undefined cover
undefined cover
undefined cover
undefined cover
undefined cover
undefined cover
Se mettre au vert ! Quels défis pour l’école à l'ère de l'anthropocène ? Avec Régis Guyon cover
Se mettre au vert ! Quels défis pour l’école à l'ère de l'anthropocène ? Avec Régis Guyon cover
Le sens des mots, un podcast des Éditions de l'ENS de Lyon

Se mettre au vert ! Quels défis pour l’école à l'ère de l'anthropocène ? Avec Régis Guyon

Se mettre au vert ! Quels défis pour l’école à l'ère de l'anthropocène ? Avec Régis Guyon

11min |27/05/2025
Play
undefined cover
undefined cover
undefined cover
undefined cover
undefined cover
undefined cover
Se mettre au vert ! Quels défis pour l’école à l'ère de l'anthropocène ? Avec Régis Guyon cover
Se mettre au vert ! Quels défis pour l’école à l'ère de l'anthropocène ? Avec Régis Guyon cover
Le sens des mots, un podcast des Éditions de l'ENS de Lyon

Se mettre au vert ! Quels défis pour l’école à l'ère de l'anthropocène ? Avec Régis Guyon

Se mettre au vert ! Quels défis pour l’école à l'ère de l'anthropocène ? Avec Régis Guyon

11min |27/05/2025
Play

Description

L’éducation au développement durable (ce qu’on appelle couramment EDD) fait partie des missions de l’École inscrites dans le code de l’éducation. Sur le site du Ministère de l'éducation nationale, on peut d’ailleurs lire qu’il est pleinement mobilisé dans la lutte contre le changement climatique, et en faveur de la biodiversité. On y lit aussi que les élèves sont appelés à être des acteurs majeurs de la transition écologique, et que l’école doit être un lieu exemplaire de la protection de l'environnement. Transition écologique, urgence climatique, anthropocène, durabilité… Comment ces notions, ces questions, ont été introduites dans les programmes scolaires, et comment l'école s'empare ? Quelles sont les avancées depuis 20 ans ? Quels types de mesures concrètes sont déjà mises en place ou expérimentées et avec quels résultats ? Enfin, à quelles conditions les éducations environnementales peuvent-elles être transformatrices ?

Pour répondre à ces questions, nous recevons dans ce nouvel épisode du sens des mots Régis Guyon, qui codirige avec Hélène Buisson-Fenet la collection Entretiens Ferdinand Buisson. Il vient aujourd’hui nous parler du livre L'école écologique : s'ajuster ou transformer ?Il a choisi de nous en parler en 3 mots : école écologique, agir et transformer.

Vous entendez au début de cet épisode des extraits issus de :


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Vous écoutez Le sens des mots, un podcast des éditions de l'ENS de Lyon. Pour entendre la voix de nos auteurs, dépasser vos idées reçues sur la recherche et décrypter le monde qui nous entoure. Pour réussir la transition écologique, il faut une révolution de l'éducation. L'éducation a un rôle majeur à jouer dans cet enjeu fondamental qu'est le développement durable et la lutte contre le changement climatique. Les pesticides, ça va tuer les mauvais insectes, mais aussi les bons insectes, comme... Les abeilles, les papillons. C'est bien la manière de parler de l'avenir, de s'y projeter, qui se trouve engagée à travers cette éducation au changement climatique. L’éducation au développement durable (ce qu’on appelle couramment EDD) fait partie des missions de l’école inscrites dans le code de l’éducation. Sur le site du Ministère de l'éducation nationale, on peut d’ailleurs lire qu’il est pleinement mobilisé dans la lutte contre le changement climatique, et en faveur de la biodiversité. On y lit aussi que les élèves sont appelés à être des acteurs majeurs de la transition écologique, et que l’école doit être un lieu exemplaire de la protection de l'environnement. Transition écologique, urgence climatique, anthropocène, durabilité… Comment ces notions, ces questions, ont été introduites dans les programmes scolaires, et comment l'école s'empare ? Quelles sont les avancées depuis 20 ans ? Quels types de mesures concrètes sont déjà mises en place ou expérimentées et avec quels résultats ? Enfin, à quelles conditions les éducations environnementales peuvent-elles être transformatrices ? Pour répondre à ces questions, nous recevons dans ce nouvel épisode du Sens des mots Régis Guyon, qui codirige avec Hélène Buisson-Fenet la collection Entretiens Ferdinand Buisson. Il vient aujourd’hui nous parler du livre L'école écologique : s'ajuster ou transformer ? Il a choisi de nous en parler en 3 mots : école écologique, agir et transformer.

  • Régis Guyon

    Alors, école écologique, moi ça me fait d'abord penser à la question de comment cette question de l'écologie est entrée ou s'est immiscée dans la question scolaire, ou dans l'école, dans les bâtiments. Et comme souvent, quand une problématique se développe dans la société, dans le débat public, il y a toujours un décalage, un temps plus ou moins long, ça dépend des thématiques, entre ce qui se joue dans ce débat-là et dans la société, et son arrivée dans l'école. Ça peut prendre plusieurs dizaines d'années. Et sur la question écologique, on va dire, si on fait remonter cette prise de conscience de la nécessité de se projeter, dans la question écologique, au début des années 70, et on pense aux travaux de Serge Moscovici en particulier et son livre de 1972, on peut dire que ça a mis une trentaine d'années à peu près à s'installer dans l'école parce qu'il a fallu tout un processus qui est plus ou moins long, mais là on peut le donner trois décennies, qui est fait de négociations, de compromis, de controverses et de pressions, mais aussi de traductions pour que ces savoirs qui sont développés à la fois dans la science, dans la recherche scientifique, et dans le monde politique et dans la société en général, arrivent dans une transposition à travers les programmes, ce qu'on appelle les curricula, dans l'école, et pour qu'ensuite, évidemment, puisque ça ne suffit absolument pas, pour que les enseignants, eux, s'en emparent, et en fassent, eux, une pratique éducative et pédagogique, et ce que certains sociologues appellent les curricula en acte. Les premiers textes touchant à cette question écologique, on peut les dater de 2004. Donc on voit l'écart qui existe entre fin des années 60, début des années 70 et 2004. Donc on voit bien ces trois décennies. Mais voyez bien qu'il a fallu toute une maturation en amont. Et que derrière, ce n'est pas parce qu'en 2004, l'UNESCO a fait un texte et une déclaration que d'un seul coup, tout devient évident et limpide dans la conscience des prescripteurs et des pilotes de l'éducation, mais aussi dans les classes. Donc il faut bien tout un temps ensuite, à travers des circulaires, des programmes, etc., pour que ça devienne tangible dans les apprentissages. Le deuxième mot sera « agir ». Alors, une des choses qui est rappelée par Angela Barthes dans son texte en particulier, c'est la complexité des notions mobilisées. Et elle insiste bien, elle fait tout un tableau avec différents types de notions, en les catégorisant entre notions scientifiques, notions de débat public. Donc, notion scientifique, par exemple, elle prend, je ne sais pas, le réchauffement climatique, par exemple. Alors que si on parle d'anthropocène, ça va être une hypothèse scientifique. Il y a des controverses qui existent autour de cette notion-là. Et puis si on arrive sur développement durable, puisque dans l'école, ça s'est appelé, du côté des Nations Unies, les objectifs de développement durable, et pour l'Éducation nationale en France, l'éducation au développement durable, et on voit bien que déjà, entre les mots qu'on utilise, la référence que l'on peut faire est assez différente, et que l'école, en fait, parle d'éducation au développement durable et ne sort pas trop de cette notion-là. Et quand elle est confrontée à d'autres thématiques comme réchauffement climatique ou dégradation de la biodiversité ou l'anthropocène, elle est beaucoup moins à l'aise parce que les savoirs ne sont peut-être pas tout à fait suffisamment clairs, je ne dis pas qu'ils n'existent pas, mais suffisamment clairs et les controverses un peu atténuées, pour pouvoir les intégrer dans des programmes où on aime bien quand même avoir des formes de savoir un peu solides, quitte à ce qu'ils évoluent dans le temps, évidemment. Finalement, cette question de l'écologie ou de l'école écologique pourrait se traduire aussi sous la forme de questions socialement vives, parce que cette question socialement vive fait ce dialogue avec la société et la recherche, mais aussi souligne des formes d'incertitudes qu'il y aurait à répondre à cette problématique-là. C'est-à-dire que sur le développement durable, l'anthropocène, peu importe comment on l'appelle finalement, il n'y a pas qu'une seule bonne réponse, il n'y a pas qu'un savoir définitif, il n'y a pas qu'une seule approche possible. C'est une multiplicité des choses et certains auteurs de l'ouvrage soulignent à quel point il est important de mettre en place du côté des apprentissages, et on peut mesurer ce que ça peut vouloir dire en termes d'engagement et d'objets complexes à mettre en œuvre dans la classe, qui est l'éducation au doute, l'éducation au changement, c'est ce que Benoit Urgelli en particulier développe dans son texte, l'éducation à l'incertitude, comment aujourd'hui dans l'école on peut mettre en place une pédagogie qui relève d'une approche par l'incertitude, alors que l'école, justement, essaye de faire l'inverse, c'est de donner des savoirs un peu solides et certains, en tout cas jusqu'à un certain point, et qui rassurent aussi à la fois les élèves et ce qu'ils ont à apprendre, et non pas une incertitude qui ferait qu'on ne sait pas en fait ce qu'il faut savoir. Or que cette incertitude, vu la thématique du développement durable, et comment ça impacte nos vies, soit par procuration, quand on voit les événements, les incendies, les inondations, les cyclones, et j'en passe dans les médias et ce que l'on vit au quotidien, la pollution de l'air, ce genre de choses. On voit bien aussi que ça a un impact dans notre vie. Et du coup, ça engage aussi à avoir une réflexion sur là où on est, ce qu'on fait et ce qu'on a à faire ensemble. Et donc, ce que indique, en tout cas, et je repense au texte de Benoit Urgelli, mais ce n'est pas le seul, comment favoriser ces démarches d'enquêtes qui prennent en charge cette incertitude-là. Et on peut penser à des démarches de sciences participatives ou par rapport à la démarche qui est celle de l'enquête et de la participation. On va essayer de déterminer des savoirs ensemble et de se mettre d'accord, même si on n'y était pas forcément sur les mêmes types de compréhension au départ. On arrive à déceler des certitudes ensemble ou des compromis qu'on peut faire ensemble sur des savoirs. Le troisième mot sera le verbe « transformer », mais avec l'interrogation qui va avec. Alors, la question de l'ajustement ou de la transformation est une question, elle aussi, sacrément compliquée. Parce que, si je prends l'exemple de l'enseignement agricole, parce qu'il y a deux textes qui viennent du monde de l'enseignement agricole et donc du ministère de l'Agriculture, où on retrouve là encore des tensions dans ce qui est proposé aux élèves, donc aux lycéens qui apprennent un métier. Ce sont des endroits où on apprend des métiers. Ça ne veut pas dire qu'on n'ira pas dans l'enseignement supérieur, le BTS ou autre, après. Mais on apprend, c'est une dimension très professionnelle, mais qui est très liée aussi donc au monde économique. Et le monde agro ou agricole aujourd'hui, ou de l'agriculture aujourd'hui, financièrement en tout cas, est quand même dimensionné pour mesurer le poids du secteur agro-industriel, qui a des attendus en termes de productivité, d'efficacité, avec des formes intensives du travail et de la production. Voilà, là encore je vais dire ce qui pourrait relever d'une controverse en fait, qui est peut-être pas très respectueux de l'environnement, et qui néglige aussi d'autres formes peut-être alternatives de la production agricole, que ce soit l'élevage ou que ce soit le secteur céréalier, le betteravier ou les fruits et légumes, etc. Et donc quelque part on a une forme de compromis qui est parfois fait entre une industrie qui dit oui on va s'adapter, on va s'améliorer, on va moins polluer, on va respecter les sols, etc. Et puis des postures plus radicales, qui vont dire, non nous on arrête, on fait une agriculture pensée avec l'environnement, avec le respect des insectes, avec des haies, des choses bio, propres, etc. d e façon respectueuse de l'environnement en tout cas. Et donc on voit bien que les lycées agricoles sont à la convergence aussi de ces tensions-là et qu'il est parfois difficile de promouvoir telle forme sans se mettre à dos d'autres qui relèvent d'une autre forme d'économie. Et donc voilà, ce n'est pas du tout simple. Donc c'est vrai que c'est une question, s'adapter, c'est presque provocateur. C'est pour ça qu'il y a toujours un point d'interrogation dans les espèces d'alternatives que l'on pose dans les problématiques de la collection, parce qu'il n'y a pas de bonne réponse en fait. Il y a d'essayer de trouver des modalités pour que chacun s'y retrouve. Et dans un monde aujourd'hui où finalement la question écologique est embarquée dans des formes à la fois de contre-vérité, dans le monde politique dans lequel on est, si on observe ce qui se passe aux États-Unis, mais pas que aux États-Unis, on voit bien que la question écologique peut être prise comme une question de militantisme, comme une question de propagande, et que certains peuvent aussi réclamer des enseignants qu'ils se retirent de ces questions parce que trop politiques justement. Peut-être que c'est la preuve que ce sont des questions politiques, en leur demandant de rester dans une forme de neutralité, et donc en les soupçonnant d'être trop proches de formes de militantisme qu'on voit sur l'aménagement d'une nouvelle autoroute entre Toulouse et Castres, ou d'autres endroits, où cette question écologique se pose pleinement.

  • Speaker #0

    Vous venez d'écouter Le sens des mots. L'ouvrage dont il était question aujourd'hui, L'école écologique : s'ajuster ou transformer ? est à retrouver en version papier sur le site d'ENS Éditions et en librairie. Vous pouvez le trouver également en version numérique sur la plateforme OpenEdition Books.

  • Speaker #1

    C'était Le sens des mots. Ce podcast a été préparé par Sandrine Padilla et Maëlle Lopez. Au mixage et réalisation Sébastien Boudin. A bientôt pour une prochaine édition.

Description

L’éducation au développement durable (ce qu’on appelle couramment EDD) fait partie des missions de l’École inscrites dans le code de l’éducation. Sur le site du Ministère de l'éducation nationale, on peut d’ailleurs lire qu’il est pleinement mobilisé dans la lutte contre le changement climatique, et en faveur de la biodiversité. On y lit aussi que les élèves sont appelés à être des acteurs majeurs de la transition écologique, et que l’école doit être un lieu exemplaire de la protection de l'environnement. Transition écologique, urgence climatique, anthropocène, durabilité… Comment ces notions, ces questions, ont été introduites dans les programmes scolaires, et comment l'école s'empare ? Quelles sont les avancées depuis 20 ans ? Quels types de mesures concrètes sont déjà mises en place ou expérimentées et avec quels résultats ? Enfin, à quelles conditions les éducations environnementales peuvent-elles être transformatrices ?

Pour répondre à ces questions, nous recevons dans ce nouvel épisode du sens des mots Régis Guyon, qui codirige avec Hélène Buisson-Fenet la collection Entretiens Ferdinand Buisson. Il vient aujourd’hui nous parler du livre L'école écologique : s'ajuster ou transformer ?Il a choisi de nous en parler en 3 mots : école écologique, agir et transformer.

Vous entendez au début de cet épisode des extraits issus de :


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Vous écoutez Le sens des mots, un podcast des éditions de l'ENS de Lyon. Pour entendre la voix de nos auteurs, dépasser vos idées reçues sur la recherche et décrypter le monde qui nous entoure. Pour réussir la transition écologique, il faut une révolution de l'éducation. L'éducation a un rôle majeur à jouer dans cet enjeu fondamental qu'est le développement durable et la lutte contre le changement climatique. Les pesticides, ça va tuer les mauvais insectes, mais aussi les bons insectes, comme... Les abeilles, les papillons. C'est bien la manière de parler de l'avenir, de s'y projeter, qui se trouve engagée à travers cette éducation au changement climatique. L’éducation au développement durable (ce qu’on appelle couramment EDD) fait partie des missions de l’école inscrites dans le code de l’éducation. Sur le site du Ministère de l'éducation nationale, on peut d’ailleurs lire qu’il est pleinement mobilisé dans la lutte contre le changement climatique, et en faveur de la biodiversité. On y lit aussi que les élèves sont appelés à être des acteurs majeurs de la transition écologique, et que l’école doit être un lieu exemplaire de la protection de l'environnement. Transition écologique, urgence climatique, anthropocène, durabilité… Comment ces notions, ces questions, ont été introduites dans les programmes scolaires, et comment l'école s'empare ? Quelles sont les avancées depuis 20 ans ? Quels types de mesures concrètes sont déjà mises en place ou expérimentées et avec quels résultats ? Enfin, à quelles conditions les éducations environnementales peuvent-elles être transformatrices ? Pour répondre à ces questions, nous recevons dans ce nouvel épisode du Sens des mots Régis Guyon, qui codirige avec Hélène Buisson-Fenet la collection Entretiens Ferdinand Buisson. Il vient aujourd’hui nous parler du livre L'école écologique : s'ajuster ou transformer ? Il a choisi de nous en parler en 3 mots : école écologique, agir et transformer.

  • Régis Guyon

    Alors, école écologique, moi ça me fait d'abord penser à la question de comment cette question de l'écologie est entrée ou s'est immiscée dans la question scolaire, ou dans l'école, dans les bâtiments. Et comme souvent, quand une problématique se développe dans la société, dans le débat public, il y a toujours un décalage, un temps plus ou moins long, ça dépend des thématiques, entre ce qui se joue dans ce débat-là et dans la société, et son arrivée dans l'école. Ça peut prendre plusieurs dizaines d'années. Et sur la question écologique, on va dire, si on fait remonter cette prise de conscience de la nécessité de se projeter, dans la question écologique, au début des années 70, et on pense aux travaux de Serge Moscovici en particulier et son livre de 1972, on peut dire que ça a mis une trentaine d'années à peu près à s'installer dans l'école parce qu'il a fallu tout un processus qui est plus ou moins long, mais là on peut le donner trois décennies, qui est fait de négociations, de compromis, de controverses et de pressions, mais aussi de traductions pour que ces savoirs qui sont développés à la fois dans la science, dans la recherche scientifique, et dans le monde politique et dans la société en général, arrivent dans une transposition à travers les programmes, ce qu'on appelle les curricula, dans l'école, et pour qu'ensuite, évidemment, puisque ça ne suffit absolument pas, pour que les enseignants, eux, s'en emparent, et en fassent, eux, une pratique éducative et pédagogique, et ce que certains sociologues appellent les curricula en acte. Les premiers textes touchant à cette question écologique, on peut les dater de 2004. Donc on voit l'écart qui existe entre fin des années 60, début des années 70 et 2004. Donc on voit bien ces trois décennies. Mais voyez bien qu'il a fallu toute une maturation en amont. Et que derrière, ce n'est pas parce qu'en 2004, l'UNESCO a fait un texte et une déclaration que d'un seul coup, tout devient évident et limpide dans la conscience des prescripteurs et des pilotes de l'éducation, mais aussi dans les classes. Donc il faut bien tout un temps ensuite, à travers des circulaires, des programmes, etc., pour que ça devienne tangible dans les apprentissages. Le deuxième mot sera « agir ». Alors, une des choses qui est rappelée par Angela Barthes dans son texte en particulier, c'est la complexité des notions mobilisées. Et elle insiste bien, elle fait tout un tableau avec différents types de notions, en les catégorisant entre notions scientifiques, notions de débat public. Donc, notion scientifique, par exemple, elle prend, je ne sais pas, le réchauffement climatique, par exemple. Alors que si on parle d'anthropocène, ça va être une hypothèse scientifique. Il y a des controverses qui existent autour de cette notion-là. Et puis si on arrive sur développement durable, puisque dans l'école, ça s'est appelé, du côté des Nations Unies, les objectifs de développement durable, et pour l'Éducation nationale en France, l'éducation au développement durable, et on voit bien que déjà, entre les mots qu'on utilise, la référence que l'on peut faire est assez différente, et que l'école, en fait, parle d'éducation au développement durable et ne sort pas trop de cette notion-là. Et quand elle est confrontée à d'autres thématiques comme réchauffement climatique ou dégradation de la biodiversité ou l'anthropocène, elle est beaucoup moins à l'aise parce que les savoirs ne sont peut-être pas tout à fait suffisamment clairs, je ne dis pas qu'ils n'existent pas, mais suffisamment clairs et les controverses un peu atténuées, pour pouvoir les intégrer dans des programmes où on aime bien quand même avoir des formes de savoir un peu solides, quitte à ce qu'ils évoluent dans le temps, évidemment. Finalement, cette question de l'écologie ou de l'école écologique pourrait se traduire aussi sous la forme de questions socialement vives, parce que cette question socialement vive fait ce dialogue avec la société et la recherche, mais aussi souligne des formes d'incertitudes qu'il y aurait à répondre à cette problématique-là. C'est-à-dire que sur le développement durable, l'anthropocène, peu importe comment on l'appelle finalement, il n'y a pas qu'une seule bonne réponse, il n'y a pas qu'un savoir définitif, il n'y a pas qu'une seule approche possible. C'est une multiplicité des choses et certains auteurs de l'ouvrage soulignent à quel point il est important de mettre en place du côté des apprentissages, et on peut mesurer ce que ça peut vouloir dire en termes d'engagement et d'objets complexes à mettre en œuvre dans la classe, qui est l'éducation au doute, l'éducation au changement, c'est ce que Benoit Urgelli en particulier développe dans son texte, l'éducation à l'incertitude, comment aujourd'hui dans l'école on peut mettre en place une pédagogie qui relève d'une approche par l'incertitude, alors que l'école, justement, essaye de faire l'inverse, c'est de donner des savoirs un peu solides et certains, en tout cas jusqu'à un certain point, et qui rassurent aussi à la fois les élèves et ce qu'ils ont à apprendre, et non pas une incertitude qui ferait qu'on ne sait pas en fait ce qu'il faut savoir. Or que cette incertitude, vu la thématique du développement durable, et comment ça impacte nos vies, soit par procuration, quand on voit les événements, les incendies, les inondations, les cyclones, et j'en passe dans les médias et ce que l'on vit au quotidien, la pollution de l'air, ce genre de choses. On voit bien aussi que ça a un impact dans notre vie. Et du coup, ça engage aussi à avoir une réflexion sur là où on est, ce qu'on fait et ce qu'on a à faire ensemble. Et donc, ce que indique, en tout cas, et je repense au texte de Benoit Urgelli, mais ce n'est pas le seul, comment favoriser ces démarches d'enquêtes qui prennent en charge cette incertitude-là. Et on peut penser à des démarches de sciences participatives ou par rapport à la démarche qui est celle de l'enquête et de la participation. On va essayer de déterminer des savoirs ensemble et de se mettre d'accord, même si on n'y était pas forcément sur les mêmes types de compréhension au départ. On arrive à déceler des certitudes ensemble ou des compromis qu'on peut faire ensemble sur des savoirs. Le troisième mot sera le verbe « transformer », mais avec l'interrogation qui va avec. Alors, la question de l'ajustement ou de la transformation est une question, elle aussi, sacrément compliquée. Parce que, si je prends l'exemple de l'enseignement agricole, parce qu'il y a deux textes qui viennent du monde de l'enseignement agricole et donc du ministère de l'Agriculture, où on retrouve là encore des tensions dans ce qui est proposé aux élèves, donc aux lycéens qui apprennent un métier. Ce sont des endroits où on apprend des métiers. Ça ne veut pas dire qu'on n'ira pas dans l'enseignement supérieur, le BTS ou autre, après. Mais on apprend, c'est une dimension très professionnelle, mais qui est très liée aussi donc au monde économique. Et le monde agro ou agricole aujourd'hui, ou de l'agriculture aujourd'hui, financièrement en tout cas, est quand même dimensionné pour mesurer le poids du secteur agro-industriel, qui a des attendus en termes de productivité, d'efficacité, avec des formes intensives du travail et de la production. Voilà, là encore je vais dire ce qui pourrait relever d'une controverse en fait, qui est peut-être pas très respectueux de l'environnement, et qui néglige aussi d'autres formes peut-être alternatives de la production agricole, que ce soit l'élevage ou que ce soit le secteur céréalier, le betteravier ou les fruits et légumes, etc. Et donc quelque part on a une forme de compromis qui est parfois fait entre une industrie qui dit oui on va s'adapter, on va s'améliorer, on va moins polluer, on va respecter les sols, etc. Et puis des postures plus radicales, qui vont dire, non nous on arrête, on fait une agriculture pensée avec l'environnement, avec le respect des insectes, avec des haies, des choses bio, propres, etc. d e façon respectueuse de l'environnement en tout cas. Et donc on voit bien que les lycées agricoles sont à la convergence aussi de ces tensions-là et qu'il est parfois difficile de promouvoir telle forme sans se mettre à dos d'autres qui relèvent d'une autre forme d'économie. Et donc voilà, ce n'est pas du tout simple. Donc c'est vrai que c'est une question, s'adapter, c'est presque provocateur. C'est pour ça qu'il y a toujours un point d'interrogation dans les espèces d'alternatives que l'on pose dans les problématiques de la collection, parce qu'il n'y a pas de bonne réponse en fait. Il y a d'essayer de trouver des modalités pour que chacun s'y retrouve. Et dans un monde aujourd'hui où finalement la question écologique est embarquée dans des formes à la fois de contre-vérité, dans le monde politique dans lequel on est, si on observe ce qui se passe aux États-Unis, mais pas que aux États-Unis, on voit bien que la question écologique peut être prise comme une question de militantisme, comme une question de propagande, et que certains peuvent aussi réclamer des enseignants qu'ils se retirent de ces questions parce que trop politiques justement. Peut-être que c'est la preuve que ce sont des questions politiques, en leur demandant de rester dans une forme de neutralité, et donc en les soupçonnant d'être trop proches de formes de militantisme qu'on voit sur l'aménagement d'une nouvelle autoroute entre Toulouse et Castres, ou d'autres endroits, où cette question écologique se pose pleinement.

  • Speaker #0

    Vous venez d'écouter Le sens des mots. L'ouvrage dont il était question aujourd'hui, L'école écologique : s'ajuster ou transformer ? est à retrouver en version papier sur le site d'ENS Éditions et en librairie. Vous pouvez le trouver également en version numérique sur la plateforme OpenEdition Books.

  • Speaker #1

    C'était Le sens des mots. Ce podcast a été préparé par Sandrine Padilla et Maëlle Lopez. Au mixage et réalisation Sébastien Boudin. A bientôt pour une prochaine édition.

Share

Embed

You may also like

Description

L’éducation au développement durable (ce qu’on appelle couramment EDD) fait partie des missions de l’École inscrites dans le code de l’éducation. Sur le site du Ministère de l'éducation nationale, on peut d’ailleurs lire qu’il est pleinement mobilisé dans la lutte contre le changement climatique, et en faveur de la biodiversité. On y lit aussi que les élèves sont appelés à être des acteurs majeurs de la transition écologique, et que l’école doit être un lieu exemplaire de la protection de l'environnement. Transition écologique, urgence climatique, anthropocène, durabilité… Comment ces notions, ces questions, ont été introduites dans les programmes scolaires, et comment l'école s'empare ? Quelles sont les avancées depuis 20 ans ? Quels types de mesures concrètes sont déjà mises en place ou expérimentées et avec quels résultats ? Enfin, à quelles conditions les éducations environnementales peuvent-elles être transformatrices ?

Pour répondre à ces questions, nous recevons dans ce nouvel épisode du sens des mots Régis Guyon, qui codirige avec Hélène Buisson-Fenet la collection Entretiens Ferdinand Buisson. Il vient aujourd’hui nous parler du livre L'école écologique : s'ajuster ou transformer ?Il a choisi de nous en parler en 3 mots : école écologique, agir et transformer.

Vous entendez au début de cet épisode des extraits issus de :


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Vous écoutez Le sens des mots, un podcast des éditions de l'ENS de Lyon. Pour entendre la voix de nos auteurs, dépasser vos idées reçues sur la recherche et décrypter le monde qui nous entoure. Pour réussir la transition écologique, il faut une révolution de l'éducation. L'éducation a un rôle majeur à jouer dans cet enjeu fondamental qu'est le développement durable et la lutte contre le changement climatique. Les pesticides, ça va tuer les mauvais insectes, mais aussi les bons insectes, comme... Les abeilles, les papillons. C'est bien la manière de parler de l'avenir, de s'y projeter, qui se trouve engagée à travers cette éducation au changement climatique. L’éducation au développement durable (ce qu’on appelle couramment EDD) fait partie des missions de l’école inscrites dans le code de l’éducation. Sur le site du Ministère de l'éducation nationale, on peut d’ailleurs lire qu’il est pleinement mobilisé dans la lutte contre le changement climatique, et en faveur de la biodiversité. On y lit aussi que les élèves sont appelés à être des acteurs majeurs de la transition écologique, et que l’école doit être un lieu exemplaire de la protection de l'environnement. Transition écologique, urgence climatique, anthropocène, durabilité… Comment ces notions, ces questions, ont été introduites dans les programmes scolaires, et comment l'école s'empare ? Quelles sont les avancées depuis 20 ans ? Quels types de mesures concrètes sont déjà mises en place ou expérimentées et avec quels résultats ? Enfin, à quelles conditions les éducations environnementales peuvent-elles être transformatrices ? Pour répondre à ces questions, nous recevons dans ce nouvel épisode du Sens des mots Régis Guyon, qui codirige avec Hélène Buisson-Fenet la collection Entretiens Ferdinand Buisson. Il vient aujourd’hui nous parler du livre L'école écologique : s'ajuster ou transformer ? Il a choisi de nous en parler en 3 mots : école écologique, agir et transformer.

  • Régis Guyon

    Alors, école écologique, moi ça me fait d'abord penser à la question de comment cette question de l'écologie est entrée ou s'est immiscée dans la question scolaire, ou dans l'école, dans les bâtiments. Et comme souvent, quand une problématique se développe dans la société, dans le débat public, il y a toujours un décalage, un temps plus ou moins long, ça dépend des thématiques, entre ce qui se joue dans ce débat-là et dans la société, et son arrivée dans l'école. Ça peut prendre plusieurs dizaines d'années. Et sur la question écologique, on va dire, si on fait remonter cette prise de conscience de la nécessité de se projeter, dans la question écologique, au début des années 70, et on pense aux travaux de Serge Moscovici en particulier et son livre de 1972, on peut dire que ça a mis une trentaine d'années à peu près à s'installer dans l'école parce qu'il a fallu tout un processus qui est plus ou moins long, mais là on peut le donner trois décennies, qui est fait de négociations, de compromis, de controverses et de pressions, mais aussi de traductions pour que ces savoirs qui sont développés à la fois dans la science, dans la recherche scientifique, et dans le monde politique et dans la société en général, arrivent dans une transposition à travers les programmes, ce qu'on appelle les curricula, dans l'école, et pour qu'ensuite, évidemment, puisque ça ne suffit absolument pas, pour que les enseignants, eux, s'en emparent, et en fassent, eux, une pratique éducative et pédagogique, et ce que certains sociologues appellent les curricula en acte. Les premiers textes touchant à cette question écologique, on peut les dater de 2004. Donc on voit l'écart qui existe entre fin des années 60, début des années 70 et 2004. Donc on voit bien ces trois décennies. Mais voyez bien qu'il a fallu toute une maturation en amont. Et que derrière, ce n'est pas parce qu'en 2004, l'UNESCO a fait un texte et une déclaration que d'un seul coup, tout devient évident et limpide dans la conscience des prescripteurs et des pilotes de l'éducation, mais aussi dans les classes. Donc il faut bien tout un temps ensuite, à travers des circulaires, des programmes, etc., pour que ça devienne tangible dans les apprentissages. Le deuxième mot sera « agir ». Alors, une des choses qui est rappelée par Angela Barthes dans son texte en particulier, c'est la complexité des notions mobilisées. Et elle insiste bien, elle fait tout un tableau avec différents types de notions, en les catégorisant entre notions scientifiques, notions de débat public. Donc, notion scientifique, par exemple, elle prend, je ne sais pas, le réchauffement climatique, par exemple. Alors que si on parle d'anthropocène, ça va être une hypothèse scientifique. Il y a des controverses qui existent autour de cette notion-là. Et puis si on arrive sur développement durable, puisque dans l'école, ça s'est appelé, du côté des Nations Unies, les objectifs de développement durable, et pour l'Éducation nationale en France, l'éducation au développement durable, et on voit bien que déjà, entre les mots qu'on utilise, la référence que l'on peut faire est assez différente, et que l'école, en fait, parle d'éducation au développement durable et ne sort pas trop de cette notion-là. Et quand elle est confrontée à d'autres thématiques comme réchauffement climatique ou dégradation de la biodiversité ou l'anthropocène, elle est beaucoup moins à l'aise parce que les savoirs ne sont peut-être pas tout à fait suffisamment clairs, je ne dis pas qu'ils n'existent pas, mais suffisamment clairs et les controverses un peu atténuées, pour pouvoir les intégrer dans des programmes où on aime bien quand même avoir des formes de savoir un peu solides, quitte à ce qu'ils évoluent dans le temps, évidemment. Finalement, cette question de l'écologie ou de l'école écologique pourrait se traduire aussi sous la forme de questions socialement vives, parce que cette question socialement vive fait ce dialogue avec la société et la recherche, mais aussi souligne des formes d'incertitudes qu'il y aurait à répondre à cette problématique-là. C'est-à-dire que sur le développement durable, l'anthropocène, peu importe comment on l'appelle finalement, il n'y a pas qu'une seule bonne réponse, il n'y a pas qu'un savoir définitif, il n'y a pas qu'une seule approche possible. C'est une multiplicité des choses et certains auteurs de l'ouvrage soulignent à quel point il est important de mettre en place du côté des apprentissages, et on peut mesurer ce que ça peut vouloir dire en termes d'engagement et d'objets complexes à mettre en œuvre dans la classe, qui est l'éducation au doute, l'éducation au changement, c'est ce que Benoit Urgelli en particulier développe dans son texte, l'éducation à l'incertitude, comment aujourd'hui dans l'école on peut mettre en place une pédagogie qui relève d'une approche par l'incertitude, alors que l'école, justement, essaye de faire l'inverse, c'est de donner des savoirs un peu solides et certains, en tout cas jusqu'à un certain point, et qui rassurent aussi à la fois les élèves et ce qu'ils ont à apprendre, et non pas une incertitude qui ferait qu'on ne sait pas en fait ce qu'il faut savoir. Or que cette incertitude, vu la thématique du développement durable, et comment ça impacte nos vies, soit par procuration, quand on voit les événements, les incendies, les inondations, les cyclones, et j'en passe dans les médias et ce que l'on vit au quotidien, la pollution de l'air, ce genre de choses. On voit bien aussi que ça a un impact dans notre vie. Et du coup, ça engage aussi à avoir une réflexion sur là où on est, ce qu'on fait et ce qu'on a à faire ensemble. Et donc, ce que indique, en tout cas, et je repense au texte de Benoit Urgelli, mais ce n'est pas le seul, comment favoriser ces démarches d'enquêtes qui prennent en charge cette incertitude-là. Et on peut penser à des démarches de sciences participatives ou par rapport à la démarche qui est celle de l'enquête et de la participation. On va essayer de déterminer des savoirs ensemble et de se mettre d'accord, même si on n'y était pas forcément sur les mêmes types de compréhension au départ. On arrive à déceler des certitudes ensemble ou des compromis qu'on peut faire ensemble sur des savoirs. Le troisième mot sera le verbe « transformer », mais avec l'interrogation qui va avec. Alors, la question de l'ajustement ou de la transformation est une question, elle aussi, sacrément compliquée. Parce que, si je prends l'exemple de l'enseignement agricole, parce qu'il y a deux textes qui viennent du monde de l'enseignement agricole et donc du ministère de l'Agriculture, où on retrouve là encore des tensions dans ce qui est proposé aux élèves, donc aux lycéens qui apprennent un métier. Ce sont des endroits où on apprend des métiers. Ça ne veut pas dire qu'on n'ira pas dans l'enseignement supérieur, le BTS ou autre, après. Mais on apprend, c'est une dimension très professionnelle, mais qui est très liée aussi donc au monde économique. Et le monde agro ou agricole aujourd'hui, ou de l'agriculture aujourd'hui, financièrement en tout cas, est quand même dimensionné pour mesurer le poids du secteur agro-industriel, qui a des attendus en termes de productivité, d'efficacité, avec des formes intensives du travail et de la production. Voilà, là encore je vais dire ce qui pourrait relever d'une controverse en fait, qui est peut-être pas très respectueux de l'environnement, et qui néglige aussi d'autres formes peut-être alternatives de la production agricole, que ce soit l'élevage ou que ce soit le secteur céréalier, le betteravier ou les fruits et légumes, etc. Et donc quelque part on a une forme de compromis qui est parfois fait entre une industrie qui dit oui on va s'adapter, on va s'améliorer, on va moins polluer, on va respecter les sols, etc. Et puis des postures plus radicales, qui vont dire, non nous on arrête, on fait une agriculture pensée avec l'environnement, avec le respect des insectes, avec des haies, des choses bio, propres, etc. d e façon respectueuse de l'environnement en tout cas. Et donc on voit bien que les lycées agricoles sont à la convergence aussi de ces tensions-là et qu'il est parfois difficile de promouvoir telle forme sans se mettre à dos d'autres qui relèvent d'une autre forme d'économie. Et donc voilà, ce n'est pas du tout simple. Donc c'est vrai que c'est une question, s'adapter, c'est presque provocateur. C'est pour ça qu'il y a toujours un point d'interrogation dans les espèces d'alternatives que l'on pose dans les problématiques de la collection, parce qu'il n'y a pas de bonne réponse en fait. Il y a d'essayer de trouver des modalités pour que chacun s'y retrouve. Et dans un monde aujourd'hui où finalement la question écologique est embarquée dans des formes à la fois de contre-vérité, dans le monde politique dans lequel on est, si on observe ce qui se passe aux États-Unis, mais pas que aux États-Unis, on voit bien que la question écologique peut être prise comme une question de militantisme, comme une question de propagande, et que certains peuvent aussi réclamer des enseignants qu'ils se retirent de ces questions parce que trop politiques justement. Peut-être que c'est la preuve que ce sont des questions politiques, en leur demandant de rester dans une forme de neutralité, et donc en les soupçonnant d'être trop proches de formes de militantisme qu'on voit sur l'aménagement d'une nouvelle autoroute entre Toulouse et Castres, ou d'autres endroits, où cette question écologique se pose pleinement.

  • Speaker #0

    Vous venez d'écouter Le sens des mots. L'ouvrage dont il était question aujourd'hui, L'école écologique : s'ajuster ou transformer ? est à retrouver en version papier sur le site d'ENS Éditions et en librairie. Vous pouvez le trouver également en version numérique sur la plateforme OpenEdition Books.

  • Speaker #1

    C'était Le sens des mots. Ce podcast a été préparé par Sandrine Padilla et Maëlle Lopez. Au mixage et réalisation Sébastien Boudin. A bientôt pour une prochaine édition.

Description

L’éducation au développement durable (ce qu’on appelle couramment EDD) fait partie des missions de l’École inscrites dans le code de l’éducation. Sur le site du Ministère de l'éducation nationale, on peut d’ailleurs lire qu’il est pleinement mobilisé dans la lutte contre le changement climatique, et en faveur de la biodiversité. On y lit aussi que les élèves sont appelés à être des acteurs majeurs de la transition écologique, et que l’école doit être un lieu exemplaire de la protection de l'environnement. Transition écologique, urgence climatique, anthropocène, durabilité… Comment ces notions, ces questions, ont été introduites dans les programmes scolaires, et comment l'école s'empare ? Quelles sont les avancées depuis 20 ans ? Quels types de mesures concrètes sont déjà mises en place ou expérimentées et avec quels résultats ? Enfin, à quelles conditions les éducations environnementales peuvent-elles être transformatrices ?

Pour répondre à ces questions, nous recevons dans ce nouvel épisode du sens des mots Régis Guyon, qui codirige avec Hélène Buisson-Fenet la collection Entretiens Ferdinand Buisson. Il vient aujourd’hui nous parler du livre L'école écologique : s'ajuster ou transformer ?Il a choisi de nous en parler en 3 mots : école écologique, agir et transformer.

Vous entendez au début de cet épisode des extraits issus de :


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Vous écoutez Le sens des mots, un podcast des éditions de l'ENS de Lyon. Pour entendre la voix de nos auteurs, dépasser vos idées reçues sur la recherche et décrypter le monde qui nous entoure. Pour réussir la transition écologique, il faut une révolution de l'éducation. L'éducation a un rôle majeur à jouer dans cet enjeu fondamental qu'est le développement durable et la lutte contre le changement climatique. Les pesticides, ça va tuer les mauvais insectes, mais aussi les bons insectes, comme... Les abeilles, les papillons. C'est bien la manière de parler de l'avenir, de s'y projeter, qui se trouve engagée à travers cette éducation au changement climatique. L’éducation au développement durable (ce qu’on appelle couramment EDD) fait partie des missions de l’école inscrites dans le code de l’éducation. Sur le site du Ministère de l'éducation nationale, on peut d’ailleurs lire qu’il est pleinement mobilisé dans la lutte contre le changement climatique, et en faveur de la biodiversité. On y lit aussi que les élèves sont appelés à être des acteurs majeurs de la transition écologique, et que l’école doit être un lieu exemplaire de la protection de l'environnement. Transition écologique, urgence climatique, anthropocène, durabilité… Comment ces notions, ces questions, ont été introduites dans les programmes scolaires, et comment l'école s'empare ? Quelles sont les avancées depuis 20 ans ? Quels types de mesures concrètes sont déjà mises en place ou expérimentées et avec quels résultats ? Enfin, à quelles conditions les éducations environnementales peuvent-elles être transformatrices ? Pour répondre à ces questions, nous recevons dans ce nouvel épisode du Sens des mots Régis Guyon, qui codirige avec Hélène Buisson-Fenet la collection Entretiens Ferdinand Buisson. Il vient aujourd’hui nous parler du livre L'école écologique : s'ajuster ou transformer ? Il a choisi de nous en parler en 3 mots : école écologique, agir et transformer.

  • Régis Guyon

    Alors, école écologique, moi ça me fait d'abord penser à la question de comment cette question de l'écologie est entrée ou s'est immiscée dans la question scolaire, ou dans l'école, dans les bâtiments. Et comme souvent, quand une problématique se développe dans la société, dans le débat public, il y a toujours un décalage, un temps plus ou moins long, ça dépend des thématiques, entre ce qui se joue dans ce débat-là et dans la société, et son arrivée dans l'école. Ça peut prendre plusieurs dizaines d'années. Et sur la question écologique, on va dire, si on fait remonter cette prise de conscience de la nécessité de se projeter, dans la question écologique, au début des années 70, et on pense aux travaux de Serge Moscovici en particulier et son livre de 1972, on peut dire que ça a mis une trentaine d'années à peu près à s'installer dans l'école parce qu'il a fallu tout un processus qui est plus ou moins long, mais là on peut le donner trois décennies, qui est fait de négociations, de compromis, de controverses et de pressions, mais aussi de traductions pour que ces savoirs qui sont développés à la fois dans la science, dans la recherche scientifique, et dans le monde politique et dans la société en général, arrivent dans une transposition à travers les programmes, ce qu'on appelle les curricula, dans l'école, et pour qu'ensuite, évidemment, puisque ça ne suffit absolument pas, pour que les enseignants, eux, s'en emparent, et en fassent, eux, une pratique éducative et pédagogique, et ce que certains sociologues appellent les curricula en acte. Les premiers textes touchant à cette question écologique, on peut les dater de 2004. Donc on voit l'écart qui existe entre fin des années 60, début des années 70 et 2004. Donc on voit bien ces trois décennies. Mais voyez bien qu'il a fallu toute une maturation en amont. Et que derrière, ce n'est pas parce qu'en 2004, l'UNESCO a fait un texte et une déclaration que d'un seul coup, tout devient évident et limpide dans la conscience des prescripteurs et des pilotes de l'éducation, mais aussi dans les classes. Donc il faut bien tout un temps ensuite, à travers des circulaires, des programmes, etc., pour que ça devienne tangible dans les apprentissages. Le deuxième mot sera « agir ». Alors, une des choses qui est rappelée par Angela Barthes dans son texte en particulier, c'est la complexité des notions mobilisées. Et elle insiste bien, elle fait tout un tableau avec différents types de notions, en les catégorisant entre notions scientifiques, notions de débat public. Donc, notion scientifique, par exemple, elle prend, je ne sais pas, le réchauffement climatique, par exemple. Alors que si on parle d'anthropocène, ça va être une hypothèse scientifique. Il y a des controverses qui existent autour de cette notion-là. Et puis si on arrive sur développement durable, puisque dans l'école, ça s'est appelé, du côté des Nations Unies, les objectifs de développement durable, et pour l'Éducation nationale en France, l'éducation au développement durable, et on voit bien que déjà, entre les mots qu'on utilise, la référence que l'on peut faire est assez différente, et que l'école, en fait, parle d'éducation au développement durable et ne sort pas trop de cette notion-là. Et quand elle est confrontée à d'autres thématiques comme réchauffement climatique ou dégradation de la biodiversité ou l'anthropocène, elle est beaucoup moins à l'aise parce que les savoirs ne sont peut-être pas tout à fait suffisamment clairs, je ne dis pas qu'ils n'existent pas, mais suffisamment clairs et les controverses un peu atténuées, pour pouvoir les intégrer dans des programmes où on aime bien quand même avoir des formes de savoir un peu solides, quitte à ce qu'ils évoluent dans le temps, évidemment. Finalement, cette question de l'écologie ou de l'école écologique pourrait se traduire aussi sous la forme de questions socialement vives, parce que cette question socialement vive fait ce dialogue avec la société et la recherche, mais aussi souligne des formes d'incertitudes qu'il y aurait à répondre à cette problématique-là. C'est-à-dire que sur le développement durable, l'anthropocène, peu importe comment on l'appelle finalement, il n'y a pas qu'une seule bonne réponse, il n'y a pas qu'un savoir définitif, il n'y a pas qu'une seule approche possible. C'est une multiplicité des choses et certains auteurs de l'ouvrage soulignent à quel point il est important de mettre en place du côté des apprentissages, et on peut mesurer ce que ça peut vouloir dire en termes d'engagement et d'objets complexes à mettre en œuvre dans la classe, qui est l'éducation au doute, l'éducation au changement, c'est ce que Benoit Urgelli en particulier développe dans son texte, l'éducation à l'incertitude, comment aujourd'hui dans l'école on peut mettre en place une pédagogie qui relève d'une approche par l'incertitude, alors que l'école, justement, essaye de faire l'inverse, c'est de donner des savoirs un peu solides et certains, en tout cas jusqu'à un certain point, et qui rassurent aussi à la fois les élèves et ce qu'ils ont à apprendre, et non pas une incertitude qui ferait qu'on ne sait pas en fait ce qu'il faut savoir. Or que cette incertitude, vu la thématique du développement durable, et comment ça impacte nos vies, soit par procuration, quand on voit les événements, les incendies, les inondations, les cyclones, et j'en passe dans les médias et ce que l'on vit au quotidien, la pollution de l'air, ce genre de choses. On voit bien aussi que ça a un impact dans notre vie. Et du coup, ça engage aussi à avoir une réflexion sur là où on est, ce qu'on fait et ce qu'on a à faire ensemble. Et donc, ce que indique, en tout cas, et je repense au texte de Benoit Urgelli, mais ce n'est pas le seul, comment favoriser ces démarches d'enquêtes qui prennent en charge cette incertitude-là. Et on peut penser à des démarches de sciences participatives ou par rapport à la démarche qui est celle de l'enquête et de la participation. On va essayer de déterminer des savoirs ensemble et de se mettre d'accord, même si on n'y était pas forcément sur les mêmes types de compréhension au départ. On arrive à déceler des certitudes ensemble ou des compromis qu'on peut faire ensemble sur des savoirs. Le troisième mot sera le verbe « transformer », mais avec l'interrogation qui va avec. Alors, la question de l'ajustement ou de la transformation est une question, elle aussi, sacrément compliquée. Parce que, si je prends l'exemple de l'enseignement agricole, parce qu'il y a deux textes qui viennent du monde de l'enseignement agricole et donc du ministère de l'Agriculture, où on retrouve là encore des tensions dans ce qui est proposé aux élèves, donc aux lycéens qui apprennent un métier. Ce sont des endroits où on apprend des métiers. Ça ne veut pas dire qu'on n'ira pas dans l'enseignement supérieur, le BTS ou autre, après. Mais on apprend, c'est une dimension très professionnelle, mais qui est très liée aussi donc au monde économique. Et le monde agro ou agricole aujourd'hui, ou de l'agriculture aujourd'hui, financièrement en tout cas, est quand même dimensionné pour mesurer le poids du secteur agro-industriel, qui a des attendus en termes de productivité, d'efficacité, avec des formes intensives du travail et de la production. Voilà, là encore je vais dire ce qui pourrait relever d'une controverse en fait, qui est peut-être pas très respectueux de l'environnement, et qui néglige aussi d'autres formes peut-être alternatives de la production agricole, que ce soit l'élevage ou que ce soit le secteur céréalier, le betteravier ou les fruits et légumes, etc. Et donc quelque part on a une forme de compromis qui est parfois fait entre une industrie qui dit oui on va s'adapter, on va s'améliorer, on va moins polluer, on va respecter les sols, etc. Et puis des postures plus radicales, qui vont dire, non nous on arrête, on fait une agriculture pensée avec l'environnement, avec le respect des insectes, avec des haies, des choses bio, propres, etc. d e façon respectueuse de l'environnement en tout cas. Et donc on voit bien que les lycées agricoles sont à la convergence aussi de ces tensions-là et qu'il est parfois difficile de promouvoir telle forme sans se mettre à dos d'autres qui relèvent d'une autre forme d'économie. Et donc voilà, ce n'est pas du tout simple. Donc c'est vrai que c'est une question, s'adapter, c'est presque provocateur. C'est pour ça qu'il y a toujours un point d'interrogation dans les espèces d'alternatives que l'on pose dans les problématiques de la collection, parce qu'il n'y a pas de bonne réponse en fait. Il y a d'essayer de trouver des modalités pour que chacun s'y retrouve. Et dans un monde aujourd'hui où finalement la question écologique est embarquée dans des formes à la fois de contre-vérité, dans le monde politique dans lequel on est, si on observe ce qui se passe aux États-Unis, mais pas que aux États-Unis, on voit bien que la question écologique peut être prise comme une question de militantisme, comme une question de propagande, et que certains peuvent aussi réclamer des enseignants qu'ils se retirent de ces questions parce que trop politiques justement. Peut-être que c'est la preuve que ce sont des questions politiques, en leur demandant de rester dans une forme de neutralité, et donc en les soupçonnant d'être trop proches de formes de militantisme qu'on voit sur l'aménagement d'une nouvelle autoroute entre Toulouse et Castres, ou d'autres endroits, où cette question écologique se pose pleinement.

  • Speaker #0

    Vous venez d'écouter Le sens des mots. L'ouvrage dont il était question aujourd'hui, L'école écologique : s'ajuster ou transformer ? est à retrouver en version papier sur le site d'ENS Éditions et en librairie. Vous pouvez le trouver également en version numérique sur la plateforme OpenEdition Books.

  • Speaker #1

    C'était Le sens des mots. Ce podcast a été préparé par Sandrine Padilla et Maëlle Lopez. Au mixage et réalisation Sébastien Boudin. A bientôt pour une prochaine édition.

Share

Embed

You may also like

undefined cover
undefined cover