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Médecin qui es-tu?

#18. La migraine chez l'enfant.

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21min |05/07/2024
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#18. La migraine chez l'enfant.

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Description

Le Docteur Berciaud Sylvie, responsable du Centre d'évaluation et du traitement de la douleur pédiatrique du CHU de Bordeaux, nous aide à mieux comprendre la migraine chez l'enfant.👶

Les symptômes peuvent être trompeurs, et les critères pour le diagnostique sont trés précis!

Quels sont les traitements? Médicamenteux? Non médicamenteux?

Peut-on introduire un traitement de fond?

Un enfant migraineux deviendra-t-il un adulte migraineux?

Le Dr Berciaud nous répond et explique avec la pédagogie que l'on connait des pédiatres. Parfaite!

Merci!


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Maxime

    Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode de Médecins qui est tu?, un épisode focus aujourd'hui sur la migraine chez l'enfant. On fait ça avec docteur Sylvie Berciaud. Bonjour Sylvie. Bonjour. Tu es responsable du Centre d'évaluation et du traitement de la douleur pédiatrique au CHU de Bordeaux. Et tu vas nous venir en aide aujourd'hui pour parler de la migraine chez l'enfant, qui est une pathologie parfois difficile. On va notamment faire la comparaison avec la présentation migraineuse de l'adulte, parce qu'il y a plein de petites subtilités. qui peuvent parfois nous amener à passer à côté du diagnostic. Donc merci d'être ici. Qu'est-ce qu'une migraine déjà ? Et comment on peut la déceler chez un enfant ?

  • Dr Berciaud

    Alors la migraine, c'est un mal de tête qui est très intense, qui est souvent accompagné, et donc dans sa définition ça en fait partie, de symptômes associés comme des nausées, des vomissements, le bruit ou la lumière qui gêne, la photophonophobie. qui empêche l'enfant d'avoir ses activités, c'est-à-dire quand la crise est tellement intense que l'enfant doit s'arrêter, il ne peut pas continuer. Donc pour la différencier des petits maux de tête habituels, il suffit de demander à l'enfant quand il se plaint de céphalée, de maux de tête, c'est est-ce que tu as des gros maux de tête qui t'empêchent de faire les choses? Et est-ce que sinon des fois il y a des petits maux de tête? Et ce gros maux de tête-là, c'est cette fameuse migraine.

  • Maxime

    D'accord. On va discuter de la différence avec la présentation de la migraine avec l'adulte. Mais la migraine appartient à ce qu'on appelle les céphalées, donc une grande case qui veut dire maux de tête. Et qui dit mot de tête dit d'abord écarter ce qui est grave. Est-ce que tu peux nous citer les critères ou les symptômes qui doivent amener à une consultation en urgence notamment ?

  • Dr Berciaud

    La céphalée, effectivement, est un message d'alerte pour plein de symptômes différents. Les choses qui doivent, en tout cas, alerter, c'est une céphalée extrêmement intense, avec un enfant qui serait complètement prostré, pour lequel une prise d'un premier antalgique simple n'aurait strictement aucun effet, qui arrive chez un enfant qui n'a pas de mécanisme. Pas l'habitude d'avoir des maux de tête vraiment très inaugurals. Ça, ça va nécessiter effectivement une première consultation. Ensuite, si cette céphalée est accompagnée de symptômes neurologiques, comme avoir du mal à parler, à bouger un membre, ou un enfant qui est extrêmement confus et qui reste confus sur plusieurs minutes, ça aussi, ça va nécessiter effectivement de consulter en urgence. Donc la céphalée avec fièvre ne nécessite pas forcément une consultation en urgence. C'est vrai que souvent il y a en arrière-pensée les méningites, mais ça dépend de l'état général de l'enfant, mais ça peut nécessiter une consultation déjà chez le médecin traitant, dans un délai semi-urgent, mais pas forcément aux urgences. À d'autres céphalées plus intenses.

  • Maxime

    Dans tous les cas, au moindre doute ?

  • Dr Berciaud

    Il faut consulter.

  • Maxime

    Ok. Alors, la présentation de la migraine chez l'enfant... hyper particulière, avec parfois des diagnostics qui ne sont pas faits parce que la présentation est vraiment atypique. On a choisi de faire une petite comparaison entre la migraine chez l'adulte et la migraine chez l'enfant. Notamment, pourquoi ? Parce qu'un enfant peut ne pas avoir de plainte au niveau de la tête, et c'est pour autant une migraine. Donc on va faire le point. Présentation très rapide de la migraine chez l'adulte. J'avais déjà fait le point avec le côté psychiatrie où il faut parfois 3, 4 éléments sur 5 pour rentrer dans une pathologie. Dans la migraine, c'est un peu pareil. Il faut par exemple avoir 5 crises répondant à différents critères. Ces critères, c'est par exemple une crise de 4 à 72 heures, une céphalée de 4 à 72 heures. Une céphalée qui a, cette fois-ci encore, deux des caractéristiques suivants, unilatéral, pulsatile, modéré ou sévère, c'est-à-dire qu'il y a un critère d'intensité. et une aggravation, comme tu le disais, avec une activité physique de routine ou par exemple une montée ou descente d'escalier. Et puis, encore un quatrième item dans la façon de procéder au diagnostic, c'est les céphalées qui doivent être accompagnées soit de nausées ou vomissements, soit de phonophotophobie, c'est-à-dire être gênées par la lumière ou par le bruit. Ok, ça c'est côté adulte. On va reprendre un peu tranquillement pour la partie pédiatrique. Il y a des items communs.

  • Dr Berciaud

    Oui, il y a des items communs. Il y en a qui diffèrent un peu. Donc, il y a effectivement un critère de répétition. Donc, il faut effectivement cinq crises à peu près identiques. Donc, parler de migraine, théoriquement, c'est un enfant qui a déjà eu au moins cinq épisodes d'une céphalie identique. Après, des fois, dès le premier épisode, on fait une suspicion de migraine. Mais pour affirmer ce diagnostic chez l'enfant, il faut aussi 5 épisodes. Il y a un critère de durée. Chez l'enfant, la crise peut être un peu plus courte, 2 à 72 heures. Il y a le critère de localisation stricto sensu, effectivement unilatérale. Chez l'enfant, ça peut être bilatéral, beaucoup plus fréquemment d'ailleurs. Et donc ce caractère uni ou bilatéral est moins prépondérant.

  • Maxime

    Chez l'adulte, c'est a bascule. Parfois à droite, parfois à gauche. Et chez l'enfant, c'est l'ensemble de la tête qui est douloureuse.

  • Dr Berciaud

    Exactement, ça peut être l'ensemble de la tête, mais ça peut aussi être qu'un côté, le gauche ou le droit, parfois toujours du même, parfois d'un côté ou de l'autre.

  • Maxime

    Le critère d'intensité ?

  • Dr Berciaud

    L'intensité, c'est le même critère. Donc modéré, sévère, ça veut dire que c'est une crise qui est intense.

  • Maxime

    Ok, critère pulsatile ?

  • Dr Berciaud

    Le critère pulsatile existe effectivement chez l'enfant. La difficulté, c'est que l'enfant ne va pas le verbaliser comme ça très facilement. Donc très souvent, on peut retenir un critère de migraine alors que l'enfant va définir un mot de tête plutôt à type de pression, de pesanteur. Le caractère pulsatile arrive plus tard quand c'est des grands enfants.

  • Maxime

    Aggravation lors de l'activité ?

  • Dr Berciaud

    Tout à fait,

  • Maxime

    c'est la même. Et nausées, vomissements ?

  • Dr Berciaud

    Nausées, vomissements font partie des critères. Tout comme la photo ou phonophobie, qui sont aussi présentes chez les enfants. Alors, spontanément, ils ne vont peut-être pas le dire. Donc, il faut savoir le questionner sans trop le suggérer non plus. Donc, leur demander s'il y a d'autres symptômes en même temps qu'ils ont mal à la tête. Est-ce qu'il y a d'autres choses qui les gênent ou qui les embêtent ? Et très spontanément, ils vont pouvoir dérouler.

  • Maxime

    D'accord. Il y a des symptômes particuliers qui sont hors céphalées, justement, hors maux de tête. Est-ce que tu peux nous les citer ? Oui. En fonction de quel âge, notamment, par exemple ?

  • Dr Berciaud

    Tout à fait, c'est en fonction de l'âge de l'enfant. Plus l'enfant va être jeune, plus les symptômes migraineux peuvent être un petit peu plus à bas bruit, c'est-à-dire que le mot de tête ne va pas être en première intention. Il y a notamment ce qu'on appelle les migraines abdominales chez l'enfant, avec des enfants qui vont présenter des crises répétitives de douleurs abdominales, avec prostration, nausées, vomissements, mais pas de plaintes céphalalgiques. Et en fait, ce sont des équivalents migraineux du tout petit. Tout comme peuvent... l'être, des douleurs abdominales intenses sans forcément qu'il y ait des vomissements mais de façon récurrente qui reviennent par crise et ces enfants en grandissant souvent finissent par évoluer vers une migraine un peu plus typique avec cette plainte de céphalée donc c'est souvent chez les petits enfants ça peut apparaître dès les nourrissons donc moins de deux ans et plus l'enfant va grandir, plus il va arriver vers l'âge élémentaire à peu près vers six ans plus la plainte de céphalée va pouvoir être présente ceci dit, des enfants de quatre ans peuvent se plaindre de céphalée aussi et

  • Maxime

    Est-ce qu'on arrive à faire le diagnostic de migraine à ce petit âge ou c'est plutôt à postériori ?

  • Dr Berciaud

    Souvent c'est à postériori. C'est en voyant des adolescents ou des plus grands enfants migraineux. Quand on interroge, on se rend compte qu'il y avait ces crises, parfois communément appelées crises d'acétone, avec des vomissements, douleurs abdominales, qui en fait étaient des équivalents migraineux. Et puis parfois, quand le médecin qui voit l'enfant connaît cette entité, ça peut être diagnostiqué beaucoup plus tôt.

  • Maxime

    D'accord. C'est vrai que le primabord... On part plutôt sur une pathologie abdominale digestive. C'est assez particulier. Mais il y a ce critère de temps, tout ce qu'on disait tout à l'heure, 4 à 72 heures. Il y a ces critères qui sont déjà là, même si c'est une plainte abdominale ?

  • Dr Berciaud

    Alors, ces critères sont là aussi. La durée de la crise, oui, c'est 2 en l'occurrence pour l'enfant à 72 heures. Mais effectivement, les autres critères peuvent être présents. Et il y a cette répétition des crises aussi qui est importante. l'impact aussi sur l'enfant.

  • Maxime

    D'accord. Pour parler de cette répétition, première crise, qu'est-ce qu'on réalise chez une première crise migraineuse chez un enfant ?

  • Dr Berciaud

    Première crise de céphalie intense chez un enfant qui aurait les caractéristiques migraineuses, qui ne rentre pas encore dans la case de migraine, parce qu'il n'y a pas eu assez de crise, mais qui a tous les autres critères, la photophonophobie, nausée ou vomissement et céphalie intense. Effectivement, il y a... Pas de nécessité à faire forcément des examens complémentaires très importants. C'est vrai qu'on a toujours l'épée de Damoclès de se dire, est-ce qu'on passe à côté d'autre chose, d'une cause d'une céphalée secondaire, c'est-à-dire qui ne serait pas liée à la migraine, mais sur une première crise très intense, un examen neurologique au décours normal, un enfant qui a un développement psychomoteur normal, qui a un examen clinique rassurant et un mot de tête qui répond bien au paracétamol et ibuprofène, plus volontiers on en parlera, mais plutôt l'ibuprofène. Eh bien, on n'a pas de nécessité de faire une imagerie cérébrale en urgence. Il n'y a pas de nécessité de faire de bilan sanguin. La migraine, c'est un diagnostic qui est vraiment clinique. Et donc, finalement, on n'a pas besoin d'examen complémentaire pour faire un diagnostic de migraine.

  • Maxime

    D'accord. On va parler d'évolution et après, on parlera de traitement. Mais est-ce qu'un enfant migraineux évolue vers un adulte migraineux ?

  • Dr Berciaud

    C'est une bonne question. Alors, il y a... Effectivement, la migraine chez l'enfant, ça reste assez fréquent. Il y a quand même 15% des adolescents qui vont être migraineux. Ils ne vont pas forcément tous évoluer migraineux à l'âge adulte, ces enfants. Cette évolution, elle est très individuelle. Il n'y a pas de facteur vraiment très identifiable pour prédire à un enfant s'il sera migraineux ou pas à l'âge adulte. L'intérêt, c'est d'avoir identifié précocement. La migraine, pour que l'enfant sache ce qu'il a, puisse reconnaître comment agir dessus, et mieux on connaît ce qu'on a, mieux on agit dessus, et plus on a de chance que plus tard ça évolue bien et qu'il n'y ait peu ou pas de crise à l'âge adulte.

  • Maxime

    Une notion importante de maîtrise de sa pathologie et de ses traitements pour que derrière il y ait moins une installation néfaste de la pathologie. On connaît un peu l'explication de la migraine, de comment elle s'installe, pourquoi elle arrive chez un enfant ou un adulte d'ailleurs ?

  • Dr Berciaud

    Alors, il y a des facteurs déclenchants qui sont multifactoriels. Justement, ça entretient un peu le flou sur d'où ça vient, pourquoi c'est là, qu'est-ce que c'est. Donc, il y a des facteurs déclenchants qui surviennent dans un contexte fragilisé. C'est-à-dire qu'il y a une hérédité de la migraine. Souvent, on retrouve des cas, des antécédents familiaux de personnes migraineuses. Donc, il y a un terrain migraineux familial, souvent. et par-dessus viennent se greffer des facteurs déclenchants. C'est vraiment ce qui vient appuyer sur la gâchette et déclencher la crise. Donc ça peut être la fatigue, ça peut être d'avoir pas assez bu, ça peut être la chaleur, le soleil, la lumière, le bruit. Ils sont très individuels, donc il y a tout ce qui est facteur, on dit extérieur, que je vous ai un petit peu cité là, et puis il y a tout ce qui est facteur intrinsèque, et donc ça va être la fatigue, le stress. L'anxiété, la concentration, les émotions en général, elles peuvent être positives et déclencher une crise de migraine, être très excité d'aller à un anniversaire, et les enfants font parfois des crises de migraine.

  • Maxime

    Même le sommeil, l'hyper-sommeil.

  • Dr Berciaud

    L'hyper-sommeil, exactement. Dormir trop, faire une très grande grasse matinée pour des adolescents sur un week-end, et boum, ça peut déclencher une crise derrière. Ou à l'inverse, le manque de sommeil, mais ça, ça paraissait plus logique pour les gens. Donc il y a tous ces facteurs environnementaux, extérieurs et intrinsèques. qui vont venir, dans certaines circonstances, déclencher la crise. Mais ce n'est pas toujours reproductible. C'est ça qui, des fois, peut être un peu perturbant, parce que dans une situation égale, parfois il va faire la crise, parfois il ne va pas la faire. Donc il y a ce côté un petit peu aléatoire malgré tout.

  • Maxime

    Ok. On va parler des traitements. Alors, est-ce qu'une migraine peut être traitée par un médecin traitant ? Est-ce qu'il peut gérer tout ça ?

  • Dr Berciaud

    Bien sûr, tout à fait. Oui, c'est d'ailleurs le premier médecin qui est en première ligne et qui voit ses enfants migraineux. Donc oui, ça peut tout à fait être traité par un médecin traitant, et ça doit l'être d'ailleurs, et du coup, il faut identifier la crise de migraine, et à partir du moment où c'est identifié, il y a vraiment des choses très simples et basiques à respecter. Quand la crise commence, on a repéré que c'était une crise de migraine, on met l'enfant au calme. On lui propose de se mettre un petit peu au repos et précocement, on donne le traitement. Ça, c'est vraiment quelque chose qui est important, c'est-à-dire qu'il faut prendre le traitement dans la première demi-heure, première heure idéalement. Un traitement qui est pris deux ou trois heures après, la crise est installée et peut ne pas du tout marcher, alors que le même traitement peut parfaitement marcher s'il est pris précocement.

  • Maxime

    Pour casser la crise.

  • Dr Berciaud

    Pour casser la crise. Moi, tout le temps, je fais la comparaison avec l'eau qui bout dans la casserole. Si on éteint tout de suite le feu, ça ne va pas déborder et puis ça va vite rentrer dans l'ordre. Et puis, si on se rend compte un peu trop tard et qu'on arrive après... On met plus de temps à tout ranger. D'accord. C'est un peu pareil.

  • Maxime

    Ok. D'ailleurs, mais ça, ça va être fonction du diagnostic qui est réalisé plus facilement plus tard. Mais on n'en a pas parlé, mais il y a un pic de prévalence de la migraine chez l'enfant.

  • Dr Berciaud

    Le moment où c'est le plus fréquent, c'est effectivement chez les adolescents. Donc 15 à 30% des adolescents qui sont migraineux.

  • Maxime

    C'est par un biais de diagnostic peut-être ?

  • Dr Berciaud

    Il y a souvent un biais de diagnostic chez le tout petit. Mais ça reste effectivement quelque chose de très fréquent. En consultation de douleur, c'est quasiment la moitié des patients qu'on voit pour des céphalées. Alors il y a les migraines et puis des fois il y a les plus petits motettes, les céphalées de tension. Mais la migraine est un des diagnostics principaux qu'on a en consultation de douleur.

  • Maxime

    D'accord. On poursuit sur le traitement. Oui, exactement. Traitement médicamenteux de première intention ou pas ?

  • Dr Berciaud

    Alors quand la crise est là, sur la crise, oui, souvent, il va y avoir besoin d'un traitement médicamenteux pour la crise de migraine. Alors vraiment, le chef de file, c'est les anti-inflammatoires non stéroïdiens. Et c'est vraiment l'ibuprofène qu'il faut donner à bonne dose. Donc c'est 10 mg par kilo. Donc ça veut dire que des enfants qui vont faire 40 kg, par exemple, peuvent prendre des comprimés comme les adultes à 400 mg. Ce qui parfois freine un petit peu la prescription. On a tendance à sous-doser ces enfants qui font 40 kg et qui ont peut-être une dizaine d'années, et on leur donne 200 mg. Non, c'est bien 10 mg par kilo, 400 mg donc au maximum, ou en solution buvable en dose poids, là c'est plus simple. Et donc donner précocement, dès le début de la crise. Associer à des mesures physiques, souvent mettre un peu de frais sur le front, parfois il peut y avoir des huiles essentielles, mais ça, il faut interroger l'enfant sur ce qui lui fait du bien. s'il se mettre au repos fait du bien et il met du froid très bien, si c'est d'écouter une musique, on peut le laisser écouter une musique. Il n'y a pas forcément besoin de le mettre dans le silence si finalement un environnement musical lui fait du bien.

  • Maxime

    Est-ce qu'on couvre avec un protecteur gastrique ?

  • Dr Berciaud

    Pas forcément. Quand c'est vraiment en prise unique comme ça et peu fréquente, ça peut être très bien toléré. Parfois, certains enfants vont nous dire qu'effectivement, à la prise du médicament, ils vont avoir des brûlures d'estomac. Et dans ces cas-là, on met un protecteur gastrique associé.

  • Maxime

    D'accord. Et c'est important de mettre d'emblée la bonne posologie, parce que derrière, il peut y avoir une reprise médicamenteuse qui entraîne un mésusage. On en parlera tout à l'heure peut-être. Mais ne pas avoir peur de la première prise pour casser encore une fois cette crise et ne pas amener un crescendo sur la prise médicamenteuse. Ok. Après l'ibuprofène, qu'est-ce qu'on fait si ça ne fonctionne pas ?

  • Dr Berciaud

    Alors, quand on est chez un enfant de moins de 12 ans, moins de 30 kilos, on peut éventuellement proposer une dose d'à peu près une heure après le temps d'action, quand même une demi-heure, une heure après, de paracétamol. Ça, c'est possible. Alors, on donne 15 mg par kilo. Et chez l'enfant de plus de 12 ans ou 30 kilos, on peut utiliser l'autre famille de médicaments qu'on donne dans la migraine, notamment dans le traitement de crise. La famille des triptans, et c'est le sumatriptan, c'est un spray qui se fait en spray nasal. Et on peut le donner chez l'enfant. Donc il y a deux dosages, il y a 10 mg et puis il y a 20 mg. On commence d'abord par le 10 mg et puis si le 10 n'est pas suffisant, sur les crises ultérieures, on peut proposer le 20.

  • Maxime

    Il vient après la prise ibuprofène ?

  • Dr Berciaud

    Généralement, on le propose d'abord en seconde intention. Et chez les enfants qui nous répondent qu'ils ont systématiquement besoin de le prendre, on peut parfois le donner en première intention.

  • Maxime

    Est-ce que chez l'adulte, on peut proposer INS plus triptan d'emblée ? Est-ce que chez l'enfant, c'est pareil ?

  • Dr Berciaud

    Ça peut se faire si l'enfant nous dit que, quel que soit l'ordre, c'est-à-dire anti-inflammatoire non stéroïdien puis triptan, ou triptan puis anti-inflammatoire, il y a quand même besoin des deux. Dans ces cas-là, on peut être amené à proposer à prendre les deux d'emblée.

  • Maxime

    D'accord. Sumatriptan prescrit par ?

  • Dr Berciaud

    Tout le monde. Médecin traitant peut prescrire, médecin pédiatre, structure douleur, tout médecin est habilité à pouvoir prescrire le sumatriptan. Ça a l'autorisation, qu'on dit là et même, l'autorisation d'utilisation de mise sur marché dès 12 ans. Donc il n'y a pas de souci là-dessus.

  • Maxime

    Les posologies, parce qu'il y a la case de mésusage médicamenteux, beaucoup côté migraine. Quelle est la prise médicamenteuse maximale de l'INS et des triptans ?

  • Dr Berciaud

    On essaie de dire pas plus de trois prises médicamenteuses au total, maximum par semaine. Si on en est à ça, il faut quand même reconsulter si ça fait trois ou quatre mois que l'enfant prend trois fois par semaine des traitements anti-inflammatoires ou des triptans. Ce qui est important, c'est de préciser que c'est des prises médicamenteuses, c'est-à-dire que ce n'est pas trois fois des INS, trois fois des triptans, parce que parfois ça peut être un peu confondu. Et l'idée, c'est que comme chez l'adulte, l'enfant peut avoir des céphalées de mésusage médicamenteux, c'est-à-dire que de trop consommer de médicaments peut... finalement aussi entraîner des céphalées et s'associer aux céphalées migraineuses. C'est vraiment important d'identifier la bonne dose à la bonne fréquence et de le préciser sur les prescriptions.

  • Maxime

    Ok. Et donc, on introduit comme ça le traitement de fond s'il y en a un côté pédiatrie, puisque, en tout cas, tu vas me dire, mais côté adulte, le traitement de fond s'envisage s'il y a un excès de prix de médicamentes ou une altération sur la qualité de vie. Est-ce que ce sont les mêmes critères côté pédiatrie ?

  • Dr Berciaud

    Oui, alors chez l'enfant, globalement, il y a effectivement une notion de traitement de fonds. Alors, il faut savoir que c'est un petit peu différent de chez l'adulte, parce que les études chez l'enfant ont finalement montré peu d'efficacité des traitements de fonds médicamenteux. Donc, en fait, le premier traitement de fonds à proposer chez un enfant, et finalement, ça peut se proposer parfois, quelle que soit la fréquence des crises, c'est plutôt quand les crises ont commencé à avoir un impact sur le quotidien. On va plutôt jauger là-dessus. On va proposer des apprentissages de techniques psychocorporelles. Alors qu'est-ce que c'est que ces techniques psychocorporelles ? Ça va être des techniques pour apprendre à l'enfant à mieux gérer sa crise de migraine, mieux la ressentir, mieux gérer la fatigabilité, le stress du quotidien, comme de la relaxation, de la sophrologie, il y a les thérapies cognitivo-comportementales, il y a l'hypnose également. Et donc c'est plutôt ces techniques-là qu'on va utiliser.

  • Maxime

    Efficacité démontrée ?

  • Dr Berciaud

    Avec une efficacité démontrée, parfois même supérieure à des traitements médicamenteux. Après, dans certaines situations... Ces traitements médicamenteux peuvent être utilisés, mais là, ça va demander par contre l'avis d'une structure douleur ou neuropédiatrique, parce que vraiment, ce n'est pas du tout la première intention. Ça vient tout à fait en deuxième ligne.

  • Maxime

    Bétabloquant comme chez l'adulte ? Envisageable ?

  • Dr Berciaud

    Alors, les traitements de fond médicamenteux chez l'enfant... peut potentiellement utiliser, et encore une fois, c'est sans vraiment preuve dans la littérature, ça peut être effectivement les bêtas bloquants, et ça peut être sinon la famille des antidépresseurs tricycliques, telles que la mitryptiline, effectivement.

  • Maxime

    Ok. Mais finalement, même toi, en structure douleur, tu les manipules ou pas ?

  • Dr Berciaud

    Alors, on les manipule dans certains cas. On les manipule vraiment quand on arrive en seconde ligne, c'est-à-dire que... On a optimisé tous les facteurs déclenchants, identifié, on a mis des prises en charge globales, physiques, psychocorporelles. Et si malgré cela, ça reste compliqué, et notamment dans les cas de surconsommation médicamenteuse, pour arriver à faire ce qu'on appelle un sevrage médicamenteux. Ça peut paraître paradoxal, mais des fois, on a besoin de mettre un peu de traitement de fond pour pouvoir baisser les traitements de crise, passer un cap. Et puis ensuite, c'est un traitement qui, quand il est mis en place, est très régulièrement réévalué. Et donc, on essaie toujours de l'arrêter.

  • Maxime

    Ces enfants, ils ont quel avenir côté migraine ? Est-ce qu'ils vont être envoyés au centre de la douleur côté adulte ?

  • Dr Berciaud

    Alors, on essaie dans nos missions de les autonomiser, de faire en sorte que ça n'impacte plus leur vie et que ça reste... très peu fréquent voir que ça s'arrête complètement et donc de ne pas avoir à les passer en structure adulte. Mais effectivement, il y a des fois, ça persiste où il y a un besoin ressenti de garder un suivi pluriprofessionnel. Et donc, on peut effectivement parfois faire des réunions de transition où on présente des jeunes adultes, du coup, en structure douleur adulte pour que le suivi puisse poursuivre. Donc, ça peut arriver effectivement.

  • Maxime

    Ok. Sylvie merci beaucoup c'était très très clair et à bientôt pour de nouveaux épisodes merci beaucoup merci à toi voilà c'était un épisode de médecins qui étudient merci d'avoir écouté je vous invite à vous abonner en cliquant sur la petite clochette comme ça vous serez avertis de la sortie de nouveaux épisodes à bientôt

Description

Le Docteur Berciaud Sylvie, responsable du Centre d'évaluation et du traitement de la douleur pédiatrique du CHU de Bordeaux, nous aide à mieux comprendre la migraine chez l'enfant.👶

Les symptômes peuvent être trompeurs, et les critères pour le diagnostique sont trés précis!

Quels sont les traitements? Médicamenteux? Non médicamenteux?

Peut-on introduire un traitement de fond?

Un enfant migraineux deviendra-t-il un adulte migraineux?

Le Dr Berciaud nous répond et explique avec la pédagogie que l'on connait des pédiatres. Parfaite!

Merci!


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Maxime

    Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode de Médecins qui est tu?, un épisode focus aujourd'hui sur la migraine chez l'enfant. On fait ça avec docteur Sylvie Berciaud. Bonjour Sylvie. Bonjour. Tu es responsable du Centre d'évaluation et du traitement de la douleur pédiatrique au CHU de Bordeaux. Et tu vas nous venir en aide aujourd'hui pour parler de la migraine chez l'enfant, qui est une pathologie parfois difficile. On va notamment faire la comparaison avec la présentation migraineuse de l'adulte, parce qu'il y a plein de petites subtilités. qui peuvent parfois nous amener à passer à côté du diagnostic. Donc merci d'être ici. Qu'est-ce qu'une migraine déjà ? Et comment on peut la déceler chez un enfant ?

  • Dr Berciaud

    Alors la migraine, c'est un mal de tête qui est très intense, qui est souvent accompagné, et donc dans sa définition ça en fait partie, de symptômes associés comme des nausées, des vomissements, le bruit ou la lumière qui gêne, la photophonophobie. qui empêche l'enfant d'avoir ses activités, c'est-à-dire quand la crise est tellement intense que l'enfant doit s'arrêter, il ne peut pas continuer. Donc pour la différencier des petits maux de tête habituels, il suffit de demander à l'enfant quand il se plaint de céphalée, de maux de tête, c'est est-ce que tu as des gros maux de tête qui t'empêchent de faire les choses? Et est-ce que sinon des fois il y a des petits maux de tête? Et ce gros maux de tête-là, c'est cette fameuse migraine.

  • Maxime

    D'accord. On va discuter de la différence avec la présentation de la migraine avec l'adulte. Mais la migraine appartient à ce qu'on appelle les céphalées, donc une grande case qui veut dire maux de tête. Et qui dit mot de tête dit d'abord écarter ce qui est grave. Est-ce que tu peux nous citer les critères ou les symptômes qui doivent amener à une consultation en urgence notamment ?

  • Dr Berciaud

    La céphalée, effectivement, est un message d'alerte pour plein de symptômes différents. Les choses qui doivent, en tout cas, alerter, c'est une céphalée extrêmement intense, avec un enfant qui serait complètement prostré, pour lequel une prise d'un premier antalgique simple n'aurait strictement aucun effet, qui arrive chez un enfant qui n'a pas de mécanisme. Pas l'habitude d'avoir des maux de tête vraiment très inaugurals. Ça, ça va nécessiter effectivement une première consultation. Ensuite, si cette céphalée est accompagnée de symptômes neurologiques, comme avoir du mal à parler, à bouger un membre, ou un enfant qui est extrêmement confus et qui reste confus sur plusieurs minutes, ça aussi, ça va nécessiter effectivement de consulter en urgence. Donc la céphalée avec fièvre ne nécessite pas forcément une consultation en urgence. C'est vrai que souvent il y a en arrière-pensée les méningites, mais ça dépend de l'état général de l'enfant, mais ça peut nécessiter une consultation déjà chez le médecin traitant, dans un délai semi-urgent, mais pas forcément aux urgences. À d'autres céphalées plus intenses.

  • Maxime

    Dans tous les cas, au moindre doute ?

  • Dr Berciaud

    Il faut consulter.

  • Maxime

    Ok. Alors, la présentation de la migraine chez l'enfant... hyper particulière, avec parfois des diagnostics qui ne sont pas faits parce que la présentation est vraiment atypique. On a choisi de faire une petite comparaison entre la migraine chez l'adulte et la migraine chez l'enfant. Notamment, pourquoi ? Parce qu'un enfant peut ne pas avoir de plainte au niveau de la tête, et c'est pour autant une migraine. Donc on va faire le point. Présentation très rapide de la migraine chez l'adulte. J'avais déjà fait le point avec le côté psychiatrie où il faut parfois 3, 4 éléments sur 5 pour rentrer dans une pathologie. Dans la migraine, c'est un peu pareil. Il faut par exemple avoir 5 crises répondant à différents critères. Ces critères, c'est par exemple une crise de 4 à 72 heures, une céphalée de 4 à 72 heures. Une céphalée qui a, cette fois-ci encore, deux des caractéristiques suivants, unilatéral, pulsatile, modéré ou sévère, c'est-à-dire qu'il y a un critère d'intensité. et une aggravation, comme tu le disais, avec une activité physique de routine ou par exemple une montée ou descente d'escalier. Et puis, encore un quatrième item dans la façon de procéder au diagnostic, c'est les céphalées qui doivent être accompagnées soit de nausées ou vomissements, soit de phonophotophobie, c'est-à-dire être gênées par la lumière ou par le bruit. Ok, ça c'est côté adulte. On va reprendre un peu tranquillement pour la partie pédiatrique. Il y a des items communs.

  • Dr Berciaud

    Oui, il y a des items communs. Il y en a qui diffèrent un peu. Donc, il y a effectivement un critère de répétition. Donc, il faut effectivement cinq crises à peu près identiques. Donc, parler de migraine, théoriquement, c'est un enfant qui a déjà eu au moins cinq épisodes d'une céphalie identique. Après, des fois, dès le premier épisode, on fait une suspicion de migraine. Mais pour affirmer ce diagnostic chez l'enfant, il faut aussi 5 épisodes. Il y a un critère de durée. Chez l'enfant, la crise peut être un peu plus courte, 2 à 72 heures. Il y a le critère de localisation stricto sensu, effectivement unilatérale. Chez l'enfant, ça peut être bilatéral, beaucoup plus fréquemment d'ailleurs. Et donc ce caractère uni ou bilatéral est moins prépondérant.

  • Maxime

    Chez l'adulte, c'est a bascule. Parfois à droite, parfois à gauche. Et chez l'enfant, c'est l'ensemble de la tête qui est douloureuse.

  • Dr Berciaud

    Exactement, ça peut être l'ensemble de la tête, mais ça peut aussi être qu'un côté, le gauche ou le droit, parfois toujours du même, parfois d'un côté ou de l'autre.

  • Maxime

    Le critère d'intensité ?

  • Dr Berciaud

    L'intensité, c'est le même critère. Donc modéré, sévère, ça veut dire que c'est une crise qui est intense.

  • Maxime

    Ok, critère pulsatile ?

  • Dr Berciaud

    Le critère pulsatile existe effectivement chez l'enfant. La difficulté, c'est que l'enfant ne va pas le verbaliser comme ça très facilement. Donc très souvent, on peut retenir un critère de migraine alors que l'enfant va définir un mot de tête plutôt à type de pression, de pesanteur. Le caractère pulsatile arrive plus tard quand c'est des grands enfants.

  • Maxime

    Aggravation lors de l'activité ?

  • Dr Berciaud

    Tout à fait,

  • Maxime

    c'est la même. Et nausées, vomissements ?

  • Dr Berciaud

    Nausées, vomissements font partie des critères. Tout comme la photo ou phonophobie, qui sont aussi présentes chez les enfants. Alors, spontanément, ils ne vont peut-être pas le dire. Donc, il faut savoir le questionner sans trop le suggérer non plus. Donc, leur demander s'il y a d'autres symptômes en même temps qu'ils ont mal à la tête. Est-ce qu'il y a d'autres choses qui les gênent ou qui les embêtent ? Et très spontanément, ils vont pouvoir dérouler.

  • Maxime

    D'accord. Il y a des symptômes particuliers qui sont hors céphalées, justement, hors maux de tête. Est-ce que tu peux nous les citer ? Oui. En fonction de quel âge, notamment, par exemple ?

  • Dr Berciaud

    Tout à fait, c'est en fonction de l'âge de l'enfant. Plus l'enfant va être jeune, plus les symptômes migraineux peuvent être un petit peu plus à bas bruit, c'est-à-dire que le mot de tête ne va pas être en première intention. Il y a notamment ce qu'on appelle les migraines abdominales chez l'enfant, avec des enfants qui vont présenter des crises répétitives de douleurs abdominales, avec prostration, nausées, vomissements, mais pas de plaintes céphalalgiques. Et en fait, ce sont des équivalents migraineux du tout petit. Tout comme peuvent... l'être, des douleurs abdominales intenses sans forcément qu'il y ait des vomissements mais de façon récurrente qui reviennent par crise et ces enfants en grandissant souvent finissent par évoluer vers une migraine un peu plus typique avec cette plainte de céphalée donc c'est souvent chez les petits enfants ça peut apparaître dès les nourrissons donc moins de deux ans et plus l'enfant va grandir, plus il va arriver vers l'âge élémentaire à peu près vers six ans plus la plainte de céphalée va pouvoir être présente ceci dit, des enfants de quatre ans peuvent se plaindre de céphalée aussi et

  • Maxime

    Est-ce qu'on arrive à faire le diagnostic de migraine à ce petit âge ou c'est plutôt à postériori ?

  • Dr Berciaud

    Souvent c'est à postériori. C'est en voyant des adolescents ou des plus grands enfants migraineux. Quand on interroge, on se rend compte qu'il y avait ces crises, parfois communément appelées crises d'acétone, avec des vomissements, douleurs abdominales, qui en fait étaient des équivalents migraineux. Et puis parfois, quand le médecin qui voit l'enfant connaît cette entité, ça peut être diagnostiqué beaucoup plus tôt.

  • Maxime

    D'accord. C'est vrai que le primabord... On part plutôt sur une pathologie abdominale digestive. C'est assez particulier. Mais il y a ce critère de temps, tout ce qu'on disait tout à l'heure, 4 à 72 heures. Il y a ces critères qui sont déjà là, même si c'est une plainte abdominale ?

  • Dr Berciaud

    Alors, ces critères sont là aussi. La durée de la crise, oui, c'est 2 en l'occurrence pour l'enfant à 72 heures. Mais effectivement, les autres critères peuvent être présents. Et il y a cette répétition des crises aussi qui est importante. l'impact aussi sur l'enfant.

  • Maxime

    D'accord. Pour parler de cette répétition, première crise, qu'est-ce qu'on réalise chez une première crise migraineuse chez un enfant ?

  • Dr Berciaud

    Première crise de céphalie intense chez un enfant qui aurait les caractéristiques migraineuses, qui ne rentre pas encore dans la case de migraine, parce qu'il n'y a pas eu assez de crise, mais qui a tous les autres critères, la photophonophobie, nausée ou vomissement et céphalie intense. Effectivement, il y a... Pas de nécessité à faire forcément des examens complémentaires très importants. C'est vrai qu'on a toujours l'épée de Damoclès de se dire, est-ce qu'on passe à côté d'autre chose, d'une cause d'une céphalée secondaire, c'est-à-dire qui ne serait pas liée à la migraine, mais sur une première crise très intense, un examen neurologique au décours normal, un enfant qui a un développement psychomoteur normal, qui a un examen clinique rassurant et un mot de tête qui répond bien au paracétamol et ibuprofène, plus volontiers on en parlera, mais plutôt l'ibuprofène. Eh bien, on n'a pas de nécessité de faire une imagerie cérébrale en urgence. Il n'y a pas de nécessité de faire de bilan sanguin. La migraine, c'est un diagnostic qui est vraiment clinique. Et donc, finalement, on n'a pas besoin d'examen complémentaire pour faire un diagnostic de migraine.

  • Maxime

    D'accord. On va parler d'évolution et après, on parlera de traitement. Mais est-ce qu'un enfant migraineux évolue vers un adulte migraineux ?

  • Dr Berciaud

    C'est une bonne question. Alors, il y a... Effectivement, la migraine chez l'enfant, ça reste assez fréquent. Il y a quand même 15% des adolescents qui vont être migraineux. Ils ne vont pas forcément tous évoluer migraineux à l'âge adulte, ces enfants. Cette évolution, elle est très individuelle. Il n'y a pas de facteur vraiment très identifiable pour prédire à un enfant s'il sera migraineux ou pas à l'âge adulte. L'intérêt, c'est d'avoir identifié précocement. La migraine, pour que l'enfant sache ce qu'il a, puisse reconnaître comment agir dessus, et mieux on connaît ce qu'on a, mieux on agit dessus, et plus on a de chance que plus tard ça évolue bien et qu'il n'y ait peu ou pas de crise à l'âge adulte.

  • Maxime

    Une notion importante de maîtrise de sa pathologie et de ses traitements pour que derrière il y ait moins une installation néfaste de la pathologie. On connaît un peu l'explication de la migraine, de comment elle s'installe, pourquoi elle arrive chez un enfant ou un adulte d'ailleurs ?

  • Dr Berciaud

    Alors, il y a des facteurs déclenchants qui sont multifactoriels. Justement, ça entretient un peu le flou sur d'où ça vient, pourquoi c'est là, qu'est-ce que c'est. Donc, il y a des facteurs déclenchants qui surviennent dans un contexte fragilisé. C'est-à-dire qu'il y a une hérédité de la migraine. Souvent, on retrouve des cas, des antécédents familiaux de personnes migraineuses. Donc, il y a un terrain migraineux familial, souvent. et par-dessus viennent se greffer des facteurs déclenchants. C'est vraiment ce qui vient appuyer sur la gâchette et déclencher la crise. Donc ça peut être la fatigue, ça peut être d'avoir pas assez bu, ça peut être la chaleur, le soleil, la lumière, le bruit. Ils sont très individuels, donc il y a tout ce qui est facteur, on dit extérieur, que je vous ai un petit peu cité là, et puis il y a tout ce qui est facteur intrinsèque, et donc ça va être la fatigue, le stress. L'anxiété, la concentration, les émotions en général, elles peuvent être positives et déclencher une crise de migraine, être très excité d'aller à un anniversaire, et les enfants font parfois des crises de migraine.

  • Maxime

    Même le sommeil, l'hyper-sommeil.

  • Dr Berciaud

    L'hyper-sommeil, exactement. Dormir trop, faire une très grande grasse matinée pour des adolescents sur un week-end, et boum, ça peut déclencher une crise derrière. Ou à l'inverse, le manque de sommeil, mais ça, ça paraissait plus logique pour les gens. Donc il y a tous ces facteurs environnementaux, extérieurs et intrinsèques. qui vont venir, dans certaines circonstances, déclencher la crise. Mais ce n'est pas toujours reproductible. C'est ça qui, des fois, peut être un peu perturbant, parce que dans une situation égale, parfois il va faire la crise, parfois il ne va pas la faire. Donc il y a ce côté un petit peu aléatoire malgré tout.

  • Maxime

    Ok. On va parler des traitements. Alors, est-ce qu'une migraine peut être traitée par un médecin traitant ? Est-ce qu'il peut gérer tout ça ?

  • Dr Berciaud

    Bien sûr, tout à fait. Oui, c'est d'ailleurs le premier médecin qui est en première ligne et qui voit ses enfants migraineux. Donc oui, ça peut tout à fait être traité par un médecin traitant, et ça doit l'être d'ailleurs, et du coup, il faut identifier la crise de migraine, et à partir du moment où c'est identifié, il y a vraiment des choses très simples et basiques à respecter. Quand la crise commence, on a repéré que c'était une crise de migraine, on met l'enfant au calme. On lui propose de se mettre un petit peu au repos et précocement, on donne le traitement. Ça, c'est vraiment quelque chose qui est important, c'est-à-dire qu'il faut prendre le traitement dans la première demi-heure, première heure idéalement. Un traitement qui est pris deux ou trois heures après, la crise est installée et peut ne pas du tout marcher, alors que le même traitement peut parfaitement marcher s'il est pris précocement.

  • Maxime

    Pour casser la crise.

  • Dr Berciaud

    Pour casser la crise. Moi, tout le temps, je fais la comparaison avec l'eau qui bout dans la casserole. Si on éteint tout de suite le feu, ça ne va pas déborder et puis ça va vite rentrer dans l'ordre. Et puis, si on se rend compte un peu trop tard et qu'on arrive après... On met plus de temps à tout ranger. D'accord. C'est un peu pareil.

  • Maxime

    Ok. D'ailleurs, mais ça, ça va être fonction du diagnostic qui est réalisé plus facilement plus tard. Mais on n'en a pas parlé, mais il y a un pic de prévalence de la migraine chez l'enfant.

  • Dr Berciaud

    Le moment où c'est le plus fréquent, c'est effectivement chez les adolescents. Donc 15 à 30% des adolescents qui sont migraineux.

  • Maxime

    C'est par un biais de diagnostic peut-être ?

  • Dr Berciaud

    Il y a souvent un biais de diagnostic chez le tout petit. Mais ça reste effectivement quelque chose de très fréquent. En consultation de douleur, c'est quasiment la moitié des patients qu'on voit pour des céphalées. Alors il y a les migraines et puis des fois il y a les plus petits motettes, les céphalées de tension. Mais la migraine est un des diagnostics principaux qu'on a en consultation de douleur.

  • Maxime

    D'accord. On poursuit sur le traitement. Oui, exactement. Traitement médicamenteux de première intention ou pas ?

  • Dr Berciaud

    Alors quand la crise est là, sur la crise, oui, souvent, il va y avoir besoin d'un traitement médicamenteux pour la crise de migraine. Alors vraiment, le chef de file, c'est les anti-inflammatoires non stéroïdiens. Et c'est vraiment l'ibuprofène qu'il faut donner à bonne dose. Donc c'est 10 mg par kilo. Donc ça veut dire que des enfants qui vont faire 40 kg, par exemple, peuvent prendre des comprimés comme les adultes à 400 mg. Ce qui parfois freine un petit peu la prescription. On a tendance à sous-doser ces enfants qui font 40 kg et qui ont peut-être une dizaine d'années, et on leur donne 200 mg. Non, c'est bien 10 mg par kilo, 400 mg donc au maximum, ou en solution buvable en dose poids, là c'est plus simple. Et donc donner précocement, dès le début de la crise. Associer à des mesures physiques, souvent mettre un peu de frais sur le front, parfois il peut y avoir des huiles essentielles, mais ça, il faut interroger l'enfant sur ce qui lui fait du bien. s'il se mettre au repos fait du bien et il met du froid très bien, si c'est d'écouter une musique, on peut le laisser écouter une musique. Il n'y a pas forcément besoin de le mettre dans le silence si finalement un environnement musical lui fait du bien.

  • Maxime

    Est-ce qu'on couvre avec un protecteur gastrique ?

  • Dr Berciaud

    Pas forcément. Quand c'est vraiment en prise unique comme ça et peu fréquente, ça peut être très bien toléré. Parfois, certains enfants vont nous dire qu'effectivement, à la prise du médicament, ils vont avoir des brûlures d'estomac. Et dans ces cas-là, on met un protecteur gastrique associé.

  • Maxime

    D'accord. Et c'est important de mettre d'emblée la bonne posologie, parce que derrière, il peut y avoir une reprise médicamenteuse qui entraîne un mésusage. On en parlera tout à l'heure peut-être. Mais ne pas avoir peur de la première prise pour casser encore une fois cette crise et ne pas amener un crescendo sur la prise médicamenteuse. Ok. Après l'ibuprofène, qu'est-ce qu'on fait si ça ne fonctionne pas ?

  • Dr Berciaud

    Alors, quand on est chez un enfant de moins de 12 ans, moins de 30 kilos, on peut éventuellement proposer une dose d'à peu près une heure après le temps d'action, quand même une demi-heure, une heure après, de paracétamol. Ça, c'est possible. Alors, on donne 15 mg par kilo. Et chez l'enfant de plus de 12 ans ou 30 kilos, on peut utiliser l'autre famille de médicaments qu'on donne dans la migraine, notamment dans le traitement de crise. La famille des triptans, et c'est le sumatriptan, c'est un spray qui se fait en spray nasal. Et on peut le donner chez l'enfant. Donc il y a deux dosages, il y a 10 mg et puis il y a 20 mg. On commence d'abord par le 10 mg et puis si le 10 n'est pas suffisant, sur les crises ultérieures, on peut proposer le 20.

  • Maxime

    Il vient après la prise ibuprofène ?

  • Dr Berciaud

    Généralement, on le propose d'abord en seconde intention. Et chez les enfants qui nous répondent qu'ils ont systématiquement besoin de le prendre, on peut parfois le donner en première intention.

  • Maxime

    Est-ce que chez l'adulte, on peut proposer INS plus triptan d'emblée ? Est-ce que chez l'enfant, c'est pareil ?

  • Dr Berciaud

    Ça peut se faire si l'enfant nous dit que, quel que soit l'ordre, c'est-à-dire anti-inflammatoire non stéroïdien puis triptan, ou triptan puis anti-inflammatoire, il y a quand même besoin des deux. Dans ces cas-là, on peut être amené à proposer à prendre les deux d'emblée.

  • Maxime

    D'accord. Sumatriptan prescrit par ?

  • Dr Berciaud

    Tout le monde. Médecin traitant peut prescrire, médecin pédiatre, structure douleur, tout médecin est habilité à pouvoir prescrire le sumatriptan. Ça a l'autorisation, qu'on dit là et même, l'autorisation d'utilisation de mise sur marché dès 12 ans. Donc il n'y a pas de souci là-dessus.

  • Maxime

    Les posologies, parce qu'il y a la case de mésusage médicamenteux, beaucoup côté migraine. Quelle est la prise médicamenteuse maximale de l'INS et des triptans ?

  • Dr Berciaud

    On essaie de dire pas plus de trois prises médicamenteuses au total, maximum par semaine. Si on en est à ça, il faut quand même reconsulter si ça fait trois ou quatre mois que l'enfant prend trois fois par semaine des traitements anti-inflammatoires ou des triptans. Ce qui est important, c'est de préciser que c'est des prises médicamenteuses, c'est-à-dire que ce n'est pas trois fois des INS, trois fois des triptans, parce que parfois ça peut être un peu confondu. Et l'idée, c'est que comme chez l'adulte, l'enfant peut avoir des céphalées de mésusage médicamenteux, c'est-à-dire que de trop consommer de médicaments peut... finalement aussi entraîner des céphalées et s'associer aux céphalées migraineuses. C'est vraiment important d'identifier la bonne dose à la bonne fréquence et de le préciser sur les prescriptions.

  • Maxime

    Ok. Et donc, on introduit comme ça le traitement de fond s'il y en a un côté pédiatrie, puisque, en tout cas, tu vas me dire, mais côté adulte, le traitement de fond s'envisage s'il y a un excès de prix de médicamentes ou une altération sur la qualité de vie. Est-ce que ce sont les mêmes critères côté pédiatrie ?

  • Dr Berciaud

    Oui, alors chez l'enfant, globalement, il y a effectivement une notion de traitement de fonds. Alors, il faut savoir que c'est un petit peu différent de chez l'adulte, parce que les études chez l'enfant ont finalement montré peu d'efficacité des traitements de fonds médicamenteux. Donc, en fait, le premier traitement de fonds à proposer chez un enfant, et finalement, ça peut se proposer parfois, quelle que soit la fréquence des crises, c'est plutôt quand les crises ont commencé à avoir un impact sur le quotidien. On va plutôt jauger là-dessus. On va proposer des apprentissages de techniques psychocorporelles. Alors qu'est-ce que c'est que ces techniques psychocorporelles ? Ça va être des techniques pour apprendre à l'enfant à mieux gérer sa crise de migraine, mieux la ressentir, mieux gérer la fatigabilité, le stress du quotidien, comme de la relaxation, de la sophrologie, il y a les thérapies cognitivo-comportementales, il y a l'hypnose également. Et donc c'est plutôt ces techniques-là qu'on va utiliser.

  • Maxime

    Efficacité démontrée ?

  • Dr Berciaud

    Avec une efficacité démontrée, parfois même supérieure à des traitements médicamenteux. Après, dans certaines situations... Ces traitements médicamenteux peuvent être utilisés, mais là, ça va demander par contre l'avis d'une structure douleur ou neuropédiatrique, parce que vraiment, ce n'est pas du tout la première intention. Ça vient tout à fait en deuxième ligne.

  • Maxime

    Bétabloquant comme chez l'adulte ? Envisageable ?

  • Dr Berciaud

    Alors, les traitements de fond médicamenteux chez l'enfant... peut potentiellement utiliser, et encore une fois, c'est sans vraiment preuve dans la littérature, ça peut être effectivement les bêtas bloquants, et ça peut être sinon la famille des antidépresseurs tricycliques, telles que la mitryptiline, effectivement.

  • Maxime

    Ok. Mais finalement, même toi, en structure douleur, tu les manipules ou pas ?

  • Dr Berciaud

    Alors, on les manipule dans certains cas. On les manipule vraiment quand on arrive en seconde ligne, c'est-à-dire que... On a optimisé tous les facteurs déclenchants, identifié, on a mis des prises en charge globales, physiques, psychocorporelles. Et si malgré cela, ça reste compliqué, et notamment dans les cas de surconsommation médicamenteuse, pour arriver à faire ce qu'on appelle un sevrage médicamenteux. Ça peut paraître paradoxal, mais des fois, on a besoin de mettre un peu de traitement de fond pour pouvoir baisser les traitements de crise, passer un cap. Et puis ensuite, c'est un traitement qui, quand il est mis en place, est très régulièrement réévalué. Et donc, on essaie toujours de l'arrêter.

  • Maxime

    Ces enfants, ils ont quel avenir côté migraine ? Est-ce qu'ils vont être envoyés au centre de la douleur côté adulte ?

  • Dr Berciaud

    Alors, on essaie dans nos missions de les autonomiser, de faire en sorte que ça n'impacte plus leur vie et que ça reste... très peu fréquent voir que ça s'arrête complètement et donc de ne pas avoir à les passer en structure adulte. Mais effectivement, il y a des fois, ça persiste où il y a un besoin ressenti de garder un suivi pluriprofessionnel. Et donc, on peut effectivement parfois faire des réunions de transition où on présente des jeunes adultes, du coup, en structure douleur adulte pour que le suivi puisse poursuivre. Donc, ça peut arriver effectivement.

  • Maxime

    Ok. Sylvie merci beaucoup c'était très très clair et à bientôt pour de nouveaux épisodes merci beaucoup merci à toi voilà c'était un épisode de médecins qui étudient merci d'avoir écouté je vous invite à vous abonner en cliquant sur la petite clochette comme ça vous serez avertis de la sortie de nouveaux épisodes à bientôt

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Description

Le Docteur Berciaud Sylvie, responsable du Centre d'évaluation et du traitement de la douleur pédiatrique du CHU de Bordeaux, nous aide à mieux comprendre la migraine chez l'enfant.👶

Les symptômes peuvent être trompeurs, et les critères pour le diagnostique sont trés précis!

Quels sont les traitements? Médicamenteux? Non médicamenteux?

Peut-on introduire un traitement de fond?

Un enfant migraineux deviendra-t-il un adulte migraineux?

Le Dr Berciaud nous répond et explique avec la pédagogie que l'on connait des pédiatres. Parfaite!

Merci!


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Maxime

    Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode de Médecins qui est tu?, un épisode focus aujourd'hui sur la migraine chez l'enfant. On fait ça avec docteur Sylvie Berciaud. Bonjour Sylvie. Bonjour. Tu es responsable du Centre d'évaluation et du traitement de la douleur pédiatrique au CHU de Bordeaux. Et tu vas nous venir en aide aujourd'hui pour parler de la migraine chez l'enfant, qui est une pathologie parfois difficile. On va notamment faire la comparaison avec la présentation migraineuse de l'adulte, parce qu'il y a plein de petites subtilités. qui peuvent parfois nous amener à passer à côté du diagnostic. Donc merci d'être ici. Qu'est-ce qu'une migraine déjà ? Et comment on peut la déceler chez un enfant ?

  • Dr Berciaud

    Alors la migraine, c'est un mal de tête qui est très intense, qui est souvent accompagné, et donc dans sa définition ça en fait partie, de symptômes associés comme des nausées, des vomissements, le bruit ou la lumière qui gêne, la photophonophobie. qui empêche l'enfant d'avoir ses activités, c'est-à-dire quand la crise est tellement intense que l'enfant doit s'arrêter, il ne peut pas continuer. Donc pour la différencier des petits maux de tête habituels, il suffit de demander à l'enfant quand il se plaint de céphalée, de maux de tête, c'est est-ce que tu as des gros maux de tête qui t'empêchent de faire les choses? Et est-ce que sinon des fois il y a des petits maux de tête? Et ce gros maux de tête-là, c'est cette fameuse migraine.

  • Maxime

    D'accord. On va discuter de la différence avec la présentation de la migraine avec l'adulte. Mais la migraine appartient à ce qu'on appelle les céphalées, donc une grande case qui veut dire maux de tête. Et qui dit mot de tête dit d'abord écarter ce qui est grave. Est-ce que tu peux nous citer les critères ou les symptômes qui doivent amener à une consultation en urgence notamment ?

  • Dr Berciaud

    La céphalée, effectivement, est un message d'alerte pour plein de symptômes différents. Les choses qui doivent, en tout cas, alerter, c'est une céphalée extrêmement intense, avec un enfant qui serait complètement prostré, pour lequel une prise d'un premier antalgique simple n'aurait strictement aucun effet, qui arrive chez un enfant qui n'a pas de mécanisme. Pas l'habitude d'avoir des maux de tête vraiment très inaugurals. Ça, ça va nécessiter effectivement une première consultation. Ensuite, si cette céphalée est accompagnée de symptômes neurologiques, comme avoir du mal à parler, à bouger un membre, ou un enfant qui est extrêmement confus et qui reste confus sur plusieurs minutes, ça aussi, ça va nécessiter effectivement de consulter en urgence. Donc la céphalée avec fièvre ne nécessite pas forcément une consultation en urgence. C'est vrai que souvent il y a en arrière-pensée les méningites, mais ça dépend de l'état général de l'enfant, mais ça peut nécessiter une consultation déjà chez le médecin traitant, dans un délai semi-urgent, mais pas forcément aux urgences. À d'autres céphalées plus intenses.

  • Maxime

    Dans tous les cas, au moindre doute ?

  • Dr Berciaud

    Il faut consulter.

  • Maxime

    Ok. Alors, la présentation de la migraine chez l'enfant... hyper particulière, avec parfois des diagnostics qui ne sont pas faits parce que la présentation est vraiment atypique. On a choisi de faire une petite comparaison entre la migraine chez l'adulte et la migraine chez l'enfant. Notamment, pourquoi ? Parce qu'un enfant peut ne pas avoir de plainte au niveau de la tête, et c'est pour autant une migraine. Donc on va faire le point. Présentation très rapide de la migraine chez l'adulte. J'avais déjà fait le point avec le côté psychiatrie où il faut parfois 3, 4 éléments sur 5 pour rentrer dans une pathologie. Dans la migraine, c'est un peu pareil. Il faut par exemple avoir 5 crises répondant à différents critères. Ces critères, c'est par exemple une crise de 4 à 72 heures, une céphalée de 4 à 72 heures. Une céphalée qui a, cette fois-ci encore, deux des caractéristiques suivants, unilatéral, pulsatile, modéré ou sévère, c'est-à-dire qu'il y a un critère d'intensité. et une aggravation, comme tu le disais, avec une activité physique de routine ou par exemple une montée ou descente d'escalier. Et puis, encore un quatrième item dans la façon de procéder au diagnostic, c'est les céphalées qui doivent être accompagnées soit de nausées ou vomissements, soit de phonophotophobie, c'est-à-dire être gênées par la lumière ou par le bruit. Ok, ça c'est côté adulte. On va reprendre un peu tranquillement pour la partie pédiatrique. Il y a des items communs.

  • Dr Berciaud

    Oui, il y a des items communs. Il y en a qui diffèrent un peu. Donc, il y a effectivement un critère de répétition. Donc, il faut effectivement cinq crises à peu près identiques. Donc, parler de migraine, théoriquement, c'est un enfant qui a déjà eu au moins cinq épisodes d'une céphalie identique. Après, des fois, dès le premier épisode, on fait une suspicion de migraine. Mais pour affirmer ce diagnostic chez l'enfant, il faut aussi 5 épisodes. Il y a un critère de durée. Chez l'enfant, la crise peut être un peu plus courte, 2 à 72 heures. Il y a le critère de localisation stricto sensu, effectivement unilatérale. Chez l'enfant, ça peut être bilatéral, beaucoup plus fréquemment d'ailleurs. Et donc ce caractère uni ou bilatéral est moins prépondérant.

  • Maxime

    Chez l'adulte, c'est a bascule. Parfois à droite, parfois à gauche. Et chez l'enfant, c'est l'ensemble de la tête qui est douloureuse.

  • Dr Berciaud

    Exactement, ça peut être l'ensemble de la tête, mais ça peut aussi être qu'un côté, le gauche ou le droit, parfois toujours du même, parfois d'un côté ou de l'autre.

  • Maxime

    Le critère d'intensité ?

  • Dr Berciaud

    L'intensité, c'est le même critère. Donc modéré, sévère, ça veut dire que c'est une crise qui est intense.

  • Maxime

    Ok, critère pulsatile ?

  • Dr Berciaud

    Le critère pulsatile existe effectivement chez l'enfant. La difficulté, c'est que l'enfant ne va pas le verbaliser comme ça très facilement. Donc très souvent, on peut retenir un critère de migraine alors que l'enfant va définir un mot de tête plutôt à type de pression, de pesanteur. Le caractère pulsatile arrive plus tard quand c'est des grands enfants.

  • Maxime

    Aggravation lors de l'activité ?

  • Dr Berciaud

    Tout à fait,

  • Maxime

    c'est la même. Et nausées, vomissements ?

  • Dr Berciaud

    Nausées, vomissements font partie des critères. Tout comme la photo ou phonophobie, qui sont aussi présentes chez les enfants. Alors, spontanément, ils ne vont peut-être pas le dire. Donc, il faut savoir le questionner sans trop le suggérer non plus. Donc, leur demander s'il y a d'autres symptômes en même temps qu'ils ont mal à la tête. Est-ce qu'il y a d'autres choses qui les gênent ou qui les embêtent ? Et très spontanément, ils vont pouvoir dérouler.

  • Maxime

    D'accord. Il y a des symptômes particuliers qui sont hors céphalées, justement, hors maux de tête. Est-ce que tu peux nous les citer ? Oui. En fonction de quel âge, notamment, par exemple ?

  • Dr Berciaud

    Tout à fait, c'est en fonction de l'âge de l'enfant. Plus l'enfant va être jeune, plus les symptômes migraineux peuvent être un petit peu plus à bas bruit, c'est-à-dire que le mot de tête ne va pas être en première intention. Il y a notamment ce qu'on appelle les migraines abdominales chez l'enfant, avec des enfants qui vont présenter des crises répétitives de douleurs abdominales, avec prostration, nausées, vomissements, mais pas de plaintes céphalalgiques. Et en fait, ce sont des équivalents migraineux du tout petit. Tout comme peuvent... l'être, des douleurs abdominales intenses sans forcément qu'il y ait des vomissements mais de façon récurrente qui reviennent par crise et ces enfants en grandissant souvent finissent par évoluer vers une migraine un peu plus typique avec cette plainte de céphalée donc c'est souvent chez les petits enfants ça peut apparaître dès les nourrissons donc moins de deux ans et plus l'enfant va grandir, plus il va arriver vers l'âge élémentaire à peu près vers six ans plus la plainte de céphalée va pouvoir être présente ceci dit, des enfants de quatre ans peuvent se plaindre de céphalée aussi et

  • Maxime

    Est-ce qu'on arrive à faire le diagnostic de migraine à ce petit âge ou c'est plutôt à postériori ?

  • Dr Berciaud

    Souvent c'est à postériori. C'est en voyant des adolescents ou des plus grands enfants migraineux. Quand on interroge, on se rend compte qu'il y avait ces crises, parfois communément appelées crises d'acétone, avec des vomissements, douleurs abdominales, qui en fait étaient des équivalents migraineux. Et puis parfois, quand le médecin qui voit l'enfant connaît cette entité, ça peut être diagnostiqué beaucoup plus tôt.

  • Maxime

    D'accord. C'est vrai que le primabord... On part plutôt sur une pathologie abdominale digestive. C'est assez particulier. Mais il y a ce critère de temps, tout ce qu'on disait tout à l'heure, 4 à 72 heures. Il y a ces critères qui sont déjà là, même si c'est une plainte abdominale ?

  • Dr Berciaud

    Alors, ces critères sont là aussi. La durée de la crise, oui, c'est 2 en l'occurrence pour l'enfant à 72 heures. Mais effectivement, les autres critères peuvent être présents. Et il y a cette répétition des crises aussi qui est importante. l'impact aussi sur l'enfant.

  • Maxime

    D'accord. Pour parler de cette répétition, première crise, qu'est-ce qu'on réalise chez une première crise migraineuse chez un enfant ?

  • Dr Berciaud

    Première crise de céphalie intense chez un enfant qui aurait les caractéristiques migraineuses, qui ne rentre pas encore dans la case de migraine, parce qu'il n'y a pas eu assez de crise, mais qui a tous les autres critères, la photophonophobie, nausée ou vomissement et céphalie intense. Effectivement, il y a... Pas de nécessité à faire forcément des examens complémentaires très importants. C'est vrai qu'on a toujours l'épée de Damoclès de se dire, est-ce qu'on passe à côté d'autre chose, d'une cause d'une céphalée secondaire, c'est-à-dire qui ne serait pas liée à la migraine, mais sur une première crise très intense, un examen neurologique au décours normal, un enfant qui a un développement psychomoteur normal, qui a un examen clinique rassurant et un mot de tête qui répond bien au paracétamol et ibuprofène, plus volontiers on en parlera, mais plutôt l'ibuprofène. Eh bien, on n'a pas de nécessité de faire une imagerie cérébrale en urgence. Il n'y a pas de nécessité de faire de bilan sanguin. La migraine, c'est un diagnostic qui est vraiment clinique. Et donc, finalement, on n'a pas besoin d'examen complémentaire pour faire un diagnostic de migraine.

  • Maxime

    D'accord. On va parler d'évolution et après, on parlera de traitement. Mais est-ce qu'un enfant migraineux évolue vers un adulte migraineux ?

  • Dr Berciaud

    C'est une bonne question. Alors, il y a... Effectivement, la migraine chez l'enfant, ça reste assez fréquent. Il y a quand même 15% des adolescents qui vont être migraineux. Ils ne vont pas forcément tous évoluer migraineux à l'âge adulte, ces enfants. Cette évolution, elle est très individuelle. Il n'y a pas de facteur vraiment très identifiable pour prédire à un enfant s'il sera migraineux ou pas à l'âge adulte. L'intérêt, c'est d'avoir identifié précocement. La migraine, pour que l'enfant sache ce qu'il a, puisse reconnaître comment agir dessus, et mieux on connaît ce qu'on a, mieux on agit dessus, et plus on a de chance que plus tard ça évolue bien et qu'il n'y ait peu ou pas de crise à l'âge adulte.

  • Maxime

    Une notion importante de maîtrise de sa pathologie et de ses traitements pour que derrière il y ait moins une installation néfaste de la pathologie. On connaît un peu l'explication de la migraine, de comment elle s'installe, pourquoi elle arrive chez un enfant ou un adulte d'ailleurs ?

  • Dr Berciaud

    Alors, il y a des facteurs déclenchants qui sont multifactoriels. Justement, ça entretient un peu le flou sur d'où ça vient, pourquoi c'est là, qu'est-ce que c'est. Donc, il y a des facteurs déclenchants qui surviennent dans un contexte fragilisé. C'est-à-dire qu'il y a une hérédité de la migraine. Souvent, on retrouve des cas, des antécédents familiaux de personnes migraineuses. Donc, il y a un terrain migraineux familial, souvent. et par-dessus viennent se greffer des facteurs déclenchants. C'est vraiment ce qui vient appuyer sur la gâchette et déclencher la crise. Donc ça peut être la fatigue, ça peut être d'avoir pas assez bu, ça peut être la chaleur, le soleil, la lumière, le bruit. Ils sont très individuels, donc il y a tout ce qui est facteur, on dit extérieur, que je vous ai un petit peu cité là, et puis il y a tout ce qui est facteur intrinsèque, et donc ça va être la fatigue, le stress. L'anxiété, la concentration, les émotions en général, elles peuvent être positives et déclencher une crise de migraine, être très excité d'aller à un anniversaire, et les enfants font parfois des crises de migraine.

  • Maxime

    Même le sommeil, l'hyper-sommeil.

  • Dr Berciaud

    L'hyper-sommeil, exactement. Dormir trop, faire une très grande grasse matinée pour des adolescents sur un week-end, et boum, ça peut déclencher une crise derrière. Ou à l'inverse, le manque de sommeil, mais ça, ça paraissait plus logique pour les gens. Donc il y a tous ces facteurs environnementaux, extérieurs et intrinsèques. qui vont venir, dans certaines circonstances, déclencher la crise. Mais ce n'est pas toujours reproductible. C'est ça qui, des fois, peut être un peu perturbant, parce que dans une situation égale, parfois il va faire la crise, parfois il ne va pas la faire. Donc il y a ce côté un petit peu aléatoire malgré tout.

  • Maxime

    Ok. On va parler des traitements. Alors, est-ce qu'une migraine peut être traitée par un médecin traitant ? Est-ce qu'il peut gérer tout ça ?

  • Dr Berciaud

    Bien sûr, tout à fait. Oui, c'est d'ailleurs le premier médecin qui est en première ligne et qui voit ses enfants migraineux. Donc oui, ça peut tout à fait être traité par un médecin traitant, et ça doit l'être d'ailleurs, et du coup, il faut identifier la crise de migraine, et à partir du moment où c'est identifié, il y a vraiment des choses très simples et basiques à respecter. Quand la crise commence, on a repéré que c'était une crise de migraine, on met l'enfant au calme. On lui propose de se mettre un petit peu au repos et précocement, on donne le traitement. Ça, c'est vraiment quelque chose qui est important, c'est-à-dire qu'il faut prendre le traitement dans la première demi-heure, première heure idéalement. Un traitement qui est pris deux ou trois heures après, la crise est installée et peut ne pas du tout marcher, alors que le même traitement peut parfaitement marcher s'il est pris précocement.

  • Maxime

    Pour casser la crise.

  • Dr Berciaud

    Pour casser la crise. Moi, tout le temps, je fais la comparaison avec l'eau qui bout dans la casserole. Si on éteint tout de suite le feu, ça ne va pas déborder et puis ça va vite rentrer dans l'ordre. Et puis, si on se rend compte un peu trop tard et qu'on arrive après... On met plus de temps à tout ranger. D'accord. C'est un peu pareil.

  • Maxime

    Ok. D'ailleurs, mais ça, ça va être fonction du diagnostic qui est réalisé plus facilement plus tard. Mais on n'en a pas parlé, mais il y a un pic de prévalence de la migraine chez l'enfant.

  • Dr Berciaud

    Le moment où c'est le plus fréquent, c'est effectivement chez les adolescents. Donc 15 à 30% des adolescents qui sont migraineux.

  • Maxime

    C'est par un biais de diagnostic peut-être ?

  • Dr Berciaud

    Il y a souvent un biais de diagnostic chez le tout petit. Mais ça reste effectivement quelque chose de très fréquent. En consultation de douleur, c'est quasiment la moitié des patients qu'on voit pour des céphalées. Alors il y a les migraines et puis des fois il y a les plus petits motettes, les céphalées de tension. Mais la migraine est un des diagnostics principaux qu'on a en consultation de douleur.

  • Maxime

    D'accord. On poursuit sur le traitement. Oui, exactement. Traitement médicamenteux de première intention ou pas ?

  • Dr Berciaud

    Alors quand la crise est là, sur la crise, oui, souvent, il va y avoir besoin d'un traitement médicamenteux pour la crise de migraine. Alors vraiment, le chef de file, c'est les anti-inflammatoires non stéroïdiens. Et c'est vraiment l'ibuprofène qu'il faut donner à bonne dose. Donc c'est 10 mg par kilo. Donc ça veut dire que des enfants qui vont faire 40 kg, par exemple, peuvent prendre des comprimés comme les adultes à 400 mg. Ce qui parfois freine un petit peu la prescription. On a tendance à sous-doser ces enfants qui font 40 kg et qui ont peut-être une dizaine d'années, et on leur donne 200 mg. Non, c'est bien 10 mg par kilo, 400 mg donc au maximum, ou en solution buvable en dose poids, là c'est plus simple. Et donc donner précocement, dès le début de la crise. Associer à des mesures physiques, souvent mettre un peu de frais sur le front, parfois il peut y avoir des huiles essentielles, mais ça, il faut interroger l'enfant sur ce qui lui fait du bien. s'il se mettre au repos fait du bien et il met du froid très bien, si c'est d'écouter une musique, on peut le laisser écouter une musique. Il n'y a pas forcément besoin de le mettre dans le silence si finalement un environnement musical lui fait du bien.

  • Maxime

    Est-ce qu'on couvre avec un protecteur gastrique ?

  • Dr Berciaud

    Pas forcément. Quand c'est vraiment en prise unique comme ça et peu fréquente, ça peut être très bien toléré. Parfois, certains enfants vont nous dire qu'effectivement, à la prise du médicament, ils vont avoir des brûlures d'estomac. Et dans ces cas-là, on met un protecteur gastrique associé.

  • Maxime

    D'accord. Et c'est important de mettre d'emblée la bonne posologie, parce que derrière, il peut y avoir une reprise médicamenteuse qui entraîne un mésusage. On en parlera tout à l'heure peut-être. Mais ne pas avoir peur de la première prise pour casser encore une fois cette crise et ne pas amener un crescendo sur la prise médicamenteuse. Ok. Après l'ibuprofène, qu'est-ce qu'on fait si ça ne fonctionne pas ?

  • Dr Berciaud

    Alors, quand on est chez un enfant de moins de 12 ans, moins de 30 kilos, on peut éventuellement proposer une dose d'à peu près une heure après le temps d'action, quand même une demi-heure, une heure après, de paracétamol. Ça, c'est possible. Alors, on donne 15 mg par kilo. Et chez l'enfant de plus de 12 ans ou 30 kilos, on peut utiliser l'autre famille de médicaments qu'on donne dans la migraine, notamment dans le traitement de crise. La famille des triptans, et c'est le sumatriptan, c'est un spray qui se fait en spray nasal. Et on peut le donner chez l'enfant. Donc il y a deux dosages, il y a 10 mg et puis il y a 20 mg. On commence d'abord par le 10 mg et puis si le 10 n'est pas suffisant, sur les crises ultérieures, on peut proposer le 20.

  • Maxime

    Il vient après la prise ibuprofène ?

  • Dr Berciaud

    Généralement, on le propose d'abord en seconde intention. Et chez les enfants qui nous répondent qu'ils ont systématiquement besoin de le prendre, on peut parfois le donner en première intention.

  • Maxime

    Est-ce que chez l'adulte, on peut proposer INS plus triptan d'emblée ? Est-ce que chez l'enfant, c'est pareil ?

  • Dr Berciaud

    Ça peut se faire si l'enfant nous dit que, quel que soit l'ordre, c'est-à-dire anti-inflammatoire non stéroïdien puis triptan, ou triptan puis anti-inflammatoire, il y a quand même besoin des deux. Dans ces cas-là, on peut être amené à proposer à prendre les deux d'emblée.

  • Maxime

    D'accord. Sumatriptan prescrit par ?

  • Dr Berciaud

    Tout le monde. Médecin traitant peut prescrire, médecin pédiatre, structure douleur, tout médecin est habilité à pouvoir prescrire le sumatriptan. Ça a l'autorisation, qu'on dit là et même, l'autorisation d'utilisation de mise sur marché dès 12 ans. Donc il n'y a pas de souci là-dessus.

  • Maxime

    Les posologies, parce qu'il y a la case de mésusage médicamenteux, beaucoup côté migraine. Quelle est la prise médicamenteuse maximale de l'INS et des triptans ?

  • Dr Berciaud

    On essaie de dire pas plus de trois prises médicamenteuses au total, maximum par semaine. Si on en est à ça, il faut quand même reconsulter si ça fait trois ou quatre mois que l'enfant prend trois fois par semaine des traitements anti-inflammatoires ou des triptans. Ce qui est important, c'est de préciser que c'est des prises médicamenteuses, c'est-à-dire que ce n'est pas trois fois des INS, trois fois des triptans, parce que parfois ça peut être un peu confondu. Et l'idée, c'est que comme chez l'adulte, l'enfant peut avoir des céphalées de mésusage médicamenteux, c'est-à-dire que de trop consommer de médicaments peut... finalement aussi entraîner des céphalées et s'associer aux céphalées migraineuses. C'est vraiment important d'identifier la bonne dose à la bonne fréquence et de le préciser sur les prescriptions.

  • Maxime

    Ok. Et donc, on introduit comme ça le traitement de fond s'il y en a un côté pédiatrie, puisque, en tout cas, tu vas me dire, mais côté adulte, le traitement de fond s'envisage s'il y a un excès de prix de médicamentes ou une altération sur la qualité de vie. Est-ce que ce sont les mêmes critères côté pédiatrie ?

  • Dr Berciaud

    Oui, alors chez l'enfant, globalement, il y a effectivement une notion de traitement de fonds. Alors, il faut savoir que c'est un petit peu différent de chez l'adulte, parce que les études chez l'enfant ont finalement montré peu d'efficacité des traitements de fonds médicamenteux. Donc, en fait, le premier traitement de fonds à proposer chez un enfant, et finalement, ça peut se proposer parfois, quelle que soit la fréquence des crises, c'est plutôt quand les crises ont commencé à avoir un impact sur le quotidien. On va plutôt jauger là-dessus. On va proposer des apprentissages de techniques psychocorporelles. Alors qu'est-ce que c'est que ces techniques psychocorporelles ? Ça va être des techniques pour apprendre à l'enfant à mieux gérer sa crise de migraine, mieux la ressentir, mieux gérer la fatigabilité, le stress du quotidien, comme de la relaxation, de la sophrologie, il y a les thérapies cognitivo-comportementales, il y a l'hypnose également. Et donc c'est plutôt ces techniques-là qu'on va utiliser.

  • Maxime

    Efficacité démontrée ?

  • Dr Berciaud

    Avec une efficacité démontrée, parfois même supérieure à des traitements médicamenteux. Après, dans certaines situations... Ces traitements médicamenteux peuvent être utilisés, mais là, ça va demander par contre l'avis d'une structure douleur ou neuropédiatrique, parce que vraiment, ce n'est pas du tout la première intention. Ça vient tout à fait en deuxième ligne.

  • Maxime

    Bétabloquant comme chez l'adulte ? Envisageable ?

  • Dr Berciaud

    Alors, les traitements de fond médicamenteux chez l'enfant... peut potentiellement utiliser, et encore une fois, c'est sans vraiment preuve dans la littérature, ça peut être effectivement les bêtas bloquants, et ça peut être sinon la famille des antidépresseurs tricycliques, telles que la mitryptiline, effectivement.

  • Maxime

    Ok. Mais finalement, même toi, en structure douleur, tu les manipules ou pas ?

  • Dr Berciaud

    Alors, on les manipule dans certains cas. On les manipule vraiment quand on arrive en seconde ligne, c'est-à-dire que... On a optimisé tous les facteurs déclenchants, identifié, on a mis des prises en charge globales, physiques, psychocorporelles. Et si malgré cela, ça reste compliqué, et notamment dans les cas de surconsommation médicamenteuse, pour arriver à faire ce qu'on appelle un sevrage médicamenteux. Ça peut paraître paradoxal, mais des fois, on a besoin de mettre un peu de traitement de fond pour pouvoir baisser les traitements de crise, passer un cap. Et puis ensuite, c'est un traitement qui, quand il est mis en place, est très régulièrement réévalué. Et donc, on essaie toujours de l'arrêter.

  • Maxime

    Ces enfants, ils ont quel avenir côté migraine ? Est-ce qu'ils vont être envoyés au centre de la douleur côté adulte ?

  • Dr Berciaud

    Alors, on essaie dans nos missions de les autonomiser, de faire en sorte que ça n'impacte plus leur vie et que ça reste... très peu fréquent voir que ça s'arrête complètement et donc de ne pas avoir à les passer en structure adulte. Mais effectivement, il y a des fois, ça persiste où il y a un besoin ressenti de garder un suivi pluriprofessionnel. Et donc, on peut effectivement parfois faire des réunions de transition où on présente des jeunes adultes, du coup, en structure douleur adulte pour que le suivi puisse poursuivre. Donc, ça peut arriver effectivement.

  • Maxime

    Ok. Sylvie merci beaucoup c'était très très clair et à bientôt pour de nouveaux épisodes merci beaucoup merci à toi voilà c'était un épisode de médecins qui étudient merci d'avoir écouté je vous invite à vous abonner en cliquant sur la petite clochette comme ça vous serez avertis de la sortie de nouveaux épisodes à bientôt

Description

Le Docteur Berciaud Sylvie, responsable du Centre d'évaluation et du traitement de la douleur pédiatrique du CHU de Bordeaux, nous aide à mieux comprendre la migraine chez l'enfant.👶

Les symptômes peuvent être trompeurs, et les critères pour le diagnostique sont trés précis!

Quels sont les traitements? Médicamenteux? Non médicamenteux?

Peut-on introduire un traitement de fond?

Un enfant migraineux deviendra-t-il un adulte migraineux?

Le Dr Berciaud nous répond et explique avec la pédagogie que l'on connait des pédiatres. Parfaite!

Merci!


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Maxime

    Bonjour et bienvenue dans ce nouvel épisode de Médecins qui est tu?, un épisode focus aujourd'hui sur la migraine chez l'enfant. On fait ça avec docteur Sylvie Berciaud. Bonjour Sylvie. Bonjour. Tu es responsable du Centre d'évaluation et du traitement de la douleur pédiatrique au CHU de Bordeaux. Et tu vas nous venir en aide aujourd'hui pour parler de la migraine chez l'enfant, qui est une pathologie parfois difficile. On va notamment faire la comparaison avec la présentation migraineuse de l'adulte, parce qu'il y a plein de petites subtilités. qui peuvent parfois nous amener à passer à côté du diagnostic. Donc merci d'être ici. Qu'est-ce qu'une migraine déjà ? Et comment on peut la déceler chez un enfant ?

  • Dr Berciaud

    Alors la migraine, c'est un mal de tête qui est très intense, qui est souvent accompagné, et donc dans sa définition ça en fait partie, de symptômes associés comme des nausées, des vomissements, le bruit ou la lumière qui gêne, la photophonophobie. qui empêche l'enfant d'avoir ses activités, c'est-à-dire quand la crise est tellement intense que l'enfant doit s'arrêter, il ne peut pas continuer. Donc pour la différencier des petits maux de tête habituels, il suffit de demander à l'enfant quand il se plaint de céphalée, de maux de tête, c'est est-ce que tu as des gros maux de tête qui t'empêchent de faire les choses? Et est-ce que sinon des fois il y a des petits maux de tête? Et ce gros maux de tête-là, c'est cette fameuse migraine.

  • Maxime

    D'accord. On va discuter de la différence avec la présentation de la migraine avec l'adulte. Mais la migraine appartient à ce qu'on appelle les céphalées, donc une grande case qui veut dire maux de tête. Et qui dit mot de tête dit d'abord écarter ce qui est grave. Est-ce que tu peux nous citer les critères ou les symptômes qui doivent amener à une consultation en urgence notamment ?

  • Dr Berciaud

    La céphalée, effectivement, est un message d'alerte pour plein de symptômes différents. Les choses qui doivent, en tout cas, alerter, c'est une céphalée extrêmement intense, avec un enfant qui serait complètement prostré, pour lequel une prise d'un premier antalgique simple n'aurait strictement aucun effet, qui arrive chez un enfant qui n'a pas de mécanisme. Pas l'habitude d'avoir des maux de tête vraiment très inaugurals. Ça, ça va nécessiter effectivement une première consultation. Ensuite, si cette céphalée est accompagnée de symptômes neurologiques, comme avoir du mal à parler, à bouger un membre, ou un enfant qui est extrêmement confus et qui reste confus sur plusieurs minutes, ça aussi, ça va nécessiter effectivement de consulter en urgence. Donc la céphalée avec fièvre ne nécessite pas forcément une consultation en urgence. C'est vrai que souvent il y a en arrière-pensée les méningites, mais ça dépend de l'état général de l'enfant, mais ça peut nécessiter une consultation déjà chez le médecin traitant, dans un délai semi-urgent, mais pas forcément aux urgences. À d'autres céphalées plus intenses.

  • Maxime

    Dans tous les cas, au moindre doute ?

  • Dr Berciaud

    Il faut consulter.

  • Maxime

    Ok. Alors, la présentation de la migraine chez l'enfant... hyper particulière, avec parfois des diagnostics qui ne sont pas faits parce que la présentation est vraiment atypique. On a choisi de faire une petite comparaison entre la migraine chez l'adulte et la migraine chez l'enfant. Notamment, pourquoi ? Parce qu'un enfant peut ne pas avoir de plainte au niveau de la tête, et c'est pour autant une migraine. Donc on va faire le point. Présentation très rapide de la migraine chez l'adulte. J'avais déjà fait le point avec le côté psychiatrie où il faut parfois 3, 4 éléments sur 5 pour rentrer dans une pathologie. Dans la migraine, c'est un peu pareil. Il faut par exemple avoir 5 crises répondant à différents critères. Ces critères, c'est par exemple une crise de 4 à 72 heures, une céphalée de 4 à 72 heures. Une céphalée qui a, cette fois-ci encore, deux des caractéristiques suivants, unilatéral, pulsatile, modéré ou sévère, c'est-à-dire qu'il y a un critère d'intensité. et une aggravation, comme tu le disais, avec une activité physique de routine ou par exemple une montée ou descente d'escalier. Et puis, encore un quatrième item dans la façon de procéder au diagnostic, c'est les céphalées qui doivent être accompagnées soit de nausées ou vomissements, soit de phonophotophobie, c'est-à-dire être gênées par la lumière ou par le bruit. Ok, ça c'est côté adulte. On va reprendre un peu tranquillement pour la partie pédiatrique. Il y a des items communs.

  • Dr Berciaud

    Oui, il y a des items communs. Il y en a qui diffèrent un peu. Donc, il y a effectivement un critère de répétition. Donc, il faut effectivement cinq crises à peu près identiques. Donc, parler de migraine, théoriquement, c'est un enfant qui a déjà eu au moins cinq épisodes d'une céphalie identique. Après, des fois, dès le premier épisode, on fait une suspicion de migraine. Mais pour affirmer ce diagnostic chez l'enfant, il faut aussi 5 épisodes. Il y a un critère de durée. Chez l'enfant, la crise peut être un peu plus courte, 2 à 72 heures. Il y a le critère de localisation stricto sensu, effectivement unilatérale. Chez l'enfant, ça peut être bilatéral, beaucoup plus fréquemment d'ailleurs. Et donc ce caractère uni ou bilatéral est moins prépondérant.

  • Maxime

    Chez l'adulte, c'est a bascule. Parfois à droite, parfois à gauche. Et chez l'enfant, c'est l'ensemble de la tête qui est douloureuse.

  • Dr Berciaud

    Exactement, ça peut être l'ensemble de la tête, mais ça peut aussi être qu'un côté, le gauche ou le droit, parfois toujours du même, parfois d'un côté ou de l'autre.

  • Maxime

    Le critère d'intensité ?

  • Dr Berciaud

    L'intensité, c'est le même critère. Donc modéré, sévère, ça veut dire que c'est une crise qui est intense.

  • Maxime

    Ok, critère pulsatile ?

  • Dr Berciaud

    Le critère pulsatile existe effectivement chez l'enfant. La difficulté, c'est que l'enfant ne va pas le verbaliser comme ça très facilement. Donc très souvent, on peut retenir un critère de migraine alors que l'enfant va définir un mot de tête plutôt à type de pression, de pesanteur. Le caractère pulsatile arrive plus tard quand c'est des grands enfants.

  • Maxime

    Aggravation lors de l'activité ?

  • Dr Berciaud

    Tout à fait,

  • Maxime

    c'est la même. Et nausées, vomissements ?

  • Dr Berciaud

    Nausées, vomissements font partie des critères. Tout comme la photo ou phonophobie, qui sont aussi présentes chez les enfants. Alors, spontanément, ils ne vont peut-être pas le dire. Donc, il faut savoir le questionner sans trop le suggérer non plus. Donc, leur demander s'il y a d'autres symptômes en même temps qu'ils ont mal à la tête. Est-ce qu'il y a d'autres choses qui les gênent ou qui les embêtent ? Et très spontanément, ils vont pouvoir dérouler.

  • Maxime

    D'accord. Il y a des symptômes particuliers qui sont hors céphalées, justement, hors maux de tête. Est-ce que tu peux nous les citer ? Oui. En fonction de quel âge, notamment, par exemple ?

  • Dr Berciaud

    Tout à fait, c'est en fonction de l'âge de l'enfant. Plus l'enfant va être jeune, plus les symptômes migraineux peuvent être un petit peu plus à bas bruit, c'est-à-dire que le mot de tête ne va pas être en première intention. Il y a notamment ce qu'on appelle les migraines abdominales chez l'enfant, avec des enfants qui vont présenter des crises répétitives de douleurs abdominales, avec prostration, nausées, vomissements, mais pas de plaintes céphalalgiques. Et en fait, ce sont des équivalents migraineux du tout petit. Tout comme peuvent... l'être, des douleurs abdominales intenses sans forcément qu'il y ait des vomissements mais de façon récurrente qui reviennent par crise et ces enfants en grandissant souvent finissent par évoluer vers une migraine un peu plus typique avec cette plainte de céphalée donc c'est souvent chez les petits enfants ça peut apparaître dès les nourrissons donc moins de deux ans et plus l'enfant va grandir, plus il va arriver vers l'âge élémentaire à peu près vers six ans plus la plainte de céphalée va pouvoir être présente ceci dit, des enfants de quatre ans peuvent se plaindre de céphalée aussi et

  • Maxime

    Est-ce qu'on arrive à faire le diagnostic de migraine à ce petit âge ou c'est plutôt à postériori ?

  • Dr Berciaud

    Souvent c'est à postériori. C'est en voyant des adolescents ou des plus grands enfants migraineux. Quand on interroge, on se rend compte qu'il y avait ces crises, parfois communément appelées crises d'acétone, avec des vomissements, douleurs abdominales, qui en fait étaient des équivalents migraineux. Et puis parfois, quand le médecin qui voit l'enfant connaît cette entité, ça peut être diagnostiqué beaucoup plus tôt.

  • Maxime

    D'accord. C'est vrai que le primabord... On part plutôt sur une pathologie abdominale digestive. C'est assez particulier. Mais il y a ce critère de temps, tout ce qu'on disait tout à l'heure, 4 à 72 heures. Il y a ces critères qui sont déjà là, même si c'est une plainte abdominale ?

  • Dr Berciaud

    Alors, ces critères sont là aussi. La durée de la crise, oui, c'est 2 en l'occurrence pour l'enfant à 72 heures. Mais effectivement, les autres critères peuvent être présents. Et il y a cette répétition des crises aussi qui est importante. l'impact aussi sur l'enfant.

  • Maxime

    D'accord. Pour parler de cette répétition, première crise, qu'est-ce qu'on réalise chez une première crise migraineuse chez un enfant ?

  • Dr Berciaud

    Première crise de céphalie intense chez un enfant qui aurait les caractéristiques migraineuses, qui ne rentre pas encore dans la case de migraine, parce qu'il n'y a pas eu assez de crise, mais qui a tous les autres critères, la photophonophobie, nausée ou vomissement et céphalie intense. Effectivement, il y a... Pas de nécessité à faire forcément des examens complémentaires très importants. C'est vrai qu'on a toujours l'épée de Damoclès de se dire, est-ce qu'on passe à côté d'autre chose, d'une cause d'une céphalée secondaire, c'est-à-dire qui ne serait pas liée à la migraine, mais sur une première crise très intense, un examen neurologique au décours normal, un enfant qui a un développement psychomoteur normal, qui a un examen clinique rassurant et un mot de tête qui répond bien au paracétamol et ibuprofène, plus volontiers on en parlera, mais plutôt l'ibuprofène. Eh bien, on n'a pas de nécessité de faire une imagerie cérébrale en urgence. Il n'y a pas de nécessité de faire de bilan sanguin. La migraine, c'est un diagnostic qui est vraiment clinique. Et donc, finalement, on n'a pas besoin d'examen complémentaire pour faire un diagnostic de migraine.

  • Maxime

    D'accord. On va parler d'évolution et après, on parlera de traitement. Mais est-ce qu'un enfant migraineux évolue vers un adulte migraineux ?

  • Dr Berciaud

    C'est une bonne question. Alors, il y a... Effectivement, la migraine chez l'enfant, ça reste assez fréquent. Il y a quand même 15% des adolescents qui vont être migraineux. Ils ne vont pas forcément tous évoluer migraineux à l'âge adulte, ces enfants. Cette évolution, elle est très individuelle. Il n'y a pas de facteur vraiment très identifiable pour prédire à un enfant s'il sera migraineux ou pas à l'âge adulte. L'intérêt, c'est d'avoir identifié précocement. La migraine, pour que l'enfant sache ce qu'il a, puisse reconnaître comment agir dessus, et mieux on connaît ce qu'on a, mieux on agit dessus, et plus on a de chance que plus tard ça évolue bien et qu'il n'y ait peu ou pas de crise à l'âge adulte.

  • Maxime

    Une notion importante de maîtrise de sa pathologie et de ses traitements pour que derrière il y ait moins une installation néfaste de la pathologie. On connaît un peu l'explication de la migraine, de comment elle s'installe, pourquoi elle arrive chez un enfant ou un adulte d'ailleurs ?

  • Dr Berciaud

    Alors, il y a des facteurs déclenchants qui sont multifactoriels. Justement, ça entretient un peu le flou sur d'où ça vient, pourquoi c'est là, qu'est-ce que c'est. Donc, il y a des facteurs déclenchants qui surviennent dans un contexte fragilisé. C'est-à-dire qu'il y a une hérédité de la migraine. Souvent, on retrouve des cas, des antécédents familiaux de personnes migraineuses. Donc, il y a un terrain migraineux familial, souvent. et par-dessus viennent se greffer des facteurs déclenchants. C'est vraiment ce qui vient appuyer sur la gâchette et déclencher la crise. Donc ça peut être la fatigue, ça peut être d'avoir pas assez bu, ça peut être la chaleur, le soleil, la lumière, le bruit. Ils sont très individuels, donc il y a tout ce qui est facteur, on dit extérieur, que je vous ai un petit peu cité là, et puis il y a tout ce qui est facteur intrinsèque, et donc ça va être la fatigue, le stress. L'anxiété, la concentration, les émotions en général, elles peuvent être positives et déclencher une crise de migraine, être très excité d'aller à un anniversaire, et les enfants font parfois des crises de migraine.

  • Maxime

    Même le sommeil, l'hyper-sommeil.

  • Dr Berciaud

    L'hyper-sommeil, exactement. Dormir trop, faire une très grande grasse matinée pour des adolescents sur un week-end, et boum, ça peut déclencher une crise derrière. Ou à l'inverse, le manque de sommeil, mais ça, ça paraissait plus logique pour les gens. Donc il y a tous ces facteurs environnementaux, extérieurs et intrinsèques. qui vont venir, dans certaines circonstances, déclencher la crise. Mais ce n'est pas toujours reproductible. C'est ça qui, des fois, peut être un peu perturbant, parce que dans une situation égale, parfois il va faire la crise, parfois il ne va pas la faire. Donc il y a ce côté un petit peu aléatoire malgré tout.

  • Maxime

    Ok. On va parler des traitements. Alors, est-ce qu'une migraine peut être traitée par un médecin traitant ? Est-ce qu'il peut gérer tout ça ?

  • Dr Berciaud

    Bien sûr, tout à fait. Oui, c'est d'ailleurs le premier médecin qui est en première ligne et qui voit ses enfants migraineux. Donc oui, ça peut tout à fait être traité par un médecin traitant, et ça doit l'être d'ailleurs, et du coup, il faut identifier la crise de migraine, et à partir du moment où c'est identifié, il y a vraiment des choses très simples et basiques à respecter. Quand la crise commence, on a repéré que c'était une crise de migraine, on met l'enfant au calme. On lui propose de se mettre un petit peu au repos et précocement, on donne le traitement. Ça, c'est vraiment quelque chose qui est important, c'est-à-dire qu'il faut prendre le traitement dans la première demi-heure, première heure idéalement. Un traitement qui est pris deux ou trois heures après, la crise est installée et peut ne pas du tout marcher, alors que le même traitement peut parfaitement marcher s'il est pris précocement.

  • Maxime

    Pour casser la crise.

  • Dr Berciaud

    Pour casser la crise. Moi, tout le temps, je fais la comparaison avec l'eau qui bout dans la casserole. Si on éteint tout de suite le feu, ça ne va pas déborder et puis ça va vite rentrer dans l'ordre. Et puis, si on se rend compte un peu trop tard et qu'on arrive après... On met plus de temps à tout ranger. D'accord. C'est un peu pareil.

  • Maxime

    Ok. D'ailleurs, mais ça, ça va être fonction du diagnostic qui est réalisé plus facilement plus tard. Mais on n'en a pas parlé, mais il y a un pic de prévalence de la migraine chez l'enfant.

  • Dr Berciaud

    Le moment où c'est le plus fréquent, c'est effectivement chez les adolescents. Donc 15 à 30% des adolescents qui sont migraineux.

  • Maxime

    C'est par un biais de diagnostic peut-être ?

  • Dr Berciaud

    Il y a souvent un biais de diagnostic chez le tout petit. Mais ça reste effectivement quelque chose de très fréquent. En consultation de douleur, c'est quasiment la moitié des patients qu'on voit pour des céphalées. Alors il y a les migraines et puis des fois il y a les plus petits motettes, les céphalées de tension. Mais la migraine est un des diagnostics principaux qu'on a en consultation de douleur.

  • Maxime

    D'accord. On poursuit sur le traitement. Oui, exactement. Traitement médicamenteux de première intention ou pas ?

  • Dr Berciaud

    Alors quand la crise est là, sur la crise, oui, souvent, il va y avoir besoin d'un traitement médicamenteux pour la crise de migraine. Alors vraiment, le chef de file, c'est les anti-inflammatoires non stéroïdiens. Et c'est vraiment l'ibuprofène qu'il faut donner à bonne dose. Donc c'est 10 mg par kilo. Donc ça veut dire que des enfants qui vont faire 40 kg, par exemple, peuvent prendre des comprimés comme les adultes à 400 mg. Ce qui parfois freine un petit peu la prescription. On a tendance à sous-doser ces enfants qui font 40 kg et qui ont peut-être une dizaine d'années, et on leur donne 200 mg. Non, c'est bien 10 mg par kilo, 400 mg donc au maximum, ou en solution buvable en dose poids, là c'est plus simple. Et donc donner précocement, dès le début de la crise. Associer à des mesures physiques, souvent mettre un peu de frais sur le front, parfois il peut y avoir des huiles essentielles, mais ça, il faut interroger l'enfant sur ce qui lui fait du bien. s'il se mettre au repos fait du bien et il met du froid très bien, si c'est d'écouter une musique, on peut le laisser écouter une musique. Il n'y a pas forcément besoin de le mettre dans le silence si finalement un environnement musical lui fait du bien.

  • Maxime

    Est-ce qu'on couvre avec un protecteur gastrique ?

  • Dr Berciaud

    Pas forcément. Quand c'est vraiment en prise unique comme ça et peu fréquente, ça peut être très bien toléré. Parfois, certains enfants vont nous dire qu'effectivement, à la prise du médicament, ils vont avoir des brûlures d'estomac. Et dans ces cas-là, on met un protecteur gastrique associé.

  • Maxime

    D'accord. Et c'est important de mettre d'emblée la bonne posologie, parce que derrière, il peut y avoir une reprise médicamenteuse qui entraîne un mésusage. On en parlera tout à l'heure peut-être. Mais ne pas avoir peur de la première prise pour casser encore une fois cette crise et ne pas amener un crescendo sur la prise médicamenteuse. Ok. Après l'ibuprofène, qu'est-ce qu'on fait si ça ne fonctionne pas ?

  • Dr Berciaud

    Alors, quand on est chez un enfant de moins de 12 ans, moins de 30 kilos, on peut éventuellement proposer une dose d'à peu près une heure après le temps d'action, quand même une demi-heure, une heure après, de paracétamol. Ça, c'est possible. Alors, on donne 15 mg par kilo. Et chez l'enfant de plus de 12 ans ou 30 kilos, on peut utiliser l'autre famille de médicaments qu'on donne dans la migraine, notamment dans le traitement de crise. La famille des triptans, et c'est le sumatriptan, c'est un spray qui se fait en spray nasal. Et on peut le donner chez l'enfant. Donc il y a deux dosages, il y a 10 mg et puis il y a 20 mg. On commence d'abord par le 10 mg et puis si le 10 n'est pas suffisant, sur les crises ultérieures, on peut proposer le 20.

  • Maxime

    Il vient après la prise ibuprofène ?

  • Dr Berciaud

    Généralement, on le propose d'abord en seconde intention. Et chez les enfants qui nous répondent qu'ils ont systématiquement besoin de le prendre, on peut parfois le donner en première intention.

  • Maxime

    Est-ce que chez l'adulte, on peut proposer INS plus triptan d'emblée ? Est-ce que chez l'enfant, c'est pareil ?

  • Dr Berciaud

    Ça peut se faire si l'enfant nous dit que, quel que soit l'ordre, c'est-à-dire anti-inflammatoire non stéroïdien puis triptan, ou triptan puis anti-inflammatoire, il y a quand même besoin des deux. Dans ces cas-là, on peut être amené à proposer à prendre les deux d'emblée.

  • Maxime

    D'accord. Sumatriptan prescrit par ?

  • Dr Berciaud

    Tout le monde. Médecin traitant peut prescrire, médecin pédiatre, structure douleur, tout médecin est habilité à pouvoir prescrire le sumatriptan. Ça a l'autorisation, qu'on dit là et même, l'autorisation d'utilisation de mise sur marché dès 12 ans. Donc il n'y a pas de souci là-dessus.

  • Maxime

    Les posologies, parce qu'il y a la case de mésusage médicamenteux, beaucoup côté migraine. Quelle est la prise médicamenteuse maximale de l'INS et des triptans ?

  • Dr Berciaud

    On essaie de dire pas plus de trois prises médicamenteuses au total, maximum par semaine. Si on en est à ça, il faut quand même reconsulter si ça fait trois ou quatre mois que l'enfant prend trois fois par semaine des traitements anti-inflammatoires ou des triptans. Ce qui est important, c'est de préciser que c'est des prises médicamenteuses, c'est-à-dire que ce n'est pas trois fois des INS, trois fois des triptans, parce que parfois ça peut être un peu confondu. Et l'idée, c'est que comme chez l'adulte, l'enfant peut avoir des céphalées de mésusage médicamenteux, c'est-à-dire que de trop consommer de médicaments peut... finalement aussi entraîner des céphalées et s'associer aux céphalées migraineuses. C'est vraiment important d'identifier la bonne dose à la bonne fréquence et de le préciser sur les prescriptions.

  • Maxime

    Ok. Et donc, on introduit comme ça le traitement de fond s'il y en a un côté pédiatrie, puisque, en tout cas, tu vas me dire, mais côté adulte, le traitement de fond s'envisage s'il y a un excès de prix de médicamentes ou une altération sur la qualité de vie. Est-ce que ce sont les mêmes critères côté pédiatrie ?

  • Dr Berciaud

    Oui, alors chez l'enfant, globalement, il y a effectivement une notion de traitement de fonds. Alors, il faut savoir que c'est un petit peu différent de chez l'adulte, parce que les études chez l'enfant ont finalement montré peu d'efficacité des traitements de fonds médicamenteux. Donc, en fait, le premier traitement de fonds à proposer chez un enfant, et finalement, ça peut se proposer parfois, quelle que soit la fréquence des crises, c'est plutôt quand les crises ont commencé à avoir un impact sur le quotidien. On va plutôt jauger là-dessus. On va proposer des apprentissages de techniques psychocorporelles. Alors qu'est-ce que c'est que ces techniques psychocorporelles ? Ça va être des techniques pour apprendre à l'enfant à mieux gérer sa crise de migraine, mieux la ressentir, mieux gérer la fatigabilité, le stress du quotidien, comme de la relaxation, de la sophrologie, il y a les thérapies cognitivo-comportementales, il y a l'hypnose également. Et donc c'est plutôt ces techniques-là qu'on va utiliser.

  • Maxime

    Efficacité démontrée ?

  • Dr Berciaud

    Avec une efficacité démontrée, parfois même supérieure à des traitements médicamenteux. Après, dans certaines situations... Ces traitements médicamenteux peuvent être utilisés, mais là, ça va demander par contre l'avis d'une structure douleur ou neuropédiatrique, parce que vraiment, ce n'est pas du tout la première intention. Ça vient tout à fait en deuxième ligne.

  • Maxime

    Bétabloquant comme chez l'adulte ? Envisageable ?

  • Dr Berciaud

    Alors, les traitements de fond médicamenteux chez l'enfant... peut potentiellement utiliser, et encore une fois, c'est sans vraiment preuve dans la littérature, ça peut être effectivement les bêtas bloquants, et ça peut être sinon la famille des antidépresseurs tricycliques, telles que la mitryptiline, effectivement.

  • Maxime

    Ok. Mais finalement, même toi, en structure douleur, tu les manipules ou pas ?

  • Dr Berciaud

    Alors, on les manipule dans certains cas. On les manipule vraiment quand on arrive en seconde ligne, c'est-à-dire que... On a optimisé tous les facteurs déclenchants, identifié, on a mis des prises en charge globales, physiques, psychocorporelles. Et si malgré cela, ça reste compliqué, et notamment dans les cas de surconsommation médicamenteuse, pour arriver à faire ce qu'on appelle un sevrage médicamenteux. Ça peut paraître paradoxal, mais des fois, on a besoin de mettre un peu de traitement de fond pour pouvoir baisser les traitements de crise, passer un cap. Et puis ensuite, c'est un traitement qui, quand il est mis en place, est très régulièrement réévalué. Et donc, on essaie toujours de l'arrêter.

  • Maxime

    Ces enfants, ils ont quel avenir côté migraine ? Est-ce qu'ils vont être envoyés au centre de la douleur côté adulte ?

  • Dr Berciaud

    Alors, on essaie dans nos missions de les autonomiser, de faire en sorte que ça n'impacte plus leur vie et que ça reste... très peu fréquent voir que ça s'arrête complètement et donc de ne pas avoir à les passer en structure adulte. Mais effectivement, il y a des fois, ça persiste où il y a un besoin ressenti de garder un suivi pluriprofessionnel. Et donc, on peut effectivement parfois faire des réunions de transition où on présente des jeunes adultes, du coup, en structure douleur adulte pour que le suivi puisse poursuivre. Donc, ça peut arriver effectivement.

  • Maxime

    Ok. Sylvie merci beaucoup c'était très très clair et à bientôt pour de nouveaux épisodes merci beaucoup merci à toi voilà c'était un épisode de médecins qui étudient merci d'avoir écouté je vous invite à vous abonner en cliquant sur la petite clochette comme ça vous serez avertis de la sortie de nouveaux épisodes à bientôt

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