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La Fluence - explorer la coopération

En quoi le vivant peut nous inspirer des modes de fonctionnement collectifs ? avec Irene Alvarez et Christine Ebadi

En quoi le vivant peut nous inspirer des modes de fonctionnement collectifs ? avec Irene Alvarez et Christine Ebadi

20min |11/06/2024
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En quoi le vivant peut nous inspirer des modes de fonctionnement collectifs ? avec Irene Alvarez et Christine Ebadi

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20min |11/06/2024
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Description

Aujourd’hui on enregistre un épisode à l’occasion de la Biomim’expo, un événement organisé pour NewCorp Conseil qui rassemble les acteurs et actrices du biomimétisme en France et qui a lieu les 11 et 12 juin 2024 au parc floral de Paris. 

Nous allons donc explorer la coopération mais sous l’angle du vivant et de la bioinspiration. Comment le vivant peut nous inspirer des modes de fonctionnement collectifs ?


Pour répondre à cette question, je suis en compagnie de deux invitées : 

  • Irene Alvarez, médiatrice nature-culture, ancienne directrice du Centre de Recherches sur les Ecosystèmes d’Altitude, le CREA Mont-Blanc, fondatrice d’Immersion Montagne et accompagnatrice en montagne. 

  • et Christine Ebadi, cofondatrice d’Holomea qui nous apporte son expertise sur la transformation organisationnelle et les collectifs.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous, je m'appelle Bérinice, je travaille chez Holoméa et je suis passionnée par la bio-inspiration et la manière dont fonctionnent les humains entre eux. Bienvenue sur La Fluence, le podcast qui explore la coopération. La Fluence, c'est une occasion de se poser des questions, d'explorer, de découvrir, d'apprendre et surtout de partager. Entre chaos et opportunités, explorons ensemble de nouvelles manières de construire les collectifs. Aujourd'hui on enregistre un épisode à l'occasion de la BiomimExpo, un événement organisé par NewCorp Conseil qui rassemble les acteurs et actrices du biomimétisme en France et qui a lieu les 11 et 12 juin 2024 au parc floral de Paris. Nous allons donc explorer la coopération mais sous l'angle du vivant et de la bio-inspiration. Comment le vivant peut nous inspirer des modes de fonctionnement collectif ? Pour répondre à cette question, je suis en compagnie de deux invités. Irène Alvarez, médiatrice Nature Culture, ancienne directrice du Centre de recherche sur les écosystèmes d'altitude Le Créa Montblanc, et fondatrice d'Immersion Montagne et accompagnatrice en montagne. Et je suis aussi accompagnée de Christine Lebadie, cofondatrice de l'OMEA, qui nous apporte son expertise sur la transformation organisationnelle et les collectifs. Bonjour Irène et Christine. On va commencer Irène par se présenter. Est-ce que tu peux nous parler du Créa Mont Blanc, d'Immersion Montagne et nous présenter un petit peu ce que tu fais ?

  • Speaker #1

    Bonjour Bérénice et bonjour à tous et à toutes. Je suis Irène Alvarez. J'ai créé Immersion Montagne il y a cinq ans. L'idée d'Immersion Montagne, c'est d'organiser des temps en nature pour se connecter de manière différente à la nature et pouvoir par la suite agir individuellement et collectivement à partir de ce qu'on ressent et ce qu'on apprend de la nature. Et j'ai aussi pendant dix ans co-dirigé le CREA Mont Blanc, qui est le Centre de Recherche sur les Écosystèmes d'Altitude, basé à Chamonix, et qui est une association qui mène à la fois de la recherche scientifique, mais en même temps, dans chacune de ces recherches, il y a une dimension sociétale, et donc de transmission des savoirs à travers la science participative, par exemple, ou différentes modalités de transmission de la science et de la démarche scientifique à différents publics.

  • Speaker #0

    Christine, est-ce que tu peux nous présenter Oloméa et nous expliquer en quoi le partenariat avec Le Créamont Blanc et Immersion Montagne fait partie des activités ?

  • Speaker #2

    Bonjour, je suis Christine Ebadi, j'ai cofondé Olomea. Olomea, c'est une agence de conseil qui accompagne la transformation des organisations. Notre particularité, c'est de nous inspirer des principes du vivant, dans nos pratiques et dans nos accompagnements, et nous aidons nos clients à faire évoluer leur modèle de fonctionnement vers plus d'engagement, de coopération, d'adaptabilité collective. Aujourd'hui, toutes les organisations ont des défis immenses à relever pour répondre, se développer dans le contexte de changements permanents des transitions écologiques et sociales. Or, le vivant se développe depuis 3,8 milliards d'années. Ces principes ont permis de s'adapter aux nombreuses perturbations. Et c'est dans ce cadre qu'on travaille avec Le Créamont Blanc et Immersion Montagne. C'est une alliance qui est un peu particulière. Chaque structure amène un regard assez différent, complémentaire, c'est hétérogène. Nous amenons la connaissance des organisations, des entreprises, des collectivités, des différents collectifs. Le Créamont Blanc amène toute la connaissance scientifique, l'observation des écosystèmes naturels, comment ils réagissent aux perturbations. quels sont les principes qui s'appliquent, est-ce qu'on coopère, est-ce qu'on est en compétition, comment on réagit. Et Immersion Montagne, comme l'a dit Irène, va amener toute cette dimension sensible de connexion, parce que ce n'est pas qu'avec la tête, on a vraiment une approche tête-coeur-corps, c'est comment je me connecte, comment ça me fait vivre autre chose, et quel impact ça a bien sûr d'abord sur moi, mais ensuite dans le collectif.

  • Speaker #0

    Justement, j'aimerais qu'on explore ensemble certains de ces principes, donc certains principes du vivant. En quoi est-ce que ça peut finalement nous apporter et nous aider dans nos collectifs ? Donc Irène, est-ce que tu aurais des exemples à nous partager d'espèces vivantes qui pourraient nous inspirer justement dans les collectifs ?

  • Speaker #1

    D'abord, je voudrais dire que tout part de l'émerveillement. que je peux avoir, mais que beaucoup de gens ont, à l'égard du vivant et de ses capacités d'adaptation à un milieu qui est sans cesse changeant. Et ça, c'est particulièrement vrai en montagne, où les contraintes sont assez fortes. Le premier exemple qui me vient en tête, c'est celui du silenacol, qui est une plante de haute altitude, qui peut vivre jusqu'à plus de 3000 m d'altitude, et qui a cette particularité, comme beaucoup de plantes de haute montagne, d'adopter une forme sphérique. On dit une forme en coussin. C'est une très belle plante avec des toutes petites fleurs roses, pleines de couleurs dans cette haute montagne. Et cette forme de sphère lui permet d'exposer très peu de surface à l'extérieur pour un très grand volume intérieur. Et de ce fait, elle crée une espèce de serre naturelle. Il fait beaucoup plus chaud à l'intérieur du coussin qu'à l'extérieur. et par cette simple forme géométrique, elle facilite l'implantation d'autres organismes dans son sein, à sa surface et à l'intérieur. Des exemples de facilitation dans des milieux sous contrainte, il y en a énormément. Nous, on appelle souvent, on peut appeler ça de la coopération, ça va jusqu'à la symbiose, mais déjà le fait que l'ingéniosité du vivant va permettre à d'autres vivants de mieux vivre, en tous les cas de s'implanter et de se développer dans des endroits où on ne les attend pas.

  • Speaker #0

    De cet exemple de forme géométrique qui favorise l'implantation d'autres organismes, en quoi est-ce que ça peut être quelque chose qu'on peut ramener dans le domaine des collectifs et qu'est-ce que ça peut nous inspirer dans nos manières de fonctionner ensemble ?

  • Speaker #2

    En tout cas, moi, ce que je comprends de cette plante, c'est qu'il y a vraiment une dimension collective, une dimension de protection collective, où on va mettre certaines espèces ensemble. Je sais qu'il y a d'autres espèces qui sont à l'intérieur, même qui sont accueillies par le silène. Évidemment, ça vient sur, finalement, qu'est-ce que c'est qu'un collectif dans une organisation ? Jusqu'à finalement relativement récemment, une organisation s'était faite pour être efficace, s'était faite pour dérouler, pour produire. Chaque individu est attendu dans une forme de performance. On se rend bien compte que dans le contexte aujourd'hui, chaque individu ne peut pas grand-chose. On est un peu démuni sur pas mal de sujets et on a besoin de coopérer. Une des définitions qu'on peut donner de la coopération, c'est prendre en charge les contraintes de l'autre. C'est de se dire qu'on a un destin commun, dans le cas de la Silène, c'est de survivre dans des situations difficiles, sous contraintes, en altitude, comme l'a dit Irène. Finalement, nos organisations sont soumises aux transitions, aux grandes transformations, les chocs répétés qu'on subit depuis quelques années. Et cette question de la coopération, c'est finalement comment on arrive à être... ensemble et à s'adapter collectivement à tout ce qui nous arrive. Pour moi, un des piliers des réponses, et dont le vivant est une des preuves, c'est vraiment cette question de la coopération, c'est construire des organisations réellement coopératives, ce qui remet en question beaucoup des règles du jeu, d'évaluation et de définition de la performance.

  • Speaker #0

    Il y a même une coopération intercollectif, parce que là, dans le cas de la silène, elle favorise l'implantation d'autres organismes. Il y a peut-être une notion aussi de coopération multiacteur ?

  • Speaker #1

    Dans le cadre du silène, il y a d'abord une coopération, pour moi en tous les cas, avec le milieu, c'est-à-dire le climat. Je vais me ramasser au sol plutôt que de pousser à deux mètres de haut pour bénéficier en fait... du peu de chaleur qu'il y a au sol. Donc il y a une coopération avec le milieu. Mais il y a aussi effectivement des micro-organismes, des insectes, des plantes, qui vont pouvoir s'implanter dans ce sileine. Mais ce que je voudrais préciser aussi, c'est qu'il y a une grosse différence entre ce dont je peux témoigner des milieux naturels et ce dont témoigne Christine des milieux humains, c'est que le sileine n'a pas l'intention d'accueillir tous ces organismes. C'est... le vivant co-évolue, tous ces organismes co-évoluent pour chacun trouver leur niche écologique. Et il y a des interactions qui sont positives pour l'ensemble des partenaires et juste des interactions de facilitation sans aucune intention de collaborer. Voilà, donc ça c'est placer à la fois la beauté de ce qui se passe dans le vivant et en même temps le fait que la bio-inspiration est une inspiration. qu'il y a d'autres choses qui se jouent dans les collectifs humains aussi.

  • Speaker #0

    Effectivement, c'est important de le préciser parce que souvent, on a tendance à personnifier le vivant ou la nature. Et effectivement, il n'y a pas d'intention d'évoluer depuis 3,8 milliards d'années, mais les choses se sont faites ainsi. Et il y a différentes stratégies qui ont été mises en œuvre, notamment pour s'adapter à des conditions climatiques ou survivre dans des milieux extrêmes. Et c'est de ça qu'on peut s'inspirer. Mais effectivement... Voilà, ça reste des principes, des principes abstraits, théoriques, qu'il nous faut, nous, après, hybrider avec ce qu'on vit et nos contraintes à nous, entre humains, dans le réel, dans notre monde qui existe.

  • Speaker #2

    Et pour faire écho à cette question de l'hybridation et de l'inspiration des principes du vivant, en fait, effectivement, la question que, dans les organisations, finalement, on se pose, c'est... Est-ce qu'il y a une pertinence de l'organisation en regard du contexte ? Un petit peu, est-ce que, comme le Silène, est-ce qu'il est finalement pertinent là où il est ? Et nous, on a cette même question. Il n'y a pas de réponse absolue. Il n'y a pas la meilleure organisation du monde, mais il y a celle qui est la plus adaptée au contexte et ce qu'on est en train de vivre. et c'est là où les caractéristiques de ce que le vivant a déployé sont intéressantes pour nous. Et c'est cette question du changement très brutal qu'on peut vivre par moments, la vitesse du changement, la capacité à se reconstruire, à démarrer autrement, à peut-être développer des nouvelles niches. Et on a cette question de l'adaptabilité, c'est pour ça que cette inspiration devient de plus en plus pertinente aujourd'hui pour nos organisations.

  • Speaker #0

    En tout cas, moi, ça me semble extrêmement intéressant justement d'aller voir un petit peu comment ça se passe dans les écosystèmes d'altitude. Alors, Irène, est-ce que tu as un deuxième exemple de principe dans le vivant ou d'exemple de situation qui existe dans le vivant qui peuvent nous inspirer sur nos modes de fonctionnement collectifs ?

  • Speaker #1

    Il y a un autre principe qui me vient en tête qui est celui de la diversité. C'est-à-dire que... Dans la nature, un système est résilient lorsqu'il est divers, c'est-à-dire lorsqu'il y a suffisamment de réponses potentielles à un choc extérieur. Et l'endroit où on trouve le plus de diversité, en montagne notamment, c'est dans ce qu'on appelle les marges. Et ces marges, chaque espèce a une zone dans laquelle elle se sent particulièrement... confortable pour se développer, où tous ses besoins sont couverts. Et puis, légèrement au-dessus de cette zone ou en dessous de cette zone, on continue à observer des individus de cette espèce qui sont dans une zone beaucoup moins confortable pour eux, mais qui continuent à se développer. Et on pourrait les appeler des marginaux, puisqu'ils vivent dans les marges. Et la plupart du temps, effectivement, ces stratégies sont vouées à l'échec, puisque les conditions ne sont pas suffisantes pour qu'ils s'installent. mais dans des conditions où, par exemple, le climat change actuellement, les conditions deviennent plus favorables en altitude, on voit se développer des arbres au marge de la forêt, et ce sont ces arbres qui, potentiellement, vont donner les graines de la forêt de demain. Et donc, ça nous interpelle sur ce catalogue, cette diversité du catalogue des réponses possibles, et la place des marginaux dans le maintien de l'écosystème.

  • Speaker #0

    Et du coup, Christine, qu'est-ce qu'on pourrait abstraire de cet exemple-là qu'on pourrait ensuite ramener dans le domaine des organisations et des collectifs ?

  • Speaker #2

    Dans la question de la diversité, de la marginalité, de l'innovation, ce sont des grands enjeux pour les organisations. Pourquoi ? Parce que nos organisations, elles sont issues de la pensée industrielle. Elles visent la standardisation, l'homogénéisation pour être capables de répéter certaines actions et qui, dans le volume, vont donner des produits, des services que l'entreprise va vendre. Et le gros sujet que ça soulève, c'est que cette question de la répétition marche bien tant que l'écosystème est stable, tant que la demande est toujours la même, c'est pertinent. Dans un contexte où il y a beaucoup de contraintes, beaucoup de changements, beaucoup de transformations, quand un choc ou une grosse perturbation arrive, on n'est pas prêt, on n'est pas capable de répondre, parce qu'on a ultra-optimisé une chaîne, on a plutôt recruté des gens qui étaient plutôt similaires, ça vient faire écho à la question de la diversité. Quant aux marginaux, si on peut les nommer comme ça, les personnes qui fonctionnent de façon atypique, la plupart des organisations, peut-être pas toutes, mais la plupart ont du mal à les intégrer dans... les collectifs, elles sont plutôt tenues à l'écart. Donc il y a un énorme enjeu, Irène a parlé de catalogue d'adaptation, il y a un énorme enjeu pour les organisations d'avoir des catalogues variés, d'avoir des catalogues diversifiés, et donc ça se base forcément sur des personnes aux modes de fonctionnement différents, avec des idées différentes, et ça fait écho à, finalement, comment le collectif arrive à les intégrer, comment il arrive à les faire coopérer. C'est... complètement pertinent à notre échelle aujourd'hui dans notre contexte.

  • Speaker #0

    Merci déjà pour ce partage sur ces principes. Je trouve qu'on comprend bien en quoi ça peut être abstrait, puis ramené dans le domaine des collectifs et des organisations. Concrètement, en tant que collectif, comment on fait aujourd'hui si on veut appliquer ces principes-là ?

  • Speaker #2

    Déjà, il y a une première chose, quand on a commencé à travailler ensemble, cette triple alliance, c'est cette question tête-coeur-corps. En fait... dans l'organisation classique, et surtout inviter la tête, finalement, très peu le corps et le cœur. Et on se rend compte que pour amener des transformations, fonctionner autrement, se reconnecter finalement aux vivants qui nous entourent et en prendre soin, parce que c'est bien une question de soin, finalement, dont on parle. on a besoin de le vivre, on a besoin de l'expérimenter. Et c'est vraiment ce qui nous a donné l'idée, avec Immersion Montagne et le Créamont Blanc, finalement, d'emmener les gens, les équipes, en nature, à l'extérieur, à la fois pour avoir cette reliance, cette connexion, cette observation. et cette hybridation, j'allais dire, in situ. Parce que c'est des mots, là, ce qu'on partage, il faut le vivre. Il y a quelque chose de l'ordre de l'émotionnel, du sensible, qui me semble indispensable. Moi-même, je suis passée par ça, c'est parce que j'ai eu cette expérience que la suite s'est finalement enclenchée.

  • Speaker #1

    Je pense qu'effectivement, le fait de vivre ces principes, qu'ils soient nommés ou pas, mais simplement de vivre l'écosystème et de retrouver notre appartenance aux vivants, en tant qu'individu et en tant que collectif, me semble essentiel, à la fois par les sens et évidemment par la science.

  • Speaker #0

    Ça fait écho, je trouve, à la question de l'émerveillement dont tu parlais au début de l'épisode, de retrouver peut-être aussi... l'émerveillement de choses simples, voir des petites fleurs roses, voir des animaux tout le matin, d'avoir aussi peut-être cette ouverture sur ce qui se passe autour de nous et pour pouvoir à nouveau être dans une logique d'émerveillement vraiment face à la beauté de ce qui nous entoure finalement.

  • Speaker #2

    Toutes nos réflexions autour de l'organisation bio-inspirée, des principes du vivant, de l'émerveillement, C'est aussi là, et peut-être en premier, pour alimenter ce qu'on appelle communément les transitions écologiques et sociales. Alors pourquoi nous, en fait, on s'intéresse vraiment à cette question, cette dimension collective ? La transition écologique et sociale, c'est un immense projet collectif, complexe, qui demande beaucoup, beaucoup de coopération. C'est là où la question des organisations bio-inspirées, des organisations qui arrivent à s'inscrire dans les limites planétaires, les limites du vivant, et qui finalement nous donnent une place qui est plus régulée, plus juste, nous semble pertinent. C'est vraiment cette voie qui nous a semblé juste quand on a commencé à l'élaborer avec le Créamont Blanc et Immersion Montagne. Il y a vraiment en visu, j'allais dire, cette question des transitions et de faire advenir une société qui est un peu plus régulée, un peu plus adaptée à… aux limites de la planète, tout simplement.

  • Speaker #0

    Et plus relié, du coup, au vivant, c'est ça ?

  • Speaker #2

    Oui, c'est cette question de la reliance. Cette question du vivant, on en parle souvent, finalement, à l'intérieur de soi. Quel vivant est-ce que, finalement, dans l'organisation, puisque c'est mon prisme à moi, quand je vais le matin au bureau, est-ce que je me sens vivante ? Ou est-ce que je laisse la vitalité de côté, je viens exécuter une activité ? Moi, ma proposition, c'est quand on passe autant de temps dans les entreprises ou dans les collectivités ou autres, on a besoin d'avoir cette vitalité. C'est ce vivant entre les personnes qui est absolument nécessaire et qui est ce qu'on est en fait, ce qu'on aime. Et puis, c'est ce vivant autour de nous qui nous reconnecte à ses limites parce que l'être humain est une espèce parmi d'autres. Et voilà, c'est la question de notre place, notre juste place.

  • Speaker #1

    Je dirais que le fait d'être en nature et de passer du temps en nature permet effectivement cette reconnexion à soi, aux autres et à tous les autres, à tout le vivant qui nous entoure. Et puis je pense aussi que la démarche d'observation et de questionnement que propose la science permet d'une certaine manière de révéler l'invisible, c'est-à-dire qu'en prêtant attention à ce qui se passe autour de nous, on observe des choses qu'on ne voit pas de manière quotidienne, et je pense que c'est un des enjeux des collectifs humains, c'est aussi d'arriver à lire tout ce qui s'y passe, et voilà, en ça, la nature nous enseigne à observer tous ces signaux faibles qui font qu'on arrive à fonctionner ensemble, et qu'on arrive à perdurer, tout simplement.

  • Speaker #0

    Merci à toutes les deux pour cette discussion que j'ai trouvée passionnante. et donc si vous auditeurs et auditrices vous souhaitez en savoir plus sur la bio-inspiration à l'échelle des organisations vous pouvez nous retrouver à la Biomim Expo les 11 et 12 juin 2024 au Parc Floral de Paris sur notre stand commun Oloméa, Créamont Blanc, Immersion Montagne Pour ne rater aucun épisode et pour faire grandir ce podcast, vous pouvez en parler autour de vous, vous abonner sur votre plateforme d'écoute préférée et nous laisser des étoiles si vous nous écoutez depuis Spotify ou Apple Podcast. Merci pour votre écoute et à bientôt pour un nouvel épisode de l'Affluence.

  • Speaker #1

    Sous-titrage ST'501

Description

Aujourd’hui on enregistre un épisode à l’occasion de la Biomim’expo, un événement organisé pour NewCorp Conseil qui rassemble les acteurs et actrices du biomimétisme en France et qui a lieu les 11 et 12 juin 2024 au parc floral de Paris. 

Nous allons donc explorer la coopération mais sous l’angle du vivant et de la bioinspiration. Comment le vivant peut nous inspirer des modes de fonctionnement collectifs ?


Pour répondre à cette question, je suis en compagnie de deux invitées : 

  • Irene Alvarez, médiatrice nature-culture, ancienne directrice du Centre de Recherches sur les Ecosystèmes d’Altitude, le CREA Mont-Blanc, fondatrice d’Immersion Montagne et accompagnatrice en montagne. 

  • et Christine Ebadi, cofondatrice d’Holomea qui nous apporte son expertise sur la transformation organisationnelle et les collectifs.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous, je m'appelle Bérinice, je travaille chez Holoméa et je suis passionnée par la bio-inspiration et la manière dont fonctionnent les humains entre eux. Bienvenue sur La Fluence, le podcast qui explore la coopération. La Fluence, c'est une occasion de se poser des questions, d'explorer, de découvrir, d'apprendre et surtout de partager. Entre chaos et opportunités, explorons ensemble de nouvelles manières de construire les collectifs. Aujourd'hui on enregistre un épisode à l'occasion de la BiomimExpo, un événement organisé par NewCorp Conseil qui rassemble les acteurs et actrices du biomimétisme en France et qui a lieu les 11 et 12 juin 2024 au parc floral de Paris. Nous allons donc explorer la coopération mais sous l'angle du vivant et de la bio-inspiration. Comment le vivant peut nous inspirer des modes de fonctionnement collectif ? Pour répondre à cette question, je suis en compagnie de deux invités. Irène Alvarez, médiatrice Nature Culture, ancienne directrice du Centre de recherche sur les écosystèmes d'altitude Le Créa Montblanc, et fondatrice d'Immersion Montagne et accompagnatrice en montagne. Et je suis aussi accompagnée de Christine Lebadie, cofondatrice de l'OMEA, qui nous apporte son expertise sur la transformation organisationnelle et les collectifs. Bonjour Irène et Christine. On va commencer Irène par se présenter. Est-ce que tu peux nous parler du Créa Mont Blanc, d'Immersion Montagne et nous présenter un petit peu ce que tu fais ?

  • Speaker #1

    Bonjour Bérénice et bonjour à tous et à toutes. Je suis Irène Alvarez. J'ai créé Immersion Montagne il y a cinq ans. L'idée d'Immersion Montagne, c'est d'organiser des temps en nature pour se connecter de manière différente à la nature et pouvoir par la suite agir individuellement et collectivement à partir de ce qu'on ressent et ce qu'on apprend de la nature. Et j'ai aussi pendant dix ans co-dirigé le CREA Mont Blanc, qui est le Centre de Recherche sur les Écosystèmes d'Altitude, basé à Chamonix, et qui est une association qui mène à la fois de la recherche scientifique, mais en même temps, dans chacune de ces recherches, il y a une dimension sociétale, et donc de transmission des savoirs à travers la science participative, par exemple, ou différentes modalités de transmission de la science et de la démarche scientifique à différents publics.

  • Speaker #0

    Christine, est-ce que tu peux nous présenter Oloméa et nous expliquer en quoi le partenariat avec Le Créamont Blanc et Immersion Montagne fait partie des activités ?

  • Speaker #2

    Bonjour, je suis Christine Ebadi, j'ai cofondé Olomea. Olomea, c'est une agence de conseil qui accompagne la transformation des organisations. Notre particularité, c'est de nous inspirer des principes du vivant, dans nos pratiques et dans nos accompagnements, et nous aidons nos clients à faire évoluer leur modèle de fonctionnement vers plus d'engagement, de coopération, d'adaptabilité collective. Aujourd'hui, toutes les organisations ont des défis immenses à relever pour répondre, se développer dans le contexte de changements permanents des transitions écologiques et sociales. Or, le vivant se développe depuis 3,8 milliards d'années. Ces principes ont permis de s'adapter aux nombreuses perturbations. Et c'est dans ce cadre qu'on travaille avec Le Créamont Blanc et Immersion Montagne. C'est une alliance qui est un peu particulière. Chaque structure amène un regard assez différent, complémentaire, c'est hétérogène. Nous amenons la connaissance des organisations, des entreprises, des collectivités, des différents collectifs. Le Créamont Blanc amène toute la connaissance scientifique, l'observation des écosystèmes naturels, comment ils réagissent aux perturbations. quels sont les principes qui s'appliquent, est-ce qu'on coopère, est-ce qu'on est en compétition, comment on réagit. Et Immersion Montagne, comme l'a dit Irène, va amener toute cette dimension sensible de connexion, parce que ce n'est pas qu'avec la tête, on a vraiment une approche tête-coeur-corps, c'est comment je me connecte, comment ça me fait vivre autre chose, et quel impact ça a bien sûr d'abord sur moi, mais ensuite dans le collectif.

  • Speaker #0

    Justement, j'aimerais qu'on explore ensemble certains de ces principes, donc certains principes du vivant. En quoi est-ce que ça peut finalement nous apporter et nous aider dans nos collectifs ? Donc Irène, est-ce que tu aurais des exemples à nous partager d'espèces vivantes qui pourraient nous inspirer justement dans les collectifs ?

  • Speaker #1

    D'abord, je voudrais dire que tout part de l'émerveillement. que je peux avoir, mais que beaucoup de gens ont, à l'égard du vivant et de ses capacités d'adaptation à un milieu qui est sans cesse changeant. Et ça, c'est particulièrement vrai en montagne, où les contraintes sont assez fortes. Le premier exemple qui me vient en tête, c'est celui du silenacol, qui est une plante de haute altitude, qui peut vivre jusqu'à plus de 3000 m d'altitude, et qui a cette particularité, comme beaucoup de plantes de haute montagne, d'adopter une forme sphérique. On dit une forme en coussin. C'est une très belle plante avec des toutes petites fleurs roses, pleines de couleurs dans cette haute montagne. Et cette forme de sphère lui permet d'exposer très peu de surface à l'extérieur pour un très grand volume intérieur. Et de ce fait, elle crée une espèce de serre naturelle. Il fait beaucoup plus chaud à l'intérieur du coussin qu'à l'extérieur. et par cette simple forme géométrique, elle facilite l'implantation d'autres organismes dans son sein, à sa surface et à l'intérieur. Des exemples de facilitation dans des milieux sous contrainte, il y en a énormément. Nous, on appelle souvent, on peut appeler ça de la coopération, ça va jusqu'à la symbiose, mais déjà le fait que l'ingéniosité du vivant va permettre à d'autres vivants de mieux vivre, en tous les cas de s'implanter et de se développer dans des endroits où on ne les attend pas.

  • Speaker #0

    De cet exemple de forme géométrique qui favorise l'implantation d'autres organismes, en quoi est-ce que ça peut être quelque chose qu'on peut ramener dans le domaine des collectifs et qu'est-ce que ça peut nous inspirer dans nos manières de fonctionner ensemble ?

  • Speaker #2

    En tout cas, moi, ce que je comprends de cette plante, c'est qu'il y a vraiment une dimension collective, une dimension de protection collective, où on va mettre certaines espèces ensemble. Je sais qu'il y a d'autres espèces qui sont à l'intérieur, même qui sont accueillies par le silène. Évidemment, ça vient sur, finalement, qu'est-ce que c'est qu'un collectif dans une organisation ? Jusqu'à finalement relativement récemment, une organisation s'était faite pour être efficace, s'était faite pour dérouler, pour produire. Chaque individu est attendu dans une forme de performance. On se rend bien compte que dans le contexte aujourd'hui, chaque individu ne peut pas grand-chose. On est un peu démuni sur pas mal de sujets et on a besoin de coopérer. Une des définitions qu'on peut donner de la coopération, c'est prendre en charge les contraintes de l'autre. C'est de se dire qu'on a un destin commun, dans le cas de la Silène, c'est de survivre dans des situations difficiles, sous contraintes, en altitude, comme l'a dit Irène. Finalement, nos organisations sont soumises aux transitions, aux grandes transformations, les chocs répétés qu'on subit depuis quelques années. Et cette question de la coopération, c'est finalement comment on arrive à être... ensemble et à s'adapter collectivement à tout ce qui nous arrive. Pour moi, un des piliers des réponses, et dont le vivant est une des preuves, c'est vraiment cette question de la coopération, c'est construire des organisations réellement coopératives, ce qui remet en question beaucoup des règles du jeu, d'évaluation et de définition de la performance.

  • Speaker #0

    Il y a même une coopération intercollectif, parce que là, dans le cas de la silène, elle favorise l'implantation d'autres organismes. Il y a peut-être une notion aussi de coopération multiacteur ?

  • Speaker #1

    Dans le cadre du silène, il y a d'abord une coopération, pour moi en tous les cas, avec le milieu, c'est-à-dire le climat. Je vais me ramasser au sol plutôt que de pousser à deux mètres de haut pour bénéficier en fait... du peu de chaleur qu'il y a au sol. Donc il y a une coopération avec le milieu. Mais il y a aussi effectivement des micro-organismes, des insectes, des plantes, qui vont pouvoir s'implanter dans ce sileine. Mais ce que je voudrais préciser aussi, c'est qu'il y a une grosse différence entre ce dont je peux témoigner des milieux naturels et ce dont témoigne Christine des milieux humains, c'est que le sileine n'a pas l'intention d'accueillir tous ces organismes. C'est... le vivant co-évolue, tous ces organismes co-évoluent pour chacun trouver leur niche écologique. Et il y a des interactions qui sont positives pour l'ensemble des partenaires et juste des interactions de facilitation sans aucune intention de collaborer. Voilà, donc ça c'est placer à la fois la beauté de ce qui se passe dans le vivant et en même temps le fait que la bio-inspiration est une inspiration. qu'il y a d'autres choses qui se jouent dans les collectifs humains aussi.

  • Speaker #0

    Effectivement, c'est important de le préciser parce que souvent, on a tendance à personnifier le vivant ou la nature. Et effectivement, il n'y a pas d'intention d'évoluer depuis 3,8 milliards d'années, mais les choses se sont faites ainsi. Et il y a différentes stratégies qui ont été mises en œuvre, notamment pour s'adapter à des conditions climatiques ou survivre dans des milieux extrêmes. Et c'est de ça qu'on peut s'inspirer. Mais effectivement... Voilà, ça reste des principes, des principes abstraits, théoriques, qu'il nous faut, nous, après, hybrider avec ce qu'on vit et nos contraintes à nous, entre humains, dans le réel, dans notre monde qui existe.

  • Speaker #2

    Et pour faire écho à cette question de l'hybridation et de l'inspiration des principes du vivant, en fait, effectivement, la question que, dans les organisations, finalement, on se pose, c'est... Est-ce qu'il y a une pertinence de l'organisation en regard du contexte ? Un petit peu, est-ce que, comme le Silène, est-ce qu'il est finalement pertinent là où il est ? Et nous, on a cette même question. Il n'y a pas de réponse absolue. Il n'y a pas la meilleure organisation du monde, mais il y a celle qui est la plus adaptée au contexte et ce qu'on est en train de vivre. et c'est là où les caractéristiques de ce que le vivant a déployé sont intéressantes pour nous. Et c'est cette question du changement très brutal qu'on peut vivre par moments, la vitesse du changement, la capacité à se reconstruire, à démarrer autrement, à peut-être développer des nouvelles niches. Et on a cette question de l'adaptabilité, c'est pour ça que cette inspiration devient de plus en plus pertinente aujourd'hui pour nos organisations.

  • Speaker #0

    En tout cas, moi, ça me semble extrêmement intéressant justement d'aller voir un petit peu comment ça se passe dans les écosystèmes d'altitude. Alors, Irène, est-ce que tu as un deuxième exemple de principe dans le vivant ou d'exemple de situation qui existe dans le vivant qui peuvent nous inspirer sur nos modes de fonctionnement collectifs ?

  • Speaker #1

    Il y a un autre principe qui me vient en tête qui est celui de la diversité. C'est-à-dire que... Dans la nature, un système est résilient lorsqu'il est divers, c'est-à-dire lorsqu'il y a suffisamment de réponses potentielles à un choc extérieur. Et l'endroit où on trouve le plus de diversité, en montagne notamment, c'est dans ce qu'on appelle les marges. Et ces marges, chaque espèce a une zone dans laquelle elle se sent particulièrement... confortable pour se développer, où tous ses besoins sont couverts. Et puis, légèrement au-dessus de cette zone ou en dessous de cette zone, on continue à observer des individus de cette espèce qui sont dans une zone beaucoup moins confortable pour eux, mais qui continuent à se développer. Et on pourrait les appeler des marginaux, puisqu'ils vivent dans les marges. Et la plupart du temps, effectivement, ces stratégies sont vouées à l'échec, puisque les conditions ne sont pas suffisantes pour qu'ils s'installent. mais dans des conditions où, par exemple, le climat change actuellement, les conditions deviennent plus favorables en altitude, on voit se développer des arbres au marge de la forêt, et ce sont ces arbres qui, potentiellement, vont donner les graines de la forêt de demain. Et donc, ça nous interpelle sur ce catalogue, cette diversité du catalogue des réponses possibles, et la place des marginaux dans le maintien de l'écosystème.

  • Speaker #0

    Et du coup, Christine, qu'est-ce qu'on pourrait abstraire de cet exemple-là qu'on pourrait ensuite ramener dans le domaine des organisations et des collectifs ?

  • Speaker #2

    Dans la question de la diversité, de la marginalité, de l'innovation, ce sont des grands enjeux pour les organisations. Pourquoi ? Parce que nos organisations, elles sont issues de la pensée industrielle. Elles visent la standardisation, l'homogénéisation pour être capables de répéter certaines actions et qui, dans le volume, vont donner des produits, des services que l'entreprise va vendre. Et le gros sujet que ça soulève, c'est que cette question de la répétition marche bien tant que l'écosystème est stable, tant que la demande est toujours la même, c'est pertinent. Dans un contexte où il y a beaucoup de contraintes, beaucoup de changements, beaucoup de transformations, quand un choc ou une grosse perturbation arrive, on n'est pas prêt, on n'est pas capable de répondre, parce qu'on a ultra-optimisé une chaîne, on a plutôt recruté des gens qui étaient plutôt similaires, ça vient faire écho à la question de la diversité. Quant aux marginaux, si on peut les nommer comme ça, les personnes qui fonctionnent de façon atypique, la plupart des organisations, peut-être pas toutes, mais la plupart ont du mal à les intégrer dans... les collectifs, elles sont plutôt tenues à l'écart. Donc il y a un énorme enjeu, Irène a parlé de catalogue d'adaptation, il y a un énorme enjeu pour les organisations d'avoir des catalogues variés, d'avoir des catalogues diversifiés, et donc ça se base forcément sur des personnes aux modes de fonctionnement différents, avec des idées différentes, et ça fait écho à, finalement, comment le collectif arrive à les intégrer, comment il arrive à les faire coopérer. C'est... complètement pertinent à notre échelle aujourd'hui dans notre contexte.

  • Speaker #0

    Merci déjà pour ce partage sur ces principes. Je trouve qu'on comprend bien en quoi ça peut être abstrait, puis ramené dans le domaine des collectifs et des organisations. Concrètement, en tant que collectif, comment on fait aujourd'hui si on veut appliquer ces principes-là ?

  • Speaker #2

    Déjà, il y a une première chose, quand on a commencé à travailler ensemble, cette triple alliance, c'est cette question tête-coeur-corps. En fait... dans l'organisation classique, et surtout inviter la tête, finalement, très peu le corps et le cœur. Et on se rend compte que pour amener des transformations, fonctionner autrement, se reconnecter finalement aux vivants qui nous entourent et en prendre soin, parce que c'est bien une question de soin, finalement, dont on parle. on a besoin de le vivre, on a besoin de l'expérimenter. Et c'est vraiment ce qui nous a donné l'idée, avec Immersion Montagne et le Créamont Blanc, finalement, d'emmener les gens, les équipes, en nature, à l'extérieur, à la fois pour avoir cette reliance, cette connexion, cette observation. et cette hybridation, j'allais dire, in situ. Parce que c'est des mots, là, ce qu'on partage, il faut le vivre. Il y a quelque chose de l'ordre de l'émotionnel, du sensible, qui me semble indispensable. Moi-même, je suis passée par ça, c'est parce que j'ai eu cette expérience que la suite s'est finalement enclenchée.

  • Speaker #1

    Je pense qu'effectivement, le fait de vivre ces principes, qu'ils soient nommés ou pas, mais simplement de vivre l'écosystème et de retrouver notre appartenance aux vivants, en tant qu'individu et en tant que collectif, me semble essentiel, à la fois par les sens et évidemment par la science.

  • Speaker #0

    Ça fait écho, je trouve, à la question de l'émerveillement dont tu parlais au début de l'épisode, de retrouver peut-être aussi... l'émerveillement de choses simples, voir des petites fleurs roses, voir des animaux tout le matin, d'avoir aussi peut-être cette ouverture sur ce qui se passe autour de nous et pour pouvoir à nouveau être dans une logique d'émerveillement vraiment face à la beauté de ce qui nous entoure finalement.

  • Speaker #2

    Toutes nos réflexions autour de l'organisation bio-inspirée, des principes du vivant, de l'émerveillement, C'est aussi là, et peut-être en premier, pour alimenter ce qu'on appelle communément les transitions écologiques et sociales. Alors pourquoi nous, en fait, on s'intéresse vraiment à cette question, cette dimension collective ? La transition écologique et sociale, c'est un immense projet collectif, complexe, qui demande beaucoup, beaucoup de coopération. C'est là où la question des organisations bio-inspirées, des organisations qui arrivent à s'inscrire dans les limites planétaires, les limites du vivant, et qui finalement nous donnent une place qui est plus régulée, plus juste, nous semble pertinent. C'est vraiment cette voie qui nous a semblé juste quand on a commencé à l'élaborer avec le Créamont Blanc et Immersion Montagne. Il y a vraiment en visu, j'allais dire, cette question des transitions et de faire advenir une société qui est un peu plus régulée, un peu plus adaptée à… aux limites de la planète, tout simplement.

  • Speaker #0

    Et plus relié, du coup, au vivant, c'est ça ?

  • Speaker #2

    Oui, c'est cette question de la reliance. Cette question du vivant, on en parle souvent, finalement, à l'intérieur de soi. Quel vivant est-ce que, finalement, dans l'organisation, puisque c'est mon prisme à moi, quand je vais le matin au bureau, est-ce que je me sens vivante ? Ou est-ce que je laisse la vitalité de côté, je viens exécuter une activité ? Moi, ma proposition, c'est quand on passe autant de temps dans les entreprises ou dans les collectivités ou autres, on a besoin d'avoir cette vitalité. C'est ce vivant entre les personnes qui est absolument nécessaire et qui est ce qu'on est en fait, ce qu'on aime. Et puis, c'est ce vivant autour de nous qui nous reconnecte à ses limites parce que l'être humain est une espèce parmi d'autres. Et voilà, c'est la question de notre place, notre juste place.

  • Speaker #1

    Je dirais que le fait d'être en nature et de passer du temps en nature permet effectivement cette reconnexion à soi, aux autres et à tous les autres, à tout le vivant qui nous entoure. Et puis je pense aussi que la démarche d'observation et de questionnement que propose la science permet d'une certaine manière de révéler l'invisible, c'est-à-dire qu'en prêtant attention à ce qui se passe autour de nous, on observe des choses qu'on ne voit pas de manière quotidienne, et je pense que c'est un des enjeux des collectifs humains, c'est aussi d'arriver à lire tout ce qui s'y passe, et voilà, en ça, la nature nous enseigne à observer tous ces signaux faibles qui font qu'on arrive à fonctionner ensemble, et qu'on arrive à perdurer, tout simplement.

  • Speaker #0

    Merci à toutes les deux pour cette discussion que j'ai trouvée passionnante. et donc si vous auditeurs et auditrices vous souhaitez en savoir plus sur la bio-inspiration à l'échelle des organisations vous pouvez nous retrouver à la Biomim Expo les 11 et 12 juin 2024 au Parc Floral de Paris sur notre stand commun Oloméa, Créamont Blanc, Immersion Montagne Pour ne rater aucun épisode et pour faire grandir ce podcast, vous pouvez en parler autour de vous, vous abonner sur votre plateforme d'écoute préférée et nous laisser des étoiles si vous nous écoutez depuis Spotify ou Apple Podcast. Merci pour votre écoute et à bientôt pour un nouvel épisode de l'Affluence.

  • Speaker #1

    Sous-titrage ST'501

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Description

Aujourd’hui on enregistre un épisode à l’occasion de la Biomim’expo, un événement organisé pour NewCorp Conseil qui rassemble les acteurs et actrices du biomimétisme en France et qui a lieu les 11 et 12 juin 2024 au parc floral de Paris. 

Nous allons donc explorer la coopération mais sous l’angle du vivant et de la bioinspiration. Comment le vivant peut nous inspirer des modes de fonctionnement collectifs ?


Pour répondre à cette question, je suis en compagnie de deux invitées : 

  • Irene Alvarez, médiatrice nature-culture, ancienne directrice du Centre de Recherches sur les Ecosystèmes d’Altitude, le CREA Mont-Blanc, fondatrice d’Immersion Montagne et accompagnatrice en montagne. 

  • et Christine Ebadi, cofondatrice d’Holomea qui nous apporte son expertise sur la transformation organisationnelle et les collectifs.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous, je m'appelle Bérinice, je travaille chez Holoméa et je suis passionnée par la bio-inspiration et la manière dont fonctionnent les humains entre eux. Bienvenue sur La Fluence, le podcast qui explore la coopération. La Fluence, c'est une occasion de se poser des questions, d'explorer, de découvrir, d'apprendre et surtout de partager. Entre chaos et opportunités, explorons ensemble de nouvelles manières de construire les collectifs. Aujourd'hui on enregistre un épisode à l'occasion de la BiomimExpo, un événement organisé par NewCorp Conseil qui rassemble les acteurs et actrices du biomimétisme en France et qui a lieu les 11 et 12 juin 2024 au parc floral de Paris. Nous allons donc explorer la coopération mais sous l'angle du vivant et de la bio-inspiration. Comment le vivant peut nous inspirer des modes de fonctionnement collectif ? Pour répondre à cette question, je suis en compagnie de deux invités. Irène Alvarez, médiatrice Nature Culture, ancienne directrice du Centre de recherche sur les écosystèmes d'altitude Le Créa Montblanc, et fondatrice d'Immersion Montagne et accompagnatrice en montagne. Et je suis aussi accompagnée de Christine Lebadie, cofondatrice de l'OMEA, qui nous apporte son expertise sur la transformation organisationnelle et les collectifs. Bonjour Irène et Christine. On va commencer Irène par se présenter. Est-ce que tu peux nous parler du Créa Mont Blanc, d'Immersion Montagne et nous présenter un petit peu ce que tu fais ?

  • Speaker #1

    Bonjour Bérénice et bonjour à tous et à toutes. Je suis Irène Alvarez. J'ai créé Immersion Montagne il y a cinq ans. L'idée d'Immersion Montagne, c'est d'organiser des temps en nature pour se connecter de manière différente à la nature et pouvoir par la suite agir individuellement et collectivement à partir de ce qu'on ressent et ce qu'on apprend de la nature. Et j'ai aussi pendant dix ans co-dirigé le CREA Mont Blanc, qui est le Centre de Recherche sur les Écosystèmes d'Altitude, basé à Chamonix, et qui est une association qui mène à la fois de la recherche scientifique, mais en même temps, dans chacune de ces recherches, il y a une dimension sociétale, et donc de transmission des savoirs à travers la science participative, par exemple, ou différentes modalités de transmission de la science et de la démarche scientifique à différents publics.

  • Speaker #0

    Christine, est-ce que tu peux nous présenter Oloméa et nous expliquer en quoi le partenariat avec Le Créamont Blanc et Immersion Montagne fait partie des activités ?

  • Speaker #2

    Bonjour, je suis Christine Ebadi, j'ai cofondé Olomea. Olomea, c'est une agence de conseil qui accompagne la transformation des organisations. Notre particularité, c'est de nous inspirer des principes du vivant, dans nos pratiques et dans nos accompagnements, et nous aidons nos clients à faire évoluer leur modèle de fonctionnement vers plus d'engagement, de coopération, d'adaptabilité collective. Aujourd'hui, toutes les organisations ont des défis immenses à relever pour répondre, se développer dans le contexte de changements permanents des transitions écologiques et sociales. Or, le vivant se développe depuis 3,8 milliards d'années. Ces principes ont permis de s'adapter aux nombreuses perturbations. Et c'est dans ce cadre qu'on travaille avec Le Créamont Blanc et Immersion Montagne. C'est une alliance qui est un peu particulière. Chaque structure amène un regard assez différent, complémentaire, c'est hétérogène. Nous amenons la connaissance des organisations, des entreprises, des collectivités, des différents collectifs. Le Créamont Blanc amène toute la connaissance scientifique, l'observation des écosystèmes naturels, comment ils réagissent aux perturbations. quels sont les principes qui s'appliquent, est-ce qu'on coopère, est-ce qu'on est en compétition, comment on réagit. Et Immersion Montagne, comme l'a dit Irène, va amener toute cette dimension sensible de connexion, parce que ce n'est pas qu'avec la tête, on a vraiment une approche tête-coeur-corps, c'est comment je me connecte, comment ça me fait vivre autre chose, et quel impact ça a bien sûr d'abord sur moi, mais ensuite dans le collectif.

  • Speaker #0

    Justement, j'aimerais qu'on explore ensemble certains de ces principes, donc certains principes du vivant. En quoi est-ce que ça peut finalement nous apporter et nous aider dans nos collectifs ? Donc Irène, est-ce que tu aurais des exemples à nous partager d'espèces vivantes qui pourraient nous inspirer justement dans les collectifs ?

  • Speaker #1

    D'abord, je voudrais dire que tout part de l'émerveillement. que je peux avoir, mais que beaucoup de gens ont, à l'égard du vivant et de ses capacités d'adaptation à un milieu qui est sans cesse changeant. Et ça, c'est particulièrement vrai en montagne, où les contraintes sont assez fortes. Le premier exemple qui me vient en tête, c'est celui du silenacol, qui est une plante de haute altitude, qui peut vivre jusqu'à plus de 3000 m d'altitude, et qui a cette particularité, comme beaucoup de plantes de haute montagne, d'adopter une forme sphérique. On dit une forme en coussin. C'est une très belle plante avec des toutes petites fleurs roses, pleines de couleurs dans cette haute montagne. Et cette forme de sphère lui permet d'exposer très peu de surface à l'extérieur pour un très grand volume intérieur. Et de ce fait, elle crée une espèce de serre naturelle. Il fait beaucoup plus chaud à l'intérieur du coussin qu'à l'extérieur. et par cette simple forme géométrique, elle facilite l'implantation d'autres organismes dans son sein, à sa surface et à l'intérieur. Des exemples de facilitation dans des milieux sous contrainte, il y en a énormément. Nous, on appelle souvent, on peut appeler ça de la coopération, ça va jusqu'à la symbiose, mais déjà le fait que l'ingéniosité du vivant va permettre à d'autres vivants de mieux vivre, en tous les cas de s'implanter et de se développer dans des endroits où on ne les attend pas.

  • Speaker #0

    De cet exemple de forme géométrique qui favorise l'implantation d'autres organismes, en quoi est-ce que ça peut être quelque chose qu'on peut ramener dans le domaine des collectifs et qu'est-ce que ça peut nous inspirer dans nos manières de fonctionner ensemble ?

  • Speaker #2

    En tout cas, moi, ce que je comprends de cette plante, c'est qu'il y a vraiment une dimension collective, une dimension de protection collective, où on va mettre certaines espèces ensemble. Je sais qu'il y a d'autres espèces qui sont à l'intérieur, même qui sont accueillies par le silène. Évidemment, ça vient sur, finalement, qu'est-ce que c'est qu'un collectif dans une organisation ? Jusqu'à finalement relativement récemment, une organisation s'était faite pour être efficace, s'était faite pour dérouler, pour produire. Chaque individu est attendu dans une forme de performance. On se rend bien compte que dans le contexte aujourd'hui, chaque individu ne peut pas grand-chose. On est un peu démuni sur pas mal de sujets et on a besoin de coopérer. Une des définitions qu'on peut donner de la coopération, c'est prendre en charge les contraintes de l'autre. C'est de se dire qu'on a un destin commun, dans le cas de la Silène, c'est de survivre dans des situations difficiles, sous contraintes, en altitude, comme l'a dit Irène. Finalement, nos organisations sont soumises aux transitions, aux grandes transformations, les chocs répétés qu'on subit depuis quelques années. Et cette question de la coopération, c'est finalement comment on arrive à être... ensemble et à s'adapter collectivement à tout ce qui nous arrive. Pour moi, un des piliers des réponses, et dont le vivant est une des preuves, c'est vraiment cette question de la coopération, c'est construire des organisations réellement coopératives, ce qui remet en question beaucoup des règles du jeu, d'évaluation et de définition de la performance.

  • Speaker #0

    Il y a même une coopération intercollectif, parce que là, dans le cas de la silène, elle favorise l'implantation d'autres organismes. Il y a peut-être une notion aussi de coopération multiacteur ?

  • Speaker #1

    Dans le cadre du silène, il y a d'abord une coopération, pour moi en tous les cas, avec le milieu, c'est-à-dire le climat. Je vais me ramasser au sol plutôt que de pousser à deux mètres de haut pour bénéficier en fait... du peu de chaleur qu'il y a au sol. Donc il y a une coopération avec le milieu. Mais il y a aussi effectivement des micro-organismes, des insectes, des plantes, qui vont pouvoir s'implanter dans ce sileine. Mais ce que je voudrais préciser aussi, c'est qu'il y a une grosse différence entre ce dont je peux témoigner des milieux naturels et ce dont témoigne Christine des milieux humains, c'est que le sileine n'a pas l'intention d'accueillir tous ces organismes. C'est... le vivant co-évolue, tous ces organismes co-évoluent pour chacun trouver leur niche écologique. Et il y a des interactions qui sont positives pour l'ensemble des partenaires et juste des interactions de facilitation sans aucune intention de collaborer. Voilà, donc ça c'est placer à la fois la beauté de ce qui se passe dans le vivant et en même temps le fait que la bio-inspiration est une inspiration. qu'il y a d'autres choses qui se jouent dans les collectifs humains aussi.

  • Speaker #0

    Effectivement, c'est important de le préciser parce que souvent, on a tendance à personnifier le vivant ou la nature. Et effectivement, il n'y a pas d'intention d'évoluer depuis 3,8 milliards d'années, mais les choses se sont faites ainsi. Et il y a différentes stratégies qui ont été mises en œuvre, notamment pour s'adapter à des conditions climatiques ou survivre dans des milieux extrêmes. Et c'est de ça qu'on peut s'inspirer. Mais effectivement... Voilà, ça reste des principes, des principes abstraits, théoriques, qu'il nous faut, nous, après, hybrider avec ce qu'on vit et nos contraintes à nous, entre humains, dans le réel, dans notre monde qui existe.

  • Speaker #2

    Et pour faire écho à cette question de l'hybridation et de l'inspiration des principes du vivant, en fait, effectivement, la question que, dans les organisations, finalement, on se pose, c'est... Est-ce qu'il y a une pertinence de l'organisation en regard du contexte ? Un petit peu, est-ce que, comme le Silène, est-ce qu'il est finalement pertinent là où il est ? Et nous, on a cette même question. Il n'y a pas de réponse absolue. Il n'y a pas la meilleure organisation du monde, mais il y a celle qui est la plus adaptée au contexte et ce qu'on est en train de vivre. et c'est là où les caractéristiques de ce que le vivant a déployé sont intéressantes pour nous. Et c'est cette question du changement très brutal qu'on peut vivre par moments, la vitesse du changement, la capacité à se reconstruire, à démarrer autrement, à peut-être développer des nouvelles niches. Et on a cette question de l'adaptabilité, c'est pour ça que cette inspiration devient de plus en plus pertinente aujourd'hui pour nos organisations.

  • Speaker #0

    En tout cas, moi, ça me semble extrêmement intéressant justement d'aller voir un petit peu comment ça se passe dans les écosystèmes d'altitude. Alors, Irène, est-ce que tu as un deuxième exemple de principe dans le vivant ou d'exemple de situation qui existe dans le vivant qui peuvent nous inspirer sur nos modes de fonctionnement collectifs ?

  • Speaker #1

    Il y a un autre principe qui me vient en tête qui est celui de la diversité. C'est-à-dire que... Dans la nature, un système est résilient lorsqu'il est divers, c'est-à-dire lorsqu'il y a suffisamment de réponses potentielles à un choc extérieur. Et l'endroit où on trouve le plus de diversité, en montagne notamment, c'est dans ce qu'on appelle les marges. Et ces marges, chaque espèce a une zone dans laquelle elle se sent particulièrement... confortable pour se développer, où tous ses besoins sont couverts. Et puis, légèrement au-dessus de cette zone ou en dessous de cette zone, on continue à observer des individus de cette espèce qui sont dans une zone beaucoup moins confortable pour eux, mais qui continuent à se développer. Et on pourrait les appeler des marginaux, puisqu'ils vivent dans les marges. Et la plupart du temps, effectivement, ces stratégies sont vouées à l'échec, puisque les conditions ne sont pas suffisantes pour qu'ils s'installent. mais dans des conditions où, par exemple, le climat change actuellement, les conditions deviennent plus favorables en altitude, on voit se développer des arbres au marge de la forêt, et ce sont ces arbres qui, potentiellement, vont donner les graines de la forêt de demain. Et donc, ça nous interpelle sur ce catalogue, cette diversité du catalogue des réponses possibles, et la place des marginaux dans le maintien de l'écosystème.

  • Speaker #0

    Et du coup, Christine, qu'est-ce qu'on pourrait abstraire de cet exemple-là qu'on pourrait ensuite ramener dans le domaine des organisations et des collectifs ?

  • Speaker #2

    Dans la question de la diversité, de la marginalité, de l'innovation, ce sont des grands enjeux pour les organisations. Pourquoi ? Parce que nos organisations, elles sont issues de la pensée industrielle. Elles visent la standardisation, l'homogénéisation pour être capables de répéter certaines actions et qui, dans le volume, vont donner des produits, des services que l'entreprise va vendre. Et le gros sujet que ça soulève, c'est que cette question de la répétition marche bien tant que l'écosystème est stable, tant que la demande est toujours la même, c'est pertinent. Dans un contexte où il y a beaucoup de contraintes, beaucoup de changements, beaucoup de transformations, quand un choc ou une grosse perturbation arrive, on n'est pas prêt, on n'est pas capable de répondre, parce qu'on a ultra-optimisé une chaîne, on a plutôt recruté des gens qui étaient plutôt similaires, ça vient faire écho à la question de la diversité. Quant aux marginaux, si on peut les nommer comme ça, les personnes qui fonctionnent de façon atypique, la plupart des organisations, peut-être pas toutes, mais la plupart ont du mal à les intégrer dans... les collectifs, elles sont plutôt tenues à l'écart. Donc il y a un énorme enjeu, Irène a parlé de catalogue d'adaptation, il y a un énorme enjeu pour les organisations d'avoir des catalogues variés, d'avoir des catalogues diversifiés, et donc ça se base forcément sur des personnes aux modes de fonctionnement différents, avec des idées différentes, et ça fait écho à, finalement, comment le collectif arrive à les intégrer, comment il arrive à les faire coopérer. C'est... complètement pertinent à notre échelle aujourd'hui dans notre contexte.

  • Speaker #0

    Merci déjà pour ce partage sur ces principes. Je trouve qu'on comprend bien en quoi ça peut être abstrait, puis ramené dans le domaine des collectifs et des organisations. Concrètement, en tant que collectif, comment on fait aujourd'hui si on veut appliquer ces principes-là ?

  • Speaker #2

    Déjà, il y a une première chose, quand on a commencé à travailler ensemble, cette triple alliance, c'est cette question tête-coeur-corps. En fait... dans l'organisation classique, et surtout inviter la tête, finalement, très peu le corps et le cœur. Et on se rend compte que pour amener des transformations, fonctionner autrement, se reconnecter finalement aux vivants qui nous entourent et en prendre soin, parce que c'est bien une question de soin, finalement, dont on parle. on a besoin de le vivre, on a besoin de l'expérimenter. Et c'est vraiment ce qui nous a donné l'idée, avec Immersion Montagne et le Créamont Blanc, finalement, d'emmener les gens, les équipes, en nature, à l'extérieur, à la fois pour avoir cette reliance, cette connexion, cette observation. et cette hybridation, j'allais dire, in situ. Parce que c'est des mots, là, ce qu'on partage, il faut le vivre. Il y a quelque chose de l'ordre de l'émotionnel, du sensible, qui me semble indispensable. Moi-même, je suis passée par ça, c'est parce que j'ai eu cette expérience que la suite s'est finalement enclenchée.

  • Speaker #1

    Je pense qu'effectivement, le fait de vivre ces principes, qu'ils soient nommés ou pas, mais simplement de vivre l'écosystème et de retrouver notre appartenance aux vivants, en tant qu'individu et en tant que collectif, me semble essentiel, à la fois par les sens et évidemment par la science.

  • Speaker #0

    Ça fait écho, je trouve, à la question de l'émerveillement dont tu parlais au début de l'épisode, de retrouver peut-être aussi... l'émerveillement de choses simples, voir des petites fleurs roses, voir des animaux tout le matin, d'avoir aussi peut-être cette ouverture sur ce qui se passe autour de nous et pour pouvoir à nouveau être dans une logique d'émerveillement vraiment face à la beauté de ce qui nous entoure finalement.

  • Speaker #2

    Toutes nos réflexions autour de l'organisation bio-inspirée, des principes du vivant, de l'émerveillement, C'est aussi là, et peut-être en premier, pour alimenter ce qu'on appelle communément les transitions écologiques et sociales. Alors pourquoi nous, en fait, on s'intéresse vraiment à cette question, cette dimension collective ? La transition écologique et sociale, c'est un immense projet collectif, complexe, qui demande beaucoup, beaucoup de coopération. C'est là où la question des organisations bio-inspirées, des organisations qui arrivent à s'inscrire dans les limites planétaires, les limites du vivant, et qui finalement nous donnent une place qui est plus régulée, plus juste, nous semble pertinent. C'est vraiment cette voie qui nous a semblé juste quand on a commencé à l'élaborer avec le Créamont Blanc et Immersion Montagne. Il y a vraiment en visu, j'allais dire, cette question des transitions et de faire advenir une société qui est un peu plus régulée, un peu plus adaptée à… aux limites de la planète, tout simplement.

  • Speaker #0

    Et plus relié, du coup, au vivant, c'est ça ?

  • Speaker #2

    Oui, c'est cette question de la reliance. Cette question du vivant, on en parle souvent, finalement, à l'intérieur de soi. Quel vivant est-ce que, finalement, dans l'organisation, puisque c'est mon prisme à moi, quand je vais le matin au bureau, est-ce que je me sens vivante ? Ou est-ce que je laisse la vitalité de côté, je viens exécuter une activité ? Moi, ma proposition, c'est quand on passe autant de temps dans les entreprises ou dans les collectivités ou autres, on a besoin d'avoir cette vitalité. C'est ce vivant entre les personnes qui est absolument nécessaire et qui est ce qu'on est en fait, ce qu'on aime. Et puis, c'est ce vivant autour de nous qui nous reconnecte à ses limites parce que l'être humain est une espèce parmi d'autres. Et voilà, c'est la question de notre place, notre juste place.

  • Speaker #1

    Je dirais que le fait d'être en nature et de passer du temps en nature permet effectivement cette reconnexion à soi, aux autres et à tous les autres, à tout le vivant qui nous entoure. Et puis je pense aussi que la démarche d'observation et de questionnement que propose la science permet d'une certaine manière de révéler l'invisible, c'est-à-dire qu'en prêtant attention à ce qui se passe autour de nous, on observe des choses qu'on ne voit pas de manière quotidienne, et je pense que c'est un des enjeux des collectifs humains, c'est aussi d'arriver à lire tout ce qui s'y passe, et voilà, en ça, la nature nous enseigne à observer tous ces signaux faibles qui font qu'on arrive à fonctionner ensemble, et qu'on arrive à perdurer, tout simplement.

  • Speaker #0

    Merci à toutes les deux pour cette discussion que j'ai trouvée passionnante. et donc si vous auditeurs et auditrices vous souhaitez en savoir plus sur la bio-inspiration à l'échelle des organisations vous pouvez nous retrouver à la Biomim Expo les 11 et 12 juin 2024 au Parc Floral de Paris sur notre stand commun Oloméa, Créamont Blanc, Immersion Montagne Pour ne rater aucun épisode et pour faire grandir ce podcast, vous pouvez en parler autour de vous, vous abonner sur votre plateforme d'écoute préférée et nous laisser des étoiles si vous nous écoutez depuis Spotify ou Apple Podcast. Merci pour votre écoute et à bientôt pour un nouvel épisode de l'Affluence.

  • Speaker #1

    Sous-titrage ST'501

Description

Aujourd’hui on enregistre un épisode à l’occasion de la Biomim’expo, un événement organisé pour NewCorp Conseil qui rassemble les acteurs et actrices du biomimétisme en France et qui a lieu les 11 et 12 juin 2024 au parc floral de Paris. 

Nous allons donc explorer la coopération mais sous l’angle du vivant et de la bioinspiration. Comment le vivant peut nous inspirer des modes de fonctionnement collectifs ?


Pour répondre à cette question, je suis en compagnie de deux invitées : 

  • Irene Alvarez, médiatrice nature-culture, ancienne directrice du Centre de Recherches sur les Ecosystèmes d’Altitude, le CREA Mont-Blanc, fondatrice d’Immersion Montagne et accompagnatrice en montagne. 

  • et Christine Ebadi, cofondatrice d’Holomea qui nous apporte son expertise sur la transformation organisationnelle et les collectifs.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour à toutes et à tous, je m'appelle Bérinice, je travaille chez Holoméa et je suis passionnée par la bio-inspiration et la manière dont fonctionnent les humains entre eux. Bienvenue sur La Fluence, le podcast qui explore la coopération. La Fluence, c'est une occasion de se poser des questions, d'explorer, de découvrir, d'apprendre et surtout de partager. Entre chaos et opportunités, explorons ensemble de nouvelles manières de construire les collectifs. Aujourd'hui on enregistre un épisode à l'occasion de la BiomimExpo, un événement organisé par NewCorp Conseil qui rassemble les acteurs et actrices du biomimétisme en France et qui a lieu les 11 et 12 juin 2024 au parc floral de Paris. Nous allons donc explorer la coopération mais sous l'angle du vivant et de la bio-inspiration. Comment le vivant peut nous inspirer des modes de fonctionnement collectif ? Pour répondre à cette question, je suis en compagnie de deux invités. Irène Alvarez, médiatrice Nature Culture, ancienne directrice du Centre de recherche sur les écosystèmes d'altitude Le Créa Montblanc, et fondatrice d'Immersion Montagne et accompagnatrice en montagne. Et je suis aussi accompagnée de Christine Lebadie, cofondatrice de l'OMEA, qui nous apporte son expertise sur la transformation organisationnelle et les collectifs. Bonjour Irène et Christine. On va commencer Irène par se présenter. Est-ce que tu peux nous parler du Créa Mont Blanc, d'Immersion Montagne et nous présenter un petit peu ce que tu fais ?

  • Speaker #1

    Bonjour Bérénice et bonjour à tous et à toutes. Je suis Irène Alvarez. J'ai créé Immersion Montagne il y a cinq ans. L'idée d'Immersion Montagne, c'est d'organiser des temps en nature pour se connecter de manière différente à la nature et pouvoir par la suite agir individuellement et collectivement à partir de ce qu'on ressent et ce qu'on apprend de la nature. Et j'ai aussi pendant dix ans co-dirigé le CREA Mont Blanc, qui est le Centre de Recherche sur les Écosystèmes d'Altitude, basé à Chamonix, et qui est une association qui mène à la fois de la recherche scientifique, mais en même temps, dans chacune de ces recherches, il y a une dimension sociétale, et donc de transmission des savoirs à travers la science participative, par exemple, ou différentes modalités de transmission de la science et de la démarche scientifique à différents publics.

  • Speaker #0

    Christine, est-ce que tu peux nous présenter Oloméa et nous expliquer en quoi le partenariat avec Le Créamont Blanc et Immersion Montagne fait partie des activités ?

  • Speaker #2

    Bonjour, je suis Christine Ebadi, j'ai cofondé Olomea. Olomea, c'est une agence de conseil qui accompagne la transformation des organisations. Notre particularité, c'est de nous inspirer des principes du vivant, dans nos pratiques et dans nos accompagnements, et nous aidons nos clients à faire évoluer leur modèle de fonctionnement vers plus d'engagement, de coopération, d'adaptabilité collective. Aujourd'hui, toutes les organisations ont des défis immenses à relever pour répondre, se développer dans le contexte de changements permanents des transitions écologiques et sociales. Or, le vivant se développe depuis 3,8 milliards d'années. Ces principes ont permis de s'adapter aux nombreuses perturbations. Et c'est dans ce cadre qu'on travaille avec Le Créamont Blanc et Immersion Montagne. C'est une alliance qui est un peu particulière. Chaque structure amène un regard assez différent, complémentaire, c'est hétérogène. Nous amenons la connaissance des organisations, des entreprises, des collectivités, des différents collectifs. Le Créamont Blanc amène toute la connaissance scientifique, l'observation des écosystèmes naturels, comment ils réagissent aux perturbations. quels sont les principes qui s'appliquent, est-ce qu'on coopère, est-ce qu'on est en compétition, comment on réagit. Et Immersion Montagne, comme l'a dit Irène, va amener toute cette dimension sensible de connexion, parce que ce n'est pas qu'avec la tête, on a vraiment une approche tête-coeur-corps, c'est comment je me connecte, comment ça me fait vivre autre chose, et quel impact ça a bien sûr d'abord sur moi, mais ensuite dans le collectif.

  • Speaker #0

    Justement, j'aimerais qu'on explore ensemble certains de ces principes, donc certains principes du vivant. En quoi est-ce que ça peut finalement nous apporter et nous aider dans nos collectifs ? Donc Irène, est-ce que tu aurais des exemples à nous partager d'espèces vivantes qui pourraient nous inspirer justement dans les collectifs ?

  • Speaker #1

    D'abord, je voudrais dire que tout part de l'émerveillement. que je peux avoir, mais que beaucoup de gens ont, à l'égard du vivant et de ses capacités d'adaptation à un milieu qui est sans cesse changeant. Et ça, c'est particulièrement vrai en montagne, où les contraintes sont assez fortes. Le premier exemple qui me vient en tête, c'est celui du silenacol, qui est une plante de haute altitude, qui peut vivre jusqu'à plus de 3000 m d'altitude, et qui a cette particularité, comme beaucoup de plantes de haute montagne, d'adopter une forme sphérique. On dit une forme en coussin. C'est une très belle plante avec des toutes petites fleurs roses, pleines de couleurs dans cette haute montagne. Et cette forme de sphère lui permet d'exposer très peu de surface à l'extérieur pour un très grand volume intérieur. Et de ce fait, elle crée une espèce de serre naturelle. Il fait beaucoup plus chaud à l'intérieur du coussin qu'à l'extérieur. et par cette simple forme géométrique, elle facilite l'implantation d'autres organismes dans son sein, à sa surface et à l'intérieur. Des exemples de facilitation dans des milieux sous contrainte, il y en a énormément. Nous, on appelle souvent, on peut appeler ça de la coopération, ça va jusqu'à la symbiose, mais déjà le fait que l'ingéniosité du vivant va permettre à d'autres vivants de mieux vivre, en tous les cas de s'implanter et de se développer dans des endroits où on ne les attend pas.

  • Speaker #0

    De cet exemple de forme géométrique qui favorise l'implantation d'autres organismes, en quoi est-ce que ça peut être quelque chose qu'on peut ramener dans le domaine des collectifs et qu'est-ce que ça peut nous inspirer dans nos manières de fonctionner ensemble ?

  • Speaker #2

    En tout cas, moi, ce que je comprends de cette plante, c'est qu'il y a vraiment une dimension collective, une dimension de protection collective, où on va mettre certaines espèces ensemble. Je sais qu'il y a d'autres espèces qui sont à l'intérieur, même qui sont accueillies par le silène. Évidemment, ça vient sur, finalement, qu'est-ce que c'est qu'un collectif dans une organisation ? Jusqu'à finalement relativement récemment, une organisation s'était faite pour être efficace, s'était faite pour dérouler, pour produire. Chaque individu est attendu dans une forme de performance. On se rend bien compte que dans le contexte aujourd'hui, chaque individu ne peut pas grand-chose. On est un peu démuni sur pas mal de sujets et on a besoin de coopérer. Une des définitions qu'on peut donner de la coopération, c'est prendre en charge les contraintes de l'autre. C'est de se dire qu'on a un destin commun, dans le cas de la Silène, c'est de survivre dans des situations difficiles, sous contraintes, en altitude, comme l'a dit Irène. Finalement, nos organisations sont soumises aux transitions, aux grandes transformations, les chocs répétés qu'on subit depuis quelques années. Et cette question de la coopération, c'est finalement comment on arrive à être... ensemble et à s'adapter collectivement à tout ce qui nous arrive. Pour moi, un des piliers des réponses, et dont le vivant est une des preuves, c'est vraiment cette question de la coopération, c'est construire des organisations réellement coopératives, ce qui remet en question beaucoup des règles du jeu, d'évaluation et de définition de la performance.

  • Speaker #0

    Il y a même une coopération intercollectif, parce que là, dans le cas de la silène, elle favorise l'implantation d'autres organismes. Il y a peut-être une notion aussi de coopération multiacteur ?

  • Speaker #1

    Dans le cadre du silène, il y a d'abord une coopération, pour moi en tous les cas, avec le milieu, c'est-à-dire le climat. Je vais me ramasser au sol plutôt que de pousser à deux mètres de haut pour bénéficier en fait... du peu de chaleur qu'il y a au sol. Donc il y a une coopération avec le milieu. Mais il y a aussi effectivement des micro-organismes, des insectes, des plantes, qui vont pouvoir s'implanter dans ce sileine. Mais ce que je voudrais préciser aussi, c'est qu'il y a une grosse différence entre ce dont je peux témoigner des milieux naturels et ce dont témoigne Christine des milieux humains, c'est que le sileine n'a pas l'intention d'accueillir tous ces organismes. C'est... le vivant co-évolue, tous ces organismes co-évoluent pour chacun trouver leur niche écologique. Et il y a des interactions qui sont positives pour l'ensemble des partenaires et juste des interactions de facilitation sans aucune intention de collaborer. Voilà, donc ça c'est placer à la fois la beauté de ce qui se passe dans le vivant et en même temps le fait que la bio-inspiration est une inspiration. qu'il y a d'autres choses qui se jouent dans les collectifs humains aussi.

  • Speaker #0

    Effectivement, c'est important de le préciser parce que souvent, on a tendance à personnifier le vivant ou la nature. Et effectivement, il n'y a pas d'intention d'évoluer depuis 3,8 milliards d'années, mais les choses se sont faites ainsi. Et il y a différentes stratégies qui ont été mises en œuvre, notamment pour s'adapter à des conditions climatiques ou survivre dans des milieux extrêmes. Et c'est de ça qu'on peut s'inspirer. Mais effectivement... Voilà, ça reste des principes, des principes abstraits, théoriques, qu'il nous faut, nous, après, hybrider avec ce qu'on vit et nos contraintes à nous, entre humains, dans le réel, dans notre monde qui existe.

  • Speaker #2

    Et pour faire écho à cette question de l'hybridation et de l'inspiration des principes du vivant, en fait, effectivement, la question que, dans les organisations, finalement, on se pose, c'est... Est-ce qu'il y a une pertinence de l'organisation en regard du contexte ? Un petit peu, est-ce que, comme le Silène, est-ce qu'il est finalement pertinent là où il est ? Et nous, on a cette même question. Il n'y a pas de réponse absolue. Il n'y a pas la meilleure organisation du monde, mais il y a celle qui est la plus adaptée au contexte et ce qu'on est en train de vivre. et c'est là où les caractéristiques de ce que le vivant a déployé sont intéressantes pour nous. Et c'est cette question du changement très brutal qu'on peut vivre par moments, la vitesse du changement, la capacité à se reconstruire, à démarrer autrement, à peut-être développer des nouvelles niches. Et on a cette question de l'adaptabilité, c'est pour ça que cette inspiration devient de plus en plus pertinente aujourd'hui pour nos organisations.

  • Speaker #0

    En tout cas, moi, ça me semble extrêmement intéressant justement d'aller voir un petit peu comment ça se passe dans les écosystèmes d'altitude. Alors, Irène, est-ce que tu as un deuxième exemple de principe dans le vivant ou d'exemple de situation qui existe dans le vivant qui peuvent nous inspirer sur nos modes de fonctionnement collectifs ?

  • Speaker #1

    Il y a un autre principe qui me vient en tête qui est celui de la diversité. C'est-à-dire que... Dans la nature, un système est résilient lorsqu'il est divers, c'est-à-dire lorsqu'il y a suffisamment de réponses potentielles à un choc extérieur. Et l'endroit où on trouve le plus de diversité, en montagne notamment, c'est dans ce qu'on appelle les marges. Et ces marges, chaque espèce a une zone dans laquelle elle se sent particulièrement... confortable pour se développer, où tous ses besoins sont couverts. Et puis, légèrement au-dessus de cette zone ou en dessous de cette zone, on continue à observer des individus de cette espèce qui sont dans une zone beaucoup moins confortable pour eux, mais qui continuent à se développer. Et on pourrait les appeler des marginaux, puisqu'ils vivent dans les marges. Et la plupart du temps, effectivement, ces stratégies sont vouées à l'échec, puisque les conditions ne sont pas suffisantes pour qu'ils s'installent. mais dans des conditions où, par exemple, le climat change actuellement, les conditions deviennent plus favorables en altitude, on voit se développer des arbres au marge de la forêt, et ce sont ces arbres qui, potentiellement, vont donner les graines de la forêt de demain. Et donc, ça nous interpelle sur ce catalogue, cette diversité du catalogue des réponses possibles, et la place des marginaux dans le maintien de l'écosystème.

  • Speaker #0

    Et du coup, Christine, qu'est-ce qu'on pourrait abstraire de cet exemple-là qu'on pourrait ensuite ramener dans le domaine des organisations et des collectifs ?

  • Speaker #2

    Dans la question de la diversité, de la marginalité, de l'innovation, ce sont des grands enjeux pour les organisations. Pourquoi ? Parce que nos organisations, elles sont issues de la pensée industrielle. Elles visent la standardisation, l'homogénéisation pour être capables de répéter certaines actions et qui, dans le volume, vont donner des produits, des services que l'entreprise va vendre. Et le gros sujet que ça soulève, c'est que cette question de la répétition marche bien tant que l'écosystème est stable, tant que la demande est toujours la même, c'est pertinent. Dans un contexte où il y a beaucoup de contraintes, beaucoup de changements, beaucoup de transformations, quand un choc ou une grosse perturbation arrive, on n'est pas prêt, on n'est pas capable de répondre, parce qu'on a ultra-optimisé une chaîne, on a plutôt recruté des gens qui étaient plutôt similaires, ça vient faire écho à la question de la diversité. Quant aux marginaux, si on peut les nommer comme ça, les personnes qui fonctionnent de façon atypique, la plupart des organisations, peut-être pas toutes, mais la plupart ont du mal à les intégrer dans... les collectifs, elles sont plutôt tenues à l'écart. Donc il y a un énorme enjeu, Irène a parlé de catalogue d'adaptation, il y a un énorme enjeu pour les organisations d'avoir des catalogues variés, d'avoir des catalogues diversifiés, et donc ça se base forcément sur des personnes aux modes de fonctionnement différents, avec des idées différentes, et ça fait écho à, finalement, comment le collectif arrive à les intégrer, comment il arrive à les faire coopérer. C'est... complètement pertinent à notre échelle aujourd'hui dans notre contexte.

  • Speaker #0

    Merci déjà pour ce partage sur ces principes. Je trouve qu'on comprend bien en quoi ça peut être abstrait, puis ramené dans le domaine des collectifs et des organisations. Concrètement, en tant que collectif, comment on fait aujourd'hui si on veut appliquer ces principes-là ?

  • Speaker #2

    Déjà, il y a une première chose, quand on a commencé à travailler ensemble, cette triple alliance, c'est cette question tête-coeur-corps. En fait... dans l'organisation classique, et surtout inviter la tête, finalement, très peu le corps et le cœur. Et on se rend compte que pour amener des transformations, fonctionner autrement, se reconnecter finalement aux vivants qui nous entourent et en prendre soin, parce que c'est bien une question de soin, finalement, dont on parle. on a besoin de le vivre, on a besoin de l'expérimenter. Et c'est vraiment ce qui nous a donné l'idée, avec Immersion Montagne et le Créamont Blanc, finalement, d'emmener les gens, les équipes, en nature, à l'extérieur, à la fois pour avoir cette reliance, cette connexion, cette observation. et cette hybridation, j'allais dire, in situ. Parce que c'est des mots, là, ce qu'on partage, il faut le vivre. Il y a quelque chose de l'ordre de l'émotionnel, du sensible, qui me semble indispensable. Moi-même, je suis passée par ça, c'est parce que j'ai eu cette expérience que la suite s'est finalement enclenchée.

  • Speaker #1

    Je pense qu'effectivement, le fait de vivre ces principes, qu'ils soient nommés ou pas, mais simplement de vivre l'écosystème et de retrouver notre appartenance aux vivants, en tant qu'individu et en tant que collectif, me semble essentiel, à la fois par les sens et évidemment par la science.

  • Speaker #0

    Ça fait écho, je trouve, à la question de l'émerveillement dont tu parlais au début de l'épisode, de retrouver peut-être aussi... l'émerveillement de choses simples, voir des petites fleurs roses, voir des animaux tout le matin, d'avoir aussi peut-être cette ouverture sur ce qui se passe autour de nous et pour pouvoir à nouveau être dans une logique d'émerveillement vraiment face à la beauté de ce qui nous entoure finalement.

  • Speaker #2

    Toutes nos réflexions autour de l'organisation bio-inspirée, des principes du vivant, de l'émerveillement, C'est aussi là, et peut-être en premier, pour alimenter ce qu'on appelle communément les transitions écologiques et sociales. Alors pourquoi nous, en fait, on s'intéresse vraiment à cette question, cette dimension collective ? La transition écologique et sociale, c'est un immense projet collectif, complexe, qui demande beaucoup, beaucoup de coopération. C'est là où la question des organisations bio-inspirées, des organisations qui arrivent à s'inscrire dans les limites planétaires, les limites du vivant, et qui finalement nous donnent une place qui est plus régulée, plus juste, nous semble pertinent. C'est vraiment cette voie qui nous a semblé juste quand on a commencé à l'élaborer avec le Créamont Blanc et Immersion Montagne. Il y a vraiment en visu, j'allais dire, cette question des transitions et de faire advenir une société qui est un peu plus régulée, un peu plus adaptée à… aux limites de la planète, tout simplement.

  • Speaker #0

    Et plus relié, du coup, au vivant, c'est ça ?

  • Speaker #2

    Oui, c'est cette question de la reliance. Cette question du vivant, on en parle souvent, finalement, à l'intérieur de soi. Quel vivant est-ce que, finalement, dans l'organisation, puisque c'est mon prisme à moi, quand je vais le matin au bureau, est-ce que je me sens vivante ? Ou est-ce que je laisse la vitalité de côté, je viens exécuter une activité ? Moi, ma proposition, c'est quand on passe autant de temps dans les entreprises ou dans les collectivités ou autres, on a besoin d'avoir cette vitalité. C'est ce vivant entre les personnes qui est absolument nécessaire et qui est ce qu'on est en fait, ce qu'on aime. Et puis, c'est ce vivant autour de nous qui nous reconnecte à ses limites parce que l'être humain est une espèce parmi d'autres. Et voilà, c'est la question de notre place, notre juste place.

  • Speaker #1

    Je dirais que le fait d'être en nature et de passer du temps en nature permet effectivement cette reconnexion à soi, aux autres et à tous les autres, à tout le vivant qui nous entoure. Et puis je pense aussi que la démarche d'observation et de questionnement que propose la science permet d'une certaine manière de révéler l'invisible, c'est-à-dire qu'en prêtant attention à ce qui se passe autour de nous, on observe des choses qu'on ne voit pas de manière quotidienne, et je pense que c'est un des enjeux des collectifs humains, c'est aussi d'arriver à lire tout ce qui s'y passe, et voilà, en ça, la nature nous enseigne à observer tous ces signaux faibles qui font qu'on arrive à fonctionner ensemble, et qu'on arrive à perdurer, tout simplement.

  • Speaker #0

    Merci à toutes les deux pour cette discussion que j'ai trouvée passionnante. et donc si vous auditeurs et auditrices vous souhaitez en savoir plus sur la bio-inspiration à l'échelle des organisations vous pouvez nous retrouver à la Biomim Expo les 11 et 12 juin 2024 au Parc Floral de Paris sur notre stand commun Oloméa, Créamont Blanc, Immersion Montagne Pour ne rater aucun épisode et pour faire grandir ce podcast, vous pouvez en parler autour de vous, vous abonner sur votre plateforme d'écoute préférée et nous laisser des étoiles si vous nous écoutez depuis Spotify ou Apple Podcast. Merci pour votre écoute et à bientôt pour un nouvel épisode de l'Affluence.

  • Speaker #1

    Sous-titrage ST'501

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