- Speaker #0
Bienvenue dans le podcast de la Terre à l'assiette.
- Christian
Aujourd'hui, je vous emmène avec Arnaud Duhem auprès du gardien du berceau de la bistronomie parisienne. Arnaud est Toulousain de naissance et Parisien d'adoption. Après deux décennies dans les palaces et le conseil, il revient aux sources, à la Régalade, fondée par Yves Candebord en 1992, à qui Bruno Doucet a succédé ensuite. Et Arnaud y inscrit, depuis qu'il l'a repris en septembre 2020, son propre chapitre. Les petits parisiens. Ce lieu est un pont entre hier et aujourd'hui, un risotto à l'encre, un riz au lait immobile, mais aussi des vins nature, un décor avec une tradition revisitée et un minimalisme chic et convivial. C'est pourquoi j'aime qualifier Arnaud à la fois comme héritier et bâtisseur d'héritage.
- Speaker #0
Une émission présentée par Christian Regouby.
- Christian
Arnaud, on parle d'abord, si tu veux bien, d'identité. Parce que, en fait, ton parcours, et tout ce dont on parle là, relève d'une identité. Raconte-nous un petit peu, qu'est-ce qui a fait que... que tu as toujours su, semble-t-il, que l'hôtellerie et la restauration seraient ta maison.
- Arnaud
Bonjour Christian. Dans un premier temps, moi j'ai été élevé dans une famille où on a beaucoup voyagé et j'ai grandi outre-mer pendant les dix premières années de ma vie. Donc ça m'a apporté effectivement une ouverture d'esprit qui m'a permis de voir différentes cultures et de me tourner vers les autres. Au-delà du fait que mon père cuisine très bien, donc nous a donné ce goût-là. J'ai certainement été... bercé là-dedans depuis tout petit et j'ai été sensible à cet univers-là, c'est pour ça que j'ai voulu rejoindre cette industrie.
- Christian
Tes études se sont tout de suite orientées vers ça ?
- Arnaud
Alors au départ c'est assez marrant parce qu'en fin de troisième j'ai rencontré une conseillère d'orientation qui m'a dit du M, menuiserie ou bâtiment. Et là je me suis sorti du bureau, non pas que j'ai quelques griefs que ce soit contre cette profession, c'est deux professions mais je me voyais pas du tout dedans. Je me suis posé les bonnes questions en me disant si tu ne te réveilles pas et que tu ne te choisis pas toi-même, tu vas te retrouver dans une filière qui ne te plaît pas forcément. Donc après quelques réflexions, ça paraissait naturel de faire de la restauration parce que ça me permettait à la fois de voyager et d'aller dans des endroits dans lesquels je n'aurais pas pu forcément aller comme client. Et ça me permettait de rencontrer plein de gens surtout.
- Christian
C'est extraordinaire ce que tu racontes parce que ça prouve toujours, on a beaucoup d'exemples à travers ces podcasts et au sein du collège, que la force de l'identité elle part d'abord de soi-même et pas de la manière dont on vous juge ou on vous case quelque part. Ducasse me disait souvent que... À son époque, à l'école, on voyait, vous n'êtes pas fait pour grand-chose, vous serez cuisinier. C'était aussi ça. Alors qu'on voit aujourd'hui, ce sont des métiers qui sont à la pointe de l'évolution de la société. On pourra en reparler. Donc, en fait, ton parcours, après avoir eu cette orientation-là, avoir décidé d'aller vers quelque chose qui correspondait aussi, entre guillemets, à tes origines, ton père, etc. Tu es rentré chez Vanel, je crois.
- Arnaud
J'ai commencé ma carrière à Toulouse, oui, après un BEP, un bac pro. L'hôtellerie restauration en service, j'ai commencé au restaurant Vanel à Toulouse qui était à l'époque étoilé et pour apprendre la rigueur, la base et l'excellence. pour ensuite, après, évoluer dans différentes maisons. Mais oui, le premier parcours, la première expérience... Et après,
- Christian
les maisons dans lesquelles tu as été, ton parcours, peut-être, rapidement... Alors,
- Arnaud
j'ai mis ces dix ans pour faire tout ce qu'on peut imaginer dans ce métier-là, c'est-à-dire de la brasserie, du gastro, en commençant par le plus difficile, donc le gastro, après j'ai fait de la brasserie, après je suis monté à Paris, où j'ai travaillé un peu avec Jean-Louis Coste à l'hôtel. D'accord. Un peu de temps après l'ouverture de l'hôtel.
- Christian
Une logique marketing aussi...
- Arnaud
Oui, et puis surtout, c'était ma première expérience dans un hôtel, dans un restaurant d'hôtel.
- Christian
D'accord.
- Arnaud
Ensuite, j'ai rejoint Pierre Hermé, qui était à l'époque président de la Durée, pour l'ouverture de la Durée sur les Champs-Élysées.
- Christian
Oui.
- Arnaud
Et ensuite, je suis descendu sur la Côte d'Azur, Palais Metterling dans un premier temps, à Nice, maison qui n'est plus aujourd'hui, puis le Martinez, et enfin les équipes d'Alain Ducasse à Monaco pour l'ouverture du restaurant Bar et Boeuf.
- Christian
Oui, donc c'est vraiment un parcours et une expérience, en plus avec... Des figures qui ont dû beaucoup t'apprendre, en fait.
- Arnaud
Oui, parce que depuis que je suis rentré à l'école hôtelière, mon but, c'était de travailler pour Alain Ducasse. Oui, parce qu'il y avait ce terroir commun de la région. On est du sud-ouest tous les deux. Il y avait lui et Alain Dutournier. Donc, je me suis donné les moyens de mes ambitions en essayant de rejoindre ces équipes. Ça m'a pris un peu plus de temps que certaines personnes, peut-être. Mais au bout de huit ans de travail, j'y suis arrivé. Et puis après j'ai passé 5 ans avec lui à différents postes.
- Christian
Ça montre bien que le terroir, le territoire reste un ancrage majeur. Tu parles des deux co-présidents du... collèges avec des histoires différentes, mais le fait de leur racine au niveau territoire, c'est quelque chose certainement qui est extrêmement riche dans leur développement et dans tout ce qu'ils ont pu entreprendre. En fait, tu travaillais chez les autres, d'une certaine façon. Qu'est-ce qui s'est passé en 2012, je crois, non ?
- Arnaud
Oui, en 2012, mon objectif dans un premier temps, mon objectif de carrière, c'était d'arriver à prendre la direction de la restauration d'un palace ou d'un hôtel. Il se trouve que j'ai eu l'opportunité de le faire dans deux très belles maisons, au parc Aya de Paris-Vendôme, rue de la Paix, pendant cinq ans. Et ensuite, à l'ouverture du Shangri-La Hôtel Paris, donc une fois que j'avais coché ces cases-là, j'avais quand même ce rêve d'enfant d'avoir mon propre restaurant. J'ai d'abord monté Carpe Duem Conseil, que j'ai toujours, ma société de conseil qui tourne toujours.
- Christian
C'est presque une logique naturelle d'être conseil après avoir été dans toutes ces logiques-là.
- Arnaud
Disons qu'à ce moment-là, je n'avais pas forcément la confiance en moi pour pouvoir entreprendre. Je ne me sentais pas légitime. Et il se trouve que beaucoup de gens venaient me voir pour me demander des conseils et des orientations sur différents sujets qui concernaient mon métier. Donc je me suis dit pourquoi pas essayer d'en vivre. Voilà, c'est comme ça que Carpe Duem Conseil est né.
- Christian
D'accord.
- Arnaud
Et ça fait 12 ans maintenant, 13.
- Christian
Et donc qui existe toujours.
- Arnaud
Qui existe toujours, oui. Bien sûr.
- Christian
Et qui est presque une société qui conseille aussi Arnaud Duem.
- Arnaud
Disons que je m'applique les principes que j'essaye, les conseils que je dispense à mes clients, oui.
- Christian
Et de voir ce qui marche ou ce qui ne marche pas.
- Arnaud
D'être capable d'analyser et de trancher si nécessaire et de faire des choix.
- Christian
Je te propose qu'on passe à notre première chronique. Comme chaque quinzaine, c'est la chronique que nos auditeurs attendent tous. Toc toc, qui est là ?
- Speaker #0
Toc toc, qui est là ?
- Christian
Alors c'est parti Arnaud, un peu une sorte de portrait chinois. Si t'étais un animal ?
- Arnaud
Un guépard.
- Christian
Pourquoi le guépard ?
- Arnaud
Parce que agile, rapide, élégant.
- Christian
Ah, très bien, très bien. Une saison ?
- Arnaud
Le printemps. La renaissance.
- Christian
Un pays ?
- Arnaud
La France.
- Christian
Si t'avais à faire un autre métier, tu t'étais quoi ?
- Arnaud
Architecte ou designer. J'ai une appétence particulière pour ces métiers-là. Je suis très sensible à l'art, au beau d'une manière générale, à la création ou à la créativité de ces gens-là.
- Christian
Beaucoup de restaurateurs qui sont investis de cette façon-là, avec les valeurs que tu portes. me parle d'architecte, pour ne pas l'oublier, à commencer par Alain Ducasse.
- Arnaud
C'est vrai. Je pense qu'il y a une valeur commune entre notre métier et celui d'architecte, c'est qu'on participe à faire vivre une expérience. Et c'est certainement au cœur de nos métiers, à la fois une expérience architecturale dans un lieu qui va être pensé et réfléchi. Et nous, à nos tables, effectivement, on essaie de faire passer un bon moment et de délivrer une expérience qui soit... équilibrée.
- Christian
Alors je crois que c'est ça, et c'est aussi que vous n'arrêtez pas la restauration à la cuisine, même si elle est centrale. C'est tout ce qui entoure la cuisine, et comme tu dis, le moment, le moment c'est le lieu.
- Arnaud
Exactement.
- Christian
Tu l'as bien montré à travers ce que tu vas nous en parler, le restaurant que tu as repris et que tu développes maintenant, mais cette notion de lieu est indissociable de la manière dont on goûte la cuisine. J'oserais même presque dire, le goût des aliments, est aussi influencé par le lieu et l'ambiance dans laquelle on se trouve.
- Arnaud
Ce n'est pas toujours le cas, mais ça peut l'être, effectivement. En tout cas, ça y contribue, oui. Et l'ambiance générale, l'atmosphère, fait partie intégrante de l'histoire qu'on veut raconter. Donc, s'il y a un anachronisme entre la cuisine et le lieu, ça ne fonctionne pas. ou en tout cas pas de la même manière.
- Christian
Parle-nous de cette reprise que tu as faite, où je dis que tu es à la fois héritier et en même temps tu es projeté dans le futur. Pourquoi jeter ton dévolu sur un restaurant qui est mythique au départ, qui a été à la source même de la bistronomie, alors que tu n'avais jamais créé de restaurant ?
- Arnaud
Alors Yves, le client de Borde, a quand même marqué toute une génération de restaurateurs et a marqué la cuisine de son empreinte. à travers l'invention d'un modèle économique qui n'existait pas à l'époque. Et effectivement, je passais devant cette maison assez régulièrement. à l'époque où Bruno Doucet l'avait encore. Quand il l'a vendu en 2017, un jour je suis passé devant, j'ai vu que c'était fermé, je me suis dit tiens, c'est ce qui m'a donné envie, c'était la régalade qui m'a donné envie d'avoir un restaurant, de créer mon premier restaurant. En rachetant, en me positionnant comme acquéreur de cette maison, je bouclais la boucle. C'était ambitieux parce que je suis le seul, le premier restaurateur. qui est cette maison, je ne suis pas cuisinier. Ah oui ? Cette maison a toujours appartenu à des cuisiniers.
- Christian
C'est justement pour ça que tu vas réussir à faire ce passage, parce qu'il n'y a pas de comparaison possible. Ce n'est pas un cuisinier qui remplace un autre cuisinier. Et je pense Je pense que dans ta démarche, tu ajoutes quelque chose et tu n'effaces rien. Il y a une chose très importante que tu as dit tout à l'heure, parce qu'elle n'est pas forcément apparente, mais elle est au cœur même de tout le développement du Collège Kuhner de France, qui est essentiellement centré sur des valeurs relationnelles, c'est ça qui fait la qualité. Mais une fois qu'on a dit ça, c'est bien gentil, quelle est la réalité économique ? Tu as dit une chose vraiment pour moi fondamentale, l'invention d'un nouveau modèle économique. C'est au cœur même du collège et c'était au cœur même de la création de la bistronomie. Ce n'était pas simplement un mot qui d'un seul coup allait devenir à la mode. C'est que derrière, il y avait une vraie réalité économique et ce qui a permis d'ailleurs son développement.
- Arnaud
Bien sûr. Il ne faut quand même pas perdre de vue qu'un restaurant, c'est un commerce. Et le but d'un commerce, c'est de gagner de l'argent, pas d'en perdre. Donc on est aujourd'hui dans une réalité économique qui est complexe, certes, à différents égards qu'on connaît tous. mais pour autant il faut garder en tête Ces principes de gestion, de qualité, d'expérience, mais d'essayer de le faire le plus intelligemment possible avec des valeurs qu'on va défendre, à travers les gens avec lesquels on va travailler, les personnes qui vont nous entourer, le cercle proche et nos fournisseurs.
- Christian
C'est important parce que ce n'est pas forcément facile de le faire dans le modèle économique où nous nous trouvons aujourd'hui, et quelque part, on doit le prendre en compte, on ne peut pas s'y échapper. en revanche il y a aussi une nouvelle façon d'inventer un nouveau modèle économique. J'ai pu voir à travers les différentes expériences et les interviews que j'ai pu faire avec des membres du collège, que de la valeur ajoutée humaine, relationnelle, générait une autre économie aussi. Pas forcément dans les mêmes critères, mais c'est intéressant à explorer. Alors toi, aujourd'hui, comment tu as fait et qui as-tu trouvé pour accompagner cette expérience ?
- Arnaud
Aujourd'hui, le chef de cuisine s'appelle Lucas Felsin, qui a eu son propre restaurant.
- Christian
qui s'appelait Uma.
- Arnaud
Lucas, c'est une belle rencontre. C'est avant tout une histoire d'hommes. On partage les mêmes valeurs. Et après, il faut être capable de laisser les chefs s'exprimer. J'ai souvent pour habitude de dire que moi, je définis le bac à sable et mes collaborateurs jouent à l'intérieur. C'est une partie de ping-pong permanente. On partage des idées, mais il ne faut surtout pas l'hybrider. Surtout pas quelqu'un comme Lucas. qui est très créatif.
- Christian
C'est formidable ce que tu dis, parce que là aussi, ça résonne beaucoup par rapport aux valeurs du collège qui ne sont pas forcément toujours apparentes, la notion de rencontre. Mais la rencontre, c'est quelque chose de fondamental. Arthur Rimbaud disait « Je est un autre » . Et j'ai coutume de dire qu'au collège, un autre est je. C'est-à-dire qu'en fait, je ne sais plus qui disait « Je suis ce que je rencontre » .
- Arnaud
On rencontre effectivement énormément de monde et on partage plein de valeurs et je pense qu'effectivement le collège culinaire, s'il y a un fil rouge qui nous unit tous, c'est les valeurs pour lesquelles on milite entre guillemets. Donc le bien manger, l'art de recevoir. de bien vivre et de raconter des histoires qui sont de mettre en avant un terroir et toute une filière.
- Christian
Tu as parlé du chef, il y a aussi la salle, il y a aussi les vins, où tu as quelqu'un d'absolument exceptionnel aussi qui nous fait rentrer forcément dans la passion du vin, même si on n'y connaît rien.
- Arnaud
C'est ça.
- Christian
Donc, dis-nous un petit peu comment tu as construit cette équipe.
- Arnaud
L'homme du vin dans la maison et qui gère la salle s'appelle Loïc Mougène. Il était aussi propriétaire de son restaurant, un restaurant très connu qui s'appelait La Robe et le Palais. Fervent défenseur des vins nature, vrai passionné pour la peine. Donc je pense que ce qui nous anime, Luca, Loïc et moi, c'est cette passion du métier et cette envie de faire découvrir les gens et de les emmener dans notre univers. Donc moi, je ne suis pas un expert. Eux le sont, chacun dans leur domaine. J'aurais plutôt tendance à dire que par rapport à eux, je suis plus généraliste. On est très complémentaires. Luca, la créativité. Loïc a l'expertise sur les vins, les vignerons et la manière d'embarquer les gens justement. Et nous sommes tous les trois profondément passionnés par les produits. Par les produits, le goût et l'expérience globale qu'on va réussir à délivrer à nos clients et à faire vivre à nos clients. C'est une association de compétences où chacun a son rôle et le mien dans ce cas précis, c'est plutôt d'être le gardien du temple et de gérer le côté plus économique, marketing et financier.
- Christian
Mais quand on vient chez toi, c'est l'expérience justement, quand on parle d'expérience client, dont le résultat est dans l'assiette, mais l'expérience relationnelle est assez unique. Je te propose de passer à notre deuxième chronique qui s'appelle fromage ou dessert.
- Speaker #0
C'est fromage ou dessert ?
- Christian
Alors on va explorer tes préférences en toute transparence. Parce qu'en fait, on se connaît souvent à travers ce qu'on préfère. Est-ce que tu préférerais René, être dans le passé ou dans le futur ?
- Arnaud
Les deux sont indissociables, donc j'aurais tendance à dire les deux en général. Il ne faut jamais oublier d'où on vient. C'est la base. Ne jamais oublier d'où on vient. Effectivement, défendre des valeurs et regarder devant.
- Christian
Logique ou émotion ?
- Arnaud
C'est une question compliquée. Les deux, à 50-50. La logique est indispensable parce que parfois il faut être pragmatique et effectivement raisonner de manière logique, mais non sans émotion.
- Christian
Travail ou vacances ?
- Arnaud
Cruel dilemme. Les deux, parce qu'on ne profite jamais des vacances si on n'a pas travaillé. Sans travail, on ne peut pas partir en vacances.
- Christian
Compétition ou coopération ?
- Arnaud
Coopération indispensable. On fait un travail d'équipe. Seul on va plus vite, mais ensemble on va plus loin. Mais la compétition reste au cœur de notre métier aussi et de ma vie d'une manière générale.
- Christian
Tu viens de démontrer à travers tout ce que tu dis, j'ai ce mot qui me vient toujours à l'esprit et qui est très actuel, en tout cas porteur de futur, l'hybridation. Nous sortons d'un monde d'exclusion, c'est-à-dire c'est noir ou c'est blanc. Aujourd'hui, la vie nous montre que ce n'est pas aussi simple que ça. Et que tout peut être contradictoire, mais tout peut être source de richesse à partir du moment où on le prend en main. Dernier volet, la notion de transmission par rapport au fait que tu as un héritage. Comment tu la vois cette notion de transmission ?
- Arnaud
On essaye tous de transmettre quelque chose. Après, la transmission, on travaille dessus au quotidien avec nos collaborateurs. et principalement... Les jeunes qu'on peut accueillir et qu'on forme, donc on a une vraie mission à ce niveau-là. Et au-delà de ça, au-delà de la transmission et de la formation, il y a effectivement une notion de... D'héritage qu'on transmet en leur expliquant que la maison dans laquelle ils sont rentrés n'est pas un restaurant comme les autres, qu'il y a une vraie histoire, que c'est de là qu'a commencé ce fameux mouvement de la bistronomie, et qu'il faut être fier de ça et que ça se sente dans le travail au quotidien.
- Christian
Est-ce que pour terminer tu aurais un projet secret, une envie pour l'avenir ? Parce que de toute façon tu n'es manifestement pas un homme à rester sur place, donc tu projettes tout ça comment ?
- Arnaud
Des projets, on en a tous,
- Christian
des rêves aussi.
- Arnaud
Donc pour le moment je me concentre sur la réussite et le développement des petits parisiens. De rester sur la feuille de route qu'on s'est fixée avec Lucas et Loïc. Et puis après je pense qu'il faut se laisser porter par la vie les opportunités. Moi j'ai une chance inouïe, c'est que je ne suis pas que dans mon restaurant, puisqu'à travers ma société de conseil je vais dans différents endroits, dans différents pays. Donc ça apporte beaucoup de richesses et beaucoup de rencontres. Donc les rencontres créent des opportunités aussi.
- Christian
Et ce qui permet aussi, de façon induite, d'être en recul sur ce que tu fais au quotidien.
- Arnaud
C'est capital.
- Christian
Tirant des leçons à travers la manière dont tu te nourris à l'extérieur.
- Arnaud
Oui, parce que c'est effectivement, même si les clients que j'accompagne en conseil sont souvent des grands groupes et des grosses unités, beaucoup plus grosses que mon restaurant. Ça me permet justement, eu égard à mon parcours déjà, de pouvoir revenir dans des structures comme ça. Et puis surtout de garder un oeil sur tout ce qui se passe et tout ce qui se fait. Il faut toujours garder les antennes.
- Christian
Voilà, tour de contrôle à 360 degrés. Exactement. On passe une troisième et dernière chronique, ton coup de gueule.
- Speaker #0
La moutarde me montonnait.
- Christian
On a tous exprimé ou pas exprimé des choses qui à un moment donné nous font bondir. Là, est-ce qu'il y a quelque chose qui te donne envie de hurler dans un coussin ?
- Arnaud
Ce qui est parfois frustrant, c'est que le terme de restaurant est galvaudé. Parce qu'il y a différents niveaux de restauration effectivement. et cette manière de... Classer entre guillemets les différents types de restauration, ça englobe le même nom, mais on ne fait pas le même métier au quotidien. Ce n'est pas pour autant un coup de gueule, parce que c'est très compliqué à légiférer, et c'est un débat qui est plus que jamais d'actualité, mais le plus important aujourd'hui, c'est que chacun trouve sa place, quel que soit le positionnement de son établissement.
- Christian
C'est un métier difficile, passionnant, et on voit bien quelle valeur humaine il porte en lui-même. C'est un des sujets clés au sein du collège. Que veut dire le mot restaurant ? Comment ? Puisque... Tu dis légiférer malheureusement tout ce qui est loi, etc. n'aboutit pas à grand chose. En revanche, on peut peut-être petit à petit imposer une nouvelle conception du restaurant. Et cette conception, quelque part, c'est restaurant de producteur. Un restaurant, c'est un... restaurant de producteurs. Et cette notion est importante. On est aussi face à un système où tu as énormément de débit de nourriture, où il n'y a même pas un cuisinier en cuisine, où tout est derrière. Et il y a une différenciation quand même à donner et une éducation à faire de tout ça, avec passion, envie. Et comme le disait Johnny Hallyday, avec l'envie d'avoir envie.
- Arnaud
Exactement.
- Christian
Je te remercie vraiment. Arnaud, c'était vraiment très sympathique de t'avoir. Merci à toi. Et à toute cette démarche. Dans notre prochain épisode, nous allons recevoir un homme aussi d'exception qui s'appelle Andreas Mavromatis. Andreas qui nous racontera comment son enfance a été marquée par un fort attachement justement à la terre qui lui a permis de construire alors un modèle culinaire artisanal Euh... que je dirais presque d'avenir, parce qu'il a utilisé en même temps, un petit peu comme l'avait fait le nôtre, Gaston le nôtre, il a utilisé certaines techniques de la logistique et de la technologie pour développer tout ce qu'il a développé en France et ailleurs. C'est un bel empire, mais surtout avec quelqu'un qui reste l'incarnation de ça, parce que l'artisan, par définition, c'est celui qui incarne, ce n'est pas simplement un chef d'entreprise, et c'est ça qui est vraiment très important. Merci Arnaud, à très vite.
- Arnaud
Merci à toi Christian, à très bientôt.
- Speaker #0
Vous venez de déguster un épisode de La Terre à la Tire, le podcast qui vous donne envie de bien manger. Nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie. Si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef, et en vous abonnant. Vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous !