurent qui dit que finalement, la coopération, l'intention est de savoir. Je trouve qu'il y a quelque chose de très fort là-dedans. Mais on est aussi dans un moment où il faut faire. Alors, il y a l'injonction à faire, on peut la questionner, mais il y a quand même des choses qu'on doit mettre en place et faire. Et les entreprises ont cette forte capacité à faire. C'est peut-être même l'un des acteurs de la société qui est peut-être l'un des mieux armés pour pouvoir faire, apporter des solutions et proposer des choses concrètes qui nous permettent de changer de mode de vie, de pratiques, etc. Donc voilà, mettre tous ces acteurs autour de la table. L'année dernière, on était une douzaine d'entreprises qui se sont mobilisées. Et cette année, on le fait sur un format plus apprenant, autour d'une idée de B-Université. Encore une fois, apprendre ensemble, co-apprendre, ça fait partie des clés pour pouvoir coopérer. Et on réitère l'expérience cette année, fin août à Arles.

  • Bérénice d'Holomea

    Et du coup, en quoi ça consiste la B-Université ?

  • Pascale Boissier

    Alors la B-Université, c'est trois choses. La première, c'est aller aussi s'ouvrir un peu les chakras. le cœur, l'esprit, auprès de gens qui réfléchissent à ces questions, qui expérimentent, qui ont d'autres visions du monde et d'autres points de vue. Parce que le monde économique, parfois, on peut manquer de diversité et de pluralisme dans les points de vue. Donc ça, c'est un point important. Le deuxième, c'est de pouvoir approfondir, au contact d'experts, un certain nombre de sujets. Cette année... On aimerait aller plus loin sur les questions d'écologie du travail. Ça fait partie aussi des thématiques autour du vivant. La dimension sociale est importante. Ou d'un grand mot du moment, qui est celui de la régénération, par exemple. Comment on peut approfondir ces questions ? Et puis, enfin, comment on arrive à faire alliance ? Donc, ce sera l'occasion pour des bicorps d'être déjà entre bicorps, mais aussi d'aller rencontrer... des gens qui œuvrent dans d'autres pays, notamment cette année, des rencontres avec nos homologues d'Amérique latine, puisque la Colombie est très présente à Agir pour le vivant, ils ont une édition à Medellín. Donc de rencontrer à la fois des acteurs qui œuvrent dans ce sens ailleurs dans le monde et aussi sur le territoire, puisque sur le pays d'Arles, il se passe aussi beaucoup de choses. Donc de faire cette connexion entre le local, le territorial et l'international. Donc c'est un programme... qui promet de nous faire vivre plein de choses géniales. On a hâte.

  • Bérénice d'Holomea

    C'est génial d'avoir à la fois le côté très local et en même temps ce côté presque inspiration de comment ça se fait ailleurs. Et finalement, je pense que le but, ce n'est pas de faire la même chose, mais c'est de se dire qu'est-ce qu'on peut ramener, quelles sont nos contraintes communes, là cet enjeu, comment ils ont répondu. Et du coup, ce métissage finalement de solutions, c'est ça qui crée la richesse et la pertinence d'une solution, j'ai l'impression.

  • Pascale Boissier

    En tout cas, créer des liens, créer des ponts, croiser des regards, des expériences, alors on le sait, c'est fondamental. Après, il faut prendre le temps pour le faire. Et ça, encore une fois, je reviens aux spécificités du monde économique, c'est parfois compliqué de pouvoir mettre le nez dehors, de pouvoir prendre du temps pour faire tout ça. On n'est pas dans des systèmes qui permettent de le faire. On est souvent dans des entreprises, en ce moment particulièrement dans un contexte un peu tendu sur le plan économique, social et géopolitique, où prendre ce temps du recul, de la reliance avec d'autres, de l'inspiration, d'aller voir autre chose, voire même de se mettre en jachère à certains moments. pour laisser émerger des choses, parce que malgré tout, d'être tout le temps dans le faire peut parfois nous couper d'un certain nombre de choses qui pourraient émerger si on leur laissait seulement le temps de venir, de pousser. Voilà, c'est vrai qu'on est dans des mondes, et notamment dans le monde des transitions aujourd'hui, de l'impact, ça prend des noms variés. dans quand même la volonté d'action, d'être très agissant et d'obtenir des résultats. Mais d'être agissant tout le temps, ça ne nous aide pas toujours. Donc de prendre le temps aussi de ne pas faire, pour nous c'est aussi une voie. Et c'est celle-là qu'on a envie aussi de faire expérimenter à des entreprises et des collaborateurs qui n'ont pas forcément l'habitude de le faire.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, de le laisser venir. C'est un sujet, ça. C'est pas facile.

  • Pascale Boissier

    Laisser venir et advenir, je pense que c'est un des trucs les plus difficiles qu'on ait à faire, à la fois individuellement, parce que je pense qu'on est tous concernés par cette difficulté aussi à faire confiance. On appelle ça faire confiance à la vie, faire confiance au destin. Chacun y mettra ce qu'il veut. Mais de laisser advenir et de se dire que... Alors, il y a des traditions où c'est très présent. notamment orientale, où le non-agir est une forme d'action. Mais elle vient nous confronter beaucoup culturellement, intellectuellement et même émotionnellement dans nos cultures à nous. Clairement, le non-agir ne fait pas vraiment partie de notre logiciel. Et pourtant, qu'est-ce qu'il peut être intéressant d'explorer ? Évidemment, rien ne s'exclut. Il ne s'agit pas d'arrêter d'agir, mais de se dire...... être toujours dans l'action, c'est toujours la clé, surtout face à ce qui nous attend.

  • Bérénice d'Holomea

    Surtout que je trouve que ça peut créer un sentiment de culpabilité aussi. Finalement, il y a des fois où on produit, puis juste après, on est un peu fatigué, on a moins d'idées, on sent qu'on a besoin de souffler. On peut se sentir finalement mal à l'aise et se dire mais je ne fais rien en ce moment, je ne suis pas productive, je ne suis pas productive Et ça peut créer de la peur, de l'angoisse. L'envie de combler, de se rajouter d'autres choses. Parce que d'être un peu plus lent, un peu plus détendu, un peu plus improductif, ça fait peur. On a peur de ne pas réussir à se remettre. Je ne sais pas de quoi on a peur, mais ça peut faire peur.

  • Pascale Boissier

    C'est intéressant de demander de quoi on a peur. Mais c'est vrai qu'on est dans nos sociétés dans une injonction absolument défastatrice à cet endroit-là. Oui, on est dans des cultures de la productivité, on est dans des cultures de la performance de manière générale. On parlait du monde économique, mais cette performance s'étend à tous les domaines. Même le développement personnel est devenu performatif d'une certaine manière. Même des pratiques qui ne nécessitent aucun résultat, je pense au yoga par exemple, c'est devenu aussi des résultats à atteindre et des niveaux à dépasser, etc. et qu'effectivement, cette peur de loisiveté dans nos sociétés, de la paresse, je ne vais pas refaire toute la liste de ce que pas mal de philosophes et d'auteurs d'ailleurs ont exploré. La question aujourd'hui, c'est comment, dans nos manières de faire, sur des sujets de transition, sur des sujets aussi complexes, sur la coopération, on arrive petit à petit à déconstruire ces logiques-là pour entrer dans autre chose. Alors, je te l'ai dit, j'étais avec eux, j'assistais à la conférence d'Olivier Hamand sur, justement, l'antidote occulte de la performance, qui était absolument ébouriffante, parce que d'un coup, de valoriser la sous-optimalité, de valoriser la lenteur, de valoriser l'incohérence, de valoriser l'inachevé, toutes ces notions qui sont tellement antinomiques avec notre mode. culturelle actuelle, d'un coup, il y a quelque chose qui vient à la fois nous bousculer et à la fois nous faire du bien. Je crois qu'on a tous cette aspiration à pouvoir articuler, équilibrer davantage les choses, y compris dans nos milieux de la transition et de l'engagement, même si je n'aime pas beaucoup ce mot. Parce qu'on le voit aujourd'hui, il peut y avoir beaucoup d'épuisement, il y a des burn-out, il y a des gens qui, dans cette recherche, encore une fois, qui est toujours dans le logiciel de la productivité, de la performance, il peut tout à fait s'appliquer à nos sujets de transition écologique et sociale. Et c'est ça aujourd'hui qu'on doit questionner. Mais ce n'est pas facile, effectivement.

  • Bérénice d'Holomea

    Je suis totalement d'accord. En plus, on parlait tout à l'heure d'innovation. Il y a un côté aussi où on essaye de sortir du cadre. d'emmener vers autre chose et où en fait des personnes qui auraient besoin de se faire convaincre demandent des résultats. Et donc c'est pas forcément possible. D'où cet épuisement aussi parce qu'on essaye de tirer vers quelque chose où peut-être il n'y en a pas encore des résultats ou qui ne sont pas encore vraiment observables, qui ne sont pas suffisants sur une ancienne logique, qui ne peuvent pas être observés avec les mêmes indicateurs. Et ça peut provoquer beaucoup de frustration et de colère je pense aussi. de se retrouver dans ces situations-là. Et puis, moi, ce que j'ai observé aussi, c'est que parfois, il y a un côté un peu sacrificiel. Comme je travaille pour la bonne cause, je fais des heures sans les compter. Peut-être que dans mon équipe, ça se passe mal, mais ce n'est pas grave parce qu'on travaille pour la bonne cause. Donc, il faut continuer. Et c'est tellement dommage. Et moi, ça me parle aussi de la coopération comme logique d'amour, parce que... Moi, je crois profondément que si on aime ce qu'on fait et qu'on est heureux dans ce qu'on fait, alors on va forcément produire des choses qui sont dans le sens d'une transition et d'un avenir qu'on a envie de faire advenir. Et oui, c'est vrai que ce côté sacrificiel, ça empêche finalement même, j'ai l'impression, de potentiels résultats peut-être d'avoir lieu, puisqu'il y a ce désengagement, il y a cette colère, il y a cette fatigue qui sont présentes et qui... qui en fait épuisent des personnes qui auraient l'envie profonde de s'investir.

  • Pascale Boissier

    Et je crois que tu as raison de le souligner, parce que je pense que l'intérêt général et nos problématiques n'excluent pas au contraire des problématiques d'exploitation, des problématiques de violence dans les relations et dans les rapports. Ma conviction, c'est que parce qu'on est toujours dans ce logiciel du résultat, donc le résultat... résultat qu'il y ait, que ce soit de changer le monde ou que ce soit de le conserver tel qu'il est, la mécanique elle est la même. Si en tout cas il n'y a pas d'attention portée à la manière dont on le fait, alors beaucoup de gens évoquent les questions d'écologie de la relation, d'écologie humaine etc. Moi c'est fondamental et d'ailleurs je fais partie des gens qui pensent que l'intention première c'est d'abord la qualité. des relations, des connexions et de la manière dont tu fais les choses. Parce que je fais partie des gens qui pensent que c'est à cette condition-là qu'on pourra aller vers le monde qu'on appelle de nos vœux, mais sans soin et sans attention portée à tout ça. Je crois qu'on n'a pas vraiment renversé la table dans la manière de faire. Et on reproduit, je crois que c'est ce que... peut faire parfois le monde de l'impact. Déjà, rien que ce mot, impact, Il peut être jugé positivement, justement, quand on parle d'impact positif. Mais pour moi, on n'est pas vraiment sortis du vieux logiciel économique de la performance. Donc, on peut faire de l'impact tout en étant violent dans les relations sociales. C'était Pierre Rabhi qui disait on peut manger bio, exploiter son prochain On peut décarboner en exploitant son prochain, on peut être des boîtes à impact tout en exploitant, on va dire, les personnes qui justement se donnent sans compter pour ces sujets-là. Pour l'anecdote, moi, la première fois que j'ai pris conscience de ça, c'est en discutant avec une personne d'un syndicat, d'un vieux syndicat, dont on se dit aujourd'hui, ils sont complètement... à la rue, etc., mais qui me racontait comment, au moment du Covid, des bonnes volontés avaient été récupérées sous forme d'exploitation pure et simple. Par exemple, des femmes qui faisaient des masques en tissu, qui au début le faisaient pour contribuer à la solidarité, à l'entraide qui s'est mise en place à ce moment-là. Mais très vite, c'est devenu des obligations, des heures à faire, des attentes sur le nombre de masques qu'il fallait faire. Et très vite, un système informel d'entraide est devenu un système d'exploitation de bénévoles qui fabriquaient à la chaîne ces masques en tissu, dont en plus, après, on s'est rendu compte qu'ils n'allaient pas forcément être utiles. Et donc, ces logiques d'exploitation, de violence sociale, ils ne sont malheureusement pas incompatibles avec la recherche d'un impact environnemental positif. Et c'est ça qu'il va falloir arriver à réconcilier aujourd'hui.

  • Bérénice d'Holomea

    Et donc justement, tu parles de soins, d'attention portée, de qualité de relation. Comment est-ce que tu crées ce cadre ou ce climat quand tu as justement des acteurs qui ne se connaissent pas ? qui ne travaillent pas du tout dans les mêmes domaines, et qui, peut-être même eux, en interne, n'ont peut-être pas forcément les réflexes de coopération. Comment est-ce que tu arrives à créer ce climat d'attention et de soins dans les relations ?

  • Pascale Boissier

    Je crois qu'il y a deux choses. La première, c'est le cadre de... Mais là, on revient à des fondamentaux sur la coopération. C'est le cadre de protection et de sécurité que tu mets en place. au sein duquel les échanges, les dialogues ou le travail ensemble peut se faire. S'il n'y a pas de cadre clair, s'il n'y a pas de confiance dans les personnes qui posent le cadre, c'est vrai que c'est très compliqué de pouvoir opérer. Ensuite, dans la qualité des relations qui peuvent se mettre en place, là, il faut faire avec là où en sont les gens. Et assumer aussi qu'il puisse y avoir... des émotions qu'on juge parfois négativement. Je pense que déjà, si on pouvait un peu moins connoter et juger nos émotions ou réactions socialement pas acceptées, on ferait peut-être un grand pas. Donc accepter la colère, accepter le conflit, accepter le désaccord, accepter parfois aussi qu'il y ait de la violence dans la manière d'exprimer les choses. Mais en revanche, de pouvoir petit à petit favoriser des modes de fonctionnement. Alors, comment on fait concrètement ? Alors, il y a déjà comment on incarne nous-mêmes les choses. Moi, je pense que ça commence par nous, évidemment. Tu parlais de confiance en soi. Je pense que c'est aussi notre capacité à nous déconstruire notre mode de relation, nos modes de communication. Et dans des groupes, dans des collectifs, d'arriver à pouvoir à la fois incarner ça du mieux qu'on peut, et c'est pas facile, et accepter aussi que ça marche pas toujours de manière apaisée, et que ça, on doit aussi faire avec. Et parfois, dans le non-apaisement, il y a aussi des choses utiles à prendre et qui peuvent nous aider à avancer. Je crois pas dans les collectifs... pacifié à 100%, je ne suis pas sûre. En revanche, dans une dynamique qui cherche à prendre soin des autres, je pense qu'on peut y arriver. C'est même essentiel, les conflits sont toujours le signe de besoins qui ne sont pas nourris. Et du coup, de comprendre ce qui n'est pas nourri, c'est déjà la première clé pour se dire comment on arrive à nourrir davantage. Alors, il y a ce qui est de notre responsabilité personnelle, dans notre capacité aussi à... à avoir conscience de nos besoins, notamment en interaction avec les autres, à savoir ce dont on a besoin, à savoir aussi comment en prendre soin, enfin prendre soin de soi, ça passe par là. Mais ce faisant, on le fait aussi pour les autres. Et un conflit est toujours l'expression de besoins, ça c'est très CNV, mais de besoins qui ne sont pas compris ou qui ne sont pas reconnus. Et oui, ça peut être très utile à un moment donné pour... pour pouvoir exprimer, dénouer des choses. On souhaiterait que ça ne passe pas forcément par le conflit pour arriver à se parler, à se comprendre. Mais parfois, c'est comme ça. Et on fait avec ce qui est vivant là. Et on l'accompagne au mieux. Parfois, ça marche. Parfois, ça ne marche pas. Mais c'est ça qui fait aussi l'intérêt de ces jeux collectifs. C'est qu'on apprend tout le temps sur soi et sur les autres. Après, il faut avoir envie. Et ça, pour le coup, qu'est-ce qui fait que l'envie est là ? Je ne suis pas persuadée qu'on donne envie. Je crois qu'il y a ce mythe aussi où on pourrait donner envie. Je pense que les flammes s'allument en chacun de manière très intime. C'est quelque chose qui relève vraiment de... très personnelles au fond, même si ça peut être stimulé par plein d'autres choses, mais je pense que ça vient vraiment de soi. De la même manière, pour des collectifs, pour moi, c'est jamais exogène. Il y a toujours quelque chose qui vient du corps collectif, quel qu'il soit, et puis il y a des moments où ça vient, et des moments où ça prend plus de temps pour l'accepter.

  • Bérénice d'Holomea

    Moi, je crois aussi beaucoup que ça vient par étapes. Des fois, ça vient, puis peut-être que ça repart. mais ça a nourri quelque chose. Et du coup, la fois d'après, et moi, là c'est plus un témoignage personnel, mais il y a des questions sur lesquelles j'ai beaucoup évolué, et ça m'a pris des années. Moi je ne crois pas au basculement du jour au lendemain. Je crois à des petits événements, des expériences, des vécus, des rencontres, des témoignages, des signes, peut-être qu'on a vu quelque part, un mot, une image, quelque chose. Et qui vont provoquer ce basculement ? Et moi, je trouve que regarder que ce basculement, c'est finalement exclure tout le chemin qui a été parcouru avant.

  • Pascale Boissier

    Je rejoins complètement. Moi, je pense que tout ce tissage de choses, alors on n'a pas toujours le recul pour se rendre compte de ce qui est en train de se passer, mais c'est là où la notion de confiance revient. Moi, je suis quelqu'un qui a... Après, j'ai eu beaucoup de chances dans ma vie. pour pouvoir avoir cette confiance dans la vie. Mais la confiance, les choses se tissent, tu ne les comprends pas forcément, tu ne vois pas forcément où ça va. Mais à un moment donné, il y a quelque chose, un déclic, une bascule. Je suis comme toi, mais je ne crois pas aux grandes bascules. C'est forcément l'alliance de plein de dynamiques et de plein de choses qui, à un moment donné, pouf, s'éclairent, du sens où nous font passer à l'action sur quelque chose. Et au fond, c'est très beau et réconfortant de se dire qu'on n'a pas besoin comme ça de grandes épiphanies dans nos vies. D'ailleurs, merci de me le rappeler là, parce que je crois qu'on est tous dans des moments où on a besoin que des choses se passent. Et on ne les voit pas forcément arriver, mais c'est de faire confiance à des process invisibles dans lesquels on est partie prenante avec d'autres. Et de se dire que le sens de tout ça se révélera. petit à petit ou pas complètement. J'aime bien cette part de mystère aussi dans ce qui se joue. Mais c'est important de se le rappeler.

  • Bérénice d'Holomea

    Moi, ça me rassure beaucoup de me dire que des fois, on est un peu dans l'attente. On se dit en ce moment, il ne se passe pas grand-chose. Et moi, souvent, je me dis si, mais c'est juste que tu ne le sais pas encore. Et j'aime bien me dire ça. Ça me rassure. Je me dis, mais si, mais dans un an, deux ans, trois ans, je regarderai ce moment et je me dirai c'est là, en fait, qu'il s'est dépassé des choses et que ça... Ça a nourri l'action ou la chose que j'attendais. Et je pense que ça s'applique dans le monde personnel, professionnel. On ne sait pas quand les choses vont se dénouer. Et voilà, on rejoint encore cette innovation et cette inconnue et cette confiance. Ça a un côté angoissant, mais finalement, assez chouette aussi, assez rassurante de se dire que tout peut encore arriver.

  • Pascale Boissier

    Je pense que cette... peur ou ses angoisses ou ses appréhensions, c'est des moteurs aussi. Je crois que tout concourt à un moment donné tout à sa place et à son rôle. Alors on n'a pas envie de se laisser submerger par l'angoisse, même si parfois ça peut arriver. Mais en même temps, dans la conscience que quelque chose se lit, se relie, qu'on n'est pas forcément à la bonne échelle pour voir ce qui se passe, qu'on n'a pas forcément le recul. Ça vaut pour nos vies, comme tu disais, peut-être dans trois ans, on se dira, tiens, en fait, c'était ce moment-là. Mais ça vaut aussi pour nos sociétés. Et dans 20 ans, on se dira, mais si, mais là, cette année hyper relou 2024, il y avait déjà ça qui était à l'œuvre et il y a ça qui était en train de... de monter. Ça nous aide à aussi apparaisser trop le nez dans le court terme qui peut être effectivement un peu effrayant pour essayer de voir un peu plus large. Ce que disait Olivier Hamann, ça fait du bien d'entendre ça, c'est que lui il parle des marges et il prend l'exemple des murmurations, tu sais ces danses des oiseaux qui évoluent dans le ciel en groupe de manière totalement fluide coordonnée. Et en fait, il expliquait que c'est les oiseaux qui sont aux marges, qui sont sur les bordures, qui font passer, qui gèrent en fait l'information qui circule dans le groupe. Ce n'est pas le cœur du système. Et pour lui, les marges ont déjà basculé. Alors quand on est au cœur du système, on ne voit pas forcément que les marges ont basculé. Quand on est à la marge, on se dit mais le cœur du système, il est toujours comme avant. Donc où qu'on soit, on a peut-être... pas exactement la meilleure vue sur ce qui se passe, donc seul le temps nous le dira.

  • Bérénice d'Holomea

    Oui, je suis tout à fait d'accord. Merci beaucoup pour cet échange, pour ce partage.

  • Pascale Boissier

    Merci à toi Bérénice. Indépendamment de ce qu'on arrivera ou pas à réaliser tous ensemble, la qualité de ces moments et de ces conversations elle est essentielle, donc merci beaucoup pour cette invitation.

  • Bérénice d'Holomea

    La définition de Pascal concernant la coopération, le vient de sa lecture de l'ouvrage Coopérer et se faire confiance écrit par Éloi Laurent. Pour Pascal, la coopération ne réside pas seulement dans l'action vers un but commun, mais elle serait plutôt mue par une dynamique d'amour et par une envie de savoir plutôt que de faire. Donc coopérer n'est pas seulement faire ensemble, mais c'est aussi s'accorder sur le sens et la manière dont on le fait. Un des ingrédients qui est essentiel à la coopération qu'on a identifié dans la discussion avec Pascal, c'est la confiance. à la fois la confiance en soi et aussi la confiance dans le groupe, dans le collectif. Et en fait, le cadre de sécurité qu'on va instaurer et le climat de confiance qui va être présent dans le collectif, ce sont deux choses qui sont absolument essentielles à cette coopération. Et on sait qu'il est plus facile de faire confiance lorsqu'on connaît une personne, une situation. Et donc, dans le cas des accompagnements de Pascal, qui sont en général des coopérations multiparties prenantes entre plusieurs organisations de types différents, et aussi parfois qui travaillent dans des secteurs d'activité distincts. Donc là, la question, c'est finalement, comme ces interlocuteurs finalement ne se connaissent pas, n'ont pas connaissance des enjeux de chacun, comment on crée ce climat de confiance ? Comment faire pour que ces organisations, elles arrivent déjà à dialoguer, parce que parfois le vocabulaire peut être différent, mais aussi à se comprendre et à faire ensemble, à agir ensemble autour d'enjeux communs ? Pascal, dans ces activités d'accompagnement, Elle travaille justement sur ces enjeux de coopération entre plusieurs organisations. Et elle le fait aussi de par son engagement auprès de B corp et de B lab France. Et donc, Pascal est notamment impliqué dans l'association Bilab France au niveau de la communication, qui est liée aussi avec l'animation de communautés, qui sont en fait des entreprises qui sont engagées dans la démarche B corp et qui n'ont pas forcément les mêmes secteurs d'activité, les mêmes enjeux. Et donc, c'est pour ça aussi, dans ce cadre-là, Pascal est aussi... facilitatrice de synergie, de liens et de coopération dans des organisations diverses. Et ça, en fait, ça peut passer par différents moyens. Et un des moyens de faire cette animation-là, c'est justement d'organiser des événements. Comme par exemple, elle nous parle du festival Agir pour le Vivant qui a lieu la dernière semaine d'août à Arles. Et donc, ce festival, c'est vraiment une opportunité pour les entreprises de créer une dynamique collective. coalition aussi, à la fois d'entreprises et aussi de personnes qui ont envie de s'investir sur le sujet. Ce genre d'événement et ce genre de rassemblement, c'est vraiment une occasion pour sortir aussi de cette culture très agissante qui est très présente dans notre société et qui est aussi présente dans les engagements on va dire de transition. Il y a toujours un enjeu à faire, à montrer, à avoir des résultats et en fait on se laisse prendre finalement dans cette culture-là qu'on essaye justement de changer. Et donc, participer à des événements comme ça, où en fait, le but c'est vraiment d'aller créer du lien, d'aller s'inspirer, d'aller voir ce qui se fait ailleurs, d'exprimer peut-être sa créativité. C'est un moyen de laisser venir, de laisser advenir, de laisser émerger et de pas tout le temps être dans le faire, mais justement être dans cette dynamique d'amour dont parlait Pascal au début pour aller créer des liens et finalement prendre ce temps-là aussi pour poser un petit peu ses réflexions et ses actions. Donc justement voilà, ce modèle de productivité et de performance qu'on essaye de déconstruire parfois quand on s'engage dans des entreprises à mission, dans... des associations, dans des organisations, dans le sens de la transition écologique et sociale. On essaye vraiment de sortir de ce modèle-là qui a des externalités extrêmement négatives, mais en fait, on remarque que ce modèle-là, il s'applique toujours. Et c'est intéressant de comprendre pourquoi, parce qu'en fait, on essaye de changer quelque chose et finalement, ça devient quelque chose qui est appliqué à nous-mêmes. Et ça, c'est aussi lié à la manière dont on s'organise, parce que si on ne change pas nos fonctionnements collectifs, en fait, on va répéter les anciens schémas Et on va produire exactement les mêmes externalités du stress, de l'épuisement, du désengagement, de la colère. C'est en allant créer des nouvelles interactions avec de l'attention, avec du soin qui est porté aux membres d'un collectif et aussi au collectif en lui-même, avec ce climat de confiance qu'on va pouvoir créer dans les collectifs. Et ça, ça va pouvoir permettre de générer un fonctionnement différent. Et ce fonctionnement différent va pouvoir soutenir une production qui est différente et qui est en lien avec la transition écologique et sociale. Ça, c'est une loi qui s'appelle la loi de Conway qui dit que ce qu'on produit ressemble à la manière dont on est organisé. Et donc forcément, si on essaye de produire autre chose, si on essaye de produire de nouveaux produits, de nouveaux fonctionnements, de nouveaux services en lien avec la transition, eh bien, on a besoin de modifier nos modes de fonctionnement aussi. Retrouvez les épisodes de l'affluence une fois par mois. Il forme un recueil de témoignages, de vécus liés aux transformations des pratiques qui vous permettra d'avoir des clés pour faire évoluer à votre échelle votre environnement professionnel. Pour ne rater aucun épisode et pour faire grandir ce podcast, vous pouvez en parler autour de vous, vous abonner sur votre plateforme d'écoute préférée et nous laisser des étoiles si vous nous écoutez depuis Spotify ou Apple Podcast. Merci pour votre écoute et à bientôt pour un nouvel épisode de la Fluence. Sous-titrage Société Radio-

Share

Embed

You may also like