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En quête d'Orient. Épisode 1 - La Turquie et la naissance d'une quête cover
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Place des religions

En quête d'Orient. Épisode 1 - La Turquie et la naissance d'une quête

En quête d'Orient. Épisode 1 - La Turquie et la naissance d'une quête

18min |04/07/2025|

102

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18min |04/07/2025|

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Description

Dans la dixième saison du podcast Place des religions, nous partons sur les traces des chrétiens d’Orient pour comprendre leur histoire. Une quête qui révèle bien des enjeux contemporains : celui de la survie des minorités culturelles en Orient, celui d’un héritage commun byzantin et ottoman, de luttes fratricides, et celui des grands exils et des rêves de retour.


À travers l’odyssée des chrétiens d’Orient, de massacres en résistances, cette série radiophonique de cinq épisodes nous invite à partir sur les routes : Istanbul, la région Tur Abdin, la Chine, l’Éthiopie, jusqu’à l’île de Chypre.


L’écrivain, historien, voyageur et homme de radio Sébastien de Courtois s’est proposé d’être le guide littéraire pour cette traversée. Ses textes sont interprétés par l’acteur Pablo Pauly.

Enfin, la série s’appuie sur la parole de nombreux spécialistes du sujet : Jean-François Colosimo, Gilles Kepel, Jean Lebrun, Alain Desreumaux, Bertrand Hirsch et Noël Quidu.


Un podcast qui touchera tous ceux qui cherchent à comprendre les racines du monde dans lequel ils vivent, qui croient à la force des récits et à la beauté de l’écoute. Une parole habitée, une mémoire vivante, un regard à la fois sensible et rigoureux pour rappeler que toute minorité porte une part d’universel.



Une série podcast documentaire d’Ulysse Manhes et David Federmann, proposée par La Croix.


Épisode 1 :

À Istanbul, ancienne Byzance, Sébastien de Courtois part sur les traces du christianisme byzantin. Entre églises transformées en mosquées et mémoire effacée, il explore l’héritage chrétien oriental encore présent dans les murs de la ville. Avec Gilles Kepel, Alain Desreumaux, Jean-François Colosimo, et Jean Lebrun. Lectures : Pablo Pauly. Chant : Noëmi Waysfeld.



CRÉDITS – Auteurs et réalisation : David Federmann et Ulysse Manhes. Textes : Sébastien de Courtois. Lectures : Pablo Pauly. Chants : Noëmi Waysfeld. Avec Jean-François Colosimo, Gilles Kepel, Jean Lebrun, Alain Desreumaux, Bertrand Hirsch et Noël Quidu. À La Croix – Chargée de production : Célestine Albert-Steward. Communication : Audrey Campagne et Sandrine Verdelhan.


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Découvrez tous les podcasts de LA CROIX :

« L’Envers du récit », « C’est ça l’Amérique », « Croire, le podcast de l’aventure spirituelle »


PODCAST LA CROIX - Juillet 2025



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Enquête d'Orient, sur les routes du christianisme, une série documentaire proposée par Lacroix. Épisode 1, la Turquie et la naissance d'une quête. Quelle magie opère sur nous les mondes inconnus ? Les peuples lointains, disparus ou incompris, aux histoires et aux destins oubliés, aux trésors cachés, aux secrets bien gardés. Les chrétiens d'Orient appartiennent à ces mondes, le berceau de toute une civilisation sortie de l'ombre il y a 2000 ans, ou plutôt sortie du soleil, orientale, mésopotamien, entre la Turquie, l'Irak et la Syrie, où vécurent il y a deux millénaires les Araméens, les Grecs et les Arméniens. les tout premiers chrétiens de l'histoire. Aujourd'hui encore, leurs descendants vivent et habitent les terres, les églises et les villages de ces régions. Ils perpétuent les rites et les traditions de l'origine. Mais dans les temps modernes, leur survie n'est plus assurée. La peur de disparaître plane sur la communauté des chrétiens d'Orient. Tout un monde qui ne tient qu'à un fil pourrait un jour disparaître comme l'Atlantide. Qui sont donc ces chrétiens d'Orient ? Quelle est leur histoire ? Quel est leur destin ?

  • Speaker #1

    Dans le monastère du Safran, près de Mardin, en Turquie. Alors que nous visitons la crypte des patriarches, un vieux moine m'explique la tradition d'enterrer les défunts en position assise. Cette coutume remonte à l'époque des rois assyriens, il y a plus de 3000 ans. A l'entrée des tombeaux, il n'est pas rare de ramasser au ras du sol des bouts de chandelles consumées. Et là, l'émotion me submerge. Comment est-il possible de laisser partir tous ces trésors, de laisser l'oubli s'installer, plus que jamais faisons entendre le cri de désespoir de ces chrétiens, au moment où les attaques contre eux redoublent d'intensité, à seulement quelques kilomètres d'ici, sur le mont Islo, près de la frontière syrienne, le sentiment de tranquillité que l'on ressent dans ces espaces est désormais sans égal. Un retour au désert, un horizon de cendres.

  • Speaker #0

    Ce cri du cœur, c'est le cri de Sébastien de Courtois, écrivain et voyageur. Un cri qu'il exprimait en 2014, à l'heure sombre, où Daesh, en Irak, assassinait les chrétiens d'Orient et détruisait leurs musées, manuscrits et monastères. Sébastien de Courtois a dédié sa vie aux chrétiens d'Orient, témoignant de leur culture et de leur disparition progressive. Une quête qu'il mène encore aujourd'hui sur le terrain universitaire, mais aussi par les voyages et l'écriture. Une longue aventure qui commença en Turquie, au pied du Bosphore, dans la légendaire Istanbul.

  • Speaker #2

    L'enquête sur les chrétiens d'Orient, elle démarre à... à Istanbul, elle démarre en fait à Byzance ou à Constantinople.

  • Speaker #0

    Gilles Kepel, essayiste, politologue et historien.

  • Speaker #2

    Elle rappelle que Istanbul vient de l'expression grecque « istin polin » , c'est-à-dire « vers la ville » , puisqu'on disait « je vais vers la ville » . Donc c'est là qu'on va et c'est là d'où l'on part. Car tout le monde y allait et c'était même dans le nom, dans l'origine du nom, il y a ce départ et cette arrivée d'une itinérance.

  • Speaker #3

    C'est une ville magique qui parle d'histoire tout de suite.

  • Speaker #0

    Alain Desremeaux, chercheur au CNRS, spécialiste des mondes syriacs.

  • Speaker #3

    C'est une ville moderne, c'est vrai ? C'est une ville avec une pauvreté ancienne qui est prégnante, qui reste. Et donc c'est une atmosphère très active. En fait, c'est un monde où on respire à la fois le passé et le présent.

  • Speaker #4

    Istanbul, c'est un double sas, c'est une double porte. Istanbul, c'est un Orient-Occident.

  • Speaker #0

    Jean-François Colosimo, éditeur et essayiste.

  • Speaker #4

    Istanbul, en fait, est véritablement installé à l'articulation entre l'Occident, l'Orient, l'Europe, l'Asie. Et en fait, cette ville, qui est une ville totalement tourbillante, je dirais, agglomère autour d'elle tous ces ailleurs, mais des ailleurs qui, pour nous, qui venons par exemple de France sont des ailleurs tout à fait je dirais compréhensibles, acceptables, vivables et beaucoup plus que ça encore enthousiasmants.

  • Speaker #1

    Lorsque j'arrivais à Istanbul, la ville me semblait immortelle.

  • Speaker #0

    Extrait teinté à Istanbul, ouvrage de Sébastien de Courtois, de 2014.

  • Speaker #1

    Une découverte pour moi, celle de voir des mosquées couvertes de neige et les flots déchaînés du Bosphore. Je m'étais arrêté dans la côte de Galata, qui monte depuis le port de Caracueil, en succession de marches épuisantes vers la tour génoise, et en me retournant dans cette côte... J'étais ébloui par la lumière de l'hiver. Que penser de cet instant magique, où je compris à la seconde même que je pouvais appartenir à ces lieux ? Les façades noires, les gueules renfermées, le halo des cigarettes, les fils sur les trottoirs les jours de superloto, l'attente devant les arrêts de Dolmousse, l'été brûlant et ce langage incompréhensible.

  • Speaker #5

    Te Ausha, katipoui koudanou yanou, gâzleri mahmou. Kati Bini Mbem, Kati Binen, Nekarashim

  • Speaker #6

    Istanbul, c'est les quartiers très différents les uns des autres.

  • Speaker #0

    Jean Lebrun, journaliste et historien. Les juifs,

  • Speaker #6

    les chrétiens, les arméniens ont gardé ou ont longtemps gardé leur quartier. Nous, loin, il y a le quartier le plus... islamisés avec le long de la colline sur les chemins montants les femmes poêlées et leurs époux sérieux il y a les souvenirs de l'Istanbul occidentalisé du XIXe siècle, les maisons qui donnent sur l'eau, les maisons qui surplombent, souvent en bois, le fleuve, les maisons le long du Bosphore qui tremblent de tous leurs membres, au passage des très très très gros bateaux qui franchissent les détroits et qui de temps en temps se fichent tout droit dans les maisons. Donc c'est ça, Istanbul, c'est un continuum entre des architectures différentes, et qui témoignent d'un cosmopolitisme, d'un mélange des styles. Voilà, c'est ça qui est assez fascinant à Istanbul, que j'appelle Constantinople pour ma part.

  • Speaker #0

    Istanbul, Constantinople, Byzance. Des siècles de mémoire sont déposés dans cette immense cité, aux trois noms éternels. à la croisée de l'Occident et de l'Orient. À l'ouest s'ouvre l'Europe, à l'est l'Asie. Ici, sur le détroit du Bosphore, se croisent les communautés turcs, grecs, arméniens, russes, iraniens, juifs, chrétiens, musulmans. Les bateaux naviguent entre les trois rives, la Corne d'Or, la rive latine et la rive asiatique. Cette cité grandiose, aux identités multiples, fut autrefois le bastion du christianisme.

  • Speaker #3

    On est dans un monde moderne qui assume un héritage ottoman et le décor est profondément ottoman avec un style qui est, disons-le, sidérant, qui est génial. Nous sommes dans la capitale de l'Empire romain d'Orient. En fait, c'est l'Empire romain d'Orient qui a été fondé en 330 par Constantin. L'Empire romain d'Orient... qui s'est bâti en se christianisant, est là tout entier. Il a été, évidemment, intégré à l'intérieur du monde ottoman. Mais il reste profondément présent dans ses vestiges.

  • Speaker #4

    Il n'y a pas d'Istanbul sans Constantinople, et il n'y a pas de Constantinople sans christianisme. Alors, de ce point de vue-là, évidemment, on va voir la mosquée bleue qui est à côté de Sainte-Sophie. Puis on va dire, ah, quel univers de mosquée ! Oui. La mosquée bleue, elle est bâtie par Sinan, qui est un grand architecte ottoman, lequel, en fait, a été volé, comme tous les janissaires, à une famille chrétienne. Et son espoir, c'est de copier Sainte-Sophie, même si la mosquée bleue copie très imparfaitement le miracle architectural qu'est Sainte-Sophie. En fait, vous voyez, le type de mosquée turque, en fait, c'est l'église byzantine, simplement qui est islamisée.

  • Speaker #1

    Il existe une autre manière de découvrir les églises du vieux Byzance, celles qui sont devenues des petites mosquées de quartier, au cours des siècles, et qui ne figurent pas sur les guides officiels.

  • Speaker #0

    Un thé à Istanbul, 2014.

  • Speaker #1

    À côté de Sainte-Sophie qui attire toute la lumière, ces sanctuaires plus modestes, couvents et paroisses, illustrent une autre richesse de Constantinople. La conversion de ces églises ne s'est pas faite brutalement. Le processus s'est étalé sur des siècles. Les bâtiments abandonnés ne le sont pas restés longtemps. Il s'agit d'une autre forme de migration, une sorte de métempsychose de la bière. Car changer de dieu, réserve aussi.

  • Speaker #0

    Dans ce décor turc, le passé chrétien remonte à la surface et se révèle dans les plis du décor et de l'architecture. Un passé qui dort, comme un secret, dans les détails de Constantinople.

  • Speaker #6

    Je sens le passé chrétien dans beaucoup d'endroits, à Constantinople, là où est le tombeau des sultans, je sens le passé chrétien à Sainte-Sophie, dans le pavement de Sainte-Sophie. avec le même souci d'universalité dans ce pavement à l'époque chrétienne et à l'époque ottomane. Et puis je sens la présence chrétienne dans le quartier du Fanart, dans le quartier du Patriarcat, avec les maisons des... grands notables qui jouent un rôle très important dans la définition de la politique du patriarcat, et qui sont un peu à l'abandon alentour. Moi ça m'émeut d'ailleurs le siège du patriarcat, un peu délaissé, un peu oublié, un peu délabré. Donc la présence, on sent qu'elle est fragile, on sent qu'elle est menacée, enfin on sent qu'elle va être maintenue, mais dans un état d'infériorité, dans un état de minorité, dans un état de décrépitude, même parfois volontaire. de la part du pouvoir.

  • Speaker #1

    Toutes ces églises se trouvent dans la vieille ville, c'est-à-dire le vaste périmètre historique compris entre les murs anciens de Constantinople et, disons, Sainte-Sophie à l'est. Dans le quartier de Lac-Duc-de-Valence, la mosquée de Calenderane était peut-être l'église de la Cataleptos. La mosquée de Mola Gurani, dans le même quartier de Vefa, l'ancienne église de Saint Théodore. Près de l'Aleli, la mosquée de Messie Ali Pacha et l'ancienne chapelle du couvent Mirelion. La mosquée de Kodja Mustapha Pacha est à l'origine une structure byzantine. Il faut l'œil avisé du chercheur pour les dénicher dans les ruelles de la 7e colline d'Istanbul. Que d'église me direz-vous ? Il faut chercher un peu, ne pas avoir peur, demander son chemin au gamin et se fondre, se perdre un peu, revenir sur ses pas. C'est pour moi une autre manière de voyager, remonter le cours de l'histoire et voir ce que le fleuve a laissé.

  • Speaker #0

    En chemin sur ces traces chrétiennes, on se laisse porter par le mystère d'un passé lointain, celui de ces anciens chrétiens orientaux. Mais où sont-ils aujourd'hui ? Existe-t-il encore ? Et si l'enquête devait démarrer ailleurs ? Et s'il fallait porter le regard encore plus loin, plus à l'Est ?

  • Speaker #3

    Lorsque l'on... qui est Istanbul, vers l'Orient, qu'on longe toute la rive méditerranéenne. On va tomber sur les villes impériales et villes provinciales de l'Empire romain d'Orient chrétien. Et si on va jusqu'à l'Est, on va tomber jusqu'à son extrémité. Son extrémité, le Tour Abidine, qui est un lieu chrétien par excellence, à la frontière du monde perse, entre l'Empire romain et la Perse.

  • Speaker #0

    À cet instant, le tour Abdin fait son apparition, un nom syriac désignant la région du sud-est de la Turquie à la frontière de la Syrie et de l'Irak, une région montagneuse, à l'est d'Istanbul, aux confins de l'Anatolie, considérée comme le bastion du christianisme oriental. Et Sébastien de Courtois ne cesse d'y penser. Il sent comme un appel venu de ses déserts mythologiques. Un matin, la décision est prise. Il fait son sac, quitte Istanbul et part à la rencontre des mystères du Tour Abidine. Enquête d'Orient sur les routes du christianisme Une série documentaire d'Ulis Manes et de David Federman proposée par La Croix, avec la participation de Gilles Kepel, Alain Desremeaux, Jean-François Colosimo et Jean Lebrun. Les extraits des ouvrages de Sébastien de Courtois sont interprétés par Pablo Poli. A noter l'interprétation de la chanson traditionnelle turque « Uskudara Gideriken » par Noemi Weisfeld. Enquête et scénario, Ulis Manes et David Federman. Narration Ulysse Manès, suivi de production et du partenariat à La Croix, Célestine Albert-Steward, Sandrine Verdelan et Laurence Chabazon. Réalisation et générique original David Federman.

Description

Dans la dixième saison du podcast Place des religions, nous partons sur les traces des chrétiens d’Orient pour comprendre leur histoire. Une quête qui révèle bien des enjeux contemporains : celui de la survie des minorités culturelles en Orient, celui d’un héritage commun byzantin et ottoman, de luttes fratricides, et celui des grands exils et des rêves de retour.


À travers l’odyssée des chrétiens d’Orient, de massacres en résistances, cette série radiophonique de cinq épisodes nous invite à partir sur les routes : Istanbul, la région Tur Abdin, la Chine, l’Éthiopie, jusqu’à l’île de Chypre.


L’écrivain, historien, voyageur et homme de radio Sébastien de Courtois s’est proposé d’être le guide littéraire pour cette traversée. Ses textes sont interprétés par l’acteur Pablo Pauly.

Enfin, la série s’appuie sur la parole de nombreux spécialistes du sujet : Jean-François Colosimo, Gilles Kepel, Jean Lebrun, Alain Desreumaux, Bertrand Hirsch et Noël Quidu.


Un podcast qui touchera tous ceux qui cherchent à comprendre les racines du monde dans lequel ils vivent, qui croient à la force des récits et à la beauté de l’écoute. Une parole habitée, une mémoire vivante, un regard à la fois sensible et rigoureux pour rappeler que toute minorité porte une part d’universel.



Une série podcast documentaire d’Ulysse Manhes et David Federmann, proposée par La Croix.


Épisode 1 :

À Istanbul, ancienne Byzance, Sébastien de Courtois part sur les traces du christianisme byzantin. Entre églises transformées en mosquées et mémoire effacée, il explore l’héritage chrétien oriental encore présent dans les murs de la ville. Avec Gilles Kepel, Alain Desreumaux, Jean-François Colosimo, et Jean Lebrun. Lectures : Pablo Pauly. Chant : Noëmi Waysfeld.



CRÉDITS – Auteurs et réalisation : David Federmann et Ulysse Manhes. Textes : Sébastien de Courtois. Lectures : Pablo Pauly. Chants : Noëmi Waysfeld. Avec Jean-François Colosimo, Gilles Kepel, Jean Lebrun, Alain Desreumaux, Bertrand Hirsch et Noël Quidu. À La Croix – Chargée de production : Célestine Albert-Steward. Communication : Audrey Campagne et Sandrine Verdelhan.


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« L’Envers du récit », « C’est ça l’Amérique », « Croire, le podcast de l’aventure spirituelle »


PODCAST LA CROIX - Juillet 2025



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Enquête d'Orient, sur les routes du christianisme, une série documentaire proposée par Lacroix. Épisode 1, la Turquie et la naissance d'une quête. Quelle magie opère sur nous les mondes inconnus ? Les peuples lointains, disparus ou incompris, aux histoires et aux destins oubliés, aux trésors cachés, aux secrets bien gardés. Les chrétiens d'Orient appartiennent à ces mondes, le berceau de toute une civilisation sortie de l'ombre il y a 2000 ans, ou plutôt sortie du soleil, orientale, mésopotamien, entre la Turquie, l'Irak et la Syrie, où vécurent il y a deux millénaires les Araméens, les Grecs et les Arméniens. les tout premiers chrétiens de l'histoire. Aujourd'hui encore, leurs descendants vivent et habitent les terres, les églises et les villages de ces régions. Ils perpétuent les rites et les traditions de l'origine. Mais dans les temps modernes, leur survie n'est plus assurée. La peur de disparaître plane sur la communauté des chrétiens d'Orient. Tout un monde qui ne tient qu'à un fil pourrait un jour disparaître comme l'Atlantide. Qui sont donc ces chrétiens d'Orient ? Quelle est leur histoire ? Quel est leur destin ?

  • Speaker #1

    Dans le monastère du Safran, près de Mardin, en Turquie. Alors que nous visitons la crypte des patriarches, un vieux moine m'explique la tradition d'enterrer les défunts en position assise. Cette coutume remonte à l'époque des rois assyriens, il y a plus de 3000 ans. A l'entrée des tombeaux, il n'est pas rare de ramasser au ras du sol des bouts de chandelles consumées. Et là, l'émotion me submerge. Comment est-il possible de laisser partir tous ces trésors, de laisser l'oubli s'installer, plus que jamais faisons entendre le cri de désespoir de ces chrétiens, au moment où les attaques contre eux redoublent d'intensité, à seulement quelques kilomètres d'ici, sur le mont Islo, près de la frontière syrienne, le sentiment de tranquillité que l'on ressent dans ces espaces est désormais sans égal. Un retour au désert, un horizon de cendres.

  • Speaker #0

    Ce cri du cœur, c'est le cri de Sébastien de Courtois, écrivain et voyageur. Un cri qu'il exprimait en 2014, à l'heure sombre, où Daesh, en Irak, assassinait les chrétiens d'Orient et détruisait leurs musées, manuscrits et monastères. Sébastien de Courtois a dédié sa vie aux chrétiens d'Orient, témoignant de leur culture et de leur disparition progressive. Une quête qu'il mène encore aujourd'hui sur le terrain universitaire, mais aussi par les voyages et l'écriture. Une longue aventure qui commença en Turquie, au pied du Bosphore, dans la légendaire Istanbul.

  • Speaker #2

    L'enquête sur les chrétiens d'Orient, elle démarre à... à Istanbul, elle démarre en fait à Byzance ou à Constantinople.

  • Speaker #0

    Gilles Kepel, essayiste, politologue et historien.

  • Speaker #2

    Elle rappelle que Istanbul vient de l'expression grecque « istin polin » , c'est-à-dire « vers la ville » , puisqu'on disait « je vais vers la ville » . Donc c'est là qu'on va et c'est là d'où l'on part. Car tout le monde y allait et c'était même dans le nom, dans l'origine du nom, il y a ce départ et cette arrivée d'une itinérance.

  • Speaker #3

    C'est une ville magique qui parle d'histoire tout de suite.

  • Speaker #0

    Alain Desremeaux, chercheur au CNRS, spécialiste des mondes syriacs.

  • Speaker #3

    C'est une ville moderne, c'est vrai ? C'est une ville avec une pauvreté ancienne qui est prégnante, qui reste. Et donc c'est une atmosphère très active. En fait, c'est un monde où on respire à la fois le passé et le présent.

  • Speaker #4

    Istanbul, c'est un double sas, c'est une double porte. Istanbul, c'est un Orient-Occident.

  • Speaker #0

    Jean-François Colosimo, éditeur et essayiste.

  • Speaker #4

    Istanbul, en fait, est véritablement installé à l'articulation entre l'Occident, l'Orient, l'Europe, l'Asie. Et en fait, cette ville, qui est une ville totalement tourbillante, je dirais, agglomère autour d'elle tous ces ailleurs, mais des ailleurs qui, pour nous, qui venons par exemple de France sont des ailleurs tout à fait je dirais compréhensibles, acceptables, vivables et beaucoup plus que ça encore enthousiasmants.

  • Speaker #1

    Lorsque j'arrivais à Istanbul, la ville me semblait immortelle.

  • Speaker #0

    Extrait teinté à Istanbul, ouvrage de Sébastien de Courtois, de 2014.

  • Speaker #1

    Une découverte pour moi, celle de voir des mosquées couvertes de neige et les flots déchaînés du Bosphore. Je m'étais arrêté dans la côte de Galata, qui monte depuis le port de Caracueil, en succession de marches épuisantes vers la tour génoise, et en me retournant dans cette côte... J'étais ébloui par la lumière de l'hiver. Que penser de cet instant magique, où je compris à la seconde même que je pouvais appartenir à ces lieux ? Les façades noires, les gueules renfermées, le halo des cigarettes, les fils sur les trottoirs les jours de superloto, l'attente devant les arrêts de Dolmousse, l'été brûlant et ce langage incompréhensible.

  • Speaker #5

    Te Ausha, katipoui koudanou yanou, gâzleri mahmou. Kati Bini Mbem, Kati Binen, Nekarashim

  • Speaker #6

    Istanbul, c'est les quartiers très différents les uns des autres.

  • Speaker #0

    Jean Lebrun, journaliste et historien. Les juifs,

  • Speaker #6

    les chrétiens, les arméniens ont gardé ou ont longtemps gardé leur quartier. Nous, loin, il y a le quartier le plus... islamisés avec le long de la colline sur les chemins montants les femmes poêlées et leurs époux sérieux il y a les souvenirs de l'Istanbul occidentalisé du XIXe siècle, les maisons qui donnent sur l'eau, les maisons qui surplombent, souvent en bois, le fleuve, les maisons le long du Bosphore qui tremblent de tous leurs membres, au passage des très très très gros bateaux qui franchissent les détroits et qui de temps en temps se fichent tout droit dans les maisons. Donc c'est ça, Istanbul, c'est un continuum entre des architectures différentes, et qui témoignent d'un cosmopolitisme, d'un mélange des styles. Voilà, c'est ça qui est assez fascinant à Istanbul, que j'appelle Constantinople pour ma part.

  • Speaker #0

    Istanbul, Constantinople, Byzance. Des siècles de mémoire sont déposés dans cette immense cité, aux trois noms éternels. à la croisée de l'Occident et de l'Orient. À l'ouest s'ouvre l'Europe, à l'est l'Asie. Ici, sur le détroit du Bosphore, se croisent les communautés turcs, grecs, arméniens, russes, iraniens, juifs, chrétiens, musulmans. Les bateaux naviguent entre les trois rives, la Corne d'Or, la rive latine et la rive asiatique. Cette cité grandiose, aux identités multiples, fut autrefois le bastion du christianisme.

  • Speaker #3

    On est dans un monde moderne qui assume un héritage ottoman et le décor est profondément ottoman avec un style qui est, disons-le, sidérant, qui est génial. Nous sommes dans la capitale de l'Empire romain d'Orient. En fait, c'est l'Empire romain d'Orient qui a été fondé en 330 par Constantin. L'Empire romain d'Orient... qui s'est bâti en se christianisant, est là tout entier. Il a été, évidemment, intégré à l'intérieur du monde ottoman. Mais il reste profondément présent dans ses vestiges.

  • Speaker #4

    Il n'y a pas d'Istanbul sans Constantinople, et il n'y a pas de Constantinople sans christianisme. Alors, de ce point de vue-là, évidemment, on va voir la mosquée bleue qui est à côté de Sainte-Sophie. Puis on va dire, ah, quel univers de mosquée ! Oui. La mosquée bleue, elle est bâtie par Sinan, qui est un grand architecte ottoman, lequel, en fait, a été volé, comme tous les janissaires, à une famille chrétienne. Et son espoir, c'est de copier Sainte-Sophie, même si la mosquée bleue copie très imparfaitement le miracle architectural qu'est Sainte-Sophie. En fait, vous voyez, le type de mosquée turque, en fait, c'est l'église byzantine, simplement qui est islamisée.

  • Speaker #1

    Il existe une autre manière de découvrir les églises du vieux Byzance, celles qui sont devenues des petites mosquées de quartier, au cours des siècles, et qui ne figurent pas sur les guides officiels.

  • Speaker #0

    Un thé à Istanbul, 2014.

  • Speaker #1

    À côté de Sainte-Sophie qui attire toute la lumière, ces sanctuaires plus modestes, couvents et paroisses, illustrent une autre richesse de Constantinople. La conversion de ces églises ne s'est pas faite brutalement. Le processus s'est étalé sur des siècles. Les bâtiments abandonnés ne le sont pas restés longtemps. Il s'agit d'une autre forme de migration, une sorte de métempsychose de la bière. Car changer de dieu, réserve aussi.

  • Speaker #0

    Dans ce décor turc, le passé chrétien remonte à la surface et se révèle dans les plis du décor et de l'architecture. Un passé qui dort, comme un secret, dans les détails de Constantinople.

  • Speaker #6

    Je sens le passé chrétien dans beaucoup d'endroits, à Constantinople, là où est le tombeau des sultans, je sens le passé chrétien à Sainte-Sophie, dans le pavement de Sainte-Sophie. avec le même souci d'universalité dans ce pavement à l'époque chrétienne et à l'époque ottomane. Et puis je sens la présence chrétienne dans le quartier du Fanart, dans le quartier du Patriarcat, avec les maisons des... grands notables qui jouent un rôle très important dans la définition de la politique du patriarcat, et qui sont un peu à l'abandon alentour. Moi ça m'émeut d'ailleurs le siège du patriarcat, un peu délaissé, un peu oublié, un peu délabré. Donc la présence, on sent qu'elle est fragile, on sent qu'elle est menacée, enfin on sent qu'elle va être maintenue, mais dans un état d'infériorité, dans un état de minorité, dans un état de décrépitude, même parfois volontaire. de la part du pouvoir.

  • Speaker #1

    Toutes ces églises se trouvent dans la vieille ville, c'est-à-dire le vaste périmètre historique compris entre les murs anciens de Constantinople et, disons, Sainte-Sophie à l'est. Dans le quartier de Lac-Duc-de-Valence, la mosquée de Calenderane était peut-être l'église de la Cataleptos. La mosquée de Mola Gurani, dans le même quartier de Vefa, l'ancienne église de Saint Théodore. Près de l'Aleli, la mosquée de Messie Ali Pacha et l'ancienne chapelle du couvent Mirelion. La mosquée de Kodja Mustapha Pacha est à l'origine une structure byzantine. Il faut l'œil avisé du chercheur pour les dénicher dans les ruelles de la 7e colline d'Istanbul. Que d'église me direz-vous ? Il faut chercher un peu, ne pas avoir peur, demander son chemin au gamin et se fondre, se perdre un peu, revenir sur ses pas. C'est pour moi une autre manière de voyager, remonter le cours de l'histoire et voir ce que le fleuve a laissé.

  • Speaker #0

    En chemin sur ces traces chrétiennes, on se laisse porter par le mystère d'un passé lointain, celui de ces anciens chrétiens orientaux. Mais où sont-ils aujourd'hui ? Existe-t-il encore ? Et si l'enquête devait démarrer ailleurs ? Et s'il fallait porter le regard encore plus loin, plus à l'Est ?

  • Speaker #3

    Lorsque l'on... qui est Istanbul, vers l'Orient, qu'on longe toute la rive méditerranéenne. On va tomber sur les villes impériales et villes provinciales de l'Empire romain d'Orient chrétien. Et si on va jusqu'à l'Est, on va tomber jusqu'à son extrémité. Son extrémité, le Tour Abidine, qui est un lieu chrétien par excellence, à la frontière du monde perse, entre l'Empire romain et la Perse.

  • Speaker #0

    À cet instant, le tour Abdin fait son apparition, un nom syriac désignant la région du sud-est de la Turquie à la frontière de la Syrie et de l'Irak, une région montagneuse, à l'est d'Istanbul, aux confins de l'Anatolie, considérée comme le bastion du christianisme oriental. Et Sébastien de Courtois ne cesse d'y penser. Il sent comme un appel venu de ses déserts mythologiques. Un matin, la décision est prise. Il fait son sac, quitte Istanbul et part à la rencontre des mystères du Tour Abidine. Enquête d'Orient sur les routes du christianisme Une série documentaire d'Ulis Manes et de David Federman proposée par La Croix, avec la participation de Gilles Kepel, Alain Desremeaux, Jean-François Colosimo et Jean Lebrun. Les extraits des ouvrages de Sébastien de Courtois sont interprétés par Pablo Poli. A noter l'interprétation de la chanson traditionnelle turque « Uskudara Gideriken » par Noemi Weisfeld. Enquête et scénario, Ulis Manes et David Federman. Narration Ulysse Manès, suivi de production et du partenariat à La Croix, Célestine Albert-Steward, Sandrine Verdelan et Laurence Chabazon. Réalisation et générique original David Federman.

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Description

Dans la dixième saison du podcast Place des religions, nous partons sur les traces des chrétiens d’Orient pour comprendre leur histoire. Une quête qui révèle bien des enjeux contemporains : celui de la survie des minorités culturelles en Orient, celui d’un héritage commun byzantin et ottoman, de luttes fratricides, et celui des grands exils et des rêves de retour.


À travers l’odyssée des chrétiens d’Orient, de massacres en résistances, cette série radiophonique de cinq épisodes nous invite à partir sur les routes : Istanbul, la région Tur Abdin, la Chine, l’Éthiopie, jusqu’à l’île de Chypre.


L’écrivain, historien, voyageur et homme de radio Sébastien de Courtois s’est proposé d’être le guide littéraire pour cette traversée. Ses textes sont interprétés par l’acteur Pablo Pauly.

Enfin, la série s’appuie sur la parole de nombreux spécialistes du sujet : Jean-François Colosimo, Gilles Kepel, Jean Lebrun, Alain Desreumaux, Bertrand Hirsch et Noël Quidu.


Un podcast qui touchera tous ceux qui cherchent à comprendre les racines du monde dans lequel ils vivent, qui croient à la force des récits et à la beauté de l’écoute. Une parole habitée, une mémoire vivante, un regard à la fois sensible et rigoureux pour rappeler que toute minorité porte une part d’universel.



Une série podcast documentaire d’Ulysse Manhes et David Federmann, proposée par La Croix.


Épisode 1 :

À Istanbul, ancienne Byzance, Sébastien de Courtois part sur les traces du christianisme byzantin. Entre églises transformées en mosquées et mémoire effacée, il explore l’héritage chrétien oriental encore présent dans les murs de la ville. Avec Gilles Kepel, Alain Desreumaux, Jean-François Colosimo, et Jean Lebrun. Lectures : Pablo Pauly. Chant : Noëmi Waysfeld.



CRÉDITS – Auteurs et réalisation : David Federmann et Ulysse Manhes. Textes : Sébastien de Courtois. Lectures : Pablo Pauly. Chants : Noëmi Waysfeld. Avec Jean-François Colosimo, Gilles Kepel, Jean Lebrun, Alain Desreumaux, Bertrand Hirsch et Noël Quidu. À La Croix – Chargée de production : Célestine Albert-Steward. Communication : Audrey Campagne et Sandrine Verdelhan.


----

Découvrez tous les podcasts de LA CROIX :

« L’Envers du récit », « C’est ça l’Amérique », « Croire, le podcast de l’aventure spirituelle »


PODCAST LA CROIX - Juillet 2025



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Enquête d'Orient, sur les routes du christianisme, une série documentaire proposée par Lacroix. Épisode 1, la Turquie et la naissance d'une quête. Quelle magie opère sur nous les mondes inconnus ? Les peuples lointains, disparus ou incompris, aux histoires et aux destins oubliés, aux trésors cachés, aux secrets bien gardés. Les chrétiens d'Orient appartiennent à ces mondes, le berceau de toute une civilisation sortie de l'ombre il y a 2000 ans, ou plutôt sortie du soleil, orientale, mésopotamien, entre la Turquie, l'Irak et la Syrie, où vécurent il y a deux millénaires les Araméens, les Grecs et les Arméniens. les tout premiers chrétiens de l'histoire. Aujourd'hui encore, leurs descendants vivent et habitent les terres, les églises et les villages de ces régions. Ils perpétuent les rites et les traditions de l'origine. Mais dans les temps modernes, leur survie n'est plus assurée. La peur de disparaître plane sur la communauté des chrétiens d'Orient. Tout un monde qui ne tient qu'à un fil pourrait un jour disparaître comme l'Atlantide. Qui sont donc ces chrétiens d'Orient ? Quelle est leur histoire ? Quel est leur destin ?

  • Speaker #1

    Dans le monastère du Safran, près de Mardin, en Turquie. Alors que nous visitons la crypte des patriarches, un vieux moine m'explique la tradition d'enterrer les défunts en position assise. Cette coutume remonte à l'époque des rois assyriens, il y a plus de 3000 ans. A l'entrée des tombeaux, il n'est pas rare de ramasser au ras du sol des bouts de chandelles consumées. Et là, l'émotion me submerge. Comment est-il possible de laisser partir tous ces trésors, de laisser l'oubli s'installer, plus que jamais faisons entendre le cri de désespoir de ces chrétiens, au moment où les attaques contre eux redoublent d'intensité, à seulement quelques kilomètres d'ici, sur le mont Islo, près de la frontière syrienne, le sentiment de tranquillité que l'on ressent dans ces espaces est désormais sans égal. Un retour au désert, un horizon de cendres.

  • Speaker #0

    Ce cri du cœur, c'est le cri de Sébastien de Courtois, écrivain et voyageur. Un cri qu'il exprimait en 2014, à l'heure sombre, où Daesh, en Irak, assassinait les chrétiens d'Orient et détruisait leurs musées, manuscrits et monastères. Sébastien de Courtois a dédié sa vie aux chrétiens d'Orient, témoignant de leur culture et de leur disparition progressive. Une quête qu'il mène encore aujourd'hui sur le terrain universitaire, mais aussi par les voyages et l'écriture. Une longue aventure qui commença en Turquie, au pied du Bosphore, dans la légendaire Istanbul.

  • Speaker #2

    L'enquête sur les chrétiens d'Orient, elle démarre à... à Istanbul, elle démarre en fait à Byzance ou à Constantinople.

  • Speaker #0

    Gilles Kepel, essayiste, politologue et historien.

  • Speaker #2

    Elle rappelle que Istanbul vient de l'expression grecque « istin polin » , c'est-à-dire « vers la ville » , puisqu'on disait « je vais vers la ville » . Donc c'est là qu'on va et c'est là d'où l'on part. Car tout le monde y allait et c'était même dans le nom, dans l'origine du nom, il y a ce départ et cette arrivée d'une itinérance.

  • Speaker #3

    C'est une ville magique qui parle d'histoire tout de suite.

  • Speaker #0

    Alain Desremeaux, chercheur au CNRS, spécialiste des mondes syriacs.

  • Speaker #3

    C'est une ville moderne, c'est vrai ? C'est une ville avec une pauvreté ancienne qui est prégnante, qui reste. Et donc c'est une atmosphère très active. En fait, c'est un monde où on respire à la fois le passé et le présent.

  • Speaker #4

    Istanbul, c'est un double sas, c'est une double porte. Istanbul, c'est un Orient-Occident.

  • Speaker #0

    Jean-François Colosimo, éditeur et essayiste.

  • Speaker #4

    Istanbul, en fait, est véritablement installé à l'articulation entre l'Occident, l'Orient, l'Europe, l'Asie. Et en fait, cette ville, qui est une ville totalement tourbillante, je dirais, agglomère autour d'elle tous ces ailleurs, mais des ailleurs qui, pour nous, qui venons par exemple de France sont des ailleurs tout à fait je dirais compréhensibles, acceptables, vivables et beaucoup plus que ça encore enthousiasmants.

  • Speaker #1

    Lorsque j'arrivais à Istanbul, la ville me semblait immortelle.

  • Speaker #0

    Extrait teinté à Istanbul, ouvrage de Sébastien de Courtois, de 2014.

  • Speaker #1

    Une découverte pour moi, celle de voir des mosquées couvertes de neige et les flots déchaînés du Bosphore. Je m'étais arrêté dans la côte de Galata, qui monte depuis le port de Caracueil, en succession de marches épuisantes vers la tour génoise, et en me retournant dans cette côte... J'étais ébloui par la lumière de l'hiver. Que penser de cet instant magique, où je compris à la seconde même que je pouvais appartenir à ces lieux ? Les façades noires, les gueules renfermées, le halo des cigarettes, les fils sur les trottoirs les jours de superloto, l'attente devant les arrêts de Dolmousse, l'été brûlant et ce langage incompréhensible.

  • Speaker #5

    Te Ausha, katipoui koudanou yanou, gâzleri mahmou. Kati Bini Mbem, Kati Binen, Nekarashim

  • Speaker #6

    Istanbul, c'est les quartiers très différents les uns des autres.

  • Speaker #0

    Jean Lebrun, journaliste et historien. Les juifs,

  • Speaker #6

    les chrétiens, les arméniens ont gardé ou ont longtemps gardé leur quartier. Nous, loin, il y a le quartier le plus... islamisés avec le long de la colline sur les chemins montants les femmes poêlées et leurs époux sérieux il y a les souvenirs de l'Istanbul occidentalisé du XIXe siècle, les maisons qui donnent sur l'eau, les maisons qui surplombent, souvent en bois, le fleuve, les maisons le long du Bosphore qui tremblent de tous leurs membres, au passage des très très très gros bateaux qui franchissent les détroits et qui de temps en temps se fichent tout droit dans les maisons. Donc c'est ça, Istanbul, c'est un continuum entre des architectures différentes, et qui témoignent d'un cosmopolitisme, d'un mélange des styles. Voilà, c'est ça qui est assez fascinant à Istanbul, que j'appelle Constantinople pour ma part.

  • Speaker #0

    Istanbul, Constantinople, Byzance. Des siècles de mémoire sont déposés dans cette immense cité, aux trois noms éternels. à la croisée de l'Occident et de l'Orient. À l'ouest s'ouvre l'Europe, à l'est l'Asie. Ici, sur le détroit du Bosphore, se croisent les communautés turcs, grecs, arméniens, russes, iraniens, juifs, chrétiens, musulmans. Les bateaux naviguent entre les trois rives, la Corne d'Or, la rive latine et la rive asiatique. Cette cité grandiose, aux identités multiples, fut autrefois le bastion du christianisme.

  • Speaker #3

    On est dans un monde moderne qui assume un héritage ottoman et le décor est profondément ottoman avec un style qui est, disons-le, sidérant, qui est génial. Nous sommes dans la capitale de l'Empire romain d'Orient. En fait, c'est l'Empire romain d'Orient qui a été fondé en 330 par Constantin. L'Empire romain d'Orient... qui s'est bâti en se christianisant, est là tout entier. Il a été, évidemment, intégré à l'intérieur du monde ottoman. Mais il reste profondément présent dans ses vestiges.

  • Speaker #4

    Il n'y a pas d'Istanbul sans Constantinople, et il n'y a pas de Constantinople sans christianisme. Alors, de ce point de vue-là, évidemment, on va voir la mosquée bleue qui est à côté de Sainte-Sophie. Puis on va dire, ah, quel univers de mosquée ! Oui. La mosquée bleue, elle est bâtie par Sinan, qui est un grand architecte ottoman, lequel, en fait, a été volé, comme tous les janissaires, à une famille chrétienne. Et son espoir, c'est de copier Sainte-Sophie, même si la mosquée bleue copie très imparfaitement le miracle architectural qu'est Sainte-Sophie. En fait, vous voyez, le type de mosquée turque, en fait, c'est l'église byzantine, simplement qui est islamisée.

  • Speaker #1

    Il existe une autre manière de découvrir les églises du vieux Byzance, celles qui sont devenues des petites mosquées de quartier, au cours des siècles, et qui ne figurent pas sur les guides officiels.

  • Speaker #0

    Un thé à Istanbul, 2014.

  • Speaker #1

    À côté de Sainte-Sophie qui attire toute la lumière, ces sanctuaires plus modestes, couvents et paroisses, illustrent une autre richesse de Constantinople. La conversion de ces églises ne s'est pas faite brutalement. Le processus s'est étalé sur des siècles. Les bâtiments abandonnés ne le sont pas restés longtemps. Il s'agit d'une autre forme de migration, une sorte de métempsychose de la bière. Car changer de dieu, réserve aussi.

  • Speaker #0

    Dans ce décor turc, le passé chrétien remonte à la surface et se révèle dans les plis du décor et de l'architecture. Un passé qui dort, comme un secret, dans les détails de Constantinople.

  • Speaker #6

    Je sens le passé chrétien dans beaucoup d'endroits, à Constantinople, là où est le tombeau des sultans, je sens le passé chrétien à Sainte-Sophie, dans le pavement de Sainte-Sophie. avec le même souci d'universalité dans ce pavement à l'époque chrétienne et à l'époque ottomane. Et puis je sens la présence chrétienne dans le quartier du Fanart, dans le quartier du Patriarcat, avec les maisons des... grands notables qui jouent un rôle très important dans la définition de la politique du patriarcat, et qui sont un peu à l'abandon alentour. Moi ça m'émeut d'ailleurs le siège du patriarcat, un peu délaissé, un peu oublié, un peu délabré. Donc la présence, on sent qu'elle est fragile, on sent qu'elle est menacée, enfin on sent qu'elle va être maintenue, mais dans un état d'infériorité, dans un état de minorité, dans un état de décrépitude, même parfois volontaire. de la part du pouvoir.

  • Speaker #1

    Toutes ces églises se trouvent dans la vieille ville, c'est-à-dire le vaste périmètre historique compris entre les murs anciens de Constantinople et, disons, Sainte-Sophie à l'est. Dans le quartier de Lac-Duc-de-Valence, la mosquée de Calenderane était peut-être l'église de la Cataleptos. La mosquée de Mola Gurani, dans le même quartier de Vefa, l'ancienne église de Saint Théodore. Près de l'Aleli, la mosquée de Messie Ali Pacha et l'ancienne chapelle du couvent Mirelion. La mosquée de Kodja Mustapha Pacha est à l'origine une structure byzantine. Il faut l'œil avisé du chercheur pour les dénicher dans les ruelles de la 7e colline d'Istanbul. Que d'église me direz-vous ? Il faut chercher un peu, ne pas avoir peur, demander son chemin au gamin et se fondre, se perdre un peu, revenir sur ses pas. C'est pour moi une autre manière de voyager, remonter le cours de l'histoire et voir ce que le fleuve a laissé.

  • Speaker #0

    En chemin sur ces traces chrétiennes, on se laisse porter par le mystère d'un passé lointain, celui de ces anciens chrétiens orientaux. Mais où sont-ils aujourd'hui ? Existe-t-il encore ? Et si l'enquête devait démarrer ailleurs ? Et s'il fallait porter le regard encore plus loin, plus à l'Est ?

  • Speaker #3

    Lorsque l'on... qui est Istanbul, vers l'Orient, qu'on longe toute la rive méditerranéenne. On va tomber sur les villes impériales et villes provinciales de l'Empire romain d'Orient chrétien. Et si on va jusqu'à l'Est, on va tomber jusqu'à son extrémité. Son extrémité, le Tour Abidine, qui est un lieu chrétien par excellence, à la frontière du monde perse, entre l'Empire romain et la Perse.

  • Speaker #0

    À cet instant, le tour Abdin fait son apparition, un nom syriac désignant la région du sud-est de la Turquie à la frontière de la Syrie et de l'Irak, une région montagneuse, à l'est d'Istanbul, aux confins de l'Anatolie, considérée comme le bastion du christianisme oriental. Et Sébastien de Courtois ne cesse d'y penser. Il sent comme un appel venu de ses déserts mythologiques. Un matin, la décision est prise. Il fait son sac, quitte Istanbul et part à la rencontre des mystères du Tour Abidine. Enquête d'Orient sur les routes du christianisme Une série documentaire d'Ulis Manes et de David Federman proposée par La Croix, avec la participation de Gilles Kepel, Alain Desremeaux, Jean-François Colosimo et Jean Lebrun. Les extraits des ouvrages de Sébastien de Courtois sont interprétés par Pablo Poli. A noter l'interprétation de la chanson traditionnelle turque « Uskudara Gideriken » par Noemi Weisfeld. Enquête et scénario, Ulis Manes et David Federman. Narration Ulysse Manès, suivi de production et du partenariat à La Croix, Célestine Albert-Steward, Sandrine Verdelan et Laurence Chabazon. Réalisation et générique original David Federman.

Description

Dans la dixième saison du podcast Place des religions, nous partons sur les traces des chrétiens d’Orient pour comprendre leur histoire. Une quête qui révèle bien des enjeux contemporains : celui de la survie des minorités culturelles en Orient, celui d’un héritage commun byzantin et ottoman, de luttes fratricides, et celui des grands exils et des rêves de retour.


À travers l’odyssée des chrétiens d’Orient, de massacres en résistances, cette série radiophonique de cinq épisodes nous invite à partir sur les routes : Istanbul, la région Tur Abdin, la Chine, l’Éthiopie, jusqu’à l’île de Chypre.


L’écrivain, historien, voyageur et homme de radio Sébastien de Courtois s’est proposé d’être le guide littéraire pour cette traversée. Ses textes sont interprétés par l’acteur Pablo Pauly.

Enfin, la série s’appuie sur la parole de nombreux spécialistes du sujet : Jean-François Colosimo, Gilles Kepel, Jean Lebrun, Alain Desreumaux, Bertrand Hirsch et Noël Quidu.


Un podcast qui touchera tous ceux qui cherchent à comprendre les racines du monde dans lequel ils vivent, qui croient à la force des récits et à la beauté de l’écoute. Une parole habitée, une mémoire vivante, un regard à la fois sensible et rigoureux pour rappeler que toute minorité porte une part d’universel.



Une série podcast documentaire d’Ulysse Manhes et David Federmann, proposée par La Croix.


Épisode 1 :

À Istanbul, ancienne Byzance, Sébastien de Courtois part sur les traces du christianisme byzantin. Entre églises transformées en mosquées et mémoire effacée, il explore l’héritage chrétien oriental encore présent dans les murs de la ville. Avec Gilles Kepel, Alain Desreumaux, Jean-François Colosimo, et Jean Lebrun. Lectures : Pablo Pauly. Chant : Noëmi Waysfeld.



CRÉDITS – Auteurs et réalisation : David Federmann et Ulysse Manhes. Textes : Sébastien de Courtois. Lectures : Pablo Pauly. Chants : Noëmi Waysfeld. Avec Jean-François Colosimo, Gilles Kepel, Jean Lebrun, Alain Desreumaux, Bertrand Hirsch et Noël Quidu. À La Croix – Chargée de production : Célestine Albert-Steward. Communication : Audrey Campagne et Sandrine Verdelhan.


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Découvrez tous les podcasts de LA CROIX :

« L’Envers du récit », « C’est ça l’Amérique », « Croire, le podcast de l’aventure spirituelle »


PODCAST LA CROIX - Juillet 2025



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Enquête d'Orient, sur les routes du christianisme, une série documentaire proposée par Lacroix. Épisode 1, la Turquie et la naissance d'une quête. Quelle magie opère sur nous les mondes inconnus ? Les peuples lointains, disparus ou incompris, aux histoires et aux destins oubliés, aux trésors cachés, aux secrets bien gardés. Les chrétiens d'Orient appartiennent à ces mondes, le berceau de toute une civilisation sortie de l'ombre il y a 2000 ans, ou plutôt sortie du soleil, orientale, mésopotamien, entre la Turquie, l'Irak et la Syrie, où vécurent il y a deux millénaires les Araméens, les Grecs et les Arméniens. les tout premiers chrétiens de l'histoire. Aujourd'hui encore, leurs descendants vivent et habitent les terres, les églises et les villages de ces régions. Ils perpétuent les rites et les traditions de l'origine. Mais dans les temps modernes, leur survie n'est plus assurée. La peur de disparaître plane sur la communauté des chrétiens d'Orient. Tout un monde qui ne tient qu'à un fil pourrait un jour disparaître comme l'Atlantide. Qui sont donc ces chrétiens d'Orient ? Quelle est leur histoire ? Quel est leur destin ?

  • Speaker #1

    Dans le monastère du Safran, près de Mardin, en Turquie. Alors que nous visitons la crypte des patriarches, un vieux moine m'explique la tradition d'enterrer les défunts en position assise. Cette coutume remonte à l'époque des rois assyriens, il y a plus de 3000 ans. A l'entrée des tombeaux, il n'est pas rare de ramasser au ras du sol des bouts de chandelles consumées. Et là, l'émotion me submerge. Comment est-il possible de laisser partir tous ces trésors, de laisser l'oubli s'installer, plus que jamais faisons entendre le cri de désespoir de ces chrétiens, au moment où les attaques contre eux redoublent d'intensité, à seulement quelques kilomètres d'ici, sur le mont Islo, près de la frontière syrienne, le sentiment de tranquillité que l'on ressent dans ces espaces est désormais sans égal. Un retour au désert, un horizon de cendres.

  • Speaker #0

    Ce cri du cœur, c'est le cri de Sébastien de Courtois, écrivain et voyageur. Un cri qu'il exprimait en 2014, à l'heure sombre, où Daesh, en Irak, assassinait les chrétiens d'Orient et détruisait leurs musées, manuscrits et monastères. Sébastien de Courtois a dédié sa vie aux chrétiens d'Orient, témoignant de leur culture et de leur disparition progressive. Une quête qu'il mène encore aujourd'hui sur le terrain universitaire, mais aussi par les voyages et l'écriture. Une longue aventure qui commença en Turquie, au pied du Bosphore, dans la légendaire Istanbul.

  • Speaker #2

    L'enquête sur les chrétiens d'Orient, elle démarre à... à Istanbul, elle démarre en fait à Byzance ou à Constantinople.

  • Speaker #0

    Gilles Kepel, essayiste, politologue et historien.

  • Speaker #2

    Elle rappelle que Istanbul vient de l'expression grecque « istin polin » , c'est-à-dire « vers la ville » , puisqu'on disait « je vais vers la ville » . Donc c'est là qu'on va et c'est là d'où l'on part. Car tout le monde y allait et c'était même dans le nom, dans l'origine du nom, il y a ce départ et cette arrivée d'une itinérance.

  • Speaker #3

    C'est une ville magique qui parle d'histoire tout de suite.

  • Speaker #0

    Alain Desremeaux, chercheur au CNRS, spécialiste des mondes syriacs.

  • Speaker #3

    C'est une ville moderne, c'est vrai ? C'est une ville avec une pauvreté ancienne qui est prégnante, qui reste. Et donc c'est une atmosphère très active. En fait, c'est un monde où on respire à la fois le passé et le présent.

  • Speaker #4

    Istanbul, c'est un double sas, c'est une double porte. Istanbul, c'est un Orient-Occident.

  • Speaker #0

    Jean-François Colosimo, éditeur et essayiste.

  • Speaker #4

    Istanbul, en fait, est véritablement installé à l'articulation entre l'Occident, l'Orient, l'Europe, l'Asie. Et en fait, cette ville, qui est une ville totalement tourbillante, je dirais, agglomère autour d'elle tous ces ailleurs, mais des ailleurs qui, pour nous, qui venons par exemple de France sont des ailleurs tout à fait je dirais compréhensibles, acceptables, vivables et beaucoup plus que ça encore enthousiasmants.

  • Speaker #1

    Lorsque j'arrivais à Istanbul, la ville me semblait immortelle.

  • Speaker #0

    Extrait teinté à Istanbul, ouvrage de Sébastien de Courtois, de 2014.

  • Speaker #1

    Une découverte pour moi, celle de voir des mosquées couvertes de neige et les flots déchaînés du Bosphore. Je m'étais arrêté dans la côte de Galata, qui monte depuis le port de Caracueil, en succession de marches épuisantes vers la tour génoise, et en me retournant dans cette côte... J'étais ébloui par la lumière de l'hiver. Que penser de cet instant magique, où je compris à la seconde même que je pouvais appartenir à ces lieux ? Les façades noires, les gueules renfermées, le halo des cigarettes, les fils sur les trottoirs les jours de superloto, l'attente devant les arrêts de Dolmousse, l'été brûlant et ce langage incompréhensible.

  • Speaker #5

    Te Ausha, katipoui koudanou yanou, gâzleri mahmou. Kati Bini Mbem, Kati Binen, Nekarashim

  • Speaker #6

    Istanbul, c'est les quartiers très différents les uns des autres.

  • Speaker #0

    Jean Lebrun, journaliste et historien. Les juifs,

  • Speaker #6

    les chrétiens, les arméniens ont gardé ou ont longtemps gardé leur quartier. Nous, loin, il y a le quartier le plus... islamisés avec le long de la colline sur les chemins montants les femmes poêlées et leurs époux sérieux il y a les souvenirs de l'Istanbul occidentalisé du XIXe siècle, les maisons qui donnent sur l'eau, les maisons qui surplombent, souvent en bois, le fleuve, les maisons le long du Bosphore qui tremblent de tous leurs membres, au passage des très très très gros bateaux qui franchissent les détroits et qui de temps en temps se fichent tout droit dans les maisons. Donc c'est ça, Istanbul, c'est un continuum entre des architectures différentes, et qui témoignent d'un cosmopolitisme, d'un mélange des styles. Voilà, c'est ça qui est assez fascinant à Istanbul, que j'appelle Constantinople pour ma part.

  • Speaker #0

    Istanbul, Constantinople, Byzance. Des siècles de mémoire sont déposés dans cette immense cité, aux trois noms éternels. à la croisée de l'Occident et de l'Orient. À l'ouest s'ouvre l'Europe, à l'est l'Asie. Ici, sur le détroit du Bosphore, se croisent les communautés turcs, grecs, arméniens, russes, iraniens, juifs, chrétiens, musulmans. Les bateaux naviguent entre les trois rives, la Corne d'Or, la rive latine et la rive asiatique. Cette cité grandiose, aux identités multiples, fut autrefois le bastion du christianisme.

  • Speaker #3

    On est dans un monde moderne qui assume un héritage ottoman et le décor est profondément ottoman avec un style qui est, disons-le, sidérant, qui est génial. Nous sommes dans la capitale de l'Empire romain d'Orient. En fait, c'est l'Empire romain d'Orient qui a été fondé en 330 par Constantin. L'Empire romain d'Orient... qui s'est bâti en se christianisant, est là tout entier. Il a été, évidemment, intégré à l'intérieur du monde ottoman. Mais il reste profondément présent dans ses vestiges.

  • Speaker #4

    Il n'y a pas d'Istanbul sans Constantinople, et il n'y a pas de Constantinople sans christianisme. Alors, de ce point de vue-là, évidemment, on va voir la mosquée bleue qui est à côté de Sainte-Sophie. Puis on va dire, ah, quel univers de mosquée ! Oui. La mosquée bleue, elle est bâtie par Sinan, qui est un grand architecte ottoman, lequel, en fait, a été volé, comme tous les janissaires, à une famille chrétienne. Et son espoir, c'est de copier Sainte-Sophie, même si la mosquée bleue copie très imparfaitement le miracle architectural qu'est Sainte-Sophie. En fait, vous voyez, le type de mosquée turque, en fait, c'est l'église byzantine, simplement qui est islamisée.

  • Speaker #1

    Il existe une autre manière de découvrir les églises du vieux Byzance, celles qui sont devenues des petites mosquées de quartier, au cours des siècles, et qui ne figurent pas sur les guides officiels.

  • Speaker #0

    Un thé à Istanbul, 2014.

  • Speaker #1

    À côté de Sainte-Sophie qui attire toute la lumière, ces sanctuaires plus modestes, couvents et paroisses, illustrent une autre richesse de Constantinople. La conversion de ces églises ne s'est pas faite brutalement. Le processus s'est étalé sur des siècles. Les bâtiments abandonnés ne le sont pas restés longtemps. Il s'agit d'une autre forme de migration, une sorte de métempsychose de la bière. Car changer de dieu, réserve aussi.

  • Speaker #0

    Dans ce décor turc, le passé chrétien remonte à la surface et se révèle dans les plis du décor et de l'architecture. Un passé qui dort, comme un secret, dans les détails de Constantinople.

  • Speaker #6

    Je sens le passé chrétien dans beaucoup d'endroits, à Constantinople, là où est le tombeau des sultans, je sens le passé chrétien à Sainte-Sophie, dans le pavement de Sainte-Sophie. avec le même souci d'universalité dans ce pavement à l'époque chrétienne et à l'époque ottomane. Et puis je sens la présence chrétienne dans le quartier du Fanart, dans le quartier du Patriarcat, avec les maisons des... grands notables qui jouent un rôle très important dans la définition de la politique du patriarcat, et qui sont un peu à l'abandon alentour. Moi ça m'émeut d'ailleurs le siège du patriarcat, un peu délaissé, un peu oublié, un peu délabré. Donc la présence, on sent qu'elle est fragile, on sent qu'elle est menacée, enfin on sent qu'elle va être maintenue, mais dans un état d'infériorité, dans un état de minorité, dans un état de décrépitude, même parfois volontaire. de la part du pouvoir.

  • Speaker #1

    Toutes ces églises se trouvent dans la vieille ville, c'est-à-dire le vaste périmètre historique compris entre les murs anciens de Constantinople et, disons, Sainte-Sophie à l'est. Dans le quartier de Lac-Duc-de-Valence, la mosquée de Calenderane était peut-être l'église de la Cataleptos. La mosquée de Mola Gurani, dans le même quartier de Vefa, l'ancienne église de Saint Théodore. Près de l'Aleli, la mosquée de Messie Ali Pacha et l'ancienne chapelle du couvent Mirelion. La mosquée de Kodja Mustapha Pacha est à l'origine une structure byzantine. Il faut l'œil avisé du chercheur pour les dénicher dans les ruelles de la 7e colline d'Istanbul. Que d'église me direz-vous ? Il faut chercher un peu, ne pas avoir peur, demander son chemin au gamin et se fondre, se perdre un peu, revenir sur ses pas. C'est pour moi une autre manière de voyager, remonter le cours de l'histoire et voir ce que le fleuve a laissé.

  • Speaker #0

    En chemin sur ces traces chrétiennes, on se laisse porter par le mystère d'un passé lointain, celui de ces anciens chrétiens orientaux. Mais où sont-ils aujourd'hui ? Existe-t-il encore ? Et si l'enquête devait démarrer ailleurs ? Et s'il fallait porter le regard encore plus loin, plus à l'Est ?

  • Speaker #3

    Lorsque l'on... qui est Istanbul, vers l'Orient, qu'on longe toute la rive méditerranéenne. On va tomber sur les villes impériales et villes provinciales de l'Empire romain d'Orient chrétien. Et si on va jusqu'à l'Est, on va tomber jusqu'à son extrémité. Son extrémité, le Tour Abidine, qui est un lieu chrétien par excellence, à la frontière du monde perse, entre l'Empire romain et la Perse.

  • Speaker #0

    À cet instant, le tour Abdin fait son apparition, un nom syriac désignant la région du sud-est de la Turquie à la frontière de la Syrie et de l'Irak, une région montagneuse, à l'est d'Istanbul, aux confins de l'Anatolie, considérée comme le bastion du christianisme oriental. Et Sébastien de Courtois ne cesse d'y penser. Il sent comme un appel venu de ses déserts mythologiques. Un matin, la décision est prise. Il fait son sac, quitte Istanbul et part à la rencontre des mystères du Tour Abidine. Enquête d'Orient sur les routes du christianisme Une série documentaire d'Ulis Manes et de David Federman proposée par La Croix, avec la participation de Gilles Kepel, Alain Desremeaux, Jean-François Colosimo et Jean Lebrun. Les extraits des ouvrages de Sébastien de Courtois sont interprétés par Pablo Poli. A noter l'interprétation de la chanson traditionnelle turque « Uskudara Gideriken » par Noemi Weisfeld. Enquête et scénario, Ulis Manes et David Federman. Narration Ulysse Manès, suivi de production et du partenariat à La Croix, Célestine Albert-Steward, Sandrine Verdelan et Laurence Chabazon. Réalisation et générique original David Federman.

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