- Speaker #0
Je suis née à Bogotá, en Colombie, donc on parle espagnol dans la famille, etc. Après, quand on a bougé au Brésil, forcément, il fallait que j'apprenne le portugais. Et en parallèle, on m'a inscrite dans un lycée français, donc j'avais le français en plus.
- Speaker #1
Salut et bienvenue sur Partir, le podcast qui t'emmène vivre à l'étranger. Aujourd'hui, je te parle d'Alerandra, qui est née en Colombie. Elle est passée par le Brésil, le Royaume-Uni, la Turquie, avant d'immigrer en France et d'en devenir citoyenne pour aujourd'hui, finalement, vivre en Australie.
- Speaker #0
Là, c'était plus le choc. J'ai vu les différences culturelles entre les jeunes en Colombie, les jeunes au Royaume-Uni. Ce n'est pas du tout pareil. Pour moi, vraiment, le plus enrichissant, c'est avoir obtenu la nationalité française après 14 ans de vie en France.
- Speaker #1
Six pays, six vies, mais une question. Qu'est-ce que la multiculturalité change en nous ? Vous allez pouvoir découvrir tout ça et son parcours. Mais avant, je voulais vraiment vous dire merci de suivre ce podcast. Ça fait plaisir. partager ces histoires et de voir que ça vous fait voyager, que ça vous inspire. Alors vraiment, merci à tous de me suivre, de soutenir ce podcast et pour tous vos feedbacks, ça me donne beaucoup de force. Je vous laisse du coup découvrir ce nouvel épisode et je vous souhaite une bonne écoute. Eh bien merci d'être là pour partager ton histoire.
- Speaker #0
Merci à toi de m'avoir vu.
- Speaker #1
Avec plaisir. Donc toi, tu as 34 ans et tu as un parcours bien rempli. Tu es née en Colombie, tu as vécu quelques années au Brésil puis retour en Colombie. T'es partie ensuite 6 mois en Angleterre pour apprendre l'anglais. Ensuite, direction la France pour les études, pour bosser. Au milieu de ça, tu travailles un an en Turquie. Et là, t'es en Australie. Donc, parcours riche, diversifié. Exactement. Je te propose qu'on commence par le début. Toi, du coup, t'as eu une enfance partagée entre la Colombie et le Brésil. Comment t'as vécu cette double culture dès ton plus jeune âge ?
- Speaker #0
Bon, après, le temps que j'ai passé au Brésil... Quand j'ai vécu là-bas, c'est un peu flou parce que j'étais encore très jeune. Je suis partie à l'âge de 3 ans. Et donc, c'est plutôt ce que mes parents me racontent de tout ce que j'ai vécu, etc. Donc après, j'avais le côté... Je suis née à Bogotá, en Colombie, donc on parle espagnol dans la famille, etc. Après, quand on a bougé au Brésil, forcément, il fallait que j'apprenne le portugais. Et donc, c'est du côté de mon père qu'on a la nationalité, etc. Donc lui, il me parlait en portugais, histoire que j'apprenne plus vite. Et en parallèle, on m'a inscrite dans un lycée français, donc j'avais le français en plus. Donc c'était un mix de trois langues. Apparemment, ça s'est bien passé pour moi. Je n'ai pas eu de problème d'apprentissage ou quoi que ce soit. C'est vrai qu'aujourd'hui, je me sens plus colombienne que brésilienne, dans le sens où j'ai fini de grandir en Colombie et c'est là où j'ai le plus de souvenirs, etc. Mais le Brésil reste quand même une partie de moi parce que j'ai appris la langue quand j'étais jeune. Ce qui fait que quand je parle, je n'ai pas l'impression d'être une étrangère, on va le dire comme ça. Mais c'est vrai que je suis plus Colombie que Brésil, on va le dire comme ça. C'était culturellement riche dans le sens où j'ai eu pas mal de copains brésiliens, etc. Donc on a grandi ensemble, etc.
- Speaker #1
C'est quoi les différences principales entre la culture colombienne et la culture brésilienne ?
- Speaker #0
C'est très similaire dans le sens où on est tous latino, donc on est très intense. Après, les Brésiliens sont plus passionnels que les Colombiens, je vais dire ça comme ça, peut-être que je me trompe. Mais globalement, il n'y a pas beaucoup de différence, ce n'est pas le contraste que tu as par exemple entre la Colombie et la France ou la Colombie et l'Australie. ou même la Turquie, c'est un autre extrême. Donc je dirais que c'est des cultures qui sont assez proches, de part de la langue aussi, parce qu'en Colombie c'est l'espagnol, au Brésil c'est le portugais, mais en soi quand tu parles l'une des deux langues, tu peux facilement comprendre l'autre, donc il n'y a pas vraiment de gros choc culturel entre les deux.
- Speaker #1
Ok, c'est bien au moins pour si tu vas de l'un à l'autre. Oui,
- Speaker #0
oui.
- Speaker #1
Et à 17 ans du coup, tu prends la décision ? De quitter le continent, direction l'Angleterre pour apprendre l'anglais, pour ajouter une quatrième langue. Qu'est-ce qui t'a poussée à partir si jeune ?
- Speaker #0
Depuis longtemps avant que je parte, j'avais cette soif d'indépendance. Et je n'ai jamais été très « attachée » à rester proche de la famille. Je suis proche de mes parents, je suis proche de ma famille, mais... C'est pas pour autant qu'il faut que je reste près d'eux. Donc, le plan, c'était quand même de partir en France. Mais je voulais améliorer l'anglais. Et j'ai eu de la chance parce que j'ai de la famille en Angleterre. Donc, avec mes parents, on s'est dit, est-ce que je peux ? Prendre cette année pour améliorer mon anglais et en même temps voir la famille, connaître un autre pays, une autre culture aussi. Et donc on s'est dit que finalement, oui, on va faire ça. L'idée, c'était de plutôt aller dans une école. C'était ce qu'on avait prévu de base. Donc de payer une école pour que j'aille faire carrément des cours d'anglais. Mais finalement, on s'est dit non, ça ne sert à rien parce que je parlais déjà l'anglais. J'avais juste besoin de me... de me lâcher un peu et de gagner en fluency. Et donc finalement on s'est dit non, on va juste faire l'immersion culturelle avec la famille qui ne parle pas espagnol. Donc voilà.
- Speaker #1
Toi tu étais obligée de parler anglais ?
- Speaker #0
J'ai été obligée de parler anglais. Mon oncle il est colombien donc il parle espagnol mais dès le début il m'a dit non non, on va parler en anglais. Bon après voilà, il y a des moments où on parle en espagnol forcément mais sinon c'était anglais, anglais, anglais tout le temps. Et j'ai ma cousine qui est trois semaines plus jeune que moi donc on a... le même âge, donc je sortais avec ses copines à elle aussi, donc c'était ce genre d'immersion aussi de voir un peu la jeunesse et moi j'ai fini de grandir là-bas aussi parce que je suis partie à 17 ans presque 18 ans donc voilà quoi c'est...
- Speaker #1
Ouais, t'as pu voir la jeunesse en Colombie et en Angleterre,
- Speaker #0
je me dis que ça n'a rien à voir Complètement différent mais là c'était plus le choc, enfin pas vraiment un choc mais j'ai vu les différences culturelles entre les les jeunes en Colombie, les jeunes au Royaume-Uni c'est... pas du tout pareil. Nous, on est très coucoune. C'est-à-dire que moi, j'ai pu sortir toute seule de chez moi quand j'avais 13-14 ans. C'était la première fois où j'étais autorisée à sortir toute seule. Alors que j'ai l'impression qu'en Europe, en général, il y a cette indépendance qui est acquise depuis beaucoup de temps avant.
- Speaker #1
Ok. C'est bien de voir d'autres fonctionnements enrichissants. Et au final, tu n'as pas voulu t'arrêter là puisque tu décides ensuite d'aller en France. Pourquoi ce choix d'aller en France ?
- Speaker #0
Principalement parce que j'ai fait ma scolarité dans un lycée français. Et en gros, je parlais français tout le temps. On avait la possibilité de partir en France. C'était plus cher. Mais en même temps, mes parents, ils pouvaient se le permettre. Ils pouvaient se permettre de me payer, me financer les études. Après, en soi, les études... loop Le coût de la fac en France était moins cher que si je restais en Colombie. C'était plutôt le coût de la vie là-bas. Donc tout ce qui est loyer, charges, nourriture, transport, etc. C'est ça qu'ils ont dû payer en plus. Mais voilà, comme je disais, ils ont pu se permettre de me donner ce financement, etc. Donc j'ai pu partir. J'ai pris la décision, je suis partie.
- Speaker #1
Une nouvelle aventure qui nous couvre. Comment ça se passe tes premiers instants en France ?
- Speaker #0
Je suis arrivée, j'ai eu la chance d'avoir un pied à terre à Lyon. C'est pour ça que j'ai choisi Lyon, parce que j'avais un copain de l'école, enfin du collège, qui j'ai fait deux ans avec lui, la sixième et la cinquième. Et après, c'est ce genre de copain qui bougeait à chaque fois de pays, dont on parlait tout à l'heure. Et donc, ils ont atterri à Lyon et après, on a repris contact. Et je lui ai parlé du fait que je voulais partir en France. Et il m'a dit, pourquoi tu ne viens pas à Lyon, etc. Et donc j'ai eu la chance d'arriver chez lui, ils m'ont hébergée pendant bien une ou deux semaines, le temps que je trouve un appart. Et après, voilà, c'est la vie d'adulte, quoi. Enfin, genre, je devais faire mes courses toute seule, enfin, je devais me faire à manger toute seule, faire ma lessive, ma vaisselle toute seule. C'était des petits pas, aller faire l'inscription à la fac, genre, c'est... sans papa maman qui soit derrière toi en mode il faut que tu fasses ça il faut que tu fasses ça donc c'est mais en même temps c'est quelque chose que je voulais donc je me sentais pas en mode je suis triste parce que je suis loin de la maison c'était quelque chose que je voulais que j'ai j'ai souhaité que c'est un projet qu'on a qui a été mûri réfléchis avec mes parents aussi donc voilà c'était plus cette enfin je suis je suis une adulte j'y suis ça y est j'ai ma petite chambre en coloc voilà je reviens ouais
- Speaker #1
Et toi qui voulais du coup, comme tu disais, cette envie d'indépendance, tu n'as pas fait les choses à moitié. Oui,
- Speaker #0
voilà.
- Speaker #1
Tu as eu un peu un choc culturel en France ?
- Speaker #0
Pas tant que ça, parce qu'en soi, quand tu fais ta scolarité dans un lycée français, c'est vraiment un lycée français, donc rattaché au ministère de l'éducation nationale. Donc, c'est vraiment, il t'inculque un peu la culture française aussi, donc on a un peu l'habitude. Ce n'était pas la première fois que j'allais en France. On a fait un voyage scolaire. quand j'avais 15 ans et donc j'ai pu connaître un peu la France. C'est vrai qu'à force de grandir avec cette culture-là, ce n'était pas le choc-choc. Après voilà, on commence à faire des copains, quand tu vas à la fac tu connais d'autres personnes, peut-être c'est des français, peut-être c'est pas des français, mais on est tous dans la même situation. Enfin en soi ça m'a pas... J'ai pas eu ce choc culturel plus que ça, dans la mesure où j'ai réussi à y rester. J'ai pas fait comme certaines personnes que j'ai connues à la même époque que moi, qui sont parties en même temps, qui au bout de six mois ils sont rentrés chez eux parce qu'ils pouvaient plus. Et le froid, et les gens qui ne sont pas très gentils. Et voilà, je suis toute seule. Et ci et ça.
- Speaker #1
Tous ces petits trucs qui font que le pays, ça manque.
- Speaker #0
Ouais, ouais, ouais. Moi, ça va. On a quand même ce petit coup de blouse, des fois. J'aimerais bien rentrer chez moi, mais on se dit, je suis là pour une raison. Il faut que j'y aille, il faut que je continue. Voilà, après, de nos jours, la technologie, elle nous permet de... d'être en contact avec tout le monde, que ce soit ici ou de l'autre bout du monde. Donc, si j'avais besoin de parler avec mes parents, je les appelais, que ce soit à l'époque, c'était MSN. C'est vrai. Ou Skype. Et de nos jours, c'est plutôt WhatsApp. Tu prends WhatsApp, tu passes un coup de fil à tes parents et c'est bon. Oui,
- Speaker #1
c'est clair.
- Speaker #0
De ce côté-là, je ne me suis jamais sentie seule. Je suis de base une personne qui aime bien... Moi, j'aime bien être entourée de gens, mais en même temps, j'aime bien mes moments, moi. Donc, je n'ai jamais eu ce problème. Et c'est contradictoire parce que quand j'étais petite, je souffrais beaucoup quand j'étais loin de ma mère. Donc, j'ai réussi à grandir et à dépasser ça. On reste proches avec mes parents. Je les appelle souvent, etc. Avec le décageur en Australie, c'est un peu compliqué.
- Speaker #1
Tu m'étonnes.
- Speaker #0
Mais voilà.
- Speaker #1
Parce qu'avec la Colombie, ils sont en Colombie ?
- Speaker #0
Ils sont en Colombie,
- Speaker #1
oui. Il y a combien ?
- Speaker #0
Il y a 16 heures de décage. Ah ouais. Donc là, en gros, il est 4h ici. Là, c'est minuit.
- Speaker #1
C'est un peu compliqué.
- Speaker #0
C'est compliqué, oui.
- Speaker #1
J'imagine. Mais au moins, c'est pratique. Comme tu dis, les nouvelles technologies, ça permet quand même d'être un minimum connecté.
- Speaker #0
Oui, voilà. Tu n'es pas à l'époque où il fallait envoyer des lettres et tu attendais une réponse. Là, tu envoies un petit message. Certes, si la personne dort, elle va te répondre d'ici 7h. Donc, ça va. Oui,
- Speaker #1
ça se fait bien. C'est quoi les moments les plus enrichissants ? de ton expérience en France ?
- Speaker #0
Tellement. Je ne sais pas, peut-être le fait d'avoir réussi à finir la fac, avoir obtenu mon diplôme, mais pour moi, vraiment, le plus enrichissant, c'est avoir obtenu la nationalité française après 14 ans de vie en France. C'était quelque chose que j'ai... C'est un... Comment tu dis ? C'est un mérite. Genre... une récompense.
- Speaker #1
C'est gratifiant.
- Speaker #0
C'est quelque chose que j'ai réussi par moi-même avec mes efforts à moi. Et donc, je me dis que c'est quelque chose dont je suis vraiment fière. Tu m'étonnes.
- Speaker #1
14 jours labeur.
- Speaker #0
Qu'est-ce qui m'y arrive ? Surtout que la galère d'avoir fait des titres de séjour, titres de séjour, titres de séjour, avoir fait la queue pendant 5-6 heures à la préfecture. Le traitement que certains immigrés reçoivent de nos jours, ce n'est pas très cool et ça décourage beaucoup de gens. Et j'ai quand même réussi à tenir jusqu'au bout. Toutes les démarches administratives que j'ai dû faire, j'ai réussi. Et je pense que c'est pour moi le top du top. Il y a eu beaucoup de choses. Je considère avoir réussi à m'adapter à la culture, etc. il y a des gens qui réussissent pas, tu vois, enfin je connais pas mal de gens qui, enfin justement, qui sont venus en France, enfin qui sont partis en France pour faire des études, pareil comme moi, mais qui finalement ne réussissent pas forcément à s'intégrer à la culture, à la société et je trouve que de ce côté là, je me suis débrouillée plutôt pas mal.
- Speaker #1
Ouais.
- Speaker #0
Et ouais, voilà, mais il y a beaucoup beaucoup de choses, mais...
- Speaker #1
Ça, c'est vraiment le symbole.
- Speaker #0
Ouais, pour moi c'est... C'est l'aboutissement. Ouais.
- Speaker #1
C'est difficile d'avoir la nationalité ?
- Speaker #0
Je pense que ça devient de plus en plus compliqué. Moi, quand je suis arrivée, il y avait beaucoup de démarches à faire, mais c'était beaucoup plus court. Déjà, il fallait finir les études. Donc, le fait d'obtenir un diplôme dans une université française ou un établissement français te facilite la vie, dans le sens où quand tu vas postuler pour la nationalité, Je crois qu'il faut un minimum de 5 ans de vie en France. Et quand tu obtiens ton diplôme, c'est réduit à 2 ans. Donc au bout de 2 ans, en gros... Tu peux postuler à la nationalité tant que tu as ton diplôme. Par exemple, tu fais un IUT ou un BTS, ça n'existe plus. Ces petits diplômes de deux ans, tu peux facilement postuler pour la nationalité. Après, moi, ça m'a mis beaucoup de temps parce que j'ai fait ma pause en Turquie. Après, quand je suis revenue, j'étais en CDD. Ce n'est pas forcément évident quand tu as un CDD, parce que ça veut dire que peut-être derrière, tu n'auras pas de boulot. Forcément, ils n'aiment pas les gens qui... qui sont en chômage ou qui sont sans boulot parce que tu ne payes pas d'impôt. Donc, c'est plutôt l'État qui te paye toi, qui paye l'État. Donc, j'ai mis un peu de temps, mais c'est arrivé. Voilà.
- Speaker #1
Step by step.
- Speaker #0
Step by step. Exactement.
- Speaker #1
Trop bien. Ensuite, du coup, les choses font que tu pars un an en Turquie, comme tu nous dis. C'était pour travailler là-bas, c'est ça ? Oui,
- Speaker #0
oui, oui, tout à fait. OK.
- Speaker #1
Tu m'as dit que c'était un peu culturellement compliqué pour toi. Oui. Pourquoi ?
- Speaker #0
De base, j'étais toute seule. À l'époque, j'étais célibataire. Et là, pour le coup, je suis partie parce que ma meilleure amie, à l'époque, elle habitait là-bas avec sa famille. Donc, c'était plus facile pour moi d'y aller. Parce que j'avais encore une fois un pied à terre et je pourrais rester chez eux. Et de rien, avoir quelqu'un de connu qui parle ta langue, c'est toujours plus facile. Mais c'est juste la... perception de la femme en Turquie, dans un pays qui est majoritairement musulman, qui est soi-disant laïque mais en vrai il ne l'est pas trop. Dans la théorie oui, dans la pratique non. Tu as toujours l'impression de voilà, tu peux pas faire ci, tu peux pas faire ça, si tu mets des shorts, on va te regarder dans la rue. Moi je donnais des cours d'anglais dans une université privé et donc la... La plupart des jeunes qui y vont, c'est des jeunes issus de milieux très aisés. Donc, c'est les hommes qui cherchent surtout à se marier. Les femmes, pareil. Donc, tu en as qui... Moi, j'avais 24, 25 à l'époque. Donc, les étudiants, ils avaient 18, 19. Trois, quatre ans après, je suis quelques-uns encore sur Insta. Trois, quatre ans après, tu vois qu'à 22 ans, mes étudiants, ils ont... toutes, elles ont toutes des enfants déjà, elles sont toutes mariées. Je ne sais pas si elles ont fini la fac ou pas, je ne sais pas. Dans tous les cas, j'ai l'impression que le but de leur vie, c'est ça. C'est de se marier, d'avoir des enfants. Et donc, tu as aussi cette pression d'une certaine façon, dans le sens où les étudiants, ils posent toujours la question de comment ça se fait, que tu n'es pas mariée, pourquoi tu es toute seule, pourquoi tu n'as pas d'enfant, alors que...
- Speaker #1
On te renvoie ta vie via votre biais.
- Speaker #0
Alors que c'est... pas mon objectif, à l'époque c'était pas du tout mon objectif, j'étais célibataire, je découvrais la vie, je voyageais tu vois. Et voilà, j'ai pas senti cet accueil que j'ai senti dans les autres pays où j'y étais, indépendamment de mon statut ou de mon genre tu vois. Et mine de rien le fait de ne pas parler la langue est très handicapant. Je prenais des cours. de Turc, c'était une heure par semaine, donc c'était pas beaucoup parce qu'avec le travail, je pouvais pas faire plus. J'essayais de réviser un peu de mon côté, mais c'était pas évident et c'est hyper handicapant quand tu sors dans la rue.
- Speaker #1
T'es assez vite limitée.
- Speaker #0
Dans un resto, tu sais pas... On apprend à commander, etc. Mais quand on te pose des questions, bah non. Je suis désolée, je parle pas la langue.
- Speaker #1
Il parle anglais, quand même ?
- Speaker #0
Pas trop. Et en fait, c'est le genre de... pays qui s'attend à ce que tu parles leur langue et s'ils parlent pas enfin si tu parles pas la langue c'est enfin ils vont pas faire l'effort tu vois ok tu étais où en turquie j'étais à antalya donc c'est une petite ville balnéaire dans le sud ouest ouais en pleine méditerranée ouais c'est une très belle ville j'ai fait beaucoup de belles rencontres surtout parmi les étudiants mais bon voilà c'est tout c'est pas le meilleur pays dans lequel Non, après voilà comme je te disais j'avais une situation qui était très aisée parce que je gagnais bien ma vie et là bas la vie elle est pas chère j'avais un salaire d'expatrié donc je pouvais me permettre de me payer un t3 en pleine zone de plage donc ça c'était cool mais voilà il y avait pas plus que ça enfin tu vois et perso je me voyais pas finir mes jours dans ce pays quoi enfin encore moins rencontrer un partenaire turc ou marié avec un turc non c'est bon ça fait partie des expériences comment ça se passe au moins ma ça m'a beaucoup appris J'ai beaucoup appris, j'ai pu me rendre compte, j'ai découvert, j'ai connu. Après, mon temps s'est fini là-bas et ensuite,
- Speaker #1
je suis repartie. Au final, tu as quand même eu pas mal de changements entre tous les pays. Là, tu as même décidé, tu es venue en Australie, donc rebelote. Comment tu vis du coup le fait de sans cesse devoir te réadapter à un nouveau pays, une nouvelle culture, des nouvelles habitudes ?
- Speaker #0
Là, c'est une discussion qu'on a eue avec mon copain il n'y a pas longtemps. Je l'ai tellement fait que ça se fait. Là, en fait, on est venus tous les deux en Australie. Donc déjà, on n'est pas tout seul. Je trouve qu'au fur et à mesure que tu vieillis, ça devient de plus en plus difficile, surtout de quitter la zone de confort, la petite bulle. Moi, en France, j'avais ma situation stable. J'avais un boulot, j'avais un appart. J'avais mes Ausha, on avait notre appart et tout. On était bien. Mais il y avait un truc qui n'allait pas. C'est genre la monotonie. on a besoin d'un truc nouveau, découvrir un autre pays, peut-être un projet à deux. Et donc, le fait d'être venu ici à deux, ça se fait. On est tous les deux, nouveau départ. C'est quelque chose qu'on veut faire. C'est un projet qu'on a réfléchi, auquel on a réfléchi encore une fois et qui s'est fait. Et tout s'est bien passé dès le début, depuis la demande de visage jusqu'à le fait de trouver un taf ici. prolonger le visa à faire les 88 jours, tout s'est donné au bon moment et donc on se dit nickel, tout roule. Franchement non ça va, j'ai un peu l'habitude tu vois, c'est pour ça que tant que tu es avec ta famille, moi en ce moment ma famille c'est mon copain, ça va.
- Speaker #1
Ça se fait bien, comme tu dis, au moins tu n'es pas tout seul. Et en parlant de famille justement je voulais te demander quand tu bouges autant comme ça, tu vois, c'est même pas dans une autre ville, c'est un autre pays, un autre continent, comment tu gères ta relation avec tes proches, justement, avec les amis que tu fais, avec ta famille, etc. Dans ce contexte de distance et de changement tout le temps.
- Speaker #0
Après, avec la famille, ils sont toujours en Colombie. Pareil, ils ont déjà l'habitude. Ça fait tellement longtemps que je ne suis plus à la maison, que j'ai quitté le nid familial. C'est juste une question d'habitude. Après, je trouve que c'est plus un ressenti que j'ai depuis que je suis venue ici, étant donné que le décalage horaire a augmenté. C'est un peu plus compliqué de parler avec eux, mais je pense que c'est des situations auxquelles on finit par s'habituer. Comme je disais, on ne perd pas le contact, on s'envoie des textos, des WhatsApp, on parle souvent. On ne s'appelle pas tous les jours parce que...
- Speaker #1
Difficile de s'appeler tous les jours.
- Speaker #0
Mais on garde le contact après. Après, pour les amis, on a gardé notre petit groupe d'amis à Lyon. On se parle de temps en temps. On a des petits Ausha WhatsApp, Insta, etc. Donc, les amis restent là. C'est plus les amis en Australie. Pour l'instant, on n'a pas… Parce que je trouve qu'ici, les relations, elles sont tellement éphémères. Parce que des gens, ils vont, ils viennent, ils vont, ils viennent. C'est compliqué de se faire des amis, amis, amis, à moi, que tu trouves un groupe qui est là de façon permanente. Et pour l'instant, étant donné qu'on ne sait pas encore ce qu'on va faire, Les plans sont flots, on ne connaît pas la ville dans laquelle on va s'installer. Je préfère ne pas créer beaucoup de liens parce qu'on ne sait pas où on sera.
- Speaker #1
C'est vrai que c'est un peu compliqué.
- Speaker #0
Mais c'est vrai que les liens qu'on a créés dans le passé, ils y sont, ils resteront. Ça reste des copains, on ne se parle pas tous les jours, mais je sais que quand on reviendra en France, on va les voir, c'est sûr, on va passer un bon moment. Pareil pour la famille, la famille sera toujours là. Oui,
- Speaker #1
vraiment. Non, ça c'est top. Il y a une culture à laquelle tu t'identifies plus qu'une autre ?
- Speaker #0
Ça dépend. J'ai toujours entendu dire que quand tu changes de langue, tu changes de personnalité. Je trouve que c'est un peu comme ça. Quand je suis entre Français, je me sens très française dans ma façon de faire les choses, dans ma façon de réfléchir, dans ma façon de penser, etc. Quand je suis avec la famille ou des gens qui sont latino-américains, j'adopte plutôt cette facette. mon côté colombien, enfin voilà. Je suis un peu entre les deux. Je n'ai pas encore pleinement assimilé la culture australienne. Je suis encore en train de me demander quelle est la culture australienne, parce qu'on a tellement de gens de partout dans le monde ici qu'on ne sait pas. Mais entre française et colombienne, un peu les deux. Je pense que ça va faire presque... autant de temps que j'ai vécu en France et en Colombie, donc c'est un peu pareil. Et récemment, j'étais pas en France, ça fait 18 ans que j'habite pas en Colombie presque, donc des fois... Quand je rentre en Colombie, je me sens un peu plus touriste que locale. Mais ça reste mon pays-naissance. Ça reste forcément dans le cœur. Dans le cœur, ouais.
- Speaker #1
C'est ça. Et c'est ce que je voulais te demander aussi. Est-ce qu'il y a un endroit où tu dirais, genre, c'est chez moi ? Parce que ce qu'on disait, tu vois, juste avant de commencer, où les personnes qui vont grandir dans un pays, qui vont faire toute leur life, genre moi, tu vois, j'ai toujours vécu en France, à part aller un an, ou que j'ai fait en Finlande, mais c'était une parenthèse. Du coup, chez moi, c'est en France. Toi ? Comment tu vois les choses là-dessus ?
- Speaker #0
En fait, tu as le « home is where the heart is » . En ce moment, la maison, c'est ici, c'est Sydney. C'est mon quartier. Mais quand je rentre en Colombie, quand je rentre à Bogota, je me sens à la maison. C'est comme si je n'étais jamais partie. Je connais les adresses par cœur, je me rappelle de où c'est ça. Si j'ai besoin de m'orienter dans la ville, j'ai aucun mal. C'est comme si je n'étais jamais partie. Et j'ai ce même sentiment à Lyon. Quand je partais de Lyon, soit que je partais à l'étranger ou que je partais en vacances et que je rentrais à Lyon, c'était « je rentre à la maison, c'est chez moi » . Lyon, c'est chez moi. Et je pense que j'aurais toujours cette perception de « Lyon, c'est chez moi » . J'ai toujours eu une image, c'est très drôle, mais pour moi c'est hyper symbolique, c'est quand tu… Quand tu prends le train pour aller à Lyon et que tu arrives, je crois que c'est surtout de Paris, quand tu arrives et que tu croises le Rhône, et tu as la Cité internationale et que tu croises le Rhône, j'ai cette image de « je suis rentrée, c'est chez moi » . Parce que c'est déjà chez moi, c'est une perception de la maison. J'y étais-elle pendant tellement longtemps, c'est un peu ma ville d'adoption et pour moi, ce sera toujours chez moi. Je sais que je ne sais pas quand est-ce que je vais revenir à Lyon, mais le jour où je reviendrai, ce sera comme si je n'étais jamais partie. Et c'est le même sentiment que j'ai quand je rentre dans ma ville à Bogota. C'est pareil.
- Speaker #1
Tu penses que c'est quoi qui fait du coup un peu ce sentiment de chez soi ? C'est le fait de construire quelque chose ?
- Speaker #0
Je pense que c'est le fait de construire quelque chose, les moments que tu as passés, les souvenirs que tu as créés. Tu as toujours... C'est surtout à Lyon, à Bogota, j'ai mes souvenirs d'enfance bien sûr, mais à Lyon c'est genre, ah là, c'est là où j'ai fait ça, c'est là où j'ai eu ma première balade à vélo. Par exemple, mon premier quartier à Lyon, c'était Villeurbanne, c'était Flaché. C'est un quartier qui, en ce moment c'est pas mal, mais quand je suis arrivée, j'aurais toujours ce souvenir de Flaché, c'était ma première maison. Après j'ai bougé un peu sur Lyon aussi, mais voilà. Pour moi, c'est surtout les histoires que tu crées, les souvenirs que tu crées, les moments que tu passes, que ce soit tout seul ou avec des gens. Ce sera toujours ça pour moi. Ok.
- Speaker #1
Ouais, c'est vrai. Les moments que tu vis, au final,
- Speaker #0
c'est ça qui reste,
- Speaker #1
qui constitue.
- Speaker #0
Les personnes aussi, les personnes que tu croises dans ton chemin. Ouais.
- Speaker #1
T'as réussi du coup à créer des amitiés fortes en France ?
- Speaker #0
Oui. Oui. Après, enfin... Quand j'étais à la fac, j'avais beaucoup de copains français et non français. Et donc les non français, il y en a qui sont restés à Lyon, il y en a qui sont partis. Et donc ce qui fait que j'ai un peu des copains partout dans le monde. Et donc c'est ça un peu la magie aussi d'être un étranger dans un pays qui est aussi formé par des étrangers. Parce que la France aussi, il y a beaucoup d'étrangers, etc. Beaucoup d'immigrants. C'est qu'à la fin, tu crées des liens avec des gens. Et ces gens, même s'ils ne restent pas là, tu auras des copains partout dans le monde. et ceux qui sont à Lyon c'est le groupe de copains qui restent à Lyon et qui seront à Lyon et je sais que comme je te disais quand on rentrera à Lyon, ils seront là et on se reverra et on va passer des bons moments et ce sera comme si on n'était jamais partis trop bien ça fait plaisir les amitiés comme ça oui,
- Speaker #1
il va y avoir un petit pied-à-terre partout au monde si tu veux voyager sur l'occasion de découvrir des pays tu dirais que Merci. En quoi cette aventure multiculturelle a impacté ta personne et ton identité ?
- Speaker #0
Je pense que pour moi, ce serait ma capacité d'adaptation à n'importe quel environnement, on va dire comme ça. C'est que j'ai l'impression que j'ai une facilité à m'habituer à une nouvelle aventure, à un nouveau pays, à une nouvelle culture, que peut-être certaines personnes... ont plus de mal à le faire. Je trouve que, étant donné que j'ai tellement bougé, je peux m'adapter sans problème. Je trouve que, ouais, je peux m'habituer à... Je peux assimiler la culture. Je peux... Je suis très curieuse de base. Donc, par exemple, quand on est venu en Australie, je cherche toujours à, par exemple, voir... qu'est-ce qui se regarde à la télé, qu'est-ce que les gens lisent, qu'est-ce que les gens font dans leur temps libre, etc. Genre aller à la plage, etc. Pour moi, j'aime bien apprendre ce genre de choses et peut-être les assimiler, peut-être pas les faire moi-même parce que je ne cherche pas à devenir australienne non plus, mais juste essayer de comprendre comment vivent les gens ici, qu'est-ce qu'ils font, qu'est-ce qu'ils aiment, qu'est-ce qu'ils n'aiment pas, qu'est-ce qu'on mange, qu'est-ce qu'on ne mange pas. pour moi c'est ma capacité d'adaptation, je trouve.
- Speaker #1
Et à capter les différences culturelles par rapport à ce que tu fais, etc. Et les assimiler.
- Speaker #0
Oui, la curiosité envers la nouvelle culture. Parce que quand tu es un immigrant dans un pays que tu ne connais pas, c'est normal d'essayer de comprendre ce que les locaux y font. Après, je n'ai pas l'impression que tout le monde le fasse. Tu as toujours le piège de quand tu quittes ton pays. d'essayer de chercher des gens de ton pays et de rester que entre les gens de ton pays. Moi j'essaye au max d'éviter ça, non pas parce que je n'aime pas les gens de mon pays, rien à voir, c'est juste que j'aime bien découvrir des nouvelles cultures. Par exemple en France, on n'a pas cette population d'immigrés asiatiques qu'on a ici en Australie, qui fait qu'ici il y a tellement de restos qu'on n'aurait jamais vu en France. Et moi j'aime bien parce que ça me permet de découvrir qu'est-ce qu'on mange au Vietnam, qu'est-ce qu'on mange au Laos, enfin... Même la gastronomie chinoise en France n'est pas très connue. C'est surtout des clichés en mode « oui, oui, c'est chinois, mais bon, c'est pas vraiment chinois » . Et ici, en fait, tu découvres ça. Et pour moi, il faut être curieux dans ce sens-là. Il faut essayer de voir ce que forme ce pays. Cette ville, elle est tellement multiculturelle que ce serait bête de rester entre Français ou entre Colombiens. Enfin, il y a tellement de choses à voir que…
- Speaker #1
C'est clair que c'est impressionnant. À Sydney, la multiculturalité, c'est un truc énorme.
- Speaker #0
Et tu peux trouver tout et n'importe quoi.
- Speaker #1
Mais ouais, carrément. Puis comme tu parlais aussi de la population asiatique, ça prend une bonne partie de la ville. On se rend vraiment à l'influence asiatique. Chinatown, par exemple, c'est fou.
- Speaker #0
Je crois qu'il y a d'autres quartiers aussi un peu plus excentrés, qui sont très propres à chaque culture. Je n'ai pas encore eu l'occasion d'aller les voir, mais...
- Speaker #1
C'est très diversifié et c'est enrichissant. C'est très amusant. Ça,
- Speaker #0
c'est clair.
- Speaker #1
Est-ce que tu as des tips à partager justement pour une bonne arrivée dans un nouveau pays ?
- Speaker #0
Pour moi, c'est l'ouverture d'esprit, 100%. Il ne faut pas se dire « non, j'ai peur de faire ça, j'ai peur de goûter ça » . Il faut oser. Il faut être ouvert d'esprit, il faut oser, il faut être curieux. Il faut y aller, quoi. Si tu ne parles pas bien la langue, il faut oser faire des erreurs, il faut oser parler, même si tu ne parles pas bien, les gens ne vont pas te juger. C'est la seule façon dont tu vas réussir à apprendre. Pour moi, c'est oser, être curieux, se lancer. Ne pas avoir peur parce que la peur, tu vas rester dans ton coin et tu ne vas rien faire, tu ne vas rien réussir. Et si t'es pas ouvert d'esprit, les gens... peut-être que les gens qui sont en face de toi, ils ne vont pas oser venir vers toi. Je trouve qu'il faut être curieux, il faut oser, il faut s'aventurer, il faut se lancer, il ne faut pas avoir peur.
- Speaker #1
Dans tous les cas, au pire, les gens te regardent bizarrement au début et après, ils voudront t'aider et te montrer tout ça. Top. Merci pour le conseil. Merci de nous avoir partagé ton histoire, en tout cas.
- Speaker #0
Ça m'a fait plaisir.
- Speaker #1
Merci d'avoir écouté cet épisode. J'espère qu'il vous a plu. Si c'est le cas, je vous invite à mettre 5 étoiles sur la plateforme d'écoute sur laquelle vous vous trouvez. Si vous connaissez quelqu'un qui veut partir à l'étranger, je vous invite à lui partager. Ça pourra peut-être lui donner quelques tips. À bientôt !