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Une voix qui se déplace | Fabienne Rebeyrol cover
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On n'a qu'une voix

Une voix qui se déplace | Fabienne Rebeyrol

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37min |10/12/2024
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37min |10/12/2024
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Description

Bienvenue sur On n’a qu’une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix !

Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de Fabienne Rebeyrol.


A la fin de l'été 2024, je rencontre Fabienne lors d’un festival de contes dans les Pyrénées. J’y organise un micro-trottoir au cours duquel elle me confie que, petite, elle ne parle pas parce qu’elle n’a rien d’intéressant à dire.

Et pourtant… quelques heures auparavant, en découvrant sa voix, je suis sous le charme, mais loin d'imaginer le chemin parcouru.

Que s’est-il passé dans la vie de Fabienne qui, petite fille, parle davantage aux poules qu’aux humains ? Comment le rapport que l'on entretient avec notre voix peut-il se déplacer autant ?

Ce sont les éléments que je vous propose de découvrir dans cet épisode plein de belles surprises au cours duquel Fabienne se livre avec beaucoup de sincérité et de générosité. Merci à elle ! 


Bonne écoute !


💡 Vous pouvez retrouver l'actualité de Fabienne Rebeyrol par ici.

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📩 Contactez-moi à l’adresse suivante : christine.irabola.redac@gmail.com.


Crédits :

  • Réalisation, montage, mixage : Christine Irabola

  • Musiques et chants : Émilie Décla


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Christine

    On n'a qu'une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix. Chaque mois, venez à la rencontre de mes invités qui lèvent le voile sur l'histoire singulière de leur voix. Au programme, des voix parlées, des voix chantées, des voix jouées et des voix parfois malmenées. L'intention ? Vous procurer des émotions, vous faire voyager, vous apporter des conseils et vous proposer un pas de côté pour vous inviter à aimer votre voix. Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de Fabienne Reberolle. À la fin de l'été dernier... Je rencontre Fabienne à l'occasion d'un festival de contes dans les Pyrénées. Et alors que je tends mon micro aux personnes qui souhaitent partager la place qu'a la voix dans leur vie, voici ce qu'elle me confie.

  • Fabienne

    Je m'appelle Fabienne et j'ai été élevée à la campagne par ma grand-mère. Et pendant longtemps, je n'ai pas parlé. Et quand on me demandait pourquoi, je disais parce que je n'ai rien d'intéressant à dire. Et puis, je parlais beaucoup aux poules. Ma grand-mère avait des poules et c'était un public fascinant. J'adore les poules, je parle très bien le langage poule et pendant longtemps j'ai parlé aux poules et elle me répondait et je continue parce que j'ai encore des poules qui me répondent.

  • Christine

    Intriguée et surtout très touchée par son témoignage, je décide de l'inviter à partager avec nous son parcours aussi singulier qu'inspirant. Vous allez donc découvrir comment sa voix s'est déplacée au fil des années jusqu'à prendre aujourd'hui une place à la fois étonnante et juste. Bonne écoute ! Bonjour Fabienne.

  • Fabienne

    Bonjour.

  • Christine

    Merci d'être là, d'avoir accepté l'invitation sur le podcast On n'a qu'une voix. Pour commencer, j'aimerais savoir quelle est la place de la voix dans ta vie ?

  • Fabienne

    Elle est très importante. Je ne me suis jamais posée en ces termes-là, mais je me rends compte maintenant, à l'âge que j'ai, qu'elle est très importante. J'ai longtemps beaucoup écouté, sans parler justement. J'adore les voix des autres. C'est quelque chose pour moi qui est peut-être... plus représentatif que l'apparence physique. Je me fais, moi, une image intérieure de la personne avec la voix. Ça me parle davantage, ça me pénètre davantage. Et comme j'écoutais beaucoup, je ne parlais pas parce que moi, j'avais l'impression que je n'avais pas quelque chose d'aussi intéressant à dire. Il me semblait qu'il fallait aller vers les autres et c'était un peu compliqué pour moi parce que parler, c'est aller vers quelqu'un. Et c'était un petit peu compliqué, donc j'étais un peu sur la réserve. Mais j'ai engrangé, un peu comme ces enfants qui ne parlent pas, mais qui entendent tout, et tu te dis, mais il n'a pas compris. Mais si, il a tout compris, mais il n'a rien à dire de plus que ce qu'il a entendu. Et moi, j'étais un peu comme ça. La voix, pour moi, elle est diverse, variée. Je suis toujours étonnée d'entendre des nouvelles voix, de rencontrer des nouvelles voix. Je me dis, mais c'est un réservoir inépuisable. Chacun vient au monde avec... Une voix différente qui va évoluer en plus avec l'âge. Donc je me dis, ça c'est extraordinaire. Ça m'épate toujours. Je suis toujours épatée d'entendre une nouvelle voix. Et puis la voix pour moi, c'est quelque chose qui peut me permettre de m'évader du tumulte. Du tumulte du monde, tu vois, de la vie. Quelquefois je ne suis pas agressée, mais c'est trop d'informations, trop de choses qui arrivent avec beaucoup de vitesse. Moi j'ai du mal avec ça. J'ai besoin d'avoir du calme, du silence. Et la voix, par exemple, les chants inuits, qui sont très rauques, moi, ça me permet de partir un petit peu, d'aller dans un autre monde pour me reposer. Voilà, ça me fait résonner le corps. Et du coup, mon corps, on dirait qu'il se débarrasse de toutes les petites poussières du monde. Et quand c'est fini, je suis nettoyée et je peux repartir. Moi, il y a des voix qui me font ça. qui me nettoie, dont j'ai besoin. J'ai la chance d'avoir enregistré ma grand-mère, par exemple, que j'aime beaucoup. Je l'ai sur une vieille cassette, tu vois, qu'il faut que je fasse repiquer sur un CD. Mais pour moi, c'est d'un précieux. Si je devais sortir d'une maison en feu, je prends la cassette, tu vois, avec la voix de ma grand-mère. C'est quelque chose d'important.

  • Christine

    Quand on s'est rencontré, c'était dans le cadre d'un festival de contes, tu m'as confié que quand tu étais petite, tu ne parlais pas. Est-ce que tu peux nous en dire davantage ?

  • Fabienne

    Oui,j'étais une petite fille qui écoutait beaucoup. J'ai souvent eu, et ça continue, j'ai souvent eu l'impression d'être une grande oreille, une grosse oreille. Je suis avide de ça, de voix, de son, de choses que l'on entend. Ça me dit beaucoup sur mon environnement. Ça m'aide énormément. Et donc, je ne parlais pas, mais je parlais à ma grand-mère, bien sûr, que j'aimais beaucoup, et aussi aux animaux. J'ai toujours beaucoup parlé aux animaux et aux plantes, je peux le dire maintenant, il y a prescription. Donc, ma grand-mère avait des poules, et il y avait une espèce de vieille souche à côté du poulailler. Je m'installais sur la souche, et elles avaient droit à un florilège d'histoires, de poèmes, de chansons, parce que je chantais petite à tue-tête, alors qu'après, j'ai été bloquée, tu vois, dans le champ. des réflexions, des choses comme ça. Et là, sans aucun complexe, c'était dans un bois, donc il n'y avait absolument aucun témoin, aucun public à part ces poules, qui étaient un public vraiment formidable, très attentive. J'avais beaucoup de choses à raconter. Ma vie de petite fille, peut-être déjà les faire... Comme si j'allais les faire rire, tu vois, les poules. Leur raconter des trucs, un public, vraiment.

  • Christine

    Quand tu étais à l'école, tu ne prenais pas la parole du tout ?

  • Fabienne

    Alors, je me suis vite aperçue que je pouvais faire rire. Et la parole, elle était au service de ce rire-là. C'est-à-dire, quand je sentais qu'à côté de moi, il y avait quelqu'un ou quelque chose ou une tension, hop, j'y allais de ma petite bêtise, tu vois, pour pouvoir détendre l'atmosphère. C'était quelque chose pour moi qui était vital. Même pas vital, c'était obligatoire. Voilà. Et j'ai continué, je continue toujours à essayer de faire rire. Alors je me suis calmée, parce que maintenant je me dis, mais laisse respirer les gens, s'ils ont envie d'être tristes, ils ont le droit d'être tristes. Mais je continue quand même à avoir ce besoin de voir les gens autour de moi apaisés ou souriants. Et donc la voix pour moi, c'est un moyen de les faire rire. Voilà, ou de les apaiser, tu vois ? Oui.

  • Christine

    Parmi les voix qui t'ont marquée, je crois qu'il y a les voix des personnes âgées. Tu as évoqué ta grand-mère. Et quand on s'est rencontrées toutes les deux, tu m'as dit que ça avait une importance dans ta vie. Est-ce que tu peux nous partager ça ?

  • Fabienne

    Oui, ça a beaucoup d'importance. C'est ma grand-mère qui m'a élevée. Les amis de ma grand-mère avaient l'âge de ma grand-mère, voire plus âgée. Puisque dans le village où j'étais, c'était de coutume d'aller visiter les mamies qui vivaient seules. Et donc on allait passer des après-midi. En tiers, auprès de ces dames, on m'asseyait sur une chaise et moi j'écoutais. J'écoutais, je regardais, je m'imprégnais de ça. Et la voix, elle est pleine de rides, comme le corps. Je pense que la voix s'harmonise au corps. On peut avoir des surprises. Quelquefois, tu peux avoir une grosse voix dans un tout petit corps et une petite voix fluette dans un vieux corps. C'est amusant, je trouve ça super. Mais quand même, là, il y avait... il y avait l'histoire de la personne dans ce rocailleux, dans ce roulement, dans ces mots un peu chevrotés, parce qu'alors il y a le problème des dents. On perd des dents quand on est âgé, surtout à l'époque. Et je me disais, elle a des fausses dents, est-ce qu'elle a une fausse voix ? Est-ce que c'est sa voix qu'on entend vraiment ? Parce que du coup, je me disais, est-ce que c'est comme quand on te refait, tu vois, quelque chose quand tu as eu un accident, c'est... plus tout à fait pareil. Est-ce que c'est encore sa voix ? Moi, j'ai aimé ça. J'ai la voix d'Henriette, qui est morte il y a très longtemps, dans l'oreille. Je l'ai, cette voix-là. Les voix des papys qui sont moins... Je connais deux sortes de personnes âgées. Ceux qui parlent beaucoup parce qu'on se dit qu'ils ont peur de partir avant d'avoir dit tout ce qu'ils ont d'intéressant à dire. Et moi, je suis avide de ces mots. J'ai envie de savoir tout ça. Ça me plaît quand on raconte des histoires. Et puis la voix des papys et des mamies qui parlent peu et qui vont un jour te dire un mot ou deux, ou juste un soupir. Pour moi, les soupirs, les rires, les tais, les exclamations, c'est la voix. Pour moi, ça, c'est la voix. Et c'est précieux aussi. C'est dire beaucoup en peu de choses, quoi. Quelquefois en un souffle. Mais c'est important aussi d'entendre ça. La voix va avec la main d'une personne âgée qui est quelquefois légère ou fripée. Moi, je commence à vieillir aussi. Je sens ça maintenant. Tu sens la vie qui est passée, quelque chose qui a roulé, comme un galet. Mais ce n'est pas tout à fait poli, c'est doux, mais c'est plissé. La voix, elle est comme ça pour moi. Elle est douce, quelquefois. Pas toujours, mais elle est plissée. Il y a plein de choses. On voit la vie des gens, même si on ne la connaît pas. On voit bien qu'ils ont vécu des choses et que c'est resté.

  • Christine

    Donc, tu as beaucoup écouté.

  • Fabienne

    Oui.

  • Christine

    Et donc, en particulier des personnes âgées. Est-ce qu'il y a d'autres voix qui ont pu te marquer dans ton enfance ?

  • Fabienne

    Oui. Alors, j'allais à la messe. Ma grand-mère m'a menée à la messe. Et à la messe, tu avais les prêtres à l'ancienne, tu vois, en chair. avec cette espèce d'intonation un peu bizarre. Ils avaient tous la même, c'est curieux, quand tu les vois dans les films. Tu vois... . Alors, quand t'es enfant, c'est extrêmement impressionnant, mais ça fait un peu peur.. C'est pareil, il chante un peu comme une psalmodie tu vois, c'est très curieux. Ces voix-là, ça m'a impressionnée, oui, beaucoup. Ça m'a impressionnée. Et puis, moi, ce qui m'impressionne beaucoup... Là je bouche mes oreilles, ce sont les gens qui crient fort. Tu vois là, les gens qui crient fort, mes oreilles elles ne veulent pas entendre ça. Voilà, j'ai du mal avec ça. Mais tout ce qui est cris de surprise, petits cris de douleur quand tu te cognes, des choses comme ça, soupir, exclamations, ça j'aime beaucoup les rires. Les rires c'est extraordinaire, les rires des gens. C'est vraiment formidable. Je me nourris beaucoup de ça. Mon grand plaisir, c'est de faire rire quelqu'un. La télé, c'est très important pour moi, la télé, parce que la télé, elle m'a élevée aussi. Ma grand-mère a parté travailler, et donc on a eu la télé assez tard, je devais avoir 6 ou 7 ans, je ne me souviens plus exactement, des gros postes énormes. Et la télé, elle parlait. Et elle me parlait. Et moi, j'ai écouté tout ça. Elle m'a donné des voix. J'ai dans l'oreille... Les voix des acteurs de théâtre, au théâtre ce soir, j'adorais tous ces acteurs. Le Poulain, Maria Pacom. Le jeudi après-midi, puisque c'était mon jour de repos, c'était le jeudi après-midi, on avait des pièces de théâtre et des lectures par des grands comédiens de la comédie française. Et ça, moi, ça m'est resté dans l'oreille, le dernier des Mohicans. Donc, toutes ces voix de la télé, moi, elles m'ont parlé. Elles m'ont donné des voix. Je me suis sentie... On me parlait à moi. Et ça, ça m'est resté. C'est-à-dire que quand quelqu'un me parle, encore, quelque part, je suis toujours un peu étonnée qu'on prenne ce temps pour me dire quelque chose. Qu'on s'adresse à moi. Et la télé, elle me faisait ça. Je me sentais très importante que la télé me parle. Me raconte des choses. Et à l'époque, j'ai pris beaucoup de choses. Elle m'en a raconté beaucoup. Ça aussi, ça m'a aidée beaucoup.

  • Christine

    Et pas la radio ?

  • Fabienne

    Alors la radio, plus tard, la radio, puis elle avait pour moi une autre fonction d'enlever des bruits parasites, c'est-à-dire que je mettais la radio pour ne pas entendre autre chose. Voilà, donc ça a été plus tardif. La radio, maintenant, oui, j'aurais du mal à m'en passer, énormément. C'était même la première chose que je faisais quand je rentrais chez moi, c'était allumer la radio pendant longtemps. J'avais besoin de cette présence, de cette voix. Ça remplit un espace vide, ça remplit... Voilà. L'absence de quelqu'un, ça me fait penser, tu vois, quand on est célibataire ou une personne âgée qui vit seule, quelquefois la seule façon d'entendre une voix, c'est d'aller acheter quelque chose. Et ça je me dis, c'est quand même dommage, il faut qu'il y ait beaucoup d'endroits où on puisse aller pour parler et être écouté, sans avoir à payer pour qu'on t'écoute ou qu'on te parle. Et ça c'est vraiment très très très important. Je pense à des endroits comme... les espaces de vie sociaux, des choses comme ça, où les gens peuvent aller ne serait-ce que pour prendre un café et discuter. C'est vraiment important. Les gens, ils aiment parler. Moi, je parle dans le bus. Les gens, ils papotent et ils ont envie de raconter une petite histoire. Et c'est toujours super. On a des histoires incroyables. Et moi, je suis vraiment très contente d'entendre tout ça. Donc, ça ne me lasse jamais.

  • Christine

    Est-ce qu'il y a un moment où tu as justement osé prendre la parole ? Est-ce que tu en as le souvenir ? Est-ce que ça s'est fait petit à petit ? Ou est-ce que tu as souvenir de moments marquants où enfin tu as pu, toi aussi,prendre la parole ?

  • Fabienne

    La parole, je l'ai prise obligatoirement avec mon métier. J'étais institutrice, donc il y a un moment où il a bien fallu la prendre, cette parole. C'est que quand tu passes de l'autre côté en face des enfants, que tu vois si tu es faite pour ça ou pas. Et là, la parole, il faut qu'elle vienne. Mais là, ça ne m'a pas dérangée non plus. Avec les enfants, je me suis sentie extrêmement à l'aise. Parce que pour moi, les enfants, ils ne jugent pas. Il n'y a pas de jugement. Ils sont en train, eux, de placer leur voix. Ils cherchent leur voix. Ils ont une voix différente. Donc, il n'y a zéro jugement dans l'œil d'un enfant ou dans l'oreille d'un enfant. Tu vois, ta voix, elle est belle pour eux. Ils vont s'attacher. Ça va être un petit tuteur, cette voix. Donc, zéro problème avec les enfants. Ma voix, elle est venue facilement. Avec les adultes, ça a été plus compliqué. C'est-à-dire, je me surveillais, tu vois. Je faisais attention à employer les bons mots, à me juger sur ce que j'étais en train de dire. Est-ce que c'est adapté ? Est-ce que... Tu vois, c'était quelquefois un peu compliqué pour moi. J'ai mis du temps à me lâcher, et même encore, je me sens me surveiller face à quelqu'un qui va m'impressionner. Voilà. Je me juge, c'est un jugement, c'est idiot. Alors, je fais du clown en amateur. Et mon clown n'y parlait pas, c'est pareil, il était que dans le corporel et quand il parlait, il savait très mal se débrouiller avec les mots. Mais maintenant, il s'autorise, il s'autorise, j'adore, il y a des sujets dont je parle facilement, la mort par exemple, les places de village. Tu vois, c'est des choses bizarres comme ça, des choses, je peux parler de sujets graves maintenant en me disant, bon ben, c'est bon quoi, là maintenant tu peux y aller quoi. Tu peux y aller, je ne sais pas, ça ne va pas, ça ne va pas choquer. Je vais le faire avec le clown que je suis, c'est-à-dire naïf. Ma grand-mère était comme ça. Elle était très naïve, mais elle en profitait en vrai pour te dire des choses. Et tu ne lui en voulais jamais parce que tu te disais, bon ben voilà, elle est pure quelque part, c'est comme une petite fille. Et moi, j'utilise ça en clown, tu vois. Je peux dire maintenant, avec douceur, parler des choses graves. D'ailleurs, je pense que c'est plus intéressant. pour moi, de parler avec douceur et humour des choses graves que d'en faire quelque chose, que de le dire avec gravité. Quand je parle avec gravité, ça tombe un peu dans le pathos très vite et du coup, je trouve ça moins intéressant. C'est trop violent. Ma voix devient trop violente pour les gens. J'ai envie qu'elle soit plus dans la douceur, plus neutre et plus dans le plaisir. Voilà, c'est ça.

  • Christine

    Et cette douceur et cet humour, justement, est-ce que tu les utilisais en tant qu'enseignante ?

  • Fabienne

    Oui, naturellement, oui. Je peux être ferme dans mon humour si je sais arrêter les choses, mais oui, ça a toujours beaucoup mieux fonctionné. L'autorité, pour moi, elle doit être douce, elle doit être naturelle. Il faut placer des limites, mais ces limites-là, elles n'ont pas besoin d'être violentes pour moi, voilà. Après, il y a des enfants, on a juste, qui veulent savoir jusqu'où ils peuvent aller. Mais je pense que tu peux le montrer avec du recul, avec... tu vois, voilà, c'est ça. Après, moi, j'ai travaillé en IME avec des enfants qui étaient soit déficients intellectuels, soit qui avaient plein de problèmes. Ma limite, ce sont les caractériels, tu vois, par exemple. C'est là que peut-être il faudrait élever la voix et que moi, ça, je ne peux pas le faire. Voilà, c'est ma limite.

  • Christine

    Et donc par rapport aux enfants, toi qui as été une enfant dans l'écoute, est-ce que tu as été sensible à certains enfants justement qui avaient du mal à prendre la parole ? Et comment tu l'as vécu ça ?

  • Fabienne

    Tu les repères vite, ceux qui écoutent. En général, ils ont les yeux écarquillés, ils écoutent bien, ils sont extrêmement sages ces enfants-là. Ils ne bougent pas beaucoup. Ils bougent quand on leur permet de bouger, sinon ils sont sages. Et oui... Et oui, à un moment donné, il faut leur demander, eux, ce qu'ils en pensent des choses. Alors, on les taxe souvent de timides. Et c'est souvent après eux, ceux qui se révèlent le plus sur la scène ou dans des représentations. C'est un plaisir de les voir s'épanouir après. De leur montrer qu'eux aussi, ils ont des choses intéressantes à dire et qu'on peut aller vers eux et qu'ils peuvent venir vers les gens dire.

  • Christine

    J'aimerais savoir comment on peut passer de parler le langage... poule, à monter sur une scène ouverte pour compter devant un public. Je te demande ça parce que moi, la première fois que je t'ai rencontrée, que j'ai entendu ta voix, je l'ai entendue dans le cadre d'un conte, donc sur une scène ouverte. Je faisais partie du public et c'est la première fois que j'ai entendu ta voix et je n'aurais pas pu me douter que tu avais eu ce parcours avec la voix. Alors tu as parlé aussi du clown. Oui. Donc voilà, par rapport à ces engagements-là, puisque pour moi c'est une forme d'engagement, qu'est-ce que tu as envie de partager avec nous sur ce parcours-là ?

  • Fabienne

    De par mon métier, j'avais l'habitude de lire beaucoup à haute voix, à des enfants, à mon compagnon, à mon chat, je lisais à haute voix. Et ça avait toujours bien fonctionné ça. Et puis lors d'un petit festival que mon compagnon avait organisé avec d'autres personnes, il m'avait dit ça serait bien que tu viennes faire quelques lectures Donc j'avais choisi des tas d'albums. C'était dans un Ehpad, mais une fête avec tous les âges. Des petits du centre d'animation jusqu'au papi-mami qui était là. Et donc, j'ai amené mes livres, j'ai commencé à lire. Et je ne sais pas ce qui s'est passé. Je me suis levée et j'ai lâché les livres. Parce que je les avais tellement travaillés pour venir ce jour-là et être correcte. Et donner le mieux que je pouvais donner. Que je les avais en moi, tu vois. Et l'histoire est venue. Et j'ai raconté au lieu de lire. Et on m'a renvoyé que... que c'était agr��able, que c'était bien, que ça passait mieux, etc. Et quand le Covid est arrivé, cet EHPAD avec lequel j'avais eu ce contact, j'ai proposé d'envoyer un compte. Et donc chez moi, à la maison, filmé par mon compagnon, j'ai raconté une histoire que ma mère m'avait racontée. L'histoire raconte comment et pourquoi le rhinocéros a la peau plissée et qu'il a aussi mauvais caractère. Et donc j'ai enregistré cette histoire. Et on leur a envoyé. Et les retours ont été très bons. Je l'ai envoyé aussi à une amie qui est encore enseignante dans l'école où j'étais, en REP à Bordeaux. Et pareil, les retours ont été très bons. Et je me suis dit, peut-être je pourrais raconter, je pourrais dire. Et quand j'ai su qu'une conteuse professionnelle, Karine Vandome, ouvrait un atelier, un dimanche après-midi, tous les deux mois, je me suis lancée. Et je suis... tomber dans un monde extraordinaire. J'aimais les contes, j'en lisais énormément depuis toujours, mais soi-même les dire, c'est autre chose. Être au service de cette histoire pour que les gens l'entendent, c'est un monde merveilleux. Vraiment, quoi. On est timide, mais là, on est un outil au service de l'histoire. On ne disparaît pas. On accueille les gens dans notre bulle, mais on les invite. On ne les force pas. Et l'histoire, c'est elle la vedette, c'est elle qu'on doit mettre en valeur. Et notre voix est un outil, c'est presque elle la vedette. Et nous, on est là pour un peu décorer l'histoire, faire un peu d'humour pour accrocher ou un peu peur pour accrocher. Mais c'est l'histoire qui est là. On peut disparaître, on peut être presque en hypnose devant ce film qu'on est en train de raconter et qu'on doit faire passer aux autres. Et du coup... Dans le dernier stage que j'ai fait avec Michel Hindenhoek, il m'a donné des astuces pour avoir moins peur. Et je suis devenue un catalpa. Un catalpa magnifique. Je m'enracine dans le sol, mes branches elles montent jusqu'au ciel, mes feuilles sont superbes. Je prends les clés de l'endroit où je suis. Je te rassure, je les rends après. Et là, je suis chez moi, j'invite les gens chez moi, ceux qui veulent bien rentrer dans cette histoire. Et je me sens... enraciné en haut, en bas, chez moi, et j'ai moins peur. Et il m'a donné une autre clé aussi, il m'a dit d'être, il faut être soi-même, et il faut prendre plaisir. Il m'a dit, tu invites les gens à ta table, si tu ne manges pas, il y a des gens à qui ça fera rien, qui vont quand même manger ton histoire, mais il y a des gens qui ne vont pas manger, parce que toi, tu ne prends pas plaisir, toi tu ne manges pas. Ça m'a ouvert quelque chose en moi, je me suis dit, mais oui, Moi, je suis comme ça, avec cet accent-là, avec cette façon de faire qui n'est pas cette façon cérémonieuse que j'avais commencé à avoir en racontant certains contes avec une voix de dame, de tête en plus, tu sais, un peu pointue, parce que je pensais que c'était bien ça. Moi, avec ma voix de camionneur, je m'étais dit, mais non, ce n'est pas pour moi le chant, ce n'est pas pour moi... Et là, d'un coup, j'ai une voix de poitrine, je trouve ça super, quoi. Je ne savais même pas que ça existait, c'est lui qui m'a appris tout ça. Depuis je suis beaucoup mieux, je suis beaucoup moins traqueuse et je sais que c'est pas moi qui suis importante. Je viens pas là pour quand même, je viens là pour faire partager une histoire. Ça change tout. CONTE DE FABIENNE : Sur la place, il y a deux bancs face à face. Sur le premier, une vieille femme est astimée. Un bout de son jupon dépasse de sa robe. Elle porte un manteau fané et un vieux bonnet de laine troué d'où s'échappent quelques mèches blanches. À ses pieds, un cabas informe. Où l'on voit ? Un curieux bâton sculpté, cette vieille femme, c'est la mort. La mort est triste. Elle est triste et en colère. En colère parce que les hommes l'ont effacée de leur vie. Ils ne veulent plus la voir. Alors elle a le regard perdu dans le vide. Sur le banc en face, il y a Jean. Jean étudie. Il veut devenir médecin. Il est avec ses camarades de l'université. C'est la sortie des cours. Il rit et il chahute. Jean a vu la vieille femme. Elle lui rappelle sa grand-mère. Alors Jean se lève et vient s'asseoir à côté d'elle. Il commence à lui parler. Il lui demande comment elle va, si elle a à manger suffisamment, c'est important, il viendra vérifier. Il lui explique qu'il faut qu'elle prenne soin d'elle. Et puis, il passe un bras autour de ses épaules. La mort, elle, ça lui fait quelque chose. Jamais personne ne l'a pris dans les bras. Jamais personne ne l'a touchée. Elle se sent bien. Elle se redresse. Ça lui redonne même un tout petit peu de vie.

  • Christine

    Est-ce qu'aujourd'hui tu aimes ta voix ?

  • Fabienne

    Oui. bizarrement, oui. Parce que vu comment je ne l'aimais pas du tout avant, je m'étais dit, ce n'est pas gagné. Quand je m'écoutais, j'enregistrais les enfants à l'école, pour justement qu'ils apprivoisent leur voix, qu'ils aient moins peur de s'entendre. Parce qu'on a tous un mouvement de recul quand on entend notre voix. Et on jouait beaucoup avec les voix, on s'amusait avec nos voix, avec les enfants. Mais moi, pendant longtemps, enfin, petite, je chantais à l'école et tout. Après, plus de chant. plus de musique au collège, il n'y avait pas de prof, tu vois, c'était à la campagne, plus de musique au lycée, plus de chant, j'arrive à l'école normale, je tombe sur, heureusement je ne l'ai pas eu après, un prof de chant qui m'a dit, ça ne va pas du tout quoi, il ne faut pas chanter, il m'a dit. Alors j'ai quand même chanté avec les enfants, parce que je n'ai aucun problème à chanter devant les enfants, mais je n'ai plus du tout chanté. pour moi du tout ni avec des adultes jusqu'aux clowns parce qu'aux clowns un jour la metteuse en scène elle dit aujourd'hui on chante alors je vais la voir je dis ah non c'est pas possible maria c'est impossible si tu veux tu me dis quand l'exercice est fini je vais faire un tour je reviens elle me dit mais t'as pas le choix tu chantes Alors on a commencé à tourner, tu vois, dans la salle, on avait chacun un numéro, elle appelait un numéro, tu chantais. Et moi, tu vois, la tête complètement vide, le blanc, je me disais qu'est-ce que je vais chanter, qu'est-ce que je vais chanter, rien ne venait. Et quand mon numéro est sorti, eh bien j'ai chanté. l'aigle noir de Barbara. Avec une voix chevrotante, tu vois. Et ça a été une libération. Depuis, je chante. Je ne dis même plus que je ne sais pas chanter. Alors qu'avant, je ne sais absolument pas chanter. Je chante. Je me fonds dans la masse. J'écoute les autres. Je me mets à côté de quelqu'un d'une voix que j'aime bien. Et hop, je me laisse emporter. Et j'éprouve beaucoup de plaisir à ça. C'est très agréable de chanter. très agréable. Voilà.

  • Christine

    Est-ce qu'il y a d'autres éléments ou d'autres personnes qui t'ont justement accompagné sur ce chemin pour aimer ta voix ?

  • Fabienne

    Mon compagnon. Mon compagnon, il essaie de me faire prendre du recul avec tout ça, de me dire que les autres, ils n'entendent pas tout ça. Ils ne voient pas la difficulté que j'ai avec ma voix. Donc, ce n'est pas important. Il me dit toujours, tu vois, ce qui est important, c'est... l'ensemble, c'est pas la voix ou c'est pas, voilà, il ne voit pas quoi, donc je me dis oui et puis l'âge quand on vieillit, on s'attache moins à tout ça, on se dit ça c'est pas très important et on relativise avec tout ce qui se passe aussi autour de nous, les gens qui s'en vont, jeunes, les gens tu vois, tu te dis, moi j'ai encore la chance d'être là, et c'est super et je me dis, alors profite quoi tu as envie de faire quelque chose, fais-le tu vas rater, tu vas... Tu vas te relever, tu vas recommencer, tu vas réessayer et puis voilà.

  • Christine

    Tu évites de te juger en fait.

  • Fabienne

    C'est ça, j'essaie. J'essaie, Christine. Ce n'est pas toujours évident. J'ai encore des vieilleries qui s'accrochent. Tu sais, il y a toujours la petite voix. Elle est terrible cette petite voix. On l'entend. Ce n'est pas une voix qu'on n'entend pas. On l'entend. Et ce n'est pas tout à fait la même voix que la mienne. Quand on dit une petite voix, c'est vraiment un truc là... bizarre, qui te susurre des trucs et qui est... alors elle est sûre d'elle, c'est impressionnant quand même et toi tu es là ah oui peut-être, ah oui oui effectivement alors que non, quoi.

  • Christine

    Tu sais que la plupart des gens avec qui j'échange autour de mon podcast sur la thématique de la voix, alors je n'ai pas tenu de statistiques, mais je pense qu'on n'est pas loin de 9 personnes sur 10 qui disent ne pas aimer leur voix. Et toi justement, ces personnes-là, qu'est-ce que tu pourrais leur donner comme astuce ou conseil ? En tout cas, comment tu pourrais les guider sur ce chemin-là pour essayer d'aimer sa voix ?

  • Fabienne

    Je pense qu'il faut s'amuser avec sa voix. À la maison, je fais plein de voix rigolotes, que je ne suis pas forcée de refaire quand on me les demande. Quand on me les demande, je suis là, mais elles viennent. Je m'amuse, tu vois, avec des sons. Je fais des sons, je fais des bruits. J'écoute les oiseaux, j'écoute les animaux. J'essaie de reproduire, tu vois, le cri de l'animal ou le son que j'ai entendu. Et puis, je parle. Je rattrape le temps perdu, tout ce que je n'ai pas dit. Je le dis et je me dis et je me dis, petite voix, eh bien vas-y parce que la vie elle est courte, elle peut s'arrêter pour des tas de raisons et on n'aura pas profité de cette voix qui nous a été donnée. Voilà. Et il y a des gens qui ne peuvent pas parler et qui ne l'entendent pas parce qu'eux, ils n'entendent pas. Et je me dis, c'est une chance, la voix telle qu'elle est, elle est là. On peut dire les choses, avec maladresse quelquefois, oui. Je me sens des fois très maladroite, à côté de la plaque, ou alors ce qui est sorti, ce n'est pas du tout ce que je voulais dire. Eh bien tant pis, c'est sorti. Si tu es avec des gens qui t'aiment bien, ils vont me prendre, ils vont comprendre. Si tu es avec des gens qui ne te connaissent pas ou qui ne t'aiment pas, ce n'est pas très grave, on peut recommencer une autre rencontre, on peut redire, on peut dire. à je vois bien que je n'ai pas dit ce que je voulais dire tout simplement, avec simplicité. Je n'ai pas trop de conseils, je ne sais pas trop. Je crois que les gens doivent faire avec leur cœur. Des fois, ça va marcher, des fois, ça ne va pas marcher. Il faut recommencer, il faut essayer.

  • Christine

    Est-ce que conter, aujourd'hui, ça t'aide justement à rattraper le temps perdu dont tu parlais ?

  • Fabienne

    Alors, conter, je ne sais pas si ça m'aide à rattraper le temps perdu. En tout cas, c'est... C'est quelque chose d'important pour moi, quelque chose, je pense, que je suis venue jusqu'à présent dans mes démarches, jusque-là. Je pense qu'il s'est passé beaucoup de choses dans ma vie qui ont fait que là, d'un coup, je raconte. C'est presque me servir de tout ce qui s'est passé avant, bon ou moins bon, ou vraiment, vraiment moins bon, pour être là à raconter. C'est vital. C'est quelque chose, voilà, je ne savais pas. Mais il fallait que je raconte. Je ne sais pas où ça va m'amener. Je ne sais pas trop les chemins que je vais prendre avec cette histoire-là. Mais pour le moment, c'est sûrement quelque chose... Tout ce qui est arrivé avant m'a nourrie pour arriver là. Je disais pareil pour le clown il y a plusieurs années. Tout ce que j'avais fait avant, ça devait sortir. J'étais clown et je ne le savais pas. Et peut-être, peut-être, si ce n'est pas trop... présomptueux de ma part, peut-être je pourrais être une conteuse débutante pour raconter, oui, ça me construit..................................................................................................................... Les personnes âgées, par exemple, on ne les écoute pas. Au mieux, on les enregistre pour avoir des témoignages. Mais rien que le fait de parler un petit peu et de les entendre, ça ne se fait pas beaucoup. Moi, j'aimerais bien aussi peut-être être lectrice aussi. Ou raconter à des gens qui ne voient pas. Des choses comme ça, pour donner des images avec la voix. Moi, on m'a dit que j'avais la voix de ma mère, par exemple, qui est morte il y a très très longtemps. Et ça, ça a été un problème pour moi. Je voulais avoir ma voix, je ne voulais pas avoir la voix de quelqu'un. Comme les enfants qui ont dit tu ressembles à un tel et qui se disent non, je ne lui ressemble pas Et maintenant, comme j'ai oublié sa voix, je me dis c'est super, quand tu t'entends, tu l'entends un petit peu à elle Donc la voix, ça peut être aussi ce souvenir. Le souvenir de quelqu'un qui est parti, même si on l'oublie à la limite, parce que je l'ai oublié, on oublie les visages, on oublie les voix, il y a des photos, mais les voix, t'as pas toujours enregistré les voix. Donc peut-être comprendre comment c'est précieux une voix, et l'enregistrer pour la voir, pour l'entendre encore, parce que quand on entend ça, ce souvenir d'il y a longtemps, ça fait ressurgir des tas de choses qu'on a oubliées, pas que la voix. c'est comme un parfum, une voix ça peut d'un coup déclencher quelque chose de formidable un souvenir incroyable et ça je crois que la voix c'est précieux il faut la soigner, très important la soigner sa voix, d'en prendre soin, c'est comme les pieds on peut ne pas les avoir un jour toujours apte à nous porter et la voix à dire puis la voix, moi quand j'entends voix j'entends aussi, tu vois les élections on a une voix Pour moi, c'est important, ça. On peut dire encore, parce que c'est vrai qu'on se dit, ça ne sert plus à rien. Quand on vote, on n'est pas écouté. Mais c'est une voix quand même. C'est un acte, la voix. Pour moi, la voix, c'est un déplacement. Ce n'est pas quelque chose qui est arrêté. C'est quelque chose qui part, qui va vers les gens. Donc voilà, il faut en prendre soin de sa voix. Il faut l'aimer. Il faut essayer.

  • Christine

    Merci Fabienne pour ta participation à ce podcast. C'était vraiment très chouette de passer ce moment avec toi.

  • Fabienne

    Merci.

  • Christine

    Un grand merci à Fabienne pour sa confiance et la grande sincérité avec laquelle elle a osé partager le chemin de sa voix. Je vous invite à découvrir son actualité autour des histoires et du conte en suivant le lien dans la description de cet épisode. Merci à vous d'avoir écouté cet épisode d'On n'a qu'une voix jusqu'au bout. S'il vous a plu, abonnez-vous dès maintenant pour ne pas manquer la voix de mes prochains invités. Et pour soutenir mon podcast, je vous propose de le noter et de le commenter sur votre application d'écoute préférée. Enfin, un merci tout particulier à Émilie Décla. qui a créé et interprété toutes les musiques d'On n'a qu'une voix. Retrouvez l'actualité du podcast sur le compte Instagram ou LinkedIn Entre Voix et Mots. À bientôt !

Description

Bienvenue sur On n’a qu’une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix !

Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de Fabienne Rebeyrol.


A la fin de l'été 2024, je rencontre Fabienne lors d’un festival de contes dans les Pyrénées. J’y organise un micro-trottoir au cours duquel elle me confie que, petite, elle ne parle pas parce qu’elle n’a rien d’intéressant à dire.

Et pourtant… quelques heures auparavant, en découvrant sa voix, je suis sous le charme, mais loin d'imaginer le chemin parcouru.

Que s’est-il passé dans la vie de Fabienne qui, petite fille, parle davantage aux poules qu’aux humains ? Comment le rapport que l'on entretient avec notre voix peut-il se déplacer autant ?

Ce sont les éléments que je vous propose de découvrir dans cet épisode plein de belles surprises au cours duquel Fabienne se livre avec beaucoup de sincérité et de générosité. Merci à elle ! 


Bonne écoute !


💡 Vous pouvez retrouver l'actualité de Fabienne Rebeyrol par ici.

Suivez celle de mon podcast sur le compte Entre voix et mots : Instagram ou LinkedIn.


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📩 Contactez-moi à l’adresse suivante : christine.irabola.redac@gmail.com.


Crédits :

  • Réalisation, montage, mixage : Christine Irabola

  • Musiques et chants : Émilie Décla


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Christine

    On n'a qu'une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix. Chaque mois, venez à la rencontre de mes invités qui lèvent le voile sur l'histoire singulière de leur voix. Au programme, des voix parlées, des voix chantées, des voix jouées et des voix parfois malmenées. L'intention ? Vous procurer des émotions, vous faire voyager, vous apporter des conseils et vous proposer un pas de côté pour vous inviter à aimer votre voix. Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de Fabienne Reberolle. À la fin de l'été dernier... Je rencontre Fabienne à l'occasion d'un festival de contes dans les Pyrénées. Et alors que je tends mon micro aux personnes qui souhaitent partager la place qu'a la voix dans leur vie, voici ce qu'elle me confie.

  • Fabienne

    Je m'appelle Fabienne et j'ai été élevée à la campagne par ma grand-mère. Et pendant longtemps, je n'ai pas parlé. Et quand on me demandait pourquoi, je disais parce que je n'ai rien d'intéressant à dire. Et puis, je parlais beaucoup aux poules. Ma grand-mère avait des poules et c'était un public fascinant. J'adore les poules, je parle très bien le langage poule et pendant longtemps j'ai parlé aux poules et elle me répondait et je continue parce que j'ai encore des poules qui me répondent.

  • Christine

    Intriguée et surtout très touchée par son témoignage, je décide de l'inviter à partager avec nous son parcours aussi singulier qu'inspirant. Vous allez donc découvrir comment sa voix s'est déplacée au fil des années jusqu'à prendre aujourd'hui une place à la fois étonnante et juste. Bonne écoute ! Bonjour Fabienne.

  • Fabienne

    Bonjour.

  • Christine

    Merci d'être là, d'avoir accepté l'invitation sur le podcast On n'a qu'une voix. Pour commencer, j'aimerais savoir quelle est la place de la voix dans ta vie ?

  • Fabienne

    Elle est très importante. Je ne me suis jamais posée en ces termes-là, mais je me rends compte maintenant, à l'âge que j'ai, qu'elle est très importante. J'ai longtemps beaucoup écouté, sans parler justement. J'adore les voix des autres. C'est quelque chose pour moi qui est peut-être... plus représentatif que l'apparence physique. Je me fais, moi, une image intérieure de la personne avec la voix. Ça me parle davantage, ça me pénètre davantage. Et comme j'écoutais beaucoup, je ne parlais pas parce que moi, j'avais l'impression que je n'avais pas quelque chose d'aussi intéressant à dire. Il me semblait qu'il fallait aller vers les autres et c'était un peu compliqué pour moi parce que parler, c'est aller vers quelqu'un. Et c'était un petit peu compliqué, donc j'étais un peu sur la réserve. Mais j'ai engrangé, un peu comme ces enfants qui ne parlent pas, mais qui entendent tout, et tu te dis, mais il n'a pas compris. Mais si, il a tout compris, mais il n'a rien à dire de plus que ce qu'il a entendu. Et moi, j'étais un peu comme ça. La voix, pour moi, elle est diverse, variée. Je suis toujours étonnée d'entendre des nouvelles voix, de rencontrer des nouvelles voix. Je me dis, mais c'est un réservoir inépuisable. Chacun vient au monde avec... Une voix différente qui va évoluer en plus avec l'âge. Donc je me dis, ça c'est extraordinaire. Ça m'épate toujours. Je suis toujours épatée d'entendre une nouvelle voix. Et puis la voix pour moi, c'est quelque chose qui peut me permettre de m'évader du tumulte. Du tumulte du monde, tu vois, de la vie. Quelquefois je ne suis pas agressée, mais c'est trop d'informations, trop de choses qui arrivent avec beaucoup de vitesse. Moi j'ai du mal avec ça. J'ai besoin d'avoir du calme, du silence. Et la voix, par exemple, les chants inuits, qui sont très rauques, moi, ça me permet de partir un petit peu, d'aller dans un autre monde pour me reposer. Voilà, ça me fait résonner le corps. Et du coup, mon corps, on dirait qu'il se débarrasse de toutes les petites poussières du monde. Et quand c'est fini, je suis nettoyée et je peux repartir. Moi, il y a des voix qui me font ça. qui me nettoie, dont j'ai besoin. J'ai la chance d'avoir enregistré ma grand-mère, par exemple, que j'aime beaucoup. Je l'ai sur une vieille cassette, tu vois, qu'il faut que je fasse repiquer sur un CD. Mais pour moi, c'est d'un précieux. Si je devais sortir d'une maison en feu, je prends la cassette, tu vois, avec la voix de ma grand-mère. C'est quelque chose d'important.

  • Christine

    Quand on s'est rencontré, c'était dans le cadre d'un festival de contes, tu m'as confié que quand tu étais petite, tu ne parlais pas. Est-ce que tu peux nous en dire davantage ?

  • Fabienne

    Oui,j'étais une petite fille qui écoutait beaucoup. J'ai souvent eu, et ça continue, j'ai souvent eu l'impression d'être une grande oreille, une grosse oreille. Je suis avide de ça, de voix, de son, de choses que l'on entend. Ça me dit beaucoup sur mon environnement. Ça m'aide énormément. Et donc, je ne parlais pas, mais je parlais à ma grand-mère, bien sûr, que j'aimais beaucoup, et aussi aux animaux. J'ai toujours beaucoup parlé aux animaux et aux plantes, je peux le dire maintenant, il y a prescription. Donc, ma grand-mère avait des poules, et il y avait une espèce de vieille souche à côté du poulailler. Je m'installais sur la souche, et elles avaient droit à un florilège d'histoires, de poèmes, de chansons, parce que je chantais petite à tue-tête, alors qu'après, j'ai été bloquée, tu vois, dans le champ. des réflexions, des choses comme ça. Et là, sans aucun complexe, c'était dans un bois, donc il n'y avait absolument aucun témoin, aucun public à part ces poules, qui étaient un public vraiment formidable, très attentive. J'avais beaucoup de choses à raconter. Ma vie de petite fille, peut-être déjà les faire... Comme si j'allais les faire rire, tu vois, les poules. Leur raconter des trucs, un public, vraiment.

  • Christine

    Quand tu étais à l'école, tu ne prenais pas la parole du tout ?

  • Fabienne

    Alors, je me suis vite aperçue que je pouvais faire rire. Et la parole, elle était au service de ce rire-là. C'est-à-dire, quand je sentais qu'à côté de moi, il y avait quelqu'un ou quelque chose ou une tension, hop, j'y allais de ma petite bêtise, tu vois, pour pouvoir détendre l'atmosphère. C'était quelque chose pour moi qui était vital. Même pas vital, c'était obligatoire. Voilà. Et j'ai continué, je continue toujours à essayer de faire rire. Alors je me suis calmée, parce que maintenant je me dis, mais laisse respirer les gens, s'ils ont envie d'être tristes, ils ont le droit d'être tristes. Mais je continue quand même à avoir ce besoin de voir les gens autour de moi apaisés ou souriants. Et donc la voix pour moi, c'est un moyen de les faire rire. Voilà, ou de les apaiser, tu vois ? Oui.

  • Christine

    Parmi les voix qui t'ont marquée, je crois qu'il y a les voix des personnes âgées. Tu as évoqué ta grand-mère. Et quand on s'est rencontrées toutes les deux, tu m'as dit que ça avait une importance dans ta vie. Est-ce que tu peux nous partager ça ?

  • Fabienne

    Oui, ça a beaucoup d'importance. C'est ma grand-mère qui m'a élevée. Les amis de ma grand-mère avaient l'âge de ma grand-mère, voire plus âgée. Puisque dans le village où j'étais, c'était de coutume d'aller visiter les mamies qui vivaient seules. Et donc on allait passer des après-midi. En tiers, auprès de ces dames, on m'asseyait sur une chaise et moi j'écoutais. J'écoutais, je regardais, je m'imprégnais de ça. Et la voix, elle est pleine de rides, comme le corps. Je pense que la voix s'harmonise au corps. On peut avoir des surprises. Quelquefois, tu peux avoir une grosse voix dans un tout petit corps et une petite voix fluette dans un vieux corps. C'est amusant, je trouve ça super. Mais quand même, là, il y avait... il y avait l'histoire de la personne dans ce rocailleux, dans ce roulement, dans ces mots un peu chevrotés, parce qu'alors il y a le problème des dents. On perd des dents quand on est âgé, surtout à l'époque. Et je me disais, elle a des fausses dents, est-ce qu'elle a une fausse voix ? Est-ce que c'est sa voix qu'on entend vraiment ? Parce que du coup, je me disais, est-ce que c'est comme quand on te refait, tu vois, quelque chose quand tu as eu un accident, c'est... plus tout à fait pareil. Est-ce que c'est encore sa voix ? Moi, j'ai aimé ça. J'ai la voix d'Henriette, qui est morte il y a très longtemps, dans l'oreille. Je l'ai, cette voix-là. Les voix des papys qui sont moins... Je connais deux sortes de personnes âgées. Ceux qui parlent beaucoup parce qu'on se dit qu'ils ont peur de partir avant d'avoir dit tout ce qu'ils ont d'intéressant à dire. Et moi, je suis avide de ces mots. J'ai envie de savoir tout ça. Ça me plaît quand on raconte des histoires. Et puis la voix des papys et des mamies qui parlent peu et qui vont un jour te dire un mot ou deux, ou juste un soupir. Pour moi, les soupirs, les rires, les tais, les exclamations, c'est la voix. Pour moi, ça, c'est la voix. Et c'est précieux aussi. C'est dire beaucoup en peu de choses, quoi. Quelquefois en un souffle. Mais c'est important aussi d'entendre ça. La voix va avec la main d'une personne âgée qui est quelquefois légère ou fripée. Moi, je commence à vieillir aussi. Je sens ça maintenant. Tu sens la vie qui est passée, quelque chose qui a roulé, comme un galet. Mais ce n'est pas tout à fait poli, c'est doux, mais c'est plissé. La voix, elle est comme ça pour moi. Elle est douce, quelquefois. Pas toujours, mais elle est plissée. Il y a plein de choses. On voit la vie des gens, même si on ne la connaît pas. On voit bien qu'ils ont vécu des choses et que c'est resté.

  • Christine

    Donc, tu as beaucoup écouté.

  • Fabienne

    Oui.

  • Christine

    Et donc, en particulier des personnes âgées. Est-ce qu'il y a d'autres voix qui ont pu te marquer dans ton enfance ?

  • Fabienne

    Oui. Alors, j'allais à la messe. Ma grand-mère m'a menée à la messe. Et à la messe, tu avais les prêtres à l'ancienne, tu vois, en chair. avec cette espèce d'intonation un peu bizarre. Ils avaient tous la même, c'est curieux, quand tu les vois dans les films. Tu vois... . Alors, quand t'es enfant, c'est extrêmement impressionnant, mais ça fait un peu peur.. C'est pareil, il chante un peu comme une psalmodie tu vois, c'est très curieux. Ces voix-là, ça m'a impressionnée, oui, beaucoup. Ça m'a impressionnée. Et puis, moi, ce qui m'impressionne beaucoup... Là je bouche mes oreilles, ce sont les gens qui crient fort. Tu vois là, les gens qui crient fort, mes oreilles elles ne veulent pas entendre ça. Voilà, j'ai du mal avec ça. Mais tout ce qui est cris de surprise, petits cris de douleur quand tu te cognes, des choses comme ça, soupir, exclamations, ça j'aime beaucoup les rires. Les rires c'est extraordinaire, les rires des gens. C'est vraiment formidable. Je me nourris beaucoup de ça. Mon grand plaisir, c'est de faire rire quelqu'un. La télé, c'est très important pour moi, la télé, parce que la télé, elle m'a élevée aussi. Ma grand-mère a parté travailler, et donc on a eu la télé assez tard, je devais avoir 6 ou 7 ans, je ne me souviens plus exactement, des gros postes énormes. Et la télé, elle parlait. Et elle me parlait. Et moi, j'ai écouté tout ça. Elle m'a donné des voix. J'ai dans l'oreille... Les voix des acteurs de théâtre, au théâtre ce soir, j'adorais tous ces acteurs. Le Poulain, Maria Pacom. Le jeudi après-midi, puisque c'était mon jour de repos, c'était le jeudi après-midi, on avait des pièces de théâtre et des lectures par des grands comédiens de la comédie française. Et ça, moi, ça m'est resté dans l'oreille, le dernier des Mohicans. Donc, toutes ces voix de la télé, moi, elles m'ont parlé. Elles m'ont donné des voix. Je me suis sentie... On me parlait à moi. Et ça, ça m'est resté. C'est-à-dire que quand quelqu'un me parle, encore, quelque part, je suis toujours un peu étonnée qu'on prenne ce temps pour me dire quelque chose. Qu'on s'adresse à moi. Et la télé, elle me faisait ça. Je me sentais très importante que la télé me parle. Me raconte des choses. Et à l'époque, j'ai pris beaucoup de choses. Elle m'en a raconté beaucoup. Ça aussi, ça m'a aidée beaucoup.

  • Christine

    Et pas la radio ?

  • Fabienne

    Alors la radio, plus tard, la radio, puis elle avait pour moi une autre fonction d'enlever des bruits parasites, c'est-à-dire que je mettais la radio pour ne pas entendre autre chose. Voilà, donc ça a été plus tardif. La radio, maintenant, oui, j'aurais du mal à m'en passer, énormément. C'était même la première chose que je faisais quand je rentrais chez moi, c'était allumer la radio pendant longtemps. J'avais besoin de cette présence, de cette voix. Ça remplit un espace vide, ça remplit... Voilà. L'absence de quelqu'un, ça me fait penser, tu vois, quand on est célibataire ou une personne âgée qui vit seule, quelquefois la seule façon d'entendre une voix, c'est d'aller acheter quelque chose. Et ça je me dis, c'est quand même dommage, il faut qu'il y ait beaucoup d'endroits où on puisse aller pour parler et être écouté, sans avoir à payer pour qu'on t'écoute ou qu'on te parle. Et ça c'est vraiment très très très important. Je pense à des endroits comme... les espaces de vie sociaux, des choses comme ça, où les gens peuvent aller ne serait-ce que pour prendre un café et discuter. C'est vraiment important. Les gens, ils aiment parler. Moi, je parle dans le bus. Les gens, ils papotent et ils ont envie de raconter une petite histoire. Et c'est toujours super. On a des histoires incroyables. Et moi, je suis vraiment très contente d'entendre tout ça. Donc, ça ne me lasse jamais.

  • Christine

    Est-ce qu'il y a un moment où tu as justement osé prendre la parole ? Est-ce que tu en as le souvenir ? Est-ce que ça s'est fait petit à petit ? Ou est-ce que tu as souvenir de moments marquants où enfin tu as pu, toi aussi,prendre la parole ?

  • Fabienne

    La parole, je l'ai prise obligatoirement avec mon métier. J'étais institutrice, donc il y a un moment où il a bien fallu la prendre, cette parole. C'est que quand tu passes de l'autre côté en face des enfants, que tu vois si tu es faite pour ça ou pas. Et là, la parole, il faut qu'elle vienne. Mais là, ça ne m'a pas dérangée non plus. Avec les enfants, je me suis sentie extrêmement à l'aise. Parce que pour moi, les enfants, ils ne jugent pas. Il n'y a pas de jugement. Ils sont en train, eux, de placer leur voix. Ils cherchent leur voix. Ils ont une voix différente. Donc, il n'y a zéro jugement dans l'œil d'un enfant ou dans l'oreille d'un enfant. Tu vois, ta voix, elle est belle pour eux. Ils vont s'attacher. Ça va être un petit tuteur, cette voix. Donc, zéro problème avec les enfants. Ma voix, elle est venue facilement. Avec les adultes, ça a été plus compliqué. C'est-à-dire, je me surveillais, tu vois. Je faisais attention à employer les bons mots, à me juger sur ce que j'étais en train de dire. Est-ce que c'est adapté ? Est-ce que... Tu vois, c'était quelquefois un peu compliqué pour moi. J'ai mis du temps à me lâcher, et même encore, je me sens me surveiller face à quelqu'un qui va m'impressionner. Voilà. Je me juge, c'est un jugement, c'est idiot. Alors, je fais du clown en amateur. Et mon clown n'y parlait pas, c'est pareil, il était que dans le corporel et quand il parlait, il savait très mal se débrouiller avec les mots. Mais maintenant, il s'autorise, il s'autorise, j'adore, il y a des sujets dont je parle facilement, la mort par exemple, les places de village. Tu vois, c'est des choses bizarres comme ça, des choses, je peux parler de sujets graves maintenant en me disant, bon ben, c'est bon quoi, là maintenant tu peux y aller quoi. Tu peux y aller, je ne sais pas, ça ne va pas, ça ne va pas choquer. Je vais le faire avec le clown que je suis, c'est-à-dire naïf. Ma grand-mère était comme ça. Elle était très naïve, mais elle en profitait en vrai pour te dire des choses. Et tu ne lui en voulais jamais parce que tu te disais, bon ben voilà, elle est pure quelque part, c'est comme une petite fille. Et moi, j'utilise ça en clown, tu vois. Je peux dire maintenant, avec douceur, parler des choses graves. D'ailleurs, je pense que c'est plus intéressant. pour moi, de parler avec douceur et humour des choses graves que d'en faire quelque chose, que de le dire avec gravité. Quand je parle avec gravité, ça tombe un peu dans le pathos très vite et du coup, je trouve ça moins intéressant. C'est trop violent. Ma voix devient trop violente pour les gens. J'ai envie qu'elle soit plus dans la douceur, plus neutre et plus dans le plaisir. Voilà, c'est ça.

  • Christine

    Et cette douceur et cet humour, justement, est-ce que tu les utilisais en tant qu'enseignante ?

  • Fabienne

    Oui, naturellement, oui. Je peux être ferme dans mon humour si je sais arrêter les choses, mais oui, ça a toujours beaucoup mieux fonctionné. L'autorité, pour moi, elle doit être douce, elle doit être naturelle. Il faut placer des limites, mais ces limites-là, elles n'ont pas besoin d'être violentes pour moi, voilà. Après, il y a des enfants, on a juste, qui veulent savoir jusqu'où ils peuvent aller. Mais je pense que tu peux le montrer avec du recul, avec... tu vois, voilà, c'est ça. Après, moi, j'ai travaillé en IME avec des enfants qui étaient soit déficients intellectuels, soit qui avaient plein de problèmes. Ma limite, ce sont les caractériels, tu vois, par exemple. C'est là que peut-être il faudrait élever la voix et que moi, ça, je ne peux pas le faire. Voilà, c'est ma limite.

  • Christine

    Et donc par rapport aux enfants, toi qui as été une enfant dans l'écoute, est-ce que tu as été sensible à certains enfants justement qui avaient du mal à prendre la parole ? Et comment tu l'as vécu ça ?

  • Fabienne

    Tu les repères vite, ceux qui écoutent. En général, ils ont les yeux écarquillés, ils écoutent bien, ils sont extrêmement sages ces enfants-là. Ils ne bougent pas beaucoup. Ils bougent quand on leur permet de bouger, sinon ils sont sages. Et oui... Et oui, à un moment donné, il faut leur demander, eux, ce qu'ils en pensent des choses. Alors, on les taxe souvent de timides. Et c'est souvent après eux, ceux qui se révèlent le plus sur la scène ou dans des représentations. C'est un plaisir de les voir s'épanouir après. De leur montrer qu'eux aussi, ils ont des choses intéressantes à dire et qu'on peut aller vers eux et qu'ils peuvent venir vers les gens dire.

  • Christine

    J'aimerais savoir comment on peut passer de parler le langage... poule, à monter sur une scène ouverte pour compter devant un public. Je te demande ça parce que moi, la première fois que je t'ai rencontrée, que j'ai entendu ta voix, je l'ai entendue dans le cadre d'un conte, donc sur une scène ouverte. Je faisais partie du public et c'est la première fois que j'ai entendu ta voix et je n'aurais pas pu me douter que tu avais eu ce parcours avec la voix. Alors tu as parlé aussi du clown. Oui. Donc voilà, par rapport à ces engagements-là, puisque pour moi c'est une forme d'engagement, qu'est-ce que tu as envie de partager avec nous sur ce parcours-là ?

  • Fabienne

    De par mon métier, j'avais l'habitude de lire beaucoup à haute voix, à des enfants, à mon compagnon, à mon chat, je lisais à haute voix. Et ça avait toujours bien fonctionné ça. Et puis lors d'un petit festival que mon compagnon avait organisé avec d'autres personnes, il m'avait dit ça serait bien que tu viennes faire quelques lectures Donc j'avais choisi des tas d'albums. C'était dans un Ehpad, mais une fête avec tous les âges. Des petits du centre d'animation jusqu'au papi-mami qui était là. Et donc, j'ai amené mes livres, j'ai commencé à lire. Et je ne sais pas ce qui s'est passé. Je me suis levée et j'ai lâché les livres. Parce que je les avais tellement travaillés pour venir ce jour-là et être correcte. Et donner le mieux que je pouvais donner. Que je les avais en moi, tu vois. Et l'histoire est venue. Et j'ai raconté au lieu de lire. Et on m'a renvoyé que... que c'était agr��able, que c'était bien, que ça passait mieux, etc. Et quand le Covid est arrivé, cet EHPAD avec lequel j'avais eu ce contact, j'ai proposé d'envoyer un compte. Et donc chez moi, à la maison, filmé par mon compagnon, j'ai raconté une histoire que ma mère m'avait racontée. L'histoire raconte comment et pourquoi le rhinocéros a la peau plissée et qu'il a aussi mauvais caractère. Et donc j'ai enregistré cette histoire. Et on leur a envoyé. Et les retours ont été très bons. Je l'ai envoyé aussi à une amie qui est encore enseignante dans l'école où j'étais, en REP à Bordeaux. Et pareil, les retours ont été très bons. Et je me suis dit, peut-être je pourrais raconter, je pourrais dire. Et quand j'ai su qu'une conteuse professionnelle, Karine Vandome, ouvrait un atelier, un dimanche après-midi, tous les deux mois, je me suis lancée. Et je suis... tomber dans un monde extraordinaire. J'aimais les contes, j'en lisais énormément depuis toujours, mais soi-même les dire, c'est autre chose. Être au service de cette histoire pour que les gens l'entendent, c'est un monde merveilleux. Vraiment, quoi. On est timide, mais là, on est un outil au service de l'histoire. On ne disparaît pas. On accueille les gens dans notre bulle, mais on les invite. On ne les force pas. Et l'histoire, c'est elle la vedette, c'est elle qu'on doit mettre en valeur. Et notre voix est un outil, c'est presque elle la vedette. Et nous, on est là pour un peu décorer l'histoire, faire un peu d'humour pour accrocher ou un peu peur pour accrocher. Mais c'est l'histoire qui est là. On peut disparaître, on peut être presque en hypnose devant ce film qu'on est en train de raconter et qu'on doit faire passer aux autres. Et du coup... Dans le dernier stage que j'ai fait avec Michel Hindenhoek, il m'a donné des astuces pour avoir moins peur. Et je suis devenue un catalpa. Un catalpa magnifique. Je m'enracine dans le sol, mes branches elles montent jusqu'au ciel, mes feuilles sont superbes. Je prends les clés de l'endroit où je suis. Je te rassure, je les rends après. Et là, je suis chez moi, j'invite les gens chez moi, ceux qui veulent bien rentrer dans cette histoire. Et je me sens... enraciné en haut, en bas, chez moi, et j'ai moins peur. Et il m'a donné une autre clé aussi, il m'a dit d'être, il faut être soi-même, et il faut prendre plaisir. Il m'a dit, tu invites les gens à ta table, si tu ne manges pas, il y a des gens à qui ça fera rien, qui vont quand même manger ton histoire, mais il y a des gens qui ne vont pas manger, parce que toi, tu ne prends pas plaisir, toi tu ne manges pas. Ça m'a ouvert quelque chose en moi, je me suis dit, mais oui, Moi, je suis comme ça, avec cet accent-là, avec cette façon de faire qui n'est pas cette façon cérémonieuse que j'avais commencé à avoir en racontant certains contes avec une voix de dame, de tête en plus, tu sais, un peu pointue, parce que je pensais que c'était bien ça. Moi, avec ma voix de camionneur, je m'étais dit, mais non, ce n'est pas pour moi le chant, ce n'est pas pour moi... Et là, d'un coup, j'ai une voix de poitrine, je trouve ça super, quoi. Je ne savais même pas que ça existait, c'est lui qui m'a appris tout ça. Depuis je suis beaucoup mieux, je suis beaucoup moins traqueuse et je sais que c'est pas moi qui suis importante. Je viens pas là pour quand même, je viens là pour faire partager une histoire. Ça change tout. CONTE DE FABIENNE : Sur la place, il y a deux bancs face à face. Sur le premier, une vieille femme est astimée. Un bout de son jupon dépasse de sa robe. Elle porte un manteau fané et un vieux bonnet de laine troué d'où s'échappent quelques mèches blanches. À ses pieds, un cabas informe. Où l'on voit ? Un curieux bâton sculpté, cette vieille femme, c'est la mort. La mort est triste. Elle est triste et en colère. En colère parce que les hommes l'ont effacée de leur vie. Ils ne veulent plus la voir. Alors elle a le regard perdu dans le vide. Sur le banc en face, il y a Jean. Jean étudie. Il veut devenir médecin. Il est avec ses camarades de l'université. C'est la sortie des cours. Il rit et il chahute. Jean a vu la vieille femme. Elle lui rappelle sa grand-mère. Alors Jean se lève et vient s'asseoir à côté d'elle. Il commence à lui parler. Il lui demande comment elle va, si elle a à manger suffisamment, c'est important, il viendra vérifier. Il lui explique qu'il faut qu'elle prenne soin d'elle. Et puis, il passe un bras autour de ses épaules. La mort, elle, ça lui fait quelque chose. Jamais personne ne l'a pris dans les bras. Jamais personne ne l'a touchée. Elle se sent bien. Elle se redresse. Ça lui redonne même un tout petit peu de vie.

  • Christine

    Est-ce qu'aujourd'hui tu aimes ta voix ?

  • Fabienne

    Oui. bizarrement, oui. Parce que vu comment je ne l'aimais pas du tout avant, je m'étais dit, ce n'est pas gagné. Quand je m'écoutais, j'enregistrais les enfants à l'école, pour justement qu'ils apprivoisent leur voix, qu'ils aient moins peur de s'entendre. Parce qu'on a tous un mouvement de recul quand on entend notre voix. Et on jouait beaucoup avec les voix, on s'amusait avec nos voix, avec les enfants. Mais moi, pendant longtemps, enfin, petite, je chantais à l'école et tout. Après, plus de chant. plus de musique au collège, il n'y avait pas de prof, tu vois, c'était à la campagne, plus de musique au lycée, plus de chant, j'arrive à l'école normale, je tombe sur, heureusement je ne l'ai pas eu après, un prof de chant qui m'a dit, ça ne va pas du tout quoi, il ne faut pas chanter, il m'a dit. Alors j'ai quand même chanté avec les enfants, parce que je n'ai aucun problème à chanter devant les enfants, mais je n'ai plus du tout chanté. pour moi du tout ni avec des adultes jusqu'aux clowns parce qu'aux clowns un jour la metteuse en scène elle dit aujourd'hui on chante alors je vais la voir je dis ah non c'est pas possible maria c'est impossible si tu veux tu me dis quand l'exercice est fini je vais faire un tour je reviens elle me dit mais t'as pas le choix tu chantes Alors on a commencé à tourner, tu vois, dans la salle, on avait chacun un numéro, elle appelait un numéro, tu chantais. Et moi, tu vois, la tête complètement vide, le blanc, je me disais qu'est-ce que je vais chanter, qu'est-ce que je vais chanter, rien ne venait. Et quand mon numéro est sorti, eh bien j'ai chanté. l'aigle noir de Barbara. Avec une voix chevrotante, tu vois. Et ça a été une libération. Depuis, je chante. Je ne dis même plus que je ne sais pas chanter. Alors qu'avant, je ne sais absolument pas chanter. Je chante. Je me fonds dans la masse. J'écoute les autres. Je me mets à côté de quelqu'un d'une voix que j'aime bien. Et hop, je me laisse emporter. Et j'éprouve beaucoup de plaisir à ça. C'est très agréable de chanter. très agréable. Voilà.

  • Christine

    Est-ce qu'il y a d'autres éléments ou d'autres personnes qui t'ont justement accompagné sur ce chemin pour aimer ta voix ?

  • Fabienne

    Mon compagnon. Mon compagnon, il essaie de me faire prendre du recul avec tout ça, de me dire que les autres, ils n'entendent pas tout ça. Ils ne voient pas la difficulté que j'ai avec ma voix. Donc, ce n'est pas important. Il me dit toujours, tu vois, ce qui est important, c'est... l'ensemble, c'est pas la voix ou c'est pas, voilà, il ne voit pas quoi, donc je me dis oui et puis l'âge quand on vieillit, on s'attache moins à tout ça, on se dit ça c'est pas très important et on relativise avec tout ce qui se passe aussi autour de nous, les gens qui s'en vont, jeunes, les gens tu vois, tu te dis, moi j'ai encore la chance d'être là, et c'est super et je me dis, alors profite quoi tu as envie de faire quelque chose, fais-le tu vas rater, tu vas... Tu vas te relever, tu vas recommencer, tu vas réessayer et puis voilà.

  • Christine

    Tu évites de te juger en fait.

  • Fabienne

    C'est ça, j'essaie. J'essaie, Christine. Ce n'est pas toujours évident. J'ai encore des vieilleries qui s'accrochent. Tu sais, il y a toujours la petite voix. Elle est terrible cette petite voix. On l'entend. Ce n'est pas une voix qu'on n'entend pas. On l'entend. Et ce n'est pas tout à fait la même voix que la mienne. Quand on dit une petite voix, c'est vraiment un truc là... bizarre, qui te susurre des trucs et qui est... alors elle est sûre d'elle, c'est impressionnant quand même et toi tu es là ah oui peut-être, ah oui oui effectivement alors que non, quoi.

  • Christine

    Tu sais que la plupart des gens avec qui j'échange autour de mon podcast sur la thématique de la voix, alors je n'ai pas tenu de statistiques, mais je pense qu'on n'est pas loin de 9 personnes sur 10 qui disent ne pas aimer leur voix. Et toi justement, ces personnes-là, qu'est-ce que tu pourrais leur donner comme astuce ou conseil ? En tout cas, comment tu pourrais les guider sur ce chemin-là pour essayer d'aimer sa voix ?

  • Fabienne

    Je pense qu'il faut s'amuser avec sa voix. À la maison, je fais plein de voix rigolotes, que je ne suis pas forcée de refaire quand on me les demande. Quand on me les demande, je suis là, mais elles viennent. Je m'amuse, tu vois, avec des sons. Je fais des sons, je fais des bruits. J'écoute les oiseaux, j'écoute les animaux. J'essaie de reproduire, tu vois, le cri de l'animal ou le son que j'ai entendu. Et puis, je parle. Je rattrape le temps perdu, tout ce que je n'ai pas dit. Je le dis et je me dis et je me dis, petite voix, eh bien vas-y parce que la vie elle est courte, elle peut s'arrêter pour des tas de raisons et on n'aura pas profité de cette voix qui nous a été donnée. Voilà. Et il y a des gens qui ne peuvent pas parler et qui ne l'entendent pas parce qu'eux, ils n'entendent pas. Et je me dis, c'est une chance, la voix telle qu'elle est, elle est là. On peut dire les choses, avec maladresse quelquefois, oui. Je me sens des fois très maladroite, à côté de la plaque, ou alors ce qui est sorti, ce n'est pas du tout ce que je voulais dire. Eh bien tant pis, c'est sorti. Si tu es avec des gens qui t'aiment bien, ils vont me prendre, ils vont comprendre. Si tu es avec des gens qui ne te connaissent pas ou qui ne t'aiment pas, ce n'est pas très grave, on peut recommencer une autre rencontre, on peut redire, on peut dire. à je vois bien que je n'ai pas dit ce que je voulais dire tout simplement, avec simplicité. Je n'ai pas trop de conseils, je ne sais pas trop. Je crois que les gens doivent faire avec leur cœur. Des fois, ça va marcher, des fois, ça ne va pas marcher. Il faut recommencer, il faut essayer.

  • Christine

    Est-ce que conter, aujourd'hui, ça t'aide justement à rattraper le temps perdu dont tu parlais ?

  • Fabienne

    Alors, conter, je ne sais pas si ça m'aide à rattraper le temps perdu. En tout cas, c'est... C'est quelque chose d'important pour moi, quelque chose, je pense, que je suis venue jusqu'à présent dans mes démarches, jusque-là. Je pense qu'il s'est passé beaucoup de choses dans ma vie qui ont fait que là, d'un coup, je raconte. C'est presque me servir de tout ce qui s'est passé avant, bon ou moins bon, ou vraiment, vraiment moins bon, pour être là à raconter. C'est vital. C'est quelque chose, voilà, je ne savais pas. Mais il fallait que je raconte. Je ne sais pas où ça va m'amener. Je ne sais pas trop les chemins que je vais prendre avec cette histoire-là. Mais pour le moment, c'est sûrement quelque chose... Tout ce qui est arrivé avant m'a nourrie pour arriver là. Je disais pareil pour le clown il y a plusieurs années. Tout ce que j'avais fait avant, ça devait sortir. J'étais clown et je ne le savais pas. Et peut-être, peut-être, si ce n'est pas trop... présomptueux de ma part, peut-être je pourrais être une conteuse débutante pour raconter, oui, ça me construit..................................................................................................................... Les personnes âgées, par exemple, on ne les écoute pas. Au mieux, on les enregistre pour avoir des témoignages. Mais rien que le fait de parler un petit peu et de les entendre, ça ne se fait pas beaucoup. Moi, j'aimerais bien aussi peut-être être lectrice aussi. Ou raconter à des gens qui ne voient pas. Des choses comme ça, pour donner des images avec la voix. Moi, on m'a dit que j'avais la voix de ma mère, par exemple, qui est morte il y a très très longtemps. Et ça, ça a été un problème pour moi. Je voulais avoir ma voix, je ne voulais pas avoir la voix de quelqu'un. Comme les enfants qui ont dit tu ressembles à un tel et qui se disent non, je ne lui ressemble pas Et maintenant, comme j'ai oublié sa voix, je me dis c'est super, quand tu t'entends, tu l'entends un petit peu à elle Donc la voix, ça peut être aussi ce souvenir. Le souvenir de quelqu'un qui est parti, même si on l'oublie à la limite, parce que je l'ai oublié, on oublie les visages, on oublie les voix, il y a des photos, mais les voix, t'as pas toujours enregistré les voix. Donc peut-être comprendre comment c'est précieux une voix, et l'enregistrer pour la voir, pour l'entendre encore, parce que quand on entend ça, ce souvenir d'il y a longtemps, ça fait ressurgir des tas de choses qu'on a oubliées, pas que la voix. c'est comme un parfum, une voix ça peut d'un coup déclencher quelque chose de formidable un souvenir incroyable et ça je crois que la voix c'est précieux il faut la soigner, très important la soigner sa voix, d'en prendre soin, c'est comme les pieds on peut ne pas les avoir un jour toujours apte à nous porter et la voix à dire puis la voix, moi quand j'entends voix j'entends aussi, tu vois les élections on a une voix Pour moi, c'est important, ça. On peut dire encore, parce que c'est vrai qu'on se dit, ça ne sert plus à rien. Quand on vote, on n'est pas écouté. Mais c'est une voix quand même. C'est un acte, la voix. Pour moi, la voix, c'est un déplacement. Ce n'est pas quelque chose qui est arrêté. C'est quelque chose qui part, qui va vers les gens. Donc voilà, il faut en prendre soin de sa voix. Il faut l'aimer. Il faut essayer.

  • Christine

    Merci Fabienne pour ta participation à ce podcast. C'était vraiment très chouette de passer ce moment avec toi.

  • Fabienne

    Merci.

  • Christine

    Un grand merci à Fabienne pour sa confiance et la grande sincérité avec laquelle elle a osé partager le chemin de sa voix. Je vous invite à découvrir son actualité autour des histoires et du conte en suivant le lien dans la description de cet épisode. Merci à vous d'avoir écouté cet épisode d'On n'a qu'une voix jusqu'au bout. S'il vous a plu, abonnez-vous dès maintenant pour ne pas manquer la voix de mes prochains invités. Et pour soutenir mon podcast, je vous propose de le noter et de le commenter sur votre application d'écoute préférée. Enfin, un merci tout particulier à Émilie Décla. qui a créé et interprété toutes les musiques d'On n'a qu'une voix. Retrouvez l'actualité du podcast sur le compte Instagram ou LinkedIn Entre Voix et Mots. À bientôt !

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Description

Bienvenue sur On n’a qu’une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix !

Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de Fabienne Rebeyrol.


A la fin de l'été 2024, je rencontre Fabienne lors d’un festival de contes dans les Pyrénées. J’y organise un micro-trottoir au cours duquel elle me confie que, petite, elle ne parle pas parce qu’elle n’a rien d’intéressant à dire.

Et pourtant… quelques heures auparavant, en découvrant sa voix, je suis sous le charme, mais loin d'imaginer le chemin parcouru.

Que s’est-il passé dans la vie de Fabienne qui, petite fille, parle davantage aux poules qu’aux humains ? Comment le rapport que l'on entretient avec notre voix peut-il se déplacer autant ?

Ce sont les éléments que je vous propose de découvrir dans cet épisode plein de belles surprises au cours duquel Fabienne se livre avec beaucoup de sincérité et de générosité. Merci à elle ! 


Bonne écoute !


💡 Vous pouvez retrouver l'actualité de Fabienne Rebeyrol par ici.

Suivez celle de mon podcast sur le compte Entre voix et mots : Instagram ou LinkedIn.


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📩 Contactez-moi à l’adresse suivante : christine.irabola.redac@gmail.com.


Crédits :

  • Réalisation, montage, mixage : Christine Irabola

  • Musiques et chants : Émilie Décla


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Christine

    On n'a qu'une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix. Chaque mois, venez à la rencontre de mes invités qui lèvent le voile sur l'histoire singulière de leur voix. Au programme, des voix parlées, des voix chantées, des voix jouées et des voix parfois malmenées. L'intention ? Vous procurer des émotions, vous faire voyager, vous apporter des conseils et vous proposer un pas de côté pour vous inviter à aimer votre voix. Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de Fabienne Reberolle. À la fin de l'été dernier... Je rencontre Fabienne à l'occasion d'un festival de contes dans les Pyrénées. Et alors que je tends mon micro aux personnes qui souhaitent partager la place qu'a la voix dans leur vie, voici ce qu'elle me confie.

  • Fabienne

    Je m'appelle Fabienne et j'ai été élevée à la campagne par ma grand-mère. Et pendant longtemps, je n'ai pas parlé. Et quand on me demandait pourquoi, je disais parce que je n'ai rien d'intéressant à dire. Et puis, je parlais beaucoup aux poules. Ma grand-mère avait des poules et c'était un public fascinant. J'adore les poules, je parle très bien le langage poule et pendant longtemps j'ai parlé aux poules et elle me répondait et je continue parce que j'ai encore des poules qui me répondent.

  • Christine

    Intriguée et surtout très touchée par son témoignage, je décide de l'inviter à partager avec nous son parcours aussi singulier qu'inspirant. Vous allez donc découvrir comment sa voix s'est déplacée au fil des années jusqu'à prendre aujourd'hui une place à la fois étonnante et juste. Bonne écoute ! Bonjour Fabienne.

  • Fabienne

    Bonjour.

  • Christine

    Merci d'être là, d'avoir accepté l'invitation sur le podcast On n'a qu'une voix. Pour commencer, j'aimerais savoir quelle est la place de la voix dans ta vie ?

  • Fabienne

    Elle est très importante. Je ne me suis jamais posée en ces termes-là, mais je me rends compte maintenant, à l'âge que j'ai, qu'elle est très importante. J'ai longtemps beaucoup écouté, sans parler justement. J'adore les voix des autres. C'est quelque chose pour moi qui est peut-être... plus représentatif que l'apparence physique. Je me fais, moi, une image intérieure de la personne avec la voix. Ça me parle davantage, ça me pénètre davantage. Et comme j'écoutais beaucoup, je ne parlais pas parce que moi, j'avais l'impression que je n'avais pas quelque chose d'aussi intéressant à dire. Il me semblait qu'il fallait aller vers les autres et c'était un peu compliqué pour moi parce que parler, c'est aller vers quelqu'un. Et c'était un petit peu compliqué, donc j'étais un peu sur la réserve. Mais j'ai engrangé, un peu comme ces enfants qui ne parlent pas, mais qui entendent tout, et tu te dis, mais il n'a pas compris. Mais si, il a tout compris, mais il n'a rien à dire de plus que ce qu'il a entendu. Et moi, j'étais un peu comme ça. La voix, pour moi, elle est diverse, variée. Je suis toujours étonnée d'entendre des nouvelles voix, de rencontrer des nouvelles voix. Je me dis, mais c'est un réservoir inépuisable. Chacun vient au monde avec... Une voix différente qui va évoluer en plus avec l'âge. Donc je me dis, ça c'est extraordinaire. Ça m'épate toujours. Je suis toujours épatée d'entendre une nouvelle voix. Et puis la voix pour moi, c'est quelque chose qui peut me permettre de m'évader du tumulte. Du tumulte du monde, tu vois, de la vie. Quelquefois je ne suis pas agressée, mais c'est trop d'informations, trop de choses qui arrivent avec beaucoup de vitesse. Moi j'ai du mal avec ça. J'ai besoin d'avoir du calme, du silence. Et la voix, par exemple, les chants inuits, qui sont très rauques, moi, ça me permet de partir un petit peu, d'aller dans un autre monde pour me reposer. Voilà, ça me fait résonner le corps. Et du coup, mon corps, on dirait qu'il se débarrasse de toutes les petites poussières du monde. Et quand c'est fini, je suis nettoyée et je peux repartir. Moi, il y a des voix qui me font ça. qui me nettoie, dont j'ai besoin. J'ai la chance d'avoir enregistré ma grand-mère, par exemple, que j'aime beaucoup. Je l'ai sur une vieille cassette, tu vois, qu'il faut que je fasse repiquer sur un CD. Mais pour moi, c'est d'un précieux. Si je devais sortir d'une maison en feu, je prends la cassette, tu vois, avec la voix de ma grand-mère. C'est quelque chose d'important.

  • Christine

    Quand on s'est rencontré, c'était dans le cadre d'un festival de contes, tu m'as confié que quand tu étais petite, tu ne parlais pas. Est-ce que tu peux nous en dire davantage ?

  • Fabienne

    Oui,j'étais une petite fille qui écoutait beaucoup. J'ai souvent eu, et ça continue, j'ai souvent eu l'impression d'être une grande oreille, une grosse oreille. Je suis avide de ça, de voix, de son, de choses que l'on entend. Ça me dit beaucoup sur mon environnement. Ça m'aide énormément. Et donc, je ne parlais pas, mais je parlais à ma grand-mère, bien sûr, que j'aimais beaucoup, et aussi aux animaux. J'ai toujours beaucoup parlé aux animaux et aux plantes, je peux le dire maintenant, il y a prescription. Donc, ma grand-mère avait des poules, et il y avait une espèce de vieille souche à côté du poulailler. Je m'installais sur la souche, et elles avaient droit à un florilège d'histoires, de poèmes, de chansons, parce que je chantais petite à tue-tête, alors qu'après, j'ai été bloquée, tu vois, dans le champ. des réflexions, des choses comme ça. Et là, sans aucun complexe, c'était dans un bois, donc il n'y avait absolument aucun témoin, aucun public à part ces poules, qui étaient un public vraiment formidable, très attentive. J'avais beaucoup de choses à raconter. Ma vie de petite fille, peut-être déjà les faire... Comme si j'allais les faire rire, tu vois, les poules. Leur raconter des trucs, un public, vraiment.

  • Christine

    Quand tu étais à l'école, tu ne prenais pas la parole du tout ?

  • Fabienne

    Alors, je me suis vite aperçue que je pouvais faire rire. Et la parole, elle était au service de ce rire-là. C'est-à-dire, quand je sentais qu'à côté de moi, il y avait quelqu'un ou quelque chose ou une tension, hop, j'y allais de ma petite bêtise, tu vois, pour pouvoir détendre l'atmosphère. C'était quelque chose pour moi qui était vital. Même pas vital, c'était obligatoire. Voilà. Et j'ai continué, je continue toujours à essayer de faire rire. Alors je me suis calmée, parce que maintenant je me dis, mais laisse respirer les gens, s'ils ont envie d'être tristes, ils ont le droit d'être tristes. Mais je continue quand même à avoir ce besoin de voir les gens autour de moi apaisés ou souriants. Et donc la voix pour moi, c'est un moyen de les faire rire. Voilà, ou de les apaiser, tu vois ? Oui.

  • Christine

    Parmi les voix qui t'ont marquée, je crois qu'il y a les voix des personnes âgées. Tu as évoqué ta grand-mère. Et quand on s'est rencontrées toutes les deux, tu m'as dit que ça avait une importance dans ta vie. Est-ce que tu peux nous partager ça ?

  • Fabienne

    Oui, ça a beaucoup d'importance. C'est ma grand-mère qui m'a élevée. Les amis de ma grand-mère avaient l'âge de ma grand-mère, voire plus âgée. Puisque dans le village où j'étais, c'était de coutume d'aller visiter les mamies qui vivaient seules. Et donc on allait passer des après-midi. En tiers, auprès de ces dames, on m'asseyait sur une chaise et moi j'écoutais. J'écoutais, je regardais, je m'imprégnais de ça. Et la voix, elle est pleine de rides, comme le corps. Je pense que la voix s'harmonise au corps. On peut avoir des surprises. Quelquefois, tu peux avoir une grosse voix dans un tout petit corps et une petite voix fluette dans un vieux corps. C'est amusant, je trouve ça super. Mais quand même, là, il y avait... il y avait l'histoire de la personne dans ce rocailleux, dans ce roulement, dans ces mots un peu chevrotés, parce qu'alors il y a le problème des dents. On perd des dents quand on est âgé, surtout à l'époque. Et je me disais, elle a des fausses dents, est-ce qu'elle a une fausse voix ? Est-ce que c'est sa voix qu'on entend vraiment ? Parce que du coup, je me disais, est-ce que c'est comme quand on te refait, tu vois, quelque chose quand tu as eu un accident, c'est... plus tout à fait pareil. Est-ce que c'est encore sa voix ? Moi, j'ai aimé ça. J'ai la voix d'Henriette, qui est morte il y a très longtemps, dans l'oreille. Je l'ai, cette voix-là. Les voix des papys qui sont moins... Je connais deux sortes de personnes âgées. Ceux qui parlent beaucoup parce qu'on se dit qu'ils ont peur de partir avant d'avoir dit tout ce qu'ils ont d'intéressant à dire. Et moi, je suis avide de ces mots. J'ai envie de savoir tout ça. Ça me plaît quand on raconte des histoires. Et puis la voix des papys et des mamies qui parlent peu et qui vont un jour te dire un mot ou deux, ou juste un soupir. Pour moi, les soupirs, les rires, les tais, les exclamations, c'est la voix. Pour moi, ça, c'est la voix. Et c'est précieux aussi. C'est dire beaucoup en peu de choses, quoi. Quelquefois en un souffle. Mais c'est important aussi d'entendre ça. La voix va avec la main d'une personne âgée qui est quelquefois légère ou fripée. Moi, je commence à vieillir aussi. Je sens ça maintenant. Tu sens la vie qui est passée, quelque chose qui a roulé, comme un galet. Mais ce n'est pas tout à fait poli, c'est doux, mais c'est plissé. La voix, elle est comme ça pour moi. Elle est douce, quelquefois. Pas toujours, mais elle est plissée. Il y a plein de choses. On voit la vie des gens, même si on ne la connaît pas. On voit bien qu'ils ont vécu des choses et que c'est resté.

  • Christine

    Donc, tu as beaucoup écouté.

  • Fabienne

    Oui.

  • Christine

    Et donc, en particulier des personnes âgées. Est-ce qu'il y a d'autres voix qui ont pu te marquer dans ton enfance ?

  • Fabienne

    Oui. Alors, j'allais à la messe. Ma grand-mère m'a menée à la messe. Et à la messe, tu avais les prêtres à l'ancienne, tu vois, en chair. avec cette espèce d'intonation un peu bizarre. Ils avaient tous la même, c'est curieux, quand tu les vois dans les films. Tu vois... . Alors, quand t'es enfant, c'est extrêmement impressionnant, mais ça fait un peu peur.. C'est pareil, il chante un peu comme une psalmodie tu vois, c'est très curieux. Ces voix-là, ça m'a impressionnée, oui, beaucoup. Ça m'a impressionnée. Et puis, moi, ce qui m'impressionne beaucoup... Là je bouche mes oreilles, ce sont les gens qui crient fort. Tu vois là, les gens qui crient fort, mes oreilles elles ne veulent pas entendre ça. Voilà, j'ai du mal avec ça. Mais tout ce qui est cris de surprise, petits cris de douleur quand tu te cognes, des choses comme ça, soupir, exclamations, ça j'aime beaucoup les rires. Les rires c'est extraordinaire, les rires des gens. C'est vraiment formidable. Je me nourris beaucoup de ça. Mon grand plaisir, c'est de faire rire quelqu'un. La télé, c'est très important pour moi, la télé, parce que la télé, elle m'a élevée aussi. Ma grand-mère a parté travailler, et donc on a eu la télé assez tard, je devais avoir 6 ou 7 ans, je ne me souviens plus exactement, des gros postes énormes. Et la télé, elle parlait. Et elle me parlait. Et moi, j'ai écouté tout ça. Elle m'a donné des voix. J'ai dans l'oreille... Les voix des acteurs de théâtre, au théâtre ce soir, j'adorais tous ces acteurs. Le Poulain, Maria Pacom. Le jeudi après-midi, puisque c'était mon jour de repos, c'était le jeudi après-midi, on avait des pièces de théâtre et des lectures par des grands comédiens de la comédie française. Et ça, moi, ça m'est resté dans l'oreille, le dernier des Mohicans. Donc, toutes ces voix de la télé, moi, elles m'ont parlé. Elles m'ont donné des voix. Je me suis sentie... On me parlait à moi. Et ça, ça m'est resté. C'est-à-dire que quand quelqu'un me parle, encore, quelque part, je suis toujours un peu étonnée qu'on prenne ce temps pour me dire quelque chose. Qu'on s'adresse à moi. Et la télé, elle me faisait ça. Je me sentais très importante que la télé me parle. Me raconte des choses. Et à l'époque, j'ai pris beaucoup de choses. Elle m'en a raconté beaucoup. Ça aussi, ça m'a aidée beaucoup.

  • Christine

    Et pas la radio ?

  • Fabienne

    Alors la radio, plus tard, la radio, puis elle avait pour moi une autre fonction d'enlever des bruits parasites, c'est-à-dire que je mettais la radio pour ne pas entendre autre chose. Voilà, donc ça a été plus tardif. La radio, maintenant, oui, j'aurais du mal à m'en passer, énormément. C'était même la première chose que je faisais quand je rentrais chez moi, c'était allumer la radio pendant longtemps. J'avais besoin de cette présence, de cette voix. Ça remplit un espace vide, ça remplit... Voilà. L'absence de quelqu'un, ça me fait penser, tu vois, quand on est célibataire ou une personne âgée qui vit seule, quelquefois la seule façon d'entendre une voix, c'est d'aller acheter quelque chose. Et ça je me dis, c'est quand même dommage, il faut qu'il y ait beaucoup d'endroits où on puisse aller pour parler et être écouté, sans avoir à payer pour qu'on t'écoute ou qu'on te parle. Et ça c'est vraiment très très très important. Je pense à des endroits comme... les espaces de vie sociaux, des choses comme ça, où les gens peuvent aller ne serait-ce que pour prendre un café et discuter. C'est vraiment important. Les gens, ils aiment parler. Moi, je parle dans le bus. Les gens, ils papotent et ils ont envie de raconter une petite histoire. Et c'est toujours super. On a des histoires incroyables. Et moi, je suis vraiment très contente d'entendre tout ça. Donc, ça ne me lasse jamais.

  • Christine

    Est-ce qu'il y a un moment où tu as justement osé prendre la parole ? Est-ce que tu en as le souvenir ? Est-ce que ça s'est fait petit à petit ? Ou est-ce que tu as souvenir de moments marquants où enfin tu as pu, toi aussi,prendre la parole ?

  • Fabienne

    La parole, je l'ai prise obligatoirement avec mon métier. J'étais institutrice, donc il y a un moment où il a bien fallu la prendre, cette parole. C'est que quand tu passes de l'autre côté en face des enfants, que tu vois si tu es faite pour ça ou pas. Et là, la parole, il faut qu'elle vienne. Mais là, ça ne m'a pas dérangée non plus. Avec les enfants, je me suis sentie extrêmement à l'aise. Parce que pour moi, les enfants, ils ne jugent pas. Il n'y a pas de jugement. Ils sont en train, eux, de placer leur voix. Ils cherchent leur voix. Ils ont une voix différente. Donc, il n'y a zéro jugement dans l'œil d'un enfant ou dans l'oreille d'un enfant. Tu vois, ta voix, elle est belle pour eux. Ils vont s'attacher. Ça va être un petit tuteur, cette voix. Donc, zéro problème avec les enfants. Ma voix, elle est venue facilement. Avec les adultes, ça a été plus compliqué. C'est-à-dire, je me surveillais, tu vois. Je faisais attention à employer les bons mots, à me juger sur ce que j'étais en train de dire. Est-ce que c'est adapté ? Est-ce que... Tu vois, c'était quelquefois un peu compliqué pour moi. J'ai mis du temps à me lâcher, et même encore, je me sens me surveiller face à quelqu'un qui va m'impressionner. Voilà. Je me juge, c'est un jugement, c'est idiot. Alors, je fais du clown en amateur. Et mon clown n'y parlait pas, c'est pareil, il était que dans le corporel et quand il parlait, il savait très mal se débrouiller avec les mots. Mais maintenant, il s'autorise, il s'autorise, j'adore, il y a des sujets dont je parle facilement, la mort par exemple, les places de village. Tu vois, c'est des choses bizarres comme ça, des choses, je peux parler de sujets graves maintenant en me disant, bon ben, c'est bon quoi, là maintenant tu peux y aller quoi. Tu peux y aller, je ne sais pas, ça ne va pas, ça ne va pas choquer. Je vais le faire avec le clown que je suis, c'est-à-dire naïf. Ma grand-mère était comme ça. Elle était très naïve, mais elle en profitait en vrai pour te dire des choses. Et tu ne lui en voulais jamais parce que tu te disais, bon ben voilà, elle est pure quelque part, c'est comme une petite fille. Et moi, j'utilise ça en clown, tu vois. Je peux dire maintenant, avec douceur, parler des choses graves. D'ailleurs, je pense que c'est plus intéressant. pour moi, de parler avec douceur et humour des choses graves que d'en faire quelque chose, que de le dire avec gravité. Quand je parle avec gravité, ça tombe un peu dans le pathos très vite et du coup, je trouve ça moins intéressant. C'est trop violent. Ma voix devient trop violente pour les gens. J'ai envie qu'elle soit plus dans la douceur, plus neutre et plus dans le plaisir. Voilà, c'est ça.

  • Christine

    Et cette douceur et cet humour, justement, est-ce que tu les utilisais en tant qu'enseignante ?

  • Fabienne

    Oui, naturellement, oui. Je peux être ferme dans mon humour si je sais arrêter les choses, mais oui, ça a toujours beaucoup mieux fonctionné. L'autorité, pour moi, elle doit être douce, elle doit être naturelle. Il faut placer des limites, mais ces limites-là, elles n'ont pas besoin d'être violentes pour moi, voilà. Après, il y a des enfants, on a juste, qui veulent savoir jusqu'où ils peuvent aller. Mais je pense que tu peux le montrer avec du recul, avec... tu vois, voilà, c'est ça. Après, moi, j'ai travaillé en IME avec des enfants qui étaient soit déficients intellectuels, soit qui avaient plein de problèmes. Ma limite, ce sont les caractériels, tu vois, par exemple. C'est là que peut-être il faudrait élever la voix et que moi, ça, je ne peux pas le faire. Voilà, c'est ma limite.

  • Christine

    Et donc par rapport aux enfants, toi qui as été une enfant dans l'écoute, est-ce que tu as été sensible à certains enfants justement qui avaient du mal à prendre la parole ? Et comment tu l'as vécu ça ?

  • Fabienne

    Tu les repères vite, ceux qui écoutent. En général, ils ont les yeux écarquillés, ils écoutent bien, ils sont extrêmement sages ces enfants-là. Ils ne bougent pas beaucoup. Ils bougent quand on leur permet de bouger, sinon ils sont sages. Et oui... Et oui, à un moment donné, il faut leur demander, eux, ce qu'ils en pensent des choses. Alors, on les taxe souvent de timides. Et c'est souvent après eux, ceux qui se révèlent le plus sur la scène ou dans des représentations. C'est un plaisir de les voir s'épanouir après. De leur montrer qu'eux aussi, ils ont des choses intéressantes à dire et qu'on peut aller vers eux et qu'ils peuvent venir vers les gens dire.

  • Christine

    J'aimerais savoir comment on peut passer de parler le langage... poule, à monter sur une scène ouverte pour compter devant un public. Je te demande ça parce que moi, la première fois que je t'ai rencontrée, que j'ai entendu ta voix, je l'ai entendue dans le cadre d'un conte, donc sur une scène ouverte. Je faisais partie du public et c'est la première fois que j'ai entendu ta voix et je n'aurais pas pu me douter que tu avais eu ce parcours avec la voix. Alors tu as parlé aussi du clown. Oui. Donc voilà, par rapport à ces engagements-là, puisque pour moi c'est une forme d'engagement, qu'est-ce que tu as envie de partager avec nous sur ce parcours-là ?

  • Fabienne

    De par mon métier, j'avais l'habitude de lire beaucoup à haute voix, à des enfants, à mon compagnon, à mon chat, je lisais à haute voix. Et ça avait toujours bien fonctionné ça. Et puis lors d'un petit festival que mon compagnon avait organisé avec d'autres personnes, il m'avait dit ça serait bien que tu viennes faire quelques lectures Donc j'avais choisi des tas d'albums. C'était dans un Ehpad, mais une fête avec tous les âges. Des petits du centre d'animation jusqu'au papi-mami qui était là. Et donc, j'ai amené mes livres, j'ai commencé à lire. Et je ne sais pas ce qui s'est passé. Je me suis levée et j'ai lâché les livres. Parce que je les avais tellement travaillés pour venir ce jour-là et être correcte. Et donner le mieux que je pouvais donner. Que je les avais en moi, tu vois. Et l'histoire est venue. Et j'ai raconté au lieu de lire. Et on m'a renvoyé que... que c'était agr��able, que c'était bien, que ça passait mieux, etc. Et quand le Covid est arrivé, cet EHPAD avec lequel j'avais eu ce contact, j'ai proposé d'envoyer un compte. Et donc chez moi, à la maison, filmé par mon compagnon, j'ai raconté une histoire que ma mère m'avait racontée. L'histoire raconte comment et pourquoi le rhinocéros a la peau plissée et qu'il a aussi mauvais caractère. Et donc j'ai enregistré cette histoire. Et on leur a envoyé. Et les retours ont été très bons. Je l'ai envoyé aussi à une amie qui est encore enseignante dans l'école où j'étais, en REP à Bordeaux. Et pareil, les retours ont été très bons. Et je me suis dit, peut-être je pourrais raconter, je pourrais dire. Et quand j'ai su qu'une conteuse professionnelle, Karine Vandome, ouvrait un atelier, un dimanche après-midi, tous les deux mois, je me suis lancée. Et je suis... tomber dans un monde extraordinaire. J'aimais les contes, j'en lisais énormément depuis toujours, mais soi-même les dire, c'est autre chose. Être au service de cette histoire pour que les gens l'entendent, c'est un monde merveilleux. Vraiment, quoi. On est timide, mais là, on est un outil au service de l'histoire. On ne disparaît pas. On accueille les gens dans notre bulle, mais on les invite. On ne les force pas. Et l'histoire, c'est elle la vedette, c'est elle qu'on doit mettre en valeur. Et notre voix est un outil, c'est presque elle la vedette. Et nous, on est là pour un peu décorer l'histoire, faire un peu d'humour pour accrocher ou un peu peur pour accrocher. Mais c'est l'histoire qui est là. On peut disparaître, on peut être presque en hypnose devant ce film qu'on est en train de raconter et qu'on doit faire passer aux autres. Et du coup... Dans le dernier stage que j'ai fait avec Michel Hindenhoek, il m'a donné des astuces pour avoir moins peur. Et je suis devenue un catalpa. Un catalpa magnifique. Je m'enracine dans le sol, mes branches elles montent jusqu'au ciel, mes feuilles sont superbes. Je prends les clés de l'endroit où je suis. Je te rassure, je les rends après. Et là, je suis chez moi, j'invite les gens chez moi, ceux qui veulent bien rentrer dans cette histoire. Et je me sens... enraciné en haut, en bas, chez moi, et j'ai moins peur. Et il m'a donné une autre clé aussi, il m'a dit d'être, il faut être soi-même, et il faut prendre plaisir. Il m'a dit, tu invites les gens à ta table, si tu ne manges pas, il y a des gens à qui ça fera rien, qui vont quand même manger ton histoire, mais il y a des gens qui ne vont pas manger, parce que toi, tu ne prends pas plaisir, toi tu ne manges pas. Ça m'a ouvert quelque chose en moi, je me suis dit, mais oui, Moi, je suis comme ça, avec cet accent-là, avec cette façon de faire qui n'est pas cette façon cérémonieuse que j'avais commencé à avoir en racontant certains contes avec une voix de dame, de tête en plus, tu sais, un peu pointue, parce que je pensais que c'était bien ça. Moi, avec ma voix de camionneur, je m'étais dit, mais non, ce n'est pas pour moi le chant, ce n'est pas pour moi... Et là, d'un coup, j'ai une voix de poitrine, je trouve ça super, quoi. Je ne savais même pas que ça existait, c'est lui qui m'a appris tout ça. Depuis je suis beaucoup mieux, je suis beaucoup moins traqueuse et je sais que c'est pas moi qui suis importante. Je viens pas là pour quand même, je viens là pour faire partager une histoire. Ça change tout. CONTE DE FABIENNE : Sur la place, il y a deux bancs face à face. Sur le premier, une vieille femme est astimée. Un bout de son jupon dépasse de sa robe. Elle porte un manteau fané et un vieux bonnet de laine troué d'où s'échappent quelques mèches blanches. À ses pieds, un cabas informe. Où l'on voit ? Un curieux bâton sculpté, cette vieille femme, c'est la mort. La mort est triste. Elle est triste et en colère. En colère parce que les hommes l'ont effacée de leur vie. Ils ne veulent plus la voir. Alors elle a le regard perdu dans le vide. Sur le banc en face, il y a Jean. Jean étudie. Il veut devenir médecin. Il est avec ses camarades de l'université. C'est la sortie des cours. Il rit et il chahute. Jean a vu la vieille femme. Elle lui rappelle sa grand-mère. Alors Jean se lève et vient s'asseoir à côté d'elle. Il commence à lui parler. Il lui demande comment elle va, si elle a à manger suffisamment, c'est important, il viendra vérifier. Il lui explique qu'il faut qu'elle prenne soin d'elle. Et puis, il passe un bras autour de ses épaules. La mort, elle, ça lui fait quelque chose. Jamais personne ne l'a pris dans les bras. Jamais personne ne l'a touchée. Elle se sent bien. Elle se redresse. Ça lui redonne même un tout petit peu de vie.

  • Christine

    Est-ce qu'aujourd'hui tu aimes ta voix ?

  • Fabienne

    Oui. bizarrement, oui. Parce que vu comment je ne l'aimais pas du tout avant, je m'étais dit, ce n'est pas gagné. Quand je m'écoutais, j'enregistrais les enfants à l'école, pour justement qu'ils apprivoisent leur voix, qu'ils aient moins peur de s'entendre. Parce qu'on a tous un mouvement de recul quand on entend notre voix. Et on jouait beaucoup avec les voix, on s'amusait avec nos voix, avec les enfants. Mais moi, pendant longtemps, enfin, petite, je chantais à l'école et tout. Après, plus de chant. plus de musique au collège, il n'y avait pas de prof, tu vois, c'était à la campagne, plus de musique au lycée, plus de chant, j'arrive à l'école normale, je tombe sur, heureusement je ne l'ai pas eu après, un prof de chant qui m'a dit, ça ne va pas du tout quoi, il ne faut pas chanter, il m'a dit. Alors j'ai quand même chanté avec les enfants, parce que je n'ai aucun problème à chanter devant les enfants, mais je n'ai plus du tout chanté. pour moi du tout ni avec des adultes jusqu'aux clowns parce qu'aux clowns un jour la metteuse en scène elle dit aujourd'hui on chante alors je vais la voir je dis ah non c'est pas possible maria c'est impossible si tu veux tu me dis quand l'exercice est fini je vais faire un tour je reviens elle me dit mais t'as pas le choix tu chantes Alors on a commencé à tourner, tu vois, dans la salle, on avait chacun un numéro, elle appelait un numéro, tu chantais. Et moi, tu vois, la tête complètement vide, le blanc, je me disais qu'est-ce que je vais chanter, qu'est-ce que je vais chanter, rien ne venait. Et quand mon numéro est sorti, eh bien j'ai chanté. l'aigle noir de Barbara. Avec une voix chevrotante, tu vois. Et ça a été une libération. Depuis, je chante. Je ne dis même plus que je ne sais pas chanter. Alors qu'avant, je ne sais absolument pas chanter. Je chante. Je me fonds dans la masse. J'écoute les autres. Je me mets à côté de quelqu'un d'une voix que j'aime bien. Et hop, je me laisse emporter. Et j'éprouve beaucoup de plaisir à ça. C'est très agréable de chanter. très agréable. Voilà.

  • Christine

    Est-ce qu'il y a d'autres éléments ou d'autres personnes qui t'ont justement accompagné sur ce chemin pour aimer ta voix ?

  • Fabienne

    Mon compagnon. Mon compagnon, il essaie de me faire prendre du recul avec tout ça, de me dire que les autres, ils n'entendent pas tout ça. Ils ne voient pas la difficulté que j'ai avec ma voix. Donc, ce n'est pas important. Il me dit toujours, tu vois, ce qui est important, c'est... l'ensemble, c'est pas la voix ou c'est pas, voilà, il ne voit pas quoi, donc je me dis oui et puis l'âge quand on vieillit, on s'attache moins à tout ça, on se dit ça c'est pas très important et on relativise avec tout ce qui se passe aussi autour de nous, les gens qui s'en vont, jeunes, les gens tu vois, tu te dis, moi j'ai encore la chance d'être là, et c'est super et je me dis, alors profite quoi tu as envie de faire quelque chose, fais-le tu vas rater, tu vas... Tu vas te relever, tu vas recommencer, tu vas réessayer et puis voilà.

  • Christine

    Tu évites de te juger en fait.

  • Fabienne

    C'est ça, j'essaie. J'essaie, Christine. Ce n'est pas toujours évident. J'ai encore des vieilleries qui s'accrochent. Tu sais, il y a toujours la petite voix. Elle est terrible cette petite voix. On l'entend. Ce n'est pas une voix qu'on n'entend pas. On l'entend. Et ce n'est pas tout à fait la même voix que la mienne. Quand on dit une petite voix, c'est vraiment un truc là... bizarre, qui te susurre des trucs et qui est... alors elle est sûre d'elle, c'est impressionnant quand même et toi tu es là ah oui peut-être, ah oui oui effectivement alors que non, quoi.

  • Christine

    Tu sais que la plupart des gens avec qui j'échange autour de mon podcast sur la thématique de la voix, alors je n'ai pas tenu de statistiques, mais je pense qu'on n'est pas loin de 9 personnes sur 10 qui disent ne pas aimer leur voix. Et toi justement, ces personnes-là, qu'est-ce que tu pourrais leur donner comme astuce ou conseil ? En tout cas, comment tu pourrais les guider sur ce chemin-là pour essayer d'aimer sa voix ?

  • Fabienne

    Je pense qu'il faut s'amuser avec sa voix. À la maison, je fais plein de voix rigolotes, que je ne suis pas forcée de refaire quand on me les demande. Quand on me les demande, je suis là, mais elles viennent. Je m'amuse, tu vois, avec des sons. Je fais des sons, je fais des bruits. J'écoute les oiseaux, j'écoute les animaux. J'essaie de reproduire, tu vois, le cri de l'animal ou le son que j'ai entendu. Et puis, je parle. Je rattrape le temps perdu, tout ce que je n'ai pas dit. Je le dis et je me dis et je me dis, petite voix, eh bien vas-y parce que la vie elle est courte, elle peut s'arrêter pour des tas de raisons et on n'aura pas profité de cette voix qui nous a été donnée. Voilà. Et il y a des gens qui ne peuvent pas parler et qui ne l'entendent pas parce qu'eux, ils n'entendent pas. Et je me dis, c'est une chance, la voix telle qu'elle est, elle est là. On peut dire les choses, avec maladresse quelquefois, oui. Je me sens des fois très maladroite, à côté de la plaque, ou alors ce qui est sorti, ce n'est pas du tout ce que je voulais dire. Eh bien tant pis, c'est sorti. Si tu es avec des gens qui t'aiment bien, ils vont me prendre, ils vont comprendre. Si tu es avec des gens qui ne te connaissent pas ou qui ne t'aiment pas, ce n'est pas très grave, on peut recommencer une autre rencontre, on peut redire, on peut dire. à je vois bien que je n'ai pas dit ce que je voulais dire tout simplement, avec simplicité. Je n'ai pas trop de conseils, je ne sais pas trop. Je crois que les gens doivent faire avec leur cœur. Des fois, ça va marcher, des fois, ça ne va pas marcher. Il faut recommencer, il faut essayer.

  • Christine

    Est-ce que conter, aujourd'hui, ça t'aide justement à rattraper le temps perdu dont tu parlais ?

  • Fabienne

    Alors, conter, je ne sais pas si ça m'aide à rattraper le temps perdu. En tout cas, c'est... C'est quelque chose d'important pour moi, quelque chose, je pense, que je suis venue jusqu'à présent dans mes démarches, jusque-là. Je pense qu'il s'est passé beaucoup de choses dans ma vie qui ont fait que là, d'un coup, je raconte. C'est presque me servir de tout ce qui s'est passé avant, bon ou moins bon, ou vraiment, vraiment moins bon, pour être là à raconter. C'est vital. C'est quelque chose, voilà, je ne savais pas. Mais il fallait que je raconte. Je ne sais pas où ça va m'amener. Je ne sais pas trop les chemins que je vais prendre avec cette histoire-là. Mais pour le moment, c'est sûrement quelque chose... Tout ce qui est arrivé avant m'a nourrie pour arriver là. Je disais pareil pour le clown il y a plusieurs années. Tout ce que j'avais fait avant, ça devait sortir. J'étais clown et je ne le savais pas. Et peut-être, peut-être, si ce n'est pas trop... présomptueux de ma part, peut-être je pourrais être une conteuse débutante pour raconter, oui, ça me construit..................................................................................................................... Les personnes âgées, par exemple, on ne les écoute pas. Au mieux, on les enregistre pour avoir des témoignages. Mais rien que le fait de parler un petit peu et de les entendre, ça ne se fait pas beaucoup. Moi, j'aimerais bien aussi peut-être être lectrice aussi. Ou raconter à des gens qui ne voient pas. Des choses comme ça, pour donner des images avec la voix. Moi, on m'a dit que j'avais la voix de ma mère, par exemple, qui est morte il y a très très longtemps. Et ça, ça a été un problème pour moi. Je voulais avoir ma voix, je ne voulais pas avoir la voix de quelqu'un. Comme les enfants qui ont dit tu ressembles à un tel et qui se disent non, je ne lui ressemble pas Et maintenant, comme j'ai oublié sa voix, je me dis c'est super, quand tu t'entends, tu l'entends un petit peu à elle Donc la voix, ça peut être aussi ce souvenir. Le souvenir de quelqu'un qui est parti, même si on l'oublie à la limite, parce que je l'ai oublié, on oublie les visages, on oublie les voix, il y a des photos, mais les voix, t'as pas toujours enregistré les voix. Donc peut-être comprendre comment c'est précieux une voix, et l'enregistrer pour la voir, pour l'entendre encore, parce que quand on entend ça, ce souvenir d'il y a longtemps, ça fait ressurgir des tas de choses qu'on a oubliées, pas que la voix. c'est comme un parfum, une voix ça peut d'un coup déclencher quelque chose de formidable un souvenir incroyable et ça je crois que la voix c'est précieux il faut la soigner, très important la soigner sa voix, d'en prendre soin, c'est comme les pieds on peut ne pas les avoir un jour toujours apte à nous porter et la voix à dire puis la voix, moi quand j'entends voix j'entends aussi, tu vois les élections on a une voix Pour moi, c'est important, ça. On peut dire encore, parce que c'est vrai qu'on se dit, ça ne sert plus à rien. Quand on vote, on n'est pas écouté. Mais c'est une voix quand même. C'est un acte, la voix. Pour moi, la voix, c'est un déplacement. Ce n'est pas quelque chose qui est arrêté. C'est quelque chose qui part, qui va vers les gens. Donc voilà, il faut en prendre soin de sa voix. Il faut l'aimer. Il faut essayer.

  • Christine

    Merci Fabienne pour ta participation à ce podcast. C'était vraiment très chouette de passer ce moment avec toi.

  • Fabienne

    Merci.

  • Christine

    Un grand merci à Fabienne pour sa confiance et la grande sincérité avec laquelle elle a osé partager le chemin de sa voix. Je vous invite à découvrir son actualité autour des histoires et du conte en suivant le lien dans la description de cet épisode. Merci à vous d'avoir écouté cet épisode d'On n'a qu'une voix jusqu'au bout. S'il vous a plu, abonnez-vous dès maintenant pour ne pas manquer la voix de mes prochains invités. Et pour soutenir mon podcast, je vous propose de le noter et de le commenter sur votre application d'écoute préférée. Enfin, un merci tout particulier à Émilie Décla. qui a créé et interprété toutes les musiques d'On n'a qu'une voix. Retrouvez l'actualité du podcast sur le compte Instagram ou LinkedIn Entre Voix et Mots. À bientôt !

Description

Bienvenue sur On n’a qu’une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix !

Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de Fabienne Rebeyrol.


A la fin de l'été 2024, je rencontre Fabienne lors d’un festival de contes dans les Pyrénées. J’y organise un micro-trottoir au cours duquel elle me confie que, petite, elle ne parle pas parce qu’elle n’a rien d’intéressant à dire.

Et pourtant… quelques heures auparavant, en découvrant sa voix, je suis sous le charme, mais loin d'imaginer le chemin parcouru.

Que s’est-il passé dans la vie de Fabienne qui, petite fille, parle davantage aux poules qu’aux humains ? Comment le rapport que l'on entretient avec notre voix peut-il se déplacer autant ?

Ce sont les éléments que je vous propose de découvrir dans cet épisode plein de belles surprises au cours duquel Fabienne se livre avec beaucoup de sincérité et de générosité. Merci à elle ! 


Bonne écoute !


💡 Vous pouvez retrouver l'actualité de Fabienne Rebeyrol par ici.

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📩 Contactez-moi à l’adresse suivante : christine.irabola.redac@gmail.com.


Crédits :

  • Réalisation, montage, mixage : Christine Irabola

  • Musiques et chants : Émilie Décla


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Christine

    On n'a qu'une voix, un podcast pour découvrir ce que cache notre voix. Chaque mois, venez à la rencontre de mes invités qui lèvent le voile sur l'histoire singulière de leur voix. Au programme, des voix parlées, des voix chantées, des voix jouées et des voix parfois malmenées. L'intention ? Vous procurer des émotions, vous faire voyager, vous apporter des conseils et vous proposer un pas de côté pour vous inviter à aimer votre voix. Dans cet épisode, vous allez entendre la voix de Fabienne Reberolle. À la fin de l'été dernier... Je rencontre Fabienne à l'occasion d'un festival de contes dans les Pyrénées. Et alors que je tends mon micro aux personnes qui souhaitent partager la place qu'a la voix dans leur vie, voici ce qu'elle me confie.

  • Fabienne

    Je m'appelle Fabienne et j'ai été élevée à la campagne par ma grand-mère. Et pendant longtemps, je n'ai pas parlé. Et quand on me demandait pourquoi, je disais parce que je n'ai rien d'intéressant à dire. Et puis, je parlais beaucoup aux poules. Ma grand-mère avait des poules et c'était un public fascinant. J'adore les poules, je parle très bien le langage poule et pendant longtemps j'ai parlé aux poules et elle me répondait et je continue parce que j'ai encore des poules qui me répondent.

  • Christine

    Intriguée et surtout très touchée par son témoignage, je décide de l'inviter à partager avec nous son parcours aussi singulier qu'inspirant. Vous allez donc découvrir comment sa voix s'est déplacée au fil des années jusqu'à prendre aujourd'hui une place à la fois étonnante et juste. Bonne écoute ! Bonjour Fabienne.

  • Fabienne

    Bonjour.

  • Christine

    Merci d'être là, d'avoir accepté l'invitation sur le podcast On n'a qu'une voix. Pour commencer, j'aimerais savoir quelle est la place de la voix dans ta vie ?

  • Fabienne

    Elle est très importante. Je ne me suis jamais posée en ces termes-là, mais je me rends compte maintenant, à l'âge que j'ai, qu'elle est très importante. J'ai longtemps beaucoup écouté, sans parler justement. J'adore les voix des autres. C'est quelque chose pour moi qui est peut-être... plus représentatif que l'apparence physique. Je me fais, moi, une image intérieure de la personne avec la voix. Ça me parle davantage, ça me pénètre davantage. Et comme j'écoutais beaucoup, je ne parlais pas parce que moi, j'avais l'impression que je n'avais pas quelque chose d'aussi intéressant à dire. Il me semblait qu'il fallait aller vers les autres et c'était un peu compliqué pour moi parce que parler, c'est aller vers quelqu'un. Et c'était un petit peu compliqué, donc j'étais un peu sur la réserve. Mais j'ai engrangé, un peu comme ces enfants qui ne parlent pas, mais qui entendent tout, et tu te dis, mais il n'a pas compris. Mais si, il a tout compris, mais il n'a rien à dire de plus que ce qu'il a entendu. Et moi, j'étais un peu comme ça. La voix, pour moi, elle est diverse, variée. Je suis toujours étonnée d'entendre des nouvelles voix, de rencontrer des nouvelles voix. Je me dis, mais c'est un réservoir inépuisable. Chacun vient au monde avec... Une voix différente qui va évoluer en plus avec l'âge. Donc je me dis, ça c'est extraordinaire. Ça m'épate toujours. Je suis toujours épatée d'entendre une nouvelle voix. Et puis la voix pour moi, c'est quelque chose qui peut me permettre de m'évader du tumulte. Du tumulte du monde, tu vois, de la vie. Quelquefois je ne suis pas agressée, mais c'est trop d'informations, trop de choses qui arrivent avec beaucoup de vitesse. Moi j'ai du mal avec ça. J'ai besoin d'avoir du calme, du silence. Et la voix, par exemple, les chants inuits, qui sont très rauques, moi, ça me permet de partir un petit peu, d'aller dans un autre monde pour me reposer. Voilà, ça me fait résonner le corps. Et du coup, mon corps, on dirait qu'il se débarrasse de toutes les petites poussières du monde. Et quand c'est fini, je suis nettoyée et je peux repartir. Moi, il y a des voix qui me font ça. qui me nettoie, dont j'ai besoin. J'ai la chance d'avoir enregistré ma grand-mère, par exemple, que j'aime beaucoup. Je l'ai sur une vieille cassette, tu vois, qu'il faut que je fasse repiquer sur un CD. Mais pour moi, c'est d'un précieux. Si je devais sortir d'une maison en feu, je prends la cassette, tu vois, avec la voix de ma grand-mère. C'est quelque chose d'important.

  • Christine

    Quand on s'est rencontré, c'était dans le cadre d'un festival de contes, tu m'as confié que quand tu étais petite, tu ne parlais pas. Est-ce que tu peux nous en dire davantage ?

  • Fabienne

    Oui,j'étais une petite fille qui écoutait beaucoup. J'ai souvent eu, et ça continue, j'ai souvent eu l'impression d'être une grande oreille, une grosse oreille. Je suis avide de ça, de voix, de son, de choses que l'on entend. Ça me dit beaucoup sur mon environnement. Ça m'aide énormément. Et donc, je ne parlais pas, mais je parlais à ma grand-mère, bien sûr, que j'aimais beaucoup, et aussi aux animaux. J'ai toujours beaucoup parlé aux animaux et aux plantes, je peux le dire maintenant, il y a prescription. Donc, ma grand-mère avait des poules, et il y avait une espèce de vieille souche à côté du poulailler. Je m'installais sur la souche, et elles avaient droit à un florilège d'histoires, de poèmes, de chansons, parce que je chantais petite à tue-tête, alors qu'après, j'ai été bloquée, tu vois, dans le champ. des réflexions, des choses comme ça. Et là, sans aucun complexe, c'était dans un bois, donc il n'y avait absolument aucun témoin, aucun public à part ces poules, qui étaient un public vraiment formidable, très attentive. J'avais beaucoup de choses à raconter. Ma vie de petite fille, peut-être déjà les faire... Comme si j'allais les faire rire, tu vois, les poules. Leur raconter des trucs, un public, vraiment.

  • Christine

    Quand tu étais à l'école, tu ne prenais pas la parole du tout ?

  • Fabienne

    Alors, je me suis vite aperçue que je pouvais faire rire. Et la parole, elle était au service de ce rire-là. C'est-à-dire, quand je sentais qu'à côté de moi, il y avait quelqu'un ou quelque chose ou une tension, hop, j'y allais de ma petite bêtise, tu vois, pour pouvoir détendre l'atmosphère. C'était quelque chose pour moi qui était vital. Même pas vital, c'était obligatoire. Voilà. Et j'ai continué, je continue toujours à essayer de faire rire. Alors je me suis calmée, parce que maintenant je me dis, mais laisse respirer les gens, s'ils ont envie d'être tristes, ils ont le droit d'être tristes. Mais je continue quand même à avoir ce besoin de voir les gens autour de moi apaisés ou souriants. Et donc la voix pour moi, c'est un moyen de les faire rire. Voilà, ou de les apaiser, tu vois ? Oui.

  • Christine

    Parmi les voix qui t'ont marquée, je crois qu'il y a les voix des personnes âgées. Tu as évoqué ta grand-mère. Et quand on s'est rencontrées toutes les deux, tu m'as dit que ça avait une importance dans ta vie. Est-ce que tu peux nous partager ça ?

  • Fabienne

    Oui, ça a beaucoup d'importance. C'est ma grand-mère qui m'a élevée. Les amis de ma grand-mère avaient l'âge de ma grand-mère, voire plus âgée. Puisque dans le village où j'étais, c'était de coutume d'aller visiter les mamies qui vivaient seules. Et donc on allait passer des après-midi. En tiers, auprès de ces dames, on m'asseyait sur une chaise et moi j'écoutais. J'écoutais, je regardais, je m'imprégnais de ça. Et la voix, elle est pleine de rides, comme le corps. Je pense que la voix s'harmonise au corps. On peut avoir des surprises. Quelquefois, tu peux avoir une grosse voix dans un tout petit corps et une petite voix fluette dans un vieux corps. C'est amusant, je trouve ça super. Mais quand même, là, il y avait... il y avait l'histoire de la personne dans ce rocailleux, dans ce roulement, dans ces mots un peu chevrotés, parce qu'alors il y a le problème des dents. On perd des dents quand on est âgé, surtout à l'époque. Et je me disais, elle a des fausses dents, est-ce qu'elle a une fausse voix ? Est-ce que c'est sa voix qu'on entend vraiment ? Parce que du coup, je me disais, est-ce que c'est comme quand on te refait, tu vois, quelque chose quand tu as eu un accident, c'est... plus tout à fait pareil. Est-ce que c'est encore sa voix ? Moi, j'ai aimé ça. J'ai la voix d'Henriette, qui est morte il y a très longtemps, dans l'oreille. Je l'ai, cette voix-là. Les voix des papys qui sont moins... Je connais deux sortes de personnes âgées. Ceux qui parlent beaucoup parce qu'on se dit qu'ils ont peur de partir avant d'avoir dit tout ce qu'ils ont d'intéressant à dire. Et moi, je suis avide de ces mots. J'ai envie de savoir tout ça. Ça me plaît quand on raconte des histoires. Et puis la voix des papys et des mamies qui parlent peu et qui vont un jour te dire un mot ou deux, ou juste un soupir. Pour moi, les soupirs, les rires, les tais, les exclamations, c'est la voix. Pour moi, ça, c'est la voix. Et c'est précieux aussi. C'est dire beaucoup en peu de choses, quoi. Quelquefois en un souffle. Mais c'est important aussi d'entendre ça. La voix va avec la main d'une personne âgée qui est quelquefois légère ou fripée. Moi, je commence à vieillir aussi. Je sens ça maintenant. Tu sens la vie qui est passée, quelque chose qui a roulé, comme un galet. Mais ce n'est pas tout à fait poli, c'est doux, mais c'est plissé. La voix, elle est comme ça pour moi. Elle est douce, quelquefois. Pas toujours, mais elle est plissée. Il y a plein de choses. On voit la vie des gens, même si on ne la connaît pas. On voit bien qu'ils ont vécu des choses et que c'est resté.

  • Christine

    Donc, tu as beaucoup écouté.

  • Fabienne

    Oui.

  • Christine

    Et donc, en particulier des personnes âgées. Est-ce qu'il y a d'autres voix qui ont pu te marquer dans ton enfance ?

  • Fabienne

    Oui. Alors, j'allais à la messe. Ma grand-mère m'a menée à la messe. Et à la messe, tu avais les prêtres à l'ancienne, tu vois, en chair. avec cette espèce d'intonation un peu bizarre. Ils avaient tous la même, c'est curieux, quand tu les vois dans les films. Tu vois... . Alors, quand t'es enfant, c'est extrêmement impressionnant, mais ça fait un peu peur.. C'est pareil, il chante un peu comme une psalmodie tu vois, c'est très curieux. Ces voix-là, ça m'a impressionnée, oui, beaucoup. Ça m'a impressionnée. Et puis, moi, ce qui m'impressionne beaucoup... Là je bouche mes oreilles, ce sont les gens qui crient fort. Tu vois là, les gens qui crient fort, mes oreilles elles ne veulent pas entendre ça. Voilà, j'ai du mal avec ça. Mais tout ce qui est cris de surprise, petits cris de douleur quand tu te cognes, des choses comme ça, soupir, exclamations, ça j'aime beaucoup les rires. Les rires c'est extraordinaire, les rires des gens. C'est vraiment formidable. Je me nourris beaucoup de ça. Mon grand plaisir, c'est de faire rire quelqu'un. La télé, c'est très important pour moi, la télé, parce que la télé, elle m'a élevée aussi. Ma grand-mère a parté travailler, et donc on a eu la télé assez tard, je devais avoir 6 ou 7 ans, je ne me souviens plus exactement, des gros postes énormes. Et la télé, elle parlait. Et elle me parlait. Et moi, j'ai écouté tout ça. Elle m'a donné des voix. J'ai dans l'oreille... Les voix des acteurs de théâtre, au théâtre ce soir, j'adorais tous ces acteurs. Le Poulain, Maria Pacom. Le jeudi après-midi, puisque c'était mon jour de repos, c'était le jeudi après-midi, on avait des pièces de théâtre et des lectures par des grands comédiens de la comédie française. Et ça, moi, ça m'est resté dans l'oreille, le dernier des Mohicans. Donc, toutes ces voix de la télé, moi, elles m'ont parlé. Elles m'ont donné des voix. Je me suis sentie... On me parlait à moi. Et ça, ça m'est resté. C'est-à-dire que quand quelqu'un me parle, encore, quelque part, je suis toujours un peu étonnée qu'on prenne ce temps pour me dire quelque chose. Qu'on s'adresse à moi. Et la télé, elle me faisait ça. Je me sentais très importante que la télé me parle. Me raconte des choses. Et à l'époque, j'ai pris beaucoup de choses. Elle m'en a raconté beaucoup. Ça aussi, ça m'a aidée beaucoup.

  • Christine

    Et pas la radio ?

  • Fabienne

    Alors la radio, plus tard, la radio, puis elle avait pour moi une autre fonction d'enlever des bruits parasites, c'est-à-dire que je mettais la radio pour ne pas entendre autre chose. Voilà, donc ça a été plus tardif. La radio, maintenant, oui, j'aurais du mal à m'en passer, énormément. C'était même la première chose que je faisais quand je rentrais chez moi, c'était allumer la radio pendant longtemps. J'avais besoin de cette présence, de cette voix. Ça remplit un espace vide, ça remplit... Voilà. L'absence de quelqu'un, ça me fait penser, tu vois, quand on est célibataire ou une personne âgée qui vit seule, quelquefois la seule façon d'entendre une voix, c'est d'aller acheter quelque chose. Et ça je me dis, c'est quand même dommage, il faut qu'il y ait beaucoup d'endroits où on puisse aller pour parler et être écouté, sans avoir à payer pour qu'on t'écoute ou qu'on te parle. Et ça c'est vraiment très très très important. Je pense à des endroits comme... les espaces de vie sociaux, des choses comme ça, où les gens peuvent aller ne serait-ce que pour prendre un café et discuter. C'est vraiment important. Les gens, ils aiment parler. Moi, je parle dans le bus. Les gens, ils papotent et ils ont envie de raconter une petite histoire. Et c'est toujours super. On a des histoires incroyables. Et moi, je suis vraiment très contente d'entendre tout ça. Donc, ça ne me lasse jamais.

  • Christine

    Est-ce qu'il y a un moment où tu as justement osé prendre la parole ? Est-ce que tu en as le souvenir ? Est-ce que ça s'est fait petit à petit ? Ou est-ce que tu as souvenir de moments marquants où enfin tu as pu, toi aussi,prendre la parole ?

  • Fabienne

    La parole, je l'ai prise obligatoirement avec mon métier. J'étais institutrice, donc il y a un moment où il a bien fallu la prendre, cette parole. C'est que quand tu passes de l'autre côté en face des enfants, que tu vois si tu es faite pour ça ou pas. Et là, la parole, il faut qu'elle vienne. Mais là, ça ne m'a pas dérangée non plus. Avec les enfants, je me suis sentie extrêmement à l'aise. Parce que pour moi, les enfants, ils ne jugent pas. Il n'y a pas de jugement. Ils sont en train, eux, de placer leur voix. Ils cherchent leur voix. Ils ont une voix différente. Donc, il n'y a zéro jugement dans l'œil d'un enfant ou dans l'oreille d'un enfant. Tu vois, ta voix, elle est belle pour eux. Ils vont s'attacher. Ça va être un petit tuteur, cette voix. Donc, zéro problème avec les enfants. Ma voix, elle est venue facilement. Avec les adultes, ça a été plus compliqué. C'est-à-dire, je me surveillais, tu vois. Je faisais attention à employer les bons mots, à me juger sur ce que j'étais en train de dire. Est-ce que c'est adapté ? Est-ce que... Tu vois, c'était quelquefois un peu compliqué pour moi. J'ai mis du temps à me lâcher, et même encore, je me sens me surveiller face à quelqu'un qui va m'impressionner. Voilà. Je me juge, c'est un jugement, c'est idiot. Alors, je fais du clown en amateur. Et mon clown n'y parlait pas, c'est pareil, il était que dans le corporel et quand il parlait, il savait très mal se débrouiller avec les mots. Mais maintenant, il s'autorise, il s'autorise, j'adore, il y a des sujets dont je parle facilement, la mort par exemple, les places de village. Tu vois, c'est des choses bizarres comme ça, des choses, je peux parler de sujets graves maintenant en me disant, bon ben, c'est bon quoi, là maintenant tu peux y aller quoi. Tu peux y aller, je ne sais pas, ça ne va pas, ça ne va pas choquer. Je vais le faire avec le clown que je suis, c'est-à-dire naïf. Ma grand-mère était comme ça. Elle était très naïve, mais elle en profitait en vrai pour te dire des choses. Et tu ne lui en voulais jamais parce que tu te disais, bon ben voilà, elle est pure quelque part, c'est comme une petite fille. Et moi, j'utilise ça en clown, tu vois. Je peux dire maintenant, avec douceur, parler des choses graves. D'ailleurs, je pense que c'est plus intéressant. pour moi, de parler avec douceur et humour des choses graves que d'en faire quelque chose, que de le dire avec gravité. Quand je parle avec gravité, ça tombe un peu dans le pathos très vite et du coup, je trouve ça moins intéressant. C'est trop violent. Ma voix devient trop violente pour les gens. J'ai envie qu'elle soit plus dans la douceur, plus neutre et plus dans le plaisir. Voilà, c'est ça.

  • Christine

    Et cette douceur et cet humour, justement, est-ce que tu les utilisais en tant qu'enseignante ?

  • Fabienne

    Oui, naturellement, oui. Je peux être ferme dans mon humour si je sais arrêter les choses, mais oui, ça a toujours beaucoup mieux fonctionné. L'autorité, pour moi, elle doit être douce, elle doit être naturelle. Il faut placer des limites, mais ces limites-là, elles n'ont pas besoin d'être violentes pour moi, voilà. Après, il y a des enfants, on a juste, qui veulent savoir jusqu'où ils peuvent aller. Mais je pense que tu peux le montrer avec du recul, avec... tu vois, voilà, c'est ça. Après, moi, j'ai travaillé en IME avec des enfants qui étaient soit déficients intellectuels, soit qui avaient plein de problèmes. Ma limite, ce sont les caractériels, tu vois, par exemple. C'est là que peut-être il faudrait élever la voix et que moi, ça, je ne peux pas le faire. Voilà, c'est ma limite.

  • Christine

    Et donc par rapport aux enfants, toi qui as été une enfant dans l'écoute, est-ce que tu as été sensible à certains enfants justement qui avaient du mal à prendre la parole ? Et comment tu l'as vécu ça ?

  • Fabienne

    Tu les repères vite, ceux qui écoutent. En général, ils ont les yeux écarquillés, ils écoutent bien, ils sont extrêmement sages ces enfants-là. Ils ne bougent pas beaucoup. Ils bougent quand on leur permet de bouger, sinon ils sont sages. Et oui... Et oui, à un moment donné, il faut leur demander, eux, ce qu'ils en pensent des choses. Alors, on les taxe souvent de timides. Et c'est souvent après eux, ceux qui se révèlent le plus sur la scène ou dans des représentations. C'est un plaisir de les voir s'épanouir après. De leur montrer qu'eux aussi, ils ont des choses intéressantes à dire et qu'on peut aller vers eux et qu'ils peuvent venir vers les gens dire.

  • Christine

    J'aimerais savoir comment on peut passer de parler le langage... poule, à monter sur une scène ouverte pour compter devant un public. Je te demande ça parce que moi, la première fois que je t'ai rencontrée, que j'ai entendu ta voix, je l'ai entendue dans le cadre d'un conte, donc sur une scène ouverte. Je faisais partie du public et c'est la première fois que j'ai entendu ta voix et je n'aurais pas pu me douter que tu avais eu ce parcours avec la voix. Alors tu as parlé aussi du clown. Oui. Donc voilà, par rapport à ces engagements-là, puisque pour moi c'est une forme d'engagement, qu'est-ce que tu as envie de partager avec nous sur ce parcours-là ?

  • Fabienne

    De par mon métier, j'avais l'habitude de lire beaucoup à haute voix, à des enfants, à mon compagnon, à mon chat, je lisais à haute voix. Et ça avait toujours bien fonctionné ça. Et puis lors d'un petit festival que mon compagnon avait organisé avec d'autres personnes, il m'avait dit ça serait bien que tu viennes faire quelques lectures Donc j'avais choisi des tas d'albums. C'était dans un Ehpad, mais une fête avec tous les âges. Des petits du centre d'animation jusqu'au papi-mami qui était là. Et donc, j'ai amené mes livres, j'ai commencé à lire. Et je ne sais pas ce qui s'est passé. Je me suis levée et j'ai lâché les livres. Parce que je les avais tellement travaillés pour venir ce jour-là et être correcte. Et donner le mieux que je pouvais donner. Que je les avais en moi, tu vois. Et l'histoire est venue. Et j'ai raconté au lieu de lire. Et on m'a renvoyé que... que c'était agr��able, que c'était bien, que ça passait mieux, etc. Et quand le Covid est arrivé, cet EHPAD avec lequel j'avais eu ce contact, j'ai proposé d'envoyer un compte. Et donc chez moi, à la maison, filmé par mon compagnon, j'ai raconté une histoire que ma mère m'avait racontée. L'histoire raconte comment et pourquoi le rhinocéros a la peau plissée et qu'il a aussi mauvais caractère. Et donc j'ai enregistré cette histoire. Et on leur a envoyé. Et les retours ont été très bons. Je l'ai envoyé aussi à une amie qui est encore enseignante dans l'école où j'étais, en REP à Bordeaux. Et pareil, les retours ont été très bons. Et je me suis dit, peut-être je pourrais raconter, je pourrais dire. Et quand j'ai su qu'une conteuse professionnelle, Karine Vandome, ouvrait un atelier, un dimanche après-midi, tous les deux mois, je me suis lancée. Et je suis... tomber dans un monde extraordinaire. J'aimais les contes, j'en lisais énormément depuis toujours, mais soi-même les dire, c'est autre chose. Être au service de cette histoire pour que les gens l'entendent, c'est un monde merveilleux. Vraiment, quoi. On est timide, mais là, on est un outil au service de l'histoire. On ne disparaît pas. On accueille les gens dans notre bulle, mais on les invite. On ne les force pas. Et l'histoire, c'est elle la vedette, c'est elle qu'on doit mettre en valeur. Et notre voix est un outil, c'est presque elle la vedette. Et nous, on est là pour un peu décorer l'histoire, faire un peu d'humour pour accrocher ou un peu peur pour accrocher. Mais c'est l'histoire qui est là. On peut disparaître, on peut être presque en hypnose devant ce film qu'on est en train de raconter et qu'on doit faire passer aux autres. Et du coup... Dans le dernier stage que j'ai fait avec Michel Hindenhoek, il m'a donné des astuces pour avoir moins peur. Et je suis devenue un catalpa. Un catalpa magnifique. Je m'enracine dans le sol, mes branches elles montent jusqu'au ciel, mes feuilles sont superbes. Je prends les clés de l'endroit où je suis. Je te rassure, je les rends après. Et là, je suis chez moi, j'invite les gens chez moi, ceux qui veulent bien rentrer dans cette histoire. Et je me sens... enraciné en haut, en bas, chez moi, et j'ai moins peur. Et il m'a donné une autre clé aussi, il m'a dit d'être, il faut être soi-même, et il faut prendre plaisir. Il m'a dit, tu invites les gens à ta table, si tu ne manges pas, il y a des gens à qui ça fera rien, qui vont quand même manger ton histoire, mais il y a des gens qui ne vont pas manger, parce que toi, tu ne prends pas plaisir, toi tu ne manges pas. Ça m'a ouvert quelque chose en moi, je me suis dit, mais oui, Moi, je suis comme ça, avec cet accent-là, avec cette façon de faire qui n'est pas cette façon cérémonieuse que j'avais commencé à avoir en racontant certains contes avec une voix de dame, de tête en plus, tu sais, un peu pointue, parce que je pensais que c'était bien ça. Moi, avec ma voix de camionneur, je m'étais dit, mais non, ce n'est pas pour moi le chant, ce n'est pas pour moi... Et là, d'un coup, j'ai une voix de poitrine, je trouve ça super, quoi. Je ne savais même pas que ça existait, c'est lui qui m'a appris tout ça. Depuis je suis beaucoup mieux, je suis beaucoup moins traqueuse et je sais que c'est pas moi qui suis importante. Je viens pas là pour quand même, je viens là pour faire partager une histoire. Ça change tout. CONTE DE FABIENNE : Sur la place, il y a deux bancs face à face. Sur le premier, une vieille femme est astimée. Un bout de son jupon dépasse de sa robe. Elle porte un manteau fané et un vieux bonnet de laine troué d'où s'échappent quelques mèches blanches. À ses pieds, un cabas informe. Où l'on voit ? Un curieux bâton sculpté, cette vieille femme, c'est la mort. La mort est triste. Elle est triste et en colère. En colère parce que les hommes l'ont effacée de leur vie. Ils ne veulent plus la voir. Alors elle a le regard perdu dans le vide. Sur le banc en face, il y a Jean. Jean étudie. Il veut devenir médecin. Il est avec ses camarades de l'université. C'est la sortie des cours. Il rit et il chahute. Jean a vu la vieille femme. Elle lui rappelle sa grand-mère. Alors Jean se lève et vient s'asseoir à côté d'elle. Il commence à lui parler. Il lui demande comment elle va, si elle a à manger suffisamment, c'est important, il viendra vérifier. Il lui explique qu'il faut qu'elle prenne soin d'elle. Et puis, il passe un bras autour de ses épaules. La mort, elle, ça lui fait quelque chose. Jamais personne ne l'a pris dans les bras. Jamais personne ne l'a touchée. Elle se sent bien. Elle se redresse. Ça lui redonne même un tout petit peu de vie.

  • Christine

    Est-ce qu'aujourd'hui tu aimes ta voix ?

  • Fabienne

    Oui. bizarrement, oui. Parce que vu comment je ne l'aimais pas du tout avant, je m'étais dit, ce n'est pas gagné. Quand je m'écoutais, j'enregistrais les enfants à l'école, pour justement qu'ils apprivoisent leur voix, qu'ils aient moins peur de s'entendre. Parce qu'on a tous un mouvement de recul quand on entend notre voix. Et on jouait beaucoup avec les voix, on s'amusait avec nos voix, avec les enfants. Mais moi, pendant longtemps, enfin, petite, je chantais à l'école et tout. Après, plus de chant. plus de musique au collège, il n'y avait pas de prof, tu vois, c'était à la campagne, plus de musique au lycée, plus de chant, j'arrive à l'école normale, je tombe sur, heureusement je ne l'ai pas eu après, un prof de chant qui m'a dit, ça ne va pas du tout quoi, il ne faut pas chanter, il m'a dit. Alors j'ai quand même chanté avec les enfants, parce que je n'ai aucun problème à chanter devant les enfants, mais je n'ai plus du tout chanté. pour moi du tout ni avec des adultes jusqu'aux clowns parce qu'aux clowns un jour la metteuse en scène elle dit aujourd'hui on chante alors je vais la voir je dis ah non c'est pas possible maria c'est impossible si tu veux tu me dis quand l'exercice est fini je vais faire un tour je reviens elle me dit mais t'as pas le choix tu chantes Alors on a commencé à tourner, tu vois, dans la salle, on avait chacun un numéro, elle appelait un numéro, tu chantais. Et moi, tu vois, la tête complètement vide, le blanc, je me disais qu'est-ce que je vais chanter, qu'est-ce que je vais chanter, rien ne venait. Et quand mon numéro est sorti, eh bien j'ai chanté. l'aigle noir de Barbara. Avec une voix chevrotante, tu vois. Et ça a été une libération. Depuis, je chante. Je ne dis même plus que je ne sais pas chanter. Alors qu'avant, je ne sais absolument pas chanter. Je chante. Je me fonds dans la masse. J'écoute les autres. Je me mets à côté de quelqu'un d'une voix que j'aime bien. Et hop, je me laisse emporter. Et j'éprouve beaucoup de plaisir à ça. C'est très agréable de chanter. très agréable. Voilà.

  • Christine

    Est-ce qu'il y a d'autres éléments ou d'autres personnes qui t'ont justement accompagné sur ce chemin pour aimer ta voix ?

  • Fabienne

    Mon compagnon. Mon compagnon, il essaie de me faire prendre du recul avec tout ça, de me dire que les autres, ils n'entendent pas tout ça. Ils ne voient pas la difficulté que j'ai avec ma voix. Donc, ce n'est pas important. Il me dit toujours, tu vois, ce qui est important, c'est... l'ensemble, c'est pas la voix ou c'est pas, voilà, il ne voit pas quoi, donc je me dis oui et puis l'âge quand on vieillit, on s'attache moins à tout ça, on se dit ça c'est pas très important et on relativise avec tout ce qui se passe aussi autour de nous, les gens qui s'en vont, jeunes, les gens tu vois, tu te dis, moi j'ai encore la chance d'être là, et c'est super et je me dis, alors profite quoi tu as envie de faire quelque chose, fais-le tu vas rater, tu vas... Tu vas te relever, tu vas recommencer, tu vas réessayer et puis voilà.

  • Christine

    Tu évites de te juger en fait.

  • Fabienne

    C'est ça, j'essaie. J'essaie, Christine. Ce n'est pas toujours évident. J'ai encore des vieilleries qui s'accrochent. Tu sais, il y a toujours la petite voix. Elle est terrible cette petite voix. On l'entend. Ce n'est pas une voix qu'on n'entend pas. On l'entend. Et ce n'est pas tout à fait la même voix que la mienne. Quand on dit une petite voix, c'est vraiment un truc là... bizarre, qui te susurre des trucs et qui est... alors elle est sûre d'elle, c'est impressionnant quand même et toi tu es là ah oui peut-être, ah oui oui effectivement alors que non, quoi.

  • Christine

    Tu sais que la plupart des gens avec qui j'échange autour de mon podcast sur la thématique de la voix, alors je n'ai pas tenu de statistiques, mais je pense qu'on n'est pas loin de 9 personnes sur 10 qui disent ne pas aimer leur voix. Et toi justement, ces personnes-là, qu'est-ce que tu pourrais leur donner comme astuce ou conseil ? En tout cas, comment tu pourrais les guider sur ce chemin-là pour essayer d'aimer sa voix ?

  • Fabienne

    Je pense qu'il faut s'amuser avec sa voix. À la maison, je fais plein de voix rigolotes, que je ne suis pas forcée de refaire quand on me les demande. Quand on me les demande, je suis là, mais elles viennent. Je m'amuse, tu vois, avec des sons. Je fais des sons, je fais des bruits. J'écoute les oiseaux, j'écoute les animaux. J'essaie de reproduire, tu vois, le cri de l'animal ou le son que j'ai entendu. Et puis, je parle. Je rattrape le temps perdu, tout ce que je n'ai pas dit. Je le dis et je me dis et je me dis, petite voix, eh bien vas-y parce que la vie elle est courte, elle peut s'arrêter pour des tas de raisons et on n'aura pas profité de cette voix qui nous a été donnée. Voilà. Et il y a des gens qui ne peuvent pas parler et qui ne l'entendent pas parce qu'eux, ils n'entendent pas. Et je me dis, c'est une chance, la voix telle qu'elle est, elle est là. On peut dire les choses, avec maladresse quelquefois, oui. Je me sens des fois très maladroite, à côté de la plaque, ou alors ce qui est sorti, ce n'est pas du tout ce que je voulais dire. Eh bien tant pis, c'est sorti. Si tu es avec des gens qui t'aiment bien, ils vont me prendre, ils vont comprendre. Si tu es avec des gens qui ne te connaissent pas ou qui ne t'aiment pas, ce n'est pas très grave, on peut recommencer une autre rencontre, on peut redire, on peut dire. à je vois bien que je n'ai pas dit ce que je voulais dire tout simplement, avec simplicité. Je n'ai pas trop de conseils, je ne sais pas trop. Je crois que les gens doivent faire avec leur cœur. Des fois, ça va marcher, des fois, ça ne va pas marcher. Il faut recommencer, il faut essayer.

  • Christine

    Est-ce que conter, aujourd'hui, ça t'aide justement à rattraper le temps perdu dont tu parlais ?

  • Fabienne

    Alors, conter, je ne sais pas si ça m'aide à rattraper le temps perdu. En tout cas, c'est... C'est quelque chose d'important pour moi, quelque chose, je pense, que je suis venue jusqu'à présent dans mes démarches, jusque-là. Je pense qu'il s'est passé beaucoup de choses dans ma vie qui ont fait que là, d'un coup, je raconte. C'est presque me servir de tout ce qui s'est passé avant, bon ou moins bon, ou vraiment, vraiment moins bon, pour être là à raconter. C'est vital. C'est quelque chose, voilà, je ne savais pas. Mais il fallait que je raconte. Je ne sais pas où ça va m'amener. Je ne sais pas trop les chemins que je vais prendre avec cette histoire-là. Mais pour le moment, c'est sûrement quelque chose... Tout ce qui est arrivé avant m'a nourrie pour arriver là. Je disais pareil pour le clown il y a plusieurs années. Tout ce que j'avais fait avant, ça devait sortir. J'étais clown et je ne le savais pas. Et peut-être, peut-être, si ce n'est pas trop... présomptueux de ma part, peut-être je pourrais être une conteuse débutante pour raconter, oui, ça me construit..................................................................................................................... Les personnes âgées, par exemple, on ne les écoute pas. Au mieux, on les enregistre pour avoir des témoignages. Mais rien que le fait de parler un petit peu et de les entendre, ça ne se fait pas beaucoup. Moi, j'aimerais bien aussi peut-être être lectrice aussi. Ou raconter à des gens qui ne voient pas. Des choses comme ça, pour donner des images avec la voix. Moi, on m'a dit que j'avais la voix de ma mère, par exemple, qui est morte il y a très très longtemps. Et ça, ça a été un problème pour moi. Je voulais avoir ma voix, je ne voulais pas avoir la voix de quelqu'un. Comme les enfants qui ont dit tu ressembles à un tel et qui se disent non, je ne lui ressemble pas Et maintenant, comme j'ai oublié sa voix, je me dis c'est super, quand tu t'entends, tu l'entends un petit peu à elle Donc la voix, ça peut être aussi ce souvenir. Le souvenir de quelqu'un qui est parti, même si on l'oublie à la limite, parce que je l'ai oublié, on oublie les visages, on oublie les voix, il y a des photos, mais les voix, t'as pas toujours enregistré les voix. Donc peut-être comprendre comment c'est précieux une voix, et l'enregistrer pour la voir, pour l'entendre encore, parce que quand on entend ça, ce souvenir d'il y a longtemps, ça fait ressurgir des tas de choses qu'on a oubliées, pas que la voix. c'est comme un parfum, une voix ça peut d'un coup déclencher quelque chose de formidable un souvenir incroyable et ça je crois que la voix c'est précieux il faut la soigner, très important la soigner sa voix, d'en prendre soin, c'est comme les pieds on peut ne pas les avoir un jour toujours apte à nous porter et la voix à dire puis la voix, moi quand j'entends voix j'entends aussi, tu vois les élections on a une voix Pour moi, c'est important, ça. On peut dire encore, parce que c'est vrai qu'on se dit, ça ne sert plus à rien. Quand on vote, on n'est pas écouté. Mais c'est une voix quand même. C'est un acte, la voix. Pour moi, la voix, c'est un déplacement. Ce n'est pas quelque chose qui est arrêté. C'est quelque chose qui part, qui va vers les gens. Donc voilà, il faut en prendre soin de sa voix. Il faut l'aimer. Il faut essayer.

  • Christine

    Merci Fabienne pour ta participation à ce podcast. C'était vraiment très chouette de passer ce moment avec toi.

  • Fabienne

    Merci.

  • Christine

    Un grand merci à Fabienne pour sa confiance et la grande sincérité avec laquelle elle a osé partager le chemin de sa voix. Je vous invite à découvrir son actualité autour des histoires et du conte en suivant le lien dans la description de cet épisode. Merci à vous d'avoir écouté cet épisode d'On n'a qu'une voix jusqu'au bout. S'il vous a plu, abonnez-vous dès maintenant pour ne pas manquer la voix de mes prochains invités. Et pour soutenir mon podcast, je vous propose de le noter et de le commenter sur votre application d'écoute préférée. Enfin, un merci tout particulier à Émilie Décla. qui a créé et interprété toutes les musiques d'On n'a qu'une voix. Retrouvez l'actualité du podcast sur le compte Instagram ou LinkedIn Entre Voix et Mots. À bientôt !

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