Speaker #0C'est l'été, c'est le moment de ralentir, mais aussi d'en profiter pour faire un peu d'introspection. Je suis Marie-Laure Hisette, coach, conférencière et surtout une femme qui croit profondément qu'on peut diriger autrement. Cet été, on met les pieds dans le plat à travers des épisodes enregistrés en solo. Comment adopter la posture qui invite à l'ouverture et au questionnement ? Comment donner du sens à chaque action ? Comment laisser une vraie place aux émotions ? Prête à secouer un peu tes croyances ? Installe ta serviette. Attrape ta boisson fraîche et plonge avec moi dans ce voyage où le sens, l'émotion et l'audace deviennent tes meilleurs alliés. C'est parti ! Ce dernier épisode de Summer Vibe, donc dernier épisode solo de l'été, on reprendra les interviews à partir du prochain épisode qui sera publié dans deux semaines. Aujourd'hui, on s'attaque à un sujet qui va peut-être faire grincer des dents à certaines personnes, c'est la... peur de déplaire. C'est un sujet de fond que j'ai envie d'aborder aujourd'hui parce que je trouve qu'il est... personnellement je le vis très souvent et je travaille beaucoup dessus et je sais que c'est assez répandu et en particulier chez les femmes. En fait on apprend très tôt aux femmes qu'elles doivent plaire, elles doivent être belles, elles doivent être souriantes, agréables. Et on leur répète souvent que leur beauté est une clé. La clé pour trouver un mari, pour pouvoir avoir des opportunités, pour décrocher un travail, même parfois pour se faire des amis. Voilà, en gros, sois belle. On dit souvent, sois belle et tais-toi, mais au-delà de ça, c'est sois belle pour plaire. Et il est essentiel que tu plaises pour pouvoir réussir ta vie. Voilà le message qu'on transmet aux petites filles. Et d'ailleurs, c'est le mythe de la princesse. Tu vas être une princesse, potentiellement sauvée par un homme d'ailleurs, mais au-delà de ça, la princesse, elle est toujours belle, et elle plaît au prince parce qu'elle est belle. Et ça, c'est des choses que j'ai vécues aussi. Alors moi, on m'a dit des choses du type, par exemple, il faut que tu perdes du poids si tu vas avoir une chance de trouver du travail. Comme si tout se jouait là, comme si mon apparence allait déterminer ma valeur professionnelle. C'est hyper violent et c'est profondément ancré dans l'éducation des filles. Évidemment, ça se passe au niveau familial, mais c'est aussi présent dans toutes les histoires qu'on raconte aux filles, c'est présent au niveau de la société, c'est quelque chose qui nous environne et qui devient vraiment profondément ancré en nous. Dès l'enfance, on apprend à chercher une validation extérieure. On s'habitue à attendre un sourire, une approbation, un regard bienveillant pour se sentir légitime, comme si on ne pouvait pas s'auto-valider. Chez les garçons, ce n'est pas exactement la même chose. Chez eux, il y a aussi une culture qui est particulière. Mais chez eux, on va attendre autre chose. On va attendre de la performance, la force, la réussite. Chez les filles, c'est le charme, la douceur, la beauté. Ce sont deux faces d'une même médaille. Et c'est toujours la même histoire, l'idée que notre valeur ne vient pas de nous-mêmes, mais de la façon dont les autres nous perçoivent. Et c'est de là que naît cette peur de déplaire. Parce que si plaire conditionne nos chances de réussir, de rester à notre place, alors ne pas plaire devient un risque immense. Un risque de perdre un emploi, une promotion, une relation. peur en la portant nous comme une ombre silencieuse. Alors regardons la racine de cette peur de déplaire. On l'a dit, elle se construit tôt dans l'éducation. Quand une petite fille est valorisée pour son sourire sage, sa robe jolie, son obéissance, elle comprend vite que plaire sait exister. Puis ça continue à l'adolescence. Soit jolie, mais pas trop sexy. Soit gentille, mais pas trop naïve. Soit ambitieuse, mais pas arrogante. Ce sont des injonctions que l'on reçoit en permanence. soit formulée directement comme ça, soit de manière beaucoup plus utile dans tout ce qui nous est montré, dans les médias, sur les réseaux sociaux aujourd'hui, dans les échanges au quotidien. Bref, une injonction permanente à se conformer pour rester aimé. Et le coût, il est énorme. C'est une énergie qui est colossale dépensée à surveiller son image, à dire oui quand on pense non. À sourire quand on est épuisé. Et c'est aussi une perte de crédibilité dans nos rôles de leader. Quand on veut plaire à tout prix, on envoie des messages brouillés, pas clairs, et nos équipes finissent par douter de notre clarté et même de notre solidité. Alors moi je vous propose d'arrêter ça. Et ça va demander évidemment un changement profond de la société, bien sûr. Donc ça commence par changer la manière dont on élève nos enfants, avec nos filles, en leur montrant que leur valeur ne se résume pas à leur beauté. en les encourageant à se définir elles-mêmes, par exemple leur créativité, leur curiosité, leur audace, plein d'autres choses aussi. Et avec nos garçons, en les libérant aussi du carcan de la performance, en leur disant qu'ils ont le droit d'échouer, ils ont le droit d'être vulnérables, ils ont le droit d'écouter, et ils ont le droit d'exprimer leurs émotions. Donc c'est par là que ça commence au niveau sociétal. Ouvrir d'autres modèles. Arrêter de conditionner les enfants à plaire ou à dominer. et leur apprendre à être tout simplement. Et puis après, dans nos vies d'adultes, qu'est-ce qui peut être fait concrètement ? Quand toi, tu sens cette peur de déplaire monter, tu peux t'arrêter une seconde et te poser deux questions toutes simples. Premièrement, qu'est-ce que je risque vraiment si je dis non, si je déplais ? Et la deuxième, qu'est-ce que je perds si je continue à dire oui ? Ce sont des belles questions de coaching, je t'invite à te les noter quelque part ou à mettre l'épisode en pause pour bien y réfléchir. Qu'est-ce que je risque vraiment si je dis non, si je déplais ? Et qu'est-ce que je perds si je continue à dire oui ? C'est une manière de remettre la balance à sa place. Souvent, on se rend compte que le risque est surtout dans notre tête, alors que le coup de se trahir soi-même est bien réel et en général... Il n'est absolument pas perçu. Et enfin, il y a un dernier terrain sur lequel tu as la possibilité d'agir, c'est celui des équipes, des gens avec lesquels tu travailles, de tes collaborateurs, collaboratrices en particulier. Parce que cette peur de déplaire, évidemment, tout le monde peut la vivre, aussi bien en position de dirigeante ou de dirigeant. Puisque les hommes l'ont aussi. J'ai beaucoup axé sur les femmes. Enfin, la peur de déplaire, on peut aussi la retrouver chez les hommes, bien sûr. Mais bon, je vais rester au féminin. Donc, tes collaboratrices qui vivent cette peur de déplaire, qu'est-ce que toi tu peux faire ? Effectivement, elles ne vont pas toujours oser dire ce qui les dérange. Elles peuvent taire leur frustration. Elles vont faire semblant d'aller bien, ne pas froisser le manager, les collègues. Et toi tu crois que tout roule alors qu'en fait pas du tout. Alors comment faire pour que ces femmes osent s'exprimer ? Déjà, ne pas se limiter aux questions frontales. Si tu demandes « alors tout va bien ? » , la plupart répondront par réflexe « oui oui ne t'inquiète pas » . Poser une question frontale à une collaboratrice du type « qu'est-ce que tu n'oses pas me dire ? » peut paradoxalement renforcer son silence. Si elle a déjà peur de déplaire, elle ne va pas risquer de se mettre en danger en répondant. Il faut créer des espaces plus profonds, plus variés. Et ce qui fonctionne mieux sont des rituels et des espaces d'expression où la parole n'est pas la seule voix. Je te donne quelques pistes concrètes. Les temps collectifs anonymisés, par exemple. Tu peux mettre en place des questionnaires courts, anonymes, réguliers, par exemple une fois par trimestre, avec des questions simples, du type « qu'est-ce qui marche bien ? » , « qu'est-ce qui pourrait être amélioré ? » . Ça permet d'ouvrir un espace sécurisé où la parole n'est pas directement associée à un visage. Deuxièmement, les formats créatifs. Certaines femmes s'expriment mieux autrement que par la parole directe. On peut proposer des post-it anonymes, l'art d'un atelier, des boîtes à idées, des exercices où on écrit une qualité de l'équipe et un point de progrès, qu'on affiche ensuite au mur pour en discuter collectivement. Ça donne un cadre ludique moins menaçant que le tête-à-tête. Troisième idée, la force du collectif. En petits groupes non hiérarchiques, évidemment, la parole circule plus librement. Ça peut être des groupes non mixtes, je veux dire, donc que des femmes, que des hommes aussi, séparément. Si on reste sur la question des femmes et cette notion de peur de déplaire en particulier, une manager peut organiser des cercles de parole ou des temps d'échange qui peuvent être facilités par une tierce personne. un coach, une personne des RH, un mentor, quelqu'un qui crée un climat de confiance. Parce que souvent ce n'est pas à toi qu'elle craigne de déplaire, mais à la figure d'autorité que tu représentes. Passer par un tiers, ça peut désamorcer ça. Quatrième idée, tu peux me montrer l'exemple par la vulnérabilité. Oui, la tienne. Parce qu'un leader ou une leader qui ose dire ses propres zones de doute, ses propres erreurs, crée un climat où les autres sentent qu'elles ont le droit de parler sans être parfaites. C'est l'effet miroir. Et contrairement à la miroirocratie dont je parlais dans le précédent épisode solo, ici on a un effet positif. Donc si tu t'autorises à ne pas plaire tout le temps, tes collaboratrices sentiront qu'elles peuvent faire pareil. Et puis, cinquième et dernière idée, l'observation du non-dit. Il ne faut pas compter uniquement sur ce qui est exprimé verbalement. Parfois, des silences, des regards fuyants, des « non mais ça va » dit un peu trop vite, peuvent être des indicateurs. Tu peux rebondir doucement, sans insister, mais en montrant que tu as perçu quelque chose. Ça leur prouve que tu es attentive et que tu as à accueillir ce qui dépasse la parole. En bref, ce n'est pas une seule question posée de temps en temps qui change la donne. C'est une culture du feedback qui a besoin d'être instaurée. Diversifier les canaux d'expression, montrer que les retours sont écoutés, et puis suivi d'actes surtout. Donner aux femmes la conviction qu'elles ne seront pas jugées ni sanctionnées si elles épriment une critique. Créer cette culture du feedback, ce n'est pas une action ponctuelle, c'est un climat à entretenir. Plus les femmes sentiront qu'elles peuvent déplaire sans sanction, plus elles oseront dire la vérité. Et la vérité, c'est ce qui fait vraiment grandir une équipe. Alors voilà, la peur de déplaire, c'est un poison discret qui abîme la confiance en soi et la qualité de nos relations. Et je sais de quoi je parle. Je reviens de loin par rapport à ça aussi. Et c'est quelque chose qu'on peut commencer à désamorcer dans l'éducation de nos enfants, dans nos vies personnelles, dans la manière dont on communique aussi. À penser à la manière dont on communique sur les réseaux. par exemple, et puis aussi dans nos manières de diriger évidemment. Et toi, où est-ce que tu sens que cette peur de déplaire te freine encore ? Est-ce que c'est dans ta manière de dire non, dans ton rapport à ton corps, dans ton management ? Et qu'est-ce que tu pourrais changer dès aujourd'hui pour lâcher un peu cette peur et retrouver ton vrai pouvoir intérieur ? Parce que le monde n'a pas besoin de femmes qui plaisent, il a besoin de femmes qui osent. Et peut-être que la... Première étape, c'est d'en parler aussi de ça, d'en parler à quelqu'un d'extérieur qui n'est pas impliqué dans ta vie. Donc si tu en ressens le besoin, tu peux venir m'en parler en DM sur LinkedIn par exemple. Et je peux t'ouvrir un espace d'accueil de ton vécu par rapport à ça. Allez, à bientôt et on se retrouve pour les interviews dans deux semaines.