- Romain LE GAL
Bienvenue sur Lait'Change, le podcast qui donne la parole aux actrices et aux acteurs de la filière laitière et fromagère. Je suis Romain LE GAL et aujourd'hui j'ai le plaisir de vous retrouver en Savoie. Savoie, terre de fromage. Je suis à environ 1710 mètres d'altitude dans le parc naturel national de la Vanoise, juste à côté du lac de Tueda. J'ai la chance aujourd'hui d'aller en production de Beaufort-Chalet d'Alpage. Hommage qui parle à quand même beaucoup de monde le Beaufort. J'ai la chance aujourd'hui d'être accueilli par Rémy Perret. Bonjour Rémy.
- Rémy PERRET
Bonjour.
- Romain LE GAL
Comment es-tu Rémi aujourd'hui ?
- Rémy PERRET
Avec le soleil très bien.
- Romain LE GAL
Oui, ça n'a pas été le cas ces derniers temps.
- Rémy PERRET
Non, là on a eu quand même un mois très très difficile avec énormément de pluie, comme partout sur le reste du pays.
- Romain LE GAL
Oui, on a un peu cette problématique de la pluie aujourd'hui. Vous êtes monté quand en Alpage ?
- Rémy PERRET
On est monté nous le 1er juin. Comme à peu près chaque année, entre le 1er, le 2, le 3. Période à laquelle on peut commencer la fabrication du Beaufort-Chalet d'Alpache.
- Romain LE GAL
On va revenir là-dessus après. Rémi, peux-tu te présenter en quelques mots ?
- Rémy PERRET
Donc moi, comme vous l'avez dit, je m'appelle Rémi Perret. Je fais partie d'un GAEC qui est le GAEC Perret, où je suis associé avec mes deux autres frères. Exploitation que l'on a... de nos parents.
- Romain LE GAL
Donc c'était tes deux parents qui étaient associés du coup ?
- Rémy PERRET
Ils n'étaient pas associés. Les structures à l'époque faisaient qu'il y avait un chef d'exploitation qui était donc mon papa et ma maman étaient, l'aidaient sur la ferme. Voilà tout simplement.
- Romain LE GAL
Ok et donc tu as repris avec tes frères en quelle année ?
- Rémy PERRET
Nous on a repris en 2015. nos parents se sont installés dans les débuts des années 80 70 début 80 ils ont créé la structure parce qu'ils sont partis de zéro
- Romain LE GAL
Et c'est les parents de tes parents, donc tes grands-parents étaient producteurs ou pas du tout ?
- Rémy PERRET
Eh ben, étaient producteurs mais avec une ou deux vaches laitières comme ça se faisait à l'époque mais à la suite de ça donc mon papa et ma maman ont remonté une structure à côté complètement Sans avoir repris de leurs parents.
- Romain LE GAL
Avec combien de vaches laitières ils ont commencé ?
- Rémy PERRET
Un veau.
- Romain LE GAL
Un veau ?
- Rémy PERRET
Voilà. Donc, mon papa travaillait à côté au début. Il était pisteur secouriste, ici, à Méribel, où on se trouve. Pendant quelques années. Ensuite, il a été livreur de vins. pendant aussi quelques années pour pouvoir après, une fois qu'il a eu les moyens, se donner entièrement à l'exploitation.
- Romain LE GAL
D'accord. Et donc, toi et tes frères, vous avez rejoint il y a à peu près combien de temps ?
- Rémy PERRET
Nous, ça fait une dizaine d'années en gros qu'on a repris. On a toujours été sur la ferme avec nos parents. Du temps de nos parents, avant qu'ils prennent la retraite, on était salariés sur l'exploitation. Mais on a aussi un deuxième métier, comme beaucoup sur le secteur. J'ai un autre de mes frères et moi-même, on est moniteur de ski l'hiver.
- Romain LE GAL
OK.
- Rémy PERRET
Et le troisième est chauffeur d'engin de damage.
- Romain LE GAL
D'accord. Ah oui, donc il y a...
- Rémy PERRET
Plus réactif.
- Romain LE GAL
Plus réactif avec finalement aussi en fonction des saisons.
- Rémy PERRET
C'est ça.
- Romain LE GAL
Aujourd'hui, comment ça se passe ? Une vie en alpage, là on est à 1700 mètres d'altitude, vous montez tout le matériel, le chalet, comment ça se passe ?
- Rémy PERRET
Le chalet est en place avec le matériel que l'on utilise. Rien ne bouge, tout reste ici l'hiver. Il est simplement fermé enneigé. Nous on revient autour du 15 mai, où on commence à remettre en place, à faire le nettoyage. pour pouvoir monter après début juin, pour commencer la fabrication du fromage et l'installation.
- Romain LE GAL
Et l'hiver, les vaches sont donc ?
- Rémy PERRET
Donc l'hiver, en alpage, on est ici du mois de juin au mois d'octobre, à fin octobre nous à peu près. Donc le restant de l'année, on a l'exploitation qui est dans la vallée, qui se situe, enfin moi je dis la vallée, mais on est quand même à 1400 mètres d'altitude.
- Romain LE GAL
C'est un petit peu plus bas, mais ça reste dans les montagnes.
- Rémy PERRET
Et donc, on redescend le troupeau dans la vallée au niveau de la ferme.
- Romain LE GAL
Et l'hiver, le lait, tu le livres à une coopérative ?
- Rémy PERRET
Alors, quand on redescend, nous, on produit aussi de la tomme fermière. Donc, du mois d'octobre à fin mars, à peu près. On produit de la tomme fermière. Suite à... Parce que pour nous, c'est un fonctionnement qu'on a toujours eu. Donc, qui nous convient bien. On a nos clients réguliers.
- Romain LE GAL
Finalement, vous faites aussi de la transformation fromagère l'hiver en bas.
- Rémy PERRET
À la ferme. Oui. Après, il y a deux mois au printemps. Parce qu'on régule un petit peu. L'hiver, on a moins de bêtes, vu qu'elles sont en intérieur.
- Romain LE GAL
Vous avez moins de bêtes à peu près ?
- Rémy PERRET
L'hiver, on... on en garde entre 30 et 50. Et après, au mois de mars, on a toutes les autres qu'on récupère au moment des vélages, parce qu'on les fait véler sur le printemps, pour la plupart, pour avoir du lait l'été, justement. Et donc là, on livre à une coopérative pour pouvoir un peu de temps pour s'occuper des veaux à côté.
- Romain LE GAL
Par la période tampon. Voilà,
- Rémy PERRET
la période tampon, des vaches qui vèlent et pouvoir s'occuper correctement de la ferme.
- Romain LE GAL
D'accord. Et donc l'été, vous avez combien de vaches laitières dans les alpages ?
- Rémy PERRET
On monte avec à peu près 130-135 vaches en attendant que les dernières effets les veaux. A la sortie, on a entre 150 et 160 vaches laitières sur le secteur d'alpage.
- Romain LE GAL
Et du coup, en termes de par rapport au fait que vous fassiez du Beaufort, les espèces, les races utilisées, vous êtes sur quoi aujourd'hui ?
- Rémy PERRET
le cahier des charges Beaufort nous autorise deux races,
- Romain LE GAL
la tarine qui est la race tarantèse et l'abondance voilà tout simplement et du coup là dans ton troupeau tu as un mix des deux on est majoritairement en tarine d'accord c'est un peu la race de départ on
- Rémy PERRET
va dire que mon papa était 100% tarine ok,
- Romain LE GAL
est-ce que tu peux nous expliquer comment on fabrique comment on fait ok du Beaufort-Chalet d'Alpage.
- Rémy PERRET
Donc aujourd'hui, le Beaufort-Chalet d'Alpage a une particularité, c'est que c'est un Beaufort qui est resté en fabrication artisanale. C'est-à-dire artisanale, aujourd'hui, on doit avoir le lait d'un seul troupeau, qui doit être fabriqué deux fois par jour, c'est-à-dire après chaque traite.
- Romain LE GAL
Donc le matin et le soir.
- Rémy PERRET
Exactement, le matin et le soir. Donc avec un soutirage à la toile.
- Romain LE GAL
D'accord, donc le soutirage, c'est venir enlever le cahier. Finalement, relever le caillé de la cuve à la toile et à la baguette, c'est comme ça qu'on dit ?
- Rémy PERRET
Il y a une baguette, voilà, au niveau de la toile, que l'on met pour tirer le caillé.
- Romain LE GAL
Une action qui est quand même hyper physique.
- Rémy PERRET
Hyper physique. Et aujourd'hui, on utilise des gants pour mettre, pour soutirer le caillé. À l'époque, enfin moi, mon frère, mon petit frère, lui, fait encore sans les gants. Ah oui ? Oui. Et ce qu'il faut savoir, c'est que le petit lait, le sérum qu'il y a, il est quand même à 54 degrés.
- Romain LE GAL
C'est un peu chaud.
- Rémy PERRET
C'est un peu chaud. Mais bon, avec le temps, on s'habitue. Oui. Mais c'est vrai qu'on voit quasiment plus de fromager, le fer sans gants.
- Romain LE GAL
Et donc après, ça c'est les hauts de particularité. Pour le Beaufort-Chây d'Alpage, il faut que ça soit plus de 1500 mètres d'altitude. Exactement. Mais bon, là, on ne se pose pas la question. Il y a plus de 1500 mètres d'altitude. Oui. Et après, si on reprend les différentes étapes du process, donc tu récupères le lait.
- Rémy PERRET
Donc. On traite,
- Romain LE GAL
on récupère le lait.
- Rémy PERRET
On va dire qu'une demi-heure après, il est dans les cuves. On a un laps de temps qui est défini pour qu'il soit en cuve. Normalement, il doit être dans les cuves à peu près deux heures au maximum après la traite. OK. Donc voilà, nous, de ce côté-là, une demi-heure après, il est dans les cuves. Et à partir de là, démarre la production, la transformation en fromage Beaufort-Chalet d'Alpage.
- Romain LE GAL
Donc, après, en présurage ?
- Rémy PERRET
Bien sûr. Donc le lait est mis dans les cuves, est emprésuré à une température de 33 degrés. Donc après l'emprésurage, ça va faire comme un gros yaourt, ce qu'on appelle le caillage. Donc à la suite de ça, on va décailler avec un tranche caillé. C'est un appareil avec des fils comme des fils de piano. Comme si vous regardiez une guitare, l'alignement de fils c'est pareil. Donc on va découper le cahier avec ce tranche cahier jusqu'à avoir la grosseur d'un grain de riz. Pour que notre cahier arrive à être découpé à ce niveau là. Après, on va le brasser. Après, ça dépend, c'est le jugement du fromager. Donc pendant une quinzaine de minutes comme ça, ensuite on va le chauffer jusqu'à une température de 54 degrés. Pour ensuite, on va continuer à le brasser jusqu'à ce qu'il soit fait, qu'il soit bon à sortir de la cuve pour être soutiré ensuite à la baguette. et à la toile, par la main du fromager.
- Romain LE GAL
Et aujourd'hui, vous faites combien de Beaufort, Chahé d'Alpage par jour ? Alors nous,
- Rémy PERRET
aujourd'hui, on a une période, le début de saison, où on fait 6 fromages par jour. Pour ensuite, dans l'avancement de la saison, on va diminuer un petit peu, parce que les vaches produisent un peu moins, l'herbe est un peu moins riche. Et donc, on va finir la saison à 4 Beaufort par jour.
- Romain LE GAL
D'accord. Et une fois que finalement c'est soutiré, on les met dans un cercle en bois.
- Rémy PERRET
Exactement, qui est le cercle à beaufort.
- Romain LE GAL
Le cercle à beaufort.
- Rémy PERRET
Qui est convexe.
- Romain LE GAL
Qui est convexe, donc vers l'intérieur, concave extérieur.
- Rémy PERRET
Pour donner une forme au beaufort qui va être concave.
- Romain LE GAL
Et donc du coup, pourquoi ce cercle avec ce talon concave ?
- Rémy PERRET
À l'époque, ils avaient fait des talons comme ça sur les Beauforts qui sont concaves pour pouvoir justement, quand ils descendaient de l'alpage à dos de mulet, pouvoir mettre les Beauforts sur le bas de chaque côté du mulet et pouvoir les attacher. Donc la forme du fromage qui est concave justement permettait de sangler le fromage sur le bas du mulet.
- Romain LE GAL
Donc en fait, c'était une solution un peu technique pour permettre de transporter... Le fromage. Exactement. Et donc, ce cercle à Beaufort, on peut aussi le régler en fonction de la quantité qu'on a du lait ?
- Rémy PERRET
Oui, aujourd'hui, les cercles ont un cordage autour. On peut régler en fonction de la quantité de lait, à des diamètres plus ou moins gros, pour pouvoir justement serrer notre fromage.
- Romain LE GAL
On en discutait un petit peu avant l'entretien. Dans le cahier des charges, le Beaufort, c'est une AOP. Oui. depuis 1968, donc une appellation d'origine protégée. Et on en discutait qu'il y a une fourchette de poids dans le Beaufort qui est très, très large. Si on lit le cahier des charges, c'est de 20 à 70 kilos. Pourquoi ?
- Rémy PERRET
Tout simplement, à l'époque, parce qu'aujourd'hui, c'est vrai qu'on va avoir des fromages un peu plus calibrés. Même nous, en alpage, même si on a des diamètres différents, on va aller de 35 à 45 kilos. pas plus, pas moins parce que bon, moins aujourd'hui c'est assez compliqué parce qu'on a des cercles qui permettent pas non plus un serrage plus bas mais à l'époque il y avait des plus petits troupeaux et il y avait des alpages c'était pas du tout la même chose donc ils se donnaient les moyens de pouvoir rentrer au niveau du cahier des charges même s'ils avaient fait des beauforts plus petits ou des beauforts beaucoup plus gros en fonction de la quantité de lait bien sûr
- Romain LE GAL
Finalement, le Beaufort, il fallait quand même des gros troupeaux à l'époque pour faire des fromages.
- Rémy PERRET
Bien sûr, on avait des vaches qui produisaient un petit peu moins, qui étaient des alpages où peut-être il y avait plus d'agriculteurs, donc peut-être plus de vaches. Les gens très à la main, c'était complètement différent. Et puis bon, nous aujourd'hui, c'est vrai qu'on gère un petit peu différemment. Mais à l'époque, les gens essayaient de traire autant de l'hiver que l'été. Donc là, il y avait une petite différence.
- Romain LE GAL
Donc ce Beaufort, une fois qu'il est détoilé, on va le cesser salé ?
- Rémy PERRET
Donc une fois qu'il est dépressé, détoilé, dépressé, Nous, on le laisse reposer 12 heures avant de le passer dans un bain de sel, ce qu'on appelle la saumure. Donc, il va rester 24 heures. Là, il va finir son échange entre le sérum qui reste à l'intérieur et le sel. Il va prendre du sel pour ensuite aller en cave pour continuer son affinage. Ou en cave, il va continuer à être salé, parce que c'est quand même un gros fromage aujourd'hui. Il va continuer à être salé et frotté, comme nous, à l'alpage, tous les deux jours.
- Romain LE GAL
Et... Et avant ça, on n'en a pas parlé tout à l'heure, pour reconnaître un Beaufort chalet d'alpage, on peut le reconnaître aussi avec ses plaques. Vous mettez des plaques de caséine.
- Rémy PERRET
Oui, bien sûr. Donc le Beaufort chalet d'alpage, il a deux plaques. Il a la particularité d'avoir deux plaques, contrairement au Beaufort d'été ou au Beaufort d'hiver. Il a la plaque bleue que tous les Beauforts vont avoir, aussi bien été qu'hiver. Mais lui, le Beaufort chalet d'alpage, en plus, il a une plaque rouge. À l'inverse. de la plaque bleue, de l'autre côté, qui va justifier que c'est bien un Beaufort-Charles-et-Dalpage.
- Romain LE GAL
Là, c'est intéressant ce que tu dis, Rémi. Est-ce qu'on pourrait, pour les gens qui nous écoutent, redonner finalement les différences entre un Beaufort-hiver, un Beaufort-été, puis on va redonner en quelques mots les grandes distinctions du Beaufort-Charles-et-Dalpage, même si on en a parlé avant, parce que c'est vrai que ça peut perdre un petit peu les gens.
- Rémy PERRET
On va commencer par le Beaufort d'hiver. Le Beaufort d'hiver, c'est un Beaufort qui est produit hiver, tout simplement.
- Romain LE GAL
Donc les vaches sont à l'étable,
- Rémy PERRET
nourries au foin. Lui, son appellation, c'est Beaufort d'hiver. Par contre, après, on va avoir une différence, c'est sur l'alpage et l'été. Parce qu'ils sont tous les deux produits en été. Un sur le site artisanalement, comme nous aujourd'hui.
- Romain LE GAL
L'été de quel mois à tel mois, du coup ?
- Rémy PERRET
Il est produit du 1er juin à fin octobre. D'accord. Voilà, c'est vraiment...
- Romain LE GAL
C'est bien indiqué dans le cahier des charges.
- Rémy PERRET
Oui, le 1er novembre ou le 31 mai, ce n'est pas des Beaufort ni été ni alpage. Et le Beaufort d'été, lui, est produit industriellement. C'est-à-dire qu'on a le droit de mélanger le lait de plusieurs troupeaux, d'avoir du lait d'une traite refroidie. Contrairement à nous, on doit fabriquer après chaque traite. Donc le lait refroidi. Et on a le droit d'utiliser le sous-tirage sous-vide. par le biais d'un GSV, et là, par le biais d'un GSV, c'est-à-dire c'est un appareil qui...
- Romain LE GAL
Permet de faire un vide et des cloches, et qui permet de répartir le cahier dans les moules.
- Rémy PERRET
Dans les moules. Donc c'est un procédé complètement différent. Alors que nous, aujourd'hui, il n'y a aucun mélange de lait, c'est vraiment la fabrication, après chaque traite, est d'un seul troupeau. Il n'y a même pas de mélange de lait de deux troupeaux.
- Romain LE GAL
Donc le Beaufort-Chahé d'Alpage, lait d'un seul troupeau, Plus de 1500 mètres d'altitude, méthode traditionnelle, toile et baguette.
- Rémy PERRET
Exactement.
- Romain LE GAL
Et puis après, le Beaufort, c'est combien minimum d'affinage ?
- Rémy PERRET
Alors, le minimum d'affinage est 5 mois. D'accord. Mais nous, on essaye d'avoir des fromages. On n'ouvre pas un fromage avant, on va dire, 10-11 mois. Le temps qu'il ait vraiment toutes ses saveurs.
- Romain LE GAL
Et c'est quoi pour toi qui fait un bon Beaufort ?
- Rémy PERRET
La première des choses, de toute façon, pour avoir un bon fromage, c'est déjà la pâture. Il faut que les vaches aient pâturé dans des endroits où il y ait énormément de diversité au niveau de la flore pour pouvoir mettre un maximum d'arômes au niveau de la pâte de notre fromage.
- Romain LE GAL
Et après, toi, tu consommes comment le Beaufort ? Des Beauforts qui ont de la pâte ? C'est quoi pour toi ? Un bon Beaufort.
- Rémy PERRET
On essaye d'avoir un maximum de pâte, bien sûr. Parce qu'un Beaufort qui a de la pâte est un Beaufort qui a énormément de goût.
- Romain LE GAL
Ça vient de beurrer, finalement, le palais. Et ça a un goût, comme on dit, de reviens-y.
- Rémy PERRET
Ah bah ça, oui. Ça a vraiment un goût de reviens-y.
- Romain LE GAL
On prend un peu de plaisir, même beaucoup de plaisir, à revenir, finalement, sur l'apéritif avec un morceau de Beaufort.
- Rémy PERRET
Je suis entièrement d'accord. Un petit verre de vin. avec un morceau de Beaufort à côté. Souvent, on fait le repas avec ces deux choses-là. Un bon morceau de pain, c'est ce qui passe très, très bien.
- Romain LE GAL
Aujourd'hui, comment tu vois demain la production en alpage ? Est-ce que tu penses que c'est quelque chose qui est en danger ? C'est quelque chose qui va...
- Rémy PERRET
Aujourd'hui, le problème qu'on rencontre, comme tout milieu... et que ça devient de plus en plus compliqué parce que bon on a quand même des horaires qui sont très très longues, des journées qui sont très longues quand on fabrique matin et soir, des contraintes aussi qui sont beaucoup plus difficiles que d'habitude. de traire un troupeau et puis de poser le lait en bordure de route avec le camion qui vient récupérer le lait et qui part justement à la coopérative. Toutes ces choses-là font que demain, je ne sais pas si on aura encore des jeunes qui auront le mental, parce que ça impacte beaucoup aussi la vie de famille. Si on n'a pas une compagne ou des gens qui sont un peu du milieu ou qui acceptent notre vie, C'est quand même très, très difficile.
- Romain LE GAL
Quand c'est l'été comme ça en Alpage, tu redescends tous les jours ?
- Rémy PERRET
Moi, je redescends comme tous. Je redescends aussi occasionnellement dans la vallée.
- Romain LE GAL
Et du coup, avec tes deux frères, comment vous organisez le travail sur la ferme ?
- Rémy PERRET
Donc, moi, je suis en permanence à l'Alpage. Mes deux frères s'occupent aussi de la ferme en vallée. À cette époque-ci, on a les foins à faire, on a encore les dernières vaches qui vont veller ou qui ont vellé, donc à s'occuper, et puis les veaux d'élevage qu'il faut soigner. Après, j'ai mon petit frère, donc Cédric, lui, qui monte occasionnellement sur l'alpage pour faire les remplacements, quand il y a des remplacements à faire, des salariés qui sont en congé. Que ce soit la fabrication ou au niveau des vaches. De manière à ce qu'on soit toujours le même nombre sur l'alpage.
- Romain LE GAL
Vous êtes combien sur l'alpage ?
- Rémy PERRET
Aujourd'hui, on a 4 salariés.
- Romain LE GAL
D'accord. Donc avec toi, vous êtes 5 en permanence sur l'alpage. C'est ça. Et tu as combien de fromagers ?
- Rémy PERRET
Un seul.
- Romain LE GAL
Un seul. Ok. Lui, il a le droit, 16 jours sur 7, le matin et le soir, de faire ses beaux fromages.
- Rémy PERRET
Exactement.
- Romain LE GAL
Une personne qui est quand même hyper importante sur l'alpage. Et toi, tu produis un petit peu ou pas du tout ?
- Rémy PERRET
Donc moi, je ne peux pas me diviser en quatre. Donc c'est pour ça que je fais appel à mon petit frère. Et c'est lui, on a chacun nos postes. C'est un peu lui qui est le maître fromager de la famille. Il a repris le flambeau derrière mon père pour la maîtrise du fromage. Même si on sait tous les trois fabriquer, c'est mon petit frère qui est quand même le maître fromager.
- Romain LE GAL
Et là, de manière générale ? Oui. que ce soit en alpage ou sur quelques structures, pas trop dur de bosser tout le temps en famille ?
- Rémy PERRET
Comme partout, je pense. Non, nous, on s'entend bien, on a la chance de bien s'entendre. Je ne dis pas qu'il n'y a pas des petits accros, même si on est associés sans être de la même famille, mais on arrive toujours à un consensus pour sortir vers le haut et ça se passe relativement bien.
- Romain LE GAL
Et ton papa, il est toujours présent ? même malgré tout qu'il soit en retraite ?
- Rémy PERRET
Mon papa, il a monté la structure, donc c'est un peu sa vie. Il aime bien voir un petit peu nous accompagner, voir la pérennité de ce qu'il a pu construire. Et c'est vrai que il monte à l'alpage. quasiment tous les jours. Aujourd'hui, il n'a plus du tout le même rôle. Quand il monte à l'alpage le matin et il fait à manger pour tout le monde, là, ça enrôle un petit peu.
- Romain LE GAL
Un rôle qui est quand même important. Il faut nourrir les guerriers. Oui,
- Rémy PERRET
c'est ça. Donc, il faut nourrir les guerriers. Puis, il y a toujours le bon conseil quand même quand il y a des petites choses qui peuvent...
- Romain LE GAL
L'expérience.
- Rémy PERRET
L'expérience, voilà.
- Romain LE GAL
C'est le regard extérieur, l'expérience. Enfin, le regard extérieur qui est à l'intérieur, mais il a quand même... il passait quelques années. Et aujourd'hui, quand il y a une exploitation comme ça, il y a des enjeux et les enjeux, c'est des fois la transmission. Comment tu vois après, finalement, vous les trois frères ? Est-ce que dans les neveux, nièces, dans les enfants, il y a des gens qui sont tombés amoureux aussi de ce métier, de l'agriculture ? Est-ce qu'il y aura encore demain de la famille ?
- Rémy PERRET
Aujourd'hui, j'ai un fils qui est là et qui aimerait continuer. En plus, il aime bien, il souhaite fabriquer. Il aime ça. C'est déjà le plus important, il faut aimer son métier. Notre métier, si on ne l'aime pas,
- Romain LE GAL
on ne peut pas le faire.
- Rémy PERRET
Voilà, exactement. Il y a beaucoup de passion. Exactement.
- Romain LE GAL
Là, tu es dans un parc naturel. Comment ça se passe ? cohabitation avec les randonneurs, avec les promeneurs, c'est quelque chose...
- Rémy PERRET
Oui, ça se passe assez bien. C'est vrai que ce soit avec les randonneurs qui viennent nous rendre visite, qui viennent voir, visiter ce que l'on fait, que ce soit avec le parc de la Vanoise, parce que bon, c'est quand même une contrainte aussi. On a certaines règles à respecter. toujours évidente, mais qui, si on arrive à avoir un dialogue entre tout le monde, ça se passe très très bien.
- Romain LE GAL
Demain, pour toi, c'est quoi les enjeux de l'agriculture, et notamment en Savoie ?
- Rémy PERRET
Les gros enjeux de l'agriculture de demain, déjà d'une, on en parle beaucoup, après, moi, pour le moment, il y a déjà le climat un petit peu, l'évolution du climat. Je ne sais pas si on doit débattre là-dessus, mais c'est vrai qu'on voit qu'on a des périodes aussi de sécheresse.
- Romain LE GAL
Tu le ressens vraiment l'évolution climatique ?
- Rémy PERRET
On arrive à le ressentir sur des périodes assez courtes, c'est-à-dire comme l'année dernière, on a eu une semaine au mois d'août où il y a eu des fortes chaleurs, et on a eu un alpage qui a ressenti une sécheresse. Ce qu'on ne voyait pas avant, parce qu'en principe, quand on a passé, c'est après le 15 août, quand on arrive au 15 août, en principe, on a des rosées le matin qui font que, bon ben voilà, ça réhydrate les prairies, la flore et on exploite correctement. Là, on a eu une période d'une semaine où ça a été un petit peu compliqué. Bon, après, est-ce que c'est lié, peut-être que dans les années précédentes, nos ancêtres l'ont connu, nous, on l'a vraiment vu de près. Demain, on va dire que là où on va être un peu impacté, je pense que ça va être, si ça continue à faire des périodes de sécheresse, ça va être le plus gros enjeu.
- Romain LE GAL
J'ai l'impression, en tout cas, je ne vis pas la montagne, mais dans les régions où je vis, d'avoir deux saisons, on a un été, un hiver, on a de moins en moins l'intermédiaire, finalement.
- Rémy PERRET
Je te rejoins là-dessus. C'est vrai que nous aussi, on a tendance à avoir plus un été et un hiver que les quatre saisons qu'on avait habituellement.
- Romain LE GAL
Quelque chose de très réglé. Et toi, qui es là depuis quelques années, tu as vu une évolution de la faune et de la flore, surtout de la flore, parce que c'est ça qui a un impact.
- Rémy PERRET
Au niveau de la flore, on a vu une évolution. On va dire qu'on a la forêt, mis à part vraiment sur les endroits qu'on exploite, mais on a la forêt qui a pris de l'altitude.
- Romain LE GAL
D'accord.
- Rémy PERRET
Et aujourd'hui, c'est vrai que quand on voit la forêt qui monte en altitude, ça veut dire qu'il y a automatiquement un réchauffement.
- Romain LE GAL
Merci beaucoup Rémi. J'aurais quand même une dernière question avant qu'on se sépare. Rémi, c'est quoi ta pizza préférée ?
- Rémy PERRET
Pas la bonne question. Je disais que c'est la pizza avec du saumon.
- Romain LE GAL
Je croyais que tu allais me dire Savoyard.
- Rémy PERRET
On mange énormément de fromage à côté. Moi, j'aime bien la pizza qui a un petit peu de poisson. Ça nous mange un petit peu de la vente.
- Romain LE GAL
C'est super, une pizza salmone. Voilà,
- Rémy PERRET
exactement.
- Romain LE GAL
Merci beaucoup de ton accueil, Rémi.
- Rémy PERRET
De rien.
- Romain LE GAL
Et puis, j'espère que cet épisode vous a plu. N'hésitez pas à le partager et à commenter. Et je vous dis à bientôt pour un nouvel épisode de l'Échange.