- Speaker #0
Bienvenue dans les petites histoires de Michelle, un podcast dans lequel je raconte mon exploration de la cuisine japonaise. Cet art ultime de bien manger que j'ai à cœur de transmettre aujourd'hui est la synthèse entre mes pratiques d'artiste, de jardinière et de cuisinière. Il s'adresse aux amoureux du Japon, aux gourmets de tous bords et aux cuisiniers soucieux de préparer une cuisine saine, savoureuse et créative, qui nourrit aussi bien le corps que l'esprit. Vous y trouverez des récits de voyages et des témoignages d'expériences qui ont fait sens dans mon parcours. J'y délivre également, au-delà des recettes, les principes qui sous-tendent la cuisine japonaise. Nous ferons des visites dans le jardin, source d'émerveillement et d'abondance, et nous prêterons l'oreille à des personnes qui ont contribué à enrichir mon parcours dans l'oasis nippone que je me suis créée. Belle écoute à vous ! Durant la saison estivale, nous quitterons un temps l'univers de la cuisine japonaise. De la même manière que la série In Vino Veritas nous a accompagnés durant l'été 2024, une nouvelle série vous est proposée au long de l'été 2025. Cette fois-ci, elle sera centrée autour de la céramique. Je suis fascinée par les bols, ces contenants, archétypes de l'utile, ouverts sur d'infinies possibilités de formes, de matières, de courbures, de textures. boutique de l'escalier joue le rôle d'interface entre la main des céramistes qui ont façonné l'objet et les mains de ceux qui vont l'utiliser. Le céramiste Philippe Sutter, surtout connu pour ses vases Médicis, sur lesquels il est intarissable, s'est prêté au jeu pour des interviews autour du bol, revenant ainsi à ses origines dans la céramique. Bon, Philippe, j'ai lancé la machine. On va démarrer, on va s'échauffer. On va d'abord s'échauffer. Juste pendant l'échauffement, se rappeler de l'objet de l'entretien, c'est de parler du bol. Je veux du bol, que du bol dans ma boutique et c'est à ce titre là que j'aimerais qu'on voyage ensemble dans cet univers où tu m'as déjà tellement mis l'eau à la bouche et tellement dynamisé et j'étais après notre entretien téléphonique j'étais survoltée c'est l'effet du bol c'est normal c'est tout un péssard
- Speaker #1
Ça commence par une masse d'argile, c'est la phrase de Lao Tzeu. De l'argile, nous faisons un bol, mais c'est le vide à l'intérieur qui retient ce que nous voulons. C'est Danta ou The King, c'est absolument magnifique. Et puis ça commence effectivement par là. Donc, pardon. Le bol, c'est... L'origine.
- Speaker #0
Oui, c'est l'objet archétypal. Moi j'ai toujours envie de faire ce geste des mains jointes que tu positionnes sous le filet d'eau, que tu mets dans la rivière pour capter l'eau et boire.
- Speaker #1
Oui.
- Speaker #0
Oui. Alors, ce qui me fascine, c'est que, bon, moi, j'accueille 15 céramistes dans ma boutique, c'est peu de choses. Et parmi ces 15, quand je vois, à partir d'un objet aussi simple... la multitude des formes, des couleurs, du traitement. Enfin, je suis émerveillée. Pour moi, ce sont des sculptures et ce sont des objets d'art à part entière. J'ai un peu le regard qu'ont les Japonais sur les créations. L'objet usuel peut devenir une œuvre d'art et c'est comme ça que je les considère. Et dans la boutique, chez moi, tu peux les prendre en main, les toucher avant de les emporter. Donc, je suis. une interface entre l'artiste qui a façonné et la personne qui va emporter l'objet et vivre au quotidien avec lui donc il ya la présence du céramiste qui est toujours qui est toujours là
- Speaker #1
Oui, et c'est impératif de le toucher et de le prendre en main. Quand je fais ou quand je tourne des bols, j'ai cette argile qui me glisse entre les doigts. Et c'est mes doigts qui vont lui donner une forme par rapport à ce que j'ai envie de faire. Ou des formes un petit peu plus tulipes, un petit peu plus fraises, plus ouvertes, plus fermées parfois de temps à autre. Des lèvres un peu plus épaisses, un peu plus fines, parce que chacun va y trouver un petit peu sa mise en bouche aussi. Il y a certaines personnes qui préfèrent les pièces épaisses où on va retrouver des émaux un peu plus gras dessus. Ce que j'entends par émail gras, c'est ce que j'appelle... C'est très doux au toucher avec les lèvres. On a presque envie de croquer dans la tasse tellement on se dit « Tiens, ça pourrait être un chocolat, ça pourrait être quelque chose de... » On a envie de manger dedans et j'aime beaucoup les émaux gras. plutôt que ce qui est un petit peu sec. Et ça, je préfère toucher la terre en bas et avoir son côté nu, sans émail.
- Speaker #0
Oui, c'est vrai. Je comprends très bien ce que tu racontes là. Moi aussi, j'aime bien quand en bas, on perçoit la matière telle qu'elle est brute et en haut, tu as quand même ce rapport à tes lèvres qui est sensuel et où tu ne te frottes pas sur cette muqueuse ... qui est quand même très sensible, où tu ne frottes pas contre une argile rêche, peut-être même inhospitalière.
- Speaker #1
Alors qu'il existe des argiles chamotées que j'ai travaillées qui sont avec une... forte chamotte et je garde la forte chamotte en bas pour le contact avec la main et j'ai fait un polissage sur la lèvre, c'est-à-dire là où nous on positionne nos lèvres pour que ça soit hyper doux, malgré la chamotte. Donc on arrive après techniquement aussi à faire des choses très intéressantes et puis à varier un petit peu les plaisirs pour coller à quelque chose d'unique parce que chacun de nous, enfin, pour moi, n'importe qui qui vient m'acheter un bol c'est quelqu'un d'unique, donc Donc... il aura son bol à lui avec tous les critères. La forme, la couleur, l'aspect, le toucher. La matière. Et puis après, différentes argiles. Est-ce qu'il a envie de quelque chose de plus fin en porcelaine ? Est-ce qu'il a envie de toucher quelque chose d'un peu plus proche de chez nous comme une argile du Westerwald, qui n'est pas très loin d'ici, qui est à 150 km au niveau de la carrière ? Ou est-ce qu'on va aller faire des argiles comme j'en ai fait ? des noirs en rajoutant de l'oxyde de fer pour donner une puissance à la matière après on peut faire plein plein plein de choses les argiles rouges aussi qui sont qui sont assez sympathique la journée à acheter qui sont très agréables à tourner mais après fallait voir aussi un petit peu ce qui vibrait bien avec cette argile là qu'est ce qu'on met comme émail dessus parce que là
- Speaker #0
tu as la complémentaire quasiment avec ça ouais c'est pas une complémentaire mais ça Ça sonne un peu...
- Speaker #1
Et ça s'accorde quoi qu'il arrive. On passe par le feu. La couleur est donnée par le feu. La couleur de la terre. Donc là, il s'agit de cuisson en oxydation, mais on pourrait faire des cuissons réductrices aussi, qui permettent encore de développer les gammes des couleurs, d'en faire beaucoup plus avec un même oxyde. Après, on peut...
- Speaker #0
du feu, Philippe.
- Speaker #1
On peut rarement se tromper.
- Speaker #0
De toute façon, tu es bien obligé d'accepter ce qui se passe à la sortie du four.
- Speaker #1
Je veux dire qu'au-delà de ça, quand on respecte la terre, Quand on la travaille comme elle le veut, j'ai toujours été récompensé à la sortie du four. Même si ce ne sont pas mes couleurs d'origine. Par exemple, il y a des couleurs qui me laissent un petit peu plus indifférent que d'autres, à savoir la gamme des jaunes. Ce n'est pas une couleur où j'ai un attrait. Mais en travaillant le jaune à un moment donné, je l'ai travaillé respectueusement. Je dois reconnaître que le jaune est quand même magnifique.
- Speaker #0
C'est la lumière.
- Speaker #1
Sans cela, sans tout ça.
- Speaker #0
En fait, il est magnifique quand il est utilisé dans sa bonne quantité.
- Speaker #1
Et parfois, je veux dire aussi qu'un jaune, je l'ai mis avec un bleu qui, en théorie, ne devrait pas fonctionner. Mais dans la fusion des deux, c'est-à-dire à la superposition d'un émail sur l'autre, apparaît une nouvelle couleur et une nouvelle fusibilité qui est parfaitement en harmonie avec le jaune et le bleu. alors que ces deux couleurs-là, au départ, on ne les aurait pas forcément mis ensemble. Mais là, comme ça passe par le feu, il y a une espèce de correction.
- Speaker #0
Il y a un mariage.
- Speaker #1
Un mariage, une fusion, un mélange qui se produit et qui est souvent bienheureux et qui les habille parfaitement. Notamment là, par exemple, avec les bols que j'ai faits en noir et en jaune. Il y a un noir mat qui est complètement déposé sur la pièce et un retrempage dans un jaune. qui contient énormément de carbonate de Paris. Enfin, un jaune mat. On va rentrer dans la spécificité chimique de l'émail. En théorie, ces deux-là, ensemble, ce n'est pas très joli. Mais là, la fusion a développé quelque chose de tout à fait intéressant.
- Speaker #0
Bonne surprise.
- Speaker #1
C'est la surprise du feu. Quand on respecte la Terre, on n'a jamais de mauvaise surprise. Et pour le peu que je me rappelle, dans mon autre travail, qui est celui des Médicis, qui sont des pièces un petit peu plus... plus aligné, où il y a d'autres émotions qui vont rentrer en ligne de compte, c'est là où je m'en suis vraiment rendu compte de tout ça. On ne peut pas se tromper quand on reste vraiment dans la lignée de la céramique. Et c'est ça qui est vraiment chouette. Et c'est la première expérience du bol, en fait, que j'ai appris dans ma carrière de céramiste.
- Speaker #0
Un nouvel épisode des Petites Histoires de Michelle vous attend tous les mardis. Pensez à vous abonner à ma newsletter pour continuer de voyager au Japon avec moi.