- Natacha Sels
La vie est belle, essaie-la ! l e podcast de l'ARSLA, qui met en lumière des personnes confrontées à la SLA et des professionnels engagés.
- Pauline Messier
Le Tofersen c'est un traitement qui, moi, me permet de voir juste une stabilité de la maladie depuis plus d'un an. C'est la première fois qu'on a une porte ouverte sur l'avenir, et je trouve ça très dur et très cruel de venir la refermer devant nous.
- Natacha Sels
Pauline Messier, La joie dans l'âme, partie 2. Aujourd'hui, nous retrouvons Pauline Messier accompagnée de ses amis Myriam et Fanny et de son cousin Erwan. L'occasion d'un échange croisé à cœur ouvert. Dans ce second épisode, nous aurons aussi l'occasion de parler de son expérience avec le Tofersen. Traitement qui a été remis en cause par la Haute Autorité de Santé. et lui fait vivre un véritable ascenseur émotionnel. Il sera enfin question de sa vie, dont elle découvre le sens d'un peu plus près au travers de ce parcours avec la maladie. Le tout entre profondeur et légèreté, une marque de fabrique de cette étonnante jeune femme qui semble avoir la joie chevillée à l'âme.
- Pauline Messier
La liste des choses à faire avant de mourir, voir une course de Formule 1, voir des aurores boréales, c'est fait. Un shooting photo sur les toits de Paris. Aller dans un grand observatoire pour voir les étoiles et les planètes. Faire un safari. Gravir le mont Kilimanjaro.
- Myriam
Je m'appelle Myriam, je suis une amie de Pauline depuis le collège, j'ai 21 ans. Pauline, je pense que c'est la personne la plus positive que je connaisse. Ensuite, les yeux. Vous ne l'avez pas en image, mais les yeux de Pauline, c'est incroyable. Vraiment, c'est des très beaux yeux. Et un teint toujours impeccable parce qu'elle se maquille très, très bien. Le mieux, c'est quand elle met un peu de liner bleu. Ça, c'est incroyable. En ce moment, elle est brune. Il y a quelques mois, les cheveux étaient rouges. Encore un petit peu avant, c'était blond. Donc, ça dépend. J'aime bien quand elle a les cheveux rouges et bruns. Ça lui va super bien.
- Pauline Messier
Traverser l'Atlantique sur un bateau à voile. Aller a un concert de Bad Bunny. C'est un chanteur latino qui est incroyable. Faire un tour en Mongolfière. J'avais marqué passer dans le JT de TF1. J'ai trop envie de passer dans le JT de TF1.
- Fanny
Je m'appelle Fanny et j'ai 22 ans. Je suis amie avec Pauline depuis que je suis en CP. Elle est brune, elle fait hyper attention à comment elle s'habille. C'est long des fois quand il faut sortir, le temps qu'elle choisisse sa tenue. C'est vrai qu'elle a un très beau sourire communicatif en plus. Et elle met souvent des bijoux. Elle aime bien ça. Et toute jolie, toute mignonne.
- Pauline Messier
Coquette, exactement.
- Fanny
Je suis d'accord avec Myriam qu'elle est vraiment très positive. Et je trouve vraiment qu'elle a souvent de bonne humeur. Et elle est présente pour ses amis. Et elle écoute. C'est une bonne personne avec qui rigoler, mais à la fois avec qui se confier. C'est une bonne amie. Je suis très contente de l'avoir dans mes amis.
- Pauline Messier
Donc, faire les 7 merveilles du monde, finir mon recueil de poèmes. J'ai mis aussi des fois des choses qui sont un peu moins réalisables. Que mon recueil de poèmes soit dans le programme de français.
- Natacha Sels
Ça, ce serait vraiment chouette.
- Pauline Messier
Ça serait vraiment cool. J'aimerais trop entendre des élèves dire, oh non, encore du Messier, j'aime pas.
- Natacha Sels
Oh, tu pourrais choisir un autre exemple. Oh, chouette, du Messier, on adore.
- Pauline Messier
Aujourd'hui, la poésie, c'est plus trop... à la mode, donc...
- Natacha Sels
Pas sûr, pas sûr.
- Erwan
Je suis Erwan, je suis son cousin. Je la connais depuis qu'elle est née, vu que je suis le plus grand. On est cinq, quatre filles, un garçon, donc je suis le protecteur, le grand. Moi, j'ai le côté, quand elle était petite, elle est toujours joviale, etc., mais c'est une petite chipie aussi. Elle le sait très bien. Elle a toujours été super bien apprêtée. Je suis complètement d'accord avec les filles. Le petit maquillage, encore ce matin, elle demandait les bouts d'oreilles de Tata pour savoir où elles étaient parce qu'elle voulait les mettre pour aujourd'hui. Je savais que c'était une battante, mais à ce point-là, comme l'a dit Fanny, elle a eu ce petit moment de déprime normal quand on apprend une nouvelle comme celle-ci. Ensuite, elle a vraiment tourné, elle a dit « je vais profiter de ma vie » . Et en fait, ok, c'est tombé sur moi, mais autant me battre à fond et vivre. Et je pense qu'il y a très peu de personnes qui réagissent comme ça.
- Natacha Sels
T'es impressionné ?
- Erwan
Ah ouais, honnêtement, ouais. Aujourd'hui, je me dis que je pense comme ça. Quand j'ai des choses compliquées, je me dis qu'il y a pire dans la vie. Et du coup, ça me fait me battre et je pense à ma cousine.
- Pauline Messier
Créateur, tout-puissant, principe de tout-être. Toi pour qui le possible existe avant de naître. Roi de l'immensité, Tu pouvais cependant au gré de ton envie puisser pour tes enfants le bonheur et la vie dans ton éternité. Ah ma raison frémit, tu le pouvais sans doute, tu ne l'as pas voulu.
- Natacha Sels
Tu lisais la Martine qui parlait de la mort. Est-ce que des fois, ça t'arrive d'y penser ?
- Pauline Messier
Alors, encore une fois, je suis vraiment un spécimen, je pense. Je pense qu'il y a vraiment quelque chose qui tombe par rond, et ce n'est pas que les gènes. Vraiment, il y a autre chose. Dans le sens où je suis toujours à la recherche du beau. Et le peu de fois où j'ai pensé à la mort, j'organise mon enterrement, mais un truc de fou. Je me dis, j'aimerais bien qu'il y ait un dress code. Il s'habille comme ça, telle musique, avec un cœur. Oh là, ce serait magnifique. Et puis, je me dis... J'ai l'impression d'être en vue de ma personne, là, de ce que je veux dire, mais je me suis dit, j'aimerais bien faire un buste de moi, comme à l'époque et tout. Toujours un peu dans le romantisme, avec la Martine, voilà. J'ai dit, moi aussi, je veux mon petit buste. Donc, on va dire, je vais avoir tendance à romantiser un peu tout ça. Je me dis, pourquoi pas ? Souvent, dans la SLA, on ne romantise pas grand-chose. Donc, laissez-moi romantiser ce que je veux. Mais, euh... Des fois je me dis, j'aimerais trop qu'il y ait des tournesols. Je ne sais plus c'est quoi la saison, mais je me suis dit qu'il faut vraiment que je choisisse ma saison pour mourir.
- Fanny
Moi, ce qui me faisait le plus peur, c'était la mort plus que la maladie. Et la maladie, c'est un petit peu embêtant pour elle, parce qu'elle peut avoir des douleurs ou des trucs comme ça, et c'est pas cool. Mais c'est vrai que moi, en tant qu'amie, ce qui me fait le plus peur, c'est de me dire qu'un jour, je l'avais arrêtée de puer, ou qu'elle serait vraiment pas bien enfermée dans son corps.
- Erwan
Avant, j'étais très très très très très proche de Pauline. Quand je l'ai appris aussi, j'ai pris un coup, parce que quand on grandit, on voit moins les personnes avec les études. Juste des petits messages, snap, etc. Maintenant, on s'appelle au téléphone. J'ai été le premier à savoir qu'elle avait gagné un maillot du PSG, elle m'a appelé directement au FaceTime. Donc ouais, c'est des petits trucs qu'avant on faisait moins et qu'on reprend dernièrement.
- Pauline Messier
On se dit qu'on s'aime, ça c'est pas du tout un tabou dans notre famille, mais c'est vrai que parler ouvertement de la maladie et de comment on le ressent, surtout la part de mes proches, c'est quelque chose dont j'ai pas l'habitude.
- Natacha Sels
Comment vous pourriez soutenir Pauline aujourd'hui ?
- Myriam
En tant qu'amie, comme tout le monde en fait. Dans les moments où ça ne va pas, on est là, on est une épaule et on la soutient. On peut lui donner des conseils, comme tout le monde en fait. Et quand elle est heureuse, on peut partager son bonheur avec elle. Donc ensuite, si elle a besoin de nous, physiquement, parfois, et franchement, parfois, c'est plus moi qui ai besoin de Pauline. C'est l'une des personnes que je connais, c'est très contradictoire, parce que c'est grâce à elle qu'on voyage, qu'on fait plein de trucs. Elle est très entreprenante pour faire des choses. Donc en même temps, elle a besoin de nous parfois pour faire des petits trucs qu'elle ne peut plus faire maintenant. Mais en même temps, nous aussi, on a besoin d'elle. Donc c'est un bon compromis.
- Erwan
Je pense qu'elle demanderait de rester nous-mêmes. de ne pas changer. Elle est restée elle-même de A à Z, donc il faudrait qu'on fasse la même chose. Nous, on fait beaucoup de blagues sur sa maladie. Tous les deux, on passe beaucoup par l'humour, en notre famille en général. Je reste pareil. Donc on reste nous-mêmes et je pense que c'est ce qu'elle apprécie le plus.
- Natacha Sels
Je t'observe, je t'écoute. Et tu es toujours vraiment d'une incroyable positivité. C'est vraiment quelque chose qui est en toi, ça ?
- Pauline Messier
Apparemment, oui. Je ne le fais pas exprès, je ne vais pas me dire qu'il faut que je sois positive. Je le suis. Je le prends parce que c'est beaucoup mieux que d'être triste, forcément. Mais c'est que je me dis, en plus de la SLA, j'étais triste. En fait, je ne suis pas... Tant triste que ça, vraiment. Je cherche des moments, mais je ne suis pas tant que ça. Sinon, je vais appeler une copine. Et encore, oui, de temps en temps, je vais peut-être appeler une copine.
- Fanny
En fait, je me suis posé la question si elle, elle savait l'espérance de vie qu'il attendait, entre guillemets. En tout cas, de ce qu'il y avait écrit sur Internet. Donc, c'était 3 à 5 ans. Et je l'appelle et je me disais, elle a l'air d'aller bien. et elle a un peu changé son... son mindset de se dire ah bah je vais profiter déjà qu'elle profitait déjà bien avant mais alors là elle n'a jamais autant fait de voyage,elle profite encore plus de la vie qu'avant.
- Natacha Sels
Alors quand même ça demande des deuils j'ai cru comprendre que tu aimais beaucoup danser
- Pauline Messier
ah oui, on arrive dans le sujet... oui j'aimais beaucoup danser avant et donc depuis, je ne regarde plus aucune vidéo de personne qui danse. Parce que c'est un peu frustrant quand même de se retrouver prisonnière de son propre corps et de ne pas pouvoir faire ce qu'on aime. Donc oui, effectivement, il y a certains deuils à faire. C'est vrai que ça, j'avais un peu oublié dans le sens où après deux ans, forcément, il y a des choses, ça passe.
- Natacha Sels
Est-ce que du coup le fait que... Il y a des espaces qui se ferment. Est-ce qu'il y en a d'autres qui s'ouvrent ?
- Pauline Messier
Il y a le sport déjà. Là, je vais peut-être tester le rugby fauteuil mercredi. On l'a vu avec notamment les Jeux Paralympiques. J'ai trouvé ça génial parce que ça donne vraiment de la visibilité sur tout ce qui existe. Il y a le tennis de table. Il va y avoir le volet assis. J'ai découvert le footing vertical. c'est extraordinaire, c'est de l'escalade pour les personnes soit en situation de handicap, soit les personnes âgées, toutes les personnes qui ont plus de difficultés à grimper. Ça va être une machine qui va me permettre de me mettre à la verticale et de grimper comme tout le monde. Il y a beaucoup de possibilités, même si on est dans un fauteuil, on peut faire beaucoup de choses.
- Natacha Sels
Actuellement, au niveau des symptômes, où tu en es exactement ?
- Pauline Messier
Alors aujourd'hui, ma jambe gauche, je ne peux plus la lever. J'ai toujours la possibilité de lever la jambe droite. J'ai des difficultés au niveau des mains, donc tout ce qui est motricité fine. Et aussi une petite perte musculaire au niveau du bras gauche.
- Natacha Sels
Myriam, quand tu as appris la nouvelle, qu'est-ce que tu t'es dit ?
- Myriam
C'était vraiment un choc de se dire que c'est quelque chose qu'on peut imaginer arriver aux autres. mais pas à nous en fait, on peut pas se dire ouais ma pote du jour au lendemain elle va attraper une maladie dégénérative et enfin genre on s'imagine pas ça le matin quand on se réveille et vraiment ça m'a vraiment bouleversée. D'autant plus qu'elle est jeune cette maladie, normalement, ça ne devrait pas la toucher. Maintenant, je me dis, en fait, c'est vrai que ça apporte plein de mal, ça a vraiment beaucoup plus que de bien, mais ça a apporté quand même, comme Erwan, le fait qu'on se soit plus rapprochés.
- Natacha Sels
Est-ce qu'il y a des personnes qui t'inspirent ?
- Pauline Messier
Forcément mes parents, ma soeur m'inspirent au quotidien.
- Natacha Sels
Qu'est-ce qui fait qu'elle t'inspire ?
- Pauline Messier
Ma soeur ? Elle est géniale. Déjà, elle est extrêmement drôle. C'est une fille extrêmement drôle. Elle a des projets, elle va au bout de ses projets. Elle est gentille. C'est vraiment une personne merveilleuse. Et si elle écoute ça, après je vais me faire charrier tout au long de ma vie. Ça va être super, mais non, c'est une personne merveilleuse par rapport à toutes ses qualités. Et aussi, je sais qu'elle a été extrêmement présente pour moi.
- Natacha Sels
Elle est plus âgée ou jeune ?
- Pauline Messier
Elle est plus jeune, de deux ans. Et on a été là l'une pour l'autre. On a eu ce truc entre nous de se faire des blagues les plus... On est plus crues les unes que les autres par rapport à la maladie. Jamais trop devant les parents, sinon après, ils nous tuent avant l'heure. Mais oui, on s'est toujours très bien entendues. Même si des fois, elles m'énervent. Et j'aimerais bien qu'elles me rendent mon pull.
- Natacha Sels
Donc elle, elle t'inspire ?
- Pauline Messier
Oui, énormément.
- Natacha Sels
Et tes parents ?
- Pauline Messier
Forcément. Déjà, c'est mes premiers modèles. Ils sont tous les deux extraordinaires, de par leur qualité, leur gentillesse, leur altruisme. Ils sont toujours là. pour moi, pour les autres. Dans le cadre de la maladie, ils ont toujours tout fait pour être présents et m'accompagner pour réaliser des projets, mais toujours les plus fous les uns que les autres.
- Natacha Sels
Tu peux donner tes exemples ?
- Pauline Messier
Aller au Moulin Rouge. J'ai toujours voulu aller voir un gabarit et c'était extraordinaire. Les Jeux Olympiques, les Jeux Paralympiques. Tout ce qui existe, souvent on ne sait pas qu'il existe des choses, mes parents le savent. On va tout faire. Et ça m'a permis aussi de découvrir plein de choses.
- Natacha Sels
Oui, donc vraiment quelque chose de très stimulant à la maison.
- Pauline Messier
Toujours, toujours.
- Natacha Sels
Et aussi, non, d'autres modèles ?
- Pauline Messier
Je ne sais pas si je parlerais de modèle ou pas, mais une personnalité publique qui a toujours été dans notre famille, c'est Jean-Jacques Goldman. Un chanteur qui m'a accompagnée depuis le ventre de ma mère jusqu'à aujourd'hui. Je connais toutes ces chansons. Par exemple, tout à l'heure, on écoutait sur le tourne-disque une de ces chansons. Et mon cousin était là en mode, mais c'est quoi cette chanson ? Elle est connue. Et nous, on ne sait même pas dire quelles sont les chansons connues de celles qui ne le sont pas. Parce qu'on les connaît toutes par cœur. Mais je dirais modèle quand même parce que je trouve que c'est une personne très altruiste aussi.
- Natacha Sels
J'ai cru comprendre que la maladie que tu as est un gène particulier et qu'on avait trouvé un traitement actuellement. Est-ce que tu veux m'en dire plus ?
- Pauline Messier
Alors là, c'est vraiment... Un sujet qui est très chaud, surtout dans la famille, par rapport aux actualités. Mais donc oui, j'ai le gène SOD1 qui a muté, donc c'est de là que viendrait ma SLA. Aujourd'hui, on a trouvé un traitement qui permet de le stabiliser, voire d'avoir une évolution positive, on a pu en constater. Donc c'est le Toferson. C'est un traitement qui, moi, me permet de voir, en fait, juste une stabilité de la maladie depuis plus d'un an, ce qui fait quand même beaucoup de bien aussi au moral. Je pense qu'il y a ça aussi qui joue. C'est un traitement, oui, fabuleux. Le souci aujourd'hui, c'est que ce traitement, voilà, il est remis en cause par l'HAS, donc la Haute Autorité de Santé. Donc c'est quand même très alarmant. Surtout quand on voit l'efficacité de ce traitement, c'est la première fois qu'on a une porte ouverte sur l'avenir. Et je trouve ça très dur et très cruel de venir la refermer devant nous. Donc il faut continuer de parler haut et fort, même pour ceux qui n'ont plus leur voix. Parce que trouver un traitement, c'est... Oui, nous offrir un avenir. Et ce traitement, il est là aujourd'hui. Donc, c'est ça qui est beaucoup plus terrible. Ça a vraiment montré des effets très positifs. Donc, c'est là où il y a vraiment une incompréhension.
- Natacha Sels
Toi, tu le vois ?
- Pauline Messier
Ah oui, bien sûr, moi, je le vois. Mais que ce soit...
- Natacha Sels
Qu'est-ce que tu vois exactement ?
- Pauline Messier
Déjà, envie réelle, c'est que depuis juillet 2023, donc quelques mois après... Ma première injection du Toferson, je n'ai eu aucune évolution de la maladie. Alors que mon neurologue me l'avait affirmé, la maladie évoluait très vite chez moi.
- Natacha Sels
C'est un traitement que tu prends à quel rythme ?
- Pauline Messier
Je l'ai une fois par mois. Je vais à l'hôpital, ça se passe super bien. J'ai un neurologue et des infirmières qui sont exceptionnelles. C'est vraiment mon petit rendez-vous du mois. J'adore.
- Natacha Sels
C'est douloureux ?
- Pauline Messier
C'est assez douloureux. J'ai de la chance quand même parce que moi, je touche du bois. Ça se passe quand même relativement bien. Ça fait mal, mais c'est vrai que chez certaines personnes, c'est douloureux. Mais c'est pour ça qu'il faut continuer la recherche pour pouvoir trouver un autre moyen d'administrer le Tofersen.
- Natacha Sels
Je me dis que le fait que tu aies trouvé un traitement, ça doit être à la fois merveilleux et à la fois perturbant.
- Pauline Messier
Alors, c'est hyper intéressant parce qu'en novembre 2022, on m'a annoncé en gros que j'avais 2 à 5 ans à vivre. En mars 2023, j'ai eu accès à un traitement très prometteur et qui, chez moi, fonctionne. Donc, dès ce moment-là, ça change beaucoup de choses, surtout quand on voit au bout d'un an qu'effectivement, il n'y a eu aucune évolution.
- Natacha Sels
De la maladie, je précise.
- Pauline Messier
Oui, de la maladie. C'est très étrange à expliquer, mais j'ai été très vite stressée. Et tout de suite, je me suis posé la question de « mais qu'est-ce que je vais faire plus tard ? » Parce qu'on m'a dit que j'avais plus que 3 à 5 ans à vivre. D'accord, je vais faire ma vie. Et là, on me dit d'un seul coup que j'ai beaucoup plus de temps. Et ce qui est bizarre, je me sens un peu mal quand je le dis, parce que je sais que tout le monde n'a pas cette chance aussi. Ça me fait un peu peur. Comment dire ? Limite, on a envie de se dire, non mais attendez, laissez-moi pas choisir. Mais c'est que tout de suite, on est remis dans les rails du train, de la société. Et on se retrouve avec les angoisses. de quelqu'un qui vit tout à fond, sans se poser, sans juste profiter de la vie. Et puis au final, on se dit, mais on m'offre une deuxième chance. En fait, on m'offre la vie sur un plateau. C'est une des premières images que j'ai eues. J'ai vu un majordome avec un plateau en argent, ouvrir une cloche avec une sorte de papier avec marqué « vie » . Et cette chance, il faut la saisir. et je pense que Il faut prendre en compte aussi tout ce qui s'est passé avant et se dire, voilà, aujourd'hui, j'ai vécu ça, qu'est-ce que je veux plus tard ? Est-ce que je veux monter dans ce train de la société qui va super vite et avancer toujours tout droit sans jamais m'arrêter ? Ou alors j'ai envie de descendre, aller sur les sentiers et juste me balader et découvrir autre chose. Et donc, ce plateau, je le prends avec plaisir et je me dis, il me reste beaucoup de temps pour faire vraiment ce que j'ai envie de faire et des choses qui ont du sens aussi.
- Myriam
Je sais qu'à un moment, ça l'inquiétait quand elle a commencé à prendre le traitement, qu'elle voyait que du coup, sa vie allait avoir la même espérance de vie que tout le monde. Nous, on l'a vraiment pris comme un bonheur, comme elle aussi, au début. Mais après, elle est venue à se questionner, à se dire, mais qu'est-ce que je vais faire après ? Et en fait, dans ma tête, je me disais, pourquoi elle s'inquiète ? Parce qu'après tout ce qu'elle a accompli maintenant, je ne vois même pas comment elle ne pourrait pas faire de grandes choses après.
- Pauline Messier
C'est toujours très perturbant. Parce que psychologiquement, c'est dur. On vous dit qu'on va mourir, après qu'on ne va plus mourir. Et puis là aussi, avec l'annonce potentielle de mon traitement qui peut m'être enlevée, je me dis, je vais remourir. Au bout d'un moment, s'il vous plaît, laissez-moi un peu de temps. Je ne sais plus trop où j'en suis là.
- Natacha Sels
Oui, je comprends ce que tu veux dire. Enfin, ce que j'entends dans ce que tu dis, c'est que finalement, cette maladie t'a permis de quitter le train de la vie qui va trop vite, c'est-à-dire sans réflexion et où on court.
- Pauline Messier
C'est exactement ça. C'est qu'avant, je m'étais retrouvée là dans un BTS qui était génial, mais qui n'était pas fait pour moi, juste parce que je ne savais pas trop ce que je voulais faire et qu'il fallait absolument que je fasse des études, que toute ma vie on m'a dit oui, tu vas faire de longues études et puis tu vas avoir tel métier, etc. Et donc là, ça permet, ce que je disais avant, de juste se concentrer sur l'instant présent et aussi sur ce que je veux vraiment dans ma vie et le fait de vouloir être fière de la personne qu'on est.
- Natacha Sels
Et qu'est-ce que tu veux vraiment dans ta vie ?
- Pauline Messier
Je veux aider, déjà. Je veux apporter ma petite pierre, toute petite pierre à l'édifice pour tout ce qui est inclusivité aussi. Le problème, c'est qu'il y a énormément aussi de validisme autour de nous et c'est dur de faire comprendre que oui, une rampe, c'est bien. Mais par contre, si elle est inclinée à mort, non, ce n'est pas inclusif. Et oui, moi, je ne veux pas de cette rampe toute moche, grise, alors qu'à côté, ils ont un super escalier, magnifique en pierre. Moi, je veux ma rampe en pierre. Et donc, c'est faire comprendre qu'on ne veut pas juste avoir l'accessibilité, on veut l'inclusivité. Ça, pour moi, c'est très, très important.
- Fanny
Qu'est-ce qui m'a étonnée ? Je ne m'attendais pas à ce que la maladie ouvre des portes, entre guillemets, qu'elle puisse vivre des choses qu'elle n'aurait pas eu l'occasion de vivre si elle n'avait pas eu la maladie. Ça ouvre aussi l'esprit à l'entourage et pas seulement à elle.
- Natacha Sels
Est-ce que ce ne serait pas un super pouvoir qu'elle a d'ouvrir les portes ?
- Myriam
Clairement, je pense que, par exemple, si j'étais à la place de Pauline à ce moment-là, Je n'aurais pas été aussi ouverte à faire de nouvelles expériences, à profiter. Je pense que je me morfonderais beaucoup plus.
- Natacha Sels
Est-ce que tu as donné un sens à cette maladie ?
- Pauline Messier
Je me dis, toujours par rapport à la foi quand même, c'est qu'on ne va jamais avoir quelque chose qui est trop lourd à porter pour nous. Et donc si j'ai ça, c'est qu'il faut que je fasse entendre ma voix pour faire changer les choses.
- Natacha Sels
J'ai compris que tu avais un compte TikTok ?
- Pauline Messier
Alors j'ai un petit peu arrêté aussi parce que quand j'ai commencé, c'était le tout début de la maladie et ensuite j'ai eu besoin de me recentrer sur moi et de comprendre aussi comment agissait la maladie sur mon corps dans ma tête. C'était très important. Il faut d'abord se comprendre entièrement pour pouvoir aider les autres.
- Erwan
Elle a fait des lives TikTok, elle a voulu informer sur ce que c'était la SLA. Elle a toujours voulu être différente et vouloir faire bouger les choses, mais là, le faire de cette façon, avec cette nouvelle-là, je trouve ça très très beau. Et donc ça, c'est la chose qui m'a le plus surpris. C'est être calme quand elle parle aussi. Elle est toujours posée, toujours réfléchie, elle a toujours le bon mot à dire, etc. Et ses émotions, quand elle va réussir à les gérer, dans plusieurs émissions que j'ai regardées, ses mots sont très touchants. Donc c'est vraiment la chose qui m'a le plus touché dans ce qu'elle a fait depuis qu'elle a la maladie. Le partage et informer et sensibiliser les gens.
- Pauline Messier
C'est... Vraiment de les aider à vivre. Parce que souvent, on va se dire, oui, la SLA, ça y est, c'est la mort. Tout de suite. Et oui, ça amenait aussi un peu de positivité dans la maladie qui est très sombre.
- Natacha Sels
Sur TikTok, tu avais beaucoup de personnes qui te suivaient ?
- Pauline Messier
Oui, je crois que j'en ai à peu près 40 000.
- Natacha Sels
Waouh ! Alors, est-ce que c'était uniquement des personnes qui étaient... impactées et intéressées par la maladie ? Ou est-ce que c'était un public finalement beaucoup plus large ?
- Pauline Messier
Donc je vais avoir beaucoup de personnes qui ne sont pas du tout concernées par la maladie, mais qui ont été touchées par mes mots, par la brutalité aussi de la maladie, et qui veulent en savoir plus.
- Natacha Sels
Ils ont été touchés par tes mots parce que peut-être, à eux aussi, alors qu'ils ne sont pas malades, tu arrivais à faire du bien. D'après toi, c'est quel message que tu faisais passer qui touchait autant de personnes ?
- Pauline Messier
Je pense, d'après les retours aussi que j'ai eus, que c'est le fait d'avoir toujours envie de se battre malgré les difficultés de la vie.
- Natacha Sels
J'ai regardé quelques émissions avant de venir et j'ai été bluffée par cette façon très posée, un calme intérieur. Et une aura qui est vraiment là.
- Pauline Messier
Ma mère me dit que je peux être très intelligente, mais très bête à la fois. Elle dit que dès qu'il faut parler d'un sujet sérieux, là tout de suite, mon regard va changer et je vais me poser et je vais aller droit au but. Mais sinon, elle va dire, mais des fois, mais t'es là, t'es la petite fleur bleue.
- Natacha Sels
C'est peut-être ça la sagesse, c'est de passer de l'un à l'autre et de la légèreté à la profondeur.
- Pauline Messier
Sans doute.
- Erwan
Les mots étaient très beaux. Très bien choisi pour Pauline.
- Natacha Sels
De la légèreté à la profondeur, c'est bien pour Pauline.
- Erwan
Exactement, très bien choisi.
- Natacha Sels
Si tu avais un message pour d'autres malades, ce serait lequel ?
- Pauline Messier
C'est rester positif, chercher le beau, chercher l'avenir. On ne connaît pas demain, donc il faut toujours espérer. Voir les choses, oui, comme elles sont, mais chercher tous les petits détails qui font que notre journée est belle.
- Natacha Sels
Qu'est-ce que vous auriez envie de dire à Pauline que vous ne lui avez encore pas dit ?
- Erwan
On ne parle pas beaucoup de nos sentiments, donc d'avoir dit ce que j'ai dit aujourd'hui, c'est beaucoup. Et dire ce que je pensais sur le cœur devant elle aussi, c'est la chose la plus... c'est ce que j'avais envie de dire. de dire en fait.
- Fanny
Je suis fière d'elle, que je crois en elle et que je serai toujours là. Il n'y a pas de raison qu'on arrête d'être amie, sauf si tu ne veux plus de moi. En fait, c'est ça, c'est que c'est tellement mon amie avant d'être une personne malade que je suis fière d'elle comme tous mes amis. Je ne fais pas de différence avec elle ou les autres.
- Pauline Messier
Ça me fait bizarre d'entendre tout ça, c'est comme ce que je disais par rapport à mon cousin, dans le sens où on a toujours la même relation en tant qu'amis, on va se raconter nos vies, les garçons, les études, les petits problèmes de machin, de machine, mais parler à cœur ouvert de la maladie, c'est quelque chose qu'on ne fait pas, peut-être par pudeur, peut-être aussi parce qu'on a juste envie de profiter comme tout le monde. Et donc là, entendre tout ça de la part des personnes qui me sont chères, c'est très émouvant et ça me fait très plaisir. Et ça me donne envie de continuer encore plus loin avec eux à mes côtés.
- Natacha Sels
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