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De la terre à l'assiette - tous artisans du bien manger !

E14 - Julien Serri - Le chef serial entrepreneur en artisanat culinaire

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24min |18/04/2025
Play
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E14 - Julien Serri - Le chef serial entrepreneur en artisanat culinaire

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24min |18/04/2025
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Description

Entrez dans l’univers gourmand et créatif de Julien Serri, chef franco-italien, sacré vice-champion de France de pizza, et artisan militant de la qualité. Créateur des concepts Magnà et Baciato, Julien réinvente la Street Food italienne en mêlant respect du produit et innovation culinaire.

À travers cet épisode, il dévoile sa vision d’une cuisine qui ouvre l’esprit du public et valorise les producteurs locaux.

Avec passion, il aborde la transparence, le marketing éthique et sa volonté d’offrir le meilleur au plus grand nombre.
Préparez-vous à savourer une conversation inspirante, pleine de goût et de richesse humaine.


Le Collège Culinaire de France est une association fondée en 2011 à l'initiative de quinze grands chefs restaurateurs à l'instar d'Alain Ducasse, Joël Robuchon, Yannick Alléno, Paul Bocuse, Alain Dutournier, Gilles Goujon, Michel Guérard, Marc Haeberlin, Régis Marcon, Thierry Marx, Gérald Passedat, Laurent Petit, Anne-Sophie Pic, Guy Savoy et Pierre Troisgros. Le Collège Culinaire de France est la seule association, à ce jour, initiée par le plus grand rassemblement de chefs français reconnus et incontestés, qui s’emploie, concrètement, sur le terrain, à relier des Producteurs et Artisans de Qualité avec des Restaurants de Qualité de toutes catégories. Elle rassemble ceux qui œuvrent pour une vision d’avenir du métier, et fédère tous ceux qui s’engagent sur des synergies de valeurs et de pratiques partagées.


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Crédits

En cuisine :

Un foodcast mitonnée aux petits oignons par Suniwan

Illustration servie par Hugo Girard

Un épisode enregistré au Mojo dans le 17éme arrondissement


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans le podcast de La Terre à l'Assiette.

  • Christian

    Bonjour à toutes et à tous. Heureux de vous retrouver pour un nouvel épisode de notre podcast de La Terre à l'Assiette. Vous êtes de plus en plus nombreux à nous suivre et cela nous fait extrêmement plaisir. Et du plaisir, on va en prendre aujourd'hui avec notre invité qui, j'en suis sûr, va ravir tous les amoureux de la cuisine italienne et je sais qu'ils sont nombreux. Julien Serry est un chef franco-italien. expert en matière de pizza et de cuisine italienne. Reconnu par le Collège Cuisineur de France depuis 2022, Julien a été sacré vice-champion de France de la pizza. En 2019, il a fondé Bagga, un établissement qui était rue Notre-Dame-de-Lorette dans le 9e arrondissement. En 2023, Julien Seri a lancé Bacciato, un concept de street food italienne centré sur les panini et focaccia personnalisés. Comment fait-on pour être... au four, à pizza et au moulin. Quelle est la vision de son métier et la vision de son engagement pour le bien manger ? Et surtout, quelle équipe soutient-il lors des matchs France-Italie ? Attention, terrain sensible, mais ici, de la terre à l'assiette, on est transparent et on n'a peur de rien.

  • Speaker #0

    Une émission présentée par Christian Regouby.

  • Christian

    Bonjour, bonjour Julien.

  • Julien

    Buongiorno.

  • Christian

    Alors raconte-nous un petit peu la source de ton identité, c'est quoi ton projet à travers tout ce que tu fais, Dieu sait si tu es prolixe, quelles sont tes convictions profondes ?

  • Julien

    Moi ce qui me plaît dans mon métier, dans mon quotidien en fait, c'est surtout la transmission. Alors je le retrouve avec le collège sur les rapports que j'ai avec les producteurs mais aussi avec les clients. J'aime quand les clients sortent de... d'une expérience culinaire en ayant appris quelque chose.

  • Christian

    D'accord, donc cette notion de transmission, de transmettre ta passion en fait.

  • Julien

    Oui, et puis ma passion, et puis surtout la transmission du bon, du bien, parce que le bon va avec le bien.

  • Christian

    C'est vrai que ce qui est bon pour nous et bon pour la nature, et bien effectivement, tu as raison. Tu es franco-italien, mais est-ce que tu définis à travers aussi un territoire ?

  • Julien

    Moi je dis toujours que je suis un rital, alors ce mot rital c'est le... R de réfugié et Ital pour italien, quand mes grands-parents sont arrivés en France, et pour moi c'est une vraie identité, ça, Rital. C'est-à-dire qu'une de mes recettes préférées, ça va être la carbonara au Cantal, par exemple. Je trouve ça très cool de mixer les deux cultures. Et aujourd'hui, est-ce qu'on peut encore être identitaire ? On est dans une société où on est tous dans une mixité totale, en fait.

  • Christian

    R, c'est quoi justement l'identité aujourd'hui dans une société de mixité totale ? Et c'est quoi l'identité quand on pratique le métier que tu pratiques ?

  • Julien

    Si je dois me... m'identifier, me mettre dans une case, pour moi, c'est du bien, en fait. C'est l'identité du bien, du bon, et c'est ce qui fait que aujourd'hui, même d'un point de vue entrepreneurial, on fait certaines choses et d'autres qu'on se refuse à faire. En fait, c'est des choix, au quotidien, c'est des concessions. Des fois, on passe à côté de choses, mais on gagne d'autres richesses.

  • Christian

    C'est une vision de relation, en fait, par rapport aux autres, par rapport à ta cuisine, par rapport à la nature. par rapport aux produits ?

  • Julien

    C'est l'humain qui m'intéresse, moi.

  • Christian

    C'est l'humain qui t'intéresse, dans une relation, justement. Et quel type de relation avec l'humain ?

  • Julien

    Moi, c'est toujours cet échange. Alors, je n'aime pas ce mot-là, parce que ça marche pour les enfants, mais c'est l'éducation, en fait. Et je pense qu'il n'y a pas d'âge pour s'éduquer, pour éduquer aussi. Mais c'est vraiment ce qui me plaît. C'est-à-dire que quand les clients venaient, par exemple, chez Mania ou chez Bacciato, mon plaisir, c'était de leur faire découvrir des produits. En prenant des chemins de traverse, par exemple, on avait une focaccia qui était garnie d'un culatélo, mais cuit. Et en fait, la plupart des clients ne savaient pas ce que c'était que le culatélo. Donc du coup, avec ce produit qui était un culatélo différent, ça me permettait de faire la lumière sur le vrai culatélo. J'aime prendre des chemins de traverse pour pouvoir éduquer mes clients.

  • Christian

    C'est fondamental ce que tu dis, parce que ce qui montre d'ailleurs que la nourriture mène à tout et est présente partout dans l'éducation, dans la culture, dans la santé, dans tous les domaines. C'est quand même fascinant. Et cette notion d'éducation, c'est au cœur de nos sociétés aujourd'hui. Comment est-ce qu'on éduque ? Tu viens de nous donner un chemin qui est vraiment intéressant. Qu'est-ce qu'on éduque en expliquant, on éduque en faisant participer, on éduque comment ? Là tu dis, on éduque... en faisant prendre des chemins de traverse.

  • Julien

    Oui, parce qu'il ne faut pas être non plus trop fermé. C'est-à-dire que, par exemple, chez Mania, on a pris le chemin de la street food, alors que ce n'était pas du tout ma spécialité avant, parce que ça me permettait d'aller toucher une cible qui était différente. C'est-à-dire que chez Mania, j'avais quand même des jeunes... Il y avait beaucoup de jeunes qui venaient de banlieues, d'autres qui venaient de banlieues un peu plus chics, et ils se retrouvaient là, ils mangeaient tous de la pizza à la truffe, de la pizza à quatre fromages, enfin, ceux qui n'avaient pas l'habitude de manger de la truffe, mangeaient de la truffe chez moi, donc je leur ouvrais des portes, et ceux qui n'avaient pas l'habitude de manger avec les doigts, on va dire ça comme ça, d'être un peu plus street, ils se retrouvaient chez moi et ils avaient l'occasion de pouvoir être street dans un... Et c'est ça qui m'intéresse, en fait, c'est de mettre tout le monde dans la même case, parce que je pense qu'il y a une valeur commune, c'est... Tout le monde en fait, même ceux qui vont dans les fast-foods, il ne faut pas le faire, mais tous ces gens qui vont dans les fast-foods, ils veulent être en bonne santé. Et pour être en bonne santé, c'est à nous de les éduquer, de leur expliquer que ça passe par le bien manger.

  • Christian

    C'est vraiment intéressant parce qu'on pourrait dire, à travers ce que tu dis, à certains moments, c'est du marketing.

  • Julien

    Oui, mais ça passe par là en fait.

  • Christian

    Ça passe par le marketing, mais le fondement. parce que tu as du marketing aussi dans la grande distribution, magnifiquement fait. Le fondement, c'est les valeurs sur lesquelles repose ton approche.

  • Julien

    Oui, mais le marketing, moi, je ne trouve pas que ce soit un gros mot. Je suis un homme d'image, je l'ai toujours été, je le suis encore. Aujourd'hui, tous mes engagements passent par Instagram, YouTube, TikTok. Enfin, je me mets sur toutes les plateformes parce que je pense que... Tous les moyens sont bons, et puis si on parle de grande surface, j'ai pas de honte à dire, je fais pas mes courses, voilà, mais c'est pas ça le truc, c'est de dire que la plupart des gens vont faire les courses en grande surface. Donc il faut qu'on s'intéresse à ce que font ces gens-là pour qu'on puisse aller les chercher sur leur terrain. Par exemple... quand je fais un consulting où on va refaire une carte, si on doit faire un dessert, il peut m'arriver d'aller à la supérette et puis de dire Regardons les arômes yaourt, en fait. Et si je vois qu'il y a, je sais pas, c'est bête, mais poire chocolat, c'est un basique, je vais dire Bon, ça veut dire que ça plaît au grand public. Donc, c'est une première piste, une première approche. Il faut aller les chercher sur ce qui plaise. Si on leur fait quelque chose de trop différent, on reste entre nous et ça me plaît pas, ça.

  • Christian

    Mais à partir de quelle valeur ? Parce que tu fais passer, tu peux faire de la poire cassis à ta sauce, à toi, qui peut être équivalente à ce que fait la grande distribution. Donc le produit, quelle valeur ? Le marketing, tu as tout à fait raison, est un moyen. Pourquoi ne pas l'utiliser ? Simplement, quelle valeur véhicule ? C'est pour faire quoi ?

  • Julien

    En fait, ce que je dis toujours, c'est qu'il faut toujours reprendre le pire et le faire en mieux. Par exemple, on le voit beaucoup sur la pizza, on le voit beaucoup sur le burger dans la street food et c'est pour ça que j'ai pris ce chemin. Mais quand on voit ce que fait le clown américain, pourquoi pas retravailler ce que fait le clown américain, mais avec un bon pain, des bonnes farines, des bonnes viandes et d'aller chercher des belles valeurs, mais d'aller sur un terrain où moi, ce qui m'intéresse, c'est d'aller chercher tous ces jeunes qui vont manger chez ce clown en fait. Et de leur montrer qu'il y a d'autres choses. Donc, c'est vraiment le fondement de mon...

  • Christian

    Une façon de l'éduquer, de les éduquer. Oui,

  • Julien

    et puis surtout de ne pas se les mettre à dos. Parce que ça peut aussi être clivant de se trouver face à quelqu'un qui est hyper fermé en disant, non, la qualité, c'est ça. Et puis, en face, on peut avoir des gens qui se disent, bon, je n'ai pas les moyens, ce n'est pas ma philosophie. Et puis, au final, ils n'oseront pas. Il faut oser, en fait, il faut y aller.

  • Christian

    L'injonction n'est jamais bonne.

  • Julien

    Oui, c'est ça.

  • Christian

    Il faut attirer, il faut attirer. Je te propose de passer une première rubrique, Toc Toc, qui est là ?

  • Speaker #0

    Toc Toc, qui est là ?

  • Christian

    Si tu étais un animal ?

  • Julien

    Un chien. Pourquoi ? Parce que fidèle, loyal, et puis qui a besoin d'être en groupe, en fait, pas solitaire.

  • Christian

    Une saison ?

  • Julien

    Le printemps. le printemps parce que c'est la renaissance et qu'il fait pas trop chaud on est pas dans un extrême froid un extrême chaud et puis l'automne pour moi c'est un petit peu la mort d'une saison alors que le printemps on est sur une renaissance Un mot qui te paraît pour toi ? Un mot c'est compliqué ça il y a perfectionnisme parce que c'est ce qui me pourrit la vie et puis j'aime bien le mot umami parce que je trouve que c'est un terme nouveau Et qui à la fois définit rien du tout.

  • Christian

    Un goût qui n'en est pas un. Exactement.

  • Julien

    Et j'ai l'impression d'être un peu Umami.

  • Christian

    D'accord. Un des cinq sens ?

  • Julien

    Un des cinq sens, c'est l'odorat. Pour moi, tout démarre par l'odorat. Et ensuite, on ouvre les yeux, on voit. L'odorat, c'est vraiment si on a un très beau visuel. Et même si le goût est bon, si l'odorat n'est pas là. L'odorat, pour moi, est primordial. Toute la poésie passe par l'odorat.

  • Christian

    C'est très important au siècle de l'image où tout passe par l'image. C'est vrai. L'honorat.

  • Julien

    Peut-être que c'est pour ça.

  • Christian

    Ce qui a fait dire d'ailleurs à Google que pour montrer des produits, etc., ils allaient faire des émanations d'honorat à travers le téléphone portable. Ça sera sans doute sympathique. Et même pour le goût, ils ont même parlé de lécher le téléphone portable pour arriver au goût.

  • Julien

    Je ne sais pas si j'arriverai à ça.

  • Christian

    Un plat qui t'est favori ?

  • Julien

    Un plat, je dirais... Alors, je... c'est un peu mon identité, mais je dirais une carbonara au Cantal. Ouah, ouah, ouah, ouah.

  • Christian

    Là, tu nouvels l'eau à la bouche. Et une boisson ?

  • Julien

    Une boisson, un thé, parce que le thé chaud, le thé froid, le thé peut être aussi un excitant, le thé peut être un soft. Et puis surtout, on peut aussi aller dans des axes très pointus avec le thé. On peut aussi le prendre juste pour se désaltérer.

  • Christian

    Passons à la deuxième partie de notre entretien. Tout ce qui tourne autour de la notion de transparence. Transparence dans ta relation, transparence dans les produits, transparence dans la relation avec tes collaborateurs, avec les clients. Donc, c'est quoi pour toi un artisan militant de la qualité en termes de transparence ?

  • Julien

    C'est un artisan qui tutoie. Voilà, c'est un artisan qui tutoie. Alors, j'ai un peu tendance, moi, à tutoyer très, très vite aussi. Ma façon d'être, mais c'est ma manière d'être transparent et de réclamer la transparence en retour. Casser les barrières. Dans ma façon de travailler, c'est très important. J'ai vraiment besoin de connaître les gens avec qui je travaille, que ce soit des producteurs ou des collaborateurs. Je suis d'ailleurs du coup un piètre patron parce que j'ai toujours besoin de mettre cette notion d'humain et j'ai du mal à être le bad cop, le mauvais flic. Ça, je ne sais pas faire.

  • Christian

    En fait, en disant tutoiement, ça veut dire que tu casses la notion de... personnages, de représentativité,

  • Julien

    de statut.

  • Christian

    Surtout de statut. Donc d'un seul coup, tout le monde est au même statut, c'est-à-dire que tu as une personne devant toi.

  • Julien

    Je pense que c'est souvent apprécié. Alors il y a des gens qui sont un peu refroidis par ce tutoiement un peu facile, mais je trouve que ça remet tout le monde à sa place et puis qu'on a tous des gens dans notre entourage, même des gens qu'on vouvoie à longueur de journée, très importants, ils ont forcément des gens dans leur entourage. Donc moi, même un... Je ne sais pas, même un banquier, un ministre, je vais très très vite le tutoyer.

  • Christian

    Ils sont interpellés dans leur personne plus que dans leur personnage. Dans leur humanité. Dans leur humanité, en fait. Alors là aussi, en termes de représentativité, le Collège Filière de France, vous avez choisi de ne pas être un label, mais d'être une appellation, d'être défense d'une cause. Pourquoi ?

  • Julien

    Parce qu'un label, on l'a obtenu, on est content, on l'a. Voilà, et on passe à autre chose. Pour moi, le collège culinaire, c'est plus un combat, c'est du militantisme, c'est du quotidien, c'est des valeurs. Et en fait, les valeurs ne se perdent pas. Tandis qu'un label, une fois qu'on l'a obtenu, on a tendance à passer à autre chose. On veut un nouveau jouet. Et en fait, moi je... vois pas le collège du tout comme ça.

  • Christian

    Et du tout préparé, le label.

  • Julien

    Oui, c'est un peu ça. Après, c'est toujours gratifiant pour les équipes. Nous, sur les restaurants, on avait des labels avec qui on travaillait, mais le collège est tout à fait autre chose. Le collège, c'est un combat. Et si on n'adhère pas à une certaine philosophie, en fait, c'est pas la peine, si on veut.

  • Christian

    Oui, il vaut mieux être ailleurs, dans une autre famille, sans critiquer d'ailleurs. Oui, non,

  • Julien

    mais aller chercher des labels, on ne sera pas bien au collège puisqu'on a cette notion où on a besoin de partager, de construire ensemble.

  • Christian

    Dans toute ta démarche, qui est très singulière et qui en même temps est commune effectivement à l'intérieur du Collège Climat de France, quelles sont les difficultés que tu rencontres, les obstacles que tu rencontres pour appliquer ce en quoi tu crois ?

  • Julien

    Cette question, elle est compliquée parce que ce n'est pas des points qu'on aborde, mais c'est le financier. Et elle est compliquée parce qu'au collège, il y a aussi pour moi une valeur qui est importante, c'est que je n'ai jamais négocié un tarif avec un producteur du Collège Culinaire de France. Parce que j'estime qu'on est de la même famille et que du coup, il me fait déjà le juste prix. Et on est sans cesse... obliger nous en cuisine, essayer de trouver des moyens, puis encore plus moi sur la street food, de trouver des moyens de pouvoir travailler avec le mieux, sans que ce soit trop cher pour le client, sinon on retourne dans ce prix qui est clivant, et c'est très compliqué pour moi, c'est vraiment ça le plus dur. C'est l'argent.

  • Christian

    Bien sûr, trouver une logique économique qui correspond à ce que tu fais, et ce que tu veux faire, et la qualité que tu veux faire. et rencontrer et expliquer là aussi sans doute la notion du prix. Parce qu'il y a beaucoup d'impostures sur les prix bas.

  • Julien

    Oui, et sur les prix hauts aussi.

  • Christian

    Sur les prix hauts aussi.

  • Julien

    La truffe, par exemple, parlons-en. Nous, notre pizza à la truffe, on mettait 2 grammes de truffe par pizza et en fait, ça peut sembler rien du tout. Alors que 2 grammes, c'est pas mal du tout quand même. Et au final, on arrivait à avoir un prix lissé sur l'année qui n'était pas trop cher et on arrivait à... Alors que certains profitent du fait que la truffe s'appelle la truffe et que du coup on vend plus cher. Mais le problème c'est qu'on va se mettre à dos toute une clientèle et on ferme des portes.

  • Christian

    Je voudrais passer à un autre moment qu'on appelle fromage ou dessert.

  • Speaker #0

    C'est fromage ou dessert ?

  • Christian

    Logique ou émotion ?

  • Julien

    Plutôt logique.

  • Christian

    Compétition ou coopération ?

  • Julien

    Coopération.

  • Christian

    Travail ou vacances ?

  • Julien

    Je ne travaille pas. Moi, je suis heureux dans mon travail. Donc, je travaille.

  • Christian

    Et en vacances en permanence ?

  • Julien

    Exactement. Temps court ou temps long ? J'aimerais temps court, mais c'est plutôt temps long.

  • Christian

    Et la cuisine étrangère que tu préfères ?

  • Julien

    C'est la cuisine japonaise. Parce que je trouve qu'il y a une finesse. On la retrouve à la fois dans des plats assez pointus, sur la street food, une culture... tout à fait différente et je crois que c'est là où vraiment je me régale le plus.

  • Christian

    Une source d'inspiration aussi ?

  • Julien

    Oui, beaucoup d'inspiration parce que toujours cette umami et puis ces choses qu'on ne connaît pas et c'est ouvrir les portes au maximum.

  • Christian

    C'est formidable parce que depuis un peu plus de deux ans maintenant, le Collège Fils d'Art de France a créé le Collège Fils d'Art du Japon. Voilà, donc il faut le savoir et c'est intéressant parce que justement, il y a des contacts qui vont pouvoir se développer. j'aurais passé une troisième et dernière partie de notre entretien, comment est-ce que tu conçois justement ces relations de coopération alors à deux niveaux la coopération avec des producteurs t'as déjà dit pas mal de choses mais si tu pouvais approfondir ça et puis avec tes collaborateurs aujourd'hui et

  • Julien

    les problématiques que ça peut poser je vais commencer par les collaborateurs parce que c'est le plus compliqué parce que nos collaborateurs On les choisit, mais pas toujours. La restauration est compliquée. Et quelques fois...

  • Christian

    C'est eux qui vous choisissent aussi. Oui,

  • Julien

    voilà, c'est ça. Et puis, surtout, quelques fois, ils ne sont pas sensibilisés aux valeurs qu'on peut avoir. Donc, c'est à nous de transmettre les valeurs, de prendre le temps. Je sais que, par exemple, que ce soit pour Mania, Bacciato ou tous les projets qu'on a eus, chaque nouveau salarié, nous, on prévoit 1h30 et puis on lui fait lire, par exemple... On lui parle du collège, on explique ce qu'est le collège, on lui parle de la charte écotable, on lui parle de tout ça pour qu'il comprenne un petit peu dans quelle idée on est, puisqu'on est une équipe, donc on doit aller dans le même sens. Et pour les producteurs, ce que j'ai l'habitude de dire, c'est que c'est en éclairant les autres qu'on brille le plus. Alors l'objectif, c'est pas de briller, mais il faut éclairer les producteurs et c'est ce que je m'obstine à faire depuis des années. Chez Mania, on avait un mur qu'on appelait The Wall of Fame. Dans les Pizzaria Kitsch, il y a toujours la célébrité avec le Pizzaiolo. Et là, j'ai fait la même chose, mais avec mes producteurs. Et puis, tous les projets qu'il y a à côté sur les réseaux sociaux, donc sur YouTube, mon projet de la fourche à la fourchette, celui-ci, où je me rends chez des producteurs. On a fait huit épisodes. Je crois qu'on a sept collégiens quand même. Et je passe 24 heures avec eux et je les mets en avant. Ça dure 52 minutes. Et puis, je montre leur quotidien. plantent ma tente dans leur jardin. Et l'idée, c'est de les mettre en avant, de montrer ce qu'ils sont. Parce que nos producteurs ne sont jamais mis en lumière. Ils ont des grandes frustrations avec ça. Et pour nous, cuisiner, c'est facile, on est en bout de chaîne. Mais bon, c'est eux les vrais stars. Sans eux, on ne peut rien faire.

  • Christian

    Qu'est-ce que tu ressens au niveau des nouvelles générations qui montent aujourd'hui ? Et qu'est-ce que tu ressens par rapport à ce que tu as connu, toi ?

  • Julien

    Je n'essaie pas de les comprendre, j'essaie plutôt de les rattraper, de m'adapter à eux. Et j'essaie toujours d'être le moins vieux jeu possible. Parce qu'il n'y a pas le choix, c'est comme ça. En fait, il ne faut pas chercher à changer la vision des jeunes. Les jeunes, ils ont leur vision qui correspond à leur état d'esprit, qui correspond à un état sociétal.

  • Christian

    Qu'est-ce qu'ils peuvent t'apporter ? Qu'est-ce que tu peux leur apporter ?

  • Julien

    Qu'est-ce qu'ils peuvent m'apporter ? Beaucoup d'ouverture d'esprit, parce que je trouve que les jeunes générations sont beaucoup plus ouvertes que nous, parce qu'ils ont plus accès à beaucoup de choses. Et puis, moi, qu'est-ce que je peux leur apporter ? J'allais dire un peu de tradition, mais j'ai toujours que l'innovation n'exclut pas la connaissance de la tradition. Et que ce soit pour de la musique ou pour de la nourriture, c'est pareil. Ils écoutent des groupes, pourquoi pas, mais il faut quand même connaître ses bases et tout connaître, en fait. C'est important.

  • Christian

    Tu as dit tout à l'heure beaucoup de choses sur les clients, les éduquer, leur faire comprendre, etc. Tu sais qu'on a cette association Manger Citoyens qui est à côté du Collège Culinaire de France et qui a cette vocation-là. Donc il y a déjà plus de 2500 membres qui sont inscrits. Donc il y a vraiment une synergie avec ce que vous faites au Collège Culinaire de France. Et ça, c'est très bien avec le mode d'approche que tu peux avoir. J'aimerais parler d'un dernier instant. C'est l'ouverture du pot de moutarde.

  • Speaker #0

    La moutarde me mentonnait.

  • Christian

    La bruitarde qui te m'entendait, ton coup de gueule, c'est quoi ?

  • Julien

    En fait, il y en a deux, un actuel et un permanent. L'actuel, c'est les agriculteurs, le soutien aux agriculteurs que je peux leur porter. Avec plein de projets, avec les de la fourche à la fourchette, même dans le travail, en les mettant en avant. Et il m'arrive quelquefois d'entendre des gens qui ne soutiennent pas les agriculteurs et qui ont un peu ce discours de ils l'ont bien cherché En fait, il ne faut pas parler comme ça. C'est ça qui m'énerve, en fait. Ce qui m'énerve, c'est les gens qui ont cette vision-là. Parce que les agriculteurs ont probablement fait des erreurs à un moment, à un instant donné. Mais c'est parce que c'est ce qu'on leur a transmis, c'est ce qu'on leur a expliqué. Et aujourd'hui, voilà. Donc, je pense qu'il faut que tout le monde soutienne les agriculteurs. Et honnêtement, j'ai envie d'aller avec eux sur les autoroutes pour faire des barbecues. Et d'un point de vue permanent, quelque chose qui m'agace fortement dans ma vision des choses, C'est un peu le communautarisme culturel, j'ai envie de dire. C'est-à-dire que ce que je n'aime pas, c'est quand les gens en jeans sont entre eux, les gens en costumes sont entre eux, les gens en survêtres sont entre eux, que les gens qui habitent dans le 16e soient que avec les gens qui habitent dans le 16e et ceux qui habitent dans le 18e. Je déteste ça. Ce que j'aime, c'est vraiment cette notion de mixité. Et je trouve qu'on perd beaucoup. On perd beaucoup à souvent fermer les choses dans des cases et fréquenter que des gens qui... Moi, si je fréquentais que des chefs italiens, ça serait tellement pas enrichissant. Or, dans les collégiens avec qui je m'entends très bien, par exemple, j'ai mon ami Go, qui a le restaurant de Zakuro, qui est un restaurant japonais incroyable, et ça m'apporte tellement d'aller manger chez lui, d'échanger avec lui.

  • Christian

    C'est génial, c'est une vraie philosophie forte, mais pour ça, il ne faut pas avoir peur, parce que le communautarisme, quel qu'il soit, ce que tu as décrit, c'est une peur. C'est de rentrer, justement, de rester entre soi, parce que l'autre... l'autre est étranger, il est étrange il est étrange et donc il fait peur donc ce communautarisme on le voit beaucoup aujourd'hui parce que je pense fondamentalement c'est les gens ont peur mais oui c'est vrai,

  • Julien

    peut-être que ça me fait même voir les choses un peu différemment alors merci d'abord,

  • Christian

    merci de tout ce que tu nous as dit, merci d'être venu et en toute confidence si t'avais, je crois que t'as cité quelque chose là déjà une bonne adresse de restaurant Zakuro qui est un

  • Julien

    Petit restaurant japonais où on ne mange pas de sushi, qui est incroyable, tenu par Go et sa maman. Sa maman qui était une star de la chanson au Japon, incroyable, superbe histoire, on mange très bien. Abile, qui est aussi collégien, qui font de la bonne cuisine avec de l'humour. Ils ont un oeuf mayonnaise au gin et au miso, et ils l'ont appelé l'oeuf miso-gin. Je trouve ça très drôle. Et c'est aussi un magasin de vêtements, puisque son épouse, elle, est...

  • Christian

    Ah bah d'accord.

  • Julien

    Et juste une dernière adresse, pizza, parce que c'est ce que les gens attendent de moi généralement. On ne peut pas, dans une vie, ne pas avoir goûté une fois les pizzas de Gabriele Bonci à Rome.

  • Christian

    Il faut aller à Rome, mais c'est l'occasion d'un bon voyage. D'accord, bonne adresse, merci à toi. Écoute Julien, je pense que tu vas aimer notre prochain invité. Il est italien, il s'appelle, tu le connais, Adriano Farano. Il viendra notamment nous parler de son livre, Je ne mangerai pas de ce pain-là. qui nous apprend des choses étonnantes et dans lequel il développe brillamment toute sa philosophie mise en action dans son engagement pour une panification sans gluten en devenant lui-même boulanger alors qu'il était journaliste. Ça promet d'être vraiment intéressant. Alors rendez-vous dans 15 jours.

  • Speaker #0

    Vous venez de déguster un épisode de La Terre à la Tinte. le podcast qui vous donne envie de bien manger. Nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie. Si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef, et en vous abonnant. Vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous !

Description

Entrez dans l’univers gourmand et créatif de Julien Serri, chef franco-italien, sacré vice-champion de France de pizza, et artisan militant de la qualité. Créateur des concepts Magnà et Baciato, Julien réinvente la Street Food italienne en mêlant respect du produit et innovation culinaire.

À travers cet épisode, il dévoile sa vision d’une cuisine qui ouvre l’esprit du public et valorise les producteurs locaux.

Avec passion, il aborde la transparence, le marketing éthique et sa volonté d’offrir le meilleur au plus grand nombre.
Préparez-vous à savourer une conversation inspirante, pleine de goût et de richesse humaine.


Le Collège Culinaire de France est une association fondée en 2011 à l'initiative de quinze grands chefs restaurateurs à l'instar d'Alain Ducasse, Joël Robuchon, Yannick Alléno, Paul Bocuse, Alain Dutournier, Gilles Goujon, Michel Guérard, Marc Haeberlin, Régis Marcon, Thierry Marx, Gérald Passedat, Laurent Petit, Anne-Sophie Pic, Guy Savoy et Pierre Troisgros. Le Collège Culinaire de France est la seule association, à ce jour, initiée par le plus grand rassemblement de chefs français reconnus et incontestés, qui s’emploie, concrètement, sur le terrain, à relier des Producteurs et Artisans de Qualité avec des Restaurants de Qualité de toutes catégories. Elle rassemble ceux qui œuvrent pour une vision d’avenir du métier, et fédère tous ceux qui s’engagent sur des synergies de valeurs et de pratiques partagées.


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Crédits

En cuisine :

Un foodcast mitonnée aux petits oignons par Suniwan

Illustration servie par Hugo Girard

Un épisode enregistré au Mojo dans le 17éme arrondissement


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans le podcast de La Terre à l'Assiette.

  • Christian

    Bonjour à toutes et à tous. Heureux de vous retrouver pour un nouvel épisode de notre podcast de La Terre à l'Assiette. Vous êtes de plus en plus nombreux à nous suivre et cela nous fait extrêmement plaisir. Et du plaisir, on va en prendre aujourd'hui avec notre invité qui, j'en suis sûr, va ravir tous les amoureux de la cuisine italienne et je sais qu'ils sont nombreux. Julien Serry est un chef franco-italien. expert en matière de pizza et de cuisine italienne. Reconnu par le Collège Cuisineur de France depuis 2022, Julien a été sacré vice-champion de France de la pizza. En 2019, il a fondé Bagga, un établissement qui était rue Notre-Dame-de-Lorette dans le 9e arrondissement. En 2023, Julien Seri a lancé Bacciato, un concept de street food italienne centré sur les panini et focaccia personnalisés. Comment fait-on pour être... au four, à pizza et au moulin. Quelle est la vision de son métier et la vision de son engagement pour le bien manger ? Et surtout, quelle équipe soutient-il lors des matchs France-Italie ? Attention, terrain sensible, mais ici, de la terre à l'assiette, on est transparent et on n'a peur de rien.

  • Speaker #0

    Une émission présentée par Christian Regouby.

  • Christian

    Bonjour, bonjour Julien.

  • Julien

    Buongiorno.

  • Christian

    Alors raconte-nous un petit peu la source de ton identité, c'est quoi ton projet à travers tout ce que tu fais, Dieu sait si tu es prolixe, quelles sont tes convictions profondes ?

  • Julien

    Moi ce qui me plaît dans mon métier, dans mon quotidien en fait, c'est surtout la transmission. Alors je le retrouve avec le collège sur les rapports que j'ai avec les producteurs mais aussi avec les clients. J'aime quand les clients sortent de... d'une expérience culinaire en ayant appris quelque chose.

  • Christian

    D'accord, donc cette notion de transmission, de transmettre ta passion en fait.

  • Julien

    Oui, et puis ma passion, et puis surtout la transmission du bon, du bien, parce que le bon va avec le bien.

  • Christian

    C'est vrai que ce qui est bon pour nous et bon pour la nature, et bien effectivement, tu as raison. Tu es franco-italien, mais est-ce que tu définis à travers aussi un territoire ?

  • Julien

    Moi je dis toujours que je suis un rital, alors ce mot rital c'est le... R de réfugié et Ital pour italien, quand mes grands-parents sont arrivés en France, et pour moi c'est une vraie identité, ça, Rital. C'est-à-dire qu'une de mes recettes préférées, ça va être la carbonara au Cantal, par exemple. Je trouve ça très cool de mixer les deux cultures. Et aujourd'hui, est-ce qu'on peut encore être identitaire ? On est dans une société où on est tous dans une mixité totale, en fait.

  • Christian

    R, c'est quoi justement l'identité aujourd'hui dans une société de mixité totale ? Et c'est quoi l'identité quand on pratique le métier que tu pratiques ?

  • Julien

    Si je dois me... m'identifier, me mettre dans une case, pour moi, c'est du bien, en fait. C'est l'identité du bien, du bon, et c'est ce qui fait que aujourd'hui, même d'un point de vue entrepreneurial, on fait certaines choses et d'autres qu'on se refuse à faire. En fait, c'est des choix, au quotidien, c'est des concessions. Des fois, on passe à côté de choses, mais on gagne d'autres richesses.

  • Christian

    C'est une vision de relation, en fait, par rapport aux autres, par rapport à ta cuisine, par rapport à la nature. par rapport aux produits ?

  • Julien

    C'est l'humain qui m'intéresse, moi.

  • Christian

    C'est l'humain qui t'intéresse, dans une relation, justement. Et quel type de relation avec l'humain ?

  • Julien

    Moi, c'est toujours cet échange. Alors, je n'aime pas ce mot-là, parce que ça marche pour les enfants, mais c'est l'éducation, en fait. Et je pense qu'il n'y a pas d'âge pour s'éduquer, pour éduquer aussi. Mais c'est vraiment ce qui me plaît. C'est-à-dire que quand les clients venaient, par exemple, chez Mania ou chez Bacciato, mon plaisir, c'était de leur faire découvrir des produits. En prenant des chemins de traverse, par exemple, on avait une focaccia qui était garnie d'un culatélo, mais cuit. Et en fait, la plupart des clients ne savaient pas ce que c'était que le culatélo. Donc du coup, avec ce produit qui était un culatélo différent, ça me permettait de faire la lumière sur le vrai culatélo. J'aime prendre des chemins de traverse pour pouvoir éduquer mes clients.

  • Christian

    C'est fondamental ce que tu dis, parce que ce qui montre d'ailleurs que la nourriture mène à tout et est présente partout dans l'éducation, dans la culture, dans la santé, dans tous les domaines. C'est quand même fascinant. Et cette notion d'éducation, c'est au cœur de nos sociétés aujourd'hui. Comment est-ce qu'on éduque ? Tu viens de nous donner un chemin qui est vraiment intéressant. Qu'est-ce qu'on éduque en expliquant, on éduque en faisant participer, on éduque comment ? Là tu dis, on éduque... en faisant prendre des chemins de traverse.

  • Julien

    Oui, parce qu'il ne faut pas être non plus trop fermé. C'est-à-dire que, par exemple, chez Mania, on a pris le chemin de la street food, alors que ce n'était pas du tout ma spécialité avant, parce que ça me permettait d'aller toucher une cible qui était différente. C'est-à-dire que chez Mania, j'avais quand même des jeunes... Il y avait beaucoup de jeunes qui venaient de banlieues, d'autres qui venaient de banlieues un peu plus chics, et ils se retrouvaient là, ils mangeaient tous de la pizza à la truffe, de la pizza à quatre fromages, enfin, ceux qui n'avaient pas l'habitude de manger de la truffe, mangeaient de la truffe chez moi, donc je leur ouvrais des portes, et ceux qui n'avaient pas l'habitude de manger avec les doigts, on va dire ça comme ça, d'être un peu plus street, ils se retrouvaient chez moi et ils avaient l'occasion de pouvoir être street dans un... Et c'est ça qui m'intéresse, en fait, c'est de mettre tout le monde dans la même case, parce que je pense qu'il y a une valeur commune, c'est... Tout le monde en fait, même ceux qui vont dans les fast-foods, il ne faut pas le faire, mais tous ces gens qui vont dans les fast-foods, ils veulent être en bonne santé. Et pour être en bonne santé, c'est à nous de les éduquer, de leur expliquer que ça passe par le bien manger.

  • Christian

    C'est vraiment intéressant parce qu'on pourrait dire, à travers ce que tu dis, à certains moments, c'est du marketing.

  • Julien

    Oui, mais ça passe par là en fait.

  • Christian

    Ça passe par le marketing, mais le fondement. parce que tu as du marketing aussi dans la grande distribution, magnifiquement fait. Le fondement, c'est les valeurs sur lesquelles repose ton approche.

  • Julien

    Oui, mais le marketing, moi, je ne trouve pas que ce soit un gros mot. Je suis un homme d'image, je l'ai toujours été, je le suis encore. Aujourd'hui, tous mes engagements passent par Instagram, YouTube, TikTok. Enfin, je me mets sur toutes les plateformes parce que je pense que... Tous les moyens sont bons, et puis si on parle de grande surface, j'ai pas de honte à dire, je fais pas mes courses, voilà, mais c'est pas ça le truc, c'est de dire que la plupart des gens vont faire les courses en grande surface. Donc il faut qu'on s'intéresse à ce que font ces gens-là pour qu'on puisse aller les chercher sur leur terrain. Par exemple... quand je fais un consulting où on va refaire une carte, si on doit faire un dessert, il peut m'arriver d'aller à la supérette et puis de dire Regardons les arômes yaourt, en fait. Et si je vois qu'il y a, je sais pas, c'est bête, mais poire chocolat, c'est un basique, je vais dire Bon, ça veut dire que ça plaît au grand public. Donc, c'est une première piste, une première approche. Il faut aller les chercher sur ce qui plaise. Si on leur fait quelque chose de trop différent, on reste entre nous et ça me plaît pas, ça.

  • Christian

    Mais à partir de quelle valeur ? Parce que tu fais passer, tu peux faire de la poire cassis à ta sauce, à toi, qui peut être équivalente à ce que fait la grande distribution. Donc le produit, quelle valeur ? Le marketing, tu as tout à fait raison, est un moyen. Pourquoi ne pas l'utiliser ? Simplement, quelle valeur véhicule ? C'est pour faire quoi ?

  • Julien

    En fait, ce que je dis toujours, c'est qu'il faut toujours reprendre le pire et le faire en mieux. Par exemple, on le voit beaucoup sur la pizza, on le voit beaucoup sur le burger dans la street food et c'est pour ça que j'ai pris ce chemin. Mais quand on voit ce que fait le clown américain, pourquoi pas retravailler ce que fait le clown américain, mais avec un bon pain, des bonnes farines, des bonnes viandes et d'aller chercher des belles valeurs, mais d'aller sur un terrain où moi, ce qui m'intéresse, c'est d'aller chercher tous ces jeunes qui vont manger chez ce clown en fait. Et de leur montrer qu'il y a d'autres choses. Donc, c'est vraiment le fondement de mon...

  • Christian

    Une façon de l'éduquer, de les éduquer. Oui,

  • Julien

    et puis surtout de ne pas se les mettre à dos. Parce que ça peut aussi être clivant de se trouver face à quelqu'un qui est hyper fermé en disant, non, la qualité, c'est ça. Et puis, en face, on peut avoir des gens qui se disent, bon, je n'ai pas les moyens, ce n'est pas ma philosophie. Et puis, au final, ils n'oseront pas. Il faut oser, en fait, il faut y aller.

  • Christian

    L'injonction n'est jamais bonne.

  • Julien

    Oui, c'est ça.

  • Christian

    Il faut attirer, il faut attirer. Je te propose de passer une première rubrique, Toc Toc, qui est là ?

  • Speaker #0

    Toc Toc, qui est là ?

  • Christian

    Si tu étais un animal ?

  • Julien

    Un chien. Pourquoi ? Parce que fidèle, loyal, et puis qui a besoin d'être en groupe, en fait, pas solitaire.

  • Christian

    Une saison ?

  • Julien

    Le printemps. le printemps parce que c'est la renaissance et qu'il fait pas trop chaud on est pas dans un extrême froid un extrême chaud et puis l'automne pour moi c'est un petit peu la mort d'une saison alors que le printemps on est sur une renaissance Un mot qui te paraît pour toi ? Un mot c'est compliqué ça il y a perfectionnisme parce que c'est ce qui me pourrit la vie et puis j'aime bien le mot umami parce que je trouve que c'est un terme nouveau Et qui à la fois définit rien du tout.

  • Christian

    Un goût qui n'en est pas un. Exactement.

  • Julien

    Et j'ai l'impression d'être un peu Umami.

  • Christian

    D'accord. Un des cinq sens ?

  • Julien

    Un des cinq sens, c'est l'odorat. Pour moi, tout démarre par l'odorat. Et ensuite, on ouvre les yeux, on voit. L'odorat, c'est vraiment si on a un très beau visuel. Et même si le goût est bon, si l'odorat n'est pas là. L'odorat, pour moi, est primordial. Toute la poésie passe par l'odorat.

  • Christian

    C'est très important au siècle de l'image où tout passe par l'image. C'est vrai. L'honorat.

  • Julien

    Peut-être que c'est pour ça.

  • Christian

    Ce qui a fait dire d'ailleurs à Google que pour montrer des produits, etc., ils allaient faire des émanations d'honorat à travers le téléphone portable. Ça sera sans doute sympathique. Et même pour le goût, ils ont même parlé de lécher le téléphone portable pour arriver au goût.

  • Julien

    Je ne sais pas si j'arriverai à ça.

  • Christian

    Un plat qui t'est favori ?

  • Julien

    Un plat, je dirais... Alors, je... c'est un peu mon identité, mais je dirais une carbonara au Cantal. Ouah, ouah, ouah, ouah.

  • Christian

    Là, tu nouvels l'eau à la bouche. Et une boisson ?

  • Julien

    Une boisson, un thé, parce que le thé chaud, le thé froid, le thé peut être aussi un excitant, le thé peut être un soft. Et puis surtout, on peut aussi aller dans des axes très pointus avec le thé. On peut aussi le prendre juste pour se désaltérer.

  • Christian

    Passons à la deuxième partie de notre entretien. Tout ce qui tourne autour de la notion de transparence. Transparence dans ta relation, transparence dans les produits, transparence dans la relation avec tes collaborateurs, avec les clients. Donc, c'est quoi pour toi un artisan militant de la qualité en termes de transparence ?

  • Julien

    C'est un artisan qui tutoie. Voilà, c'est un artisan qui tutoie. Alors, j'ai un peu tendance, moi, à tutoyer très, très vite aussi. Ma façon d'être, mais c'est ma manière d'être transparent et de réclamer la transparence en retour. Casser les barrières. Dans ma façon de travailler, c'est très important. J'ai vraiment besoin de connaître les gens avec qui je travaille, que ce soit des producteurs ou des collaborateurs. Je suis d'ailleurs du coup un piètre patron parce que j'ai toujours besoin de mettre cette notion d'humain et j'ai du mal à être le bad cop, le mauvais flic. Ça, je ne sais pas faire.

  • Christian

    En fait, en disant tutoiement, ça veut dire que tu casses la notion de... personnages, de représentativité,

  • Julien

    de statut.

  • Christian

    Surtout de statut. Donc d'un seul coup, tout le monde est au même statut, c'est-à-dire que tu as une personne devant toi.

  • Julien

    Je pense que c'est souvent apprécié. Alors il y a des gens qui sont un peu refroidis par ce tutoiement un peu facile, mais je trouve que ça remet tout le monde à sa place et puis qu'on a tous des gens dans notre entourage, même des gens qu'on vouvoie à longueur de journée, très importants, ils ont forcément des gens dans leur entourage. Donc moi, même un... Je ne sais pas, même un banquier, un ministre, je vais très très vite le tutoyer.

  • Christian

    Ils sont interpellés dans leur personne plus que dans leur personnage. Dans leur humanité. Dans leur humanité, en fait. Alors là aussi, en termes de représentativité, le Collège Filière de France, vous avez choisi de ne pas être un label, mais d'être une appellation, d'être défense d'une cause. Pourquoi ?

  • Julien

    Parce qu'un label, on l'a obtenu, on est content, on l'a. Voilà, et on passe à autre chose. Pour moi, le collège culinaire, c'est plus un combat, c'est du militantisme, c'est du quotidien, c'est des valeurs. Et en fait, les valeurs ne se perdent pas. Tandis qu'un label, une fois qu'on l'a obtenu, on a tendance à passer à autre chose. On veut un nouveau jouet. Et en fait, moi je... vois pas le collège du tout comme ça.

  • Christian

    Et du tout préparé, le label.

  • Julien

    Oui, c'est un peu ça. Après, c'est toujours gratifiant pour les équipes. Nous, sur les restaurants, on avait des labels avec qui on travaillait, mais le collège est tout à fait autre chose. Le collège, c'est un combat. Et si on n'adhère pas à une certaine philosophie, en fait, c'est pas la peine, si on veut.

  • Christian

    Oui, il vaut mieux être ailleurs, dans une autre famille, sans critiquer d'ailleurs. Oui, non,

  • Julien

    mais aller chercher des labels, on ne sera pas bien au collège puisqu'on a cette notion où on a besoin de partager, de construire ensemble.

  • Christian

    Dans toute ta démarche, qui est très singulière et qui en même temps est commune effectivement à l'intérieur du Collège Climat de France, quelles sont les difficultés que tu rencontres, les obstacles que tu rencontres pour appliquer ce en quoi tu crois ?

  • Julien

    Cette question, elle est compliquée parce que ce n'est pas des points qu'on aborde, mais c'est le financier. Et elle est compliquée parce qu'au collège, il y a aussi pour moi une valeur qui est importante, c'est que je n'ai jamais négocié un tarif avec un producteur du Collège Culinaire de France. Parce que j'estime qu'on est de la même famille et que du coup, il me fait déjà le juste prix. Et on est sans cesse... obliger nous en cuisine, essayer de trouver des moyens, puis encore plus moi sur la street food, de trouver des moyens de pouvoir travailler avec le mieux, sans que ce soit trop cher pour le client, sinon on retourne dans ce prix qui est clivant, et c'est très compliqué pour moi, c'est vraiment ça le plus dur. C'est l'argent.

  • Christian

    Bien sûr, trouver une logique économique qui correspond à ce que tu fais, et ce que tu veux faire, et la qualité que tu veux faire. et rencontrer et expliquer là aussi sans doute la notion du prix. Parce qu'il y a beaucoup d'impostures sur les prix bas.

  • Julien

    Oui, et sur les prix hauts aussi.

  • Christian

    Sur les prix hauts aussi.

  • Julien

    La truffe, par exemple, parlons-en. Nous, notre pizza à la truffe, on mettait 2 grammes de truffe par pizza et en fait, ça peut sembler rien du tout. Alors que 2 grammes, c'est pas mal du tout quand même. Et au final, on arrivait à avoir un prix lissé sur l'année qui n'était pas trop cher et on arrivait à... Alors que certains profitent du fait que la truffe s'appelle la truffe et que du coup on vend plus cher. Mais le problème c'est qu'on va se mettre à dos toute une clientèle et on ferme des portes.

  • Christian

    Je voudrais passer à un autre moment qu'on appelle fromage ou dessert.

  • Speaker #0

    C'est fromage ou dessert ?

  • Christian

    Logique ou émotion ?

  • Julien

    Plutôt logique.

  • Christian

    Compétition ou coopération ?

  • Julien

    Coopération.

  • Christian

    Travail ou vacances ?

  • Julien

    Je ne travaille pas. Moi, je suis heureux dans mon travail. Donc, je travaille.

  • Christian

    Et en vacances en permanence ?

  • Julien

    Exactement. Temps court ou temps long ? J'aimerais temps court, mais c'est plutôt temps long.

  • Christian

    Et la cuisine étrangère que tu préfères ?

  • Julien

    C'est la cuisine japonaise. Parce que je trouve qu'il y a une finesse. On la retrouve à la fois dans des plats assez pointus, sur la street food, une culture... tout à fait différente et je crois que c'est là où vraiment je me régale le plus.

  • Christian

    Une source d'inspiration aussi ?

  • Julien

    Oui, beaucoup d'inspiration parce que toujours cette umami et puis ces choses qu'on ne connaît pas et c'est ouvrir les portes au maximum.

  • Christian

    C'est formidable parce que depuis un peu plus de deux ans maintenant, le Collège Fils d'Art de France a créé le Collège Fils d'Art du Japon. Voilà, donc il faut le savoir et c'est intéressant parce que justement, il y a des contacts qui vont pouvoir se développer. j'aurais passé une troisième et dernière partie de notre entretien, comment est-ce que tu conçois justement ces relations de coopération alors à deux niveaux la coopération avec des producteurs t'as déjà dit pas mal de choses mais si tu pouvais approfondir ça et puis avec tes collaborateurs aujourd'hui et

  • Julien

    les problématiques que ça peut poser je vais commencer par les collaborateurs parce que c'est le plus compliqué parce que nos collaborateurs On les choisit, mais pas toujours. La restauration est compliquée. Et quelques fois...

  • Christian

    C'est eux qui vous choisissent aussi. Oui,

  • Julien

    voilà, c'est ça. Et puis, surtout, quelques fois, ils ne sont pas sensibilisés aux valeurs qu'on peut avoir. Donc, c'est à nous de transmettre les valeurs, de prendre le temps. Je sais que, par exemple, que ce soit pour Mania, Bacciato ou tous les projets qu'on a eus, chaque nouveau salarié, nous, on prévoit 1h30 et puis on lui fait lire, par exemple... On lui parle du collège, on explique ce qu'est le collège, on lui parle de la charte écotable, on lui parle de tout ça pour qu'il comprenne un petit peu dans quelle idée on est, puisqu'on est une équipe, donc on doit aller dans le même sens. Et pour les producteurs, ce que j'ai l'habitude de dire, c'est que c'est en éclairant les autres qu'on brille le plus. Alors l'objectif, c'est pas de briller, mais il faut éclairer les producteurs et c'est ce que je m'obstine à faire depuis des années. Chez Mania, on avait un mur qu'on appelait The Wall of Fame. Dans les Pizzaria Kitsch, il y a toujours la célébrité avec le Pizzaiolo. Et là, j'ai fait la même chose, mais avec mes producteurs. Et puis, tous les projets qu'il y a à côté sur les réseaux sociaux, donc sur YouTube, mon projet de la fourche à la fourchette, celui-ci, où je me rends chez des producteurs. On a fait huit épisodes. Je crois qu'on a sept collégiens quand même. Et je passe 24 heures avec eux et je les mets en avant. Ça dure 52 minutes. Et puis, je montre leur quotidien. plantent ma tente dans leur jardin. Et l'idée, c'est de les mettre en avant, de montrer ce qu'ils sont. Parce que nos producteurs ne sont jamais mis en lumière. Ils ont des grandes frustrations avec ça. Et pour nous, cuisiner, c'est facile, on est en bout de chaîne. Mais bon, c'est eux les vrais stars. Sans eux, on ne peut rien faire.

  • Christian

    Qu'est-ce que tu ressens au niveau des nouvelles générations qui montent aujourd'hui ? Et qu'est-ce que tu ressens par rapport à ce que tu as connu, toi ?

  • Julien

    Je n'essaie pas de les comprendre, j'essaie plutôt de les rattraper, de m'adapter à eux. Et j'essaie toujours d'être le moins vieux jeu possible. Parce qu'il n'y a pas le choix, c'est comme ça. En fait, il ne faut pas chercher à changer la vision des jeunes. Les jeunes, ils ont leur vision qui correspond à leur état d'esprit, qui correspond à un état sociétal.

  • Christian

    Qu'est-ce qu'ils peuvent t'apporter ? Qu'est-ce que tu peux leur apporter ?

  • Julien

    Qu'est-ce qu'ils peuvent m'apporter ? Beaucoup d'ouverture d'esprit, parce que je trouve que les jeunes générations sont beaucoup plus ouvertes que nous, parce qu'ils ont plus accès à beaucoup de choses. Et puis, moi, qu'est-ce que je peux leur apporter ? J'allais dire un peu de tradition, mais j'ai toujours que l'innovation n'exclut pas la connaissance de la tradition. Et que ce soit pour de la musique ou pour de la nourriture, c'est pareil. Ils écoutent des groupes, pourquoi pas, mais il faut quand même connaître ses bases et tout connaître, en fait. C'est important.

  • Christian

    Tu as dit tout à l'heure beaucoup de choses sur les clients, les éduquer, leur faire comprendre, etc. Tu sais qu'on a cette association Manger Citoyens qui est à côté du Collège Culinaire de France et qui a cette vocation-là. Donc il y a déjà plus de 2500 membres qui sont inscrits. Donc il y a vraiment une synergie avec ce que vous faites au Collège Culinaire de France. Et ça, c'est très bien avec le mode d'approche que tu peux avoir. J'aimerais parler d'un dernier instant. C'est l'ouverture du pot de moutarde.

  • Speaker #0

    La moutarde me mentonnait.

  • Christian

    La bruitarde qui te m'entendait, ton coup de gueule, c'est quoi ?

  • Julien

    En fait, il y en a deux, un actuel et un permanent. L'actuel, c'est les agriculteurs, le soutien aux agriculteurs que je peux leur porter. Avec plein de projets, avec les de la fourche à la fourchette, même dans le travail, en les mettant en avant. Et il m'arrive quelquefois d'entendre des gens qui ne soutiennent pas les agriculteurs et qui ont un peu ce discours de ils l'ont bien cherché En fait, il ne faut pas parler comme ça. C'est ça qui m'énerve, en fait. Ce qui m'énerve, c'est les gens qui ont cette vision-là. Parce que les agriculteurs ont probablement fait des erreurs à un moment, à un instant donné. Mais c'est parce que c'est ce qu'on leur a transmis, c'est ce qu'on leur a expliqué. Et aujourd'hui, voilà. Donc, je pense qu'il faut que tout le monde soutienne les agriculteurs. Et honnêtement, j'ai envie d'aller avec eux sur les autoroutes pour faire des barbecues. Et d'un point de vue permanent, quelque chose qui m'agace fortement dans ma vision des choses, C'est un peu le communautarisme culturel, j'ai envie de dire. C'est-à-dire que ce que je n'aime pas, c'est quand les gens en jeans sont entre eux, les gens en costumes sont entre eux, les gens en survêtres sont entre eux, que les gens qui habitent dans le 16e soient que avec les gens qui habitent dans le 16e et ceux qui habitent dans le 18e. Je déteste ça. Ce que j'aime, c'est vraiment cette notion de mixité. Et je trouve qu'on perd beaucoup. On perd beaucoup à souvent fermer les choses dans des cases et fréquenter que des gens qui... Moi, si je fréquentais que des chefs italiens, ça serait tellement pas enrichissant. Or, dans les collégiens avec qui je m'entends très bien, par exemple, j'ai mon ami Go, qui a le restaurant de Zakuro, qui est un restaurant japonais incroyable, et ça m'apporte tellement d'aller manger chez lui, d'échanger avec lui.

  • Christian

    C'est génial, c'est une vraie philosophie forte, mais pour ça, il ne faut pas avoir peur, parce que le communautarisme, quel qu'il soit, ce que tu as décrit, c'est une peur. C'est de rentrer, justement, de rester entre soi, parce que l'autre... l'autre est étranger, il est étrange il est étrange et donc il fait peur donc ce communautarisme on le voit beaucoup aujourd'hui parce que je pense fondamentalement c'est les gens ont peur mais oui c'est vrai,

  • Julien

    peut-être que ça me fait même voir les choses un peu différemment alors merci d'abord,

  • Christian

    merci de tout ce que tu nous as dit, merci d'être venu et en toute confidence si t'avais, je crois que t'as cité quelque chose là déjà une bonne adresse de restaurant Zakuro qui est un

  • Julien

    Petit restaurant japonais où on ne mange pas de sushi, qui est incroyable, tenu par Go et sa maman. Sa maman qui était une star de la chanson au Japon, incroyable, superbe histoire, on mange très bien. Abile, qui est aussi collégien, qui font de la bonne cuisine avec de l'humour. Ils ont un oeuf mayonnaise au gin et au miso, et ils l'ont appelé l'oeuf miso-gin. Je trouve ça très drôle. Et c'est aussi un magasin de vêtements, puisque son épouse, elle, est...

  • Christian

    Ah bah d'accord.

  • Julien

    Et juste une dernière adresse, pizza, parce que c'est ce que les gens attendent de moi généralement. On ne peut pas, dans une vie, ne pas avoir goûté une fois les pizzas de Gabriele Bonci à Rome.

  • Christian

    Il faut aller à Rome, mais c'est l'occasion d'un bon voyage. D'accord, bonne adresse, merci à toi. Écoute Julien, je pense que tu vas aimer notre prochain invité. Il est italien, il s'appelle, tu le connais, Adriano Farano. Il viendra notamment nous parler de son livre, Je ne mangerai pas de ce pain-là. qui nous apprend des choses étonnantes et dans lequel il développe brillamment toute sa philosophie mise en action dans son engagement pour une panification sans gluten en devenant lui-même boulanger alors qu'il était journaliste. Ça promet d'être vraiment intéressant. Alors rendez-vous dans 15 jours.

  • Speaker #0

    Vous venez de déguster un épisode de La Terre à la Tinte. le podcast qui vous donne envie de bien manger. Nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie. Si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef, et en vous abonnant. Vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous !

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Description

Entrez dans l’univers gourmand et créatif de Julien Serri, chef franco-italien, sacré vice-champion de France de pizza, et artisan militant de la qualité. Créateur des concepts Magnà et Baciato, Julien réinvente la Street Food italienne en mêlant respect du produit et innovation culinaire.

À travers cet épisode, il dévoile sa vision d’une cuisine qui ouvre l’esprit du public et valorise les producteurs locaux.

Avec passion, il aborde la transparence, le marketing éthique et sa volonté d’offrir le meilleur au plus grand nombre.
Préparez-vous à savourer une conversation inspirante, pleine de goût et de richesse humaine.


Le Collège Culinaire de France est une association fondée en 2011 à l'initiative de quinze grands chefs restaurateurs à l'instar d'Alain Ducasse, Joël Robuchon, Yannick Alléno, Paul Bocuse, Alain Dutournier, Gilles Goujon, Michel Guérard, Marc Haeberlin, Régis Marcon, Thierry Marx, Gérald Passedat, Laurent Petit, Anne-Sophie Pic, Guy Savoy et Pierre Troisgros. Le Collège Culinaire de France est la seule association, à ce jour, initiée par le plus grand rassemblement de chefs français reconnus et incontestés, qui s’emploie, concrètement, sur le terrain, à relier des Producteurs et Artisans de Qualité avec des Restaurants de Qualité de toutes catégories. Elle rassemble ceux qui œuvrent pour une vision d’avenir du métier, et fédère tous ceux qui s’engagent sur des synergies de valeurs et de pratiques partagées.


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Crédits

En cuisine :

Un foodcast mitonnée aux petits oignons par Suniwan

Illustration servie par Hugo Girard

Un épisode enregistré au Mojo dans le 17éme arrondissement


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans le podcast de La Terre à l'Assiette.

  • Christian

    Bonjour à toutes et à tous. Heureux de vous retrouver pour un nouvel épisode de notre podcast de La Terre à l'Assiette. Vous êtes de plus en plus nombreux à nous suivre et cela nous fait extrêmement plaisir. Et du plaisir, on va en prendre aujourd'hui avec notre invité qui, j'en suis sûr, va ravir tous les amoureux de la cuisine italienne et je sais qu'ils sont nombreux. Julien Serry est un chef franco-italien. expert en matière de pizza et de cuisine italienne. Reconnu par le Collège Cuisineur de France depuis 2022, Julien a été sacré vice-champion de France de la pizza. En 2019, il a fondé Bagga, un établissement qui était rue Notre-Dame-de-Lorette dans le 9e arrondissement. En 2023, Julien Seri a lancé Bacciato, un concept de street food italienne centré sur les panini et focaccia personnalisés. Comment fait-on pour être... au four, à pizza et au moulin. Quelle est la vision de son métier et la vision de son engagement pour le bien manger ? Et surtout, quelle équipe soutient-il lors des matchs France-Italie ? Attention, terrain sensible, mais ici, de la terre à l'assiette, on est transparent et on n'a peur de rien.

  • Speaker #0

    Une émission présentée par Christian Regouby.

  • Christian

    Bonjour, bonjour Julien.

  • Julien

    Buongiorno.

  • Christian

    Alors raconte-nous un petit peu la source de ton identité, c'est quoi ton projet à travers tout ce que tu fais, Dieu sait si tu es prolixe, quelles sont tes convictions profondes ?

  • Julien

    Moi ce qui me plaît dans mon métier, dans mon quotidien en fait, c'est surtout la transmission. Alors je le retrouve avec le collège sur les rapports que j'ai avec les producteurs mais aussi avec les clients. J'aime quand les clients sortent de... d'une expérience culinaire en ayant appris quelque chose.

  • Christian

    D'accord, donc cette notion de transmission, de transmettre ta passion en fait.

  • Julien

    Oui, et puis ma passion, et puis surtout la transmission du bon, du bien, parce que le bon va avec le bien.

  • Christian

    C'est vrai que ce qui est bon pour nous et bon pour la nature, et bien effectivement, tu as raison. Tu es franco-italien, mais est-ce que tu définis à travers aussi un territoire ?

  • Julien

    Moi je dis toujours que je suis un rital, alors ce mot rital c'est le... R de réfugié et Ital pour italien, quand mes grands-parents sont arrivés en France, et pour moi c'est une vraie identité, ça, Rital. C'est-à-dire qu'une de mes recettes préférées, ça va être la carbonara au Cantal, par exemple. Je trouve ça très cool de mixer les deux cultures. Et aujourd'hui, est-ce qu'on peut encore être identitaire ? On est dans une société où on est tous dans une mixité totale, en fait.

  • Christian

    R, c'est quoi justement l'identité aujourd'hui dans une société de mixité totale ? Et c'est quoi l'identité quand on pratique le métier que tu pratiques ?

  • Julien

    Si je dois me... m'identifier, me mettre dans une case, pour moi, c'est du bien, en fait. C'est l'identité du bien, du bon, et c'est ce qui fait que aujourd'hui, même d'un point de vue entrepreneurial, on fait certaines choses et d'autres qu'on se refuse à faire. En fait, c'est des choix, au quotidien, c'est des concessions. Des fois, on passe à côté de choses, mais on gagne d'autres richesses.

  • Christian

    C'est une vision de relation, en fait, par rapport aux autres, par rapport à ta cuisine, par rapport à la nature. par rapport aux produits ?

  • Julien

    C'est l'humain qui m'intéresse, moi.

  • Christian

    C'est l'humain qui t'intéresse, dans une relation, justement. Et quel type de relation avec l'humain ?

  • Julien

    Moi, c'est toujours cet échange. Alors, je n'aime pas ce mot-là, parce que ça marche pour les enfants, mais c'est l'éducation, en fait. Et je pense qu'il n'y a pas d'âge pour s'éduquer, pour éduquer aussi. Mais c'est vraiment ce qui me plaît. C'est-à-dire que quand les clients venaient, par exemple, chez Mania ou chez Bacciato, mon plaisir, c'était de leur faire découvrir des produits. En prenant des chemins de traverse, par exemple, on avait une focaccia qui était garnie d'un culatélo, mais cuit. Et en fait, la plupart des clients ne savaient pas ce que c'était que le culatélo. Donc du coup, avec ce produit qui était un culatélo différent, ça me permettait de faire la lumière sur le vrai culatélo. J'aime prendre des chemins de traverse pour pouvoir éduquer mes clients.

  • Christian

    C'est fondamental ce que tu dis, parce que ce qui montre d'ailleurs que la nourriture mène à tout et est présente partout dans l'éducation, dans la culture, dans la santé, dans tous les domaines. C'est quand même fascinant. Et cette notion d'éducation, c'est au cœur de nos sociétés aujourd'hui. Comment est-ce qu'on éduque ? Tu viens de nous donner un chemin qui est vraiment intéressant. Qu'est-ce qu'on éduque en expliquant, on éduque en faisant participer, on éduque comment ? Là tu dis, on éduque... en faisant prendre des chemins de traverse.

  • Julien

    Oui, parce qu'il ne faut pas être non plus trop fermé. C'est-à-dire que, par exemple, chez Mania, on a pris le chemin de la street food, alors que ce n'était pas du tout ma spécialité avant, parce que ça me permettait d'aller toucher une cible qui était différente. C'est-à-dire que chez Mania, j'avais quand même des jeunes... Il y avait beaucoup de jeunes qui venaient de banlieues, d'autres qui venaient de banlieues un peu plus chics, et ils se retrouvaient là, ils mangeaient tous de la pizza à la truffe, de la pizza à quatre fromages, enfin, ceux qui n'avaient pas l'habitude de manger de la truffe, mangeaient de la truffe chez moi, donc je leur ouvrais des portes, et ceux qui n'avaient pas l'habitude de manger avec les doigts, on va dire ça comme ça, d'être un peu plus street, ils se retrouvaient chez moi et ils avaient l'occasion de pouvoir être street dans un... Et c'est ça qui m'intéresse, en fait, c'est de mettre tout le monde dans la même case, parce que je pense qu'il y a une valeur commune, c'est... Tout le monde en fait, même ceux qui vont dans les fast-foods, il ne faut pas le faire, mais tous ces gens qui vont dans les fast-foods, ils veulent être en bonne santé. Et pour être en bonne santé, c'est à nous de les éduquer, de leur expliquer que ça passe par le bien manger.

  • Christian

    C'est vraiment intéressant parce qu'on pourrait dire, à travers ce que tu dis, à certains moments, c'est du marketing.

  • Julien

    Oui, mais ça passe par là en fait.

  • Christian

    Ça passe par le marketing, mais le fondement. parce que tu as du marketing aussi dans la grande distribution, magnifiquement fait. Le fondement, c'est les valeurs sur lesquelles repose ton approche.

  • Julien

    Oui, mais le marketing, moi, je ne trouve pas que ce soit un gros mot. Je suis un homme d'image, je l'ai toujours été, je le suis encore. Aujourd'hui, tous mes engagements passent par Instagram, YouTube, TikTok. Enfin, je me mets sur toutes les plateformes parce que je pense que... Tous les moyens sont bons, et puis si on parle de grande surface, j'ai pas de honte à dire, je fais pas mes courses, voilà, mais c'est pas ça le truc, c'est de dire que la plupart des gens vont faire les courses en grande surface. Donc il faut qu'on s'intéresse à ce que font ces gens-là pour qu'on puisse aller les chercher sur leur terrain. Par exemple... quand je fais un consulting où on va refaire une carte, si on doit faire un dessert, il peut m'arriver d'aller à la supérette et puis de dire Regardons les arômes yaourt, en fait. Et si je vois qu'il y a, je sais pas, c'est bête, mais poire chocolat, c'est un basique, je vais dire Bon, ça veut dire que ça plaît au grand public. Donc, c'est une première piste, une première approche. Il faut aller les chercher sur ce qui plaise. Si on leur fait quelque chose de trop différent, on reste entre nous et ça me plaît pas, ça.

  • Christian

    Mais à partir de quelle valeur ? Parce que tu fais passer, tu peux faire de la poire cassis à ta sauce, à toi, qui peut être équivalente à ce que fait la grande distribution. Donc le produit, quelle valeur ? Le marketing, tu as tout à fait raison, est un moyen. Pourquoi ne pas l'utiliser ? Simplement, quelle valeur véhicule ? C'est pour faire quoi ?

  • Julien

    En fait, ce que je dis toujours, c'est qu'il faut toujours reprendre le pire et le faire en mieux. Par exemple, on le voit beaucoup sur la pizza, on le voit beaucoup sur le burger dans la street food et c'est pour ça que j'ai pris ce chemin. Mais quand on voit ce que fait le clown américain, pourquoi pas retravailler ce que fait le clown américain, mais avec un bon pain, des bonnes farines, des bonnes viandes et d'aller chercher des belles valeurs, mais d'aller sur un terrain où moi, ce qui m'intéresse, c'est d'aller chercher tous ces jeunes qui vont manger chez ce clown en fait. Et de leur montrer qu'il y a d'autres choses. Donc, c'est vraiment le fondement de mon...

  • Christian

    Une façon de l'éduquer, de les éduquer. Oui,

  • Julien

    et puis surtout de ne pas se les mettre à dos. Parce que ça peut aussi être clivant de se trouver face à quelqu'un qui est hyper fermé en disant, non, la qualité, c'est ça. Et puis, en face, on peut avoir des gens qui se disent, bon, je n'ai pas les moyens, ce n'est pas ma philosophie. Et puis, au final, ils n'oseront pas. Il faut oser, en fait, il faut y aller.

  • Christian

    L'injonction n'est jamais bonne.

  • Julien

    Oui, c'est ça.

  • Christian

    Il faut attirer, il faut attirer. Je te propose de passer une première rubrique, Toc Toc, qui est là ?

  • Speaker #0

    Toc Toc, qui est là ?

  • Christian

    Si tu étais un animal ?

  • Julien

    Un chien. Pourquoi ? Parce que fidèle, loyal, et puis qui a besoin d'être en groupe, en fait, pas solitaire.

  • Christian

    Une saison ?

  • Julien

    Le printemps. le printemps parce que c'est la renaissance et qu'il fait pas trop chaud on est pas dans un extrême froid un extrême chaud et puis l'automne pour moi c'est un petit peu la mort d'une saison alors que le printemps on est sur une renaissance Un mot qui te paraît pour toi ? Un mot c'est compliqué ça il y a perfectionnisme parce que c'est ce qui me pourrit la vie et puis j'aime bien le mot umami parce que je trouve que c'est un terme nouveau Et qui à la fois définit rien du tout.

  • Christian

    Un goût qui n'en est pas un. Exactement.

  • Julien

    Et j'ai l'impression d'être un peu Umami.

  • Christian

    D'accord. Un des cinq sens ?

  • Julien

    Un des cinq sens, c'est l'odorat. Pour moi, tout démarre par l'odorat. Et ensuite, on ouvre les yeux, on voit. L'odorat, c'est vraiment si on a un très beau visuel. Et même si le goût est bon, si l'odorat n'est pas là. L'odorat, pour moi, est primordial. Toute la poésie passe par l'odorat.

  • Christian

    C'est très important au siècle de l'image où tout passe par l'image. C'est vrai. L'honorat.

  • Julien

    Peut-être que c'est pour ça.

  • Christian

    Ce qui a fait dire d'ailleurs à Google que pour montrer des produits, etc., ils allaient faire des émanations d'honorat à travers le téléphone portable. Ça sera sans doute sympathique. Et même pour le goût, ils ont même parlé de lécher le téléphone portable pour arriver au goût.

  • Julien

    Je ne sais pas si j'arriverai à ça.

  • Christian

    Un plat qui t'est favori ?

  • Julien

    Un plat, je dirais... Alors, je... c'est un peu mon identité, mais je dirais une carbonara au Cantal. Ouah, ouah, ouah, ouah.

  • Christian

    Là, tu nouvels l'eau à la bouche. Et une boisson ?

  • Julien

    Une boisson, un thé, parce que le thé chaud, le thé froid, le thé peut être aussi un excitant, le thé peut être un soft. Et puis surtout, on peut aussi aller dans des axes très pointus avec le thé. On peut aussi le prendre juste pour se désaltérer.

  • Christian

    Passons à la deuxième partie de notre entretien. Tout ce qui tourne autour de la notion de transparence. Transparence dans ta relation, transparence dans les produits, transparence dans la relation avec tes collaborateurs, avec les clients. Donc, c'est quoi pour toi un artisan militant de la qualité en termes de transparence ?

  • Julien

    C'est un artisan qui tutoie. Voilà, c'est un artisan qui tutoie. Alors, j'ai un peu tendance, moi, à tutoyer très, très vite aussi. Ma façon d'être, mais c'est ma manière d'être transparent et de réclamer la transparence en retour. Casser les barrières. Dans ma façon de travailler, c'est très important. J'ai vraiment besoin de connaître les gens avec qui je travaille, que ce soit des producteurs ou des collaborateurs. Je suis d'ailleurs du coup un piètre patron parce que j'ai toujours besoin de mettre cette notion d'humain et j'ai du mal à être le bad cop, le mauvais flic. Ça, je ne sais pas faire.

  • Christian

    En fait, en disant tutoiement, ça veut dire que tu casses la notion de... personnages, de représentativité,

  • Julien

    de statut.

  • Christian

    Surtout de statut. Donc d'un seul coup, tout le monde est au même statut, c'est-à-dire que tu as une personne devant toi.

  • Julien

    Je pense que c'est souvent apprécié. Alors il y a des gens qui sont un peu refroidis par ce tutoiement un peu facile, mais je trouve que ça remet tout le monde à sa place et puis qu'on a tous des gens dans notre entourage, même des gens qu'on vouvoie à longueur de journée, très importants, ils ont forcément des gens dans leur entourage. Donc moi, même un... Je ne sais pas, même un banquier, un ministre, je vais très très vite le tutoyer.

  • Christian

    Ils sont interpellés dans leur personne plus que dans leur personnage. Dans leur humanité. Dans leur humanité, en fait. Alors là aussi, en termes de représentativité, le Collège Filière de France, vous avez choisi de ne pas être un label, mais d'être une appellation, d'être défense d'une cause. Pourquoi ?

  • Julien

    Parce qu'un label, on l'a obtenu, on est content, on l'a. Voilà, et on passe à autre chose. Pour moi, le collège culinaire, c'est plus un combat, c'est du militantisme, c'est du quotidien, c'est des valeurs. Et en fait, les valeurs ne se perdent pas. Tandis qu'un label, une fois qu'on l'a obtenu, on a tendance à passer à autre chose. On veut un nouveau jouet. Et en fait, moi je... vois pas le collège du tout comme ça.

  • Christian

    Et du tout préparé, le label.

  • Julien

    Oui, c'est un peu ça. Après, c'est toujours gratifiant pour les équipes. Nous, sur les restaurants, on avait des labels avec qui on travaillait, mais le collège est tout à fait autre chose. Le collège, c'est un combat. Et si on n'adhère pas à une certaine philosophie, en fait, c'est pas la peine, si on veut.

  • Christian

    Oui, il vaut mieux être ailleurs, dans une autre famille, sans critiquer d'ailleurs. Oui, non,

  • Julien

    mais aller chercher des labels, on ne sera pas bien au collège puisqu'on a cette notion où on a besoin de partager, de construire ensemble.

  • Christian

    Dans toute ta démarche, qui est très singulière et qui en même temps est commune effectivement à l'intérieur du Collège Climat de France, quelles sont les difficultés que tu rencontres, les obstacles que tu rencontres pour appliquer ce en quoi tu crois ?

  • Julien

    Cette question, elle est compliquée parce que ce n'est pas des points qu'on aborde, mais c'est le financier. Et elle est compliquée parce qu'au collège, il y a aussi pour moi une valeur qui est importante, c'est que je n'ai jamais négocié un tarif avec un producteur du Collège Culinaire de France. Parce que j'estime qu'on est de la même famille et que du coup, il me fait déjà le juste prix. Et on est sans cesse... obliger nous en cuisine, essayer de trouver des moyens, puis encore plus moi sur la street food, de trouver des moyens de pouvoir travailler avec le mieux, sans que ce soit trop cher pour le client, sinon on retourne dans ce prix qui est clivant, et c'est très compliqué pour moi, c'est vraiment ça le plus dur. C'est l'argent.

  • Christian

    Bien sûr, trouver une logique économique qui correspond à ce que tu fais, et ce que tu veux faire, et la qualité que tu veux faire. et rencontrer et expliquer là aussi sans doute la notion du prix. Parce qu'il y a beaucoup d'impostures sur les prix bas.

  • Julien

    Oui, et sur les prix hauts aussi.

  • Christian

    Sur les prix hauts aussi.

  • Julien

    La truffe, par exemple, parlons-en. Nous, notre pizza à la truffe, on mettait 2 grammes de truffe par pizza et en fait, ça peut sembler rien du tout. Alors que 2 grammes, c'est pas mal du tout quand même. Et au final, on arrivait à avoir un prix lissé sur l'année qui n'était pas trop cher et on arrivait à... Alors que certains profitent du fait que la truffe s'appelle la truffe et que du coup on vend plus cher. Mais le problème c'est qu'on va se mettre à dos toute une clientèle et on ferme des portes.

  • Christian

    Je voudrais passer à un autre moment qu'on appelle fromage ou dessert.

  • Speaker #0

    C'est fromage ou dessert ?

  • Christian

    Logique ou émotion ?

  • Julien

    Plutôt logique.

  • Christian

    Compétition ou coopération ?

  • Julien

    Coopération.

  • Christian

    Travail ou vacances ?

  • Julien

    Je ne travaille pas. Moi, je suis heureux dans mon travail. Donc, je travaille.

  • Christian

    Et en vacances en permanence ?

  • Julien

    Exactement. Temps court ou temps long ? J'aimerais temps court, mais c'est plutôt temps long.

  • Christian

    Et la cuisine étrangère que tu préfères ?

  • Julien

    C'est la cuisine japonaise. Parce que je trouve qu'il y a une finesse. On la retrouve à la fois dans des plats assez pointus, sur la street food, une culture... tout à fait différente et je crois que c'est là où vraiment je me régale le plus.

  • Christian

    Une source d'inspiration aussi ?

  • Julien

    Oui, beaucoup d'inspiration parce que toujours cette umami et puis ces choses qu'on ne connaît pas et c'est ouvrir les portes au maximum.

  • Christian

    C'est formidable parce que depuis un peu plus de deux ans maintenant, le Collège Fils d'Art de France a créé le Collège Fils d'Art du Japon. Voilà, donc il faut le savoir et c'est intéressant parce que justement, il y a des contacts qui vont pouvoir se développer. j'aurais passé une troisième et dernière partie de notre entretien, comment est-ce que tu conçois justement ces relations de coopération alors à deux niveaux la coopération avec des producteurs t'as déjà dit pas mal de choses mais si tu pouvais approfondir ça et puis avec tes collaborateurs aujourd'hui et

  • Julien

    les problématiques que ça peut poser je vais commencer par les collaborateurs parce que c'est le plus compliqué parce que nos collaborateurs On les choisit, mais pas toujours. La restauration est compliquée. Et quelques fois...

  • Christian

    C'est eux qui vous choisissent aussi. Oui,

  • Julien

    voilà, c'est ça. Et puis, surtout, quelques fois, ils ne sont pas sensibilisés aux valeurs qu'on peut avoir. Donc, c'est à nous de transmettre les valeurs, de prendre le temps. Je sais que, par exemple, que ce soit pour Mania, Bacciato ou tous les projets qu'on a eus, chaque nouveau salarié, nous, on prévoit 1h30 et puis on lui fait lire, par exemple... On lui parle du collège, on explique ce qu'est le collège, on lui parle de la charte écotable, on lui parle de tout ça pour qu'il comprenne un petit peu dans quelle idée on est, puisqu'on est une équipe, donc on doit aller dans le même sens. Et pour les producteurs, ce que j'ai l'habitude de dire, c'est que c'est en éclairant les autres qu'on brille le plus. Alors l'objectif, c'est pas de briller, mais il faut éclairer les producteurs et c'est ce que je m'obstine à faire depuis des années. Chez Mania, on avait un mur qu'on appelait The Wall of Fame. Dans les Pizzaria Kitsch, il y a toujours la célébrité avec le Pizzaiolo. Et là, j'ai fait la même chose, mais avec mes producteurs. Et puis, tous les projets qu'il y a à côté sur les réseaux sociaux, donc sur YouTube, mon projet de la fourche à la fourchette, celui-ci, où je me rends chez des producteurs. On a fait huit épisodes. Je crois qu'on a sept collégiens quand même. Et je passe 24 heures avec eux et je les mets en avant. Ça dure 52 minutes. Et puis, je montre leur quotidien. plantent ma tente dans leur jardin. Et l'idée, c'est de les mettre en avant, de montrer ce qu'ils sont. Parce que nos producteurs ne sont jamais mis en lumière. Ils ont des grandes frustrations avec ça. Et pour nous, cuisiner, c'est facile, on est en bout de chaîne. Mais bon, c'est eux les vrais stars. Sans eux, on ne peut rien faire.

  • Christian

    Qu'est-ce que tu ressens au niveau des nouvelles générations qui montent aujourd'hui ? Et qu'est-ce que tu ressens par rapport à ce que tu as connu, toi ?

  • Julien

    Je n'essaie pas de les comprendre, j'essaie plutôt de les rattraper, de m'adapter à eux. Et j'essaie toujours d'être le moins vieux jeu possible. Parce qu'il n'y a pas le choix, c'est comme ça. En fait, il ne faut pas chercher à changer la vision des jeunes. Les jeunes, ils ont leur vision qui correspond à leur état d'esprit, qui correspond à un état sociétal.

  • Christian

    Qu'est-ce qu'ils peuvent t'apporter ? Qu'est-ce que tu peux leur apporter ?

  • Julien

    Qu'est-ce qu'ils peuvent m'apporter ? Beaucoup d'ouverture d'esprit, parce que je trouve que les jeunes générations sont beaucoup plus ouvertes que nous, parce qu'ils ont plus accès à beaucoup de choses. Et puis, moi, qu'est-ce que je peux leur apporter ? J'allais dire un peu de tradition, mais j'ai toujours que l'innovation n'exclut pas la connaissance de la tradition. Et que ce soit pour de la musique ou pour de la nourriture, c'est pareil. Ils écoutent des groupes, pourquoi pas, mais il faut quand même connaître ses bases et tout connaître, en fait. C'est important.

  • Christian

    Tu as dit tout à l'heure beaucoup de choses sur les clients, les éduquer, leur faire comprendre, etc. Tu sais qu'on a cette association Manger Citoyens qui est à côté du Collège Culinaire de France et qui a cette vocation-là. Donc il y a déjà plus de 2500 membres qui sont inscrits. Donc il y a vraiment une synergie avec ce que vous faites au Collège Culinaire de France. Et ça, c'est très bien avec le mode d'approche que tu peux avoir. J'aimerais parler d'un dernier instant. C'est l'ouverture du pot de moutarde.

  • Speaker #0

    La moutarde me mentonnait.

  • Christian

    La bruitarde qui te m'entendait, ton coup de gueule, c'est quoi ?

  • Julien

    En fait, il y en a deux, un actuel et un permanent. L'actuel, c'est les agriculteurs, le soutien aux agriculteurs que je peux leur porter. Avec plein de projets, avec les de la fourche à la fourchette, même dans le travail, en les mettant en avant. Et il m'arrive quelquefois d'entendre des gens qui ne soutiennent pas les agriculteurs et qui ont un peu ce discours de ils l'ont bien cherché En fait, il ne faut pas parler comme ça. C'est ça qui m'énerve, en fait. Ce qui m'énerve, c'est les gens qui ont cette vision-là. Parce que les agriculteurs ont probablement fait des erreurs à un moment, à un instant donné. Mais c'est parce que c'est ce qu'on leur a transmis, c'est ce qu'on leur a expliqué. Et aujourd'hui, voilà. Donc, je pense qu'il faut que tout le monde soutienne les agriculteurs. Et honnêtement, j'ai envie d'aller avec eux sur les autoroutes pour faire des barbecues. Et d'un point de vue permanent, quelque chose qui m'agace fortement dans ma vision des choses, C'est un peu le communautarisme culturel, j'ai envie de dire. C'est-à-dire que ce que je n'aime pas, c'est quand les gens en jeans sont entre eux, les gens en costumes sont entre eux, les gens en survêtres sont entre eux, que les gens qui habitent dans le 16e soient que avec les gens qui habitent dans le 16e et ceux qui habitent dans le 18e. Je déteste ça. Ce que j'aime, c'est vraiment cette notion de mixité. Et je trouve qu'on perd beaucoup. On perd beaucoup à souvent fermer les choses dans des cases et fréquenter que des gens qui... Moi, si je fréquentais que des chefs italiens, ça serait tellement pas enrichissant. Or, dans les collégiens avec qui je m'entends très bien, par exemple, j'ai mon ami Go, qui a le restaurant de Zakuro, qui est un restaurant japonais incroyable, et ça m'apporte tellement d'aller manger chez lui, d'échanger avec lui.

  • Christian

    C'est génial, c'est une vraie philosophie forte, mais pour ça, il ne faut pas avoir peur, parce que le communautarisme, quel qu'il soit, ce que tu as décrit, c'est une peur. C'est de rentrer, justement, de rester entre soi, parce que l'autre... l'autre est étranger, il est étrange il est étrange et donc il fait peur donc ce communautarisme on le voit beaucoup aujourd'hui parce que je pense fondamentalement c'est les gens ont peur mais oui c'est vrai,

  • Julien

    peut-être que ça me fait même voir les choses un peu différemment alors merci d'abord,

  • Christian

    merci de tout ce que tu nous as dit, merci d'être venu et en toute confidence si t'avais, je crois que t'as cité quelque chose là déjà une bonne adresse de restaurant Zakuro qui est un

  • Julien

    Petit restaurant japonais où on ne mange pas de sushi, qui est incroyable, tenu par Go et sa maman. Sa maman qui était une star de la chanson au Japon, incroyable, superbe histoire, on mange très bien. Abile, qui est aussi collégien, qui font de la bonne cuisine avec de l'humour. Ils ont un oeuf mayonnaise au gin et au miso, et ils l'ont appelé l'oeuf miso-gin. Je trouve ça très drôle. Et c'est aussi un magasin de vêtements, puisque son épouse, elle, est...

  • Christian

    Ah bah d'accord.

  • Julien

    Et juste une dernière adresse, pizza, parce que c'est ce que les gens attendent de moi généralement. On ne peut pas, dans une vie, ne pas avoir goûté une fois les pizzas de Gabriele Bonci à Rome.

  • Christian

    Il faut aller à Rome, mais c'est l'occasion d'un bon voyage. D'accord, bonne adresse, merci à toi. Écoute Julien, je pense que tu vas aimer notre prochain invité. Il est italien, il s'appelle, tu le connais, Adriano Farano. Il viendra notamment nous parler de son livre, Je ne mangerai pas de ce pain-là. qui nous apprend des choses étonnantes et dans lequel il développe brillamment toute sa philosophie mise en action dans son engagement pour une panification sans gluten en devenant lui-même boulanger alors qu'il était journaliste. Ça promet d'être vraiment intéressant. Alors rendez-vous dans 15 jours.

  • Speaker #0

    Vous venez de déguster un épisode de La Terre à la Tinte. le podcast qui vous donne envie de bien manger. Nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie. Si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef, et en vous abonnant. Vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous !

Description

Entrez dans l’univers gourmand et créatif de Julien Serri, chef franco-italien, sacré vice-champion de France de pizza, et artisan militant de la qualité. Créateur des concepts Magnà et Baciato, Julien réinvente la Street Food italienne en mêlant respect du produit et innovation culinaire.

À travers cet épisode, il dévoile sa vision d’une cuisine qui ouvre l’esprit du public et valorise les producteurs locaux.

Avec passion, il aborde la transparence, le marketing éthique et sa volonté d’offrir le meilleur au plus grand nombre.
Préparez-vous à savourer une conversation inspirante, pleine de goût et de richesse humaine.


Le Collège Culinaire de France est une association fondée en 2011 à l'initiative de quinze grands chefs restaurateurs à l'instar d'Alain Ducasse, Joël Robuchon, Yannick Alléno, Paul Bocuse, Alain Dutournier, Gilles Goujon, Michel Guérard, Marc Haeberlin, Régis Marcon, Thierry Marx, Gérald Passedat, Laurent Petit, Anne-Sophie Pic, Guy Savoy et Pierre Troisgros. Le Collège Culinaire de France est la seule association, à ce jour, initiée par le plus grand rassemblement de chefs français reconnus et incontestés, qui s’emploie, concrètement, sur le terrain, à relier des Producteurs et Artisans de Qualité avec des Restaurants de Qualité de toutes catégories. Elle rassemble ceux qui œuvrent pour une vision d’avenir du métier, et fédère tous ceux qui s’engagent sur des synergies de valeurs et de pratiques partagées.


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Crédits

En cuisine :

Un foodcast mitonnée aux petits oignons par Suniwan

Illustration servie par Hugo Girard

Un épisode enregistré au Mojo dans le 17éme arrondissement


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans le podcast de La Terre à l'Assiette.

  • Christian

    Bonjour à toutes et à tous. Heureux de vous retrouver pour un nouvel épisode de notre podcast de La Terre à l'Assiette. Vous êtes de plus en plus nombreux à nous suivre et cela nous fait extrêmement plaisir. Et du plaisir, on va en prendre aujourd'hui avec notre invité qui, j'en suis sûr, va ravir tous les amoureux de la cuisine italienne et je sais qu'ils sont nombreux. Julien Serry est un chef franco-italien. expert en matière de pizza et de cuisine italienne. Reconnu par le Collège Cuisineur de France depuis 2022, Julien a été sacré vice-champion de France de la pizza. En 2019, il a fondé Bagga, un établissement qui était rue Notre-Dame-de-Lorette dans le 9e arrondissement. En 2023, Julien Seri a lancé Bacciato, un concept de street food italienne centré sur les panini et focaccia personnalisés. Comment fait-on pour être... au four, à pizza et au moulin. Quelle est la vision de son métier et la vision de son engagement pour le bien manger ? Et surtout, quelle équipe soutient-il lors des matchs France-Italie ? Attention, terrain sensible, mais ici, de la terre à l'assiette, on est transparent et on n'a peur de rien.

  • Speaker #0

    Une émission présentée par Christian Regouby.

  • Christian

    Bonjour, bonjour Julien.

  • Julien

    Buongiorno.

  • Christian

    Alors raconte-nous un petit peu la source de ton identité, c'est quoi ton projet à travers tout ce que tu fais, Dieu sait si tu es prolixe, quelles sont tes convictions profondes ?

  • Julien

    Moi ce qui me plaît dans mon métier, dans mon quotidien en fait, c'est surtout la transmission. Alors je le retrouve avec le collège sur les rapports que j'ai avec les producteurs mais aussi avec les clients. J'aime quand les clients sortent de... d'une expérience culinaire en ayant appris quelque chose.

  • Christian

    D'accord, donc cette notion de transmission, de transmettre ta passion en fait.

  • Julien

    Oui, et puis ma passion, et puis surtout la transmission du bon, du bien, parce que le bon va avec le bien.

  • Christian

    C'est vrai que ce qui est bon pour nous et bon pour la nature, et bien effectivement, tu as raison. Tu es franco-italien, mais est-ce que tu définis à travers aussi un territoire ?

  • Julien

    Moi je dis toujours que je suis un rital, alors ce mot rital c'est le... R de réfugié et Ital pour italien, quand mes grands-parents sont arrivés en France, et pour moi c'est une vraie identité, ça, Rital. C'est-à-dire qu'une de mes recettes préférées, ça va être la carbonara au Cantal, par exemple. Je trouve ça très cool de mixer les deux cultures. Et aujourd'hui, est-ce qu'on peut encore être identitaire ? On est dans une société où on est tous dans une mixité totale, en fait.

  • Christian

    R, c'est quoi justement l'identité aujourd'hui dans une société de mixité totale ? Et c'est quoi l'identité quand on pratique le métier que tu pratiques ?

  • Julien

    Si je dois me... m'identifier, me mettre dans une case, pour moi, c'est du bien, en fait. C'est l'identité du bien, du bon, et c'est ce qui fait que aujourd'hui, même d'un point de vue entrepreneurial, on fait certaines choses et d'autres qu'on se refuse à faire. En fait, c'est des choix, au quotidien, c'est des concessions. Des fois, on passe à côté de choses, mais on gagne d'autres richesses.

  • Christian

    C'est une vision de relation, en fait, par rapport aux autres, par rapport à ta cuisine, par rapport à la nature. par rapport aux produits ?

  • Julien

    C'est l'humain qui m'intéresse, moi.

  • Christian

    C'est l'humain qui t'intéresse, dans une relation, justement. Et quel type de relation avec l'humain ?

  • Julien

    Moi, c'est toujours cet échange. Alors, je n'aime pas ce mot-là, parce que ça marche pour les enfants, mais c'est l'éducation, en fait. Et je pense qu'il n'y a pas d'âge pour s'éduquer, pour éduquer aussi. Mais c'est vraiment ce qui me plaît. C'est-à-dire que quand les clients venaient, par exemple, chez Mania ou chez Bacciato, mon plaisir, c'était de leur faire découvrir des produits. En prenant des chemins de traverse, par exemple, on avait une focaccia qui était garnie d'un culatélo, mais cuit. Et en fait, la plupart des clients ne savaient pas ce que c'était que le culatélo. Donc du coup, avec ce produit qui était un culatélo différent, ça me permettait de faire la lumière sur le vrai culatélo. J'aime prendre des chemins de traverse pour pouvoir éduquer mes clients.

  • Christian

    C'est fondamental ce que tu dis, parce que ce qui montre d'ailleurs que la nourriture mène à tout et est présente partout dans l'éducation, dans la culture, dans la santé, dans tous les domaines. C'est quand même fascinant. Et cette notion d'éducation, c'est au cœur de nos sociétés aujourd'hui. Comment est-ce qu'on éduque ? Tu viens de nous donner un chemin qui est vraiment intéressant. Qu'est-ce qu'on éduque en expliquant, on éduque en faisant participer, on éduque comment ? Là tu dis, on éduque... en faisant prendre des chemins de traverse.

  • Julien

    Oui, parce qu'il ne faut pas être non plus trop fermé. C'est-à-dire que, par exemple, chez Mania, on a pris le chemin de la street food, alors que ce n'était pas du tout ma spécialité avant, parce que ça me permettait d'aller toucher une cible qui était différente. C'est-à-dire que chez Mania, j'avais quand même des jeunes... Il y avait beaucoup de jeunes qui venaient de banlieues, d'autres qui venaient de banlieues un peu plus chics, et ils se retrouvaient là, ils mangeaient tous de la pizza à la truffe, de la pizza à quatre fromages, enfin, ceux qui n'avaient pas l'habitude de manger de la truffe, mangeaient de la truffe chez moi, donc je leur ouvrais des portes, et ceux qui n'avaient pas l'habitude de manger avec les doigts, on va dire ça comme ça, d'être un peu plus street, ils se retrouvaient chez moi et ils avaient l'occasion de pouvoir être street dans un... Et c'est ça qui m'intéresse, en fait, c'est de mettre tout le monde dans la même case, parce que je pense qu'il y a une valeur commune, c'est... Tout le monde en fait, même ceux qui vont dans les fast-foods, il ne faut pas le faire, mais tous ces gens qui vont dans les fast-foods, ils veulent être en bonne santé. Et pour être en bonne santé, c'est à nous de les éduquer, de leur expliquer que ça passe par le bien manger.

  • Christian

    C'est vraiment intéressant parce qu'on pourrait dire, à travers ce que tu dis, à certains moments, c'est du marketing.

  • Julien

    Oui, mais ça passe par là en fait.

  • Christian

    Ça passe par le marketing, mais le fondement. parce que tu as du marketing aussi dans la grande distribution, magnifiquement fait. Le fondement, c'est les valeurs sur lesquelles repose ton approche.

  • Julien

    Oui, mais le marketing, moi, je ne trouve pas que ce soit un gros mot. Je suis un homme d'image, je l'ai toujours été, je le suis encore. Aujourd'hui, tous mes engagements passent par Instagram, YouTube, TikTok. Enfin, je me mets sur toutes les plateformes parce que je pense que... Tous les moyens sont bons, et puis si on parle de grande surface, j'ai pas de honte à dire, je fais pas mes courses, voilà, mais c'est pas ça le truc, c'est de dire que la plupart des gens vont faire les courses en grande surface. Donc il faut qu'on s'intéresse à ce que font ces gens-là pour qu'on puisse aller les chercher sur leur terrain. Par exemple... quand je fais un consulting où on va refaire une carte, si on doit faire un dessert, il peut m'arriver d'aller à la supérette et puis de dire Regardons les arômes yaourt, en fait. Et si je vois qu'il y a, je sais pas, c'est bête, mais poire chocolat, c'est un basique, je vais dire Bon, ça veut dire que ça plaît au grand public. Donc, c'est une première piste, une première approche. Il faut aller les chercher sur ce qui plaise. Si on leur fait quelque chose de trop différent, on reste entre nous et ça me plaît pas, ça.

  • Christian

    Mais à partir de quelle valeur ? Parce que tu fais passer, tu peux faire de la poire cassis à ta sauce, à toi, qui peut être équivalente à ce que fait la grande distribution. Donc le produit, quelle valeur ? Le marketing, tu as tout à fait raison, est un moyen. Pourquoi ne pas l'utiliser ? Simplement, quelle valeur véhicule ? C'est pour faire quoi ?

  • Julien

    En fait, ce que je dis toujours, c'est qu'il faut toujours reprendre le pire et le faire en mieux. Par exemple, on le voit beaucoup sur la pizza, on le voit beaucoup sur le burger dans la street food et c'est pour ça que j'ai pris ce chemin. Mais quand on voit ce que fait le clown américain, pourquoi pas retravailler ce que fait le clown américain, mais avec un bon pain, des bonnes farines, des bonnes viandes et d'aller chercher des belles valeurs, mais d'aller sur un terrain où moi, ce qui m'intéresse, c'est d'aller chercher tous ces jeunes qui vont manger chez ce clown en fait. Et de leur montrer qu'il y a d'autres choses. Donc, c'est vraiment le fondement de mon...

  • Christian

    Une façon de l'éduquer, de les éduquer. Oui,

  • Julien

    et puis surtout de ne pas se les mettre à dos. Parce que ça peut aussi être clivant de se trouver face à quelqu'un qui est hyper fermé en disant, non, la qualité, c'est ça. Et puis, en face, on peut avoir des gens qui se disent, bon, je n'ai pas les moyens, ce n'est pas ma philosophie. Et puis, au final, ils n'oseront pas. Il faut oser, en fait, il faut y aller.

  • Christian

    L'injonction n'est jamais bonne.

  • Julien

    Oui, c'est ça.

  • Christian

    Il faut attirer, il faut attirer. Je te propose de passer une première rubrique, Toc Toc, qui est là ?

  • Speaker #0

    Toc Toc, qui est là ?

  • Christian

    Si tu étais un animal ?

  • Julien

    Un chien. Pourquoi ? Parce que fidèle, loyal, et puis qui a besoin d'être en groupe, en fait, pas solitaire.

  • Christian

    Une saison ?

  • Julien

    Le printemps. le printemps parce que c'est la renaissance et qu'il fait pas trop chaud on est pas dans un extrême froid un extrême chaud et puis l'automne pour moi c'est un petit peu la mort d'une saison alors que le printemps on est sur une renaissance Un mot qui te paraît pour toi ? Un mot c'est compliqué ça il y a perfectionnisme parce que c'est ce qui me pourrit la vie et puis j'aime bien le mot umami parce que je trouve que c'est un terme nouveau Et qui à la fois définit rien du tout.

  • Christian

    Un goût qui n'en est pas un. Exactement.

  • Julien

    Et j'ai l'impression d'être un peu Umami.

  • Christian

    D'accord. Un des cinq sens ?

  • Julien

    Un des cinq sens, c'est l'odorat. Pour moi, tout démarre par l'odorat. Et ensuite, on ouvre les yeux, on voit. L'odorat, c'est vraiment si on a un très beau visuel. Et même si le goût est bon, si l'odorat n'est pas là. L'odorat, pour moi, est primordial. Toute la poésie passe par l'odorat.

  • Christian

    C'est très important au siècle de l'image où tout passe par l'image. C'est vrai. L'honorat.

  • Julien

    Peut-être que c'est pour ça.

  • Christian

    Ce qui a fait dire d'ailleurs à Google que pour montrer des produits, etc., ils allaient faire des émanations d'honorat à travers le téléphone portable. Ça sera sans doute sympathique. Et même pour le goût, ils ont même parlé de lécher le téléphone portable pour arriver au goût.

  • Julien

    Je ne sais pas si j'arriverai à ça.

  • Christian

    Un plat qui t'est favori ?

  • Julien

    Un plat, je dirais... Alors, je... c'est un peu mon identité, mais je dirais une carbonara au Cantal. Ouah, ouah, ouah, ouah.

  • Christian

    Là, tu nouvels l'eau à la bouche. Et une boisson ?

  • Julien

    Une boisson, un thé, parce que le thé chaud, le thé froid, le thé peut être aussi un excitant, le thé peut être un soft. Et puis surtout, on peut aussi aller dans des axes très pointus avec le thé. On peut aussi le prendre juste pour se désaltérer.

  • Christian

    Passons à la deuxième partie de notre entretien. Tout ce qui tourne autour de la notion de transparence. Transparence dans ta relation, transparence dans les produits, transparence dans la relation avec tes collaborateurs, avec les clients. Donc, c'est quoi pour toi un artisan militant de la qualité en termes de transparence ?

  • Julien

    C'est un artisan qui tutoie. Voilà, c'est un artisan qui tutoie. Alors, j'ai un peu tendance, moi, à tutoyer très, très vite aussi. Ma façon d'être, mais c'est ma manière d'être transparent et de réclamer la transparence en retour. Casser les barrières. Dans ma façon de travailler, c'est très important. J'ai vraiment besoin de connaître les gens avec qui je travaille, que ce soit des producteurs ou des collaborateurs. Je suis d'ailleurs du coup un piètre patron parce que j'ai toujours besoin de mettre cette notion d'humain et j'ai du mal à être le bad cop, le mauvais flic. Ça, je ne sais pas faire.

  • Christian

    En fait, en disant tutoiement, ça veut dire que tu casses la notion de... personnages, de représentativité,

  • Julien

    de statut.

  • Christian

    Surtout de statut. Donc d'un seul coup, tout le monde est au même statut, c'est-à-dire que tu as une personne devant toi.

  • Julien

    Je pense que c'est souvent apprécié. Alors il y a des gens qui sont un peu refroidis par ce tutoiement un peu facile, mais je trouve que ça remet tout le monde à sa place et puis qu'on a tous des gens dans notre entourage, même des gens qu'on vouvoie à longueur de journée, très importants, ils ont forcément des gens dans leur entourage. Donc moi, même un... Je ne sais pas, même un banquier, un ministre, je vais très très vite le tutoyer.

  • Christian

    Ils sont interpellés dans leur personne plus que dans leur personnage. Dans leur humanité. Dans leur humanité, en fait. Alors là aussi, en termes de représentativité, le Collège Filière de France, vous avez choisi de ne pas être un label, mais d'être une appellation, d'être défense d'une cause. Pourquoi ?

  • Julien

    Parce qu'un label, on l'a obtenu, on est content, on l'a. Voilà, et on passe à autre chose. Pour moi, le collège culinaire, c'est plus un combat, c'est du militantisme, c'est du quotidien, c'est des valeurs. Et en fait, les valeurs ne se perdent pas. Tandis qu'un label, une fois qu'on l'a obtenu, on a tendance à passer à autre chose. On veut un nouveau jouet. Et en fait, moi je... vois pas le collège du tout comme ça.

  • Christian

    Et du tout préparé, le label.

  • Julien

    Oui, c'est un peu ça. Après, c'est toujours gratifiant pour les équipes. Nous, sur les restaurants, on avait des labels avec qui on travaillait, mais le collège est tout à fait autre chose. Le collège, c'est un combat. Et si on n'adhère pas à une certaine philosophie, en fait, c'est pas la peine, si on veut.

  • Christian

    Oui, il vaut mieux être ailleurs, dans une autre famille, sans critiquer d'ailleurs. Oui, non,

  • Julien

    mais aller chercher des labels, on ne sera pas bien au collège puisqu'on a cette notion où on a besoin de partager, de construire ensemble.

  • Christian

    Dans toute ta démarche, qui est très singulière et qui en même temps est commune effectivement à l'intérieur du Collège Climat de France, quelles sont les difficultés que tu rencontres, les obstacles que tu rencontres pour appliquer ce en quoi tu crois ?

  • Julien

    Cette question, elle est compliquée parce que ce n'est pas des points qu'on aborde, mais c'est le financier. Et elle est compliquée parce qu'au collège, il y a aussi pour moi une valeur qui est importante, c'est que je n'ai jamais négocié un tarif avec un producteur du Collège Culinaire de France. Parce que j'estime qu'on est de la même famille et que du coup, il me fait déjà le juste prix. Et on est sans cesse... obliger nous en cuisine, essayer de trouver des moyens, puis encore plus moi sur la street food, de trouver des moyens de pouvoir travailler avec le mieux, sans que ce soit trop cher pour le client, sinon on retourne dans ce prix qui est clivant, et c'est très compliqué pour moi, c'est vraiment ça le plus dur. C'est l'argent.

  • Christian

    Bien sûr, trouver une logique économique qui correspond à ce que tu fais, et ce que tu veux faire, et la qualité que tu veux faire. et rencontrer et expliquer là aussi sans doute la notion du prix. Parce qu'il y a beaucoup d'impostures sur les prix bas.

  • Julien

    Oui, et sur les prix hauts aussi.

  • Christian

    Sur les prix hauts aussi.

  • Julien

    La truffe, par exemple, parlons-en. Nous, notre pizza à la truffe, on mettait 2 grammes de truffe par pizza et en fait, ça peut sembler rien du tout. Alors que 2 grammes, c'est pas mal du tout quand même. Et au final, on arrivait à avoir un prix lissé sur l'année qui n'était pas trop cher et on arrivait à... Alors que certains profitent du fait que la truffe s'appelle la truffe et que du coup on vend plus cher. Mais le problème c'est qu'on va se mettre à dos toute une clientèle et on ferme des portes.

  • Christian

    Je voudrais passer à un autre moment qu'on appelle fromage ou dessert.

  • Speaker #0

    C'est fromage ou dessert ?

  • Christian

    Logique ou émotion ?

  • Julien

    Plutôt logique.

  • Christian

    Compétition ou coopération ?

  • Julien

    Coopération.

  • Christian

    Travail ou vacances ?

  • Julien

    Je ne travaille pas. Moi, je suis heureux dans mon travail. Donc, je travaille.

  • Christian

    Et en vacances en permanence ?

  • Julien

    Exactement. Temps court ou temps long ? J'aimerais temps court, mais c'est plutôt temps long.

  • Christian

    Et la cuisine étrangère que tu préfères ?

  • Julien

    C'est la cuisine japonaise. Parce que je trouve qu'il y a une finesse. On la retrouve à la fois dans des plats assez pointus, sur la street food, une culture... tout à fait différente et je crois que c'est là où vraiment je me régale le plus.

  • Christian

    Une source d'inspiration aussi ?

  • Julien

    Oui, beaucoup d'inspiration parce que toujours cette umami et puis ces choses qu'on ne connaît pas et c'est ouvrir les portes au maximum.

  • Christian

    C'est formidable parce que depuis un peu plus de deux ans maintenant, le Collège Fils d'Art de France a créé le Collège Fils d'Art du Japon. Voilà, donc il faut le savoir et c'est intéressant parce que justement, il y a des contacts qui vont pouvoir se développer. j'aurais passé une troisième et dernière partie de notre entretien, comment est-ce que tu conçois justement ces relations de coopération alors à deux niveaux la coopération avec des producteurs t'as déjà dit pas mal de choses mais si tu pouvais approfondir ça et puis avec tes collaborateurs aujourd'hui et

  • Julien

    les problématiques que ça peut poser je vais commencer par les collaborateurs parce que c'est le plus compliqué parce que nos collaborateurs On les choisit, mais pas toujours. La restauration est compliquée. Et quelques fois...

  • Christian

    C'est eux qui vous choisissent aussi. Oui,

  • Julien

    voilà, c'est ça. Et puis, surtout, quelques fois, ils ne sont pas sensibilisés aux valeurs qu'on peut avoir. Donc, c'est à nous de transmettre les valeurs, de prendre le temps. Je sais que, par exemple, que ce soit pour Mania, Bacciato ou tous les projets qu'on a eus, chaque nouveau salarié, nous, on prévoit 1h30 et puis on lui fait lire, par exemple... On lui parle du collège, on explique ce qu'est le collège, on lui parle de la charte écotable, on lui parle de tout ça pour qu'il comprenne un petit peu dans quelle idée on est, puisqu'on est une équipe, donc on doit aller dans le même sens. Et pour les producteurs, ce que j'ai l'habitude de dire, c'est que c'est en éclairant les autres qu'on brille le plus. Alors l'objectif, c'est pas de briller, mais il faut éclairer les producteurs et c'est ce que je m'obstine à faire depuis des années. Chez Mania, on avait un mur qu'on appelait The Wall of Fame. Dans les Pizzaria Kitsch, il y a toujours la célébrité avec le Pizzaiolo. Et là, j'ai fait la même chose, mais avec mes producteurs. Et puis, tous les projets qu'il y a à côté sur les réseaux sociaux, donc sur YouTube, mon projet de la fourche à la fourchette, celui-ci, où je me rends chez des producteurs. On a fait huit épisodes. Je crois qu'on a sept collégiens quand même. Et je passe 24 heures avec eux et je les mets en avant. Ça dure 52 minutes. Et puis, je montre leur quotidien. plantent ma tente dans leur jardin. Et l'idée, c'est de les mettre en avant, de montrer ce qu'ils sont. Parce que nos producteurs ne sont jamais mis en lumière. Ils ont des grandes frustrations avec ça. Et pour nous, cuisiner, c'est facile, on est en bout de chaîne. Mais bon, c'est eux les vrais stars. Sans eux, on ne peut rien faire.

  • Christian

    Qu'est-ce que tu ressens au niveau des nouvelles générations qui montent aujourd'hui ? Et qu'est-ce que tu ressens par rapport à ce que tu as connu, toi ?

  • Julien

    Je n'essaie pas de les comprendre, j'essaie plutôt de les rattraper, de m'adapter à eux. Et j'essaie toujours d'être le moins vieux jeu possible. Parce qu'il n'y a pas le choix, c'est comme ça. En fait, il ne faut pas chercher à changer la vision des jeunes. Les jeunes, ils ont leur vision qui correspond à leur état d'esprit, qui correspond à un état sociétal.

  • Christian

    Qu'est-ce qu'ils peuvent t'apporter ? Qu'est-ce que tu peux leur apporter ?

  • Julien

    Qu'est-ce qu'ils peuvent m'apporter ? Beaucoup d'ouverture d'esprit, parce que je trouve que les jeunes générations sont beaucoup plus ouvertes que nous, parce qu'ils ont plus accès à beaucoup de choses. Et puis, moi, qu'est-ce que je peux leur apporter ? J'allais dire un peu de tradition, mais j'ai toujours que l'innovation n'exclut pas la connaissance de la tradition. Et que ce soit pour de la musique ou pour de la nourriture, c'est pareil. Ils écoutent des groupes, pourquoi pas, mais il faut quand même connaître ses bases et tout connaître, en fait. C'est important.

  • Christian

    Tu as dit tout à l'heure beaucoup de choses sur les clients, les éduquer, leur faire comprendre, etc. Tu sais qu'on a cette association Manger Citoyens qui est à côté du Collège Culinaire de France et qui a cette vocation-là. Donc il y a déjà plus de 2500 membres qui sont inscrits. Donc il y a vraiment une synergie avec ce que vous faites au Collège Culinaire de France. Et ça, c'est très bien avec le mode d'approche que tu peux avoir. J'aimerais parler d'un dernier instant. C'est l'ouverture du pot de moutarde.

  • Speaker #0

    La moutarde me mentonnait.

  • Christian

    La bruitarde qui te m'entendait, ton coup de gueule, c'est quoi ?

  • Julien

    En fait, il y en a deux, un actuel et un permanent. L'actuel, c'est les agriculteurs, le soutien aux agriculteurs que je peux leur porter. Avec plein de projets, avec les de la fourche à la fourchette, même dans le travail, en les mettant en avant. Et il m'arrive quelquefois d'entendre des gens qui ne soutiennent pas les agriculteurs et qui ont un peu ce discours de ils l'ont bien cherché En fait, il ne faut pas parler comme ça. C'est ça qui m'énerve, en fait. Ce qui m'énerve, c'est les gens qui ont cette vision-là. Parce que les agriculteurs ont probablement fait des erreurs à un moment, à un instant donné. Mais c'est parce que c'est ce qu'on leur a transmis, c'est ce qu'on leur a expliqué. Et aujourd'hui, voilà. Donc, je pense qu'il faut que tout le monde soutienne les agriculteurs. Et honnêtement, j'ai envie d'aller avec eux sur les autoroutes pour faire des barbecues. Et d'un point de vue permanent, quelque chose qui m'agace fortement dans ma vision des choses, C'est un peu le communautarisme culturel, j'ai envie de dire. C'est-à-dire que ce que je n'aime pas, c'est quand les gens en jeans sont entre eux, les gens en costumes sont entre eux, les gens en survêtres sont entre eux, que les gens qui habitent dans le 16e soient que avec les gens qui habitent dans le 16e et ceux qui habitent dans le 18e. Je déteste ça. Ce que j'aime, c'est vraiment cette notion de mixité. Et je trouve qu'on perd beaucoup. On perd beaucoup à souvent fermer les choses dans des cases et fréquenter que des gens qui... Moi, si je fréquentais que des chefs italiens, ça serait tellement pas enrichissant. Or, dans les collégiens avec qui je m'entends très bien, par exemple, j'ai mon ami Go, qui a le restaurant de Zakuro, qui est un restaurant japonais incroyable, et ça m'apporte tellement d'aller manger chez lui, d'échanger avec lui.

  • Christian

    C'est génial, c'est une vraie philosophie forte, mais pour ça, il ne faut pas avoir peur, parce que le communautarisme, quel qu'il soit, ce que tu as décrit, c'est une peur. C'est de rentrer, justement, de rester entre soi, parce que l'autre... l'autre est étranger, il est étrange il est étrange et donc il fait peur donc ce communautarisme on le voit beaucoup aujourd'hui parce que je pense fondamentalement c'est les gens ont peur mais oui c'est vrai,

  • Julien

    peut-être que ça me fait même voir les choses un peu différemment alors merci d'abord,

  • Christian

    merci de tout ce que tu nous as dit, merci d'être venu et en toute confidence si t'avais, je crois que t'as cité quelque chose là déjà une bonne adresse de restaurant Zakuro qui est un

  • Julien

    Petit restaurant japonais où on ne mange pas de sushi, qui est incroyable, tenu par Go et sa maman. Sa maman qui était une star de la chanson au Japon, incroyable, superbe histoire, on mange très bien. Abile, qui est aussi collégien, qui font de la bonne cuisine avec de l'humour. Ils ont un oeuf mayonnaise au gin et au miso, et ils l'ont appelé l'oeuf miso-gin. Je trouve ça très drôle. Et c'est aussi un magasin de vêtements, puisque son épouse, elle, est...

  • Christian

    Ah bah d'accord.

  • Julien

    Et juste une dernière adresse, pizza, parce que c'est ce que les gens attendent de moi généralement. On ne peut pas, dans une vie, ne pas avoir goûté une fois les pizzas de Gabriele Bonci à Rome.

  • Christian

    Il faut aller à Rome, mais c'est l'occasion d'un bon voyage. D'accord, bonne adresse, merci à toi. Écoute Julien, je pense que tu vas aimer notre prochain invité. Il est italien, il s'appelle, tu le connais, Adriano Farano. Il viendra notamment nous parler de son livre, Je ne mangerai pas de ce pain-là. qui nous apprend des choses étonnantes et dans lequel il développe brillamment toute sa philosophie mise en action dans son engagement pour une panification sans gluten en devenant lui-même boulanger alors qu'il était journaliste. Ça promet d'être vraiment intéressant. Alors rendez-vous dans 15 jours.

  • Speaker #0

    Vous venez de déguster un épisode de La Terre à la Tinte. le podcast qui vous donne envie de bien manger. Nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie. Si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef, et en vous abonnant. Vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous !

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