- Speaker #0
Et si on parlait plus ouvertement de la maladie ? Dans l'imaginaire commun, quand la santé va, tout va. Partout, on valorise un corps sain qui tient la route et dont on souhaite sans cesse repousser les limites. Dès lors, quelle est notre place quand on connaît ponctuellement ou plus durablement la présence de la maladie dans notre vie ? Je suis partie à la rencontre des personnes qui, tout comme moi, vivent en compagnie d'une maladie, car à mon sens, poser des mots sur un sujet encore tabou, ça fait du bien. Je vous propose aujourd'hui de faire la connaissance de Marie-Pauline, qui m'a éblouie par sa force et sa capacité à aller de l'avant. Marie-Pauline a fait une thrombose veineuse cérébrale. Il s'agit d'une forme rare d'AVC qui se caractérise par une veine bouchée au niveau du cerveau. Elle a développé par la suite des crises d'épilepsie, conséquence assez classique de la thrombose veineuse cérébrale, ainsi qu'un syndrome post-traumatique qui peut lui faire perdre ses mots, vous l'entendrez à un moment de l'épisode. Dans cet entretien, nous abordons l'importance du couple et de l'entourage, parce que si c'est Marie-Pauline qui parle, il y a une ribambelle de personnes qui sont évoquées, parmi lesquelles Thomas, son amoureux, mais également sa famille, ses amis et ses collègues qui ont joué un rôle clé tout au long de son parcours. Nous évoquons également les conséquences que peuvent avoir un traitement sur la vie quotidienne et les éventuelles limitations qu'impose la maladie. Marie-Pauline ne peut pas conduire pour le moment car elle est épileptique. C'est un sujet qui a un gros impact sur sa vie de tous les jours. Je vous laisse avec ce début d'épisode qui commence tout en douceur. Marie-Pauline évoque sa démarche pour témoigner dans l'anomalie qui n'avait rien d'évident pour elle.
- Speaker #1
On a parlé autour de toi ?
- Speaker #2
Plein de gens, en fait. Des copains, des proches, de la famille. Ça a été hyper bien. J'avais peur, ça a été hyper bien. Enfin, peur, non, j'appréhendais vis-à-vis de mes parents, parce que c'est des gens qui sont assez discrets. Non, qui ne sont pas discrets, mais sur des choses importantes comme ça, qui préfèrent les garder pour eux. Et en fait, j'ai halluciné de... Ah ouais, non, c'est génial ! Enfin, tu vois,
- Speaker #1
donc... Tu m'avais parlé, justement... On commence comme ça et puis après on reviendra sur quelque chose de plus cadré. Mais tu m'avais parlé que tu avais eu tout un cheminement au début où tu t'es dit que tu n'étais pas légitime. Ouais, c'est ça. C'est vachement interrogé. Puis ensuite, on a parlé à une amie à toi, il me semble. Et petit à petit, tu t'es dit c'est OK. Est-ce que tu peux réexpliquer un petit peu ?
- Speaker #2
En fait, c'est grâce à Nassim que j'ai rencontré dans le cadre du boulot et qui est quelqu'un de bien, qui m'a parlé du podcast. Quand on s'est trouvé dans le bus un jour et qu'il m'a dit tiens, mais pourquoi tu prends le bus ? Je lui ai dit je prends le bus parce qu'en ce moment, je ne peux pas conduire. Donc, je lui explique pourquoi. Et il me parle du podcast et il me dit ouais, ça pourrait être hyper intéressant que tu participes. Et sur le coup, je lui dis non, en fait, parce qu'effectivement, je ne me sentais pas légitime du tout. Et comme d'habitude, je prends une décision comme ça à la hâte. Et après, je me pose et je me dis en fait, si, ça pourrait être plutôt pas mal. Et j'en parle à une amie, effectivement, à Coralie. lors d'un trajet sur un week-end entre copains. Et elle me dit, si mais carrément, ça serait une super opportunité d'en parler, que les gens comprennent ce que ça implique et tout. Et je me suis dit, tiens, en fait, ils ont raison. Et c'est pour ça que du coup, j'ai pris contact avec toi.
- Speaker #1
Et est-ce que tu peux préciser sur quel sujet tu ne te sentais pas légitime ? Parce que ça revient beaucoup au cours des échanges que j'ai, principalement avec des femmes, donc je pense qu'il y a un sujet. Mais d'avoir une maladie ou un handicap qui est présent et malgré tout de ne pas s'instillent légitimes pour prendre la parole.
- Speaker #2
Déjà parce que ça fait partie des maladies invisibles. Ça fait partie des maladies invisibles, donc tu te dis pourquoi est-ce qu'il faudrait le montrer ? Ça c'est la première chose. Pourquoi est-ce qu'il faudrait le montrer ? Ensuite de ça, je ne me sentais pas légitime parce que finalement ça va quand même plutôt bien. Moi j'ai pris le parti de dire en avant, let's go, on continue, la vie continue et c'est pas grave. Justement pour pas qu'on en parle tout le temps, pas qu'on me demande tout le temps comment ça va, et t'en es où, et ceci et cela. Donc c'est pour ça aussi que je me sentais pas légitime, et surtout parce que ça va en fait. C'est ça qui a été vraiment l'élément qui m'a fait me dire, sur le coup, je suis pas légitime en fait.
- Speaker #1
Oui, je suis d'accord avec toi. Je pense que si on me proposait à moi de raconter mon histoire, je serais ultra mal à l'aise et je ne me sentirais pas légitime. Mais c'est très délicat, effectivement, de prendre la parole quand tout va bien et de dire que c'est OK, se comparer aux autres aussi.
- Speaker #2
Oui, à titre d'exemple, en fait, quand ça m'est arrivé, je n'en ai pas parlé de prime abord publiquement parce que je n'avais pas pris conscience de ce qui m'était arrivé. Ce n'est pas que je n'avais pas pris conscience, j'avais pris conscience, mais je n'avais pas... J'ai perçu la gravité de ce qui m'était arrivé. Et le jour où j'ai fêté les un an, Jour pour jour, je me suis assise et je me suis dit waouh, il s'est passé ça, ça fait un an et là j'ai vraiment pris conscience, j'ai pris une claque et j'ai pris conscience de ce qui s'était passé et de tout le chemin qu'il y avait eu en un an. Donc d'abord j'ai pleuré, un bon coup, mais de soulagement aussi. Et ensuite de ça, j'ai dit bon ben tiens, si j'en parlais, je fais un post sur les réseaux sociaux qui est pas du tout, je suis pas du tout du genre à aborder. des éléments vraiment très persos, plutôt du genre à rigoler ou à montrer quand je pars en voyage. Et là, j'ai fait un long texte pour expliquer ce qui s'était passé. Et les gens de mon entourage, un peu moins proches pour le coup, à halluciner en fait. Ils se sont dit Ah mais on ne savait pas qu'il était arrivé ça, et ceci, et cela, et c'est quoi ? et qui se sont renseignés du coup. Je ne voulais pas mettre forcément la lumière sur moi, ce n'était pas ce qui m'intéressait, mais au moins déjà avoir une première étape pour en parler.
- Speaker #1
Et comment tu expliques ce switch ? C'est vraiment la date des un an ?
- Speaker #2
Oui.
- Speaker #1
C'est marrant.
- Speaker #2
C'est fou. C'est vraiment les un an où je me suis dit ok, ça fait un an Et là, waouh, c'est vraiment ça qui a percuté.
- Speaker #1
Et dans quel mood tu étais juste avant ces un an ? sur la période entre ton AVC et la fin de cette première année ?
- Speaker #2
J'étais dans un mood plutôt positif. Au début même, j'étais dans le déni. J'étais dans le déni à vouloir continuer d'avoir les activités que j'ai, à vouloir faire la fête comme si de rien n'était, à vouloir continuer d'avoir un rythme assez intense. Et en fait, mon corps m'a rappelé à l'ordre. Mais ouais, j'étais plutôt dans le déni au départ. Alors c'est marrant en plus parce que la date anniversaire d'un an, comme je te disais, j'ai pris une claque. Mais au final, ce qui s'est passé ce jour-là, c'est que le midi, j'étais en déjeuner avec ma bande de copines, enfin mes franchines quoi, pour l'anniversaire de l'une d'elles. Et le soir, je faisais la fête avec d'autres copines. On faisait un... Un revival d'un enterrement de vie de jeune fille qu'on avait fait quelques mois auparavant. Et je me suis dit, ok, bon, c'était il y a un an, mais d'un autre côté, tu prends une claque, mais t'es trop occupée, comme je l'avais dit sur le post que j'ai fait sur les réseaux, t'es trop occupée à en profiter. Et ça, ça a pris le dessus et ça, j'ai trouvé ça quand même hyper cool.
- Speaker #1
Ouais, c'est super joli, le moment où tu te rends compte que c'est une partie de ta vie, mais c'est pas du tout l'ensemble.
- Speaker #2
c'est pas ce qui me représente en fait, ça fait partie de moi mais c'est pas ce qui m'incarne en fait je suis d'accord,
- Speaker #1
juste pour expliciter un peu le déni, ça dépend de chaque personne, moi j'ai eu 7 ans de déni donc c'est long et il n'y a pas de règle, je pense qu'on l'accepte à un moment où on est prêt et puis même je ne suis pas certaine que le terme accepter soit le bon, on apprend à vivre avec... et à continuer à vivre, et c'est un moment qui est super touchant. Bon, du coup, c'était ma stratégie de commencer sur un sujet un peu deep. On revient quand même en arrière. Les auditeurs ne te connaissent pas, moi je te connais assez peu. On a fait une petite visio juste pour échanger, apprendre un petit peu à se connaître et voir si on s'entendait. Pour faire cet enregistrement, est-ce que tu peux te présenter de la façon dont tu le souhaites ?
- Speaker #2
Bien sûr, donc moi je m'appelle Marie-Pauline, j'ai 36 ans, je vis à Limoges. J'ai une vie bien remplie. J'ai un métier qui est passionnant. Ce n'est pas ce qui m'incarne non plus, quoi que. Mais j'ai un métier passionnant. Je travaille sur tout ce qui est relations publiques, relations entreprises, pour le numérique et pour l'innovation, notamment pour la French Tech en limousin. Je suis fan de mon territoire, du limousin. Je suis très attachée à ce territoire et j'en suis très fière. Je suis aussi en couple avec un mec extraordinaire qui s'appelle Thomas, qui est aussi accessoirement mon mari. Et on partage notre vie avec Diplo, notre chat. Et voilà, on adore les voyages, on adore sociabiliser avec les êtres humains et rencontrer plein de gens et découvrir plein de nouvelles choses.
- Speaker #1
Tu es très constante dans ta description puisque c'est les mêmes éléments. J'ai relu ce que j'avais noté ce matin et tu t'étais décrite comme Chauvin. Tu m'as parlé de sport en plus.
- Speaker #2
Oui, je suis fan de sport, mais devant ma télé en fait. J'ai pratiqué le basket en... Bon limougeau qui se respecte, j'ai pratiqué le basket pendant quelques années, pendant une dizaine d'années, mais je suis issue d'une famille de sportifs sur plein de sports et particulièrement des sports collectifs et ça c'est hyper important pour moi parce que ça m'a forgée à travailler en équipe, c'est hyper important et avoir des valeurs sur plein de sports différents dans la famille. Donc c'est ça qui est aussi important. Je suis très très attachée aussi à ma famille proche et à mes amis qui deviennent la famille.
- Speaker #1
Oui, c'est totalement ce que tu m'avais dit. Tu m'avais parlé de ton chèque, tu m'avais présenté de Thomas, de tes amis, tout ça. Donc, trop intéressant. Pour poser un petit peu les bases quand même de la discussion et que pour les auditeurs et auditrices comprennent bien, est-ce que tu peux nous préciser quel a été ton parcours au cours des dernières années, notamment en termes de santé ?
- Speaker #2
En termes de santé, il y a bientôt deux ans, j'ai fait ce qu'on appelle une thrombose véneuse cérébrale, qui est une forme d'AVC. Je n'étais pas prédisposée à ça, j'ai eu mal à la tête. Alors, ce qu'il faut savoir, c'est que quelques années auparavant, j'avais fait de l'hypertension intracrânienne. Pareil, j'avais mal à la tête, je ne voyais pas très très bien. J'avais été suivie du coup avec un traitement et que j'avais arrêté progressivement. Donc c'était un peu derrière moi. Oui, j'avais 27 ans quand ça m'est arrivé, tu vois, donc c'était il y a quelques années quand même. Et là, donc il y a deux ans, j'ai mal à la tête. vraiment très fort et vu que j'avais fait de l'hypertension intracrânienne, j'étais quand même assez vigilante là-dessus. Malheureusement, mon médecin traitant était décédé, donc je me suis dirigée vers SOS Médecins. J'ai vu deux fois SOS Médecins, les deux fois donc ils m'ont dit que c'était une sinusite et ils m'ont prescrit du Dolibran, détail qui a son importance, alors que moi ce que je voulais c'était seulement une ordonnance pour aller passer un IRM, parce que je ne voulais pas... Aller aux urgences, encombrer les urgences dans un contexte Covid, qui plus est, ce n'est pas dans mon tempérament de dire pour un oui ou pour un non, je vais aux urgences. L'encombrement, vu le contexte qui plus est, ça ne m'intéressait pas. Finalement, j'ai la fille de mon médecin traitant qui reprend à la patientelle. et que je vais consulter, et je ne la remercierai jamais assez, qui me prescrit effectivement cette ordonnance pour aller passer cet IRM. Et je le passe à la clinique à Limoges, et là, à la clinique, ils me disent, bon là, vous montez dans cette ambulance, et puis vous allez tout de suite à l'hôpital, parce que vous faites une thrombose vanocérébrale. Donc c'est un caillot dans le sang, dans le cerveau. Alors justement, si j'ai du mal à trouver mes mots là-dessus, c'est parce que j'ai fait aussi un peu un reset et qu'il y a des mots que j'ai du mal, qui peuvent être bénins, comme AVC, comme thrombose, où je ne les trouve plus. Et tu vois, je ne pourrais même plus te donner la définition d'une thrombose vénose cérébrale parce que j'ai fait un reset complet. Je pense que le cerveau a fait ses choix. Bref, vous irez chercher la définition d'une thrombose vénose cérébrale par vous-même. Donc effectivement, on me dit qu'il y a une ambulance qui est prête. Moi, je veux rentrer chez moi d'abord pour récupérer un legging et des bouquins. Donc je prends ma voiture, ce qui était totalement irresponsable, mais il fallait que je le fasse. Alors pour l'anecdote, je ne sais pas si je te l'avais dit quand on avait échangé, mon papa a fait un AVC il y a quelques années et il avait voulu conduire pour aller aux urgences. Et je l'avais engueulé très fort. En fait, j'ai fait la même chose.
- Speaker #1
Je pense que c'est des moments où on est en pilote automatique et il n'y a rien de rationnel.
- Speaker #2
Exactement. Certains diront que je suis la fille de mon père. Et donc, toujours est-il que je rentre chez moi pour récupérer ce fameux legging et ces bouquins. Et je me retrouve hospitalisée. On m'hospitalise aux soins intensifs. Je ne prends pas conscience de la gravité de ce qui se passe. Et j'y reste qu'un jour au total. Je ne remercierai jamais aussi l'équipe, le personnel soignant à ce moment-là. Ils ont été formidables. Ils ont été hyper bienveillants. Comme il me le disait, on n'a pas l'habitude de voir quelqu'un de votre âge. Donc on va bien s'occuper de vous. Je ne dis pas qu'ils s'occupent mal des autres personnes, mais pour eux, ce n'était pas la normalité. Et du coup, après, je suis sortie avec un traitement anticoagulant. Et juste pour l'anecdote... Un interne, je lui ai demandé au moment de sortir combien de temps j'allais être en arrêt de travail. Et il me dit, ce sera à peu près six mois. Et là, je me suis mise à pleurer. J'ai dit non, non, non, c'est pas possible. Tant donné que mon emploi fait partie de mon équilibre et que c'était trop important que je puisse retrouver tout de suite une vie normale, entre guillemets. C'était inenvisageable pour moi que je puisse être arrêtée. J'ai passé les journées dans mon canap'à attendre que ça passe. Du coup, je suis rentrée chez moi et je ne me suis pas... Arrêter de travailler, par contre, j'ai un directeur, Raphaël, qui est quelqu'un de formidable, qui m'a dit Ok, ma grande, tu vas faire un mois en télétravail, histoire que tu reprennes ton rythme. Si tu es fatiguée, tu te poses, tu fais une sieste, tu y vas vraiment à ton rythme, et tu reviendras au fur et à mesure en présentiel. Et voilà, ça s'est passé comme ça, pour un retour à la vie active.
- Speaker #1
Et comment ça s'est passé cette période durant laquelle tu as repris le travail ? Est-ce que tu avais des séquelles ou des difficultés justement à retrouver toutes tes capacités ? Peut-être de concentration ?
- Speaker #2
Non, j'avais donc un traitement anticoagulant. Le traitement anticoagulant, lui, par contre, a été vraiment très très invasif. Avec, il fluidifie, comme son nom l'indique, ça fluidifie le sang. Donc sur des périodes menstruelles, c'était très très compliqué à gérer. Très fatigant, vraiment très complexe. Pareil sur des situations où tu bois un verre avec des amis, comme ça fluidifie le sang, tu te retrouves dans des situations où tu te dis Attends, j'ai bu deux verres, j'ai l'impression d'en avoir bu douze. Enfin, j'exagère un peu, mais tu vois l'idée. Et je me suis retrouvée dans des situations vraiment un peu difficiles par rapport à ça. Fatiguée un petit peu plus, mais... mais sans plus. Donc ouais, c'est surtout sur l'aspect anticoagulant traitement qui était pour le coup assez invasif que j'ai vu du changement. Et puis oui, après ça a été un retour à la normale si je dirais, assez progressif quoi, mais ouais plutôt le traitement qui a été complexe.
- Speaker #1
C'est vraiment une chance d'avoir une personne, enfin ton directeur du coup, qui a été si conciliant à l'écoute et qui a fait en sorte de respecter ton équilibre. tout en donnant la possibilité justement de retravailler ?
- Speaker #2
Alors dans un contexte professionnel, effectivement oui, c'est quelqu'un qui humainement est très très bien. J'ai aussi surtout la chance d'avoir eu Thomas, qui a été d'un soutien, et qu'il est toujours en fait, d'un soutien assez important, justement et d'une pour que les choses reprennent leur cours, que j'y aille à mon rythme, il est là-dessus. et sur plein d'autres choses, mais particulièrement là-dessus, il a été assez incroyable, parce que la part du conjoint, elle est quand même assez difficile à gérer, je pense.
- Speaker #1
Oui, justement, c'est une des choses qui m'a marquée lors de notre discussion, c'est que tu parlais, bien sûr, énormément de lui, mais que vous aviez l'air de former un binôme de chocs. Tu m'as notamment dit, là je prends un peu d'avance sur la suite de la discussion, mais qu'il savait faire le distinguo entre deux potentielles crises d'épilepsie et ton stress post-traumatique, et qu'il t'aidait vachement. en plus dans ta vie quotidienne. C'est parfois assez délicat de partager avec quelqu'un le fait qu'on a une santé défaillante. Comment est-ce que vous avez réussi un petit peu à surmonter ça ?
- Speaker #2
Ce qu'il faut savoir déjà, et là où moi je suis assez admirative, c'est que quand j'étais hospitalisée, les gens n'osaient pas trop prendre contact avec moi. Enfin, certains, oui, mais les gens, du coup, l'appelaient lui, en fait. Sauf que ce qu'il faut savoir, c'est que comme c'était période de Covid, j'avais le droit à une visite par jour d'une personne pendant une heure maximum. Donc bon, déjà, il fallait faire un choix entre mes parents, mon frère. Oui, j'ai un petit frère d'ailleurs, j'en ai pas encore parlé, qui est aussi au top, Pierre. Mais il fallait faire un choix entre mes parents, mon frère, Thomas. Donc du coup, c'est Thomas qui prioritairement venait me rendre visite. Ensuite de ça, ce qui se passait, c'est qu'il faisait sa journée de travail, il venait à l'hôpital, qui est à l'opposé du site où il bosse, et le soir, il fallait qu'il fasse compte rendu à l'ensemble des proches, et qu'il gère aussi tout le reste. Donc ça, ça a été assez compliqué, mais après, oui, au quotidien, il m'a aidé à faire en sorte que... La vie soit normale, que les choses reprennent leur cours, que je revienne à un rythme classique. Mais pour autant, lui, à percevoir, par exemple, tiens, là, tu t'es fatiguée, donc là, viens, on s'en va, on rentre à la maison. Ou fais attention, là, tu vas être en difficulté. Donc, à être vraiment très, très à l'écoute. Et ça, je suis ensuite très, très reconnaissante.
- Speaker #1
Oui, effectivement, c'est un peu... essentielles quand on a des maladies notamment qui sont rien que le stress ou la fatigue et parfois on a la tête dans le guidon et on se rend pas compte que ça va pas et d'avoir quelqu'un qui est à côté et qui nous dit lève le pied un petit peu ça va aller c'est essentiel Et actuellement, ta vie quotidienne, elle ressemble à quoi ? Est-ce que tu es impactée par son avis ?
- Speaker #2
Alors, oui, parce que, comme je te l'ai dit, j'ai pris un traitement anticoagulant qui a été très invasif pendant un an, à peu près. Et ensuite de ça, je l'ai arrêté progressivement. J'étais quand même assez contente de ça, parce que pour moi, ça voulait dire que j'étais guérie. Et échec ! Échec en quelque sorte parce que quelques temps après, j'ai fait une crise d'épilepsie. J'en ai fait plusieurs, mais qui n'étaient pas des grosses crises comme on peut en connaître traditionnellement. Mais jusqu'à en faire une grosse où je suis tombée de ma chaise au sens propre du terme. Et là, je me suis retrouvée avec un traitement anti-épileptique. Ce qui s'est passé, c'est que j'avais déjà fait des crises avant. Mais qui n'était pas, comme je te dis, des crises traditionnelles, avec des tremblements et tout. J'en avais parlé au neurologue qui me suivait à l'époque. Il m'avait dit qu'il y avait de grandes chances que ce soit du syndrome post-traumatique. Donc moi je l'ai écouté, et puis vu que ça m'arrangeait bien d'avoir du syndrome post-traumatique plutôt que de la crise d'épilepsie, on va pas se mentir. Et donc j'ai fait cette crise d'épilepsie, et je me suis retrouvée avec un nouveau traitement, cette fois-ci anti-épileptique. On m'a expliqué que c'était une conséquence assez classique de l'AVC, de faire de l'épilepsie. Sur le coup, je me suis dit, merde, pourquoi moi ? La poisse. Et au final, j'ai eu ce traitement-là. J'ai eu un premier traitement pareil qui a été assez complexe à gérer. Mais le gros sujet de l'épilepsie, c'est l'interdiction de conduire. J'adore Limoges. Il y a les transports en commun. Mais on n'est pas dans une grande ville, donc c'est un petit peu plus difficile de pouvoir circuler. Quand on n'est pas véhiculé, ça peut être un petit peu plus complexe. Donc c'est pour ça que, ouais, là aujourd'hui, ce qui m'impacte le plus, c'est l'incapacité de pouvoir conduire. Particulièrement dans mon métier où je suis amenée à me déplacer. Pour l'instant, je ne peux pas, donc c'est un peu frustrant parfois. Évidemment, on peut prendre le train. Certains limougeaux qui m'écouteront comprendront les difficultés qu'il peut y avoir avec le train. Je n'irai pas plus loin afin de ne pas créer de débat houleux. Mais ça a ce côté un peu frustrant parce que des fois, je suis sur des distances où je ne peux pas prendre le train et des distances qui sont trop courtes, mais pour autant, je suis obligée de prendre la voiture. Ça, c'est vraiment la chose qui m'impacte le plus et c'est une organisation à avoir qui... qui est un petit peu plus importante.
- Speaker #1
J'avais entendu dire qu'au bout d'un certain temps, d'un laps de temps sans crise, tu pouvais recommencer à conduire un an. Et ton traitement anti-épileptique est censé faire cesser les crises ou réduire la fréquence ?
- Speaker #2
Là, pour l'instant, ça a fait cesser les crises. Ce qui m'arrive maintenant, en ce moment, c'est soit du syndrome post-traumatique, effectivement, ou j'ai ce qu'on appelle des absences. Des absences où je trouve... pas mes mots. Enfin, comme je te dis, je pioche sur le mot épilepsie, par exemple. Je me suis retrouvée une fois avec ma maman en voiture, justement, qui me véhiculait pour aller à un endroit. Je lui dis Maman, mais tu sais, là, ce que j'ai fait, ce qui me fait trembler, alors que c'est un mot que j'ai pu répéter des dizaines de fois par jour, mais je ne le trouvais pas, quoi. Ou des absences où je me retrouve à ne plus pouvoir articuler, ne plus pouvoir parler. Ça, c'est un petit peu plus compliqué, particulièrement quand c'est dans un contexte pro. Mais ça, ça s'est vraiment calmé avec le traitement que je prends aujourd'hui. Par contre, ce qui m'arrive de temps en temps, c'est ce qu'on appelle du déjà vu. Une situation où tu te dis, je l'ai déjà vécu, je l'ai rêvé, qu'est-ce qui se passe ? Et ça, c'est trop bizarre. J'ai vu ma neurologue en début de semaine, il y a quelques jours, et je lui explique, j'ai l'impression d'avoir rêvé une situation. Tu sais, tu dis ça, t'as l'impression d'être un peu honteuse, quoi. Elle me dit, mais elle va dire que je suis folle, enfin, qu'est-ce que c'est que ça ? Et puis là, c'est elle qui met le mot dessus, qui dit, ah oui, c'est du déjà vu. Ah, ok, bon, déjà, elle sait... En plus, elle arrive à mettre un mot là-dessus. Et du coup, je suis allée... Enfin, elle rebondit pas dessus. Donc je me dis, bon, si elle rebondit pas dessus, c'est que ça doit pas être important. Et donc j'ai fait ce qu'il me faut. évidemment pas faire, c'est aller sur Google et taper déjà vu neurologie. Bon, j'ai été rassurée en quelque sorte parce que j'ai lu que c'était surtout quelque chose qui impactait les personnes qui avaient fait de l'épilepsie. Donc je me suis dit, ok, c'est classique. Je ne dirais pas que c'est normal, mais c'est classique. Donc, ça m'a rassurée aussi sur la gravité, entre guillemets, du truc. J'ai trouvé ça rassurant, oui.
- Speaker #1
C'est marrant, j'ai déjà fait du déjà-vu, ça m'arrive assez souvent.
- Speaker #2
C'est assez perturbant.
- Speaker #1
C'est bizarre comme sensation, mais ça ne me semble pas invalidant. Ça l'est pour toi ?
- Speaker #2
Non, ça n'est pas invalidant, c'est perturbant. Sur quelques secondes, tu te retrouves... Un peu perdu, mais non, c'est pas invalidant. Ça, c'est une certitude.
- Speaker #1
Je suis pas sûre de bien maîtriser ce qu'est le syndrome post-traumatique. Est-ce que c'est quelque chose en lien avec la psyché, ou est-ce que c'est quelque chose de neurologique ? Donc, toi, pour toi, ça se matérialise sur le fait que tu perds tes mots, et que tu as ces moments de bug, en fait. Ouais,
- Speaker #2
c'est ça. J'en ai aucune idée, parce que j'ai pas voulu... Oui, non, j'ai pas voulu. On va mettre les mots là-dessus. J'ai pas voulu aller chercher plus loin. J'en ai discuté avec une copine il n'y a pas longtemps, qui me disait qu'elle avait fait du syndrome post-traumatique suite au décès de sa maman, et qu'elle avait été suivie pour ça. Elle m'a dit quand tu veux, je te donne les coordonnées de la personne, et quand tu veux, tu vas voir cette personne. Il faut juste que je passe le pas, je pense. Ou pas, on verra. Pour l'instant, je n'ai pas voulu m'en préoccuper, parce que pareil, question de légitimité. Tu sais, tu te dis toujours, le syndrome post-traumatique, au début j'étais là, mais mince, j'ai pas vécu d'attentats, j'ai pas vécu de situations... C'est pas grave quoi, donc je comprenais pas pourquoi je faisais du syndrome post-traumatique. Mais après, je me disais, c'est surtout ça, j'ai pas vécu d'attentats, de braquages, d'accidents, de la route... Et donc non. Je ne suis pas légitime à traiter ça. Et après, j'y ai re-réfléchi, j'en ai parlé avec Thomas, qui me dit, non mais attends, tu es allé à l'hôpital pendant une période quand même assez longue, et surtout, tu n'as pas percuté ce qui t'était arrivé. Tu étais dans le déni. Donc effectivement, à un moment donné, tu prends une claque, et c'est là où tu fais du syndrome post-traumatique, et il faut que tu arrives à le gérer. Faudra peut-être que je passe le pas, mais oui, effectivement, pour répondre à ta question, c'est du bug, où tu ne trouves pas tes mots, tu es un peu perdue. Et sur des mots tout bêtes, moi ça m'est arrivé en réunion, où je n'arrivais même plus à dire le nom de la structure pour laquelle je travaillais. Donc c'était un petit peu compliqué. Mais j'étais avec des gens qui ont été très bienveillants. et qui m'ont absolument pas tenu rigueur.
- Speaker #1
On avait parlé justement lors de la Zizio et moi je pense que j'ai projeté la manière dont j'aurais réagi à ce moment-là, donc un stress énorme et l'envie de se cacher dans un trou de souris. Et tu m'as plutôt dit que tu réagissais très calmement et que tu arrivais à verbaliser en fait ce qui se passait.
- Speaker #2
Oui, du coup, ce qui se passe quand ça s'est passé, en fait ça s'est passé deux fois en réunion. La première fois, je pense que c'était vraiment une crise d'épilepsie. où je cherchais mes mots, où j'étais un peu désorientée. Et ça, c'était avant, justement, que je fasse une grosse crise d'épilepsie. Et la deuxième fois, je refais cette réunion avec les mêmes interlocuteurs, même situation, pas la même salle, mais vraiment même contexte. Et au moment où c'est à moi de prendre la parole, je pense que là, j'ai fait du syndrome post-traumatique parce que j'ai eu peur de revivre la même situation que... la fois d'avant, qui s'était passé quelque chose comme deux ou trois mois avant. Donc là, j'ai bugué, on va dire. Et là, du coup, j'ai pris le parti de... Autant la fois d'avant que cette fois-là, et entre les deux, que les interlocuteurs qui étaient à cette réunion, ceux que j'apprécie le plus, pas tous, ils se reconnaîtront, ceux que j'apprécie le plus. Mais voilà, j'ai pris le parti de... d'en parler, de leur dire si il se passe ça, c'est parce que ça et pour ça et pour ça. Pour que les gens comprennent ce qui se passait et que si jamais ça se reproduisait, qu'ils puissent réagir ou ne pas réagir ou ne pas s'inquiéter. En fait, de prime abord, si j'en ai parlé, c'est que j'avais peur qu'ils pensent que je me décomposais ou que... manque de professionnalisme, on va dire.
- Speaker #0
C'était vraiment ça de prime abord, alors qu'en fait, non. Et c'était un peu absurde de penser ça, mais c'est ça qui m'a travaillée. Et du coup, quand on parle avec les gens ensuite, ça roule en fait.
- Speaker #1
J'ai l'impression que tu as un rapport quand même très apaisé aux choses. En tout cas, ce n'est pas évident pour tout le monde d'en parler. Je vais mentionner un exemple. Il y a une personne que j'ai rencontrée parce que j'ai eu des cours sur ma maladie. Et on s'est revus pour parler et il a un traitement, le tecfidéra qui génère des bouffées de chaleur. Donc il doit prendre son traitement deux fois par jour et deux heures plus tard, il a des bouffées de chaleur et il vient tout rouler. Donc assez bizarre et lui, il ne veut absolument pas en parler au travail. Mais ce qui fait qu'en fait, il y a des moments où il est au bureau, il devient tout rouge et ses collègues ne comprennent pas. Ils lui disent mais que se passe-t-il ? Et donc il va se cacher aux toilettes le temps que ça passe. Ça arrivait plusieurs fois et a priori, il ne va pas en parler. Ce que je comprends tout à fait, il n'y a pas de sujet. Toi, je trouve que tu as du recul. Tu te dis, je ne veux pas qu'on croit que je ne suis pas professionnelle et tu expliques calmement aux gens. En plus, là, tu te dis, soit ils réagissent, soit ils ne réagissent pas, donc tu n'as pas d'attente.
- Speaker #0
Alors, tu as employé le mot apaiser. Je suis quelqu'un dans la vie de tous les jours qui n'est pas du tout apaisée. Je suis quelqu'un de très stressée, de très anxieuse, enfin, totalement l'inverse. C'est pas tant une question d'être apaisée, mais c'est plutôt une question d'être franche. Enfin, c'est pas de la franchise, c'est de l'honnêteté. Pour moi, c'est de l'honnêteté, en fait. C'est une forme d'honnêteté de parler de tout ça aux gens, pour que les gens sachent comment appréhender. Mes collègues, par exemple, j'ai une super équipe qui me dit Ok, mon bain... Les fois d'après, on fait une réunion, on la fait ensemble, comme ça si jamais ça ne va pas, tu nous fais un signe, tu nous tires la manche, comme ça on prend le relais pour ne pas te mettre en difficulté. Du coup, les gens sont aussi prévenants. Non, je ne suis pas du tout apaisée, je suis très stressée, très anxieuse, mais j'ai pris le parti, c'est plutôt une forme d'honnêteté.
- Speaker #1
Je trouve que c'est très important de prendre la parole, de verbaliser. Tout le monde n'y arrive pas et il n'y a pas de sujet à propos de ça. Est-ce que toi, tu as eu des étapes dans le fait de pouvoir en parler autour de toi ? Est-ce que ta famille, ça a été un sujet à un moment ? Et puis maintenant, tu arrives à en parler, est-ce qu'il y a des personnes à qui tu ne parles pas ?
- Speaker #0
Non, j'en parle assez librement en fait. Alors, je vais donner un exemple très bête, assez drôle si je puis dire. Quand je me retrouve dans des situations particulièrement, spécialement professionnelles, et que je dis, ouais, ben non, je ne peux pas, désolé, je ne peux pas. Je ne peux pas venir à tel événement, par exemple, parce que je ne peux pas conduire. Et les gens, tu sais, ils sont là. Ah, ils ne peuvent pas conduire. Enfin, pourquoi ? Alors qu'elles conduisent d'habitude. Enfin, tu sais, il y a toujours le... Mais la première réaction des gens, c'est de se dire, elle s'est faite contrôler par la police. Enfin, elle avait bu un verre de trop. Du coup, elle a une suspension de permis. Et en fait, j'anticipe là-dessus. Et je dis, non, non, mais enfin, voilà, il n'y a pas... C'est pour des raisons de santé parce que j'ai fait de l'épilepsie. Et généralement, ils font, ah, d'accord, OK. Et ça, c'est assez drôle. Donc oui, je te disais, effectivement, j'ai pris le parti d'en parler. Et avec ma famille, on en parle, même s'il y a pas mal de pudeur du côté de ma famille. Mais quelque chose par contre que j'ai appris, et ça c'est ma maman qui m'a toujours inculqué ça, c'est ce qui t'arrive dans la vie, il ne faut pas que tu prennes ça comme des échecs ou comme des difficultés, ça s'appelle l'expérience. Et tu te nourris de ça pour avancer. Et ça c'est quelque chose que j'ai vraiment toujours retenu, que je distille ça et là aux gens autour de moi, et que j'essaye de m'appliquer aussi. Ne pense pas que c'est un échec, ne te mets pas... ça sur les épaules en disant j'ai pas réussi, il m'est arrivé ça à t'en plaindre ne te plains pas de ce qui t'arrive mais considère que c'est de l'expérience et que c'est quelque chose qui va te faire avancer ça c'est hyper important et du coup on en parle ensemble mais il y a quand même une forme de pudeur mais c'est surtout on en parle ensemble dans le sens où va de l'avant et du coup tu dirais que est-ce que ça a eu un impact ?
- Speaker #1
Tout ce qui s'est passé, je présume que oui, quand même sur la manière dont tu te positionnes. Je donne un exemple. Mon père a vécu les mêmes choses que toi avec 20 ans, 20, 50 plus que toi. Donc il a fait un AVC et puis 2-3 ans plus tard, il a fait une crise d'épilepsie assez violente pour le coup. Et en fait, il s'est rendu compte... qu'il avait une fin potentielle, qu'il était potentiellement défaillant. Et pour l'instant, je crois qu'il n'est pas du tout au clair avec ça et que c'est extrêmement dur. Toi, est-ce que ça te nourrit justement ? Tu as beaucoup mentionné au début et au cours de notre visio le fait de vouloir aller de l'avant, de rester positive et de prendre ce qui allait. C'était le cas avant ou ça a exacerbé les choses ?
- Speaker #0
Ça a toujours été comme ça. Tout ce qui m'est arrivé dans ma vie, de positif ou de négatif, ça te nourrit pour aller de l'avant. Et ouais, c'est une fierté de considérer, d'avoir cette force, je trouve. C'est peut-être un peu prétentieux de ma part de parler de force, mais à un moment donné, on ne veut pas dire les mots. Et de me dire, c'est quelque chose qui me permet d'aller de l'avant. Et tout ce qui t'arrive, et ça, merci maman, c'est de l'expérience. Et fais-en une force et va de l'avant. Ne regarde pas en arrière. Si, regarde en arrière sur ce qui s'est passé, un petit peu, mais va de l'avant.
- Speaker #1
Il y a un sujet qu'on a juste touché du doigt au début, c'était les rapports au monde médical. Tu as parlé de ces deux médecins qui n'avaient pas du tout saisi ce qui se passait, et un petit peu de ta neurologue. Est-ce que tu as toujours eu le sentiment d'être entendue dans ce qui t'est arrivé ? Ou au contraire, tu as eu des moments un peu d'errance où tu t'es inquiétée et tu as dû chercher des informations en plus ?
- Speaker #0
Donc effectivement, au tout début... Au tout début du processus, on va dire, je n'ai absolument pas été écoutée par le corps médical. Pour l'anecdote, l'un des médecins, donc de chez SS Médecins, avec lequel j'ai pu échanger, quand je lui disais que j'avais mal à la tête, que c'était très très douloureux et que je voulais un IRM, m'a simplement fait une leçon de morale sur le fait que j'étais fumeuse. Il m'a fait une leçon de morale en disant qu'il fallait que j'arrête le tabac. J'étais là, moi je veux passer un IRM. Arrête de me parler de la clope, je sais que c'est pas bien. Laisse-moi tranquille avec ça. Laisse-moi, enfin, fous-moi la paix, fais-moi passer un IRM. Donc avec un discours hyper moralisateur, ce qui a été assez compliqué. Ensuite de ça, j'ai mon médecin, celle qui est restée mon médecin traitant, le docteur Clément, qui elle a été... très à l'écoute et qui est vraiment quelqu'un de bien pour qui j'ai énormément de respect et de gratitude. Ensuite de ça, je fais ça un peu dans l'ordre chronologique, mais c'est qu'il y a des étapes. Comme je le disais tout à l'heure, j'ai été hospitalisée. Là, c'est l'ensemble du personnel soignant qui a été incroyable à l'écoute, très bienveillant. Ils m'ont beaucoup aidée à ce que les choses se passent. Bien, façon de parler, mais du mieux possible. Pour donner un exemple, quand je suis sortie des centres intensifs et que j'étais hospitalisée au service neurologique, ils ont fait le nécessaire, ils n'ont pas pu y arriver, mais pour que je sois seule en chambre. Parce qu'ils voulaient que je sois seule en chambre et pas avec d'autres patients qui, comme on le disait tout à l'heure, sont un peu plus âgés et ont des pathologies et pour lesquelles le quotidien est très différent du mien. Du coup, ils n'ont pas pu y arriver, mais je sais qu'ils ont fait le nécessaire pour que ça se passe. Donc c'est pour ça que je suis assez reconnaissante. Je me suis retrouvée dans une situation avec un professeur, qui pour le coup a toute l'approche du professeur, le cliché qu'on peut connaître avec 12 internes derrière, à ne pas considérer que je suis un être humain. Enfin, bref, compliqué. Après, il y a eu un autre médecin, un jeune interne, qui a été pareil, très moralisateur. Et il ne m'a pas fait comprendre, ce n'est pas le mot exact. Mais il m'a dit des mots que j'interprétais comme tout ce qui m'arrive, c'est de ma faute. La façon dont il disait, je l'ai perçu comme ça, parce que la contraception... parce que ce qu'il faut savoir c'est que le contraceptif, donc la pilule que je prenais a priori est l'une des principales causes de la thrombose vénocérémale plus le tabac et ouais du coup je l'ai interprété c'est de votre faute et ça j'ai trouvé ça terrible et je me réentends je me revois en train de pleurer à appeler Thomas, à appeler ma mère, mes parents en disant il a dit que c'était de ma faute
- Speaker #1
Une belle empathie.
- Speaker #0
Total.
- Speaker #1
Surtout que ta contraception, a priori, elle est prescrite par un médecin, donc tu n'es pas responsable.
- Speaker #0
Non. C'est ça, voilà. Mais donc oui, du coup, il y a eu différentes étapes, différentes personnes. Là, la neurologue qui me suit aujourd'hui est très à l'écoute et pareil, quelqu'un pour lequel j'ai beaucoup d'estime.
- Speaker #1
Alors, moi, on ne m'avait pas dit que j'étais responsable, mais je me rappelle de ce moment où, à l'hôpital, en fait, le médecin faisait sa tournée. Donc, il est dispo qu'à certaines heures et moi, c'était pour m'annoncer que j'avais une sclérose en plaques quand même. J'avais 20 ans et j'étais seule et mes parents n'étaient pas là. Et il me l'a annoncé en regardant ses pieds dans ma chambre, j'étais seule. Il est parti, il restait 5 minutes et c'est super violent en fait. Pour l'instant, j'ai l'impression que c'est plus une chance d'avoir un médecin qui nous écoute et qui comprend et qui est empathique plutôt que l'inverse. Là, pareil, j'ai la chance d'avoir un neurologue qui est vraiment sympa. Et on rigole parce que là, je dois faire des examens ailleurs et l'équipe médicale n'est pas franchement sympa, je vais raconter. Et puis il me disait que lui, quand il mettait sa blouse, il laissait ses problèmes derrière et qu'il était là pour les patients. Et je me suis dit, mais c'est tellement rare et ça fait tellement plaisir à entendre. Mais oui,
- Speaker #0
c'est ça. C'est la neurologue, le docteur Labatt-Bragby qui me suit, préfère faire des rendez-vous, des petites étapes tous les trois mois pour... réajuster, voir comment ça va, est-ce qu'on réajuste le traitement. C'est elle qui a été très à l'écoute parce que le traitement antiépileptique que j'ai eu en sortie d'urgence était très, très, très invasif lui aussi. J'avais donc perte de sommeil, perte d'appétit, et j'en passe. Donc c'était assez compliqué quand même à gérer quand tu n'as pas faim et tu n'as pas sommeil.
- Speaker #1
On t'avait prévenu.
- Speaker #0
Que c'était des effets sur leur potentiel ? Non, pas du tout. On ne m'a absolument pas prévenu là-dessus. Donc ça a été quand même assez compliqué. Des crampes, des crampes au mollet, la nuit, terrible. Et donc du coup, j'étais sortée de la clinique et j'ai forcé pour prendre rendez-vous avec elle, pour lui en parler. Elle a été très à l'écoute, elle a dit on adapte, on change, on change progressivement et on se revoit dans trois mois et il vaut mieux faire des feintes. pour elle, des petites étapes comme ça, pour voir comment ça va, plutôt que de se dire, bon, ben, rendez-vous dans un an, vous conduisez pas, enfin, vous changez au fur et à mesure, enfin, voilà, c'est une approche qui est quand même beaucoup plus intéressante, je trouve, selon moi, et qui aussi me dit, bon, ben, psychologiquement, allez, j'ai une prochaine étape qui va être à court terme, donc, enfin, c'est pas tiens bon, c'est ouais, si, il va se passer un truc, il va se passer un truc. qu'il soit positif ou négatif, mais au moins, il va y avoir quelque chose. C'est une échéance, en fait. Je trouve que c'est hyper important d'avoir des petites échéances. Ça, c'est aussi, dans mon tempérament, de me dire, de me mettre des petites échéances au quotidien. Allez, dans trois semaines, je me fais un petit voyage où il va y avoir tel événement ou tel truc. Et là, c'est pareil, en fait. C'est de me dire, il va y avoir des petites échéances qui te tiennent un peu en haleine et qui ne te font pas dire rendez-vous dans un an.
- Speaker #1
Je suis d'accord sur le système d'échéance. Moi, c'est un moment où je fais le point sur mon rapport à ce que j'ai, sur comment je me sens. Et moi, je trouve que c'est presque un soin d'aller voir mon neurologue en soi. A priori, il ne va pas m'apprendre des nouvelles choses parce qu'il y a des rendez-vous qui se font sans examens médicaux. Donc, on ne va pas découvrir une poussée ou quoi que ce soit. Et c'est des moments où je me ressens sur moi et je me dis comment est-ce que ça va ? Comment tu te sens par rapport à tout ça ? On prend le temps de parler. on rigole pas mal et c'est super important mais en tout cas je ressors souvent de là avec un peu le coeur rempli de me dire je continue à prendre soin de moi et c'est en tout cas je trouve en ce qui me concerne la bonne manière d'aborder les choses et ce qui me fait du bien moi
- Speaker #0
j'espérais qu'elle me dise que je puisse reconduire mais je me garde cet espoir là à chaque fois que je la vois mais justement ça me tient en haleine en me disant mais si allez ça va... faire, tu vas y arriver, enfin, tu vas arriver à...
- Speaker #1
Parce que là, avant chaque rendez-vous, donc tous les trois mois, tu dois passer une IRM de contrôle,
- Speaker #0
qu'est-ce qu'elle vérifie ? J'en ai passé une avant de partir en vacances cet été, où elle m'a dit que je n'avais plus de séquelles neurologiques, donc ça, c'était un gros soulagement, juste avant de partir dans le sud-est, rejoindre mes amis les plus proches, et ouais, du coup... Là, je n'ai pas passé d'examen. Je l'ai vu en début de semaine, il y a quelques jours, je n'ai pas passé d'examen. Mais à chaque fois, je me dis, bon, allez. Elle va me dire, c'est bon, vous pouvez conduire. Mais il n'y a que moi qui me berce de doux espoirs là-dessus. Mais je me dis que ça va le faire. Mais ça me tient en haleine. À chaque fois, je suis un peu déçue. Mais c'est quelque chose qui te maintient, qui te tient en haleine. Je fonctionne un peu comme ça.
- Speaker #1
A priori, dans six mois, tu peux reconduire s'il n'y a pas de crise.
- Speaker #0
C'est ça.
- Speaker #1
Oui, donc tu as quand même...
- Speaker #0
C'est long.
- Speaker #1
Oui, j'imagine. Et du coup, tu te reposes sur ton entourage pour te déplacer ?
- Speaker #0
Oui, j'ai la chance que Thomas travaille sur le même site. On travaillait tous les deux dans une technopole à Limoges. Donc on vit pas très très loin. Ce qui fait qu'on covoiturait déjà avant tout ça. On covoiturait déjà, sauf que c'est moi qui gardais la voiture pour faire des déplacements ensuite la journée. Là, c'est juste que les rôles sont inversés et que c'est lui qui garde la voiture. Donc on... On covoiture, plus pour longtemps parce qu'il va avoir des évolutions au niveau de sa vie professionnelle. Mais je vais voir, je vais prendre les transports en commun un petit peu plus. Je suis à 20 minutes porte à porte, donc c'est vrai que de prime abord, c'est pas la contrainte. Mais je te dis, c'était pas la contrainte, je le prends de temps en temps. Mais jusqu'à présent, il faisait jour, il faisait pas trop mauvais. C'était avec un temps plutôt ensoleillé. Là, c'est vrai que la pluie, le froid, la nuit, je pense que ce serait un petit peu plus contraignant. Oui,
- Speaker #1
et puis le fait d'avoir une contrainte ou des limites, de toute façon, c'est assez crispant en soi. De savoir qu'on ne peut pas faire quelque chose.
- Speaker #0
Ce n'est pas grave en soi de ne pas pouvoir conduire. Mais c'est juste, quand ce n'est pas un choix, c'est pénible. Oui,
- Speaker #1
et tu t'en rends compte d'autant plus. Et est-ce que tu as d'autres limites ? Je crois que tu m'avais dit que l'alcool.
- Speaker #0
C'était sur la période anticoagulant. Mais après... prends de l'âge, enfin je prends de l'âge, donc c'est plus pareil non plus. Non, au-delà de ça, pour en revenir à la conduite, donc la chance que j'ai aussi, c'est d'avoir des parents qui sont très disponibles, qui feraient n'importe quoi pour leurs enfants et qui du coup, enfin, que je peux solliciter assez régulièrement, je ne le fais même pas. pas assez par rapport à leur disponibilité enfin comment ils pourraient se rendre disponibles pour moi parce que j'ai pas non plus envie d'être, comment dire trop dépendante, mais ça c'est c'est le caractère mais voilà à qui je peux demander quand je veux comme je voudrais ils feraient n'importe quoi pour me soulager donc oui ça c'est C'est vraiment le seul point qui aujourd'hui est différencié, on va dire.
- Speaker #1
Moi, j'ai posé toutes mes questions puisque tu as répondu à tout avant même que je pose mes questions. Est-ce qu'il y a des sujets que tu veux aborder ?
- Speaker #0
L'entourage. Je trouve que l'entourage, comme je te le disais, j'ai eu la chance d'avoir un entourage très présent, particulièrement Thomas qui... qui est incroyable, qui a été et qui est incroyable, parce qu'il arrive à anticiper maintenant, à être là au quotidien, sans être trop intrusif, à me laisser aussi de la liberté en quelque sorte, mais un espace pour moi, ou à me laisser faire en fait. L'entourage, c'est quelque chose qui, pour moi, est assez important, parce que quand n'importe quoi arrive à quelqu'un, C'est vrai que tu ne vas pas penser forcément à l'entourage de prime abord. Sauf que l'entourage proche, moi je vois en l'occurrence Thomas, il a tout pris dans la tronche. Sa femme qui est hospitalisée, en plus contexte Covid comme je te le disais, et puis pas rien. Il s'est retrouvé, je ne veux pas parler pour lui, mais il s'est retrouvé dans une situation où il s'est dit mais est-ce qu'elle va survivre ? Enfin littéralement. Et ouais, il a tout pris dans la tronche. Et en plus, comme je le disais tout à l'heure aussi, à avoir les gens qui l'appellent lui, parce que les gens n'osent pas forcément m'appeler. Donc ouais, c'est assez impressionnant comme l'entourage doit être bien bâti, assez solide, comme on dit dans le sport, assez solide sur ses appuis. Et ouais, moi, je suis assez bluffée et je pense que c'est quelque chose dont il faut parler aussi. La place de l'entourage et le... L'entourage de l'entourage, comment on entoure cet entourage, comment on est là pour lui, pour pas qu'il soit défaillant. C'est pas être défaillant vis-à-vis de la personne qui a une pathologie à qui il arrive quelque chose, mais plutôt défaillant pour elle-même, que ce soit trop lourd, que ça fasse trop à portée. J'en discutais avec quelqu'un que je connais il y a quelque temps, qui a une pathologie invisible également. Et ça a été compliqué avec son conjoint, parce que lui n'arrivait pas à comprendre cette pathologie invisible. Je ne m'avancerai pas parce que je ne sais pas où ils en sont, mais je sais que ça a été assez difficile, justement, pour cause d'incompréhension aussi de l'entourage.
- Speaker #1
Oui, et justement, je pense qu'il y a un sujet, effectivement, de comprendre ce que l'autre ressent physiquement ou mentalement en lien avec la maladie ou le handicap. Et il y a un sujet... où l'entourage se fatigue aussi. C'est éprouvant d'accompagner quelqu'un, de le soutenir. Est-ce que Thomas t'a partagé lui ce qu'il a ressenti ? Parce que, tu l'as dit, il a géré les interactions avec les autres pour les tenir au courant. Il a dû avoir très très peur. Puis ensuite, peut-être, il a dû devoir, dans le déni, peut-être faire un peu le dos rond pour t'accompagner là-dessus sans te brusquer. Ça fait beaucoup ?
- Speaker #0
Oui, ça fait beaucoup. Il a... Il ne m'a pas dit au début parce que je pense qu'il n'a pas voulu me faire un peu plus peur. C'est que quelques mois après qu'il m'a expliqué qu'il avait eu peur que je meure, quoi. Puisqu'il n'a pas voulu me le dire tout de suite, justement pour ne pas m'effrayer, je pense. Et oui, comme tu l'as très bien résumé sur l'accompagnement dans le déni, justement, il a été là étape par étape à essayer d'infuser, justement pour que je prenne conscience. Mais pour autant... Être là au quotidien. Non, vraiment, l'entourage, je pense que c'est très important. Et au-delà de Thomas qui partage ma vie, j'ai des amis, des proches qui partagent ma vie également et qui ont été là aussi à leur façon. J'ai découvert des gens dont je n'étais pas particulièrement proche ou même des gens que je connaissais dans un contexte professionnel. qui m'ont fait halluciner, mais dans le bon sens du terme, tellement ils ont été là, tellement je pense à Fred, par exemple, qui voulait venir me voir à l'hôpital. Je lui dis non, non, c'est une priorité à Thomas. Mais qui me dit, bon, vas-y, on fait une visio et tout, justement pour me changer les idées, en fait, et plein d'autres. Je repense aussi dans un contexte professionnel à Baptiste, qui travaille avec moi, qui... Lui a profité d'une visite à l'hôpital, avait un rendez-vous médical, et qui en a profité pour faire un passage éclair du côté du service neurologie pour m'amener des chocolats au nom de toute l'équipe. Alors là, je me revois en plus dans cette situation où, comme je te le disais, une visite par jour pendant une heure maximum. Donc Baptiste étant venu à l'improviste, ce qui plus est, mon quota était foutu. Et avec du personnel soignant qui m'ont dit Non, mais on sera entre deux services. Donc le service du matin, le service du soir. On ne sait pas, on n'a rien vu. Et après, dans un contexte purement personnel, des proches qui ont été là, chacun à leur façon, et dont je suis très reconnaissante également parce que Parce qu'ils m'ont permis aussi de tenir moralement, de m'envoyer des conneries sur les réseaux, de me partager des vidéos. Je les revois, c'était l'inauguration d'un resto dont un de mes amis était devenu manager. Ils étaient tous là à cette soirée. Au début, j'étais dégoûtée de ne pas pouvoir être là, parce que c'est quelque chose que j'aurais vraiment voulu partager avec eux. Thomas était là, ils ont fait des vidéos, ils faisaient la fête, ils ont fait des vidéos, ils me les ont envoyées. Et après, je me suis dit, ok, non, bon, oui, t'es dégoûté parce que tu peux pas être là. Mais d'un autre côté, regarde, il t'envoie des vidéos, il pense à toi. Et ça, c'est cool, quoi. Ou à m'envoyer d'autres choses, du divertissement, comme ils savent si bien le faire. Et ouais, ça, je leur en suis très, très reconnaissante aussi. C'est hyper important.
- Speaker #1
Mais oui. C'était dans le premier épisode, j'avais interviewé un ami à moi qui s'appelle Thibaut, et il y avait une troisième personne dans la pièce qui s'appelle Laurent, et qui est un ami commun, et qui découvrait ce jour-là qu'on avait tous les deux une maladie, Thibaut une maladie génétique et moi une maladie neurologique, et on lui a proposé de nous poser une question. Il n'avait pas préparé sa question, et il disait, comment être là sans être intrusif ? Comment me montrer que je m'intéresse à vous, sans pour autant à chaque fois ramener le sujet de... Comment ça va ta santé ? Tout ça. Toi, qu'est-ce que tu conseillerais ?
- Speaker #0
C'est une vraie question. C'est assez difficile de pouvoir y répondre. Je pense que ça dépend du tempérament de chacun et comment chacun réagit à ça. Quel est le rapport que chacun peut avoir avec la maladie ? Comme je te le dis et comme tu l'as entendu, moi je n'ai pas de difficulté à en parler, même si c'est vrai que des fois ça revient beaucoup ou tu as envie de dire ça va. Tout roule, vraiment. Et c'est vrai en plus, au quotidien ça va quoi. Outre les deux trois bricoles dont j'ai pu parler, ça va. Mais t'as des gens qui vont être beaucoup dans le pathos, ou qui vont beaucoup s'apesantir sur leur sort. Des fois t'oses même pas leur demander comment ça va, parce que tu sais que ça va être difficile, ou que ça va mettre les gens dans une situation complexe. J'ai envie de dire que ça dépend du tempérament de chacun. Je n'ai pas vraiment de réponse à la question.
- Speaker #1
Ce qu'on avait répondu à l'époque, ce qui nous importait, c'était de savoir que l'autre était là et qu'on pouvait le solliciter s'il y avait besoin. Et ça suffisait, en fait.
- Speaker #0
Tu as entièrement raison. C'est juste, je sais que vous êtes là. Je sais que l'ami est là. Je sais que les affreux sont là et d'autres. Et ouais, je sais que je peux juste envoyer un message et que... Juste, pas forcément envoyer un message, mais parler. Enfin voilà, juste savoir qu'ils sont là, ça suffit.
- Speaker #1
Et ce que je trouve cool dans ce que tu racontes, les vidéos en soirée, c'est qu'en fait, c'est important de rester spontané aussi. C'est pas parce que toi, t'étais hospitalisée ou que tu pouvais pas venir à la soirée que ça t'a pas fait plaisir de voir ton parent.
- Speaker #0
Ouais, c'est ça. Je les revois faire des vidéos, pas dire Ouais, Popo, on pense à toi et tout. Non, non, faire des vidéos d'une soirée normale, en fait. Et ouais, juste, ne serait-ce que de me les envoyer, ça m'a fait plaisir de me dire Ok, je vis le truc aussi un peu avec eux et ne pas être dans le pathos, c'était aussi hyper important. Faut avancer, faut avancer. Show must go on, comme on dit.
- Speaker #1
Merci Marie-Pauline de t'être prêtée au jeu et de nous avoir partagé ton rapport au monde enthousiaste, dynamique et plein d'amour pour tes proches. Je croise les doigts pour que ta neurologue valide enfin ta capacité à conduire à nouveau. J'espère également que cet entretien vous aura apporté une dose de bonne humeur. Il m'a personnellement requinquée. Si cet épisode vous a plu, vous souhaitez réagir, écrivez-moi sur le compte Instagram de l'anomalie pour me partager vos retours, qu'ils soient positifs ou plus circonspects. Vous pouvez soutenir mon travail en vous abonnant à ce podcast sur votre plateforme d'écoute préférée. Si vous êtes d'humeur à déplacer des montagnes, n'hésitez pas à attribuer une note ou un commentaire au podcast, cela m'aidera beaucoup. L'anomalie est un podcast autoproduit par mes soins, entièrement conscient et imaginé entre Ménilmontant et le canal de Lourcq à Paris. Rendez-vous très bientôt pour le prochain épisode. D'ici là, prenez soin de vous.