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La vie est belle, essaie-la !

Pauline Messier – La joie dans l’âme – Partie 1

Pauline Messier – La joie dans l’âme – Partie 1

27min |30/05/2025
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Pauline Messier – La joie dans l’âme – Partie 1

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Description

À 22 ans, Pauline rayonne d’une joie lucide et profonde, malgré la SLA.

Dans l’intimité de sa chambre de princesse, entourée de poésie et de foi, elle nous parle de Lamartine, d’écriture, de voyages, et de sa manière singulière d’habiter le présent.

Une rencontre lumineuse et pleine de sagesse avec une jeune femme qui fait de chaque instant un acte de vie.


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Nous remercions chaleureusement toutes les personnes qui ont participé à cette deuxième saison : personnes malades, aidants, proches, chercheurs et professionnels de santé.


Ce podcast de l'ARLSA a été réalisé par Natacha Sels, la post-production est de Bertrand Chaumeton.

 

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Bonne écoute !


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Transcription

  • Natacha Sels

    La vie est belle, essaie-la ! Le podcast de l'ARSLA, qui met en lumière des personnes confrontées à la SLA et des professionnels engagés.

  • Pauline Messier

    Dans "Touhcer l'instant", c'est forcément le présent, quelque chose que j'ai appris beaucoup avec la maladie. Alors je disais qu'il n'y avait pas beaucoup de choses qui avaient changé entre la Pauline d'avant et d'aujourd'hui, mais la Pauline d'avant, elle avait tendance à beaucoup vivre dans le futur. Alors que là, j'ai appris à accepter le présent et déjà à plus que m'en contenter, à l'apprécier.

  • Natacha Sels

    Pauline Messier, La joie dans l'âme, partie 1. La première fois que j'ai vu Pauline, c'est sur un plateau de télévision. J'avais été bluffée par cette jeune personne de 20 ans, adressant un impétueux fou rire à la mort et à la maladie qui s'invitait sur son chemin. Aujourd'hui, Pauline a 22 ans et me propose de la rencontrer chez elle, dans l'Oise, où elle vit avec ses parents, dans un pavillon aussi lumineux, coquet et pimpant qu'elle. C'est un dimanche d'automne, un gâteau trône sur la table du salon, mais ce n'est pas encore l'heure d'y goûter. Pour le moment, nous nous retirons dans sa chambre, où je découvre une grande romantique, en conversation naturelle, avec Lamartine et avec Dieu. Elle rit de se la jouer princesse. Moi, je lui prêterai plutôt une joie inconditionnelle et une arme fatale, qui lui permet de toucher l'instant, sa plume, sagesse sur ton de badinage.

  • Pauline Messier

    Alors, ma chambre, on vient de la refaire parce qu'à l'origine, c'était un bureau et je voulais vraiment avoir mon espace à moi qui me ressemble. Donc, c'est une chambre couleur un peu coquille d'œuf avec des moulures un petit peu partout. Et ma petite coiffeuse pour me maquiller parce qu'on est dans du 100% princesse. Avec une grande bibliothèque que mon père a fait. J'aime beaucoup les livres. J'aime beaucoup, beaucoup Lamartine. Lamartine, Verlaine, j'aime bien Zola, Dumas aussi. Après voilà, ça va être surtout la poésie avant le XXe.

  • Natacha Sels

    Entre la princesse et Lamartine, je sens une grande romantique.

  • Pauline Messier

    Ah oui, oui, on peut dire ça.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qui te touche dans Lamartine ?

  • Pauline Messier

    Euh... Je pense déjà à son histoire avec son amour perdu. Et c'est vraiment la douleur face à la mort, quelque chose aussi que je comprends, même si je ne suis pas du côté de Lamartine. Des questions qui se posent par rapport à la vie, pourquoi, les injustices aussi. Et tout ça dans un style très beau, très doux, avec beaucoup de nature aussi. Donc ça m'amène aussi un contraste entre la beauté de la nature et... on va dire la douleur et la mort. J'ai découvert ces poèmes au moment où j'avais la maladie. Et ça a vraiment eu, ça a fait un déclic en moi. Donc c'est vraiment à ce moment-là que j'ai été touchée.

  • Natacha Sels

    Et qu'est-ce que ça t'a apporté comme éclairage ou comme peut-être un baume ?

  • Pauline Messier

    Oui, c'est plus du baume, j'irais. Sentir en fait le même sentiment et chez... quelqu'un qui n'est plus là depuis très longtemps et chez moi. Bizarrement, je n'avais pas envie de parler avec des personnes actuelles qui ont forcément la maladie, mais j'appréciais partager ces moments avec Lamartine.

  • Natacha Sels

    C'est joli de dire partager des moments avec Lamartine. Donc tu le relis régulièrement ?

  • Pauline Messier

    Je le lis vraiment tout le temps. Il y a un poème en particulier que je relis en boucle, en boucle, en boucle. Je le connais presque par cœur. Pourtant, il fait quelques pages quand même. Et donc c'est le désespoir et c'est un poème magnifique.

  • Natacha Sels

    J'aimerais beaucoup que tu le lises.

  • Pauline Messier

    Voilà.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu veux que je le prenne ?

  • Pauline Messier

    Le blanc, Lamartine, en haut. Juste en haut,voilà.

  • Natacha Sels

    Oui, choisis le passage que tu veux.

  • Pauline Messier

    Il faut savoir aussi que Lamartine, il me touche parce qu'il est chrétien, comme moi. Mais ça m'a vraiment permis de déculpabiliser aussi et juste de voir que oui, on peut être chrétien et avoir des doutes aussi. Donc la partie qui vraiment m'a énormément touchée, c'est celle-ci. Créateur, Tout-Puissant, Principe de Tout-Être, Toi pour qui le possible existe avant de naître, Roi de l'immensité, Tu pouvais cependant, au gré de ton envie, Puiser pour tes enfants le bonheur et la vie dans ton éternité. Sans t'épuiser jamais, sur toute la nature, Tu pouvais à long flot répandre sans mesure un bonheur absolu. L'espace, le pouvoir, le temps, rien ne te coûte. Ah, ma raison frémit, tu le pouvais sans doute. Tu ne l'as pas voulu.

  • Natacha Sels

    Merci.

  • Pauline Messier

    J'ai du mal à m'exprimer vraiment, surtout sur cette partie, parce que c'est plus quelque chose que je vais ressentir. Et le titre du poème, Le Désespoir, c'est l'incompréhension, c'est les questions sans réponse. Pourquoi moi ? Déjà, la première. Pas forcément pourquoi moi, mais juste pourquoi, déjà. Comment je vais faire, c'est quoi mon futur, qu'est-ce que je vais devenir. On va dire qu'à 20 ans, on n'a rien vu du monde. Et c'est dur de nous priver de futur dès 20 ans.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu as déjà certaines réponses à tes questions ? Ou une manière de mettre ton baume à toi ?

  • Pauline Messier

    Comme je l'ai dit, je suis aussi chrétienne, donc même si j'ai mes questions, je sais et je suis persuadée qu'il y a des réponses et que rien n'est là par hasard. Donc je n'ai pas à avoir peur, mais dans les moments où ça va être plus compliqué, oui je vais prendre un stylo et une feuille. J'ai un peu plus de mal à écrire maintenant, donc je vais plus prendre un clavier et je vais écrire. Et ça va me faire du bien.

  • Natacha Sels

    Alors tu t'es mis à écrire avec la maladie ou c'était quelque chose qui était déjà là ?

  • Pauline Messier

    J'ai toujours écrit. Je crois que les premiers poèmes datent de quand j'avais 6 ans. Et après j'ai un peu arrêté avec l'adolescence, les sorties, etc. Et je me suis remis à écrire avec la maladie. Dès que j'ai commencé à faire les examens pour savoir ce que j'avais, sans m'en rendre compte, j'avais recommencé. Écrire des mots, partir par là, des vers. J'aime beaucoup la sonorité des mots.

  • Natacha Sels

    Et comment ça se fait que tu es attachée à la musique des mots, comme ça ?

  • Pauline Messier

    Alors là, c'est une question à laquelle je n'ai pas forcément de réponse. J'ai toujours aimé l'art d'une manière générale. Ah si, je pense que j'ai une réponse. Déjà, mon père a toujours écrit de la poésie. Je suis persuadée que ça peut aussi se transmettre par les gènes. Donc voilà.

  • Natacha Sels

    Je pense qu'en fait, tu parles, je ne sais pas si je dois dire de religion ou de foi.

  • Pauline Messier

    Je parlerais plus de foi. Quand on est seul, en tout cas pour moi, avec Dieu, ça va être vraiment de la foi. Ça va être une relation plutôt qu'une religion. Donc une relation c'est comme avec des amis, c'est parler, c'est demander des choses.

  • Natacha Sels

    Alors donc tu as une conversation avec Dieu ?

  • Pauline Messier

    Oui c'est ça, le matin, le soir, une conversation, je vais parler et je vais recevoir mais plus à l'intérieur de moi, du bien-être etc.

  • Natacha Sels

    Quelles sont les autres choses qui te soutiennent depuis que tu as reçu l'annonce du diagnostic ?

  • Pauline Messier

    Il va y avoir les voyages. Donc là, c'est plus le côté vraiment activité. Donc voyages, le théâtre, les sorties. Mais le plus important, ça va être surtout la famille, les amis qui sont très présents. Après, j'ai quand même de la chance parce que je n'ai jamais été trop triste par rapport à la maladie. À chaque fois, je suis très mal à l'aise de dire parce que j'ai l'impression qu'on n'a pas vraiment le droit de le dire. Mais je vais bien. Donc est-ce que c'est parce que j'ai la foi ? Est-ce que c'est parce que je vais écouter mon corps et que si à tel moment je vais avoir un peu de tristesse, je vais écrire ? Peut-être. Mais c'est vrai que je suis bien et je suis heureuse.

  • Natacha Sels

    Ce que j'entends dans ce que tu dis, c'est que la plupart du temps tu es heureuse. Peut-être dans l'instant présent en plus. Et que quand ce n'est pas le cas, tu l'exprimes et tu acceptes cette tristesse.

  • Pauline Messier

    Mais oui, c'est important d'exprimer, d'écouter son corps. C'est très, très important plutôt que d'intérioriser.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu pourrais me raconter un peu l'histoire de Pauline jusqu'à l'arrivée du diagnostic ?

  • Pauline Messier

    J'ai l'impression qu'il n'y a pas vraiment eu de changement entre avant et après.

  • Natacha Sels

    Donc, tu es née à Chambly ou tu as toujours vécu ?

  • Pauline Messier

    C'est ça. Chambly, c'est ma ville. Je m'y sens bien. C'est la meilleure ville au monde. Je veux y habiter toute ma vie.

  • Natacha Sels

    Et tu me disais que tu n'es pas la seule à y vivre. C'est une histoire de famille.

  • Pauline Messier

    C'est ça. Donc, il y a eu ma mère, ma grand-mère, mon arrière-grand-mère.

  • Natacha Sels

    Et qu'est-ce que tu aimes tant ici, alors ?

  • Pauline Messier

    Le fait que ce soit déjà une petite ville. Donc, tout est à proximité. Donc, c'est tout de suite beaucoup plus simple. Le cinéma est à proximité. Donc pour moi qui suis en fauteuil aujourd'hui, c'est génial parce que je peux y aller très facilement. Le collège est juste en face de chez moi, donc ça va être une petite ville...

  • Natacha Sels

    À taille humaine ?

  • Pauline Messier

    À taille humaine, c'est ça.

  • Natacha Sels

    D'accord. Donc une petite ville à taille humaine où tu vis comme l'ont fait ta maman, ta grand-mère et ton arrière-grand-mère et en même temps une baroudeuse qui va voir un petit peu ailleurs ce qui se passe. Est-ce que tu peux me dire les pays où tu as été ?

  • Pauline Messier

    J'ai eu la chance d'aller en Islande, un très très beau pays où j'ai vu des aurores boréales. Je pense que c'est le spectacle le plus beau de ma vie. J'ai fait la Jordanie, magnifique aussi. Le Sénégal, incroyable. Donc là, c'est un peu plus loin. Si on se rapproche aussi, j'ai fait l'Espagne, qui est magnifique. Je ne connaissais pas du tout le sud de l'Espagne et j'ai adoré. L'Angleterre, l'Italie et après on pourrait continuer mais ça fait pas mal déjà.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qui est important pour toi quand tu voyages ?

  • Pauline Messier

    C'est surtout les paysages vraiment plus naturels, des cascades, des grands arbres, des sentiers. Donc c'est plus ça, ça va être plus road trip.

  • Natacha Sels

    Tu m'as dit que tu étais partie aussi au Pérou, mais alors ça c'est une autre aventure, plus longue, est-ce que tu peux m'en parler ?

  • Pauline Messier

    J'avais 16 ans et j'étais dans une famille d'accueil, dans un lycée péruvien et ça a été une aventure extraordinaire.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce que ça t'a appris ?

  • Pauline Messier

    Connaître une culture totalement différente, des habitudes de vie aussi différentes. Une nourriture différente, la nourriture péruvienne est délicieuse. Je vais souvent à Paris manger péruvien.

  • Natacha Sels

    Tu parles espagnol très bien.

  • Pauline Messier

    Oui, mais c'est le temps. Ça fait très longtemps que je n'ai pas parlé espagnol, donc je suis un peu timide quand je parle espagnol. C'est une langue très joyeuse, très carinhosa. Vraiment, je n'arrive pas à traduire ce mot très caline. Voilà. Donc c'est une très très belle langue.

  • Natacha Sels

    Est-ce qu'il y a quelque chose avec lequel tu es revenue dans ta valise quand tu es revenue du Pérou ? Pas forcément un objet, mais quelque chose qu'ils t'ont donné en plus, que ce voyage t'a donné en plus.

  • Pauline Messier

    Le plus grand bonheur que j'ai eu, c'est les amis, ma famille d'accueil. C'est des souvenirs, ça va être tout ça en fait. Ça a été magique. Déjà quand je suis revenue du Pérou, j'ai fait un bachibac, donc c'est un double bac franco-espagnol. Ça m'a permis de profiter un peu de mon échange pour réussir aussi une partie du bac. Et par la suite j'ai commencé un BTS commerce international. Et malheureusement c'est le moment où j'ai commencé à faire des allers-retours à l'hôpital à Paris, sachant que j'étais à Saint-Malo. Donc là, j'ai dû arrêter.

  • Natacha Sels

    Alors comment tu t'es rendu compte que tu étais malade en fait ?

  • Pauline Messier

    Au départ, c'était très léger, c'est pour ça que je ne me suis pas inquiétée. Je boitais au niveau du pied et de la jambe gauche. C'était tellement léger que c'est les autres qui m'en parlaient. Au fur et à mesure, ça s'est accentué. Mais vu que je n'avais pas de douleur et que j'avais plein de choses à faire, je ne me suis pas trop inquiétée. Donc ça c'était en février 2022, et le moment où vraiment je suis allée voir mon premier neurologue, c'était en... septembre 2022.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu as compris ce que tu avais tout de suite ?

  • Pauline Messier

    Le premier neurologue, c'était pour déjà parler de mon souci à la jambe. Ensuite, il y a eu quand même quelques mois, enfin deux mois d'errance médicale où on cherchait vraiment ce que j'avais avec les batteries d'examen dans tous les sens. On nous a renvoyés en fait vers un neurologue et on ne savait pas qu'on allait avoir le diagnostic ce jour-là. Déjà, donc ça a été un peu un choc. Et ensuite, c'est vrai qu'on a eu du mal à comprendre, surtout moi qui ne m'intéressais pas trop à ce que j'avais dans mon corps. Je ne comprenais rien du tout à ce qui se passait. Et je suis sortie de là très joyeuse avec mes parents qui étaient presque en deuil. Alors ensuite, je suis allée sur Internet pour comprendre un petit peu. Rien de mieux qu'Internet, forcément.

  • Natacha Sels

    Ou rien de pire.

  • Pauline Messier

    Ou rien de pire. Et là, j'ai vu « Espérance de vie » de 3 à 4 ans. Et je rigole, mais c'est parce que quand je l'ai vue, j'ai vraiment rigolé. Et j'ai fait des vannes. Dans la nuit, j'ai commencé à beaucoup plus stresser. Et ce moment de stress, de temps qui passe, ça a duré 3 jours, où vraiment, je me suis dit « Mais là, là, il faut absolument que je fasse un milliard de choses. Je n'ai pas le temps de rester chez moi. »

  • Natacha Sels

    Et est-ce que tu as fait un milliard de choses ? Comment ça s'est manifesté ?

  • Pauline Messier

    J'ai fait beaucoup de choses, dont les voyages. Mais par la suite, j'ai finalement compris, et ça m'a fait du bien aussi, que je n'avais pas forcément besoin de faire plein de choses extraordinaires pour vivre, que j'avais le droit de me poser, que j'avais le droit de dormir, et ça m'a fait du bien.

  • Natacha Sels

    Quelque part, en fait, ce n'était pas la peine pour profiter de la vie d'être dans une course folle.

  • Pauline Messier

    Exactement, c'est ça. Bien sûr, ça m'a fait très plaisir et c'était des moments fabuleux que de voyager. Mais les moments où je me pose, où je suis avec mes amis, où je rigole avec mes parents, ça fait tout aussi plaisir. Et oui, c'est ça, c'est juste qu'on a le temps. Alors oui, il y a 3-4 ans, c'est ce que disent les statistiques, les médecins, mais on a le temps.

  • Natacha Sels

    Et même, ce n'est pas certain que ce soit 3-4 ans.

  • Pauline Messier

    Bien sûr, ça peut être moins.

  • Natacha Sels

    Peut-être, ou plus. Ou plus. Tu disais que tu avais entamé des études que tu as arrêtées. Où tu en es à ce niveau-là ?

  • Pauline Messier

    Du coup, j'ai toujours arrêté. Mais finalement, ce n'était pas une si mauvaise idée parce que le commerce, ce n'est pas mon domaine. Je ne sais pas du tout comment je suis arrivée là-bas. donc Je ne continue pas les études, mais j'essaie de remplir mon cerveau avec des choses qui me sont utiles.

  • Natacha Sels

    Alors, c'est quoi une journée type, par exemple ?

  • Pauline Messier

    Une journée classique chez moi. Je vais me réveiller par Karine, qui est mon auxiliaire de vie, qui vient tous les matins. On va papoter un petit peu, on va raconter nos vies. Elle va m'aider à me préparer. Elle me met mon parfum. Je vais lire. Je vais prier. Enfin, ça va dépendre. Je vais me renseigner sur un sujet qui m'a intéressée la veille ou sur des sujets d'actualité. Par exemple, sur l'affaire Pelicot, c'est des choses qui sont pour moi importantes.

  • Natacha Sels

    En quoi c'est important pour toi ?

  • Pauline Messier

    Notamment cette affaire, je pense qu'elle peut aider à changer beaucoup de choses, à changer le regard qu'on a sur les victimes. Et donc c'est vraiment important de vraiment se renseigner sur l'affaire, de comment ça se déroule, quels sont les débats.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu en fais quelque chose de toutes ces informations ? Ou est-ce que tu voudrais en faire quelque chose ?

  • Pauline Messier

    J'aimerais en faire quelque chose. Après, je ne me sens pas assez légitime.

  • Natacha Sels

    Pour le moment ?

  • Pauline Messier

    C'est ça, pour le moment. Donc, par exemple, je vais aussi me renseigner sur des sujets qui me concernent plus, comme par exemple le handicap. Et là, je me sens déjà un peu plus légitime pour en parler et pour faire bouger les choses aussi.

  • Natacha Sels

    Donc, le matin se passe.

  • Pauline Messier

    C'est ça, le matin se passe, le déjeuner. Ah, je sais, le midi. J'adore ce moment parce que ma mère arrête de travailler le midi, enfin, avant de reprendre l'après-midi. Et soit on va regarder en replay Koh Lanta, soit on va regarder la Star Ac'. Ça dépend de ce qu'on a dû regarder. Et donc j'aime bien ce petit moment avec ma mère. C'est un petit moment à toutes les deux. Et ensuite, je vais des fois aussi partir parce que j'ai une copine qui travaille à côté. Donc je vais lui passer un petit bonjour. J'aime bien écrire en fin d'après-midi. Je ne sais pas pourquoi, j'aime bien parce que souvent quand j'arrête d'écrire, je me rends compte qu'il fait nuit et que je suis dans le noir dans ma chambre et que je n'avais pas vu. Et j'aime bien cette sensation.

  • Natacha Sels

    Tu disais que tu écrivais de la poésie.

  • Pauline Messier

    Ce n'est pas du Lamartine, c'est du Messier. Ce n'est pas la même chose.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu voudrais m'en lire ?

  • Pauline Messier

    C'est quelque chose que j'écris, oui, vraiment dans l'intimité de ma chambre. C'est vraiment un moment très, très intime.

  • Natacha Sels

    En fait, c'est un passage fort pour quelqu'un qui écrit de oser le révéler. Merci pour ta confiance.

  • Pauline Messier

    Ok. Faut que je respire, faut que j'apprenne à respirer.

  • Natacha Sels

    Oui, voilà.

  • Pauline Messier

    Éternelle nature, pensant qu'avec le temps tout enfin se dépure, et perdus à la nuit les membres froids et lourds, j'attends éperdument la lune et ses discours, qui doivent annoncer le soleil qui rassure. J'attends le mois de mai qui bien souvent augure, des printemps merveilleux où naissent les amours, mais aussi les muguets qui décorent les cours, tout ce qu'a décidé l'éternelle nature. Au-delà des raisons, tous ces pouvoirs divins, règnent sur aujourd'hui et les siècles éteints, de l'Islande au Pérou, de la Brune à l'Aurore. Mais elle ne répond qu'à son propre désir, cette juge immuable au capricin sonore. Elle doit châtiller et tout naît pour mourir.

  • Natacha Sels

    Hein ?

  • Pauline Messier

    Je suis très, très timide là.

  • Natacha Sels

    Ça te fait quoi ?

  • Pauline Messier

    Euh... Là, déjà, physiquement parlant, je pense que la chaleur monte au jour. Mais euh... Ça me fait plaisir de partager, mais c'est vraiment parler à cœur ouvert. Il n'y a pas plus pour moi.

  • Natacha Sels

    Oui, on le sent. J'ai trouvé magnifique et en particulier, mais tout le poème, la première strophe est très, très belle. Et toi, est-ce que tu es fière quand tu lis ça ? Est-ce que tu sens que c'est beau ?

  • Pauline Messier

    Je trouve que c'est très dur d'être fière de ce qu'on écrit. Mais après, je me dis que c'est moi et je ne peux pas faire plus vrai. Donc, il faut être fière de soi. Parce que c'est des poèmes qui, à l'origine, sont pour moi. Je vais vraiment être dans un moment où je ne vais plus trop voir ce qui se passe autour. Les mots prennent le dessus. Et je ne vais pas pouvoir, moi, gérer ce que j'écris.

  • Natacha Sels

    C'est les mots qui vont tout seuls, là où ils veulent.

  • Pauline Messier

    Exactement. Donc, c'est très cliché. Mais c'est vraiment ce qui se passe.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu cherches quelque chose quand tu écris ?

  • Pauline Messier

    Forcément, je cherche le beau. Il faut toujours chercher le beau dans la vie au quotidien, mais notamment forcément dans la poésie.

  • Natacha Sels

    Et donc, tu cherches le beau ?

  • Pauline Messier

    Toujours.

  • Natacha Sels

    Et est-ce que tu le trouves ?

  • Pauline Messier

    Oui. Oui, oui.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu connais Grand Corps Malade ?

  • Pauline Messier

    Ah oui.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu connais Trouver l'instant ?

  • Pauline Messier

    Je ne connais pas les paroles.

  • Natacha Sels

    Alors j'ai envie de te le faire écouter.

  • Extrait de musique

    "On a trempé notre plume dans notre envie de changer de vision, en une route parallèle comme une furtive évasion. On a trempé notre plume et est-ce vraiment une hérésie ? De se dire qu'on l'assume, qu'on écrit de la poésie. L'existe paraît-il un instant dans l'écriture, Qui oublie la page blanche et efface les ratures. Un véritable état second, une espèce de trance, Qui apparaît mystérieusement et s'envole en silence. Que l'on rappe ou que l'on slame, on recherche ce moment, Il allume une flamme qui nous éclaire brièvement. Cette flamme est la preuve, laisse-moi t'en faire une des mots, Qu'il est possible de combattre le mal par les mots. C'est tout sauf une légende, on espère juste tout l'instant. Les quelques secondes du poète qui échappent à l'espace-temps, Les moments rares et irréels que la quiétude inonde, bouddha n'oublie jamais notre parole du bout du monde."

  • Pauline Messier

    C'est magnifique. Vraiment, c'est... De toute manière, il écrit merveilleusement bien.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qui t'a plu ? Est-ce qu'il y a des choses dans lesquelles tu te reconnais dans le contenu du texte ?

  • Pauline Messier

    Déjà, c'est ce que je disais juste avant, un peu cet état de trance aussi, qui peut paraître étrange à comprendre, mais ça arrive vraiment. Et oui, cette envie de toucher l'instant grâce aux mots.

  • Natacha Sels

    Et cet instant ? Est-ce que tu penses qu'il relie au plus grand et à Dieu ?

  • Pauline Messier

    Pour moi, tout relie à Dieu. Mais il y a aussi quelque chose... Dans "Toucher l'instant", c'est forcément le présent. Et c'est quelque chose que j'ai appris beaucoup avec la maladie. Alors je disais qu'il n'y avait pas beaucoup de choses qui avaient changé entre la Pauline d'avant et d'aujourd'hui. Mais la Pauline d'avant, elle avait tendance à beaucoup vivre dans le futur. Alors que là, j'ai appris à accepter le présent. Et déjà, à plus que m'en contenter, à l'apprécier.

  • Natacha Sels

    Comment ça s'apprend, ça ? Parce qu'on remarque souvent que... Et d'ailleurs, à un moment, tu le disais, finalement, tu faisais plein d'activités. Et finalement, est-ce qu'on ne court pas d'activité en activité sans se rendre compte qu'on est heureux ? Et puis là, c'est comme s'il y avait quelque chose qui avait changé quand même. Mais comment on fait ça ?

  • Pauline Messier

    Je ne sais pas si c'est forcément une condition de se rendre compte qu'on a une date de péremption. Il faut aussi... comprendre que tout le monde n'a pas les mêmes privilèges dans la vie. Il y en a beaucoup qui n'ont pas cette chance de se dire je profite de l'instant présent parce qu'il faut travailler, parce que il faut trouver une maison, il faut nourrir des enfants, il y a beaucoup de choses. Moi j'ai ce privilège là aujourd'hui. Alors oui je suis en situation de handicap, oui j'ai une maladie mais j'ai la chance de pouvoir être chez moi au chaud, de pouvoir voyager et c'est une chance énorme. Mais même si on n'a pas forcément ces privilèges-là. Il faut essayer, au moins le plus possible, de dire, voilà, je vais profiter d'un café avec des copains.

  • Natacha Sels

    Tout simplement.

  • Pauline Messier

    Tout simplement.

  • Natacha Sels

    Tu disais que, en fait, finalement, ça ne te rendait pas triste, parce que tu étais comme ça, heureuse, en fait. Tu es quelqu'un d'heureux. quoi qu'il arrive autour. Est-ce que tu sais que c'est une grande sagesse ?

  • Pauline Messier

    C'est vrai que sagesse et 22 ans, généralement, ça ne va pas ensemble. Et donc, ça me fait bizarre de l'entendre, mais ça me fait plaisir, c'est gentil.

  • Natacha Sels

    Dans le prochain épisode, vous retrouverez Pauline Messier, La joie dans l'âme, partie 2. Restez à l'écoute de notre podcast La Vie est Belle, essaie-la (SLA) ! et abonnez-vous sur votre plateforme préférée.

Description

À 22 ans, Pauline rayonne d’une joie lucide et profonde, malgré la SLA.

Dans l’intimité de sa chambre de princesse, entourée de poésie et de foi, elle nous parle de Lamartine, d’écriture, de voyages, et de sa manière singulière d’habiter le présent.

Une rencontre lumineuse et pleine de sagesse avec une jeune femme qui fait de chaque instant un acte de vie.


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Nous remercions chaleureusement toutes les personnes qui ont participé à cette deuxième saison : personnes malades, aidants, proches, chercheurs et professionnels de santé.


Ce podcast de l'ARLSA a été réalisé par Natacha Sels, la post-production est de Bertrand Chaumeton.

 

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Bonne écoute !


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Transcription

  • Natacha Sels

    La vie est belle, essaie-la ! Le podcast de l'ARSLA, qui met en lumière des personnes confrontées à la SLA et des professionnels engagés.

  • Pauline Messier

    Dans "Touhcer l'instant", c'est forcément le présent, quelque chose que j'ai appris beaucoup avec la maladie. Alors je disais qu'il n'y avait pas beaucoup de choses qui avaient changé entre la Pauline d'avant et d'aujourd'hui, mais la Pauline d'avant, elle avait tendance à beaucoup vivre dans le futur. Alors que là, j'ai appris à accepter le présent et déjà à plus que m'en contenter, à l'apprécier.

  • Natacha Sels

    Pauline Messier, La joie dans l'âme, partie 1. La première fois que j'ai vu Pauline, c'est sur un plateau de télévision. J'avais été bluffée par cette jeune personne de 20 ans, adressant un impétueux fou rire à la mort et à la maladie qui s'invitait sur son chemin. Aujourd'hui, Pauline a 22 ans et me propose de la rencontrer chez elle, dans l'Oise, où elle vit avec ses parents, dans un pavillon aussi lumineux, coquet et pimpant qu'elle. C'est un dimanche d'automne, un gâteau trône sur la table du salon, mais ce n'est pas encore l'heure d'y goûter. Pour le moment, nous nous retirons dans sa chambre, où je découvre une grande romantique, en conversation naturelle, avec Lamartine et avec Dieu. Elle rit de se la jouer princesse. Moi, je lui prêterai plutôt une joie inconditionnelle et une arme fatale, qui lui permet de toucher l'instant, sa plume, sagesse sur ton de badinage.

  • Pauline Messier

    Alors, ma chambre, on vient de la refaire parce qu'à l'origine, c'était un bureau et je voulais vraiment avoir mon espace à moi qui me ressemble. Donc, c'est une chambre couleur un peu coquille d'œuf avec des moulures un petit peu partout. Et ma petite coiffeuse pour me maquiller parce qu'on est dans du 100% princesse. Avec une grande bibliothèque que mon père a fait. J'aime beaucoup les livres. J'aime beaucoup, beaucoup Lamartine. Lamartine, Verlaine, j'aime bien Zola, Dumas aussi. Après voilà, ça va être surtout la poésie avant le XXe.

  • Natacha Sels

    Entre la princesse et Lamartine, je sens une grande romantique.

  • Pauline Messier

    Ah oui, oui, on peut dire ça.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qui te touche dans Lamartine ?

  • Pauline Messier

    Euh... Je pense déjà à son histoire avec son amour perdu. Et c'est vraiment la douleur face à la mort, quelque chose aussi que je comprends, même si je ne suis pas du côté de Lamartine. Des questions qui se posent par rapport à la vie, pourquoi, les injustices aussi. Et tout ça dans un style très beau, très doux, avec beaucoup de nature aussi. Donc ça m'amène aussi un contraste entre la beauté de la nature et... on va dire la douleur et la mort. J'ai découvert ces poèmes au moment où j'avais la maladie. Et ça a vraiment eu, ça a fait un déclic en moi. Donc c'est vraiment à ce moment-là que j'ai été touchée.

  • Natacha Sels

    Et qu'est-ce que ça t'a apporté comme éclairage ou comme peut-être un baume ?

  • Pauline Messier

    Oui, c'est plus du baume, j'irais. Sentir en fait le même sentiment et chez... quelqu'un qui n'est plus là depuis très longtemps et chez moi. Bizarrement, je n'avais pas envie de parler avec des personnes actuelles qui ont forcément la maladie, mais j'appréciais partager ces moments avec Lamartine.

  • Natacha Sels

    C'est joli de dire partager des moments avec Lamartine. Donc tu le relis régulièrement ?

  • Pauline Messier

    Je le lis vraiment tout le temps. Il y a un poème en particulier que je relis en boucle, en boucle, en boucle. Je le connais presque par cœur. Pourtant, il fait quelques pages quand même. Et donc c'est le désespoir et c'est un poème magnifique.

  • Natacha Sels

    J'aimerais beaucoup que tu le lises.

  • Pauline Messier

    Voilà.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu veux que je le prenne ?

  • Pauline Messier

    Le blanc, Lamartine, en haut. Juste en haut,voilà.

  • Natacha Sels

    Oui, choisis le passage que tu veux.

  • Pauline Messier

    Il faut savoir aussi que Lamartine, il me touche parce qu'il est chrétien, comme moi. Mais ça m'a vraiment permis de déculpabiliser aussi et juste de voir que oui, on peut être chrétien et avoir des doutes aussi. Donc la partie qui vraiment m'a énormément touchée, c'est celle-ci. Créateur, Tout-Puissant, Principe de Tout-Être, Toi pour qui le possible existe avant de naître, Roi de l'immensité, Tu pouvais cependant, au gré de ton envie, Puiser pour tes enfants le bonheur et la vie dans ton éternité. Sans t'épuiser jamais, sur toute la nature, Tu pouvais à long flot répandre sans mesure un bonheur absolu. L'espace, le pouvoir, le temps, rien ne te coûte. Ah, ma raison frémit, tu le pouvais sans doute. Tu ne l'as pas voulu.

  • Natacha Sels

    Merci.

  • Pauline Messier

    J'ai du mal à m'exprimer vraiment, surtout sur cette partie, parce que c'est plus quelque chose que je vais ressentir. Et le titre du poème, Le Désespoir, c'est l'incompréhension, c'est les questions sans réponse. Pourquoi moi ? Déjà, la première. Pas forcément pourquoi moi, mais juste pourquoi, déjà. Comment je vais faire, c'est quoi mon futur, qu'est-ce que je vais devenir. On va dire qu'à 20 ans, on n'a rien vu du monde. Et c'est dur de nous priver de futur dès 20 ans.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu as déjà certaines réponses à tes questions ? Ou une manière de mettre ton baume à toi ?

  • Pauline Messier

    Comme je l'ai dit, je suis aussi chrétienne, donc même si j'ai mes questions, je sais et je suis persuadée qu'il y a des réponses et que rien n'est là par hasard. Donc je n'ai pas à avoir peur, mais dans les moments où ça va être plus compliqué, oui je vais prendre un stylo et une feuille. J'ai un peu plus de mal à écrire maintenant, donc je vais plus prendre un clavier et je vais écrire. Et ça va me faire du bien.

  • Natacha Sels

    Alors tu t'es mis à écrire avec la maladie ou c'était quelque chose qui était déjà là ?

  • Pauline Messier

    J'ai toujours écrit. Je crois que les premiers poèmes datent de quand j'avais 6 ans. Et après j'ai un peu arrêté avec l'adolescence, les sorties, etc. Et je me suis remis à écrire avec la maladie. Dès que j'ai commencé à faire les examens pour savoir ce que j'avais, sans m'en rendre compte, j'avais recommencé. Écrire des mots, partir par là, des vers. J'aime beaucoup la sonorité des mots.

  • Natacha Sels

    Et comment ça se fait que tu es attachée à la musique des mots, comme ça ?

  • Pauline Messier

    Alors là, c'est une question à laquelle je n'ai pas forcément de réponse. J'ai toujours aimé l'art d'une manière générale. Ah si, je pense que j'ai une réponse. Déjà, mon père a toujours écrit de la poésie. Je suis persuadée que ça peut aussi se transmettre par les gènes. Donc voilà.

  • Natacha Sels

    Je pense qu'en fait, tu parles, je ne sais pas si je dois dire de religion ou de foi.

  • Pauline Messier

    Je parlerais plus de foi. Quand on est seul, en tout cas pour moi, avec Dieu, ça va être vraiment de la foi. Ça va être une relation plutôt qu'une religion. Donc une relation c'est comme avec des amis, c'est parler, c'est demander des choses.

  • Natacha Sels

    Alors donc tu as une conversation avec Dieu ?

  • Pauline Messier

    Oui c'est ça, le matin, le soir, une conversation, je vais parler et je vais recevoir mais plus à l'intérieur de moi, du bien-être etc.

  • Natacha Sels

    Quelles sont les autres choses qui te soutiennent depuis que tu as reçu l'annonce du diagnostic ?

  • Pauline Messier

    Il va y avoir les voyages. Donc là, c'est plus le côté vraiment activité. Donc voyages, le théâtre, les sorties. Mais le plus important, ça va être surtout la famille, les amis qui sont très présents. Après, j'ai quand même de la chance parce que je n'ai jamais été trop triste par rapport à la maladie. À chaque fois, je suis très mal à l'aise de dire parce que j'ai l'impression qu'on n'a pas vraiment le droit de le dire. Mais je vais bien. Donc est-ce que c'est parce que j'ai la foi ? Est-ce que c'est parce que je vais écouter mon corps et que si à tel moment je vais avoir un peu de tristesse, je vais écrire ? Peut-être. Mais c'est vrai que je suis bien et je suis heureuse.

  • Natacha Sels

    Ce que j'entends dans ce que tu dis, c'est que la plupart du temps tu es heureuse. Peut-être dans l'instant présent en plus. Et que quand ce n'est pas le cas, tu l'exprimes et tu acceptes cette tristesse.

  • Pauline Messier

    Mais oui, c'est important d'exprimer, d'écouter son corps. C'est très, très important plutôt que d'intérioriser.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu pourrais me raconter un peu l'histoire de Pauline jusqu'à l'arrivée du diagnostic ?

  • Pauline Messier

    J'ai l'impression qu'il n'y a pas vraiment eu de changement entre avant et après.

  • Natacha Sels

    Donc, tu es née à Chambly ou tu as toujours vécu ?

  • Pauline Messier

    C'est ça. Chambly, c'est ma ville. Je m'y sens bien. C'est la meilleure ville au monde. Je veux y habiter toute ma vie.

  • Natacha Sels

    Et tu me disais que tu n'es pas la seule à y vivre. C'est une histoire de famille.

  • Pauline Messier

    C'est ça. Donc, il y a eu ma mère, ma grand-mère, mon arrière-grand-mère.

  • Natacha Sels

    Et qu'est-ce que tu aimes tant ici, alors ?

  • Pauline Messier

    Le fait que ce soit déjà une petite ville. Donc, tout est à proximité. Donc, c'est tout de suite beaucoup plus simple. Le cinéma est à proximité. Donc pour moi qui suis en fauteuil aujourd'hui, c'est génial parce que je peux y aller très facilement. Le collège est juste en face de chez moi, donc ça va être une petite ville...

  • Natacha Sels

    À taille humaine ?

  • Pauline Messier

    À taille humaine, c'est ça.

  • Natacha Sels

    D'accord. Donc une petite ville à taille humaine où tu vis comme l'ont fait ta maman, ta grand-mère et ton arrière-grand-mère et en même temps une baroudeuse qui va voir un petit peu ailleurs ce qui se passe. Est-ce que tu peux me dire les pays où tu as été ?

  • Pauline Messier

    J'ai eu la chance d'aller en Islande, un très très beau pays où j'ai vu des aurores boréales. Je pense que c'est le spectacle le plus beau de ma vie. J'ai fait la Jordanie, magnifique aussi. Le Sénégal, incroyable. Donc là, c'est un peu plus loin. Si on se rapproche aussi, j'ai fait l'Espagne, qui est magnifique. Je ne connaissais pas du tout le sud de l'Espagne et j'ai adoré. L'Angleterre, l'Italie et après on pourrait continuer mais ça fait pas mal déjà.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qui est important pour toi quand tu voyages ?

  • Pauline Messier

    C'est surtout les paysages vraiment plus naturels, des cascades, des grands arbres, des sentiers. Donc c'est plus ça, ça va être plus road trip.

  • Natacha Sels

    Tu m'as dit que tu étais partie aussi au Pérou, mais alors ça c'est une autre aventure, plus longue, est-ce que tu peux m'en parler ?

  • Pauline Messier

    J'avais 16 ans et j'étais dans une famille d'accueil, dans un lycée péruvien et ça a été une aventure extraordinaire.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce que ça t'a appris ?

  • Pauline Messier

    Connaître une culture totalement différente, des habitudes de vie aussi différentes. Une nourriture différente, la nourriture péruvienne est délicieuse. Je vais souvent à Paris manger péruvien.

  • Natacha Sels

    Tu parles espagnol très bien.

  • Pauline Messier

    Oui, mais c'est le temps. Ça fait très longtemps que je n'ai pas parlé espagnol, donc je suis un peu timide quand je parle espagnol. C'est une langue très joyeuse, très carinhosa. Vraiment, je n'arrive pas à traduire ce mot très caline. Voilà. Donc c'est une très très belle langue.

  • Natacha Sels

    Est-ce qu'il y a quelque chose avec lequel tu es revenue dans ta valise quand tu es revenue du Pérou ? Pas forcément un objet, mais quelque chose qu'ils t'ont donné en plus, que ce voyage t'a donné en plus.

  • Pauline Messier

    Le plus grand bonheur que j'ai eu, c'est les amis, ma famille d'accueil. C'est des souvenirs, ça va être tout ça en fait. Ça a été magique. Déjà quand je suis revenue du Pérou, j'ai fait un bachibac, donc c'est un double bac franco-espagnol. Ça m'a permis de profiter un peu de mon échange pour réussir aussi une partie du bac. Et par la suite j'ai commencé un BTS commerce international. Et malheureusement c'est le moment où j'ai commencé à faire des allers-retours à l'hôpital à Paris, sachant que j'étais à Saint-Malo. Donc là, j'ai dû arrêter.

  • Natacha Sels

    Alors comment tu t'es rendu compte que tu étais malade en fait ?

  • Pauline Messier

    Au départ, c'était très léger, c'est pour ça que je ne me suis pas inquiétée. Je boitais au niveau du pied et de la jambe gauche. C'était tellement léger que c'est les autres qui m'en parlaient. Au fur et à mesure, ça s'est accentué. Mais vu que je n'avais pas de douleur et que j'avais plein de choses à faire, je ne me suis pas trop inquiétée. Donc ça c'était en février 2022, et le moment où vraiment je suis allée voir mon premier neurologue, c'était en... septembre 2022.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu as compris ce que tu avais tout de suite ?

  • Pauline Messier

    Le premier neurologue, c'était pour déjà parler de mon souci à la jambe. Ensuite, il y a eu quand même quelques mois, enfin deux mois d'errance médicale où on cherchait vraiment ce que j'avais avec les batteries d'examen dans tous les sens. On nous a renvoyés en fait vers un neurologue et on ne savait pas qu'on allait avoir le diagnostic ce jour-là. Déjà, donc ça a été un peu un choc. Et ensuite, c'est vrai qu'on a eu du mal à comprendre, surtout moi qui ne m'intéressais pas trop à ce que j'avais dans mon corps. Je ne comprenais rien du tout à ce qui se passait. Et je suis sortie de là très joyeuse avec mes parents qui étaient presque en deuil. Alors ensuite, je suis allée sur Internet pour comprendre un petit peu. Rien de mieux qu'Internet, forcément.

  • Natacha Sels

    Ou rien de pire.

  • Pauline Messier

    Ou rien de pire. Et là, j'ai vu « Espérance de vie » de 3 à 4 ans. Et je rigole, mais c'est parce que quand je l'ai vue, j'ai vraiment rigolé. Et j'ai fait des vannes. Dans la nuit, j'ai commencé à beaucoup plus stresser. Et ce moment de stress, de temps qui passe, ça a duré 3 jours, où vraiment, je me suis dit « Mais là, là, il faut absolument que je fasse un milliard de choses. Je n'ai pas le temps de rester chez moi. »

  • Natacha Sels

    Et est-ce que tu as fait un milliard de choses ? Comment ça s'est manifesté ?

  • Pauline Messier

    J'ai fait beaucoup de choses, dont les voyages. Mais par la suite, j'ai finalement compris, et ça m'a fait du bien aussi, que je n'avais pas forcément besoin de faire plein de choses extraordinaires pour vivre, que j'avais le droit de me poser, que j'avais le droit de dormir, et ça m'a fait du bien.

  • Natacha Sels

    Quelque part, en fait, ce n'était pas la peine pour profiter de la vie d'être dans une course folle.

  • Pauline Messier

    Exactement, c'est ça. Bien sûr, ça m'a fait très plaisir et c'était des moments fabuleux que de voyager. Mais les moments où je me pose, où je suis avec mes amis, où je rigole avec mes parents, ça fait tout aussi plaisir. Et oui, c'est ça, c'est juste qu'on a le temps. Alors oui, il y a 3-4 ans, c'est ce que disent les statistiques, les médecins, mais on a le temps.

  • Natacha Sels

    Et même, ce n'est pas certain que ce soit 3-4 ans.

  • Pauline Messier

    Bien sûr, ça peut être moins.

  • Natacha Sels

    Peut-être, ou plus. Ou plus. Tu disais que tu avais entamé des études que tu as arrêtées. Où tu en es à ce niveau-là ?

  • Pauline Messier

    Du coup, j'ai toujours arrêté. Mais finalement, ce n'était pas une si mauvaise idée parce que le commerce, ce n'est pas mon domaine. Je ne sais pas du tout comment je suis arrivée là-bas. donc Je ne continue pas les études, mais j'essaie de remplir mon cerveau avec des choses qui me sont utiles.

  • Natacha Sels

    Alors, c'est quoi une journée type, par exemple ?

  • Pauline Messier

    Une journée classique chez moi. Je vais me réveiller par Karine, qui est mon auxiliaire de vie, qui vient tous les matins. On va papoter un petit peu, on va raconter nos vies. Elle va m'aider à me préparer. Elle me met mon parfum. Je vais lire. Je vais prier. Enfin, ça va dépendre. Je vais me renseigner sur un sujet qui m'a intéressée la veille ou sur des sujets d'actualité. Par exemple, sur l'affaire Pelicot, c'est des choses qui sont pour moi importantes.

  • Natacha Sels

    En quoi c'est important pour toi ?

  • Pauline Messier

    Notamment cette affaire, je pense qu'elle peut aider à changer beaucoup de choses, à changer le regard qu'on a sur les victimes. Et donc c'est vraiment important de vraiment se renseigner sur l'affaire, de comment ça se déroule, quels sont les débats.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu en fais quelque chose de toutes ces informations ? Ou est-ce que tu voudrais en faire quelque chose ?

  • Pauline Messier

    J'aimerais en faire quelque chose. Après, je ne me sens pas assez légitime.

  • Natacha Sels

    Pour le moment ?

  • Pauline Messier

    C'est ça, pour le moment. Donc, par exemple, je vais aussi me renseigner sur des sujets qui me concernent plus, comme par exemple le handicap. Et là, je me sens déjà un peu plus légitime pour en parler et pour faire bouger les choses aussi.

  • Natacha Sels

    Donc, le matin se passe.

  • Pauline Messier

    C'est ça, le matin se passe, le déjeuner. Ah, je sais, le midi. J'adore ce moment parce que ma mère arrête de travailler le midi, enfin, avant de reprendre l'après-midi. Et soit on va regarder en replay Koh Lanta, soit on va regarder la Star Ac'. Ça dépend de ce qu'on a dû regarder. Et donc j'aime bien ce petit moment avec ma mère. C'est un petit moment à toutes les deux. Et ensuite, je vais des fois aussi partir parce que j'ai une copine qui travaille à côté. Donc je vais lui passer un petit bonjour. J'aime bien écrire en fin d'après-midi. Je ne sais pas pourquoi, j'aime bien parce que souvent quand j'arrête d'écrire, je me rends compte qu'il fait nuit et que je suis dans le noir dans ma chambre et que je n'avais pas vu. Et j'aime bien cette sensation.

  • Natacha Sels

    Tu disais que tu écrivais de la poésie.

  • Pauline Messier

    Ce n'est pas du Lamartine, c'est du Messier. Ce n'est pas la même chose.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu voudrais m'en lire ?

  • Pauline Messier

    C'est quelque chose que j'écris, oui, vraiment dans l'intimité de ma chambre. C'est vraiment un moment très, très intime.

  • Natacha Sels

    En fait, c'est un passage fort pour quelqu'un qui écrit de oser le révéler. Merci pour ta confiance.

  • Pauline Messier

    Ok. Faut que je respire, faut que j'apprenne à respirer.

  • Natacha Sels

    Oui, voilà.

  • Pauline Messier

    Éternelle nature, pensant qu'avec le temps tout enfin se dépure, et perdus à la nuit les membres froids et lourds, j'attends éperdument la lune et ses discours, qui doivent annoncer le soleil qui rassure. J'attends le mois de mai qui bien souvent augure, des printemps merveilleux où naissent les amours, mais aussi les muguets qui décorent les cours, tout ce qu'a décidé l'éternelle nature. Au-delà des raisons, tous ces pouvoirs divins, règnent sur aujourd'hui et les siècles éteints, de l'Islande au Pérou, de la Brune à l'Aurore. Mais elle ne répond qu'à son propre désir, cette juge immuable au capricin sonore. Elle doit châtiller et tout naît pour mourir.

  • Natacha Sels

    Hein ?

  • Pauline Messier

    Je suis très, très timide là.

  • Natacha Sels

    Ça te fait quoi ?

  • Pauline Messier

    Euh... Là, déjà, physiquement parlant, je pense que la chaleur monte au jour. Mais euh... Ça me fait plaisir de partager, mais c'est vraiment parler à cœur ouvert. Il n'y a pas plus pour moi.

  • Natacha Sels

    Oui, on le sent. J'ai trouvé magnifique et en particulier, mais tout le poème, la première strophe est très, très belle. Et toi, est-ce que tu es fière quand tu lis ça ? Est-ce que tu sens que c'est beau ?

  • Pauline Messier

    Je trouve que c'est très dur d'être fière de ce qu'on écrit. Mais après, je me dis que c'est moi et je ne peux pas faire plus vrai. Donc, il faut être fière de soi. Parce que c'est des poèmes qui, à l'origine, sont pour moi. Je vais vraiment être dans un moment où je ne vais plus trop voir ce qui se passe autour. Les mots prennent le dessus. Et je ne vais pas pouvoir, moi, gérer ce que j'écris.

  • Natacha Sels

    C'est les mots qui vont tout seuls, là où ils veulent.

  • Pauline Messier

    Exactement. Donc, c'est très cliché. Mais c'est vraiment ce qui se passe.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu cherches quelque chose quand tu écris ?

  • Pauline Messier

    Forcément, je cherche le beau. Il faut toujours chercher le beau dans la vie au quotidien, mais notamment forcément dans la poésie.

  • Natacha Sels

    Et donc, tu cherches le beau ?

  • Pauline Messier

    Toujours.

  • Natacha Sels

    Et est-ce que tu le trouves ?

  • Pauline Messier

    Oui. Oui, oui.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu connais Grand Corps Malade ?

  • Pauline Messier

    Ah oui.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu connais Trouver l'instant ?

  • Pauline Messier

    Je ne connais pas les paroles.

  • Natacha Sels

    Alors j'ai envie de te le faire écouter.

  • Extrait de musique

    "On a trempé notre plume dans notre envie de changer de vision, en une route parallèle comme une furtive évasion. On a trempé notre plume et est-ce vraiment une hérésie ? De se dire qu'on l'assume, qu'on écrit de la poésie. L'existe paraît-il un instant dans l'écriture, Qui oublie la page blanche et efface les ratures. Un véritable état second, une espèce de trance, Qui apparaît mystérieusement et s'envole en silence. Que l'on rappe ou que l'on slame, on recherche ce moment, Il allume une flamme qui nous éclaire brièvement. Cette flamme est la preuve, laisse-moi t'en faire une des mots, Qu'il est possible de combattre le mal par les mots. C'est tout sauf une légende, on espère juste tout l'instant. Les quelques secondes du poète qui échappent à l'espace-temps, Les moments rares et irréels que la quiétude inonde, bouddha n'oublie jamais notre parole du bout du monde."

  • Pauline Messier

    C'est magnifique. Vraiment, c'est... De toute manière, il écrit merveilleusement bien.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qui t'a plu ? Est-ce qu'il y a des choses dans lesquelles tu te reconnais dans le contenu du texte ?

  • Pauline Messier

    Déjà, c'est ce que je disais juste avant, un peu cet état de trance aussi, qui peut paraître étrange à comprendre, mais ça arrive vraiment. Et oui, cette envie de toucher l'instant grâce aux mots.

  • Natacha Sels

    Et cet instant ? Est-ce que tu penses qu'il relie au plus grand et à Dieu ?

  • Pauline Messier

    Pour moi, tout relie à Dieu. Mais il y a aussi quelque chose... Dans "Toucher l'instant", c'est forcément le présent. Et c'est quelque chose que j'ai appris beaucoup avec la maladie. Alors je disais qu'il n'y avait pas beaucoup de choses qui avaient changé entre la Pauline d'avant et d'aujourd'hui. Mais la Pauline d'avant, elle avait tendance à beaucoup vivre dans le futur. Alors que là, j'ai appris à accepter le présent. Et déjà, à plus que m'en contenter, à l'apprécier.

  • Natacha Sels

    Comment ça s'apprend, ça ? Parce qu'on remarque souvent que... Et d'ailleurs, à un moment, tu le disais, finalement, tu faisais plein d'activités. Et finalement, est-ce qu'on ne court pas d'activité en activité sans se rendre compte qu'on est heureux ? Et puis là, c'est comme s'il y avait quelque chose qui avait changé quand même. Mais comment on fait ça ?

  • Pauline Messier

    Je ne sais pas si c'est forcément une condition de se rendre compte qu'on a une date de péremption. Il faut aussi... comprendre que tout le monde n'a pas les mêmes privilèges dans la vie. Il y en a beaucoup qui n'ont pas cette chance de se dire je profite de l'instant présent parce qu'il faut travailler, parce que il faut trouver une maison, il faut nourrir des enfants, il y a beaucoup de choses. Moi j'ai ce privilège là aujourd'hui. Alors oui je suis en situation de handicap, oui j'ai une maladie mais j'ai la chance de pouvoir être chez moi au chaud, de pouvoir voyager et c'est une chance énorme. Mais même si on n'a pas forcément ces privilèges-là. Il faut essayer, au moins le plus possible, de dire, voilà, je vais profiter d'un café avec des copains.

  • Natacha Sels

    Tout simplement.

  • Pauline Messier

    Tout simplement.

  • Natacha Sels

    Tu disais que, en fait, finalement, ça ne te rendait pas triste, parce que tu étais comme ça, heureuse, en fait. Tu es quelqu'un d'heureux. quoi qu'il arrive autour. Est-ce que tu sais que c'est une grande sagesse ?

  • Pauline Messier

    C'est vrai que sagesse et 22 ans, généralement, ça ne va pas ensemble. Et donc, ça me fait bizarre de l'entendre, mais ça me fait plaisir, c'est gentil.

  • Natacha Sels

    Dans le prochain épisode, vous retrouverez Pauline Messier, La joie dans l'âme, partie 2. Restez à l'écoute de notre podcast La Vie est Belle, essaie-la (SLA) ! et abonnez-vous sur votre plateforme préférée.

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À 22 ans, Pauline rayonne d’une joie lucide et profonde, malgré la SLA.

Dans l’intimité de sa chambre de princesse, entourée de poésie et de foi, elle nous parle de Lamartine, d’écriture, de voyages, et de sa manière singulière d’habiter le présent.

Une rencontre lumineuse et pleine de sagesse avec une jeune femme qui fait de chaque instant un acte de vie.


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Transcription

  • Natacha Sels

    La vie est belle, essaie-la ! Le podcast de l'ARSLA, qui met en lumière des personnes confrontées à la SLA et des professionnels engagés.

  • Pauline Messier

    Dans "Touhcer l'instant", c'est forcément le présent, quelque chose que j'ai appris beaucoup avec la maladie. Alors je disais qu'il n'y avait pas beaucoup de choses qui avaient changé entre la Pauline d'avant et d'aujourd'hui, mais la Pauline d'avant, elle avait tendance à beaucoup vivre dans le futur. Alors que là, j'ai appris à accepter le présent et déjà à plus que m'en contenter, à l'apprécier.

  • Natacha Sels

    Pauline Messier, La joie dans l'âme, partie 1. La première fois que j'ai vu Pauline, c'est sur un plateau de télévision. J'avais été bluffée par cette jeune personne de 20 ans, adressant un impétueux fou rire à la mort et à la maladie qui s'invitait sur son chemin. Aujourd'hui, Pauline a 22 ans et me propose de la rencontrer chez elle, dans l'Oise, où elle vit avec ses parents, dans un pavillon aussi lumineux, coquet et pimpant qu'elle. C'est un dimanche d'automne, un gâteau trône sur la table du salon, mais ce n'est pas encore l'heure d'y goûter. Pour le moment, nous nous retirons dans sa chambre, où je découvre une grande romantique, en conversation naturelle, avec Lamartine et avec Dieu. Elle rit de se la jouer princesse. Moi, je lui prêterai plutôt une joie inconditionnelle et une arme fatale, qui lui permet de toucher l'instant, sa plume, sagesse sur ton de badinage.

  • Pauline Messier

    Alors, ma chambre, on vient de la refaire parce qu'à l'origine, c'était un bureau et je voulais vraiment avoir mon espace à moi qui me ressemble. Donc, c'est une chambre couleur un peu coquille d'œuf avec des moulures un petit peu partout. Et ma petite coiffeuse pour me maquiller parce qu'on est dans du 100% princesse. Avec une grande bibliothèque que mon père a fait. J'aime beaucoup les livres. J'aime beaucoup, beaucoup Lamartine. Lamartine, Verlaine, j'aime bien Zola, Dumas aussi. Après voilà, ça va être surtout la poésie avant le XXe.

  • Natacha Sels

    Entre la princesse et Lamartine, je sens une grande romantique.

  • Pauline Messier

    Ah oui, oui, on peut dire ça.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qui te touche dans Lamartine ?

  • Pauline Messier

    Euh... Je pense déjà à son histoire avec son amour perdu. Et c'est vraiment la douleur face à la mort, quelque chose aussi que je comprends, même si je ne suis pas du côté de Lamartine. Des questions qui se posent par rapport à la vie, pourquoi, les injustices aussi. Et tout ça dans un style très beau, très doux, avec beaucoup de nature aussi. Donc ça m'amène aussi un contraste entre la beauté de la nature et... on va dire la douleur et la mort. J'ai découvert ces poèmes au moment où j'avais la maladie. Et ça a vraiment eu, ça a fait un déclic en moi. Donc c'est vraiment à ce moment-là que j'ai été touchée.

  • Natacha Sels

    Et qu'est-ce que ça t'a apporté comme éclairage ou comme peut-être un baume ?

  • Pauline Messier

    Oui, c'est plus du baume, j'irais. Sentir en fait le même sentiment et chez... quelqu'un qui n'est plus là depuis très longtemps et chez moi. Bizarrement, je n'avais pas envie de parler avec des personnes actuelles qui ont forcément la maladie, mais j'appréciais partager ces moments avec Lamartine.

  • Natacha Sels

    C'est joli de dire partager des moments avec Lamartine. Donc tu le relis régulièrement ?

  • Pauline Messier

    Je le lis vraiment tout le temps. Il y a un poème en particulier que je relis en boucle, en boucle, en boucle. Je le connais presque par cœur. Pourtant, il fait quelques pages quand même. Et donc c'est le désespoir et c'est un poème magnifique.

  • Natacha Sels

    J'aimerais beaucoup que tu le lises.

  • Pauline Messier

    Voilà.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu veux que je le prenne ?

  • Pauline Messier

    Le blanc, Lamartine, en haut. Juste en haut,voilà.

  • Natacha Sels

    Oui, choisis le passage que tu veux.

  • Pauline Messier

    Il faut savoir aussi que Lamartine, il me touche parce qu'il est chrétien, comme moi. Mais ça m'a vraiment permis de déculpabiliser aussi et juste de voir que oui, on peut être chrétien et avoir des doutes aussi. Donc la partie qui vraiment m'a énormément touchée, c'est celle-ci. Créateur, Tout-Puissant, Principe de Tout-Être, Toi pour qui le possible existe avant de naître, Roi de l'immensité, Tu pouvais cependant, au gré de ton envie, Puiser pour tes enfants le bonheur et la vie dans ton éternité. Sans t'épuiser jamais, sur toute la nature, Tu pouvais à long flot répandre sans mesure un bonheur absolu. L'espace, le pouvoir, le temps, rien ne te coûte. Ah, ma raison frémit, tu le pouvais sans doute. Tu ne l'as pas voulu.

  • Natacha Sels

    Merci.

  • Pauline Messier

    J'ai du mal à m'exprimer vraiment, surtout sur cette partie, parce que c'est plus quelque chose que je vais ressentir. Et le titre du poème, Le Désespoir, c'est l'incompréhension, c'est les questions sans réponse. Pourquoi moi ? Déjà, la première. Pas forcément pourquoi moi, mais juste pourquoi, déjà. Comment je vais faire, c'est quoi mon futur, qu'est-ce que je vais devenir. On va dire qu'à 20 ans, on n'a rien vu du monde. Et c'est dur de nous priver de futur dès 20 ans.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu as déjà certaines réponses à tes questions ? Ou une manière de mettre ton baume à toi ?

  • Pauline Messier

    Comme je l'ai dit, je suis aussi chrétienne, donc même si j'ai mes questions, je sais et je suis persuadée qu'il y a des réponses et que rien n'est là par hasard. Donc je n'ai pas à avoir peur, mais dans les moments où ça va être plus compliqué, oui je vais prendre un stylo et une feuille. J'ai un peu plus de mal à écrire maintenant, donc je vais plus prendre un clavier et je vais écrire. Et ça va me faire du bien.

  • Natacha Sels

    Alors tu t'es mis à écrire avec la maladie ou c'était quelque chose qui était déjà là ?

  • Pauline Messier

    J'ai toujours écrit. Je crois que les premiers poèmes datent de quand j'avais 6 ans. Et après j'ai un peu arrêté avec l'adolescence, les sorties, etc. Et je me suis remis à écrire avec la maladie. Dès que j'ai commencé à faire les examens pour savoir ce que j'avais, sans m'en rendre compte, j'avais recommencé. Écrire des mots, partir par là, des vers. J'aime beaucoup la sonorité des mots.

  • Natacha Sels

    Et comment ça se fait que tu es attachée à la musique des mots, comme ça ?

  • Pauline Messier

    Alors là, c'est une question à laquelle je n'ai pas forcément de réponse. J'ai toujours aimé l'art d'une manière générale. Ah si, je pense que j'ai une réponse. Déjà, mon père a toujours écrit de la poésie. Je suis persuadée que ça peut aussi se transmettre par les gènes. Donc voilà.

  • Natacha Sels

    Je pense qu'en fait, tu parles, je ne sais pas si je dois dire de religion ou de foi.

  • Pauline Messier

    Je parlerais plus de foi. Quand on est seul, en tout cas pour moi, avec Dieu, ça va être vraiment de la foi. Ça va être une relation plutôt qu'une religion. Donc une relation c'est comme avec des amis, c'est parler, c'est demander des choses.

  • Natacha Sels

    Alors donc tu as une conversation avec Dieu ?

  • Pauline Messier

    Oui c'est ça, le matin, le soir, une conversation, je vais parler et je vais recevoir mais plus à l'intérieur de moi, du bien-être etc.

  • Natacha Sels

    Quelles sont les autres choses qui te soutiennent depuis que tu as reçu l'annonce du diagnostic ?

  • Pauline Messier

    Il va y avoir les voyages. Donc là, c'est plus le côté vraiment activité. Donc voyages, le théâtre, les sorties. Mais le plus important, ça va être surtout la famille, les amis qui sont très présents. Après, j'ai quand même de la chance parce que je n'ai jamais été trop triste par rapport à la maladie. À chaque fois, je suis très mal à l'aise de dire parce que j'ai l'impression qu'on n'a pas vraiment le droit de le dire. Mais je vais bien. Donc est-ce que c'est parce que j'ai la foi ? Est-ce que c'est parce que je vais écouter mon corps et que si à tel moment je vais avoir un peu de tristesse, je vais écrire ? Peut-être. Mais c'est vrai que je suis bien et je suis heureuse.

  • Natacha Sels

    Ce que j'entends dans ce que tu dis, c'est que la plupart du temps tu es heureuse. Peut-être dans l'instant présent en plus. Et que quand ce n'est pas le cas, tu l'exprimes et tu acceptes cette tristesse.

  • Pauline Messier

    Mais oui, c'est important d'exprimer, d'écouter son corps. C'est très, très important plutôt que d'intérioriser.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu pourrais me raconter un peu l'histoire de Pauline jusqu'à l'arrivée du diagnostic ?

  • Pauline Messier

    J'ai l'impression qu'il n'y a pas vraiment eu de changement entre avant et après.

  • Natacha Sels

    Donc, tu es née à Chambly ou tu as toujours vécu ?

  • Pauline Messier

    C'est ça. Chambly, c'est ma ville. Je m'y sens bien. C'est la meilleure ville au monde. Je veux y habiter toute ma vie.

  • Natacha Sels

    Et tu me disais que tu n'es pas la seule à y vivre. C'est une histoire de famille.

  • Pauline Messier

    C'est ça. Donc, il y a eu ma mère, ma grand-mère, mon arrière-grand-mère.

  • Natacha Sels

    Et qu'est-ce que tu aimes tant ici, alors ?

  • Pauline Messier

    Le fait que ce soit déjà une petite ville. Donc, tout est à proximité. Donc, c'est tout de suite beaucoup plus simple. Le cinéma est à proximité. Donc pour moi qui suis en fauteuil aujourd'hui, c'est génial parce que je peux y aller très facilement. Le collège est juste en face de chez moi, donc ça va être une petite ville...

  • Natacha Sels

    À taille humaine ?

  • Pauline Messier

    À taille humaine, c'est ça.

  • Natacha Sels

    D'accord. Donc une petite ville à taille humaine où tu vis comme l'ont fait ta maman, ta grand-mère et ton arrière-grand-mère et en même temps une baroudeuse qui va voir un petit peu ailleurs ce qui se passe. Est-ce que tu peux me dire les pays où tu as été ?

  • Pauline Messier

    J'ai eu la chance d'aller en Islande, un très très beau pays où j'ai vu des aurores boréales. Je pense que c'est le spectacle le plus beau de ma vie. J'ai fait la Jordanie, magnifique aussi. Le Sénégal, incroyable. Donc là, c'est un peu plus loin. Si on se rapproche aussi, j'ai fait l'Espagne, qui est magnifique. Je ne connaissais pas du tout le sud de l'Espagne et j'ai adoré. L'Angleterre, l'Italie et après on pourrait continuer mais ça fait pas mal déjà.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qui est important pour toi quand tu voyages ?

  • Pauline Messier

    C'est surtout les paysages vraiment plus naturels, des cascades, des grands arbres, des sentiers. Donc c'est plus ça, ça va être plus road trip.

  • Natacha Sels

    Tu m'as dit que tu étais partie aussi au Pérou, mais alors ça c'est une autre aventure, plus longue, est-ce que tu peux m'en parler ?

  • Pauline Messier

    J'avais 16 ans et j'étais dans une famille d'accueil, dans un lycée péruvien et ça a été une aventure extraordinaire.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce que ça t'a appris ?

  • Pauline Messier

    Connaître une culture totalement différente, des habitudes de vie aussi différentes. Une nourriture différente, la nourriture péruvienne est délicieuse. Je vais souvent à Paris manger péruvien.

  • Natacha Sels

    Tu parles espagnol très bien.

  • Pauline Messier

    Oui, mais c'est le temps. Ça fait très longtemps que je n'ai pas parlé espagnol, donc je suis un peu timide quand je parle espagnol. C'est une langue très joyeuse, très carinhosa. Vraiment, je n'arrive pas à traduire ce mot très caline. Voilà. Donc c'est une très très belle langue.

  • Natacha Sels

    Est-ce qu'il y a quelque chose avec lequel tu es revenue dans ta valise quand tu es revenue du Pérou ? Pas forcément un objet, mais quelque chose qu'ils t'ont donné en plus, que ce voyage t'a donné en plus.

  • Pauline Messier

    Le plus grand bonheur que j'ai eu, c'est les amis, ma famille d'accueil. C'est des souvenirs, ça va être tout ça en fait. Ça a été magique. Déjà quand je suis revenue du Pérou, j'ai fait un bachibac, donc c'est un double bac franco-espagnol. Ça m'a permis de profiter un peu de mon échange pour réussir aussi une partie du bac. Et par la suite j'ai commencé un BTS commerce international. Et malheureusement c'est le moment où j'ai commencé à faire des allers-retours à l'hôpital à Paris, sachant que j'étais à Saint-Malo. Donc là, j'ai dû arrêter.

  • Natacha Sels

    Alors comment tu t'es rendu compte que tu étais malade en fait ?

  • Pauline Messier

    Au départ, c'était très léger, c'est pour ça que je ne me suis pas inquiétée. Je boitais au niveau du pied et de la jambe gauche. C'était tellement léger que c'est les autres qui m'en parlaient. Au fur et à mesure, ça s'est accentué. Mais vu que je n'avais pas de douleur et que j'avais plein de choses à faire, je ne me suis pas trop inquiétée. Donc ça c'était en février 2022, et le moment où vraiment je suis allée voir mon premier neurologue, c'était en... septembre 2022.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu as compris ce que tu avais tout de suite ?

  • Pauline Messier

    Le premier neurologue, c'était pour déjà parler de mon souci à la jambe. Ensuite, il y a eu quand même quelques mois, enfin deux mois d'errance médicale où on cherchait vraiment ce que j'avais avec les batteries d'examen dans tous les sens. On nous a renvoyés en fait vers un neurologue et on ne savait pas qu'on allait avoir le diagnostic ce jour-là. Déjà, donc ça a été un peu un choc. Et ensuite, c'est vrai qu'on a eu du mal à comprendre, surtout moi qui ne m'intéressais pas trop à ce que j'avais dans mon corps. Je ne comprenais rien du tout à ce qui se passait. Et je suis sortie de là très joyeuse avec mes parents qui étaient presque en deuil. Alors ensuite, je suis allée sur Internet pour comprendre un petit peu. Rien de mieux qu'Internet, forcément.

  • Natacha Sels

    Ou rien de pire.

  • Pauline Messier

    Ou rien de pire. Et là, j'ai vu « Espérance de vie » de 3 à 4 ans. Et je rigole, mais c'est parce que quand je l'ai vue, j'ai vraiment rigolé. Et j'ai fait des vannes. Dans la nuit, j'ai commencé à beaucoup plus stresser. Et ce moment de stress, de temps qui passe, ça a duré 3 jours, où vraiment, je me suis dit « Mais là, là, il faut absolument que je fasse un milliard de choses. Je n'ai pas le temps de rester chez moi. »

  • Natacha Sels

    Et est-ce que tu as fait un milliard de choses ? Comment ça s'est manifesté ?

  • Pauline Messier

    J'ai fait beaucoup de choses, dont les voyages. Mais par la suite, j'ai finalement compris, et ça m'a fait du bien aussi, que je n'avais pas forcément besoin de faire plein de choses extraordinaires pour vivre, que j'avais le droit de me poser, que j'avais le droit de dormir, et ça m'a fait du bien.

  • Natacha Sels

    Quelque part, en fait, ce n'était pas la peine pour profiter de la vie d'être dans une course folle.

  • Pauline Messier

    Exactement, c'est ça. Bien sûr, ça m'a fait très plaisir et c'était des moments fabuleux que de voyager. Mais les moments où je me pose, où je suis avec mes amis, où je rigole avec mes parents, ça fait tout aussi plaisir. Et oui, c'est ça, c'est juste qu'on a le temps. Alors oui, il y a 3-4 ans, c'est ce que disent les statistiques, les médecins, mais on a le temps.

  • Natacha Sels

    Et même, ce n'est pas certain que ce soit 3-4 ans.

  • Pauline Messier

    Bien sûr, ça peut être moins.

  • Natacha Sels

    Peut-être, ou plus. Ou plus. Tu disais que tu avais entamé des études que tu as arrêtées. Où tu en es à ce niveau-là ?

  • Pauline Messier

    Du coup, j'ai toujours arrêté. Mais finalement, ce n'était pas une si mauvaise idée parce que le commerce, ce n'est pas mon domaine. Je ne sais pas du tout comment je suis arrivée là-bas. donc Je ne continue pas les études, mais j'essaie de remplir mon cerveau avec des choses qui me sont utiles.

  • Natacha Sels

    Alors, c'est quoi une journée type, par exemple ?

  • Pauline Messier

    Une journée classique chez moi. Je vais me réveiller par Karine, qui est mon auxiliaire de vie, qui vient tous les matins. On va papoter un petit peu, on va raconter nos vies. Elle va m'aider à me préparer. Elle me met mon parfum. Je vais lire. Je vais prier. Enfin, ça va dépendre. Je vais me renseigner sur un sujet qui m'a intéressée la veille ou sur des sujets d'actualité. Par exemple, sur l'affaire Pelicot, c'est des choses qui sont pour moi importantes.

  • Natacha Sels

    En quoi c'est important pour toi ?

  • Pauline Messier

    Notamment cette affaire, je pense qu'elle peut aider à changer beaucoup de choses, à changer le regard qu'on a sur les victimes. Et donc c'est vraiment important de vraiment se renseigner sur l'affaire, de comment ça se déroule, quels sont les débats.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu en fais quelque chose de toutes ces informations ? Ou est-ce que tu voudrais en faire quelque chose ?

  • Pauline Messier

    J'aimerais en faire quelque chose. Après, je ne me sens pas assez légitime.

  • Natacha Sels

    Pour le moment ?

  • Pauline Messier

    C'est ça, pour le moment. Donc, par exemple, je vais aussi me renseigner sur des sujets qui me concernent plus, comme par exemple le handicap. Et là, je me sens déjà un peu plus légitime pour en parler et pour faire bouger les choses aussi.

  • Natacha Sels

    Donc, le matin se passe.

  • Pauline Messier

    C'est ça, le matin se passe, le déjeuner. Ah, je sais, le midi. J'adore ce moment parce que ma mère arrête de travailler le midi, enfin, avant de reprendre l'après-midi. Et soit on va regarder en replay Koh Lanta, soit on va regarder la Star Ac'. Ça dépend de ce qu'on a dû regarder. Et donc j'aime bien ce petit moment avec ma mère. C'est un petit moment à toutes les deux. Et ensuite, je vais des fois aussi partir parce que j'ai une copine qui travaille à côté. Donc je vais lui passer un petit bonjour. J'aime bien écrire en fin d'après-midi. Je ne sais pas pourquoi, j'aime bien parce que souvent quand j'arrête d'écrire, je me rends compte qu'il fait nuit et que je suis dans le noir dans ma chambre et que je n'avais pas vu. Et j'aime bien cette sensation.

  • Natacha Sels

    Tu disais que tu écrivais de la poésie.

  • Pauline Messier

    Ce n'est pas du Lamartine, c'est du Messier. Ce n'est pas la même chose.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu voudrais m'en lire ?

  • Pauline Messier

    C'est quelque chose que j'écris, oui, vraiment dans l'intimité de ma chambre. C'est vraiment un moment très, très intime.

  • Natacha Sels

    En fait, c'est un passage fort pour quelqu'un qui écrit de oser le révéler. Merci pour ta confiance.

  • Pauline Messier

    Ok. Faut que je respire, faut que j'apprenne à respirer.

  • Natacha Sels

    Oui, voilà.

  • Pauline Messier

    Éternelle nature, pensant qu'avec le temps tout enfin se dépure, et perdus à la nuit les membres froids et lourds, j'attends éperdument la lune et ses discours, qui doivent annoncer le soleil qui rassure. J'attends le mois de mai qui bien souvent augure, des printemps merveilleux où naissent les amours, mais aussi les muguets qui décorent les cours, tout ce qu'a décidé l'éternelle nature. Au-delà des raisons, tous ces pouvoirs divins, règnent sur aujourd'hui et les siècles éteints, de l'Islande au Pérou, de la Brune à l'Aurore. Mais elle ne répond qu'à son propre désir, cette juge immuable au capricin sonore. Elle doit châtiller et tout naît pour mourir.

  • Natacha Sels

    Hein ?

  • Pauline Messier

    Je suis très, très timide là.

  • Natacha Sels

    Ça te fait quoi ?

  • Pauline Messier

    Euh... Là, déjà, physiquement parlant, je pense que la chaleur monte au jour. Mais euh... Ça me fait plaisir de partager, mais c'est vraiment parler à cœur ouvert. Il n'y a pas plus pour moi.

  • Natacha Sels

    Oui, on le sent. J'ai trouvé magnifique et en particulier, mais tout le poème, la première strophe est très, très belle. Et toi, est-ce que tu es fière quand tu lis ça ? Est-ce que tu sens que c'est beau ?

  • Pauline Messier

    Je trouve que c'est très dur d'être fière de ce qu'on écrit. Mais après, je me dis que c'est moi et je ne peux pas faire plus vrai. Donc, il faut être fière de soi. Parce que c'est des poèmes qui, à l'origine, sont pour moi. Je vais vraiment être dans un moment où je ne vais plus trop voir ce qui se passe autour. Les mots prennent le dessus. Et je ne vais pas pouvoir, moi, gérer ce que j'écris.

  • Natacha Sels

    C'est les mots qui vont tout seuls, là où ils veulent.

  • Pauline Messier

    Exactement. Donc, c'est très cliché. Mais c'est vraiment ce qui se passe.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu cherches quelque chose quand tu écris ?

  • Pauline Messier

    Forcément, je cherche le beau. Il faut toujours chercher le beau dans la vie au quotidien, mais notamment forcément dans la poésie.

  • Natacha Sels

    Et donc, tu cherches le beau ?

  • Pauline Messier

    Toujours.

  • Natacha Sels

    Et est-ce que tu le trouves ?

  • Pauline Messier

    Oui. Oui, oui.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu connais Grand Corps Malade ?

  • Pauline Messier

    Ah oui.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu connais Trouver l'instant ?

  • Pauline Messier

    Je ne connais pas les paroles.

  • Natacha Sels

    Alors j'ai envie de te le faire écouter.

  • Extrait de musique

    "On a trempé notre plume dans notre envie de changer de vision, en une route parallèle comme une furtive évasion. On a trempé notre plume et est-ce vraiment une hérésie ? De se dire qu'on l'assume, qu'on écrit de la poésie. L'existe paraît-il un instant dans l'écriture, Qui oublie la page blanche et efface les ratures. Un véritable état second, une espèce de trance, Qui apparaît mystérieusement et s'envole en silence. Que l'on rappe ou que l'on slame, on recherche ce moment, Il allume une flamme qui nous éclaire brièvement. Cette flamme est la preuve, laisse-moi t'en faire une des mots, Qu'il est possible de combattre le mal par les mots. C'est tout sauf une légende, on espère juste tout l'instant. Les quelques secondes du poète qui échappent à l'espace-temps, Les moments rares et irréels que la quiétude inonde, bouddha n'oublie jamais notre parole du bout du monde."

  • Pauline Messier

    C'est magnifique. Vraiment, c'est... De toute manière, il écrit merveilleusement bien.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qui t'a plu ? Est-ce qu'il y a des choses dans lesquelles tu te reconnais dans le contenu du texte ?

  • Pauline Messier

    Déjà, c'est ce que je disais juste avant, un peu cet état de trance aussi, qui peut paraître étrange à comprendre, mais ça arrive vraiment. Et oui, cette envie de toucher l'instant grâce aux mots.

  • Natacha Sels

    Et cet instant ? Est-ce que tu penses qu'il relie au plus grand et à Dieu ?

  • Pauline Messier

    Pour moi, tout relie à Dieu. Mais il y a aussi quelque chose... Dans "Toucher l'instant", c'est forcément le présent. Et c'est quelque chose que j'ai appris beaucoup avec la maladie. Alors je disais qu'il n'y avait pas beaucoup de choses qui avaient changé entre la Pauline d'avant et d'aujourd'hui. Mais la Pauline d'avant, elle avait tendance à beaucoup vivre dans le futur. Alors que là, j'ai appris à accepter le présent. Et déjà, à plus que m'en contenter, à l'apprécier.

  • Natacha Sels

    Comment ça s'apprend, ça ? Parce qu'on remarque souvent que... Et d'ailleurs, à un moment, tu le disais, finalement, tu faisais plein d'activités. Et finalement, est-ce qu'on ne court pas d'activité en activité sans se rendre compte qu'on est heureux ? Et puis là, c'est comme s'il y avait quelque chose qui avait changé quand même. Mais comment on fait ça ?

  • Pauline Messier

    Je ne sais pas si c'est forcément une condition de se rendre compte qu'on a une date de péremption. Il faut aussi... comprendre que tout le monde n'a pas les mêmes privilèges dans la vie. Il y en a beaucoup qui n'ont pas cette chance de se dire je profite de l'instant présent parce qu'il faut travailler, parce que il faut trouver une maison, il faut nourrir des enfants, il y a beaucoup de choses. Moi j'ai ce privilège là aujourd'hui. Alors oui je suis en situation de handicap, oui j'ai une maladie mais j'ai la chance de pouvoir être chez moi au chaud, de pouvoir voyager et c'est une chance énorme. Mais même si on n'a pas forcément ces privilèges-là. Il faut essayer, au moins le plus possible, de dire, voilà, je vais profiter d'un café avec des copains.

  • Natacha Sels

    Tout simplement.

  • Pauline Messier

    Tout simplement.

  • Natacha Sels

    Tu disais que, en fait, finalement, ça ne te rendait pas triste, parce que tu étais comme ça, heureuse, en fait. Tu es quelqu'un d'heureux. quoi qu'il arrive autour. Est-ce que tu sais que c'est une grande sagesse ?

  • Pauline Messier

    C'est vrai que sagesse et 22 ans, généralement, ça ne va pas ensemble. Et donc, ça me fait bizarre de l'entendre, mais ça me fait plaisir, c'est gentil.

  • Natacha Sels

    Dans le prochain épisode, vous retrouverez Pauline Messier, La joie dans l'âme, partie 2. Restez à l'écoute de notre podcast La Vie est Belle, essaie-la (SLA) ! et abonnez-vous sur votre plateforme préférée.

Description

À 22 ans, Pauline rayonne d’une joie lucide et profonde, malgré la SLA.

Dans l’intimité de sa chambre de princesse, entourée de poésie et de foi, elle nous parle de Lamartine, d’écriture, de voyages, et de sa manière singulière d’habiter le présent.

Une rencontre lumineuse et pleine de sagesse avec une jeune femme qui fait de chaque instant un acte de vie.


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Nous remercions chaleureusement toutes les personnes qui ont participé à cette deuxième saison : personnes malades, aidants, proches, chercheurs et professionnels de santé.


Ce podcast de l'ARLSA a été réalisé par Natacha Sels, la post-production est de Bertrand Chaumeton.

 

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  • Natacha Sels

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  • Pauline Messier

    Dans "Touhcer l'instant", c'est forcément le présent, quelque chose que j'ai appris beaucoup avec la maladie. Alors je disais qu'il n'y avait pas beaucoup de choses qui avaient changé entre la Pauline d'avant et d'aujourd'hui, mais la Pauline d'avant, elle avait tendance à beaucoup vivre dans le futur. Alors que là, j'ai appris à accepter le présent et déjà à plus que m'en contenter, à l'apprécier.

  • Natacha Sels

    Pauline Messier, La joie dans l'âme, partie 1. La première fois que j'ai vu Pauline, c'est sur un plateau de télévision. J'avais été bluffée par cette jeune personne de 20 ans, adressant un impétueux fou rire à la mort et à la maladie qui s'invitait sur son chemin. Aujourd'hui, Pauline a 22 ans et me propose de la rencontrer chez elle, dans l'Oise, où elle vit avec ses parents, dans un pavillon aussi lumineux, coquet et pimpant qu'elle. C'est un dimanche d'automne, un gâteau trône sur la table du salon, mais ce n'est pas encore l'heure d'y goûter. Pour le moment, nous nous retirons dans sa chambre, où je découvre une grande romantique, en conversation naturelle, avec Lamartine et avec Dieu. Elle rit de se la jouer princesse. Moi, je lui prêterai plutôt une joie inconditionnelle et une arme fatale, qui lui permet de toucher l'instant, sa plume, sagesse sur ton de badinage.

  • Pauline Messier

    Alors, ma chambre, on vient de la refaire parce qu'à l'origine, c'était un bureau et je voulais vraiment avoir mon espace à moi qui me ressemble. Donc, c'est une chambre couleur un peu coquille d'œuf avec des moulures un petit peu partout. Et ma petite coiffeuse pour me maquiller parce qu'on est dans du 100% princesse. Avec une grande bibliothèque que mon père a fait. J'aime beaucoup les livres. J'aime beaucoup, beaucoup Lamartine. Lamartine, Verlaine, j'aime bien Zola, Dumas aussi. Après voilà, ça va être surtout la poésie avant le XXe.

  • Natacha Sels

    Entre la princesse et Lamartine, je sens une grande romantique.

  • Pauline Messier

    Ah oui, oui, on peut dire ça.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qui te touche dans Lamartine ?

  • Pauline Messier

    Euh... Je pense déjà à son histoire avec son amour perdu. Et c'est vraiment la douleur face à la mort, quelque chose aussi que je comprends, même si je ne suis pas du côté de Lamartine. Des questions qui se posent par rapport à la vie, pourquoi, les injustices aussi. Et tout ça dans un style très beau, très doux, avec beaucoup de nature aussi. Donc ça m'amène aussi un contraste entre la beauté de la nature et... on va dire la douleur et la mort. J'ai découvert ces poèmes au moment où j'avais la maladie. Et ça a vraiment eu, ça a fait un déclic en moi. Donc c'est vraiment à ce moment-là que j'ai été touchée.

  • Natacha Sels

    Et qu'est-ce que ça t'a apporté comme éclairage ou comme peut-être un baume ?

  • Pauline Messier

    Oui, c'est plus du baume, j'irais. Sentir en fait le même sentiment et chez... quelqu'un qui n'est plus là depuis très longtemps et chez moi. Bizarrement, je n'avais pas envie de parler avec des personnes actuelles qui ont forcément la maladie, mais j'appréciais partager ces moments avec Lamartine.

  • Natacha Sels

    C'est joli de dire partager des moments avec Lamartine. Donc tu le relis régulièrement ?

  • Pauline Messier

    Je le lis vraiment tout le temps. Il y a un poème en particulier que je relis en boucle, en boucle, en boucle. Je le connais presque par cœur. Pourtant, il fait quelques pages quand même. Et donc c'est le désespoir et c'est un poème magnifique.

  • Natacha Sels

    J'aimerais beaucoup que tu le lises.

  • Pauline Messier

    Voilà.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu veux que je le prenne ?

  • Pauline Messier

    Le blanc, Lamartine, en haut. Juste en haut,voilà.

  • Natacha Sels

    Oui, choisis le passage que tu veux.

  • Pauline Messier

    Il faut savoir aussi que Lamartine, il me touche parce qu'il est chrétien, comme moi. Mais ça m'a vraiment permis de déculpabiliser aussi et juste de voir que oui, on peut être chrétien et avoir des doutes aussi. Donc la partie qui vraiment m'a énormément touchée, c'est celle-ci. Créateur, Tout-Puissant, Principe de Tout-Être, Toi pour qui le possible existe avant de naître, Roi de l'immensité, Tu pouvais cependant, au gré de ton envie, Puiser pour tes enfants le bonheur et la vie dans ton éternité. Sans t'épuiser jamais, sur toute la nature, Tu pouvais à long flot répandre sans mesure un bonheur absolu. L'espace, le pouvoir, le temps, rien ne te coûte. Ah, ma raison frémit, tu le pouvais sans doute. Tu ne l'as pas voulu.

  • Natacha Sels

    Merci.

  • Pauline Messier

    J'ai du mal à m'exprimer vraiment, surtout sur cette partie, parce que c'est plus quelque chose que je vais ressentir. Et le titre du poème, Le Désespoir, c'est l'incompréhension, c'est les questions sans réponse. Pourquoi moi ? Déjà, la première. Pas forcément pourquoi moi, mais juste pourquoi, déjà. Comment je vais faire, c'est quoi mon futur, qu'est-ce que je vais devenir. On va dire qu'à 20 ans, on n'a rien vu du monde. Et c'est dur de nous priver de futur dès 20 ans.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu as déjà certaines réponses à tes questions ? Ou une manière de mettre ton baume à toi ?

  • Pauline Messier

    Comme je l'ai dit, je suis aussi chrétienne, donc même si j'ai mes questions, je sais et je suis persuadée qu'il y a des réponses et que rien n'est là par hasard. Donc je n'ai pas à avoir peur, mais dans les moments où ça va être plus compliqué, oui je vais prendre un stylo et une feuille. J'ai un peu plus de mal à écrire maintenant, donc je vais plus prendre un clavier et je vais écrire. Et ça va me faire du bien.

  • Natacha Sels

    Alors tu t'es mis à écrire avec la maladie ou c'était quelque chose qui était déjà là ?

  • Pauline Messier

    J'ai toujours écrit. Je crois que les premiers poèmes datent de quand j'avais 6 ans. Et après j'ai un peu arrêté avec l'adolescence, les sorties, etc. Et je me suis remis à écrire avec la maladie. Dès que j'ai commencé à faire les examens pour savoir ce que j'avais, sans m'en rendre compte, j'avais recommencé. Écrire des mots, partir par là, des vers. J'aime beaucoup la sonorité des mots.

  • Natacha Sels

    Et comment ça se fait que tu es attachée à la musique des mots, comme ça ?

  • Pauline Messier

    Alors là, c'est une question à laquelle je n'ai pas forcément de réponse. J'ai toujours aimé l'art d'une manière générale. Ah si, je pense que j'ai une réponse. Déjà, mon père a toujours écrit de la poésie. Je suis persuadée que ça peut aussi se transmettre par les gènes. Donc voilà.

  • Natacha Sels

    Je pense qu'en fait, tu parles, je ne sais pas si je dois dire de religion ou de foi.

  • Pauline Messier

    Je parlerais plus de foi. Quand on est seul, en tout cas pour moi, avec Dieu, ça va être vraiment de la foi. Ça va être une relation plutôt qu'une religion. Donc une relation c'est comme avec des amis, c'est parler, c'est demander des choses.

  • Natacha Sels

    Alors donc tu as une conversation avec Dieu ?

  • Pauline Messier

    Oui c'est ça, le matin, le soir, une conversation, je vais parler et je vais recevoir mais plus à l'intérieur de moi, du bien-être etc.

  • Natacha Sels

    Quelles sont les autres choses qui te soutiennent depuis que tu as reçu l'annonce du diagnostic ?

  • Pauline Messier

    Il va y avoir les voyages. Donc là, c'est plus le côté vraiment activité. Donc voyages, le théâtre, les sorties. Mais le plus important, ça va être surtout la famille, les amis qui sont très présents. Après, j'ai quand même de la chance parce que je n'ai jamais été trop triste par rapport à la maladie. À chaque fois, je suis très mal à l'aise de dire parce que j'ai l'impression qu'on n'a pas vraiment le droit de le dire. Mais je vais bien. Donc est-ce que c'est parce que j'ai la foi ? Est-ce que c'est parce que je vais écouter mon corps et que si à tel moment je vais avoir un peu de tristesse, je vais écrire ? Peut-être. Mais c'est vrai que je suis bien et je suis heureuse.

  • Natacha Sels

    Ce que j'entends dans ce que tu dis, c'est que la plupart du temps tu es heureuse. Peut-être dans l'instant présent en plus. Et que quand ce n'est pas le cas, tu l'exprimes et tu acceptes cette tristesse.

  • Pauline Messier

    Mais oui, c'est important d'exprimer, d'écouter son corps. C'est très, très important plutôt que d'intérioriser.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu pourrais me raconter un peu l'histoire de Pauline jusqu'à l'arrivée du diagnostic ?

  • Pauline Messier

    J'ai l'impression qu'il n'y a pas vraiment eu de changement entre avant et après.

  • Natacha Sels

    Donc, tu es née à Chambly ou tu as toujours vécu ?

  • Pauline Messier

    C'est ça. Chambly, c'est ma ville. Je m'y sens bien. C'est la meilleure ville au monde. Je veux y habiter toute ma vie.

  • Natacha Sels

    Et tu me disais que tu n'es pas la seule à y vivre. C'est une histoire de famille.

  • Pauline Messier

    C'est ça. Donc, il y a eu ma mère, ma grand-mère, mon arrière-grand-mère.

  • Natacha Sels

    Et qu'est-ce que tu aimes tant ici, alors ?

  • Pauline Messier

    Le fait que ce soit déjà une petite ville. Donc, tout est à proximité. Donc, c'est tout de suite beaucoup plus simple. Le cinéma est à proximité. Donc pour moi qui suis en fauteuil aujourd'hui, c'est génial parce que je peux y aller très facilement. Le collège est juste en face de chez moi, donc ça va être une petite ville...

  • Natacha Sels

    À taille humaine ?

  • Pauline Messier

    À taille humaine, c'est ça.

  • Natacha Sels

    D'accord. Donc une petite ville à taille humaine où tu vis comme l'ont fait ta maman, ta grand-mère et ton arrière-grand-mère et en même temps une baroudeuse qui va voir un petit peu ailleurs ce qui se passe. Est-ce que tu peux me dire les pays où tu as été ?

  • Pauline Messier

    J'ai eu la chance d'aller en Islande, un très très beau pays où j'ai vu des aurores boréales. Je pense que c'est le spectacle le plus beau de ma vie. J'ai fait la Jordanie, magnifique aussi. Le Sénégal, incroyable. Donc là, c'est un peu plus loin. Si on se rapproche aussi, j'ai fait l'Espagne, qui est magnifique. Je ne connaissais pas du tout le sud de l'Espagne et j'ai adoré. L'Angleterre, l'Italie et après on pourrait continuer mais ça fait pas mal déjà.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qui est important pour toi quand tu voyages ?

  • Pauline Messier

    C'est surtout les paysages vraiment plus naturels, des cascades, des grands arbres, des sentiers. Donc c'est plus ça, ça va être plus road trip.

  • Natacha Sels

    Tu m'as dit que tu étais partie aussi au Pérou, mais alors ça c'est une autre aventure, plus longue, est-ce que tu peux m'en parler ?

  • Pauline Messier

    J'avais 16 ans et j'étais dans une famille d'accueil, dans un lycée péruvien et ça a été une aventure extraordinaire.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce que ça t'a appris ?

  • Pauline Messier

    Connaître une culture totalement différente, des habitudes de vie aussi différentes. Une nourriture différente, la nourriture péruvienne est délicieuse. Je vais souvent à Paris manger péruvien.

  • Natacha Sels

    Tu parles espagnol très bien.

  • Pauline Messier

    Oui, mais c'est le temps. Ça fait très longtemps que je n'ai pas parlé espagnol, donc je suis un peu timide quand je parle espagnol. C'est une langue très joyeuse, très carinhosa. Vraiment, je n'arrive pas à traduire ce mot très caline. Voilà. Donc c'est une très très belle langue.

  • Natacha Sels

    Est-ce qu'il y a quelque chose avec lequel tu es revenue dans ta valise quand tu es revenue du Pérou ? Pas forcément un objet, mais quelque chose qu'ils t'ont donné en plus, que ce voyage t'a donné en plus.

  • Pauline Messier

    Le plus grand bonheur que j'ai eu, c'est les amis, ma famille d'accueil. C'est des souvenirs, ça va être tout ça en fait. Ça a été magique. Déjà quand je suis revenue du Pérou, j'ai fait un bachibac, donc c'est un double bac franco-espagnol. Ça m'a permis de profiter un peu de mon échange pour réussir aussi une partie du bac. Et par la suite j'ai commencé un BTS commerce international. Et malheureusement c'est le moment où j'ai commencé à faire des allers-retours à l'hôpital à Paris, sachant que j'étais à Saint-Malo. Donc là, j'ai dû arrêter.

  • Natacha Sels

    Alors comment tu t'es rendu compte que tu étais malade en fait ?

  • Pauline Messier

    Au départ, c'était très léger, c'est pour ça que je ne me suis pas inquiétée. Je boitais au niveau du pied et de la jambe gauche. C'était tellement léger que c'est les autres qui m'en parlaient. Au fur et à mesure, ça s'est accentué. Mais vu que je n'avais pas de douleur et que j'avais plein de choses à faire, je ne me suis pas trop inquiétée. Donc ça c'était en février 2022, et le moment où vraiment je suis allée voir mon premier neurologue, c'était en... septembre 2022.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu as compris ce que tu avais tout de suite ?

  • Pauline Messier

    Le premier neurologue, c'était pour déjà parler de mon souci à la jambe. Ensuite, il y a eu quand même quelques mois, enfin deux mois d'errance médicale où on cherchait vraiment ce que j'avais avec les batteries d'examen dans tous les sens. On nous a renvoyés en fait vers un neurologue et on ne savait pas qu'on allait avoir le diagnostic ce jour-là. Déjà, donc ça a été un peu un choc. Et ensuite, c'est vrai qu'on a eu du mal à comprendre, surtout moi qui ne m'intéressais pas trop à ce que j'avais dans mon corps. Je ne comprenais rien du tout à ce qui se passait. Et je suis sortie de là très joyeuse avec mes parents qui étaient presque en deuil. Alors ensuite, je suis allée sur Internet pour comprendre un petit peu. Rien de mieux qu'Internet, forcément.

  • Natacha Sels

    Ou rien de pire.

  • Pauline Messier

    Ou rien de pire. Et là, j'ai vu « Espérance de vie » de 3 à 4 ans. Et je rigole, mais c'est parce que quand je l'ai vue, j'ai vraiment rigolé. Et j'ai fait des vannes. Dans la nuit, j'ai commencé à beaucoup plus stresser. Et ce moment de stress, de temps qui passe, ça a duré 3 jours, où vraiment, je me suis dit « Mais là, là, il faut absolument que je fasse un milliard de choses. Je n'ai pas le temps de rester chez moi. »

  • Natacha Sels

    Et est-ce que tu as fait un milliard de choses ? Comment ça s'est manifesté ?

  • Pauline Messier

    J'ai fait beaucoup de choses, dont les voyages. Mais par la suite, j'ai finalement compris, et ça m'a fait du bien aussi, que je n'avais pas forcément besoin de faire plein de choses extraordinaires pour vivre, que j'avais le droit de me poser, que j'avais le droit de dormir, et ça m'a fait du bien.

  • Natacha Sels

    Quelque part, en fait, ce n'était pas la peine pour profiter de la vie d'être dans une course folle.

  • Pauline Messier

    Exactement, c'est ça. Bien sûr, ça m'a fait très plaisir et c'était des moments fabuleux que de voyager. Mais les moments où je me pose, où je suis avec mes amis, où je rigole avec mes parents, ça fait tout aussi plaisir. Et oui, c'est ça, c'est juste qu'on a le temps. Alors oui, il y a 3-4 ans, c'est ce que disent les statistiques, les médecins, mais on a le temps.

  • Natacha Sels

    Et même, ce n'est pas certain que ce soit 3-4 ans.

  • Pauline Messier

    Bien sûr, ça peut être moins.

  • Natacha Sels

    Peut-être, ou plus. Ou plus. Tu disais que tu avais entamé des études que tu as arrêtées. Où tu en es à ce niveau-là ?

  • Pauline Messier

    Du coup, j'ai toujours arrêté. Mais finalement, ce n'était pas une si mauvaise idée parce que le commerce, ce n'est pas mon domaine. Je ne sais pas du tout comment je suis arrivée là-bas. donc Je ne continue pas les études, mais j'essaie de remplir mon cerveau avec des choses qui me sont utiles.

  • Natacha Sels

    Alors, c'est quoi une journée type, par exemple ?

  • Pauline Messier

    Une journée classique chez moi. Je vais me réveiller par Karine, qui est mon auxiliaire de vie, qui vient tous les matins. On va papoter un petit peu, on va raconter nos vies. Elle va m'aider à me préparer. Elle me met mon parfum. Je vais lire. Je vais prier. Enfin, ça va dépendre. Je vais me renseigner sur un sujet qui m'a intéressée la veille ou sur des sujets d'actualité. Par exemple, sur l'affaire Pelicot, c'est des choses qui sont pour moi importantes.

  • Natacha Sels

    En quoi c'est important pour toi ?

  • Pauline Messier

    Notamment cette affaire, je pense qu'elle peut aider à changer beaucoup de choses, à changer le regard qu'on a sur les victimes. Et donc c'est vraiment important de vraiment se renseigner sur l'affaire, de comment ça se déroule, quels sont les débats.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu en fais quelque chose de toutes ces informations ? Ou est-ce que tu voudrais en faire quelque chose ?

  • Pauline Messier

    J'aimerais en faire quelque chose. Après, je ne me sens pas assez légitime.

  • Natacha Sels

    Pour le moment ?

  • Pauline Messier

    C'est ça, pour le moment. Donc, par exemple, je vais aussi me renseigner sur des sujets qui me concernent plus, comme par exemple le handicap. Et là, je me sens déjà un peu plus légitime pour en parler et pour faire bouger les choses aussi.

  • Natacha Sels

    Donc, le matin se passe.

  • Pauline Messier

    C'est ça, le matin se passe, le déjeuner. Ah, je sais, le midi. J'adore ce moment parce que ma mère arrête de travailler le midi, enfin, avant de reprendre l'après-midi. Et soit on va regarder en replay Koh Lanta, soit on va regarder la Star Ac'. Ça dépend de ce qu'on a dû regarder. Et donc j'aime bien ce petit moment avec ma mère. C'est un petit moment à toutes les deux. Et ensuite, je vais des fois aussi partir parce que j'ai une copine qui travaille à côté. Donc je vais lui passer un petit bonjour. J'aime bien écrire en fin d'après-midi. Je ne sais pas pourquoi, j'aime bien parce que souvent quand j'arrête d'écrire, je me rends compte qu'il fait nuit et que je suis dans le noir dans ma chambre et que je n'avais pas vu. Et j'aime bien cette sensation.

  • Natacha Sels

    Tu disais que tu écrivais de la poésie.

  • Pauline Messier

    Ce n'est pas du Lamartine, c'est du Messier. Ce n'est pas la même chose.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu voudrais m'en lire ?

  • Pauline Messier

    C'est quelque chose que j'écris, oui, vraiment dans l'intimité de ma chambre. C'est vraiment un moment très, très intime.

  • Natacha Sels

    En fait, c'est un passage fort pour quelqu'un qui écrit de oser le révéler. Merci pour ta confiance.

  • Pauline Messier

    Ok. Faut que je respire, faut que j'apprenne à respirer.

  • Natacha Sels

    Oui, voilà.

  • Pauline Messier

    Éternelle nature, pensant qu'avec le temps tout enfin se dépure, et perdus à la nuit les membres froids et lourds, j'attends éperdument la lune et ses discours, qui doivent annoncer le soleil qui rassure. J'attends le mois de mai qui bien souvent augure, des printemps merveilleux où naissent les amours, mais aussi les muguets qui décorent les cours, tout ce qu'a décidé l'éternelle nature. Au-delà des raisons, tous ces pouvoirs divins, règnent sur aujourd'hui et les siècles éteints, de l'Islande au Pérou, de la Brune à l'Aurore. Mais elle ne répond qu'à son propre désir, cette juge immuable au capricin sonore. Elle doit châtiller et tout naît pour mourir.

  • Natacha Sels

    Hein ?

  • Pauline Messier

    Je suis très, très timide là.

  • Natacha Sels

    Ça te fait quoi ?

  • Pauline Messier

    Euh... Là, déjà, physiquement parlant, je pense que la chaleur monte au jour. Mais euh... Ça me fait plaisir de partager, mais c'est vraiment parler à cœur ouvert. Il n'y a pas plus pour moi.

  • Natacha Sels

    Oui, on le sent. J'ai trouvé magnifique et en particulier, mais tout le poème, la première strophe est très, très belle. Et toi, est-ce que tu es fière quand tu lis ça ? Est-ce que tu sens que c'est beau ?

  • Pauline Messier

    Je trouve que c'est très dur d'être fière de ce qu'on écrit. Mais après, je me dis que c'est moi et je ne peux pas faire plus vrai. Donc, il faut être fière de soi. Parce que c'est des poèmes qui, à l'origine, sont pour moi. Je vais vraiment être dans un moment où je ne vais plus trop voir ce qui se passe autour. Les mots prennent le dessus. Et je ne vais pas pouvoir, moi, gérer ce que j'écris.

  • Natacha Sels

    C'est les mots qui vont tout seuls, là où ils veulent.

  • Pauline Messier

    Exactement. Donc, c'est très cliché. Mais c'est vraiment ce qui se passe.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu cherches quelque chose quand tu écris ?

  • Pauline Messier

    Forcément, je cherche le beau. Il faut toujours chercher le beau dans la vie au quotidien, mais notamment forcément dans la poésie.

  • Natacha Sels

    Et donc, tu cherches le beau ?

  • Pauline Messier

    Toujours.

  • Natacha Sels

    Et est-ce que tu le trouves ?

  • Pauline Messier

    Oui. Oui, oui.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu connais Grand Corps Malade ?

  • Pauline Messier

    Ah oui.

  • Natacha Sels

    Est-ce que tu connais Trouver l'instant ?

  • Pauline Messier

    Je ne connais pas les paroles.

  • Natacha Sels

    Alors j'ai envie de te le faire écouter.

  • Extrait de musique

    "On a trempé notre plume dans notre envie de changer de vision, en une route parallèle comme une furtive évasion. On a trempé notre plume et est-ce vraiment une hérésie ? De se dire qu'on l'assume, qu'on écrit de la poésie. L'existe paraît-il un instant dans l'écriture, Qui oublie la page blanche et efface les ratures. Un véritable état second, une espèce de trance, Qui apparaît mystérieusement et s'envole en silence. Que l'on rappe ou que l'on slame, on recherche ce moment, Il allume une flamme qui nous éclaire brièvement. Cette flamme est la preuve, laisse-moi t'en faire une des mots, Qu'il est possible de combattre le mal par les mots. C'est tout sauf une légende, on espère juste tout l'instant. Les quelques secondes du poète qui échappent à l'espace-temps, Les moments rares et irréels que la quiétude inonde, bouddha n'oublie jamais notre parole du bout du monde."

  • Pauline Messier

    C'est magnifique. Vraiment, c'est... De toute manière, il écrit merveilleusement bien.

  • Natacha Sels

    Qu'est-ce qui t'a plu ? Est-ce qu'il y a des choses dans lesquelles tu te reconnais dans le contenu du texte ?

  • Pauline Messier

    Déjà, c'est ce que je disais juste avant, un peu cet état de trance aussi, qui peut paraître étrange à comprendre, mais ça arrive vraiment. Et oui, cette envie de toucher l'instant grâce aux mots.

  • Natacha Sels

    Et cet instant ? Est-ce que tu penses qu'il relie au plus grand et à Dieu ?

  • Pauline Messier

    Pour moi, tout relie à Dieu. Mais il y a aussi quelque chose... Dans "Toucher l'instant", c'est forcément le présent. Et c'est quelque chose que j'ai appris beaucoup avec la maladie. Alors je disais qu'il n'y avait pas beaucoup de choses qui avaient changé entre la Pauline d'avant et d'aujourd'hui. Mais la Pauline d'avant, elle avait tendance à beaucoup vivre dans le futur. Alors que là, j'ai appris à accepter le présent. Et déjà, à plus que m'en contenter, à l'apprécier.

  • Natacha Sels

    Comment ça s'apprend, ça ? Parce qu'on remarque souvent que... Et d'ailleurs, à un moment, tu le disais, finalement, tu faisais plein d'activités. Et finalement, est-ce qu'on ne court pas d'activité en activité sans se rendre compte qu'on est heureux ? Et puis là, c'est comme s'il y avait quelque chose qui avait changé quand même. Mais comment on fait ça ?

  • Pauline Messier

    Je ne sais pas si c'est forcément une condition de se rendre compte qu'on a une date de péremption. Il faut aussi... comprendre que tout le monde n'a pas les mêmes privilèges dans la vie. Il y en a beaucoup qui n'ont pas cette chance de se dire je profite de l'instant présent parce qu'il faut travailler, parce que il faut trouver une maison, il faut nourrir des enfants, il y a beaucoup de choses. Moi j'ai ce privilège là aujourd'hui. Alors oui je suis en situation de handicap, oui j'ai une maladie mais j'ai la chance de pouvoir être chez moi au chaud, de pouvoir voyager et c'est une chance énorme. Mais même si on n'a pas forcément ces privilèges-là. Il faut essayer, au moins le plus possible, de dire, voilà, je vais profiter d'un café avec des copains.

  • Natacha Sels

    Tout simplement.

  • Pauline Messier

    Tout simplement.

  • Natacha Sels

    Tu disais que, en fait, finalement, ça ne te rendait pas triste, parce que tu étais comme ça, heureuse, en fait. Tu es quelqu'un d'heureux. quoi qu'il arrive autour. Est-ce que tu sais que c'est une grande sagesse ?

  • Pauline Messier

    C'est vrai que sagesse et 22 ans, généralement, ça ne va pas ensemble. Et donc, ça me fait bizarre de l'entendre, mais ça me fait plaisir, c'est gentil.

  • Natacha Sels

    Dans le prochain épisode, vous retrouverez Pauline Messier, La joie dans l'âme, partie 2. Restez à l'écoute de notre podcast La Vie est Belle, essaie-la (SLA) ! et abonnez-vous sur votre plateforme préférée.

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