- Speaker #0
Bienvenue dans le podcast de La Terre à l'Assiette.
- Christian
Bonjour et bienvenue à toutes et à tous dans ce nouvel épisode du podcast de La Terre à l'Assiette. Une histoire d'amour, celle de ses parents. Improbable, à l'autre bout de la Terre. Des rebondissements à couper le souffle, mais pas l'appétit. Des valeurs humaines qui vous touchent en plein cœur. Non, je ne suis pas en train de vous faire le résumé de la dernière série à succès de Netflix. bien que tous les ingrédients y soient réunis, mais bien du parcours étonnant d'Omar Abodil. Ce restaurateur franco-libanais est le propriétaire du restaurant-hôtel du Donjon, domaine Saint-Clair à Etretat, un établissement qu'il a repris il y a 20 ans, reconnu par le Collège Culinaire de France depuis 2015. Aujourd'hui, il va nous raconter comment son périple personnel, familial et culinaire l'a conduit à traverser la moitié du monde. des terres rouges arides d'Australie jusqu'aux plaines beaucoup plus verdoyantes de sa Normandie d'adoption. Il nous parlera aussi de son combat pour une autre restauration artisanale dans laquelle il s'est engagé corps et âme, mais aussi de cette terre du Liban, un pays où il n'a pas grandi, mais qui lui tient particulièrement à cœur.
- Speaker #0
Une émission présentée par Christian Regouby
- Christian
Bonjour Omar.
- Omar
Bonjour Christian.
- Christian
Alors, raconte-nous un petit peu cette source qui est à la base de toute ton identité d'artisan militant de la qualité que tu incarnes magnifiquement au collège.
- Omar
Bah écoute, j'ai pas... je commence toujours à dire que je n'ai pas de mérite, parce que j'ai un père libanais, une mère française, un couple formidable qui m'a donné l'amour de ce métier. Vous m'excuserez d'avance, mais quand j'étais gamin, de l'âge de 6 ans à 18 ans, j'étais au Pays-Bas. pensionnat et j'avais toujours dit jamais je ferais ce métier de merde. Et en fait finalement je crois que j'ai un peu raté ma promesse. Mais c'est un papa et une maman qui se sont rencontrés en fait dans un environnement assez incroyable en Australie. Le premier partait en fait du Liban dans un cargo de 5000 personnes et puis en arrivant à Sydney, il se retrouve à faire trois boulots. Le matin il était agent à la Comptas et à la Middle Easter Line parce qu'en fait il faisait technicien là-dessus. Après le jour où la fin de journée, il était barman, et la nuit, il était postier, où il triait le courrier. Et évidemment, il dormait, mais il donnait la moitié de son salaire à son collègue. Et puis ma mère, qui, elle, est partie dans les années... En fait, elle avait 17-18 ans en Nouvelle-Calédonie. Après, elle part en Australie. Elle rencontre mon papa. Après ce choc entre une blonde et un persan, c'était un peu la fusion incroyable. Et maman a été, je le dis assez souvent, la première féministe en Australie. Australie, c'est une société très machiste et elle a été la première à avoir cette autorisation d'alcool pour vendre de l'alcool dans un restaurant. Et le premier restaurant français qui a été construit à Sydney à l'époque. Et d'autres ont suivi, évidemment, derrière. Mais c'est en fait, c'est toute cette persévérance. Et puis, c'est aussi la conviction de savoir d'où je viens. d'un milieu modeste au départ, mais en fait qu'ils ont su, eux, construire. Et je tente, je tente, des fois je me plante, mais je tente d'être à la hauteur de ce que ils m'ont légué.
- Christian
Ce qui était extraordinaire dans tout ce que tu dis, c'est que... ça incarne complètement ce que vous développez au Collège Culinaire de France, c'est-à-dire le fait que d'où l'on vient, d'où l'on parle, ce qui est inscrit dans votre identité profonde se traduit complètement dans le métier. C'est vraiment le métier que vous appelez d'artisan militant de la qualité, c'est un métier qui incarne l'identité profonde d'une personne. et d'un territoire.
- Omar
Je partage totalement. Je pense qu'il faut qu'au-delà de l'incarnation, c'est de le vivre, c'est de l'habiter, c'est de l'assumer. Et pendant très longtemps, quand j'ai repris l'affaire, familial, j'étais un peu opposé à la notion familiale. J'étais en fait... Vous savez, il fallait faire grand, il fallait faire plus gros, plus fort, plus... Et finalement, je suis revenu en fait à mes erreurs de jeunesse, qui en fait ont peut-être conduit en fait à apprendre avec un chemin qui n'a pas été toujours droit, mais qui a été en fait un cheminement qui nous permet de nous inspirer en fait, et au moins d'en tirer les leçons. Et c'est surtout ça le plus important, c'est de t'en tirer les leçons et de savoir se remettre en cause, parce que finalement, la seule verticalité ou la seule vérité, c'est la vérité du miroir. Et à partir du moment où on se dit qu'on s'est planté, ce qui manque aujourd'hui dans notre société, c'est qu'on ne sait plus s'excuser, on ne sait plus dire pardon, on ne sait plus dire merci, on ne sait plus dire au revoir, on ne sait plus dire bonjour. Des choses simples de la vie, mais qui, en fait, finalement, font une société et une civilisation.
- Christian
En fait, tu dis quelque chose qui est... petit à petit, et c'est très inquiétant, en tout cas ça interpelle, qui est une perte d'identité. On a avec ça, après, un vide qui s'installe. Que le fait de cultiver, de nourrir son identité, avec les erreurs, comme tu dis, avec les échecs, c'est ce qui renforce et ce qui permet d'affirmer l'avenir.
- Omar
Alors, on parle souvent d'échecs et d'erreurs, parce que c'est en fait ce qui nous grandit, mais il y a aussi des réussites. Donc, après, il faut garder l'espoir. Donc, même si la perte d'identité est peut-être flagrante et forte, fortement... visible aujourd'hui, il ne faut pas perdre espoir, il faut maintenir en fait le cap.
- Christian
Alors tu l'as dit magnifiquement, je voudrais revenir à cette notion de territoire. Parce que si tu avais à définir ton territoire à travers notamment ce que tu fais en Normandie, ce que tu fais aussi par rapport au Liban, je trouve ça vraiment très très intéressant, et même la façon dont tu as abordé ta relation au Liban, notamment depuis la Covid et le changement de système de pensée par rapport à ça ?
- Omar
Pour revenir un peu à cette histoire-là, je pense que le territoire correspond à l'histoire que l'on écrit. Lorsque la Covid est arrivée, la première gifle, en général les politiques n'aiment pas trop qu'on dise ça, mais la première gifle a été le 14 mars où tout le monde oublie. Mais le 14 mars à 20h, il fallait qu'à minuit on ferme les restaurants. Alors moi, comme un bon vivant, le lendemain j'ai fait une grosse fête avec tous mes collaborateurs en la ville. les frigos donc c'était bien mais après le lundi matin grâce à guillaume gomez et stéphane mégenès en fait on s'est mis en fait à donner à manger en fait alors pas à manger mais en fait de donner des parenthèses heureuses tous les dimanches pour les équipes qui étaient autour de nous en fait pour les soignants les aides-soignants et puis après arrive les l'explosion du 4 août, qui est en fait la deuxième gifle. Et là, je décide que finalement, notre territoire, il n'est pas uniquement dans notre périmètre proche, mais en fait, il est aussi... On dit souvent au Liban qu'on porte le Liban en soi, et en fait, il nous accompagne tout le temps, mais malgré tout, il y avait le besoin d'emmener mes équipes au Liban pour qu'ils se rendent compte de la chance qu'eux pouvaient avoir en étant en France, et de se rendre et de se projeter. Ça ne veut pas dire que le Liban est mieux que la France, que la France est mieux que le Liban, c'était même pas ça le sujet, c'était uniquement d'arriver à se projeter... avec une sorte de vision, une sorte de perception en se disant où on se positionne dans ce territoire, où on se positionne dans l'espace. Et puis, finalement, on a aidé les Libanais, on a envoyé des conteneurs, on a emmené des équipes, on a fait le premier voyage avec 25 collaborateurs, le deuxième avec 35 collaborateurs, et puis, à force d'envoyer du poisson sans leur apprendre à pêcher, il y avait un petit souci. Donc, on a fait des terrains agricoles sur lesquels, maintenant, on sème, on cultive et on récolte des légumes pour la population au Liban. On a deux terrains, on va arriver au troisième terrain, donc c'est lourd, c'est dur, mais on est en train d'arriver un peu à notre mission. missions et à nos objectifs. On travaille entre autres sur la méthode de Jean-Martin Fortier sur le maraîchage, donc le maraîchage bio-intensif. Et puis, on est arrivé en fait à avoir un parallèle où on a ramené tout ça en France, où on travaille avec une association qui s'appelle Graines en main, qui permet de recréer de la verticalité pour les gens qui sont en échec social en France. Et en fait, on les a réintégrés dans notre potager au donjon, pour que finalement, on dise que ce que nous pouvons faire au Liban, on peut aussi le faire en France.
- Christian
C'est vraiment passionnant. Ça me permet d'aborder ce qu'on appelle nous Toc toc, qui est là ?
- Speaker #0
Toc toc, qui est là ?
- Christian
Je vais te poser des questions rapides. Si tu étais un animal ?
- Omar
Un loup.
- Christian
Si tu étais une saison ?
- Omar
L'automne.
- Christian
Un pays ?
- Omar
Le Liban.
- Christian
Si tu étais un mot ?
- Omar
Engagement.
- Christian
Un plat, je sais qu'il y a l'agneau...
- Omar
Ouais, alors moi, c'est plutôt le kibé naillé, parce que c'est la viande d'agneau cru, comme ça, avec du blé concassé. D'accord.
- Christian
Ta poisson favorite ?
- Omar
Négroli.
- Christian
Ah ! On partage ça tous les deux, là. Vous parlez beaucoup au collège de transparence, transparence dans la relation, transparence dans les produits. Pourquoi ? C'est quoi, en tant qu'artisan militant qualité, la transparence, ça sert à quoi et pourquoi on revendique la transparence ?
- Omar
Quand j'ai commencé mon potager en 2004, au Donjon, je l'ai fait sous l'impulsion et l'inspiration d'Alain Passard. À l'époque où les changements de la restauration dans les années 2000 avaient fait que radicalement, il fallait qu'on voit les choses différemment. Et pour moi, la notion de ce potager-là, je ne l'ai pas bien expliqué, mais c'était l'idée de temporalité. C'est d'expliquer que dans la transparence qu'on doit avoir aussi vis-à-vis du consommateur, c'est de dire que les choses prennent du temps. et que si on parle de transparence, c'est parler de temporalité, parler de produits, parler de producteurs et d'artisans avec qui nous travaillons, parler de nos travailleurs et de nos collaborateurs et les mettre en avant. Finalement, c'est une chaîne humaine, une chaîne environnementale qui fait la qualité de ce que l'on est en tant qu'entrepreneur. Après, je ne suis pas, je suis d'abord et avant tout restaurateur, peut-être plus des fois ambianceur mondain ou dans l'hospitalité, mais... Mais malgré tout, la profondeur, elle est pour moi importante et forcément, elle amène, pour qu'elle soit confirmée, il faut être transparent derrière.
- Christian
Par rapport à cette volonté-là, je sais qu'au Collège Culière de France, vous ne revendiquez pas d'être un label, mais plutôt une appellation, la défense d'une cause. Quelles sont les difficultés auxquelles on se heurte quand on a cette démarche-là ?
- Omar
La difficulté de l'humain. C'est en fait toujours les perceptions et les freins. C'est un peu la règle des freins au changement. Donc dès qu'on commence à changer quelque chose, ça ne plaît à personne. Donc c'est un combat permanent, c'est un engagement. Xavier Alberti l'a dit très bien à la dernière convention de Territorial, mais sans engagement rien ne commence, mais sans constance rien ne finit. Donc je pense que de toutes les manières c'est un travail continu, permanent, assidu. Il faut en être fier, il faut après le propager, il faut le diffuser en fait derrière. En étant là-dessus c'est plutôt une bonne chose après de tout faire. dans le système de labels, appellations. Pour moi, ce ne sont que des mots et ce n'est pas l'incarnation de ce que l'on a. Aujourd'hui, il faut juste assumer qu'on est collège féculaire de France. Il faut le faire savoir. Il faut que les consommateurs le comprennent. Et pour moi, mon combat, c'est d'arriver à ce que finalement une restauration durable, raisonnée, incarnée et responsable soit vraiment identifiée différemment de toute l'autre partie de la restauration qui est une nécessité, mais qui n'est pas un besoin.
- Christian
C'est une belle formule. En fait, on s'aperçoit que c'est une construction. Et avant tout, une construction de tous les jours, une construction humaine, avant toute chose.
- Omar
Je crois que c'est une co-construction. C'est permanent. Je vois difficilement le fait qu'on puisse construire tout seul. Moi, je ne construis pas mon entreprise seul. Si je n'ai pas mes collaborateurs à côté de moi, ça ne marche pas.
- Christian
On va y venir, c'est un point très important. Je te propose avant de passer à notre rubrique fromage ou dessert.
- Speaker #0
C'est fromage ou dessert ?
- Christian
Logique ou émotion ?
- Omar
Émotion.
- Christian
Travail ou vacances ?
- Omar
Travail.
- Christian
Pareil, vie personnelle ou vie professionnelle ?
- Omar
Professionnelle.
- Christian
Temps court ou temps long ?
- Omar
Temps long.
- Christian
Est-ce que t'aimerais renaître dans le passé ou dans le futur ?
- Omar
Passé. On se marrait mieux.
- Christian
Et tu te marres encore aujourd'hui quand même ?
- Omar
Je trouve qu'on se... Non, je m'emmerde. Ouais, c'est moins drôle.
- Christian
T'as une sacrée énergie pour t'emmerder.
- Omar
Mais après, on est contraints à des obligations qui sont beaucoup plus lourdes qu'elles n'étaient auparavant. Et donc, je trouve qu'on a perdu le sens de l'humain. On a perdu le sens, je disais tout à l'heure, de votre décor. C'est absolument incroyable. C'est top. C'est ce côté, en fait, on a perdu le sens du temps et c'est le dernier luxe qui nous reste.
- Christian
Ta cuisine étrangère préférée ?
- Omar
Libanaise.
- Christian
Libanaise, ok. Alors, on passe maintenant à la dernière partie. Comment est-ce que tu conçois, je sais que tu le développes beaucoup, tu en as parlé tout à l'heure, mais comment est-ce que tu conçois tes relations de coopération avec d'autres producteurs ou même avec d'autres assurants ? Parce que je sais que tu es très actif au sein du collège. Explique-nous un petit peu comment tu vois ça. vois ça.
- Omar
Écoute, la coopération qu'on doit avoir et la collaboration avec les producteurs et les artisans, c'est un travail continu encore une fois. En fait, malheureusement, c'est toujours un peu la notion de la fourmi, en fait. C'est un travail de besogneux. Moi, je suis un ouvrier. Je reste un ouvrier. Donc, en fait, l'idée, c'est de travailler et de parler avec des ouvriers. Alors, après, on peut donner des mots, de l'élégance autour, mais on reste des ouvriers, puisqu'on est des faiseurs. Et sans humains, on ne peut pas y arriver. Donc, évidemment, la problématique, c'est de trouver le bon producteur, le bon artisan, d'essayer de les faire travailler de manière régulière pour que finalement tout le monde s'y retrouve. Donc nous, en fait, économiquement, eux économiquement aussi. Mais c'est un travail permanent. Et en fait, c'est un peu l'avantage avec le collège, c'est d'avoir un peu cette source, ce vivier, cette bibliothèque, ce garde-manger, ce grenier formidable qui nous permet d'aller chercher directement un producteur et puis de s'en inspirer et d'arriver à travailler là-dessus. Après, sur les restaurateurs, c'est un combat qui est en fait aussi... Très difficile, parce qu'on est quand même dans une restauration très engagée, pour certains d'entre nous. Il faut maintenir forcément, parce que dans toutes ces belles paroles, il y a quand même des engagements financiers. Il y a un équilibre financier qui doit être maintenu derrière. La fondation de mon groupe est basée sur l'humain et l'environnement. Le profit est quand même l'élément final, parce que finalement, on ne peut pas jouer dans un écosystème en ne donnant que de la philosophie. Donc, les restaurateurs, on essaye de les amener, de les accompagner, de s'en inspirer, de s'auto-inspirer, parce que finalement, il y a quand même des gens qui font des choses formidables en France. Et on a un territoire exceptionnel. On a un laboratoire permanent. On a un laboratoire et des recherches-développements qui sont extraordinairement... pertinentes en fonction des régions, et ça c'est génial.
- Christian
Tu décris toutes les vertus, mais difficiles à mettre en œuvre, de coopération par rapport à de la compétition qui, elle, isole.
- Omar
La coopération, c'est un élément fondateur et solide, mais après, c'est en effet la compétition derrière. En fait, on doit gérer nos affaires aussi après derrière.
- Christian
C'est-à-dire que, comment la coopération génère une économie rentable et profitable ? C'est ça l'enjeu ?
- Omar
Je pense que c'est le collectif qui le permet.
- Christian
C'est le collectif. On ne peut pas le faire tout seul. On est bien d'accord.
- Omar
Si en fait on était suffisamment pertinent, mais comme on le faisait auparavant, si on fait livrer en fait directement la totalité d'une marchandise pour plusieurs restaurateurs... qui achètent en commun pour en fait une valeur commune, ce serait plus simple. Mais c'est facile à dire.
- Christian
Il y a quelques expériences au sein du collège qui vont dans ce sens-là, et c'est prometteur par rapport justement... Et chaque cas est différent, on ne peut pas normer les choses.
- Omar
Et puis le sujet, c'est aussi, on a malheureusement des valeurs concentriques. Il y a les valeurs géographiques concentriques. Donc les valeurs qu'on retrouve à Paris, finalement, c'est beaucoup plus facile. Mais nous, en Normandie, on est un peu isolé. Quand je suis en Savoie, je suis un peu isolé. Donc en fait, finalement, c'est... d'arriver à construire, construire, construire et ne jamais lâcher.
- Christian
Quelle relation tu ressens ? Tu parles avec tes collaborateurs, donc tu as parlé aussi d'une certaine vision que tu as dans la manière de gérer tes collaborateurs, de les impliquer, de les faire co-construire, c'est ce que tu disais tout à l'heure. Est-ce que tu sens, au niveau des nouvelles générations, des aspirations différentes ou une façon d'aborder les choses différentes ?
- Omar
C'est quand même un peu la courbe du deuil. On est toujours entre la colère, l'acceptation et tout ce qui va autour. Donc évidemment, ça a été quand même très brutal. même pour moi, qui envie toujours de changer et de m'adapter en conséquence. Mais il faut savoir qu'on n'est plus dans la même génération qu'on a pu vivre à une certaine époque. Donc, il faut l'accepter. Maintenant, je l'ai accepté. Il faut qu'on adapte notre mode de management, notre mode de fonctionnement, et forcément écouter les aspirations des uns et des autres. Il ne faut pas chercher à essayer de les mettre dans une boîte qui était la mienne, qui est toujours la mienne aujourd'hui, mais qui ne me regarde que moi. Et après, c'est finalement...
- Christian
Et en ce sens, ils apportent quelque chose ? Ils t'apportent quelque chose ?
- Omar
Objectivement, non. Pas pour le moment. Je pense qu'on est encore dans une mutation très récente et je pense qu'on a perdu dans le bon sens. Le bon sens a été perdu.
- Christian
Ce qui est fondamental dans ce que tu dis, c'est qu'autant en termes techniques, il y a des choses qui se transmissent, mais autant en termes de savoir-être, il y a une expérience de vie du savoir-être qui, justement, on voit la dégradation. C'est là où c'est important de...
- Omar
Oui, savoir-être, c'est exactement ce que tu viens de dire. Ça prolonge le bon sens. Oui,
- Christian
c'est ça, c'est le bon sens.
- Omar
Je ne sais pas comment le dire autrement, mais ce qui est véritable, c'est que... On parlait tout à l'heure de la notion de la réglementation des choses, mais la réglementation n'est pas la solution d'une relation humaine. Ce n'est pas la construction d'une relation avec l'autre. c'est une technique qui peut être nécessaire à un certain moment mais qui n'est pas la réalité elle cache la réalité de ceux qui sont devant nous mais quand tu parles de bon sens,
- Christian
il me vient toujours à l'esprit cette notion de sens commun puisque c'est l'équivalent du bon sens, on disait le sens commun et la question à se poser c'est où est-ce qu'il y a du commun aujourd'hui ? où est-ce qu'on construit du commun ?
- Omar
on est complètement là-dessus j'ai trouvé une vidéo qui était assez intéressante et en fait le bon sens pour moi je l'ai résumé à la main à la main Je crois qu'à partir du moment où on est capable de pouvoir tendre la main ou mettre la main sur l'épaule d'un ami, ou uniquement d'utiliser sa main pour que finalement on ouvre un ascenseur pour laisser passer quelqu'un, tendre une main pour ramasser quelque chose par terre, tendre une main pour juste en fait... aider quelqu'un à se relever, c'est uniquement la main. Et je pense qu'on a perdu cette main.
- Christian
C'est génial ce que tu dis. Je me permettrais, parce qu'il m'a beaucoup marqué, de reprendre un mot de Michel Guérard, qui, même quelques semaines avant sa mort... malheureusement récente, me disait l'artisan, en fait, comme disait Paul Valéry, c'est la main qui est le prolongement de l'esprit. Et c'est tellement fort, c'est tellement vrai, c'est tellement simple et évident, c'est exactement ce que tu viens de dire. La main.
- Omar
Alors moi qui parle beaucoup avec les mains, là je suis resté très sage, je peux parler avec les mains.
- Christian
Je te propose maintenant d'ouvrir le pot de moutarde.
- Speaker #0
La moutarde me montonnait.
- Christian
Le pot de moutarde, c'est quand la moutarde te monte au nez, je te sais passionné par plein de choses. Un coup de gueule sur quelque chose qui te heurte dans notre environnement ou dans la société.
- Omar
Il y a des choses personnelles, mais que je n'aborderai pas là. Personnelles, enfin, plutôt géopolitiques. Non, ce qui me désole, c'est en fait le manque de politesse, d'élégance, de savoir-être. Ça me fatigue et ça me blesse. Ça me blesse et ça me blesse pour les autres. Je trouve que l'injustice, quel qu'elle soit, à quel niveau, me fait très mal. Et l'injustice, je crois que c'est un peu ça. Il faut être juste. Parce que transparent... c'est bien, mais il faut être juste.
- Christian
Il faut être juste, tout à fait. Écoute, je te remercie, merci de toutes ces participations. En toute confidence, si tu avais une adresse à nous recommander, un restaurant ou un producteur pour nos auditeurs et nos auditrices.
- Omar
Alors moi je suis un fan du filet de bœuf au poivre, donc j'adore le polbert. Louis-Paul Baer à Paris. Et puis, il faut venir chez nous, c'est bien aussi. Parce que Normandie, ça vous bouge.
- Christian
C'est un univers. Le donjon, c'est un univers à Etretat. C'est merveilleux. On est dans un autre monde.
- Omar
Et tu sais, en fait, on parlait de territoire tout à l'heure, mais t'imagines quand même que j'ai aussi maintenant un restaurant subsaharien africain au niveau du Racine à Etretat. Donc j'ai bousculé un peu les cauchemars, j'ai ramené du territoire africain à Etroda et ça les a décoiffés.
- Christian
C'est génial. On est vraiment dans la diversité et la mixité. Écoute, pour notre prochain épisode, nous recevrons un artisan exceptionnel avec qui, Omar, tu as au moins un point commun, c'est le goût du voyage. Lui, c'est un globetrotter de l'apiculture. Il viendra nous parler de sa ferme familiale et de ses enjeux en termes d'apiculture, qui on le sait est menacé par le dérèglement climatique. Un rendez-vous passionnant à ne pas manquer dans 15 jours. Merci Romain.
- Speaker #0
Vous venez de déguster un épisode de La Terre à la Tinte, le podcast qui vous donne envie de bien manger. Nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie. Si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef. et en vous abonnant. Vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous !