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De la terre à l'assiette - tous artisans du bien manger !

E13 - Thierry Fedon - La productivité du temps court à partir d’une démarche de temps long

E13 - Thierry Fedon - La productivité du temps court à partir d’une démarche de temps long

25min |03/04/2025
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Description

Thierry Fedon de la Maison Fedon en Haute-Vienne n’est pas seulement un apiculteur passionné.

C’est un explorateur des saveurs, un protecteur de la biodiversité et un artisan militant de la qualité.

Thierry perpétue l’héritage familial de la Maison Fedon, tout en lui apportant une vision unique, nourrie par des voyages à travers le monde.

Autant de rencontres qui ont façonné son approche.


Dans cet épisode, il partage son histoire, ses voyages, et sa quête d’une apiculture respectueuse de la nature et des abeilles.

Il évoque aussi les défis de son métier, l’impact du dérèglement climatique, la lutte contre la fraude au miel, et l’importance de son approche qui part des territoires.

Découvrez comment Thierry transcende les limites de son métier pour en faire un véritable engagement écologique et humain.


Le Collège Culinaire de France est une association fondée en 2011 à l'initiative de quinze grands chefs restaurateurs à l'instar d'Alain Ducasse, Joël Robuchon, Yannick Alléno, Paul Bocuse, Alain Dutournier, Gilles Goujon, Michel Guérard, Marc Haeberlin, Régis Marcon, Thierry Marx, Gérald Passedat, Laurent Petit, Anne-Sophie Pic, Guy Savoy et Pierre Troisgros. Le Collège Culinaire de France est la seule association, à ce jour, initiée par le plus grand rassemblement de chefs français reconnus et incontestés, qui s’emploie, concrètement, sur le terrain, à relier des Producteurs et Artisans de Qualité avec des Restaurants de Qualité de toutes catégories. Elle rassemble ceux qui œuvrent pour une vision d’avenir du métier, et fédère tous ceux qui s’engagent sur des synergies de valeurs et de pratiques partagées.


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Crédits

En cuisine :

Un foodcast mitonnée aux petits oignons par Suniwan

Illustration servie par Hugo Girard

Un épisode enregistré au Mojo dans le 17éme arrondissement de Paris


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans le podcast de La Terre à l'Assiette.

  • Christian

    Bonjour, je suis ravi de vous retrouver dans un nouvel épisode de La Terre à l'Assiette, le podcast qui met en avant les artisans du bien-manger, celles et ceux qui vivent leur passion au service d'une gastronomie humaniste et plus jeune. Qui mieux que mon invité du jour pour incarner ce combat ? C'est sur la commune de Razès, en Haute-Neuve, que Thierry Feudon, de la maison Feudon, possède sa ferme apicole. L'histoire de la maison Feudon commence en 1960, lorsque Jean et Solange Feudon débutent leur activité d'apiculteur. Dès son plus jeune âge, leur fils Thierry les assiste en bravant de nombreuses piqûres. Cela ne l'a pas découragé bien d'encontre. À 18 ans, ce voyageur dans l'âme est désireux d'en apprendre davantage sur cette activité fascinante, décide de partir explorer l'univers apicole à travers le monde. Pourquoi ce choix ? En quoi ce voyage a-t-il changé sa vision du métier ? Est-elle toujours la même aujourd'hui ? Il posera la question. Reconnu par le Collège Culière de France depuis 2018, nous nous intéressons également avec lui aux enjeux et aux défis à relever pour pérenniser une activité qui, on le sait, est touchée au premier plan par le dérèglement climatique.

  • Speaker #0

    Une émission présentée par Christian Regouby.

  • Christian

    Bonjour Thierry.

  • Thierry

    Bonjour Christian.

  • Christian

    Alors raconte-nous un petit peu comment s'est forgé ton identité à travers justement cette histoire que j'ai rapidement évoquée pour que tu puisses développer ta vision. de ce métier que tu incarnes aujourd'hui et que tu portes courageusement.

  • Thierry

    Alors comme tu l'as expliqué, effectivement, moi j'ai baigné au milieu des abeilles dès mon plus jeune âge. J'ai vraiment cette activité à travers les parents. je suivais dans toute leur activité, ça a vraiment mis mes sens en éveil. C'est une empreinte très forte, très diversifiée au fil des saisons et des activités. Et puis en plus, avec les ruches, on peut se déplacer, on n'est pas lié à un foncier, on peut effectuer de la transhumance. Donc en fait, j'ai tout de suite ressenti cette très grande richesse, cette diversité. Et puis un peu plus tard, j'ai voulu étendre ce territoire de découverte en allant un petit peu plus loin que la ferme familiale.

  • Christian

    Et ce voyage que tu as entrepris à 18 ans, 18 ans. Pourquoi ? Qu'est-ce qui a motivé le fait de partir comme ça ?

  • Thierry

    L'inconscience, sûrement. J'ai voulu aller le plus loin possible en perdant tous mes repères. Donc je suis parti au Japon, avec l'idée finalement de trouver un apiculteur. Donc j'ai fait le tour du Japon en stop jusqu'au moment où j'ai trouvé un apiculteur. Et suite à un problème d'attaque d'un rucher par un ours, finalement j'ai eu ma place, puisque je devenais nécessaire dans cette exploitation. Donc c'est comme ça que j'ai été accepté.

  • Christian

    C'est là où en fait l'inconscience n'est pas de l'inconséquence.

  • Thierry

    Oui, j'y ai goûté. Donc après, ça m'a donné envie de continuer. Après, je suis parti deux ans en Afrique, en Nouvelle-Zélande, à travers le monde, dans beaucoup d'endroits, puisqu'il y a des apiculteurs partout. Et on arrive avec un savoir-faire. Donc personne ne nous attend, mais finalement, on est bienvenus assez rapidement.

  • Christian

    Alors tu m'as dit par inconscience, mais le pourquoi vraiment de ce voyage, indépendamment de la manière dont tu es parti, et qu'est-ce que ça t'a vraiment apporté de différent ?

  • Thierry

    Je pense que je me suis rendu compte qu'il y a une autre façon de travailler, puisque je ne connaissais que celle de mes parents.

  • Christian

    C'est pour ça que tu es parti, parce que tu voulais voir une autre façon.

  • Thierry

    Oui, je voulais découvrir d'autres horizons, avec d'autres apiculteurs, d'autres abeilles, d'autres environnements surtout. Et ça m'a permis, à travers les semaines que j'ai pu passer dans le nord du Japon, en Hokkaido, de rencontrer des gens assez formidables. Finalement, qui sont partout où j'ai pu voyager après. Ce n'était pas tant les techniques qu'on apprend, mais plutôt le regard de l'autre. de gens qui sont devenus des mentors, finalement. Quelle est leur appréhension de leur activité qu'on partage, la passion qu'on partage ? Et en fait, c'est ce que j'en ai gardé. C'est pourquoi ils sont comme ça, comment ils en parlent, comment ils se comportent, comment ils se comportent bien, souvent. Et pourquoi ça devient des mentors aussi. Alors, ce n'est pas une ambition de devenir un mentor, mais c'est d'appréhender, en fait, cette façon de cohabiter entre la nature. un insecte et puis de faire une activité qui reste toujours aussi passionnante. Ça enrichit réellement toutes les ambitions que je pouvais avoir en étant jeune. Oui, oui, vraiment. Et mon regard des années après, c'est que ça me donne vraiment l'envie de continuer à rencontrer des gens qui partagent la même activité que moi, avec la même passion. Et c'est vrai que si je me retrouve en Ouzbékistan ou en Bolivie, tout de suite on est au cœur des choses. En partageant une même passion, en fait on comprend le pays tout de suite. C'est étonnant, très étonnant, on n'a pas besoin de rester très longtemps et de poser des questions. On regarde, on partage, on regarde comment la personne parle à ses abeilles ou les regarde. regarde ou parle d'elle. En fait, on comprend beaucoup de choses très vite. Et ce partage, en fait, il est très fort.

  • Christian

    C'est intéressant parce que vous parlez souvent au collège de territoire. C'est quoi ton territoire ? On voit bien qu'il est à la fois ancré quelque part, mais il est en même temps mouvant à travers ce que tu as capté à travers le monde et cette transhumance dont tu parles, cette mobilité qu'il peut y avoir à travers tes ruches.

  • Thierry

    Avant de voyager, je n'avais pas la notion de mon territoire. C'était mon quotidien. Et c'est vraiment en revenant sur ce territoire-là. limousin que je me suis aperçu de toute sa beauté de toute sa richesse et ensuite il faut savoir que nous avec nos abeilles avec nos ruches on lit le paysage où on anticipe le paysage sur ce qui va se passer au niveau des fleuraisons est en fait notre le fondement notre notre regard c'est ensuite d'apporter une saveur à ce paysage à travers le miel ou les miels qu'on produit.

  • Christian

    Ce que tu évoques me fait penser à quelque chose de totalement nouveau et totalement porté vers l'avenir dans la relation à la nature. Il me semble, tu disais tout à l'heure, les sens en éveil. Il y a une forme d'hybridation entre la nature et ton activité, entre ton activité humaine. et la nature, qui est totalement nouvelle par rapport à la manière dont on considérait la nature et l'exploitation de la nature précédemment.

  • Thierry

    Oui, complètement, parce que en fait, quand on regarde un paysage, on ne voit pas le miel. C'est un produit qu'on ne voit pas. Et on ne le découvre que grâce aux abeilles qui le concentrent, qui le concentrent, qui l'enrichissent. Et soudainement, finalement, si on a bien fait notre travail, si on était au bon endroit, au bon moment, avec les bonnes conditions, on récolte un miel. Un miel qu'on a imaginé grâce aux abeilles, qui sont le vecteur de cette énergie et de la nature. Donc c'est assez formidable en soi, c'est pour ça que ça nous fascine et on n'est jamais blasé de regarder ce qui se passe et on ressent vraiment l'énergie. Alors des fois elle est très forte et puis des fois elle est beaucoup moins forte. Mais on est vraiment à l'unisson avec cette nature à travers nos abeilles.

  • Christian

    C'est fascinant parce que ça ne vient pas forcément à l'esprit quand on parle d'apiculture ou quand on parle d'abeilles, tout ce que tu nous dis. Et par rapport à ça, dans ce que tu as développé au collège, comment tu vis ton... ton identité d'artisan militant de la qualité, comme vous dites.

  • Thierry

    Avant de penser à appartenir au collège, j'ignorais son existence déjà jusqu'en 2018, j'essayais de faire le mieux possible mon métier, avec ce que j'imaginais être le mieux possible, c'est-à-dire bien faire pour produire du bon et du beau. et en respectant les abeilles et donc la nature, en espérant que le consommateur sache vraiment comprendre notre démarche. Notre démarche, elle est complexe. Il y a beaucoup de poésie dans notre démarche. Mais quand on rencontre un consommateur, c'est un échange. un échange, un pot de miel contre un peu d'argent. Mais en fait, on vend beaucoup plus que ça. On vend tout un symbole, on vend la nature dans tout ce qu'elle a de meilleur.

  • Christian

    Ah oui, c'est passionnant. Et ça, c'est ce côté militant, artisan militant, en fait, quelque part.

  • Thierry

    Oui, oui. Et puis, moi, j'ai évolué dans mon activité. Il y a une dizaine d'années, j'ai arrêté d'aller dans certaines zones qui ne me plaisaient pas. D'accord. Qui étaient finalement, on peut dire, dans des zones où se pratiquait l'agribusiness. Et je me suis réfugié dans... une zone qui est beaucoup plus proche de moi, qui m'environne, qui est plus liée à une campagne respectueuse, je dirais. On voit beaucoup plus de gens que de matériel. On y voit de la forêt aussi, des vaches limousines. Et c'est un endroit finalement où je savais clairement que j'allais vers une décroissance de ma productivité. Mais au final, j'allais être beaucoup plus fier des miels que j'allais proposer déjà à mes enfants et puis à la clientèle ensuite.

  • Christian

    Donc tu privilégies le sens, ton identité.

  • Thierry

    aux résultats ou la productivité économique en fait j'étais j'avais une conviction qu'en produisant beaucoup moins j'allais j'allais être beaucoup plus fier en étant beaucoup plus fier je serai peut-être mieux parler de mes produits au consommateur final Alors qui peut être des particuliers, mais qui peuvent être aussi des chefs, des restaurateurs, des artisans. Donc c'est devenu beaucoup plus fort en moi, cette démarche, à travers la conviction initiale que j'avais.

  • Christian

    C'est un sacré chemin, parce que c'est un chemin qui va à l'encontre des sentiers battus. Je pense que dans ta profession, c'est pas forcément évident de trouver des formes d'alter ego ?

  • Thierry

    Alors il y en a, ils ont vraiment du mérite, mais c'est pas la majorité. était loin de là, puisqu'en fait, là aussi, comme en agriculture, il y a souvent une course à la productivité. Moi, je me suis écarté de ça, et j'ai focalisé avec notre équipe sur des petites productions, sur des territoires isolés qu'on avait choisis. C'était pas du tout économique, parfois, même souvent. Mais finalement, ce qu'on a pu produire, les consommateurs ont découvert qu'il y avait peut-être une autre façon d'appréhender un apiculteur, son travail, et à travers son travail, à travers le travail travail des abeilles, il y avait un territoire. Et en fait, c'était mettre en avant un territoire qui était beaucoup plus riche qu'on ne le pensait.

  • Christian

    Je te propose, avant de passer à notre deuxième partie, de passer dans notre rubrique Toc toc, qui est là ?

  • Speaker #0

    Toc toc, qui est là ?

  • Christian

    Tu nous dis en question-réponse si tu étais un animal.

  • Thierry

    Une abeille.

  • Christian

    Une reine ? Non,

  • Thierry

    une abeille ou même un papillon pour son vol erratique.

  • Christian

    Ah, c'est beau ça. Une saison ?

  • Thierry

    Le printemps pour son énergie.

  • Christian

    Une ville ?

  • Thierry

    Florence.

  • Christian

    Pourquoi ?

  • Thierry

    Il y a tout.

  • Christian

    Il y a tout. Un des cinq sens ?

  • Thierry

    Je dirais le sixième. Il nous en faut beaucoup d'intuition.

  • Christian

    Le sixième sens, c'est très beau ça, effectivement, comme réponse. Un plat ?

  • Thierry

    Un lapin aux olives accompagné d'une ratatouille.

  • Christian

    Une boisson ?

  • Thierry

    Amen tout salon.

  • Christian

    Alors, la deuxième partie où je voudrais t'interroger, c'est cette notion de la relation, de la transparence de la relation. Je dirais, dans toutes ses dimensions, la relation aux autres, la relation à la nature, la relation aux produits, la relation aux abeilles. C'est quoi l'essence même de cette relation pour toi ?

  • Thierry

    C'est quelque chose qui est ancré en moi depuis toujours, c'est-à-dire qu'on dépend de la nature. Complètement. Et contrairement à d'autres activités d'élevage, puisque l'apiculture c'est un élevage aussi, avant c'était une cueillette, c'est devenu plutôt de l'élevage, contrairement à d'autres élevages en agriculture, plus on a de ruches et plus on les disperse, moins elles sont concentrées. Et donc c'est vraiment, là on est à l'opposé du ressort évidemment, puisque les ruches dépendent de leur environnement. Donc de la qualité de l'environnement aussi, et des ressources. Donc c'est important de les placer au bon endroit, et puis d'avoir une nature ou une agriculture respectueuse des abeilles, parce que les abeilles sont un filtre. Quand les abeilles vont bien, on peut dire que c'est un endroit qui fait plaisir à vivre. Et on le ressent nous-mêmes, quand les abeilles vont bien.

  • Christian

    Est-ce qu'on entend souvent parler aujourd'hui, dans tout ce qui est pollinisation, etc., de l'avenir même de l'humanité ? On voit quantité de choses qui se dégradent, même si on le ressent, comme par exemple, il n'y a plus de champs d'oiseaux dans les campagnes, etc. Est-ce que toi, dans la démarche avec les abeilles, tu ressens des comportements des abeilles différents selon les environnements où elles se trouvent ?

  • Thierry

    Je dirais que ça touche plus peut-être au changement climatique. C'est l'absence d'hiver qui marque vraiment le changement. L'absence d'hiver, c'est une pause dans la nature. Et cette absence fait que les colonies d'abeilles et la végétation, puisqu'elles sont fortement corrélées, sont assez bousculées. Donc notre métier a vraiment changé, il a évolué, il faut être beaucoup plus Ausha, beaucoup plus observateur, savoir répondre quand on pense que c'est le bon moment sur certaines activités. C'est pas du tout la routine, mais finalement c'est ce qu'on aime. reconnaître.

  • Christian

    Ça veut dire que c'est quand même l'imprévu.

  • Thierry

    C'est l'imprévu, mais je crois que c'est ce qui nous motive. Il y a beaucoup d'imprévus dans cette poésie puisque c'est un mouvement.

  • Christian

    C'est être au cœur de la vie, mais au cœur de la vie c'est être au cœur de l'incertitude aussi. C'est tout l'inverse des sociétés d'où l'on vient où, je pense, on a besoin de certitude.

  • Thierry

    Alors nos repères, c'est la nature. La nature, on a des indices à travers les abeilles quand on connaît bien le fonctionnement. Et on est témoin de tout ça. Après, on a quand même une entreprise à faire tourner. On n'est pas que des poètes à regarder ce qui se passe devant une ruche. Donc il faut conjuguer tout ça, mais je dirais qu'un travail d'équipe... Avec une équipe vraiment passionnée, puisqu'on est très bien entouré à la Maison Feudon.

  • Christian

    On va y venir, c'est important effectivement que tu nous expliques ça. Mais je voudrais juste avant, tu parles parce que la relation économique est fondamentale. Comment est-ce qu'on crée... à partir de cette philosophie-là, non pas une adaptation à l'économie d'aujourd'hui, mais quasiment une nouvelle économie. Parce que la finalité économique pour toi, me semble-t-il, comme beaucoup de membres du Collège Militaire de France, c'est de bien vivre de son métier. Ce n'est pas d'avoir des investissements phénoménaux, etc., pour être toujours plus grand, plus gros, plus de profit. C'est de bien vivre de son métier. Comment on peut imaginer justement, puisque tu dis à certains moments que vous avez eu des difficultés avec l'approche que tu as, mais comment on arrive quand même à trouver, quels sont les quelques ingrédients à ton avis qu'il faut mettre en place pour cette nouvelle économie ?

  • Thierry

    Je pense qu'il ne faut pas rester tout seul déjà, il faut avoir un réseau, un réseau dans notre filière. alors moi je l'ai élargi aussi à l'étranger depuis que je voyage et ça permet d'enrichir parce que chacun se pose des questions dans son coin et en fait en échangeant une réflexion ou une idée, on repart chacun avec trois idées, c'est-à-dire celle qu'on avait plus la nouvelle donc c'est vrai qu'il faut vraiment s'enrichir on peut pas être un super héros et penser qu'on va vraiment réussir dans tout ce qui se passe non, non, il faut vraiment alors c'est un collectif, un collectif de filière ou un collectif transversal

  • Christian

    Et la démarche avec le collège ? parallèlement à la filière, tu y trouves quoi ?

  • Thierry

    Je rencontre des personnes avec lesquelles je partage les mêmes valeurs. C'est-à-dire des gens honnêtes, qui veulent bien faire, et de leur mieux. Et on se comprend assez vite. Parfois, je me comprends beaucoup mieux. Je partage des valeurs qui sont bien supérieures à celles que je peux avoir à certains de mes collègues en apiculture.

  • Christian

    Oui, tu nous as dit ça plusieurs fois.

  • Thierry

    Et donc, c'est un enrichissement intellectuel, personnel, et d'entreprise aussi.

  • Christian

    Quel sont les... principales difficultés ou obstacles qui te viennent à l'esprit pour justement pratiquer cette approche du métier telle que tu la pratiques ?

  • Thierry

    La principale difficulté, je dirais, c'est la qualité de nos environnements, par exemple. Changement climatique, bien sûr. Le marché. Parce que le marché, le miel est un des produits au monde le plus fraudé.

  • Christian

    Ah oui ?

  • Thierry

    Donc... Voilà, ça perturbe quand même, alors non pas notre métier directement, mais en fait, c'est la relation que peuvent avoir les consommateurs par rapport à un produit qui s'appelle miel et qui n'en est pas toujours.

  • Christian

    Quelle est la proportion de miel importé par rapport au miel produit en France ?

  • Thierry

    On en importe un peu plus qu'on en produit maintenant. Ça s'est plutôt dégradé. Et puis c'est assez sauvage.

  • Christian

    Donc en termes de consommation ?

  • Thierry

    En consommation, on est à peu près sur 40 000 tonnes en France. Et bon an, mal an, oui, on va en produire peut-être 20 000, à peu près.

  • Christian

    Alors maintenant, je te propose de passer à l'instant fromage ou dessert.

  • Speaker #0

    C'est fromage ou dessert ?

  • Christian

    Logique ou émotion ?

  • Thierry

    Émotion.

  • Christian

    Compétition ou coopération ?

  • Thierry

    Coopération.

  • Christian

    Travail ou vacances ?

  • Thierry

    Je suis entre les deux toujours.

  • Christian

    Pareil, vie personnelle ou vie professionnelle ?

  • Thierry

    Tout ça est bien mélangé.

  • Christian

    Surtout que ton épouse, on va le voir, travaille avec toi. Temps court ou temps long ?

  • Thierry

    Temps long. Il faut construire les choses sur la durée.

  • Christian

    Est-ce que tu aimerais renaître dans le passé ou dans le futur ?

  • Thierry

    Dans le futur proche. Mais je préfère le présent finalement.

  • Christian

    Quelle est ta cuisine étrangère préférée ?

  • Thierry

    Italienne.

  • Christian

    Merci Thierry. Passons à la troisième et dernière partie de notre entretien. Justement, tu l'as évoqué, tout ce qui est... coopération, que ce soit coopération avec d'autres dans ton métier, coopération avec des membres du collège, mais aussi après on va le voir avec coopération avec tes équipes internes, comment vous construisez, vous avez une relation me semble-t-il assez familiale, mais en même temps avec des personnes qui viennent de l'extérieur. Donc tes coopérations avec d'autres producteurs, avec des restaurants, avec d'autres membres, avec ta filière, tu les qualifierais comment en termes d'approche ?

  • Thierry

    Struvkelle est Épanouissante. Épanouissante, je me rappelle il y a quelques années, Guy Ausha, de la cuisine du cloître à Limoges, nous avait sollicité pour venir avec sa brigade passer une journée, pour comprendre ce qu'on faisait. Et on n'avait pas l'habitude de ça, pas du tout.

  • Christian

    Comprendre le métier de l'autre.

  • Thierry

    Voilà. Et en fait, on a passé une très belle journée. On s'est aperçu que... on faisait des choses intéressantes Et puis on avait besoin de les expliquer, de les faire comprendre. Moi, je lui ai demandé ensuite d'aller dans sa cuisine avec l'équipe. Et ça, c'est fait. Bien sûr. Donc ça, c'est très enrichissant pour tout le monde. On se connaît mieux. On connaît ce que chacun fait, comment il le fait, quelles sont ses difficultés. Donc ça crée beaucoup de liens.

  • Christian

    C'est un point important au Collège Cuyard de France, à travers les journées d'échange nationales qui se font, justement, ces mélanges, et connaître les uns et les autres. Quelle est l'importance de la... Tu as un petit peu répondu.

  • Thierry

    tout à l'heure de la proximité d'un tour d'univers alors nous on est dans une région qui n'est pas très dense en termes de population et je dirais qu'en fait on est il faut il faut savoir s'écarter de son quotidien professionnel pour rencontrer les autres à certaines occasions alors ça peut être aller dans un restaurant comme comme consommateur mais aussi aller voir les professionnels à travers différentes rencontres ça peut être à trop à travers les matinées d'immersion les journées d'immersion où on se rencontre on s'aperçoit que sur un un même territoire, finalement, on se connaît très peu, mais on se connaît de mieux en mieux, finalement. Et on appréhende peut-être notre territoire différemment à plusieurs. Le collectif est toujours satisfaisant, en fait.

  • Christian

    Et en équipe interne, on sait que ton épouse Svetlana est beaucoup impliquée dans votre projet. Elle a été qualifiée de bi-addict.

  • Thierry

    Oui, on peut dire ça, oui.

  • Christian

    Quelque part. Mais d'autres... vous ont rejoint. Edgar est toujours avec vous.

  • Thierry

    Edgar, bien sûr, oui. Il est arrivé comme stagiaire. Ensuite, il a été... Il a fait sa formation en alternance. Et puis, il est devenu salarié. Puis, il est devenu co-gérant. C'est formidable. Et puis, ça sera... Moi, j'adore partager. J'adore enseigner. Je vais aussi dans les écoles primaires, aussi, pour parler du goût. Parler des abeilles, mais parler du goût aussi. J'interviens aussi auprès d'un apiculteur professionnel, pour échanger avec eux. Donc, je suis très impliqué au niveau associatif dans ma filière, également. Et... Et ça apporte, en fait, ça élargit son écosystème du quotidien, en fait. Bien sûr. Et donc, on voit les choses très différemment, de façon beaucoup plus large. Et je pense qu'ensuite, c'est vrai qu'on se sent moins seul parce qu'on a des difficultés sur une micro-entreprise. Il ne faut pas rêver, on a des difficultés au quotidien. Il faut savoir s'entourer, en fait.

  • Christian

    Bruno, par exemple.

  • Thierry

    Bruno,

  • Christian

    il est là depuis 25, 30 ans.

  • Thierry

    Il est là depuis 35 ans, je pense.

  • Christian

    35 ans, c'est formidable. Voilà, le fait de fidéliser sur... sur une passion, c'est pas simplement le partage de la passion, c'est aussi une façon d'être en relation avec les autres.

  • Thierry

    Oui, et puis il faut expliquer ce qu'on fait. Il faut le faire comprendre, il faut lui donner beaucoup de sens, mais ça, ils le comprennent assez vite. Et puis, travailler dans la nature, c'est pas mal. Il faut reconnaître qu'on a un open space qui est remarquable.

  • Christian

    Comment on fait comprendre ça au grand public ? Parce que tu connais l'association de manchés citoyens que le collège a développé à côté pour justement sensibiliser ce grand public, en faire des passionnés. Vous avez une relation avec ce grand public ?

  • Thierry

    Oui, on a une relation qu'on a construite au fil du temps parce qu'en fait, on n'était pas toujours en accord avec... tout ce qu'on retrouvait dans les médias sur l'abeille, sur les mortalités, etc. Enfin, les problèmes de l'apiculture que nous, on connaît moins dans l'environnement qu'on a choisi. Et on a vraiment voulu expliquer aux consommateurs notre point de vue. Notre point de vue, alors, ça passe sur les réseaux, sur notre communauté, mais aussi on fait des marchés événementiels de producteurs. Et là, on est vraiment là pour expliquer. Vendre un pot de miel, vous savez, ce n'est pas cinq secondes. On y passe dix minutes parce qu'on est intarissable et les gens ont beaucoup de questions sur notre univers, en fait.

  • Christian

    Ça demande effectivement d'être expliqué, de s'en... Alors je te propose maintenant d'ouvrir le moment La Moutarde me monte au nez.

  • Speaker #0

    La Moutarde me monte au nez.

  • Christian

    Alors la moutarde de Montaunay, c'est quelque part un coup de gueule sur quelque chose qui te révolte ou sur lequel tu aurais des choses à dire, que ce soit dans l'environnement de notre société, dans l'univers de ton métier, qu'est-ce que tu aurais à nous dire ? Oui,

  • Thierry

    je l'ai déjà évoqué. Évoqué un petit peu, c'est quand même tous ces faux miels qui rentrent en Europe, alors qui s'appellent miel sans doute au niveau du papier sur les douanes, mais qui n'en sont pas du tout. Si vous voulez, d'un côté, nous, on est avec nos ruches à créer de la poésie, en quelque sorte. Ça a un goût, mais c'est de la poésie. Et on est confronté à des gens qui veulent s'enrichir à l'autre bout du monde, plutôt en Asie, et qui vendent. Des dizaines de milliers de tonnes ou des centaines de milliers de tonnes à travers le monde, ça s'appelle miel, ça a été reconstitué, c'est toujours très bien fait visiblement, c'est très dur à contrôler, mais ça envahit le monde entier. Et là c'est vraiment, on est à l'opposé, on est dans deux mondes, mais le consommateur justement il faut qu'on l'éduque, il faut vraiment qu'on fasse notre boulot. lui faire comprendre qu'il faut être non pas consommateur mais consommacteur, il faut se renseigner vraiment sur ce qu'on achète, c'est une démarche du quotidien, pour ne pas acheter n'importe quoi. C'est-à-dire que là, le mot miel qui est un vrai symbole, symbole de la nature, on en est à l'opposé. Donc là on est sur le terrain pour faire notre boulot, et alors la chance c'est qu'on ait des dizaines de milliers en France à faire notre boulot sur le terrain, et d'expliquer au jour le jour pourquoi il faut aller voir un apiculteur, et puis si on n'a pas tout. les questions, les réponses, on va chez lui. On se fait expliquer.

  • Christian

    Bien sûr. C'est la meilleure façon d'ailleurs, c'est de partager ce que tu disais. Il faut faire un restaurant et que le restaurant...

  • Thierry

    Pédagogie.

  • Christian

    Mais ça se passe en co-acteur.

  • Thierry

    Exactement.

  • Christian

    Je te remercie. Peut-être en dernière confidence, est-ce que tu aurais une adresse à nous recommander, que ce soit un restaurant, un producteur qui te vienne à l'esprit ?

  • Thierry

    J'en aurais deux parce que c'est deux coups de cœur très récents. Le restaurant, il te... tilleul dans le petit village de Tournemire, dans le Cantal. Et puis, je pense à Cyril Abonnel, La Vie Comptée, qui est un usiculteur, producteur d'huile de noix assez formidable.

  • Christian

    D'accord. Eh bien, écoute, merci Thierry. Et toi qui as beaucoup voyagé, j'imagine que tu as dû aller en Italie. Eh bien, à l'heure de notre prochain épisode, c'est l'Italie qui viendra s'installer dans notre studio, avec tiens-toi bien, un chef vice-champion de France de la pizza. un épisode à ne pas manquer pour tous les amoureux des produits du terroir et de la gastronomie aussi italienne et je sais qu'ils sont nombreux,

  • Speaker #0

    merci à toi vous venez de déguster un épisode de la Terre à la Tinte, le podcast qui vous donne envie de bien manger nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie, si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef et en vous abonnant, vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous.

Description

Thierry Fedon de la Maison Fedon en Haute-Vienne n’est pas seulement un apiculteur passionné.

C’est un explorateur des saveurs, un protecteur de la biodiversité et un artisan militant de la qualité.

Thierry perpétue l’héritage familial de la Maison Fedon, tout en lui apportant une vision unique, nourrie par des voyages à travers le monde.

Autant de rencontres qui ont façonné son approche.


Dans cet épisode, il partage son histoire, ses voyages, et sa quête d’une apiculture respectueuse de la nature et des abeilles.

Il évoque aussi les défis de son métier, l’impact du dérèglement climatique, la lutte contre la fraude au miel, et l’importance de son approche qui part des territoires.

Découvrez comment Thierry transcende les limites de son métier pour en faire un véritable engagement écologique et humain.


Le Collège Culinaire de France est une association fondée en 2011 à l'initiative de quinze grands chefs restaurateurs à l'instar d'Alain Ducasse, Joël Robuchon, Yannick Alléno, Paul Bocuse, Alain Dutournier, Gilles Goujon, Michel Guérard, Marc Haeberlin, Régis Marcon, Thierry Marx, Gérald Passedat, Laurent Petit, Anne-Sophie Pic, Guy Savoy et Pierre Troisgros. Le Collège Culinaire de France est la seule association, à ce jour, initiée par le plus grand rassemblement de chefs français reconnus et incontestés, qui s’emploie, concrètement, sur le terrain, à relier des Producteurs et Artisans de Qualité avec des Restaurants de Qualité de toutes catégories. Elle rassemble ceux qui œuvrent pour une vision d’avenir du métier, et fédère tous ceux qui s’engagent sur des synergies de valeurs et de pratiques partagées.


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Crédits

En cuisine :

Un foodcast mitonnée aux petits oignons par Suniwan

Illustration servie par Hugo Girard

Un épisode enregistré au Mojo dans le 17éme arrondissement de Paris


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans le podcast de La Terre à l'Assiette.

  • Christian

    Bonjour, je suis ravi de vous retrouver dans un nouvel épisode de La Terre à l'Assiette, le podcast qui met en avant les artisans du bien-manger, celles et ceux qui vivent leur passion au service d'une gastronomie humaniste et plus jeune. Qui mieux que mon invité du jour pour incarner ce combat ? C'est sur la commune de Razès, en Haute-Neuve, que Thierry Feudon, de la maison Feudon, possède sa ferme apicole. L'histoire de la maison Feudon commence en 1960, lorsque Jean et Solange Feudon débutent leur activité d'apiculteur. Dès son plus jeune âge, leur fils Thierry les assiste en bravant de nombreuses piqûres. Cela ne l'a pas découragé bien d'encontre. À 18 ans, ce voyageur dans l'âme est désireux d'en apprendre davantage sur cette activité fascinante, décide de partir explorer l'univers apicole à travers le monde. Pourquoi ce choix ? En quoi ce voyage a-t-il changé sa vision du métier ? Est-elle toujours la même aujourd'hui ? Il posera la question. Reconnu par le Collège Culière de France depuis 2018, nous nous intéressons également avec lui aux enjeux et aux défis à relever pour pérenniser une activité qui, on le sait, est touchée au premier plan par le dérèglement climatique.

  • Speaker #0

    Une émission présentée par Christian Regouby.

  • Christian

    Bonjour Thierry.

  • Thierry

    Bonjour Christian.

  • Christian

    Alors raconte-nous un petit peu comment s'est forgé ton identité à travers justement cette histoire que j'ai rapidement évoquée pour que tu puisses développer ta vision. de ce métier que tu incarnes aujourd'hui et que tu portes courageusement.

  • Thierry

    Alors comme tu l'as expliqué, effectivement, moi j'ai baigné au milieu des abeilles dès mon plus jeune âge. J'ai vraiment cette activité à travers les parents. je suivais dans toute leur activité, ça a vraiment mis mes sens en éveil. C'est une empreinte très forte, très diversifiée au fil des saisons et des activités. Et puis en plus, avec les ruches, on peut se déplacer, on n'est pas lié à un foncier, on peut effectuer de la transhumance. Donc en fait, j'ai tout de suite ressenti cette très grande richesse, cette diversité. Et puis un peu plus tard, j'ai voulu étendre ce territoire de découverte en allant un petit peu plus loin que la ferme familiale.

  • Christian

    Et ce voyage que tu as entrepris à 18 ans, 18 ans. Pourquoi ? Qu'est-ce qui a motivé le fait de partir comme ça ?

  • Thierry

    L'inconscience, sûrement. J'ai voulu aller le plus loin possible en perdant tous mes repères. Donc je suis parti au Japon, avec l'idée finalement de trouver un apiculteur. Donc j'ai fait le tour du Japon en stop jusqu'au moment où j'ai trouvé un apiculteur. Et suite à un problème d'attaque d'un rucher par un ours, finalement j'ai eu ma place, puisque je devenais nécessaire dans cette exploitation. Donc c'est comme ça que j'ai été accepté.

  • Christian

    C'est là où en fait l'inconscience n'est pas de l'inconséquence.

  • Thierry

    Oui, j'y ai goûté. Donc après, ça m'a donné envie de continuer. Après, je suis parti deux ans en Afrique, en Nouvelle-Zélande, à travers le monde, dans beaucoup d'endroits, puisqu'il y a des apiculteurs partout. Et on arrive avec un savoir-faire. Donc personne ne nous attend, mais finalement, on est bienvenus assez rapidement.

  • Christian

    Alors tu m'as dit par inconscience, mais le pourquoi vraiment de ce voyage, indépendamment de la manière dont tu es parti, et qu'est-ce que ça t'a vraiment apporté de différent ?

  • Thierry

    Je pense que je me suis rendu compte qu'il y a une autre façon de travailler, puisque je ne connaissais que celle de mes parents.

  • Christian

    C'est pour ça que tu es parti, parce que tu voulais voir une autre façon.

  • Thierry

    Oui, je voulais découvrir d'autres horizons, avec d'autres apiculteurs, d'autres abeilles, d'autres environnements surtout. Et ça m'a permis, à travers les semaines que j'ai pu passer dans le nord du Japon, en Hokkaido, de rencontrer des gens assez formidables. Finalement, qui sont partout où j'ai pu voyager après. Ce n'était pas tant les techniques qu'on apprend, mais plutôt le regard de l'autre. de gens qui sont devenus des mentors, finalement. Quelle est leur appréhension de leur activité qu'on partage, la passion qu'on partage ? Et en fait, c'est ce que j'en ai gardé. C'est pourquoi ils sont comme ça, comment ils en parlent, comment ils se comportent, comment ils se comportent bien, souvent. Et pourquoi ça devient des mentors aussi. Alors, ce n'est pas une ambition de devenir un mentor, mais c'est d'appréhender, en fait, cette façon de cohabiter entre la nature. un insecte et puis de faire une activité qui reste toujours aussi passionnante. Ça enrichit réellement toutes les ambitions que je pouvais avoir en étant jeune. Oui, oui, vraiment. Et mon regard des années après, c'est que ça me donne vraiment l'envie de continuer à rencontrer des gens qui partagent la même activité que moi, avec la même passion. Et c'est vrai que si je me retrouve en Ouzbékistan ou en Bolivie, tout de suite on est au cœur des choses. En partageant une même passion, en fait on comprend le pays tout de suite. C'est étonnant, très étonnant, on n'a pas besoin de rester très longtemps et de poser des questions. On regarde, on partage, on regarde comment la personne parle à ses abeilles ou les regarde. regarde ou parle d'elle. En fait, on comprend beaucoup de choses très vite. Et ce partage, en fait, il est très fort.

  • Christian

    C'est intéressant parce que vous parlez souvent au collège de territoire. C'est quoi ton territoire ? On voit bien qu'il est à la fois ancré quelque part, mais il est en même temps mouvant à travers ce que tu as capté à travers le monde et cette transhumance dont tu parles, cette mobilité qu'il peut y avoir à travers tes ruches.

  • Thierry

    Avant de voyager, je n'avais pas la notion de mon territoire. C'était mon quotidien. Et c'est vraiment en revenant sur ce territoire-là. limousin que je me suis aperçu de toute sa beauté de toute sa richesse et ensuite il faut savoir que nous avec nos abeilles avec nos ruches on lit le paysage où on anticipe le paysage sur ce qui va se passer au niveau des fleuraisons est en fait notre le fondement notre notre regard c'est ensuite d'apporter une saveur à ce paysage à travers le miel ou les miels qu'on produit.

  • Christian

    Ce que tu évoques me fait penser à quelque chose de totalement nouveau et totalement porté vers l'avenir dans la relation à la nature. Il me semble, tu disais tout à l'heure, les sens en éveil. Il y a une forme d'hybridation entre la nature et ton activité, entre ton activité humaine. et la nature, qui est totalement nouvelle par rapport à la manière dont on considérait la nature et l'exploitation de la nature précédemment.

  • Thierry

    Oui, complètement, parce que en fait, quand on regarde un paysage, on ne voit pas le miel. C'est un produit qu'on ne voit pas. Et on ne le découvre que grâce aux abeilles qui le concentrent, qui le concentrent, qui l'enrichissent. Et soudainement, finalement, si on a bien fait notre travail, si on était au bon endroit, au bon moment, avec les bonnes conditions, on récolte un miel. Un miel qu'on a imaginé grâce aux abeilles, qui sont le vecteur de cette énergie et de la nature. Donc c'est assez formidable en soi, c'est pour ça que ça nous fascine et on n'est jamais blasé de regarder ce qui se passe et on ressent vraiment l'énergie. Alors des fois elle est très forte et puis des fois elle est beaucoup moins forte. Mais on est vraiment à l'unisson avec cette nature à travers nos abeilles.

  • Christian

    C'est fascinant parce que ça ne vient pas forcément à l'esprit quand on parle d'apiculture ou quand on parle d'abeilles, tout ce que tu nous dis. Et par rapport à ça, dans ce que tu as développé au collège, comment tu vis ton... ton identité d'artisan militant de la qualité, comme vous dites.

  • Thierry

    Avant de penser à appartenir au collège, j'ignorais son existence déjà jusqu'en 2018, j'essayais de faire le mieux possible mon métier, avec ce que j'imaginais être le mieux possible, c'est-à-dire bien faire pour produire du bon et du beau. et en respectant les abeilles et donc la nature, en espérant que le consommateur sache vraiment comprendre notre démarche. Notre démarche, elle est complexe. Il y a beaucoup de poésie dans notre démarche. Mais quand on rencontre un consommateur, c'est un échange. un échange, un pot de miel contre un peu d'argent. Mais en fait, on vend beaucoup plus que ça. On vend tout un symbole, on vend la nature dans tout ce qu'elle a de meilleur.

  • Christian

    Ah oui, c'est passionnant. Et ça, c'est ce côté militant, artisan militant, en fait, quelque part.

  • Thierry

    Oui, oui. Et puis, moi, j'ai évolué dans mon activité. Il y a une dizaine d'années, j'ai arrêté d'aller dans certaines zones qui ne me plaisaient pas. D'accord. Qui étaient finalement, on peut dire, dans des zones où se pratiquait l'agribusiness. Et je me suis réfugié dans... une zone qui est beaucoup plus proche de moi, qui m'environne, qui est plus liée à une campagne respectueuse, je dirais. On voit beaucoup plus de gens que de matériel. On y voit de la forêt aussi, des vaches limousines. Et c'est un endroit finalement où je savais clairement que j'allais vers une décroissance de ma productivité. Mais au final, j'allais être beaucoup plus fier des miels que j'allais proposer déjà à mes enfants et puis à la clientèle ensuite.

  • Christian

    Donc tu privilégies le sens, ton identité.

  • Thierry

    aux résultats ou la productivité économique en fait j'étais j'avais une conviction qu'en produisant beaucoup moins j'allais j'allais être beaucoup plus fier en étant beaucoup plus fier je serai peut-être mieux parler de mes produits au consommateur final Alors qui peut être des particuliers, mais qui peuvent être aussi des chefs, des restaurateurs, des artisans. Donc c'est devenu beaucoup plus fort en moi, cette démarche, à travers la conviction initiale que j'avais.

  • Christian

    C'est un sacré chemin, parce que c'est un chemin qui va à l'encontre des sentiers battus. Je pense que dans ta profession, c'est pas forcément évident de trouver des formes d'alter ego ?

  • Thierry

    Alors il y en a, ils ont vraiment du mérite, mais c'est pas la majorité. était loin de là, puisqu'en fait, là aussi, comme en agriculture, il y a souvent une course à la productivité. Moi, je me suis écarté de ça, et j'ai focalisé avec notre équipe sur des petites productions, sur des territoires isolés qu'on avait choisis. C'était pas du tout économique, parfois, même souvent. Mais finalement, ce qu'on a pu produire, les consommateurs ont découvert qu'il y avait peut-être une autre façon d'appréhender un apiculteur, son travail, et à travers son travail, à travers le travail travail des abeilles, il y avait un territoire. Et en fait, c'était mettre en avant un territoire qui était beaucoup plus riche qu'on ne le pensait.

  • Christian

    Je te propose, avant de passer à notre deuxième partie, de passer dans notre rubrique Toc toc, qui est là ?

  • Speaker #0

    Toc toc, qui est là ?

  • Christian

    Tu nous dis en question-réponse si tu étais un animal.

  • Thierry

    Une abeille.

  • Christian

    Une reine ? Non,

  • Thierry

    une abeille ou même un papillon pour son vol erratique.

  • Christian

    Ah, c'est beau ça. Une saison ?

  • Thierry

    Le printemps pour son énergie.

  • Christian

    Une ville ?

  • Thierry

    Florence.

  • Christian

    Pourquoi ?

  • Thierry

    Il y a tout.

  • Christian

    Il y a tout. Un des cinq sens ?

  • Thierry

    Je dirais le sixième. Il nous en faut beaucoup d'intuition.

  • Christian

    Le sixième sens, c'est très beau ça, effectivement, comme réponse. Un plat ?

  • Thierry

    Un lapin aux olives accompagné d'une ratatouille.

  • Christian

    Une boisson ?

  • Thierry

    Amen tout salon.

  • Christian

    Alors, la deuxième partie où je voudrais t'interroger, c'est cette notion de la relation, de la transparence de la relation. Je dirais, dans toutes ses dimensions, la relation aux autres, la relation à la nature, la relation aux produits, la relation aux abeilles. C'est quoi l'essence même de cette relation pour toi ?

  • Thierry

    C'est quelque chose qui est ancré en moi depuis toujours, c'est-à-dire qu'on dépend de la nature. Complètement. Et contrairement à d'autres activités d'élevage, puisque l'apiculture c'est un élevage aussi, avant c'était une cueillette, c'est devenu plutôt de l'élevage, contrairement à d'autres élevages en agriculture, plus on a de ruches et plus on les disperse, moins elles sont concentrées. Et donc c'est vraiment, là on est à l'opposé du ressort évidemment, puisque les ruches dépendent de leur environnement. Donc de la qualité de l'environnement aussi, et des ressources. Donc c'est important de les placer au bon endroit, et puis d'avoir une nature ou une agriculture respectueuse des abeilles, parce que les abeilles sont un filtre. Quand les abeilles vont bien, on peut dire que c'est un endroit qui fait plaisir à vivre. Et on le ressent nous-mêmes, quand les abeilles vont bien.

  • Christian

    Est-ce qu'on entend souvent parler aujourd'hui, dans tout ce qui est pollinisation, etc., de l'avenir même de l'humanité ? On voit quantité de choses qui se dégradent, même si on le ressent, comme par exemple, il n'y a plus de champs d'oiseaux dans les campagnes, etc. Est-ce que toi, dans la démarche avec les abeilles, tu ressens des comportements des abeilles différents selon les environnements où elles se trouvent ?

  • Thierry

    Je dirais que ça touche plus peut-être au changement climatique. C'est l'absence d'hiver qui marque vraiment le changement. L'absence d'hiver, c'est une pause dans la nature. Et cette absence fait que les colonies d'abeilles et la végétation, puisqu'elles sont fortement corrélées, sont assez bousculées. Donc notre métier a vraiment changé, il a évolué, il faut être beaucoup plus Ausha, beaucoup plus observateur, savoir répondre quand on pense que c'est le bon moment sur certaines activités. C'est pas du tout la routine, mais finalement c'est ce qu'on aime. reconnaître.

  • Christian

    Ça veut dire que c'est quand même l'imprévu.

  • Thierry

    C'est l'imprévu, mais je crois que c'est ce qui nous motive. Il y a beaucoup d'imprévus dans cette poésie puisque c'est un mouvement.

  • Christian

    C'est être au cœur de la vie, mais au cœur de la vie c'est être au cœur de l'incertitude aussi. C'est tout l'inverse des sociétés d'où l'on vient où, je pense, on a besoin de certitude.

  • Thierry

    Alors nos repères, c'est la nature. La nature, on a des indices à travers les abeilles quand on connaît bien le fonctionnement. Et on est témoin de tout ça. Après, on a quand même une entreprise à faire tourner. On n'est pas que des poètes à regarder ce qui se passe devant une ruche. Donc il faut conjuguer tout ça, mais je dirais qu'un travail d'équipe... Avec une équipe vraiment passionnée, puisqu'on est très bien entouré à la Maison Feudon.

  • Christian

    On va y venir, c'est important effectivement que tu nous expliques ça. Mais je voudrais juste avant, tu parles parce que la relation économique est fondamentale. Comment est-ce qu'on crée... à partir de cette philosophie-là, non pas une adaptation à l'économie d'aujourd'hui, mais quasiment une nouvelle économie. Parce que la finalité économique pour toi, me semble-t-il, comme beaucoup de membres du Collège Militaire de France, c'est de bien vivre de son métier. Ce n'est pas d'avoir des investissements phénoménaux, etc., pour être toujours plus grand, plus gros, plus de profit. C'est de bien vivre de son métier. Comment on peut imaginer justement, puisque tu dis à certains moments que vous avez eu des difficultés avec l'approche que tu as, mais comment on arrive quand même à trouver, quels sont les quelques ingrédients à ton avis qu'il faut mettre en place pour cette nouvelle économie ?

  • Thierry

    Je pense qu'il ne faut pas rester tout seul déjà, il faut avoir un réseau, un réseau dans notre filière. alors moi je l'ai élargi aussi à l'étranger depuis que je voyage et ça permet d'enrichir parce que chacun se pose des questions dans son coin et en fait en échangeant une réflexion ou une idée, on repart chacun avec trois idées, c'est-à-dire celle qu'on avait plus la nouvelle donc c'est vrai qu'il faut vraiment s'enrichir on peut pas être un super héros et penser qu'on va vraiment réussir dans tout ce qui se passe non, non, il faut vraiment alors c'est un collectif, un collectif de filière ou un collectif transversal

  • Christian

    Et la démarche avec le collège ? parallèlement à la filière, tu y trouves quoi ?

  • Thierry

    Je rencontre des personnes avec lesquelles je partage les mêmes valeurs. C'est-à-dire des gens honnêtes, qui veulent bien faire, et de leur mieux. Et on se comprend assez vite. Parfois, je me comprends beaucoup mieux. Je partage des valeurs qui sont bien supérieures à celles que je peux avoir à certains de mes collègues en apiculture.

  • Christian

    Oui, tu nous as dit ça plusieurs fois.

  • Thierry

    Et donc, c'est un enrichissement intellectuel, personnel, et d'entreprise aussi.

  • Christian

    Quel sont les... principales difficultés ou obstacles qui te viennent à l'esprit pour justement pratiquer cette approche du métier telle que tu la pratiques ?

  • Thierry

    La principale difficulté, je dirais, c'est la qualité de nos environnements, par exemple. Changement climatique, bien sûr. Le marché. Parce que le marché, le miel est un des produits au monde le plus fraudé.

  • Christian

    Ah oui ?

  • Thierry

    Donc... Voilà, ça perturbe quand même, alors non pas notre métier directement, mais en fait, c'est la relation que peuvent avoir les consommateurs par rapport à un produit qui s'appelle miel et qui n'en est pas toujours.

  • Christian

    Quelle est la proportion de miel importé par rapport au miel produit en France ?

  • Thierry

    On en importe un peu plus qu'on en produit maintenant. Ça s'est plutôt dégradé. Et puis c'est assez sauvage.

  • Christian

    Donc en termes de consommation ?

  • Thierry

    En consommation, on est à peu près sur 40 000 tonnes en France. Et bon an, mal an, oui, on va en produire peut-être 20 000, à peu près.

  • Christian

    Alors maintenant, je te propose de passer à l'instant fromage ou dessert.

  • Speaker #0

    C'est fromage ou dessert ?

  • Christian

    Logique ou émotion ?

  • Thierry

    Émotion.

  • Christian

    Compétition ou coopération ?

  • Thierry

    Coopération.

  • Christian

    Travail ou vacances ?

  • Thierry

    Je suis entre les deux toujours.

  • Christian

    Pareil, vie personnelle ou vie professionnelle ?

  • Thierry

    Tout ça est bien mélangé.

  • Christian

    Surtout que ton épouse, on va le voir, travaille avec toi. Temps court ou temps long ?

  • Thierry

    Temps long. Il faut construire les choses sur la durée.

  • Christian

    Est-ce que tu aimerais renaître dans le passé ou dans le futur ?

  • Thierry

    Dans le futur proche. Mais je préfère le présent finalement.

  • Christian

    Quelle est ta cuisine étrangère préférée ?

  • Thierry

    Italienne.

  • Christian

    Merci Thierry. Passons à la troisième et dernière partie de notre entretien. Justement, tu l'as évoqué, tout ce qui est... coopération, que ce soit coopération avec d'autres dans ton métier, coopération avec des membres du collège, mais aussi après on va le voir avec coopération avec tes équipes internes, comment vous construisez, vous avez une relation me semble-t-il assez familiale, mais en même temps avec des personnes qui viennent de l'extérieur. Donc tes coopérations avec d'autres producteurs, avec des restaurants, avec d'autres membres, avec ta filière, tu les qualifierais comment en termes d'approche ?

  • Thierry

    Struvkelle est Épanouissante. Épanouissante, je me rappelle il y a quelques années, Guy Ausha, de la cuisine du cloître à Limoges, nous avait sollicité pour venir avec sa brigade passer une journée, pour comprendre ce qu'on faisait. Et on n'avait pas l'habitude de ça, pas du tout.

  • Christian

    Comprendre le métier de l'autre.

  • Thierry

    Voilà. Et en fait, on a passé une très belle journée. On s'est aperçu que... on faisait des choses intéressantes Et puis on avait besoin de les expliquer, de les faire comprendre. Moi, je lui ai demandé ensuite d'aller dans sa cuisine avec l'équipe. Et ça, c'est fait. Bien sûr. Donc ça, c'est très enrichissant pour tout le monde. On se connaît mieux. On connaît ce que chacun fait, comment il le fait, quelles sont ses difficultés. Donc ça crée beaucoup de liens.

  • Christian

    C'est un point important au Collège Cuyard de France, à travers les journées d'échange nationales qui se font, justement, ces mélanges, et connaître les uns et les autres. Quelle est l'importance de la... Tu as un petit peu répondu.

  • Thierry

    tout à l'heure de la proximité d'un tour d'univers alors nous on est dans une région qui n'est pas très dense en termes de population et je dirais qu'en fait on est il faut il faut savoir s'écarter de son quotidien professionnel pour rencontrer les autres à certaines occasions alors ça peut être aller dans un restaurant comme comme consommateur mais aussi aller voir les professionnels à travers différentes rencontres ça peut être à trop à travers les matinées d'immersion les journées d'immersion où on se rencontre on s'aperçoit que sur un un même territoire, finalement, on se connaît très peu, mais on se connaît de mieux en mieux, finalement. Et on appréhende peut-être notre territoire différemment à plusieurs. Le collectif est toujours satisfaisant, en fait.

  • Christian

    Et en équipe interne, on sait que ton épouse Svetlana est beaucoup impliquée dans votre projet. Elle a été qualifiée de bi-addict.

  • Thierry

    Oui, on peut dire ça, oui.

  • Christian

    Quelque part. Mais d'autres... vous ont rejoint. Edgar est toujours avec vous.

  • Thierry

    Edgar, bien sûr, oui. Il est arrivé comme stagiaire. Ensuite, il a été... Il a fait sa formation en alternance. Et puis, il est devenu salarié. Puis, il est devenu co-gérant. C'est formidable. Et puis, ça sera... Moi, j'adore partager. J'adore enseigner. Je vais aussi dans les écoles primaires, aussi, pour parler du goût. Parler des abeilles, mais parler du goût aussi. J'interviens aussi auprès d'un apiculteur professionnel, pour échanger avec eux. Donc, je suis très impliqué au niveau associatif dans ma filière, également. Et... Et ça apporte, en fait, ça élargit son écosystème du quotidien, en fait. Bien sûr. Et donc, on voit les choses très différemment, de façon beaucoup plus large. Et je pense qu'ensuite, c'est vrai qu'on se sent moins seul parce qu'on a des difficultés sur une micro-entreprise. Il ne faut pas rêver, on a des difficultés au quotidien. Il faut savoir s'entourer, en fait.

  • Christian

    Bruno, par exemple.

  • Thierry

    Bruno,

  • Christian

    il est là depuis 25, 30 ans.

  • Thierry

    Il est là depuis 35 ans, je pense.

  • Christian

    35 ans, c'est formidable. Voilà, le fait de fidéliser sur... sur une passion, c'est pas simplement le partage de la passion, c'est aussi une façon d'être en relation avec les autres.

  • Thierry

    Oui, et puis il faut expliquer ce qu'on fait. Il faut le faire comprendre, il faut lui donner beaucoup de sens, mais ça, ils le comprennent assez vite. Et puis, travailler dans la nature, c'est pas mal. Il faut reconnaître qu'on a un open space qui est remarquable.

  • Christian

    Comment on fait comprendre ça au grand public ? Parce que tu connais l'association de manchés citoyens que le collège a développé à côté pour justement sensibiliser ce grand public, en faire des passionnés. Vous avez une relation avec ce grand public ?

  • Thierry

    Oui, on a une relation qu'on a construite au fil du temps parce qu'en fait, on n'était pas toujours en accord avec... tout ce qu'on retrouvait dans les médias sur l'abeille, sur les mortalités, etc. Enfin, les problèmes de l'apiculture que nous, on connaît moins dans l'environnement qu'on a choisi. Et on a vraiment voulu expliquer aux consommateurs notre point de vue. Notre point de vue, alors, ça passe sur les réseaux, sur notre communauté, mais aussi on fait des marchés événementiels de producteurs. Et là, on est vraiment là pour expliquer. Vendre un pot de miel, vous savez, ce n'est pas cinq secondes. On y passe dix minutes parce qu'on est intarissable et les gens ont beaucoup de questions sur notre univers, en fait.

  • Christian

    Ça demande effectivement d'être expliqué, de s'en... Alors je te propose maintenant d'ouvrir le moment La Moutarde me monte au nez.

  • Speaker #0

    La Moutarde me monte au nez.

  • Christian

    Alors la moutarde de Montaunay, c'est quelque part un coup de gueule sur quelque chose qui te révolte ou sur lequel tu aurais des choses à dire, que ce soit dans l'environnement de notre société, dans l'univers de ton métier, qu'est-ce que tu aurais à nous dire ? Oui,

  • Thierry

    je l'ai déjà évoqué. Évoqué un petit peu, c'est quand même tous ces faux miels qui rentrent en Europe, alors qui s'appellent miel sans doute au niveau du papier sur les douanes, mais qui n'en sont pas du tout. Si vous voulez, d'un côté, nous, on est avec nos ruches à créer de la poésie, en quelque sorte. Ça a un goût, mais c'est de la poésie. Et on est confronté à des gens qui veulent s'enrichir à l'autre bout du monde, plutôt en Asie, et qui vendent. Des dizaines de milliers de tonnes ou des centaines de milliers de tonnes à travers le monde, ça s'appelle miel, ça a été reconstitué, c'est toujours très bien fait visiblement, c'est très dur à contrôler, mais ça envahit le monde entier. Et là c'est vraiment, on est à l'opposé, on est dans deux mondes, mais le consommateur justement il faut qu'on l'éduque, il faut vraiment qu'on fasse notre boulot. lui faire comprendre qu'il faut être non pas consommateur mais consommacteur, il faut se renseigner vraiment sur ce qu'on achète, c'est une démarche du quotidien, pour ne pas acheter n'importe quoi. C'est-à-dire que là, le mot miel qui est un vrai symbole, symbole de la nature, on en est à l'opposé. Donc là on est sur le terrain pour faire notre boulot, et alors la chance c'est qu'on ait des dizaines de milliers en France à faire notre boulot sur le terrain, et d'expliquer au jour le jour pourquoi il faut aller voir un apiculteur, et puis si on n'a pas tout. les questions, les réponses, on va chez lui. On se fait expliquer.

  • Christian

    Bien sûr. C'est la meilleure façon d'ailleurs, c'est de partager ce que tu disais. Il faut faire un restaurant et que le restaurant...

  • Thierry

    Pédagogie.

  • Christian

    Mais ça se passe en co-acteur.

  • Thierry

    Exactement.

  • Christian

    Je te remercie. Peut-être en dernière confidence, est-ce que tu aurais une adresse à nous recommander, que ce soit un restaurant, un producteur qui te vienne à l'esprit ?

  • Thierry

    J'en aurais deux parce que c'est deux coups de cœur très récents. Le restaurant, il te... tilleul dans le petit village de Tournemire, dans le Cantal. Et puis, je pense à Cyril Abonnel, La Vie Comptée, qui est un usiculteur, producteur d'huile de noix assez formidable.

  • Christian

    D'accord. Eh bien, écoute, merci Thierry. Et toi qui as beaucoup voyagé, j'imagine que tu as dû aller en Italie. Eh bien, à l'heure de notre prochain épisode, c'est l'Italie qui viendra s'installer dans notre studio, avec tiens-toi bien, un chef vice-champion de France de la pizza. un épisode à ne pas manquer pour tous les amoureux des produits du terroir et de la gastronomie aussi italienne et je sais qu'ils sont nombreux,

  • Speaker #0

    merci à toi vous venez de déguster un épisode de la Terre à la Tinte, le podcast qui vous donne envie de bien manger nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie, si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef et en vous abonnant, vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous.

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Description

Thierry Fedon de la Maison Fedon en Haute-Vienne n’est pas seulement un apiculteur passionné.

C’est un explorateur des saveurs, un protecteur de la biodiversité et un artisan militant de la qualité.

Thierry perpétue l’héritage familial de la Maison Fedon, tout en lui apportant une vision unique, nourrie par des voyages à travers le monde.

Autant de rencontres qui ont façonné son approche.


Dans cet épisode, il partage son histoire, ses voyages, et sa quête d’une apiculture respectueuse de la nature et des abeilles.

Il évoque aussi les défis de son métier, l’impact du dérèglement climatique, la lutte contre la fraude au miel, et l’importance de son approche qui part des territoires.

Découvrez comment Thierry transcende les limites de son métier pour en faire un véritable engagement écologique et humain.


Le Collège Culinaire de France est une association fondée en 2011 à l'initiative de quinze grands chefs restaurateurs à l'instar d'Alain Ducasse, Joël Robuchon, Yannick Alléno, Paul Bocuse, Alain Dutournier, Gilles Goujon, Michel Guérard, Marc Haeberlin, Régis Marcon, Thierry Marx, Gérald Passedat, Laurent Petit, Anne-Sophie Pic, Guy Savoy et Pierre Troisgros. Le Collège Culinaire de France est la seule association, à ce jour, initiée par le plus grand rassemblement de chefs français reconnus et incontestés, qui s’emploie, concrètement, sur le terrain, à relier des Producteurs et Artisans de Qualité avec des Restaurants de Qualité de toutes catégories. Elle rassemble ceux qui œuvrent pour une vision d’avenir du métier, et fédère tous ceux qui s’engagent sur des synergies de valeurs et de pratiques partagées.


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Crédits

En cuisine :

Un foodcast mitonnée aux petits oignons par Suniwan

Illustration servie par Hugo Girard

Un épisode enregistré au Mojo dans le 17éme arrondissement de Paris


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans le podcast de La Terre à l'Assiette.

  • Christian

    Bonjour, je suis ravi de vous retrouver dans un nouvel épisode de La Terre à l'Assiette, le podcast qui met en avant les artisans du bien-manger, celles et ceux qui vivent leur passion au service d'une gastronomie humaniste et plus jeune. Qui mieux que mon invité du jour pour incarner ce combat ? C'est sur la commune de Razès, en Haute-Neuve, que Thierry Feudon, de la maison Feudon, possède sa ferme apicole. L'histoire de la maison Feudon commence en 1960, lorsque Jean et Solange Feudon débutent leur activité d'apiculteur. Dès son plus jeune âge, leur fils Thierry les assiste en bravant de nombreuses piqûres. Cela ne l'a pas découragé bien d'encontre. À 18 ans, ce voyageur dans l'âme est désireux d'en apprendre davantage sur cette activité fascinante, décide de partir explorer l'univers apicole à travers le monde. Pourquoi ce choix ? En quoi ce voyage a-t-il changé sa vision du métier ? Est-elle toujours la même aujourd'hui ? Il posera la question. Reconnu par le Collège Culière de France depuis 2018, nous nous intéressons également avec lui aux enjeux et aux défis à relever pour pérenniser une activité qui, on le sait, est touchée au premier plan par le dérèglement climatique.

  • Speaker #0

    Une émission présentée par Christian Regouby.

  • Christian

    Bonjour Thierry.

  • Thierry

    Bonjour Christian.

  • Christian

    Alors raconte-nous un petit peu comment s'est forgé ton identité à travers justement cette histoire que j'ai rapidement évoquée pour que tu puisses développer ta vision. de ce métier que tu incarnes aujourd'hui et que tu portes courageusement.

  • Thierry

    Alors comme tu l'as expliqué, effectivement, moi j'ai baigné au milieu des abeilles dès mon plus jeune âge. J'ai vraiment cette activité à travers les parents. je suivais dans toute leur activité, ça a vraiment mis mes sens en éveil. C'est une empreinte très forte, très diversifiée au fil des saisons et des activités. Et puis en plus, avec les ruches, on peut se déplacer, on n'est pas lié à un foncier, on peut effectuer de la transhumance. Donc en fait, j'ai tout de suite ressenti cette très grande richesse, cette diversité. Et puis un peu plus tard, j'ai voulu étendre ce territoire de découverte en allant un petit peu plus loin que la ferme familiale.

  • Christian

    Et ce voyage que tu as entrepris à 18 ans, 18 ans. Pourquoi ? Qu'est-ce qui a motivé le fait de partir comme ça ?

  • Thierry

    L'inconscience, sûrement. J'ai voulu aller le plus loin possible en perdant tous mes repères. Donc je suis parti au Japon, avec l'idée finalement de trouver un apiculteur. Donc j'ai fait le tour du Japon en stop jusqu'au moment où j'ai trouvé un apiculteur. Et suite à un problème d'attaque d'un rucher par un ours, finalement j'ai eu ma place, puisque je devenais nécessaire dans cette exploitation. Donc c'est comme ça que j'ai été accepté.

  • Christian

    C'est là où en fait l'inconscience n'est pas de l'inconséquence.

  • Thierry

    Oui, j'y ai goûté. Donc après, ça m'a donné envie de continuer. Après, je suis parti deux ans en Afrique, en Nouvelle-Zélande, à travers le monde, dans beaucoup d'endroits, puisqu'il y a des apiculteurs partout. Et on arrive avec un savoir-faire. Donc personne ne nous attend, mais finalement, on est bienvenus assez rapidement.

  • Christian

    Alors tu m'as dit par inconscience, mais le pourquoi vraiment de ce voyage, indépendamment de la manière dont tu es parti, et qu'est-ce que ça t'a vraiment apporté de différent ?

  • Thierry

    Je pense que je me suis rendu compte qu'il y a une autre façon de travailler, puisque je ne connaissais que celle de mes parents.

  • Christian

    C'est pour ça que tu es parti, parce que tu voulais voir une autre façon.

  • Thierry

    Oui, je voulais découvrir d'autres horizons, avec d'autres apiculteurs, d'autres abeilles, d'autres environnements surtout. Et ça m'a permis, à travers les semaines que j'ai pu passer dans le nord du Japon, en Hokkaido, de rencontrer des gens assez formidables. Finalement, qui sont partout où j'ai pu voyager après. Ce n'était pas tant les techniques qu'on apprend, mais plutôt le regard de l'autre. de gens qui sont devenus des mentors, finalement. Quelle est leur appréhension de leur activité qu'on partage, la passion qu'on partage ? Et en fait, c'est ce que j'en ai gardé. C'est pourquoi ils sont comme ça, comment ils en parlent, comment ils se comportent, comment ils se comportent bien, souvent. Et pourquoi ça devient des mentors aussi. Alors, ce n'est pas une ambition de devenir un mentor, mais c'est d'appréhender, en fait, cette façon de cohabiter entre la nature. un insecte et puis de faire une activité qui reste toujours aussi passionnante. Ça enrichit réellement toutes les ambitions que je pouvais avoir en étant jeune. Oui, oui, vraiment. Et mon regard des années après, c'est que ça me donne vraiment l'envie de continuer à rencontrer des gens qui partagent la même activité que moi, avec la même passion. Et c'est vrai que si je me retrouve en Ouzbékistan ou en Bolivie, tout de suite on est au cœur des choses. En partageant une même passion, en fait on comprend le pays tout de suite. C'est étonnant, très étonnant, on n'a pas besoin de rester très longtemps et de poser des questions. On regarde, on partage, on regarde comment la personne parle à ses abeilles ou les regarde. regarde ou parle d'elle. En fait, on comprend beaucoup de choses très vite. Et ce partage, en fait, il est très fort.

  • Christian

    C'est intéressant parce que vous parlez souvent au collège de territoire. C'est quoi ton territoire ? On voit bien qu'il est à la fois ancré quelque part, mais il est en même temps mouvant à travers ce que tu as capté à travers le monde et cette transhumance dont tu parles, cette mobilité qu'il peut y avoir à travers tes ruches.

  • Thierry

    Avant de voyager, je n'avais pas la notion de mon territoire. C'était mon quotidien. Et c'est vraiment en revenant sur ce territoire-là. limousin que je me suis aperçu de toute sa beauté de toute sa richesse et ensuite il faut savoir que nous avec nos abeilles avec nos ruches on lit le paysage où on anticipe le paysage sur ce qui va se passer au niveau des fleuraisons est en fait notre le fondement notre notre regard c'est ensuite d'apporter une saveur à ce paysage à travers le miel ou les miels qu'on produit.

  • Christian

    Ce que tu évoques me fait penser à quelque chose de totalement nouveau et totalement porté vers l'avenir dans la relation à la nature. Il me semble, tu disais tout à l'heure, les sens en éveil. Il y a une forme d'hybridation entre la nature et ton activité, entre ton activité humaine. et la nature, qui est totalement nouvelle par rapport à la manière dont on considérait la nature et l'exploitation de la nature précédemment.

  • Thierry

    Oui, complètement, parce que en fait, quand on regarde un paysage, on ne voit pas le miel. C'est un produit qu'on ne voit pas. Et on ne le découvre que grâce aux abeilles qui le concentrent, qui le concentrent, qui l'enrichissent. Et soudainement, finalement, si on a bien fait notre travail, si on était au bon endroit, au bon moment, avec les bonnes conditions, on récolte un miel. Un miel qu'on a imaginé grâce aux abeilles, qui sont le vecteur de cette énergie et de la nature. Donc c'est assez formidable en soi, c'est pour ça que ça nous fascine et on n'est jamais blasé de regarder ce qui se passe et on ressent vraiment l'énergie. Alors des fois elle est très forte et puis des fois elle est beaucoup moins forte. Mais on est vraiment à l'unisson avec cette nature à travers nos abeilles.

  • Christian

    C'est fascinant parce que ça ne vient pas forcément à l'esprit quand on parle d'apiculture ou quand on parle d'abeilles, tout ce que tu nous dis. Et par rapport à ça, dans ce que tu as développé au collège, comment tu vis ton... ton identité d'artisan militant de la qualité, comme vous dites.

  • Thierry

    Avant de penser à appartenir au collège, j'ignorais son existence déjà jusqu'en 2018, j'essayais de faire le mieux possible mon métier, avec ce que j'imaginais être le mieux possible, c'est-à-dire bien faire pour produire du bon et du beau. et en respectant les abeilles et donc la nature, en espérant que le consommateur sache vraiment comprendre notre démarche. Notre démarche, elle est complexe. Il y a beaucoup de poésie dans notre démarche. Mais quand on rencontre un consommateur, c'est un échange. un échange, un pot de miel contre un peu d'argent. Mais en fait, on vend beaucoup plus que ça. On vend tout un symbole, on vend la nature dans tout ce qu'elle a de meilleur.

  • Christian

    Ah oui, c'est passionnant. Et ça, c'est ce côté militant, artisan militant, en fait, quelque part.

  • Thierry

    Oui, oui. Et puis, moi, j'ai évolué dans mon activité. Il y a une dizaine d'années, j'ai arrêté d'aller dans certaines zones qui ne me plaisaient pas. D'accord. Qui étaient finalement, on peut dire, dans des zones où se pratiquait l'agribusiness. Et je me suis réfugié dans... une zone qui est beaucoup plus proche de moi, qui m'environne, qui est plus liée à une campagne respectueuse, je dirais. On voit beaucoup plus de gens que de matériel. On y voit de la forêt aussi, des vaches limousines. Et c'est un endroit finalement où je savais clairement que j'allais vers une décroissance de ma productivité. Mais au final, j'allais être beaucoup plus fier des miels que j'allais proposer déjà à mes enfants et puis à la clientèle ensuite.

  • Christian

    Donc tu privilégies le sens, ton identité.

  • Thierry

    aux résultats ou la productivité économique en fait j'étais j'avais une conviction qu'en produisant beaucoup moins j'allais j'allais être beaucoup plus fier en étant beaucoup plus fier je serai peut-être mieux parler de mes produits au consommateur final Alors qui peut être des particuliers, mais qui peuvent être aussi des chefs, des restaurateurs, des artisans. Donc c'est devenu beaucoup plus fort en moi, cette démarche, à travers la conviction initiale que j'avais.

  • Christian

    C'est un sacré chemin, parce que c'est un chemin qui va à l'encontre des sentiers battus. Je pense que dans ta profession, c'est pas forcément évident de trouver des formes d'alter ego ?

  • Thierry

    Alors il y en a, ils ont vraiment du mérite, mais c'est pas la majorité. était loin de là, puisqu'en fait, là aussi, comme en agriculture, il y a souvent une course à la productivité. Moi, je me suis écarté de ça, et j'ai focalisé avec notre équipe sur des petites productions, sur des territoires isolés qu'on avait choisis. C'était pas du tout économique, parfois, même souvent. Mais finalement, ce qu'on a pu produire, les consommateurs ont découvert qu'il y avait peut-être une autre façon d'appréhender un apiculteur, son travail, et à travers son travail, à travers le travail travail des abeilles, il y avait un territoire. Et en fait, c'était mettre en avant un territoire qui était beaucoup plus riche qu'on ne le pensait.

  • Christian

    Je te propose, avant de passer à notre deuxième partie, de passer dans notre rubrique Toc toc, qui est là ?

  • Speaker #0

    Toc toc, qui est là ?

  • Christian

    Tu nous dis en question-réponse si tu étais un animal.

  • Thierry

    Une abeille.

  • Christian

    Une reine ? Non,

  • Thierry

    une abeille ou même un papillon pour son vol erratique.

  • Christian

    Ah, c'est beau ça. Une saison ?

  • Thierry

    Le printemps pour son énergie.

  • Christian

    Une ville ?

  • Thierry

    Florence.

  • Christian

    Pourquoi ?

  • Thierry

    Il y a tout.

  • Christian

    Il y a tout. Un des cinq sens ?

  • Thierry

    Je dirais le sixième. Il nous en faut beaucoup d'intuition.

  • Christian

    Le sixième sens, c'est très beau ça, effectivement, comme réponse. Un plat ?

  • Thierry

    Un lapin aux olives accompagné d'une ratatouille.

  • Christian

    Une boisson ?

  • Thierry

    Amen tout salon.

  • Christian

    Alors, la deuxième partie où je voudrais t'interroger, c'est cette notion de la relation, de la transparence de la relation. Je dirais, dans toutes ses dimensions, la relation aux autres, la relation à la nature, la relation aux produits, la relation aux abeilles. C'est quoi l'essence même de cette relation pour toi ?

  • Thierry

    C'est quelque chose qui est ancré en moi depuis toujours, c'est-à-dire qu'on dépend de la nature. Complètement. Et contrairement à d'autres activités d'élevage, puisque l'apiculture c'est un élevage aussi, avant c'était une cueillette, c'est devenu plutôt de l'élevage, contrairement à d'autres élevages en agriculture, plus on a de ruches et plus on les disperse, moins elles sont concentrées. Et donc c'est vraiment, là on est à l'opposé du ressort évidemment, puisque les ruches dépendent de leur environnement. Donc de la qualité de l'environnement aussi, et des ressources. Donc c'est important de les placer au bon endroit, et puis d'avoir une nature ou une agriculture respectueuse des abeilles, parce que les abeilles sont un filtre. Quand les abeilles vont bien, on peut dire que c'est un endroit qui fait plaisir à vivre. Et on le ressent nous-mêmes, quand les abeilles vont bien.

  • Christian

    Est-ce qu'on entend souvent parler aujourd'hui, dans tout ce qui est pollinisation, etc., de l'avenir même de l'humanité ? On voit quantité de choses qui se dégradent, même si on le ressent, comme par exemple, il n'y a plus de champs d'oiseaux dans les campagnes, etc. Est-ce que toi, dans la démarche avec les abeilles, tu ressens des comportements des abeilles différents selon les environnements où elles se trouvent ?

  • Thierry

    Je dirais que ça touche plus peut-être au changement climatique. C'est l'absence d'hiver qui marque vraiment le changement. L'absence d'hiver, c'est une pause dans la nature. Et cette absence fait que les colonies d'abeilles et la végétation, puisqu'elles sont fortement corrélées, sont assez bousculées. Donc notre métier a vraiment changé, il a évolué, il faut être beaucoup plus Ausha, beaucoup plus observateur, savoir répondre quand on pense que c'est le bon moment sur certaines activités. C'est pas du tout la routine, mais finalement c'est ce qu'on aime. reconnaître.

  • Christian

    Ça veut dire que c'est quand même l'imprévu.

  • Thierry

    C'est l'imprévu, mais je crois que c'est ce qui nous motive. Il y a beaucoup d'imprévus dans cette poésie puisque c'est un mouvement.

  • Christian

    C'est être au cœur de la vie, mais au cœur de la vie c'est être au cœur de l'incertitude aussi. C'est tout l'inverse des sociétés d'où l'on vient où, je pense, on a besoin de certitude.

  • Thierry

    Alors nos repères, c'est la nature. La nature, on a des indices à travers les abeilles quand on connaît bien le fonctionnement. Et on est témoin de tout ça. Après, on a quand même une entreprise à faire tourner. On n'est pas que des poètes à regarder ce qui se passe devant une ruche. Donc il faut conjuguer tout ça, mais je dirais qu'un travail d'équipe... Avec une équipe vraiment passionnée, puisqu'on est très bien entouré à la Maison Feudon.

  • Christian

    On va y venir, c'est important effectivement que tu nous expliques ça. Mais je voudrais juste avant, tu parles parce que la relation économique est fondamentale. Comment est-ce qu'on crée... à partir de cette philosophie-là, non pas une adaptation à l'économie d'aujourd'hui, mais quasiment une nouvelle économie. Parce que la finalité économique pour toi, me semble-t-il, comme beaucoup de membres du Collège Militaire de France, c'est de bien vivre de son métier. Ce n'est pas d'avoir des investissements phénoménaux, etc., pour être toujours plus grand, plus gros, plus de profit. C'est de bien vivre de son métier. Comment on peut imaginer justement, puisque tu dis à certains moments que vous avez eu des difficultés avec l'approche que tu as, mais comment on arrive quand même à trouver, quels sont les quelques ingrédients à ton avis qu'il faut mettre en place pour cette nouvelle économie ?

  • Thierry

    Je pense qu'il ne faut pas rester tout seul déjà, il faut avoir un réseau, un réseau dans notre filière. alors moi je l'ai élargi aussi à l'étranger depuis que je voyage et ça permet d'enrichir parce que chacun se pose des questions dans son coin et en fait en échangeant une réflexion ou une idée, on repart chacun avec trois idées, c'est-à-dire celle qu'on avait plus la nouvelle donc c'est vrai qu'il faut vraiment s'enrichir on peut pas être un super héros et penser qu'on va vraiment réussir dans tout ce qui se passe non, non, il faut vraiment alors c'est un collectif, un collectif de filière ou un collectif transversal

  • Christian

    Et la démarche avec le collège ? parallèlement à la filière, tu y trouves quoi ?

  • Thierry

    Je rencontre des personnes avec lesquelles je partage les mêmes valeurs. C'est-à-dire des gens honnêtes, qui veulent bien faire, et de leur mieux. Et on se comprend assez vite. Parfois, je me comprends beaucoup mieux. Je partage des valeurs qui sont bien supérieures à celles que je peux avoir à certains de mes collègues en apiculture.

  • Christian

    Oui, tu nous as dit ça plusieurs fois.

  • Thierry

    Et donc, c'est un enrichissement intellectuel, personnel, et d'entreprise aussi.

  • Christian

    Quel sont les... principales difficultés ou obstacles qui te viennent à l'esprit pour justement pratiquer cette approche du métier telle que tu la pratiques ?

  • Thierry

    La principale difficulté, je dirais, c'est la qualité de nos environnements, par exemple. Changement climatique, bien sûr. Le marché. Parce que le marché, le miel est un des produits au monde le plus fraudé.

  • Christian

    Ah oui ?

  • Thierry

    Donc... Voilà, ça perturbe quand même, alors non pas notre métier directement, mais en fait, c'est la relation que peuvent avoir les consommateurs par rapport à un produit qui s'appelle miel et qui n'en est pas toujours.

  • Christian

    Quelle est la proportion de miel importé par rapport au miel produit en France ?

  • Thierry

    On en importe un peu plus qu'on en produit maintenant. Ça s'est plutôt dégradé. Et puis c'est assez sauvage.

  • Christian

    Donc en termes de consommation ?

  • Thierry

    En consommation, on est à peu près sur 40 000 tonnes en France. Et bon an, mal an, oui, on va en produire peut-être 20 000, à peu près.

  • Christian

    Alors maintenant, je te propose de passer à l'instant fromage ou dessert.

  • Speaker #0

    C'est fromage ou dessert ?

  • Christian

    Logique ou émotion ?

  • Thierry

    Émotion.

  • Christian

    Compétition ou coopération ?

  • Thierry

    Coopération.

  • Christian

    Travail ou vacances ?

  • Thierry

    Je suis entre les deux toujours.

  • Christian

    Pareil, vie personnelle ou vie professionnelle ?

  • Thierry

    Tout ça est bien mélangé.

  • Christian

    Surtout que ton épouse, on va le voir, travaille avec toi. Temps court ou temps long ?

  • Thierry

    Temps long. Il faut construire les choses sur la durée.

  • Christian

    Est-ce que tu aimerais renaître dans le passé ou dans le futur ?

  • Thierry

    Dans le futur proche. Mais je préfère le présent finalement.

  • Christian

    Quelle est ta cuisine étrangère préférée ?

  • Thierry

    Italienne.

  • Christian

    Merci Thierry. Passons à la troisième et dernière partie de notre entretien. Justement, tu l'as évoqué, tout ce qui est... coopération, que ce soit coopération avec d'autres dans ton métier, coopération avec des membres du collège, mais aussi après on va le voir avec coopération avec tes équipes internes, comment vous construisez, vous avez une relation me semble-t-il assez familiale, mais en même temps avec des personnes qui viennent de l'extérieur. Donc tes coopérations avec d'autres producteurs, avec des restaurants, avec d'autres membres, avec ta filière, tu les qualifierais comment en termes d'approche ?

  • Thierry

    Struvkelle est Épanouissante. Épanouissante, je me rappelle il y a quelques années, Guy Ausha, de la cuisine du cloître à Limoges, nous avait sollicité pour venir avec sa brigade passer une journée, pour comprendre ce qu'on faisait. Et on n'avait pas l'habitude de ça, pas du tout.

  • Christian

    Comprendre le métier de l'autre.

  • Thierry

    Voilà. Et en fait, on a passé une très belle journée. On s'est aperçu que... on faisait des choses intéressantes Et puis on avait besoin de les expliquer, de les faire comprendre. Moi, je lui ai demandé ensuite d'aller dans sa cuisine avec l'équipe. Et ça, c'est fait. Bien sûr. Donc ça, c'est très enrichissant pour tout le monde. On se connaît mieux. On connaît ce que chacun fait, comment il le fait, quelles sont ses difficultés. Donc ça crée beaucoup de liens.

  • Christian

    C'est un point important au Collège Cuyard de France, à travers les journées d'échange nationales qui se font, justement, ces mélanges, et connaître les uns et les autres. Quelle est l'importance de la... Tu as un petit peu répondu.

  • Thierry

    tout à l'heure de la proximité d'un tour d'univers alors nous on est dans une région qui n'est pas très dense en termes de population et je dirais qu'en fait on est il faut il faut savoir s'écarter de son quotidien professionnel pour rencontrer les autres à certaines occasions alors ça peut être aller dans un restaurant comme comme consommateur mais aussi aller voir les professionnels à travers différentes rencontres ça peut être à trop à travers les matinées d'immersion les journées d'immersion où on se rencontre on s'aperçoit que sur un un même territoire, finalement, on se connaît très peu, mais on se connaît de mieux en mieux, finalement. Et on appréhende peut-être notre territoire différemment à plusieurs. Le collectif est toujours satisfaisant, en fait.

  • Christian

    Et en équipe interne, on sait que ton épouse Svetlana est beaucoup impliquée dans votre projet. Elle a été qualifiée de bi-addict.

  • Thierry

    Oui, on peut dire ça, oui.

  • Christian

    Quelque part. Mais d'autres... vous ont rejoint. Edgar est toujours avec vous.

  • Thierry

    Edgar, bien sûr, oui. Il est arrivé comme stagiaire. Ensuite, il a été... Il a fait sa formation en alternance. Et puis, il est devenu salarié. Puis, il est devenu co-gérant. C'est formidable. Et puis, ça sera... Moi, j'adore partager. J'adore enseigner. Je vais aussi dans les écoles primaires, aussi, pour parler du goût. Parler des abeilles, mais parler du goût aussi. J'interviens aussi auprès d'un apiculteur professionnel, pour échanger avec eux. Donc, je suis très impliqué au niveau associatif dans ma filière, également. Et... Et ça apporte, en fait, ça élargit son écosystème du quotidien, en fait. Bien sûr. Et donc, on voit les choses très différemment, de façon beaucoup plus large. Et je pense qu'ensuite, c'est vrai qu'on se sent moins seul parce qu'on a des difficultés sur une micro-entreprise. Il ne faut pas rêver, on a des difficultés au quotidien. Il faut savoir s'entourer, en fait.

  • Christian

    Bruno, par exemple.

  • Thierry

    Bruno,

  • Christian

    il est là depuis 25, 30 ans.

  • Thierry

    Il est là depuis 35 ans, je pense.

  • Christian

    35 ans, c'est formidable. Voilà, le fait de fidéliser sur... sur une passion, c'est pas simplement le partage de la passion, c'est aussi une façon d'être en relation avec les autres.

  • Thierry

    Oui, et puis il faut expliquer ce qu'on fait. Il faut le faire comprendre, il faut lui donner beaucoup de sens, mais ça, ils le comprennent assez vite. Et puis, travailler dans la nature, c'est pas mal. Il faut reconnaître qu'on a un open space qui est remarquable.

  • Christian

    Comment on fait comprendre ça au grand public ? Parce que tu connais l'association de manchés citoyens que le collège a développé à côté pour justement sensibiliser ce grand public, en faire des passionnés. Vous avez une relation avec ce grand public ?

  • Thierry

    Oui, on a une relation qu'on a construite au fil du temps parce qu'en fait, on n'était pas toujours en accord avec... tout ce qu'on retrouvait dans les médias sur l'abeille, sur les mortalités, etc. Enfin, les problèmes de l'apiculture que nous, on connaît moins dans l'environnement qu'on a choisi. Et on a vraiment voulu expliquer aux consommateurs notre point de vue. Notre point de vue, alors, ça passe sur les réseaux, sur notre communauté, mais aussi on fait des marchés événementiels de producteurs. Et là, on est vraiment là pour expliquer. Vendre un pot de miel, vous savez, ce n'est pas cinq secondes. On y passe dix minutes parce qu'on est intarissable et les gens ont beaucoup de questions sur notre univers, en fait.

  • Christian

    Ça demande effectivement d'être expliqué, de s'en... Alors je te propose maintenant d'ouvrir le moment La Moutarde me monte au nez.

  • Speaker #0

    La Moutarde me monte au nez.

  • Christian

    Alors la moutarde de Montaunay, c'est quelque part un coup de gueule sur quelque chose qui te révolte ou sur lequel tu aurais des choses à dire, que ce soit dans l'environnement de notre société, dans l'univers de ton métier, qu'est-ce que tu aurais à nous dire ? Oui,

  • Thierry

    je l'ai déjà évoqué. Évoqué un petit peu, c'est quand même tous ces faux miels qui rentrent en Europe, alors qui s'appellent miel sans doute au niveau du papier sur les douanes, mais qui n'en sont pas du tout. Si vous voulez, d'un côté, nous, on est avec nos ruches à créer de la poésie, en quelque sorte. Ça a un goût, mais c'est de la poésie. Et on est confronté à des gens qui veulent s'enrichir à l'autre bout du monde, plutôt en Asie, et qui vendent. Des dizaines de milliers de tonnes ou des centaines de milliers de tonnes à travers le monde, ça s'appelle miel, ça a été reconstitué, c'est toujours très bien fait visiblement, c'est très dur à contrôler, mais ça envahit le monde entier. Et là c'est vraiment, on est à l'opposé, on est dans deux mondes, mais le consommateur justement il faut qu'on l'éduque, il faut vraiment qu'on fasse notre boulot. lui faire comprendre qu'il faut être non pas consommateur mais consommacteur, il faut se renseigner vraiment sur ce qu'on achète, c'est une démarche du quotidien, pour ne pas acheter n'importe quoi. C'est-à-dire que là, le mot miel qui est un vrai symbole, symbole de la nature, on en est à l'opposé. Donc là on est sur le terrain pour faire notre boulot, et alors la chance c'est qu'on ait des dizaines de milliers en France à faire notre boulot sur le terrain, et d'expliquer au jour le jour pourquoi il faut aller voir un apiculteur, et puis si on n'a pas tout. les questions, les réponses, on va chez lui. On se fait expliquer.

  • Christian

    Bien sûr. C'est la meilleure façon d'ailleurs, c'est de partager ce que tu disais. Il faut faire un restaurant et que le restaurant...

  • Thierry

    Pédagogie.

  • Christian

    Mais ça se passe en co-acteur.

  • Thierry

    Exactement.

  • Christian

    Je te remercie. Peut-être en dernière confidence, est-ce que tu aurais une adresse à nous recommander, que ce soit un restaurant, un producteur qui te vienne à l'esprit ?

  • Thierry

    J'en aurais deux parce que c'est deux coups de cœur très récents. Le restaurant, il te... tilleul dans le petit village de Tournemire, dans le Cantal. Et puis, je pense à Cyril Abonnel, La Vie Comptée, qui est un usiculteur, producteur d'huile de noix assez formidable.

  • Christian

    D'accord. Eh bien, écoute, merci Thierry. Et toi qui as beaucoup voyagé, j'imagine que tu as dû aller en Italie. Eh bien, à l'heure de notre prochain épisode, c'est l'Italie qui viendra s'installer dans notre studio, avec tiens-toi bien, un chef vice-champion de France de la pizza. un épisode à ne pas manquer pour tous les amoureux des produits du terroir et de la gastronomie aussi italienne et je sais qu'ils sont nombreux,

  • Speaker #0

    merci à toi vous venez de déguster un épisode de la Terre à la Tinte, le podcast qui vous donne envie de bien manger nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie, si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef et en vous abonnant, vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous.

Description

Thierry Fedon de la Maison Fedon en Haute-Vienne n’est pas seulement un apiculteur passionné.

C’est un explorateur des saveurs, un protecteur de la biodiversité et un artisan militant de la qualité.

Thierry perpétue l’héritage familial de la Maison Fedon, tout en lui apportant une vision unique, nourrie par des voyages à travers le monde.

Autant de rencontres qui ont façonné son approche.


Dans cet épisode, il partage son histoire, ses voyages, et sa quête d’une apiculture respectueuse de la nature et des abeilles.

Il évoque aussi les défis de son métier, l’impact du dérèglement climatique, la lutte contre la fraude au miel, et l’importance de son approche qui part des territoires.

Découvrez comment Thierry transcende les limites de son métier pour en faire un véritable engagement écologique et humain.


Le Collège Culinaire de France est une association fondée en 2011 à l'initiative de quinze grands chefs restaurateurs à l'instar d'Alain Ducasse, Joël Robuchon, Yannick Alléno, Paul Bocuse, Alain Dutournier, Gilles Goujon, Michel Guérard, Marc Haeberlin, Régis Marcon, Thierry Marx, Gérald Passedat, Laurent Petit, Anne-Sophie Pic, Guy Savoy et Pierre Troisgros. Le Collège Culinaire de France est la seule association, à ce jour, initiée par le plus grand rassemblement de chefs français reconnus et incontestés, qui s’emploie, concrètement, sur le terrain, à relier des Producteurs et Artisans de Qualité avec des Restaurants de Qualité de toutes catégories. Elle rassemble ceux qui œuvrent pour une vision d’avenir du métier, et fédère tous ceux qui s’engagent sur des synergies de valeurs et de pratiques partagées.


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Crédits

En cuisine :

Un foodcast mitonnée aux petits oignons par Suniwan

Illustration servie par Hugo Girard

Un épisode enregistré au Mojo dans le 17éme arrondissement de Paris


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans le podcast de La Terre à l'Assiette.

  • Christian

    Bonjour, je suis ravi de vous retrouver dans un nouvel épisode de La Terre à l'Assiette, le podcast qui met en avant les artisans du bien-manger, celles et ceux qui vivent leur passion au service d'une gastronomie humaniste et plus jeune. Qui mieux que mon invité du jour pour incarner ce combat ? C'est sur la commune de Razès, en Haute-Neuve, que Thierry Feudon, de la maison Feudon, possède sa ferme apicole. L'histoire de la maison Feudon commence en 1960, lorsque Jean et Solange Feudon débutent leur activité d'apiculteur. Dès son plus jeune âge, leur fils Thierry les assiste en bravant de nombreuses piqûres. Cela ne l'a pas découragé bien d'encontre. À 18 ans, ce voyageur dans l'âme est désireux d'en apprendre davantage sur cette activité fascinante, décide de partir explorer l'univers apicole à travers le monde. Pourquoi ce choix ? En quoi ce voyage a-t-il changé sa vision du métier ? Est-elle toujours la même aujourd'hui ? Il posera la question. Reconnu par le Collège Culière de France depuis 2018, nous nous intéressons également avec lui aux enjeux et aux défis à relever pour pérenniser une activité qui, on le sait, est touchée au premier plan par le dérèglement climatique.

  • Speaker #0

    Une émission présentée par Christian Regouby.

  • Christian

    Bonjour Thierry.

  • Thierry

    Bonjour Christian.

  • Christian

    Alors raconte-nous un petit peu comment s'est forgé ton identité à travers justement cette histoire que j'ai rapidement évoquée pour que tu puisses développer ta vision. de ce métier que tu incarnes aujourd'hui et que tu portes courageusement.

  • Thierry

    Alors comme tu l'as expliqué, effectivement, moi j'ai baigné au milieu des abeilles dès mon plus jeune âge. J'ai vraiment cette activité à travers les parents. je suivais dans toute leur activité, ça a vraiment mis mes sens en éveil. C'est une empreinte très forte, très diversifiée au fil des saisons et des activités. Et puis en plus, avec les ruches, on peut se déplacer, on n'est pas lié à un foncier, on peut effectuer de la transhumance. Donc en fait, j'ai tout de suite ressenti cette très grande richesse, cette diversité. Et puis un peu plus tard, j'ai voulu étendre ce territoire de découverte en allant un petit peu plus loin que la ferme familiale.

  • Christian

    Et ce voyage que tu as entrepris à 18 ans, 18 ans. Pourquoi ? Qu'est-ce qui a motivé le fait de partir comme ça ?

  • Thierry

    L'inconscience, sûrement. J'ai voulu aller le plus loin possible en perdant tous mes repères. Donc je suis parti au Japon, avec l'idée finalement de trouver un apiculteur. Donc j'ai fait le tour du Japon en stop jusqu'au moment où j'ai trouvé un apiculteur. Et suite à un problème d'attaque d'un rucher par un ours, finalement j'ai eu ma place, puisque je devenais nécessaire dans cette exploitation. Donc c'est comme ça que j'ai été accepté.

  • Christian

    C'est là où en fait l'inconscience n'est pas de l'inconséquence.

  • Thierry

    Oui, j'y ai goûté. Donc après, ça m'a donné envie de continuer. Après, je suis parti deux ans en Afrique, en Nouvelle-Zélande, à travers le monde, dans beaucoup d'endroits, puisqu'il y a des apiculteurs partout. Et on arrive avec un savoir-faire. Donc personne ne nous attend, mais finalement, on est bienvenus assez rapidement.

  • Christian

    Alors tu m'as dit par inconscience, mais le pourquoi vraiment de ce voyage, indépendamment de la manière dont tu es parti, et qu'est-ce que ça t'a vraiment apporté de différent ?

  • Thierry

    Je pense que je me suis rendu compte qu'il y a une autre façon de travailler, puisque je ne connaissais que celle de mes parents.

  • Christian

    C'est pour ça que tu es parti, parce que tu voulais voir une autre façon.

  • Thierry

    Oui, je voulais découvrir d'autres horizons, avec d'autres apiculteurs, d'autres abeilles, d'autres environnements surtout. Et ça m'a permis, à travers les semaines que j'ai pu passer dans le nord du Japon, en Hokkaido, de rencontrer des gens assez formidables. Finalement, qui sont partout où j'ai pu voyager après. Ce n'était pas tant les techniques qu'on apprend, mais plutôt le regard de l'autre. de gens qui sont devenus des mentors, finalement. Quelle est leur appréhension de leur activité qu'on partage, la passion qu'on partage ? Et en fait, c'est ce que j'en ai gardé. C'est pourquoi ils sont comme ça, comment ils en parlent, comment ils se comportent, comment ils se comportent bien, souvent. Et pourquoi ça devient des mentors aussi. Alors, ce n'est pas une ambition de devenir un mentor, mais c'est d'appréhender, en fait, cette façon de cohabiter entre la nature. un insecte et puis de faire une activité qui reste toujours aussi passionnante. Ça enrichit réellement toutes les ambitions que je pouvais avoir en étant jeune. Oui, oui, vraiment. Et mon regard des années après, c'est que ça me donne vraiment l'envie de continuer à rencontrer des gens qui partagent la même activité que moi, avec la même passion. Et c'est vrai que si je me retrouve en Ouzbékistan ou en Bolivie, tout de suite on est au cœur des choses. En partageant une même passion, en fait on comprend le pays tout de suite. C'est étonnant, très étonnant, on n'a pas besoin de rester très longtemps et de poser des questions. On regarde, on partage, on regarde comment la personne parle à ses abeilles ou les regarde. regarde ou parle d'elle. En fait, on comprend beaucoup de choses très vite. Et ce partage, en fait, il est très fort.

  • Christian

    C'est intéressant parce que vous parlez souvent au collège de territoire. C'est quoi ton territoire ? On voit bien qu'il est à la fois ancré quelque part, mais il est en même temps mouvant à travers ce que tu as capté à travers le monde et cette transhumance dont tu parles, cette mobilité qu'il peut y avoir à travers tes ruches.

  • Thierry

    Avant de voyager, je n'avais pas la notion de mon territoire. C'était mon quotidien. Et c'est vraiment en revenant sur ce territoire-là. limousin que je me suis aperçu de toute sa beauté de toute sa richesse et ensuite il faut savoir que nous avec nos abeilles avec nos ruches on lit le paysage où on anticipe le paysage sur ce qui va se passer au niveau des fleuraisons est en fait notre le fondement notre notre regard c'est ensuite d'apporter une saveur à ce paysage à travers le miel ou les miels qu'on produit.

  • Christian

    Ce que tu évoques me fait penser à quelque chose de totalement nouveau et totalement porté vers l'avenir dans la relation à la nature. Il me semble, tu disais tout à l'heure, les sens en éveil. Il y a une forme d'hybridation entre la nature et ton activité, entre ton activité humaine. et la nature, qui est totalement nouvelle par rapport à la manière dont on considérait la nature et l'exploitation de la nature précédemment.

  • Thierry

    Oui, complètement, parce que en fait, quand on regarde un paysage, on ne voit pas le miel. C'est un produit qu'on ne voit pas. Et on ne le découvre que grâce aux abeilles qui le concentrent, qui le concentrent, qui l'enrichissent. Et soudainement, finalement, si on a bien fait notre travail, si on était au bon endroit, au bon moment, avec les bonnes conditions, on récolte un miel. Un miel qu'on a imaginé grâce aux abeilles, qui sont le vecteur de cette énergie et de la nature. Donc c'est assez formidable en soi, c'est pour ça que ça nous fascine et on n'est jamais blasé de regarder ce qui se passe et on ressent vraiment l'énergie. Alors des fois elle est très forte et puis des fois elle est beaucoup moins forte. Mais on est vraiment à l'unisson avec cette nature à travers nos abeilles.

  • Christian

    C'est fascinant parce que ça ne vient pas forcément à l'esprit quand on parle d'apiculture ou quand on parle d'abeilles, tout ce que tu nous dis. Et par rapport à ça, dans ce que tu as développé au collège, comment tu vis ton... ton identité d'artisan militant de la qualité, comme vous dites.

  • Thierry

    Avant de penser à appartenir au collège, j'ignorais son existence déjà jusqu'en 2018, j'essayais de faire le mieux possible mon métier, avec ce que j'imaginais être le mieux possible, c'est-à-dire bien faire pour produire du bon et du beau. et en respectant les abeilles et donc la nature, en espérant que le consommateur sache vraiment comprendre notre démarche. Notre démarche, elle est complexe. Il y a beaucoup de poésie dans notre démarche. Mais quand on rencontre un consommateur, c'est un échange. un échange, un pot de miel contre un peu d'argent. Mais en fait, on vend beaucoup plus que ça. On vend tout un symbole, on vend la nature dans tout ce qu'elle a de meilleur.

  • Christian

    Ah oui, c'est passionnant. Et ça, c'est ce côté militant, artisan militant, en fait, quelque part.

  • Thierry

    Oui, oui. Et puis, moi, j'ai évolué dans mon activité. Il y a une dizaine d'années, j'ai arrêté d'aller dans certaines zones qui ne me plaisaient pas. D'accord. Qui étaient finalement, on peut dire, dans des zones où se pratiquait l'agribusiness. Et je me suis réfugié dans... une zone qui est beaucoup plus proche de moi, qui m'environne, qui est plus liée à une campagne respectueuse, je dirais. On voit beaucoup plus de gens que de matériel. On y voit de la forêt aussi, des vaches limousines. Et c'est un endroit finalement où je savais clairement que j'allais vers une décroissance de ma productivité. Mais au final, j'allais être beaucoup plus fier des miels que j'allais proposer déjà à mes enfants et puis à la clientèle ensuite.

  • Christian

    Donc tu privilégies le sens, ton identité.

  • Thierry

    aux résultats ou la productivité économique en fait j'étais j'avais une conviction qu'en produisant beaucoup moins j'allais j'allais être beaucoup plus fier en étant beaucoup plus fier je serai peut-être mieux parler de mes produits au consommateur final Alors qui peut être des particuliers, mais qui peuvent être aussi des chefs, des restaurateurs, des artisans. Donc c'est devenu beaucoup plus fort en moi, cette démarche, à travers la conviction initiale que j'avais.

  • Christian

    C'est un sacré chemin, parce que c'est un chemin qui va à l'encontre des sentiers battus. Je pense que dans ta profession, c'est pas forcément évident de trouver des formes d'alter ego ?

  • Thierry

    Alors il y en a, ils ont vraiment du mérite, mais c'est pas la majorité. était loin de là, puisqu'en fait, là aussi, comme en agriculture, il y a souvent une course à la productivité. Moi, je me suis écarté de ça, et j'ai focalisé avec notre équipe sur des petites productions, sur des territoires isolés qu'on avait choisis. C'était pas du tout économique, parfois, même souvent. Mais finalement, ce qu'on a pu produire, les consommateurs ont découvert qu'il y avait peut-être une autre façon d'appréhender un apiculteur, son travail, et à travers son travail, à travers le travail travail des abeilles, il y avait un territoire. Et en fait, c'était mettre en avant un territoire qui était beaucoup plus riche qu'on ne le pensait.

  • Christian

    Je te propose, avant de passer à notre deuxième partie, de passer dans notre rubrique Toc toc, qui est là ?

  • Speaker #0

    Toc toc, qui est là ?

  • Christian

    Tu nous dis en question-réponse si tu étais un animal.

  • Thierry

    Une abeille.

  • Christian

    Une reine ? Non,

  • Thierry

    une abeille ou même un papillon pour son vol erratique.

  • Christian

    Ah, c'est beau ça. Une saison ?

  • Thierry

    Le printemps pour son énergie.

  • Christian

    Une ville ?

  • Thierry

    Florence.

  • Christian

    Pourquoi ?

  • Thierry

    Il y a tout.

  • Christian

    Il y a tout. Un des cinq sens ?

  • Thierry

    Je dirais le sixième. Il nous en faut beaucoup d'intuition.

  • Christian

    Le sixième sens, c'est très beau ça, effectivement, comme réponse. Un plat ?

  • Thierry

    Un lapin aux olives accompagné d'une ratatouille.

  • Christian

    Une boisson ?

  • Thierry

    Amen tout salon.

  • Christian

    Alors, la deuxième partie où je voudrais t'interroger, c'est cette notion de la relation, de la transparence de la relation. Je dirais, dans toutes ses dimensions, la relation aux autres, la relation à la nature, la relation aux produits, la relation aux abeilles. C'est quoi l'essence même de cette relation pour toi ?

  • Thierry

    C'est quelque chose qui est ancré en moi depuis toujours, c'est-à-dire qu'on dépend de la nature. Complètement. Et contrairement à d'autres activités d'élevage, puisque l'apiculture c'est un élevage aussi, avant c'était une cueillette, c'est devenu plutôt de l'élevage, contrairement à d'autres élevages en agriculture, plus on a de ruches et plus on les disperse, moins elles sont concentrées. Et donc c'est vraiment, là on est à l'opposé du ressort évidemment, puisque les ruches dépendent de leur environnement. Donc de la qualité de l'environnement aussi, et des ressources. Donc c'est important de les placer au bon endroit, et puis d'avoir une nature ou une agriculture respectueuse des abeilles, parce que les abeilles sont un filtre. Quand les abeilles vont bien, on peut dire que c'est un endroit qui fait plaisir à vivre. Et on le ressent nous-mêmes, quand les abeilles vont bien.

  • Christian

    Est-ce qu'on entend souvent parler aujourd'hui, dans tout ce qui est pollinisation, etc., de l'avenir même de l'humanité ? On voit quantité de choses qui se dégradent, même si on le ressent, comme par exemple, il n'y a plus de champs d'oiseaux dans les campagnes, etc. Est-ce que toi, dans la démarche avec les abeilles, tu ressens des comportements des abeilles différents selon les environnements où elles se trouvent ?

  • Thierry

    Je dirais que ça touche plus peut-être au changement climatique. C'est l'absence d'hiver qui marque vraiment le changement. L'absence d'hiver, c'est une pause dans la nature. Et cette absence fait que les colonies d'abeilles et la végétation, puisqu'elles sont fortement corrélées, sont assez bousculées. Donc notre métier a vraiment changé, il a évolué, il faut être beaucoup plus Ausha, beaucoup plus observateur, savoir répondre quand on pense que c'est le bon moment sur certaines activités. C'est pas du tout la routine, mais finalement c'est ce qu'on aime. reconnaître.

  • Christian

    Ça veut dire que c'est quand même l'imprévu.

  • Thierry

    C'est l'imprévu, mais je crois que c'est ce qui nous motive. Il y a beaucoup d'imprévus dans cette poésie puisque c'est un mouvement.

  • Christian

    C'est être au cœur de la vie, mais au cœur de la vie c'est être au cœur de l'incertitude aussi. C'est tout l'inverse des sociétés d'où l'on vient où, je pense, on a besoin de certitude.

  • Thierry

    Alors nos repères, c'est la nature. La nature, on a des indices à travers les abeilles quand on connaît bien le fonctionnement. Et on est témoin de tout ça. Après, on a quand même une entreprise à faire tourner. On n'est pas que des poètes à regarder ce qui se passe devant une ruche. Donc il faut conjuguer tout ça, mais je dirais qu'un travail d'équipe... Avec une équipe vraiment passionnée, puisqu'on est très bien entouré à la Maison Feudon.

  • Christian

    On va y venir, c'est important effectivement que tu nous expliques ça. Mais je voudrais juste avant, tu parles parce que la relation économique est fondamentale. Comment est-ce qu'on crée... à partir de cette philosophie-là, non pas une adaptation à l'économie d'aujourd'hui, mais quasiment une nouvelle économie. Parce que la finalité économique pour toi, me semble-t-il, comme beaucoup de membres du Collège Militaire de France, c'est de bien vivre de son métier. Ce n'est pas d'avoir des investissements phénoménaux, etc., pour être toujours plus grand, plus gros, plus de profit. C'est de bien vivre de son métier. Comment on peut imaginer justement, puisque tu dis à certains moments que vous avez eu des difficultés avec l'approche que tu as, mais comment on arrive quand même à trouver, quels sont les quelques ingrédients à ton avis qu'il faut mettre en place pour cette nouvelle économie ?

  • Thierry

    Je pense qu'il ne faut pas rester tout seul déjà, il faut avoir un réseau, un réseau dans notre filière. alors moi je l'ai élargi aussi à l'étranger depuis que je voyage et ça permet d'enrichir parce que chacun se pose des questions dans son coin et en fait en échangeant une réflexion ou une idée, on repart chacun avec trois idées, c'est-à-dire celle qu'on avait plus la nouvelle donc c'est vrai qu'il faut vraiment s'enrichir on peut pas être un super héros et penser qu'on va vraiment réussir dans tout ce qui se passe non, non, il faut vraiment alors c'est un collectif, un collectif de filière ou un collectif transversal

  • Christian

    Et la démarche avec le collège ? parallèlement à la filière, tu y trouves quoi ?

  • Thierry

    Je rencontre des personnes avec lesquelles je partage les mêmes valeurs. C'est-à-dire des gens honnêtes, qui veulent bien faire, et de leur mieux. Et on se comprend assez vite. Parfois, je me comprends beaucoup mieux. Je partage des valeurs qui sont bien supérieures à celles que je peux avoir à certains de mes collègues en apiculture.

  • Christian

    Oui, tu nous as dit ça plusieurs fois.

  • Thierry

    Et donc, c'est un enrichissement intellectuel, personnel, et d'entreprise aussi.

  • Christian

    Quel sont les... principales difficultés ou obstacles qui te viennent à l'esprit pour justement pratiquer cette approche du métier telle que tu la pratiques ?

  • Thierry

    La principale difficulté, je dirais, c'est la qualité de nos environnements, par exemple. Changement climatique, bien sûr. Le marché. Parce que le marché, le miel est un des produits au monde le plus fraudé.

  • Christian

    Ah oui ?

  • Thierry

    Donc... Voilà, ça perturbe quand même, alors non pas notre métier directement, mais en fait, c'est la relation que peuvent avoir les consommateurs par rapport à un produit qui s'appelle miel et qui n'en est pas toujours.

  • Christian

    Quelle est la proportion de miel importé par rapport au miel produit en France ?

  • Thierry

    On en importe un peu plus qu'on en produit maintenant. Ça s'est plutôt dégradé. Et puis c'est assez sauvage.

  • Christian

    Donc en termes de consommation ?

  • Thierry

    En consommation, on est à peu près sur 40 000 tonnes en France. Et bon an, mal an, oui, on va en produire peut-être 20 000, à peu près.

  • Christian

    Alors maintenant, je te propose de passer à l'instant fromage ou dessert.

  • Speaker #0

    C'est fromage ou dessert ?

  • Christian

    Logique ou émotion ?

  • Thierry

    Émotion.

  • Christian

    Compétition ou coopération ?

  • Thierry

    Coopération.

  • Christian

    Travail ou vacances ?

  • Thierry

    Je suis entre les deux toujours.

  • Christian

    Pareil, vie personnelle ou vie professionnelle ?

  • Thierry

    Tout ça est bien mélangé.

  • Christian

    Surtout que ton épouse, on va le voir, travaille avec toi. Temps court ou temps long ?

  • Thierry

    Temps long. Il faut construire les choses sur la durée.

  • Christian

    Est-ce que tu aimerais renaître dans le passé ou dans le futur ?

  • Thierry

    Dans le futur proche. Mais je préfère le présent finalement.

  • Christian

    Quelle est ta cuisine étrangère préférée ?

  • Thierry

    Italienne.

  • Christian

    Merci Thierry. Passons à la troisième et dernière partie de notre entretien. Justement, tu l'as évoqué, tout ce qui est... coopération, que ce soit coopération avec d'autres dans ton métier, coopération avec des membres du collège, mais aussi après on va le voir avec coopération avec tes équipes internes, comment vous construisez, vous avez une relation me semble-t-il assez familiale, mais en même temps avec des personnes qui viennent de l'extérieur. Donc tes coopérations avec d'autres producteurs, avec des restaurants, avec d'autres membres, avec ta filière, tu les qualifierais comment en termes d'approche ?

  • Thierry

    Struvkelle est Épanouissante. Épanouissante, je me rappelle il y a quelques années, Guy Ausha, de la cuisine du cloître à Limoges, nous avait sollicité pour venir avec sa brigade passer une journée, pour comprendre ce qu'on faisait. Et on n'avait pas l'habitude de ça, pas du tout.

  • Christian

    Comprendre le métier de l'autre.

  • Thierry

    Voilà. Et en fait, on a passé une très belle journée. On s'est aperçu que... on faisait des choses intéressantes Et puis on avait besoin de les expliquer, de les faire comprendre. Moi, je lui ai demandé ensuite d'aller dans sa cuisine avec l'équipe. Et ça, c'est fait. Bien sûr. Donc ça, c'est très enrichissant pour tout le monde. On se connaît mieux. On connaît ce que chacun fait, comment il le fait, quelles sont ses difficultés. Donc ça crée beaucoup de liens.

  • Christian

    C'est un point important au Collège Cuyard de France, à travers les journées d'échange nationales qui se font, justement, ces mélanges, et connaître les uns et les autres. Quelle est l'importance de la... Tu as un petit peu répondu.

  • Thierry

    tout à l'heure de la proximité d'un tour d'univers alors nous on est dans une région qui n'est pas très dense en termes de population et je dirais qu'en fait on est il faut il faut savoir s'écarter de son quotidien professionnel pour rencontrer les autres à certaines occasions alors ça peut être aller dans un restaurant comme comme consommateur mais aussi aller voir les professionnels à travers différentes rencontres ça peut être à trop à travers les matinées d'immersion les journées d'immersion où on se rencontre on s'aperçoit que sur un un même territoire, finalement, on se connaît très peu, mais on se connaît de mieux en mieux, finalement. Et on appréhende peut-être notre territoire différemment à plusieurs. Le collectif est toujours satisfaisant, en fait.

  • Christian

    Et en équipe interne, on sait que ton épouse Svetlana est beaucoup impliquée dans votre projet. Elle a été qualifiée de bi-addict.

  • Thierry

    Oui, on peut dire ça, oui.

  • Christian

    Quelque part. Mais d'autres... vous ont rejoint. Edgar est toujours avec vous.

  • Thierry

    Edgar, bien sûr, oui. Il est arrivé comme stagiaire. Ensuite, il a été... Il a fait sa formation en alternance. Et puis, il est devenu salarié. Puis, il est devenu co-gérant. C'est formidable. Et puis, ça sera... Moi, j'adore partager. J'adore enseigner. Je vais aussi dans les écoles primaires, aussi, pour parler du goût. Parler des abeilles, mais parler du goût aussi. J'interviens aussi auprès d'un apiculteur professionnel, pour échanger avec eux. Donc, je suis très impliqué au niveau associatif dans ma filière, également. Et... Et ça apporte, en fait, ça élargit son écosystème du quotidien, en fait. Bien sûr. Et donc, on voit les choses très différemment, de façon beaucoup plus large. Et je pense qu'ensuite, c'est vrai qu'on se sent moins seul parce qu'on a des difficultés sur une micro-entreprise. Il ne faut pas rêver, on a des difficultés au quotidien. Il faut savoir s'entourer, en fait.

  • Christian

    Bruno, par exemple.

  • Thierry

    Bruno,

  • Christian

    il est là depuis 25, 30 ans.

  • Thierry

    Il est là depuis 35 ans, je pense.

  • Christian

    35 ans, c'est formidable. Voilà, le fait de fidéliser sur... sur une passion, c'est pas simplement le partage de la passion, c'est aussi une façon d'être en relation avec les autres.

  • Thierry

    Oui, et puis il faut expliquer ce qu'on fait. Il faut le faire comprendre, il faut lui donner beaucoup de sens, mais ça, ils le comprennent assez vite. Et puis, travailler dans la nature, c'est pas mal. Il faut reconnaître qu'on a un open space qui est remarquable.

  • Christian

    Comment on fait comprendre ça au grand public ? Parce que tu connais l'association de manchés citoyens que le collège a développé à côté pour justement sensibiliser ce grand public, en faire des passionnés. Vous avez une relation avec ce grand public ?

  • Thierry

    Oui, on a une relation qu'on a construite au fil du temps parce qu'en fait, on n'était pas toujours en accord avec... tout ce qu'on retrouvait dans les médias sur l'abeille, sur les mortalités, etc. Enfin, les problèmes de l'apiculture que nous, on connaît moins dans l'environnement qu'on a choisi. Et on a vraiment voulu expliquer aux consommateurs notre point de vue. Notre point de vue, alors, ça passe sur les réseaux, sur notre communauté, mais aussi on fait des marchés événementiels de producteurs. Et là, on est vraiment là pour expliquer. Vendre un pot de miel, vous savez, ce n'est pas cinq secondes. On y passe dix minutes parce qu'on est intarissable et les gens ont beaucoup de questions sur notre univers, en fait.

  • Christian

    Ça demande effectivement d'être expliqué, de s'en... Alors je te propose maintenant d'ouvrir le moment La Moutarde me monte au nez.

  • Speaker #0

    La Moutarde me monte au nez.

  • Christian

    Alors la moutarde de Montaunay, c'est quelque part un coup de gueule sur quelque chose qui te révolte ou sur lequel tu aurais des choses à dire, que ce soit dans l'environnement de notre société, dans l'univers de ton métier, qu'est-ce que tu aurais à nous dire ? Oui,

  • Thierry

    je l'ai déjà évoqué. Évoqué un petit peu, c'est quand même tous ces faux miels qui rentrent en Europe, alors qui s'appellent miel sans doute au niveau du papier sur les douanes, mais qui n'en sont pas du tout. Si vous voulez, d'un côté, nous, on est avec nos ruches à créer de la poésie, en quelque sorte. Ça a un goût, mais c'est de la poésie. Et on est confronté à des gens qui veulent s'enrichir à l'autre bout du monde, plutôt en Asie, et qui vendent. Des dizaines de milliers de tonnes ou des centaines de milliers de tonnes à travers le monde, ça s'appelle miel, ça a été reconstitué, c'est toujours très bien fait visiblement, c'est très dur à contrôler, mais ça envahit le monde entier. Et là c'est vraiment, on est à l'opposé, on est dans deux mondes, mais le consommateur justement il faut qu'on l'éduque, il faut vraiment qu'on fasse notre boulot. lui faire comprendre qu'il faut être non pas consommateur mais consommacteur, il faut se renseigner vraiment sur ce qu'on achète, c'est une démarche du quotidien, pour ne pas acheter n'importe quoi. C'est-à-dire que là, le mot miel qui est un vrai symbole, symbole de la nature, on en est à l'opposé. Donc là on est sur le terrain pour faire notre boulot, et alors la chance c'est qu'on ait des dizaines de milliers en France à faire notre boulot sur le terrain, et d'expliquer au jour le jour pourquoi il faut aller voir un apiculteur, et puis si on n'a pas tout. les questions, les réponses, on va chez lui. On se fait expliquer.

  • Christian

    Bien sûr. C'est la meilleure façon d'ailleurs, c'est de partager ce que tu disais. Il faut faire un restaurant et que le restaurant...

  • Thierry

    Pédagogie.

  • Christian

    Mais ça se passe en co-acteur.

  • Thierry

    Exactement.

  • Christian

    Je te remercie. Peut-être en dernière confidence, est-ce que tu aurais une adresse à nous recommander, que ce soit un restaurant, un producteur qui te vienne à l'esprit ?

  • Thierry

    J'en aurais deux parce que c'est deux coups de cœur très récents. Le restaurant, il te... tilleul dans le petit village de Tournemire, dans le Cantal. Et puis, je pense à Cyril Abonnel, La Vie Comptée, qui est un usiculteur, producteur d'huile de noix assez formidable.

  • Christian

    D'accord. Eh bien, écoute, merci Thierry. Et toi qui as beaucoup voyagé, j'imagine que tu as dû aller en Italie. Eh bien, à l'heure de notre prochain épisode, c'est l'Italie qui viendra s'installer dans notre studio, avec tiens-toi bien, un chef vice-champion de France de la pizza. un épisode à ne pas manquer pour tous les amoureux des produits du terroir et de la gastronomie aussi italienne et je sais qu'ils sont nombreux,

  • Speaker #0

    merci à toi vous venez de déguster un épisode de la Terre à la Tinte, le podcast qui vous donne envie de bien manger nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie, si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef et en vous abonnant, vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous.

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