- Christine
On n'a qu'une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix. Chaque mois, venez à la rencontre de mes invités qui lèvent le voile sur l'histoire singulière de leur voix. Au programme, des voix parlées, des voix chantées, des voix jouées et des voix parfois malmenées. L'intention ? vous procurer des émotions, vous faire voyager, vous apporter des conseils et vous proposer un pas de côté pour vous inviter à aimer votre voix.
Dans cet épisode, vous allez à nouveau entendre la voix de Sarah Dubois, orthophoniste. Si vous ne l'avez pas déjà fait, je vous invite à écouter la première partie de notre entretien dans l'épisode précédent. Et dans ce second épisode, nous allons évoquer avec Sarah pourquoi et comment elle a choisi d'exercer le métier d'orthophoniste. Nous verrons ensuite comment est arrivé un projet de création de support pédagogique pour illustrer visuellement les enjeux anatomiques et physiologiques de notre voix. Sarah va ensuite nous partager pourquoi elle a choisi de mettre en place des ateliers vocaux. Enfin, nous allons évoquer l'aspect tabou de la voix encore aujourd'hui. et les difficultés qu'on rencontre parfois à assumer notre voix, et notamment les changements qu'elle subit au fil du temps. Bonne écoute !
Quand tu as fait le choix de l'orthophonie, est-ce que tu avais conscience de tout c'est possible, où c'est venu petit à petit ? Est-ce que tu peux aussi nous partager pourquoi tu as fait ce choix-là ?
- Sarah
Eh bien alors, pas du tout. Au début, je ne voulais pas du tout être orthophoniste. Je voulais être sage-femme parce que j'adore les bébés. Mais quand j'ai pris conscience que... qu'il fallait être très douée dans les matières scientifiques au lycée, que les sages-femmes n'avaient pas toujours la joie de donner naissance à des enfants en bonne santé. Tout ça, ça a été un peu plus dur pour moi de l'envisager. Et puis de toute façon, je pense que j'ai beaucoup de domaines créatifs qui m'ont empêchée d'aller dans les zones scientifiques. Donc j'ai fait à l'époque un bac littéraire. qui me permettait par contre d'aller dans les voies un peu plutôt paramédicales. J'avais envie du médical quand même, mais voilà, le paramédical c'était bien pratique. Et en fait c'est ma petite maman qui m'a dit, moi j'étais enseignante, j'aurais adoré être orthophoniste, renseigne-toi. Effectivement, pourquoi pas. Donc la première année j'étais à la maison en prépa à distance, préparation de concours, parce que c'était à l'époque en tout cas un concours très sélectif. Et bon, du fait des soucis de santé de mon père, j'ai pas été très concentrée. J'ai même raté mon permis cette année-là. Et l'année d'après, quand tout est rentré dans l'ordre, je suis allée à Montpellier, j'ai fait une prépa où on nous a bien appris tout le côté scolaire, vocabulaire et tout du concours. Le concours en poche à Nantes, là, bon, je n'ai pas fait partie des meilleurs élèves, toujours. parce que moi j'ai besoin de dessiner, j'ai besoin de chanter, j'ai besoin de musique. J'étais beaucoup au rattrapage, mais ce n'est pas grave. Ça m'a permis de bien apprendre plein de fois les mêmes choses, et d'avoir peut-être plus de reste aujourd'hui. Et puis un peu au culot, quand j'ai déménagé à nouveau dans les Alpes pour retrouver mes montagnes, la Provence, les Lavandes, mes parents aussi, mon père qui était resté en... dans cette région du sud-est, je me suis inscrite au conservatoire de Gap. À l'époque, c'était à Gap, dans les Hautes-Alpes. Mais vraiment, en ne sachant pas du tout ce que j'allais y trouver. Juste, je savais que ça faisait un peu bien d'aller au conservatoire, un côté un peu élitiste. Je m'attendais à ce qu'on m'enseigne des choses un peu intelligentes. Je ne sais pas trop comment décrire ça, mais je me faisais une idée un peu fausse, finalement, du fait que... Un conservatoire pour moi c'était pour les plus érudits, alors que pas du tout, c'est fait pour, au contraire, les gens qui sont des fois dans le besoin, qui n'ont pas beaucoup d'argent et qui peuvent, grâce à ce concept-là d'école de musique communale, qui peuvent accéder à un enseignement musical riche déjà et pour le coup effectivement très intelligent, très varié et très pertinent. Et donc j'ai atterri dans la classe de... chorale. Et à ce moment-là, je ne faisais pas du tout de rééducation vocale. Je ne prenais en charge que des jeunes, des enfants, puisqu'à Nantes, on ne nous avait pas trop appris. Voilà, comment faire ? En fait, quand on sort de la fac, on est un peu bébé, bébé ortho, on ne sait pas trop, il faut se former à la suite de ça. Et bon, je n'avais pas trop cherché à me former dans d'autres domaines que le scolaire, puisque c'était surtout ça notre demande. La demande, elle était énorme. Il y avait des fois deux ans d'attente chez les consœurs. Enfin bon, c'était assez incroyable. Et puis en fait, mon chef de chœur qui d'un coup découvre une orthophoniste qui vient chanter était tout enthousiaste, tout joyeux. Et il me posait plein de questions et j'étais trop gênée, je ne savais pas répondre. Ah non mais moi je ne sais pas en fait dans quel sens sont mes cordes vocales, j'en savais rien. À l'école on ne nous l'avait même pas trop dit. Je ne mets pas ma main à couper sur le fait que j'étais très concentrée non plus. Mais voilà, en tout cas c'est un peu grâce à ce monsieur-là. que je me suis lancée, parce que j'ai eu la sensation qu'on aurait pu presque être en binôme autour de la voix, autour de son concept, autour de son traitement, autour de sa prévention. Il y avait tout un truc un peu comme ça. Et moi, la prévention, j'y tiens fort. J'aime beaucoup ça. Et donc, je me suis mise à vraiment me renseigner. On a fait une formation, une sorte de stage sur une semaine à Marseille. Lui, son épouse et moi, mais d'autres, on y est allés en tout cas tous les trois. On a appris plein de choses. C'était une formation un peu orientée pour les chanteurs professionnels. J'ai rencontré des gens que j'avais vus à la télé. C'était assez incroyable. Je suis très émotive, donc moi chanter, il a fallu un moment pour que je chante devant tout le monde, ça a été catastrophique. Mais ce n'est pas grave, c'est une expérience comme une autre. Et à la suite de ça, j'ai eu trop envie d'en savoir plus. Et en fait, j'ai été boulimique de formation sur la voix, sur les livres que j'ai pu acheter, les gens que j'ai pu rencontrer. Je me suis rapprochée d'un phoniatre assez connu, qui, ma foi, maintenant, n'est plus qu'à Montpellier, mais qui était à Montpellier et à côté de Marseille, qui s'appelle Benoît Amy De Labretèque, qui est vraiment, en orthophonie en tout cas, une référence au moins au niveau des méthodes de rééducation, mais aussi des livres. Et qui, en plus de ça, est un homme adorable. Et en fait, le monde est petit. Ce monsieur, c'est le cousin de mon chef de chœur de Gap. Donc voilà, tout se réunit. Et j'ai eu la chance de pouvoir faire un diplôme universitaire plusieurs années derrière à Toulouse pour les voix professionnelles, les enseignants, les chanteurs, les guides, les personnes qui se servent de leur voix comme outil. Et donc, en fait, j'ai rédigé... Deux mémoires, mon premier pour la fin de mes études, sans le savoir que j'allais aller sur la voix, ça devait déjà m'intéresser parce que j'avais traité le sujet des sportifs de haut niveau et des troubles de la voix qui pouvaient surgir face à ce qu'on appelle les efforts à glottes fermées pour tout ce qui est musculation, altérophilie, les poussées en rugby, tout ça. Et puis mon deuxième mémoire était sur le sujet des instrumentistes avant et des effets sur la voix, bons ou mauvais. Et en fait, plus j'ai fait des formations et plus j'ai été passionnée. C'est sans limite. C'est ça qui est incroyable et qui est merveilleux, c'est que c'est sans limite. Et à chaque fois qu'on rencontre quelqu'un, à chaque fois, ça me questionne parce que la plupart du temps, en fait, c'est une nouvelle problématique puisque c'est une nouvelle personne. Donc à chaque fois, je suis là, mais alors comment on va faire ? Donc je me retrouve à inventer des exercices. Je me retrouve à, des fois, en fait, rien qu'à part honnêteté, en disant avec la personne, ben voilà, moi, je ne vous ai jamais rencontré encore. Donc on va chercher ensemble. Le but c'est que vous, vous puissiez être autonome dans la gestion de votre voix. Moi votre voix je la connais pas encore bien. Je vais vous proposer des choses, peut-être que ça marchera pas, et puis faudra me le dire. Peut-être que vous arriverez pas à les faire à la maison, faudra me le dire. On a un contrat d'honnêteté. Je préfère quelqu'un qui me dit j'ai pas travaillé, et je vois que du coup effectivement peut-être y a pas de changement, que quelqu'un qui me dit qu'il a travaillé alors qu'il ne l'a peut-être fait qu'une fois et en fait si je ne vois pas de changement, je vais changer de méthode Alors que peut-être cette méthode aurait été vraiment bonne pour cette personne. Donc il y a un vrai contrat d'honnêteté de toute façon à la base. En plus, moi je mets les gens à l'aise, je travaille en chausson. On rigole bien, ça arrive qu'on prenne une tisane. Je veux dire, ce n'est pas protocolaire. Actuellement j'ai une stagiaire, je pense qu'elle ne comprend pas. Où est-ce qu'elle a mis les pieds ? Et en même temps, elle est contente de travailler en chausson aussi. Elle me dit j'adore le concept. Voilà comment je suis arrivée à la voix et puis de toute façon, moi j'avais envie aussi de connaître de l'intérieur et de poursuivre mon ressenti et de pouvoir me dire tiens, toi tu ressens ça, ah ouais je connais, je sais comment moi je ferais pour que ça soit plus facile à sortir comme son, peut-être je peux te le conseiller, ok. Donc en fait je me suis laissée entraîner par les propositions de mes professeurs de conservatoire et donc je me suis inscrite en chant lyrique à ce moment-là. J'en ai fait, je crois, peut-être 5 ans ou 6 ans, je ne sais plus. Et malheureusement, quand je suis arrivée ici, j'aurais bien aimé poursuivre, mais la classe était pleine. Donc, je tenterai ma chance l'année prochaine. Et puis avec la grossesse, malheureusement, il y a beaucoup de choses qui bougent aussi. Le diaphragme bouge, le périnée, n'en parlons pas. Et puis les cordes vocales. Avec les hormones, j'allais encore mon enfant, donc j'ai aussi des hormones de lactation qui se manifestent. On n'est pas égaux, les femmes et les hommes, là-dessus. En tout cas, il y a aussi ça qui rentre en ligne de compte au niveau des voies féminines. C'est qu'on est très sensibles à ces choses-là, et notamment au cycle menstruel. et ça fait partie de la connaissance. sens qu'on doit avoir de soi. Il y en a pour qui ça change rien, puis il y en a pour qui ça fait une voix horrible. Ah mais moi j'ai une voix terrible, tous les mois j'ai un truc, je sais pas ce qui se passe. T'es sûre ? Moi je peux te dire. On peut peut-être découvrir ensemble. Et en fait des fois on peut juste rien faire. Il faut juste accepter par moment. Si on peut, en tout cas si c'est ce genre de raison, à part de prendre quelque chose qui fait qu'on a plus de règles et c'est pas bon pour la santé.
- Christine
Mais déjà, on peut rien que de l'avoir mis en conscience. Oui ça.
- Sarah
ça aide donc voilà entre le parcours musical et le parcours je dirais des formations professionnelles je suis arrivée à un moment où j'aime mon métier alors que j'aimais plus mon métier quand c'était les... Les premières années, finalement, ce n'était pas pour le scolaire que j'avais fait tout ça. Et ce n'était pas vraiment conscient non plus, je n'avais pas spécialement d'issue, je ne voyais pas comment j'allais faire pour rendre mon métier potable, si ce n'est mettre beaucoup de musique au milieu. et organiser mes séances autour, d'un point de vue alimentaire, disons. Mais c'est trop nul, d'aller au travail juste pour ça. Surtout quand il reste presque 40 ans. 35, 40 ans. Voilà. Voilà, donc c'est toujours le cas. J'apprends toujours de ce que je peux pratiquer personnellement et des gens que je reçois. Donc ça me motive en tout cas à continuer longtemps comme ça.
- Christine
Et tu me partageais tout à l'heure que ton chef de chœur, quand tu as parlé là, t'avais fait une demande particulière. Je ne me trompe pas, c'est bien ça ?
Oui. Est-ce que tu peux partager ça avec nous ?
- Sarah
Oui, oui, bien sûr. Alors, à l'époque... comme il a su que j'étais orthophoniste il se doutait que j'avais peut-être des tuyaux sur des sites de matériel orthophonique et en fait lui-même étant donné qu'il est le digne cousin de ce grand ponte de l'aphonie Il avait déjà dans son parcours établi des liens avec l'orthophonie, il avait déjà été dans des conférences, des choses comme ça, faire un peu des petits UV d'études. Et pour autant, il ne trouvait pas de support papier, une affiche, un poster, quelque chose pédagogique qui pourrait lui permettre d'illustrer ses propos, notamment auprès des jeunes choristes, des enfants, des ados. Pour qui, c'est encore moins évident, parce qu'ils n'ont pas eu trop le temps de se confronter à des problèmes de voix, pour le coup, et donc ils ne se sont pas forcément posé la question de comment ça marchait. Et force est de constater que, comme pour tous les instruments, quand on connaît comment fonctionnent les instruments, l'instrument, on sait un peu mieux s'en servir. Donc il cherchait ça. Alors je regarde sur les sites que je connaissais un peu, sans tout connaître, alors peut-être que ça existait déjà, mais bon en tout cas je fais un tour, plus ou moins exhaustif, et je ne trouve rien. Donc je lui ai proposé de moi-même lui créer quelque chose. Alors le private joke étant poussé à l'extrême, c'est lui le centre, au centre, j'ai fait un modèle masculin au centre d'une affiche, et c'est son visage. Et puis j'ai dessiné sur les côtés les différents acteurs de la voix, donc évidemment l'acteur anatomique, mais aussi l'acteur de la soufflerie avec le diaphragme et l'air. L'acteur de la posture, forcément. La voix n'est pas la même quand on est debout, assis, avachi, tendu, pas tendu, ou quand on est allongé. Et puis dernièrement, l'acteur de la résonance. Où est-ce que le son est envoyé une fois que les cordes vocales ont fait leur vibration ? Où est-ce que ça sonne et quels sont les éléments qui participent à cette résonance ? J'ai fait ça sur un système de couleurs pour que ça soit plus facile à... à visualiser pour les enfants, mais finalement c'est aussi bien pour les adultes. Et en fait, il a vraiment apprécié, alors il a bien rigolé de voir que c'était lui au milieu, mais il a vraiment bien apprécié le matériel. Alors c'est une grande affiche parce que quand on est en chœur, on n'est pas toujours au premier rang. Il faut que ça soit visible, donc c'est un format... à un standard, je pense que ça doit faire 59 par 84 ou quelque chose comme ça et en fait il m'a dit mais en fait tu devrais la commercialiser en tout cas faire la démarche de la proposer à d'autres parce que elle devrait intéresser c'est d'autres gens. Si elle n'existait pas et que maintenant il y a ça, franchement, moi, ça m'aide tous les jours. Bon, me voilà par le hasard de la vie sur une pointe de Bretagne avec à l'époque mon conjoint et sa famille. Et en fait, ils regardaient le match de rugby et moi, j'avoue que je suis désolée pour la région, mais c'est vraiment pas mon truc, le rugby.
- Christine
C'est pas le mien non plus dans ce camp de champ.
- Sarah
Je suis désolée pour tous les fans de rugby. Mais bref, je m'ennuyais vraiment fort et donc Donc je me suis dit, tiens, c'est peut-être l'occasion. J'ai qu'à... J'ai qu'à... publié. Je me suis servi d'un réseau social bien connu et j'ai publié mon affiche visuelle en disant que je la vendais. Que j'avais du stock un peu et que si ça intéressait quelqu'un, c'était possible. Et en fait, c'était une vraie grande surprise parce que dans la nuit, il y a eu beaucoup de commandes et je n'étais pas du tout prête à ça. Déjà, du coup, je n'étais pas du tout chez moi et je n'avais pas ce qu'il fallait. pour expédier, j'avais peut-être 4 cartons qui traînaient mais voilà quoi donc c'était vraiment n'importe quoi tout cet enthousiasme était un peu inattendu enthousiasme pardon et voilà, et c'est parti comme ça et en fait, ben voilà ce chef de chœur a son visage placardé dans pas moins de 300 cabines Et ça c'est rigolo en fait. Je parle même pas d'une victoire parce que c'était pas du tout un but en soi. C'était plutôt une sorte de défi. Mais c'est rigolo qu'il soit là placardé. Alors en ce moment je suis en train de la refaire pour qu'il n'y ait pas qu'un modèle masculin. Je suis en train d'en redessiner une avec un modèle féminin. qui était ma prof de chant de Gap. Je prends des gens que je connais. Je suis en train d'en faire une aussi sur la déglutition. Cette fois, c'est une copine qui sera à l'honneur. Et puis, mon conjoint actuel... Le papa de mon fils est clarinettiste, c'est pour ça qu'on est ici. Il est prof de clarinette au conservatoire. Il m'a demandé de faire une tablature un peu plus buvable que les tablatures actuelles de clarinette. Je suis en train aussi de faire ça. ça avec la posture du clarinettiste voilà comment on fait les notes les tablatures je dirais de base mais un peu plus joli un peu plus aéré aussi que ce soit moins étouffant dans le but un peu comme pour pour la première affiche d'être d'être lisible par les enfants d'être intuitive et puis puis face enfin que ce soit un vrai outil facilitateur quoi je trouve ça vraiment passionnant cette cette démarche.
- Christine
C'est vraiment beau de voir comment tu allies ton goût pour la créativité avec ta passion pour la voix. On le sent à ta place. C'est vraiment chouette. Sarah, aujourd'hui tu proposes des ateliers vocaux que tu as intitulés « À la rencontre du fonctionnement anatomo » . physiologique de la voix, c'est bien ça. Est-ce que tu peux nous partager cette idée que tu as eu et que tu as envie de développer aujourd'hui ?
- Sarah
Alors, c'est une idée que j'ai eue au sein du conservatoire de Gap, quand j'y étais, parce que, entre certaines rencontres de professeurs, mais aussi certaines rencontres d'élèves, j'avais l'impression qu'on ne savait pas comment ça marchait la voix. Et moi, comme je commençais à m'y connaître un peu, j'ai proposé un truc un peu officieux. entre deux cours de faire un atelier de deux heures où je pouvais expliquer un peu des choses on pouvait me poser des questions et en fait j'ai eu la sensation que les gens apprenaient vraiment beaucoup de choses ce qui pour le coup moi me paraissait évident quand on pratiquait le chant on aurait dû savoir ça et en fait c'était pas le cas donc je me suis dit ça serait pas mal peut-être de développer pour les chœurs carrément parce que Bon, de manière générale, à part quand on est en semi-professionnel ou en professionnel, un chœur c'est très amateur. Souvent c'est une moyenne d'âge de 60-70 ans parce que les gens attendent d'être à la retraite et d'avoir du temps pour se faire du bien et aller chanter. Donc au-delà du vieillissement naturel de la voix, souvent ce sont des gens qui n'ont pas forcément conscience de comment ça marche. Et donc des fois musicalement on est au rendez-vous et puis des fois c'est pas le cas. Et des fois, les gens ressortent de là, j'ai mal à la voix quand même, comment ça se fait que là, je n'arrive pas à aller dans les aigus alors qu'on me met dans ce pupitre-là. Des fois, les chefs de chœur mettent les gens dans un pupitre alors que ce n'est pas du tout la place de la personne, mais simplement, il manque d'effectifs. Il y a des choses un peu comme ça qu'on observe, alors pas chez tout le monde, heureusement. On a des gens qui n'échauffent pas les voix aussi avant de faire une séance. Donc bon, je me suis dit, c'est peut-être aussi bien pour les chefs de chœur que pour les choristes. pour les amateurs en tout cas de faire un point sur ces choses là sur le fait que ce sont des muscles que donc ça s'échauffe encore plus quand on vieillit puis vieillir je veux dire c'est tout le temps c'est pas que à partir de tel âge non mais moi j'ai que 59 ans ça ne marche pas non ça marche pas comme ça c'est à partir de 18 ans le vieillissement avant
- Christine
ça on grandit et après on vieillit ça c'est dit donc c'est pour tout le monde non mais c'est bien en même temps c'est rassurant on s'est fait en moins seule non mais c'est ça et donc bon les
- Sarah
L'idée est restée. Je voulais au début m'allier à une kiné qui était à l'époque dans la région aussi et qui, elle, dans son cheminement personnel, s'était spécialisée en kiné du musicien. Et donc on trouvait ça génial de pouvoir faire orthophonie de voix et kiné du musicien, faire de la prévention. Et on avait un peu milité pour qu'on puisse présenter quelque chose qui soit à l'année un peu comme un TD obligatoire en formation musicale pour les instruments avant et pour les chanteurs. Pas de bol, le Covid est arrivé. Et donc, c'est tombé à l'eau. Cette kiné, elle est partie. Elle est allée faire un projet de tiny house dans les Pyrénées. Elle n'est pas loin, sûrement. Je ne sais pas ce qu'elle est. On s'est perdu de vue, quoi. Et puis moi, je suis restée un peu avec mon projet sur les bras, mais en ne sachant pas trop quoi en faire, quoi. Puis peut-être, voilà, avec les histoires de Covid et tout, bon, peut-être qu'on avait changé. Tous les humains ont un peu changé. notre vision de la société, des priorités, tout ça. Je suis entrée à ce moment-là dans un chœur, enfin juste un petit peu avant peut-être, dans un chœur où c'était le chœur de la cathédrale, dirigé par Benoît Dumont, avec qui j'ai bien sympathisé. Et en fait, dans ce chœur, comme dans tous les autres chœurs, c'est surtout des personnes amatrices. Et puis, je ne vais pas dire âgées parce que ce n'est pas le cas de tout le monde, mais avec une moyenne d'âge plutôt autour de 60-70 ans. Et puis, je fais les mêmes constats avec les mêmes fragilités, des gens qui ne chantent pas parce qu'ils préfèrent pas y aller. Enfin, qui pourraient peut-être atteindre ces notes et qui sont frustrés de ne pas le faire, mais qui, des fois, ont un peu les bons réflexes de ne pas se forcer. Faisons un état des lieux de tout ça. J'ai créé ces ateliers. Je dis à la rencontre anatomo-physiologique parce que je suis musicienne, mais moi aussi très amatrice. Je n'ai pas du tout la prétention de me vendre comme prof de chant. Grâce à mon DU de Toulouse, je peux prétendre être coach vocale, mais mon vrai métier, ça reste l'orthophonie et la rééducation. Et donc, moi, mon filon, c'est vraiment expliquer comment ça fonctionne, à quoi ça ressemble, comment on ressent ça, qu'est-ce qu'on peut faire pour protéger. Et voilà, et bamose pour tous, quoi. Il faut que chacun puisse être autonome dans son ressenti, de sa voix. On ne peut pas tous être pareil, on n'est pas tous pareil, ce n'est pas possible. Donc, voilà, je prépare cet atelier, je prépare un petit fascicule que chacun aura à la fin. Et puis, surtout, je monte ma boîte parce qu'en orthophonie, on vend des services. Mais là, j'avais bien envie quand même de faire quelque chose. Et j'ai monté ma boîte de toute façon pour les affiches. Donc, j'ai mis ça un peu dans le même paquet. Je me suis dit, bon, voilà, j'ai un côté un peu orthophonie pure rééducation et puis un côté entrepreneur. où je fais des ateliers de prévention, en tout cas de connaissances, un petit peu plus poussées sur la voie pour ceux qui ne connaissent pas du tout ou qui voudraient en savoir un peu plus. Et puis ces affiches-là qui intéressent un peu du monde. Voilà, donc j'ai eu le temps de faire un atelier à Gap avant que ce soit l'heure de partir, de venir pour les Pyrénées. Et donc là, entre ma grossesse, la découverte de la maternité, des premiers mois de mon fils, j'ai... remis ça à plus tard et là je me suis enfin relancée au début du printemps avec un atelier qui s'est déroulé le 22 mars dernier les retours ont été plutôt positifs Peut-être pour certaines un peu trop poussées. Mais je pense que le principe, c'est que chacun puisse repartir avec de la théorie, mais aussi avec certains ressentis. Comment je sens, par exemple, un truc auquel on ne pense jamais, le voile du palais. Comment je peux jouer sur ma voix, mais sans perdre de l'air. Comment je peux faire des rêves musicals plus longs ? Comment je peux détendre ma langue ? Comment je peux être sûre que ce que je fais avec ma mâchoire, c'est bien ? Enfin voilà, des petites questions comme ça. Moi, je démarre toujours l'atelier en demandant les attentes de chacun pour pouvoir aussi moduler mes propos et puis être au plus juste par rapport aux attentes et aux questions. Il y a un temps théorique, une pause, un autre temps théorique, mais les deux temps théoriques sont mélangés à un peu de pratique. par chapitre, et à la fin, un gros temps de questions où chacun peut y aller soit de ses incompréhensions, si les choses n'ont pas été très claires, soit de choses qu'on n'a peut-être pas abordées. J'essaye de tracer vraiment global de la tonicité musculaire du corps jusqu'au plus petit cartilage du larynx.
- Christine
Ça ne s'adresse pas uniquement à des professionnels de la voix ?
- Sarah
Non, pas du tout. Je dirais que par logique, ça peut intéresser les professionnels de la voix, mais... N'importe quel curieux d'en savoir un peu plus est le bienvenu. Là, les prochains ateliers auront lieu le 12 avril, c'est bientôt, à l'ESCAR, et le 7 juin pour le suivant. Je pense qu'il y aura d'autres dates à l'automne et en hiver, mais pour le moment, il n'y a rien de décidé. Le lieu, c'est là où je fais mon travail, où j'exerce l'orthophonie. Et voilà, il reste des places.
- Christine
Je mettrai toutes les infos dans la description de l'épisode. En tout cas, ce que je comprends de cet atelier, c'est que ça contribue à un élément dont tu as dit qu'il était cher à ton cœur, c'est la prévention finalement.
- Sarah
Oui, parce qu'avant d'arriver en cabinet, ce serait encore mieux d'arriver tout seul à prévenir les risques, à prévenir les troubles et puis à être bien dans sa voie, bien dans son identité et à ne pas avoir besoin. finalement d'être réparé au sens mécanique du terme
- Christine
En tout cas de tout ce que tu nous as partagé je trouve que tu lèves le voile sur plein d'éléments dont on n'a même pas conscience, pourtant moi c'est quand même une thématique qui me plaît mais tu as ouvert plein de fenêtres, là ça donne envie d'aller creuser plein de choses et dans l'échange qu'on avait eu toutes les deux Tu m'avais parlé du fait que la thématique de la voix avait un côté tabou dans notre société. Qu'est-ce que tu entends par là ?
- Sarah
Parce que déjà, je me rends bien compte en rencontrant de plus en plus de gens que personne ne sait trop comment ça fonctionne. Alors, je vous laisserai le soin de découvrir tout ça si vous venez aux ateliers ou si vous bouquinez des livres d'anatomie. mais ce côté tabou pour moi il est presque Presque lié au côté tabou un peu sexuel aussi. On parle pas trop, tout comme on dit qu'on allait être pas trop en public, ou il y a des choses qui ne se font pas, tu vois. Eh bien la voix, c'est quelque chose qui est censé bien aller. Et je parle de ça par rapport à l'autorité par exemple. Il faut que cette voix, elle fonctionne, et puis on s'en fout un peu comment, mais elle doit répondre à nos besoins. Mais c'est tabou aussi dans le sens où dans les... Les quelques échanges que j'ai pu avoir avec des ostéopathes, par exemple, même dans les apprentissages, on n'apprend pas trop ce qui se passe au niveau du larynx. Et finalement, c'est en faisant des formations sur d'autres domaines, en myofacial, en thérapie manuelle autre, que je me suis rendue compte que finalement, en tant qu'orthophoniste, je m'y connaissais mieux, alors que je n'y croyais pas. Mais je m'y connaissais mieux que certains ostéos, finalement, pas d'individu à individu, mais de formation à formation. On a peut-être plus poussé les choses anatomiquement sur la voie en ortho que ce qu'on a pu faire dans le côté enveloppe globale, chez les thérapies manuelles. Alors je n'ai pas rencontré d'éthiopates encore, je ne sais pas si c'est le cas aussi pour eux. En éthiologie, ils font encore un peu de la thérapie manuelle un peu différente. Mais voilà, donc pour moi, il y a quelque chose là-dedans.
- Christine
Quand je vois à quel point la psychologie est reliée au problème de voix, et bien parfois on a des gens qui juste n'assument pas quelque chose, ou n'ont pas dit à leurs parents, j'invente un peu là des contextes, mais pourraient ne pas avoir dit aux parents un truc avant qu'ils meurent par exemple, ou ne pas s'être exprimé sur une ancienne relation amoureuse, ou refuser une homosexualité par exemple, ce genre de choses, on ne peut pas en parler. on n'ose pas en parler parce que le regard de la société il n'a pas tant changé que ça en fait en tout cas de là où je suis j'ai la sensation que c'est très lent comme progression et on ne veut pas en parler parce que c'est aussi un peu un sujet de faiblesse et ça gêne, ça gêne énormément pourquoi est-ce que cette femme là elle assumerait sa voix grave par exemple on lui veut une voix fluette parce qu'une femme c'est censé être délicat Pourquoi est-ce que ce monsieur-là, il ne peut pas garder sa voix aiguë à l'inverse ? Parce qu'un monsieur, c'est censé être viril avec des poils. C'est toutes ces petites choses-là où il y a des gens, heureusement, qui commencent à sortir de ces carcans-là. et voilà des hommes qui acceptent leur sensibilité comme des femmes qui acceptent leur pilosité par exemple c'est de plus en plus et c'est super et alors moi je trouve que dans les gens que je reçois ça arrive encore, c'est pas le cas pour tout le monde bien sûr mais ça arrive encore d'avoir des personnes qui n'osent pas être vraiment ce qu'elles sont donc en ce sens pour moi la voix c'est un peu tabou mais parce qu'en fait on n'en parle pas on n'en parle jamais
- Sarah
Oui, et puis j'ai entendu il y a quelque temps que, par exemple, les femmes, en règle générale, avaient tendance à baisser leur voix jusqu'à une octave, parce que justement, dans la société, le pouvoir, le fait d'être considéré, etc., passe par une voix plus grave, plus posée. Moi, c'était mon cas, je n'en ai pas du tout conscience, je ne sais pas pourquoi je le faisais, mais en tout cas, j'étais trop basse, et ça fait partie... Des éléments que j'ai dû retravailler, trouver juste ma hauteur de voix. Et ça aussi, c'est un tabou, parce que la voix féminine, comme tu dis, elle est associée à tout un tas de stéréotypes. Et puis à l'inverse, nous, en tant que femmes, parfois, on va s'excuser d'être là en adoptant la voix qui n'est pas la nôtre, finalement.
- Christine
Oui, tout à fait. Puis ça rejoint cette distribution aussi en termes de cœur dans les pupitres, où finalement, ce dont on se rend compte, c'est que... Chez les femmes, on a les sopranes qui chantent aiguës, les altis qui chantent graves. En gros, il y a des choeurs qui sont plus grands que ça, où on a encore plus de divises dans les pupitres, mais admettons que ce soit un choeur standard avec quatre pupitres, deux d'hommes et deux de femmes. Chez les sopranes et chez les altis, par exemple, une voix qui vieillit, elle s'aggrave naturellement. Mais il y a énormément de femmes qui refusent de quitter le pupitre soprane, parce que ça fait bien. Parce qu'avoir les notes aiguës, c'est un peu les divas. on a des blagues dans les chœurs où on dit que les sopranes c'est comme les pitbulls mais la différence c'est le rouge à lèvres bon voilà il y a des choses en plus qui circulent moi je suis soprane donc je me permets et chez les altis on a des personnes qui auraient une voix aiguë mais qui ne veulent pas trop faire d'efforts qui n'ont pas envie de mettre trop d'énergie donc on reste dans les graves c'est bien pratique sauf que les musiques elles sont écrites pour des vraies voix d'alti et des vraies voix de soprane. Éventuellement, la voix intermédiaire, elle est mezzo. Beaucoup de femmes sont mezzo et peuvent aller un peu... Voilà, d'une chaise à l'autre. Mais c'est pareil pour les hommes, en fait. On a le même phénomène avec les basses en voix grave et les ténors en voix aiguë. Un peu moins. Je dirais que c'est un peu féminin quand même comme donnée. Mais ça revient à ça. C'est ne pas accepter sa voix, mais aussi ne pas accepter le changement de sa voix. C'est aussi ok, en fait. C'est naturel de changer. On n'est pas toujours sur le même cap toute sa vie, de par nos vécus, de par nos expériences. La voix peut s'aggraver si on a vécu un trauma, par exemple, un truc très triste ou très grave. Et c'est d'accord, ça peut être l'inverse aussi. Enfin, je veux dire, ça c'est chacun. Mais c'est pas forcément grave. Ça peut arriver qu'on reçoive des personnes en cabinet qui disent, moi ma voix, effectivement, je l'aime pas. Elle est trop grave, mais elle est grave depuis que j'ai perdu mon enfant, par exemple. Là, je vais avoir des limites. Là, il faut aller dans un cabinet, faire une thérapie. Il faut prendre la chose vraiment au sérieux. C'est profond, ce n'est pas anatomique comme truc. Moi je veux pas me prendre pour une psy, je veux pas me prendre pour une ostéo, je veux pas me prendre pour une prof de chant, c'est pas du tout ça l'objet. Par contre forcément que c'est vraiment au carrefour et donc on touche un peu à des choses mais je suis très très consciente de mes limites. Et j'hésite pas à réorienter, soit justement en cours de chant parce que c'est pas à la sécu de payer les cours de chant. S'il n'y a pas de pathologie, il n'y a pas d'ortho, c'est comme ça. Mais si je peux faire, si je peux aider, si je peux me servir de ces choses-là... annexes au service du soin de la personne, je n'hésite pas.
- Sarah
Je vais te remercier vraiment très chaleureusement parce que c'était passionnant. J'aurais pu t'écouter encore pendant des heures. C'est hyper riche et ça touche à tellement de domaines que je pense que ça va intéresser en tout cas, je l'espère, beaucoup d'auditeurs et d'auditrices. Je marquerai toutes les informations tout à fait pertinentes que tu as partagées pendant l'épisode en description. Comme ça, les gens pourront te contacter directement s'ils en ont envie. Merci beaucoup,
- Christine
Sarah. Avec plaisir.
- Sarah
Je remercie à nouveau infiniment Sarah pour tous les conseils qu'elle a partagés et toutes les perspectives qu'elle a ouvertes autour de la voix. Si vous souhaitez en savoir davantage sur ses ateliers, je vous propose d'aller voir du côté de ses réseaux sociaux. Et si vous souhaitez découvrir les visuels qu'elle a créés, Je vous invite à vous rendre sur son site internet. Évidemment, toutes ces informations sont à retrouver dans la description de cet épisode. Merci à vous d'avoir écouté cet épisode d'On n'a qu'une voix jusqu'au bout. S'il vous a plu, abonnez-vous dès maintenant pour ne pas manquer la voix de mes prochains invités. Et pour soutenir mon podcast, je vous propose de le noter et de le commenter. sur votre application d'écoute préférée. Enfin, un merci tout particulier à Émilie Décla, qui a créé et interprété toutes les musiques d'On n'a qu'une voix. Retrouvez l'actualité du podcast sur le compte Instagram ou LinkedIn, entre voix et mots. À bientôt !