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De la terre à l'assiette - tous artisans du bien manger !

E9 - Arnaud Sauvé - l’entrepreneur militant en artisanat culinaire

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20min |07/02/2025
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20min |07/02/2025
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Description

Découvrez Arnaud Sauvé, artisan engagé et propriétaire du restaurant Mojo à Paris, reconnu par le Collège Culinaire de France.

Dans cet épisode, il partage sa vision d’une cuisine artisanale de convivialité,authenticité et innovation se rencontrent.

Comment Arnaud insuffle-t-il ses principes dans l’assiette ? Comment conjugue-t-il passion, qualité et défis économiques ?

Une conversation inspirante sur l’importance des relations humaines, le respect des producteurs derrière les produits et l’avenir de la gastronomie artisanale.


"L'obstacle principal aujourd'hui, la vraie difficulté, c'est le manque d'éducation et de formation des gens qui ont été habitués pendant des années à des goûts stéréotypés, à des choses extrêmement industrielles, très linéaires, et leur apporter et leur faire découvrir autre chose, il y a deux étapes. Un, les convaincre d'essayer, et deux, leur expliquer pourquoi ? est-ce qu'on fait, est évidemment différent et mieux et transporte des valeurs que les autres choses, les choses industrielles, ne véhiculent pas. Donc c'est extrêmement important, mais c'est un travail de longue haleine."

Arnaud Sauvé


Le Collège Culinaire de France est une association fondée en 2011 à l'initiative de quinze grands chefs restaurateurs à l'instar d'Alain Ducasse, Joël Robuchon, Yannick Alléno, Paul Bocuse, Alain Dutournier, Gilles Goujon, Michel Guérard, Marc Haeberlin, Régis Marcon, Thierry Marx, Gérald Passedat, Laurent Petit, Anne-Sophie Pic, Guy Savoy et Pierre Troisgros. Le Collège Culinaire de France est la seule association, à ce jour, initiée par le plus grand rassemblement de chefs français reconnus et incontestés, qui s’emploie, concrètement, sur le terrain, à relier des Producteurs et Artisans de Qualité avec des Restaurants de Qualité de toutes catégories. Elle rassemble ceux qui œuvrent pour une vision d’avenir du métier, et fédère tous ceux qui s’engagent sur des synergies de valeurs et de pratiques partagées.


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Youtube : https://youtube.com/@collegeculinairedefrance8338?si=9Gr8AOpmTzpDEQBm


Crédits

En cuisine :

Un foodcast mitonnée aux petits oignons par Suniwan

Illustration servie par Hugo Girard

Un épisode enregistré au Mojo dans le 17éme arrondissement de Paris


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Christian

    Neuf rues du général L'Enreusac à Paris, dans le 17e arrondissement, vient d'être reconnue par le Collège Culinaire de France. C'est un établissement où il insuffle ses valeurs et son engagement pour une cuisine de gastronomie artisanale. Aujourd'hui, Arnaud décrypte sans cesse les mécanismes et les actualités qui font obstacle à sa passion pour la gastronomie. Il essaie en continu des pistes de solutions et d'innovation dans sa façon de travailler. Alors comment cet engagement se concrétise-t-il dans l'assiette et dans le pilotage de son restaurant ? Pourquoi a-t-il fait de l'innovation un des moteurs de son activité ? Comment faire face à l'industrialisation galopante lorsqu'on est un restaurateur indépendant ? Autant de questions complexes mais passionnants auxquelles nous allons tenter de répondre avec Arnaud.

  • Speaker #1

    Une émission présentée par Christian Regouby.

  • Christian

    Bonjour Arnaud.

  • Arnaud

    Bonjour Christian, bonjour à tous.

  • Christian

    Alors Arnaud, raconte-nous un petit peu la manière dont tu te définis, c'est quoi ton projet ? Quelles sont tes principales convictions ?

  • Arnaud

    Alors déjà, moi je ne suis pas issu du serail de la restauration, ce qui me donne une vision un petit peu différente de pas mal de mes collègues restaurateurs. Mon ambition et mon projet est avant toute chose de créer des lieux qui sont des lieux de convivialité et de partage. Et pour arriver à cet objectif, j'ai monté différents établissements, dont le Mojo, en prenant des règles de base qui sont assez simples. Convivialité, conviction et partage.

  • Christian

    Alors ce partage, bien évidemment, c'est un partage d'abord avec les convives qui viennent chez toi. Donc ça veut dire que ton lieu, il émane de ton lieu un certain nombre de choses.

  • Arnaud

    Oui, alors la restauration, avant toute chose, est un endroit, un lieu de partage et de convivialité. Ce qu'il y a dans l'assiette est important et primordial, mais l'accueil, l'atmosphère, l'ambiance et tout ce qui fait la restauration tournent autour de différentes règles. Qualité d'accueil, qualité des produits, sourire, convivialité. On vient dans un restaurant évidemment pour manger, mais aussi pour vivre une expérience et partager des moments avec ses convives.

  • Christian

    C'est pour ça que souvent on dit, on en a parlé ensemble, c'est comme à la maison, c'est un peu un faux-semblant. Parce que si on est comme à la maison...

  • Arnaud

    C'est ça, c'est si on est à la maison, si on est comme à la maison, on reste à la maison. Donc charge au restaurateur d'amener autre chose que ce que les gens peuvent faire à la maison. Ce qu'ils peuvent très bien faire chez eux. Mais on se doit d'apporter autre chose. Donc ça, c'est un équilibre assez subtil et surtout c'est très subjectif. Et c'est quelque chose qui change en permanence. Les attentes des gens, des consommateurs, des convives, changent régulièrement. Donc il faut être en permanence à l'écoute, mais on en parlera tout à l'heure, à l'écoute des tendances du marché et de ce qui fait l'ambiance du moment.

  • Christian

    Quand tu dis c'est subjectif, c'est fondamental parce qu'on pourrait dire c'est du marketing, mais tel que tu le conçois en termes d'artisan, c'est pas du marketing. C'est quelque chose qui émane aussi de ta subjectivité et de qui tu es.

  • Arnaud

    Complètement, oui. On ne fait pas les choses uniquement pour faire tourner une entreprise, même si nous sommes aussi avant tout des chefs d'entreprise. On fait ça aussi pour se faire plaisir, pour faire plaisir aux gens qui viennent dans nos établissements. Donc si on ne raisonnait exclusivement qu'en termes de marketing, avec une dimension un tout petit peu plus large que juste marketing, ça serait aussi une dimension de gestion, d'achat, de maîtrise au cordeau des coûts. Et si on ne raisonne, il y en a qui raisonnent comme ça. Mais si on raisonne comme ça, on passe à côté de beaucoup de choses, je crois. Donc j'ai d'autres règles. Je me suis construit d'autres règles.

  • Christian

    C'est-à-dire une restauration qui a une âme, en fait.

  • Arnaud

    Avant toute chose, la restauration sans âme, c'est pas de la restauration. Il faut faire autre chose. Donc la restauration, c'est une âme. Et cette âme, elle est non seulement incarnée par le restaurateur, mais également par l'équipe. C'est un travail d'équipe. Même si la personne qui dirige le restaurant est le chef d'orchestre, les autres sont les... Les premiers violons, et ils jouent la partition.

  • Christian

    C'est un point important, on va en reparler, mais sur cette première phase, j'aurais posé une dernière question. Comment intègres-tu le temps ? Le passé, le présent, le futur, parce qu'on est toujours dans l'immédiateté aujourd'hui. Comment toi tu intègres le temps ?

  • Arnaud

    C'est un difficile équilibre entre le temps long et le temps court, arriver à construire quelque chose dans la longueur sans oublier le quotidien. Donc c'est-à-dire que... Alors il y a quand même quelque chose d'extrêmement intéressant et important à comprendre, c'est que nous sommes dans des métiers... En tout cas pour les restaurateurs, on voit très vite le résultat de ce qu'on fait. Si on décide un plat du jour le matin, si à midi il ne plaît pas, on a le résultat immédiatement.

  • Christian

    Donc c'est une sanction.

  • Arnaud

    Elle est immédiate et puis elle se paye cash. Non seulement elle se paye avec un avis négatif du client et qui aujourd'hui a la possibilité sur les réseaux sociaux de mettre une mauvaise note ou un mauvais commentaire. Donc la gestion du temps est quelque chose de primordial. Il ne faut pas perdre de vue ce qu'on est. Et où est-ce qu'on veut aller ? Et les choix au quotidien ne sont que la construction d'un futur, d'un futur à venir qui se veut plus ou moins long. Mais les deux vont ensemble, on ne peut pas séparer les deux.

  • Christian

    Alors on va aller plus loin dans tout ça, mais avant on va se faire une petite parenthèse qui s'appelle Toc toc qui est là ?

  • Speaker #1

    Toc toc qui est là ?

  • Christian

    Alors Arnaud, si tu étais un animal, tu serais quoi ?

  • Arnaud

    Alors je serais un animal de terre, je ne suis pas montagnard, je ne suis pas marin, la flotte me fout une trouille colossale. Donc plutôt un animal de terre, de forêt, allez, soyons un petit peu orgueilleux, un cerf.

  • Christian

    Bravo, et une saison ?

  • Arnaud

    L'automne, l'automne pour les couleurs et les odeurs.

  • Christian

    Un des cinq sens toi qui es cuisinier ?

  • Arnaud

    Le goût.

  • Christian

    Un mot ? Un mot central pour toi ?

  • Arnaud

    Envie. Sans envie, on ne fait rien.

  • Christian

    Un plat ?

  • Arnaud

    Un plat, oula, alors là ça se bouscule, il y en aurait beaucoup, beaucoup, beaucoup. Un peu le côté Madeleine de Proust, j'irais... Allez, je vais en citer deux, si tu m'autorises. Je vais faire un classique et un petit peu plus déluré. Le classique, ça serait des joues de bœuf braisé au vin blanc. Et le... un petit peu plus fou, ayant des origines scandinaves, des filets de filets de harangue marinés avec une marinade sucrée. C'est très particulier, il faut être originaire de là-haut pour apprécier. Mais sinon, c'est... Arrête de compliquer !

  • Christian

    Tu nous mets l'eau à la bouche.

  • Arnaud

    Avec du pain noir, servi sur du pain grillé, bien sûr.

  • Christian

    Et ta boisson préférée ?

  • Arnaud

    Le vin. Bien,

  • Christian

    alors maintenant, on passe à une deuxième phase. En fait, au Collège Culinaire de France, vous vous définissez comme artisan militant de la qualité. Ça veut dire quoi ?

  • Arnaud

    Ça veut dire qu'au quotidien, on s'oblige, non parce que c'est notre nature, on fait un choix, on fait un ensemble de sélections, aussi bien sur les solides, sur les liquides, de manière genre, de travailler avec des gens qui ont non seulement des produits de qualité, qui ont également des produits de saison et qui partagent notre vision. Et très souvent, on se rend compte... que les producteurs, que ce soit des maraîchers ou des vignerons, ont des produits qui leur ressemblent. Si le vigneron n'est pas généreux, il va avoir un vin sec, un petit peu austère. Si le gars n'aime pas sa betterave, elle va être un petit peu... Elle ne va pas être très sucrée, elle ne va pas avoir beaucoup de goût. Donc d'arriver à trouver au quotidien, ce qui prend du temps, ce qui donne parfois des dégustations un petit peu improbables à 9h du matin avec des bouteilles de blanc. Mais trouver des gens qui sont passionnés, qui ont les mêmes critères et les mêmes recherches que nous. Donc d'arriver à trouver ces personnes-là avec qui on va partager des moments et mettre en valeur leurs produits aussi. Ils sont extrêmement heureux et très sensibles à ce qu'on fait de leurs produits et au fait que nos clients, nos convives apprécient.

  • Christian

    Ce qui est génial dans ce que tu dis, c'est que je vous entends souvent dire derrière chaque produit, il y a un visage. Et en fait, ça dit bien, ce n'est pas simplement le produit, c'est l'homme ou la femme qui est derrière.

  • Arnaud

    C'est fondamental. Sans ça, on ne fait absolument rien. Donc on est très loin de... des stéréotypes et de l'industrialisation.

  • Christian

    C'est pourquoi peut-être vous ne définissiez pas comme un label au collège, vous définissiez plutôt comme une appellation, un drapeau, une cause à défendre.

  • Arnaud

    Oui, une ligne commune, une vision commune à défendre. Mais le côté à défendre, on va dire qu'on est uniquement sur une phase défensive et je veux qu'il y ait une phase offensive, une phase partagée, très important.

  • Christian

    Vous conquérez l'avenir plutôt que défendre le...

  • Arnaud

    Oui, alors on ne va pas remporter toutes les victoires, mais en tout cas, au-delà de s'inscrire juste dans une sauvegarde, je pense qu'il y a une véritable attente de fond, au-delà de la qualité, mais d'une vision de valeur, de partage. Et on doit être les chantres au quotidien de cette vision-là.

  • Christian

    C'est quoi les obstacles à surmonter pour faire ce métier de cette façon-là ?

  • Arnaud

    Alors, je pense qu'il nous faudrait des heures. pour faire la liste de tous les obstacles. Mais l'obstacle principal aujourd'hui, la vraie difficulté, c'est le manque d'éducation et de formation des gens qui ont été habitués pendant des années à des goûts stéréotypés, à des choses extrêmement industrielles, très linéaires, et leur apporter et leur faire découvrir autre chose, il y a deux étapes. Un, les convaincre d'essayer, et deux, leur expliquer pourquoi ? est-ce qu'on fait, est évidemment différent et mieux et transporte des valeurs que les autres choses, les choses industrielles, ne véhiculent pas. Donc c'est extrêmement important, mais c'est un travail de longue haleine. On ne gagnera pas tout le monde, mais en tout cas, on y arrivera petit à petit, non seulement à partager ces valeurs-là, et surtout, surtout, arriver à ce que les producteurs, quels qu'ils soient, les gens qui partagent ces valeurs-là, qui sont... Les petits artisans du quotidien, les vignerons, tous ces gens-là continuent à vivre, se développent et se redéveloppent. Reprennent le pas, pas qu'à Paris ou dans les grandes villes, mais dans tous les territoires français, replènent le pas petit à petit.

  • Christian

    Ça éclaire ce que vous dites en disant que c'est de la relation humaine ajoutée, en fait, c'est ça que vous apportez au premier.

  • Arnaud

    Mais c'est que du bonheur. C'est le fondement même des choses. S'il n'y a pas de relation humaine, s'il n'y a pas ce côté... On reçoit, on voit, on se serre, ça serre la main et on trinque ensemble. Virtuel, c'est bien, il en faut, on ne peut pas faire fi de tout ça. Mais il faut impérativement vivre les choses, sentir, recevoir, pouvoir serrer les gens dans ses bras. C'est extrêmement important.

  • Christian

    Alors, deuxième petite parenthèse, justement, pour avoir un peu en transparence ton cœur sur la table, on va dire. Je te propose de paster à l'instant fromage ou dessert.

  • Speaker #1

    C'est fromage ou dessert ?

  • Christian

    T'es dans la logique ou dans l'émotion ?

  • Arnaud

    J'aimerais bien être un petit peu plus dans la logique. L'émotion, je ne me laisse pas emporter par toutes les émotions, mais si on n'écoute pas ces émotions, la logique c'est froid. Donc il faut une bonne dose d'émotion et un peu de logique pour éviter de partir complètement dans tous les sens.

  • Christian

    Compétition ou coopération ?

  • Arnaud

    Alors il n'y a qu'une seule compétition qui vaille à mon sens, c'est la compétition contre soi-même, se fixer des objectifs et développer. développer cette lutte contre soi-même, arriver à être meilleur, à rendre les choses meilleures. Donc compétition contre soi-même, coopération, oui, c'est au quotidien, tout n'est que coopération.

  • Christian

    Vie personnelle ou vie professionnelle ?

  • Arnaud

    Il faut arriver à mélanger les deux. Si on ne fait que l'un, c'est impossible. Je vais même te raconter une petite anecdote. Avant le Covid, même si je recommence à faire ça actuellement, avant le Covid, j'arrivais à partir entre 5 et 7 jours tous les mois. Partir en vacances. Alors en vacances, c'est aussi aller sourcer des fournisseurs, trouver des vignerons, mettre absente mes établissements pendant une semaine, quasiment une semaine par mois. Donc, d'arriver à y joindre l'utile et l'agréable.

  • Christian

    Non, mais c'est bien. Donc, il n'y a pas de séparation. C'est ce que tu dis.

  • Arnaud

    Difficile.

  • Christian

    Temps court ou temps long ?

  • Arnaud

    Les deux. Les deux, parce que le temps court construit le temps long, donc on ne peut pas viser que là.

  • Christian

    Merci Arnaud, on va passer à la troisième phase de ton engagement. Comment tu conçois justement ces relations de coopération avec les producteurs ou avec d'autres restaurants du Collège Culinaire de France ?

  • Arnaud

    Avec les producteurs, avec les gens, avec les échelles de travail, c'est un travail, d'abord c'est une relation de confiance. C'est une relation qui se construit, qui met du temps à se construire, mais où on fixe des objectifs communs et puis on construit les choses ensemble. Quand on a des demandes, quand on a des attentes, on fait appel à eux. Donc ça c'est extrêmement important. Et puis avec les autres restaurateurs du collège ou d'autres, c'est partager des expériences, partager des visions. Et comme je disais tout à l'heure, c'est aussi le fait d'être en permanence à l'écoute des tendances et de ce qui se fait. Voilà, de pouvoir partager des expériences et d'avoir en permanence les antennes sorties pour être capable de dire Attention, ça, ça monte, ça, ça descend, ça, ça ne va pas. Il faut faire très attention.

  • Christian

    Alors, tu l'as évoqué rapidement tout à l'heure, mais c'est important de comprendre quelle est ta relation avec tes équipes en interne. Parce qu'on sait bien qu'aujourd'hui, c'est difficile le recrutement, la gestion de ce qu'on appelle des ressources humaines. Comment tu conçois ça, toi, dans ton métier ?

  • Arnaud

    C'est fondamental. Il y a deux choses qui sont primordiales dans la restauration. Ce sont, un, les fournisseurs, la relation, comme on en a parlé, et les équipes. Sans les équipes, on a beau avoir le plus bel établissement, le mieux décoré de la terre, le plus bel emplacement, sans les équipes, rien, absolument rien n'est possible. Donc, je leur dis souvent, vous ne travaillez pas pour moi, mais vous travaillez avec moi. On travaille ensemble. On va réfléchir à des objectifs. Vous allez me donner les moyens dont vous avez besoin pour atteindre ces objectifs-là. Et c'est une relation confiance. Je fais confiance très, très, très rapidement. Il y a deux choses qui m'énervent particulièrement. C'est évidemment quand on trahit la confiance, mais aussi quand on n'assume pas ses erreurs. Celui dans mon entreprise, dans mon restaurant Mojo. Celui qui fait le plus derrière, c'est sans doute moi, mais parce que c'est peut-être moi qui en fais le plus. Se tromper, c'est pas très très grave. J'essaie de leur expliquer ça en leur disant faites, prenez des risques, engagez-vous. Si vous vous trompez, c'est pas très grave. Ce qui est grave, c'est de recommencer une deuxième fois. Vous vous trompez, comprenez pourquoi vous vous êtes trompé et remettez. Churchill disait, la réussite c'est savoir aller d'échec en échec avec enthousiasme. Donc c'est leur faire passer cette passion, leur faire confiance, les laisser... s'exprimer, les mettre en valeur, les écouter et puis vivre ce petit moment de vie ensemble, quand ils travaillent ensemble.

  • Christian

    Est-ce que tu observes des changements au niveau des nouvelles générations qui arrivent aujourd'hui dans ce métier, surtout après la Covid ?

  • Arnaud

    Oui, il y a eu beaucoup d'évolutions. On est sortis heureusement un petit peu de cette période où les jeunes faisaient de la restauration, non pas par passion mais par obligation, parce que c'était une voie de garage. en sortant de 3ème, et il y a une montée en puissance de jeunes passionnés, grâce à des émissions de télévision, grâce à Instagram, grâce à plein de choses, et oui, aujourd'hui, il y a une vraie montée de générations qui aiment les belles choses, et qui a envie de s'impliquer, de découvrir, et de partager nos valeurs.

  • Christian

    Tu l'as largement décrit tout à l'heure, mais comment mieux sensibiliser les citoyens sur le bien manger ? Le Collège Culinaire de France, vous avez, à côté du Collège Culinaire de France, développé une association qui s'appelle Manger Citoyens, aussi pour mobiliser les citoyens. Donc comment tu vois les choses là-dessus ?

  • Arnaud

    Première chose, c'est qu'il faut être exemplaire. Tout ce qu'on essaie de promouvoir, tout ce qu'on dit, il faut le faire. Il faut être convaincant, et pour être convaincant, il faut que les gens viennent et constatent ce que ça veut dire. in situ, donc d'être dans le pratique, le discours théorique est très bien, mais de faire comprendre, de montrer in situ ce que c'est, mais aussi bien avec des producteurs qui pour eux ne se correspondent pas forcément à leur façon de faire, à leur vision, d'arriver à les convaincre, donc c'est un vrai travail du quotidien, mais au-delà de la théorie, de la pratique, de la pratique, de la pratique et de l'exemplarité.

  • Christian

    Dernier point avant de conclure, je te propose qu'on ouvre maintenant le... peau de moutarde.

  • Speaker #1

    La moutarde me montonnait.

  • Christian

    Pour coup de gueule, sur quoi ? Sur ce qui existe ? Sur une pratique ? Sur une loi ? Je sais pas.

  • Arnaud

    Il y en a beaucoup, il y a beaucoup de sujets, mais en fait, c'est plus une inquiétude, une peur, c'est la montée en puissance de l'intelligence artificielle, qui est un sujet très très vaste, qui ne concerne pas que la restauration et le bien-danger. J'ai peur que cette nouvelle technologie-là pose d'énormes problèmes dans le futur. C'est quelque chose qui m'inquiète fondamentalement.

  • Christian

    Un sujet à débattre évidemment au Collège Culière de France. Merci, en tout cas, merci Arnaud de nous avoir reçus. En plus, nous enregistrons chez toi, au Mojo, qui est devenu un studio d'enregistrement. Et peut-être en toute confidence. Peux-tu nous donner une ou deux bonnes adresses de restos, indépendamment du tien, bien évidemment ?

  • Arnaud

    Il y a beaucoup de belles adresses à Paris. J'aime beaucoup un restaurant qui se retrouve rue Saint-Roch, qui s'appelle La Cordonnerie, qui est un établissement qui se retrouve dans le flanc de l'église Saint-Roch, comme il y en avait à l'époque du Moyen-Âge. Et un tout petit établissement avec poutre apparente. Il doit y avoir 8-10 tables avec une cuisine ouverte et avec un... avec un gars passionné en cuisine qui a un petit jardin, la chance d'avoir un petit jardin, et qui produit et qui sert ce qu'il a chez lui. Donc c'est un bel endroit, la cordonnerie rue Saint-Roch.

  • Christian

    C'est génial, donc on vient au Mojo puis on a en même temps plein d'autres appareils. Voilà, c'est génial. Alors Arnaud, avant de nous quitter, est-ce que tu connais Émilie et Lucille Batafahano ? Ce sont deux passionnarias de la gastronomie et du pouvoir de la passion artisanale. Elles viennent elles aussi d'être amenées au Collège Culinaire de France il y a quelques mois. Mais natives de Malakoff, elles ont une démarche qui renverse la table. Alors, si on veut tout savoir, c'est vendredi dans 15 jours, un nouvel épisode à surtout ne pas manquer.

  • Speaker #1

    Vous venez de déguster un épisode de La Terre à l'assiette, le podcast qui vous donne envie de bien manger. Nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie. Si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef, et en vous abonnant. Vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous.

Description

Découvrez Arnaud Sauvé, artisan engagé et propriétaire du restaurant Mojo à Paris, reconnu par le Collège Culinaire de France.

Dans cet épisode, il partage sa vision d’une cuisine artisanale de convivialité,authenticité et innovation se rencontrent.

Comment Arnaud insuffle-t-il ses principes dans l’assiette ? Comment conjugue-t-il passion, qualité et défis économiques ?

Une conversation inspirante sur l’importance des relations humaines, le respect des producteurs derrière les produits et l’avenir de la gastronomie artisanale.


"L'obstacle principal aujourd'hui, la vraie difficulté, c'est le manque d'éducation et de formation des gens qui ont été habitués pendant des années à des goûts stéréotypés, à des choses extrêmement industrielles, très linéaires, et leur apporter et leur faire découvrir autre chose, il y a deux étapes. Un, les convaincre d'essayer, et deux, leur expliquer pourquoi ? est-ce qu'on fait, est évidemment différent et mieux et transporte des valeurs que les autres choses, les choses industrielles, ne véhiculent pas. Donc c'est extrêmement important, mais c'est un travail de longue haleine."

Arnaud Sauvé


Le Collège Culinaire de France est une association fondée en 2011 à l'initiative de quinze grands chefs restaurateurs à l'instar d'Alain Ducasse, Joël Robuchon, Yannick Alléno, Paul Bocuse, Alain Dutournier, Gilles Goujon, Michel Guérard, Marc Haeberlin, Régis Marcon, Thierry Marx, Gérald Passedat, Laurent Petit, Anne-Sophie Pic, Guy Savoy et Pierre Troisgros. Le Collège Culinaire de France est la seule association, à ce jour, initiée par le plus grand rassemblement de chefs français reconnus et incontestés, qui s’emploie, concrètement, sur le terrain, à relier des Producteurs et Artisans de Qualité avec des Restaurants de Qualité de toutes catégories. Elle rassemble ceux qui œuvrent pour une vision d’avenir du métier, et fédère tous ceux qui s’engagent sur des synergies de valeurs et de pratiques partagées.


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Crédits

En cuisine :

Un foodcast mitonnée aux petits oignons par Suniwan

Illustration servie par Hugo Girard

Un épisode enregistré au Mojo dans le 17éme arrondissement de Paris


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Christian

    Neuf rues du général L'Enreusac à Paris, dans le 17e arrondissement, vient d'être reconnue par le Collège Culinaire de France. C'est un établissement où il insuffle ses valeurs et son engagement pour une cuisine de gastronomie artisanale. Aujourd'hui, Arnaud décrypte sans cesse les mécanismes et les actualités qui font obstacle à sa passion pour la gastronomie. Il essaie en continu des pistes de solutions et d'innovation dans sa façon de travailler. Alors comment cet engagement se concrétise-t-il dans l'assiette et dans le pilotage de son restaurant ? Pourquoi a-t-il fait de l'innovation un des moteurs de son activité ? Comment faire face à l'industrialisation galopante lorsqu'on est un restaurateur indépendant ? Autant de questions complexes mais passionnants auxquelles nous allons tenter de répondre avec Arnaud.

  • Speaker #1

    Une émission présentée par Christian Regouby.

  • Christian

    Bonjour Arnaud.

  • Arnaud

    Bonjour Christian, bonjour à tous.

  • Christian

    Alors Arnaud, raconte-nous un petit peu la manière dont tu te définis, c'est quoi ton projet ? Quelles sont tes principales convictions ?

  • Arnaud

    Alors déjà, moi je ne suis pas issu du serail de la restauration, ce qui me donne une vision un petit peu différente de pas mal de mes collègues restaurateurs. Mon ambition et mon projet est avant toute chose de créer des lieux qui sont des lieux de convivialité et de partage. Et pour arriver à cet objectif, j'ai monté différents établissements, dont le Mojo, en prenant des règles de base qui sont assez simples. Convivialité, conviction et partage.

  • Christian

    Alors ce partage, bien évidemment, c'est un partage d'abord avec les convives qui viennent chez toi. Donc ça veut dire que ton lieu, il émane de ton lieu un certain nombre de choses.

  • Arnaud

    Oui, alors la restauration, avant toute chose, est un endroit, un lieu de partage et de convivialité. Ce qu'il y a dans l'assiette est important et primordial, mais l'accueil, l'atmosphère, l'ambiance et tout ce qui fait la restauration tournent autour de différentes règles. Qualité d'accueil, qualité des produits, sourire, convivialité. On vient dans un restaurant évidemment pour manger, mais aussi pour vivre une expérience et partager des moments avec ses convives.

  • Christian

    C'est pour ça que souvent on dit, on en a parlé ensemble, c'est comme à la maison, c'est un peu un faux-semblant. Parce que si on est comme à la maison...

  • Arnaud

    C'est ça, c'est si on est à la maison, si on est comme à la maison, on reste à la maison. Donc charge au restaurateur d'amener autre chose que ce que les gens peuvent faire à la maison. Ce qu'ils peuvent très bien faire chez eux. Mais on se doit d'apporter autre chose. Donc ça, c'est un équilibre assez subtil et surtout c'est très subjectif. Et c'est quelque chose qui change en permanence. Les attentes des gens, des consommateurs, des convives, changent régulièrement. Donc il faut être en permanence à l'écoute, mais on en parlera tout à l'heure, à l'écoute des tendances du marché et de ce qui fait l'ambiance du moment.

  • Christian

    Quand tu dis c'est subjectif, c'est fondamental parce qu'on pourrait dire c'est du marketing, mais tel que tu le conçois en termes d'artisan, c'est pas du marketing. C'est quelque chose qui émane aussi de ta subjectivité et de qui tu es.

  • Arnaud

    Complètement, oui. On ne fait pas les choses uniquement pour faire tourner une entreprise, même si nous sommes aussi avant tout des chefs d'entreprise. On fait ça aussi pour se faire plaisir, pour faire plaisir aux gens qui viennent dans nos établissements. Donc si on ne raisonnait exclusivement qu'en termes de marketing, avec une dimension un tout petit peu plus large que juste marketing, ça serait aussi une dimension de gestion, d'achat, de maîtrise au cordeau des coûts. Et si on ne raisonne, il y en a qui raisonnent comme ça. Mais si on raisonne comme ça, on passe à côté de beaucoup de choses, je crois. Donc j'ai d'autres règles. Je me suis construit d'autres règles.

  • Christian

    C'est-à-dire une restauration qui a une âme, en fait.

  • Arnaud

    Avant toute chose, la restauration sans âme, c'est pas de la restauration. Il faut faire autre chose. Donc la restauration, c'est une âme. Et cette âme, elle est non seulement incarnée par le restaurateur, mais également par l'équipe. C'est un travail d'équipe. Même si la personne qui dirige le restaurant est le chef d'orchestre, les autres sont les... Les premiers violons, et ils jouent la partition.

  • Christian

    C'est un point important, on va en reparler, mais sur cette première phase, j'aurais posé une dernière question. Comment intègres-tu le temps ? Le passé, le présent, le futur, parce qu'on est toujours dans l'immédiateté aujourd'hui. Comment toi tu intègres le temps ?

  • Arnaud

    C'est un difficile équilibre entre le temps long et le temps court, arriver à construire quelque chose dans la longueur sans oublier le quotidien. Donc c'est-à-dire que... Alors il y a quand même quelque chose d'extrêmement intéressant et important à comprendre, c'est que nous sommes dans des métiers... En tout cas pour les restaurateurs, on voit très vite le résultat de ce qu'on fait. Si on décide un plat du jour le matin, si à midi il ne plaît pas, on a le résultat immédiatement.

  • Christian

    Donc c'est une sanction.

  • Arnaud

    Elle est immédiate et puis elle se paye cash. Non seulement elle se paye avec un avis négatif du client et qui aujourd'hui a la possibilité sur les réseaux sociaux de mettre une mauvaise note ou un mauvais commentaire. Donc la gestion du temps est quelque chose de primordial. Il ne faut pas perdre de vue ce qu'on est. Et où est-ce qu'on veut aller ? Et les choix au quotidien ne sont que la construction d'un futur, d'un futur à venir qui se veut plus ou moins long. Mais les deux vont ensemble, on ne peut pas séparer les deux.

  • Christian

    Alors on va aller plus loin dans tout ça, mais avant on va se faire une petite parenthèse qui s'appelle Toc toc qui est là ?

  • Speaker #1

    Toc toc qui est là ?

  • Christian

    Alors Arnaud, si tu étais un animal, tu serais quoi ?

  • Arnaud

    Alors je serais un animal de terre, je ne suis pas montagnard, je ne suis pas marin, la flotte me fout une trouille colossale. Donc plutôt un animal de terre, de forêt, allez, soyons un petit peu orgueilleux, un cerf.

  • Christian

    Bravo, et une saison ?

  • Arnaud

    L'automne, l'automne pour les couleurs et les odeurs.

  • Christian

    Un des cinq sens toi qui es cuisinier ?

  • Arnaud

    Le goût.

  • Christian

    Un mot ? Un mot central pour toi ?

  • Arnaud

    Envie. Sans envie, on ne fait rien.

  • Christian

    Un plat ?

  • Arnaud

    Un plat, oula, alors là ça se bouscule, il y en aurait beaucoup, beaucoup, beaucoup. Un peu le côté Madeleine de Proust, j'irais... Allez, je vais en citer deux, si tu m'autorises. Je vais faire un classique et un petit peu plus déluré. Le classique, ça serait des joues de bœuf braisé au vin blanc. Et le... un petit peu plus fou, ayant des origines scandinaves, des filets de filets de harangue marinés avec une marinade sucrée. C'est très particulier, il faut être originaire de là-haut pour apprécier. Mais sinon, c'est... Arrête de compliquer !

  • Christian

    Tu nous mets l'eau à la bouche.

  • Arnaud

    Avec du pain noir, servi sur du pain grillé, bien sûr.

  • Christian

    Et ta boisson préférée ?

  • Arnaud

    Le vin. Bien,

  • Christian

    alors maintenant, on passe à une deuxième phase. En fait, au Collège Culinaire de France, vous vous définissez comme artisan militant de la qualité. Ça veut dire quoi ?

  • Arnaud

    Ça veut dire qu'au quotidien, on s'oblige, non parce que c'est notre nature, on fait un choix, on fait un ensemble de sélections, aussi bien sur les solides, sur les liquides, de manière genre, de travailler avec des gens qui ont non seulement des produits de qualité, qui ont également des produits de saison et qui partagent notre vision. Et très souvent, on se rend compte... que les producteurs, que ce soit des maraîchers ou des vignerons, ont des produits qui leur ressemblent. Si le vigneron n'est pas généreux, il va avoir un vin sec, un petit peu austère. Si le gars n'aime pas sa betterave, elle va être un petit peu... Elle ne va pas être très sucrée, elle ne va pas avoir beaucoup de goût. Donc d'arriver à trouver au quotidien, ce qui prend du temps, ce qui donne parfois des dégustations un petit peu improbables à 9h du matin avec des bouteilles de blanc. Mais trouver des gens qui sont passionnés, qui ont les mêmes critères et les mêmes recherches que nous. Donc d'arriver à trouver ces personnes-là avec qui on va partager des moments et mettre en valeur leurs produits aussi. Ils sont extrêmement heureux et très sensibles à ce qu'on fait de leurs produits et au fait que nos clients, nos convives apprécient.

  • Christian

    Ce qui est génial dans ce que tu dis, c'est que je vous entends souvent dire derrière chaque produit, il y a un visage. Et en fait, ça dit bien, ce n'est pas simplement le produit, c'est l'homme ou la femme qui est derrière.

  • Arnaud

    C'est fondamental. Sans ça, on ne fait absolument rien. Donc on est très loin de... des stéréotypes et de l'industrialisation.

  • Christian

    C'est pourquoi peut-être vous ne définissiez pas comme un label au collège, vous définissiez plutôt comme une appellation, un drapeau, une cause à défendre.

  • Arnaud

    Oui, une ligne commune, une vision commune à défendre. Mais le côté à défendre, on va dire qu'on est uniquement sur une phase défensive et je veux qu'il y ait une phase offensive, une phase partagée, très important.

  • Christian

    Vous conquérez l'avenir plutôt que défendre le...

  • Arnaud

    Oui, alors on ne va pas remporter toutes les victoires, mais en tout cas, au-delà de s'inscrire juste dans une sauvegarde, je pense qu'il y a une véritable attente de fond, au-delà de la qualité, mais d'une vision de valeur, de partage. Et on doit être les chantres au quotidien de cette vision-là.

  • Christian

    C'est quoi les obstacles à surmonter pour faire ce métier de cette façon-là ?

  • Arnaud

    Alors, je pense qu'il nous faudrait des heures. pour faire la liste de tous les obstacles. Mais l'obstacle principal aujourd'hui, la vraie difficulté, c'est le manque d'éducation et de formation des gens qui ont été habitués pendant des années à des goûts stéréotypés, à des choses extrêmement industrielles, très linéaires, et leur apporter et leur faire découvrir autre chose, il y a deux étapes. Un, les convaincre d'essayer, et deux, leur expliquer pourquoi ? est-ce qu'on fait, est évidemment différent et mieux et transporte des valeurs que les autres choses, les choses industrielles, ne véhiculent pas. Donc c'est extrêmement important, mais c'est un travail de longue haleine. On ne gagnera pas tout le monde, mais en tout cas, on y arrivera petit à petit, non seulement à partager ces valeurs-là, et surtout, surtout, arriver à ce que les producteurs, quels qu'ils soient, les gens qui partagent ces valeurs-là, qui sont... Les petits artisans du quotidien, les vignerons, tous ces gens-là continuent à vivre, se développent et se redéveloppent. Reprennent le pas, pas qu'à Paris ou dans les grandes villes, mais dans tous les territoires français, replènent le pas petit à petit.

  • Christian

    Ça éclaire ce que vous dites en disant que c'est de la relation humaine ajoutée, en fait, c'est ça que vous apportez au premier.

  • Arnaud

    Mais c'est que du bonheur. C'est le fondement même des choses. S'il n'y a pas de relation humaine, s'il n'y a pas ce côté... On reçoit, on voit, on se serre, ça serre la main et on trinque ensemble. Virtuel, c'est bien, il en faut, on ne peut pas faire fi de tout ça. Mais il faut impérativement vivre les choses, sentir, recevoir, pouvoir serrer les gens dans ses bras. C'est extrêmement important.

  • Christian

    Alors, deuxième petite parenthèse, justement, pour avoir un peu en transparence ton cœur sur la table, on va dire. Je te propose de paster à l'instant fromage ou dessert.

  • Speaker #1

    C'est fromage ou dessert ?

  • Christian

    T'es dans la logique ou dans l'émotion ?

  • Arnaud

    J'aimerais bien être un petit peu plus dans la logique. L'émotion, je ne me laisse pas emporter par toutes les émotions, mais si on n'écoute pas ces émotions, la logique c'est froid. Donc il faut une bonne dose d'émotion et un peu de logique pour éviter de partir complètement dans tous les sens.

  • Christian

    Compétition ou coopération ?

  • Arnaud

    Alors il n'y a qu'une seule compétition qui vaille à mon sens, c'est la compétition contre soi-même, se fixer des objectifs et développer. développer cette lutte contre soi-même, arriver à être meilleur, à rendre les choses meilleures. Donc compétition contre soi-même, coopération, oui, c'est au quotidien, tout n'est que coopération.

  • Christian

    Vie personnelle ou vie professionnelle ?

  • Arnaud

    Il faut arriver à mélanger les deux. Si on ne fait que l'un, c'est impossible. Je vais même te raconter une petite anecdote. Avant le Covid, même si je recommence à faire ça actuellement, avant le Covid, j'arrivais à partir entre 5 et 7 jours tous les mois. Partir en vacances. Alors en vacances, c'est aussi aller sourcer des fournisseurs, trouver des vignerons, mettre absente mes établissements pendant une semaine, quasiment une semaine par mois. Donc, d'arriver à y joindre l'utile et l'agréable.

  • Christian

    Non, mais c'est bien. Donc, il n'y a pas de séparation. C'est ce que tu dis.

  • Arnaud

    Difficile.

  • Christian

    Temps court ou temps long ?

  • Arnaud

    Les deux. Les deux, parce que le temps court construit le temps long, donc on ne peut pas viser que là.

  • Christian

    Merci Arnaud, on va passer à la troisième phase de ton engagement. Comment tu conçois justement ces relations de coopération avec les producteurs ou avec d'autres restaurants du Collège Culinaire de France ?

  • Arnaud

    Avec les producteurs, avec les gens, avec les échelles de travail, c'est un travail, d'abord c'est une relation de confiance. C'est une relation qui se construit, qui met du temps à se construire, mais où on fixe des objectifs communs et puis on construit les choses ensemble. Quand on a des demandes, quand on a des attentes, on fait appel à eux. Donc ça c'est extrêmement important. Et puis avec les autres restaurateurs du collège ou d'autres, c'est partager des expériences, partager des visions. Et comme je disais tout à l'heure, c'est aussi le fait d'être en permanence à l'écoute des tendances et de ce qui se fait. Voilà, de pouvoir partager des expériences et d'avoir en permanence les antennes sorties pour être capable de dire Attention, ça, ça monte, ça, ça descend, ça, ça ne va pas. Il faut faire très attention.

  • Christian

    Alors, tu l'as évoqué rapidement tout à l'heure, mais c'est important de comprendre quelle est ta relation avec tes équipes en interne. Parce qu'on sait bien qu'aujourd'hui, c'est difficile le recrutement, la gestion de ce qu'on appelle des ressources humaines. Comment tu conçois ça, toi, dans ton métier ?

  • Arnaud

    C'est fondamental. Il y a deux choses qui sont primordiales dans la restauration. Ce sont, un, les fournisseurs, la relation, comme on en a parlé, et les équipes. Sans les équipes, on a beau avoir le plus bel établissement, le mieux décoré de la terre, le plus bel emplacement, sans les équipes, rien, absolument rien n'est possible. Donc, je leur dis souvent, vous ne travaillez pas pour moi, mais vous travaillez avec moi. On travaille ensemble. On va réfléchir à des objectifs. Vous allez me donner les moyens dont vous avez besoin pour atteindre ces objectifs-là. Et c'est une relation confiance. Je fais confiance très, très, très rapidement. Il y a deux choses qui m'énervent particulièrement. C'est évidemment quand on trahit la confiance, mais aussi quand on n'assume pas ses erreurs. Celui dans mon entreprise, dans mon restaurant Mojo. Celui qui fait le plus derrière, c'est sans doute moi, mais parce que c'est peut-être moi qui en fais le plus. Se tromper, c'est pas très très grave. J'essaie de leur expliquer ça en leur disant faites, prenez des risques, engagez-vous. Si vous vous trompez, c'est pas très grave. Ce qui est grave, c'est de recommencer une deuxième fois. Vous vous trompez, comprenez pourquoi vous vous êtes trompé et remettez. Churchill disait, la réussite c'est savoir aller d'échec en échec avec enthousiasme. Donc c'est leur faire passer cette passion, leur faire confiance, les laisser... s'exprimer, les mettre en valeur, les écouter et puis vivre ce petit moment de vie ensemble, quand ils travaillent ensemble.

  • Christian

    Est-ce que tu observes des changements au niveau des nouvelles générations qui arrivent aujourd'hui dans ce métier, surtout après la Covid ?

  • Arnaud

    Oui, il y a eu beaucoup d'évolutions. On est sortis heureusement un petit peu de cette période où les jeunes faisaient de la restauration, non pas par passion mais par obligation, parce que c'était une voie de garage. en sortant de 3ème, et il y a une montée en puissance de jeunes passionnés, grâce à des émissions de télévision, grâce à Instagram, grâce à plein de choses, et oui, aujourd'hui, il y a une vraie montée de générations qui aiment les belles choses, et qui a envie de s'impliquer, de découvrir, et de partager nos valeurs.

  • Christian

    Tu l'as largement décrit tout à l'heure, mais comment mieux sensibiliser les citoyens sur le bien manger ? Le Collège Culinaire de France, vous avez, à côté du Collège Culinaire de France, développé une association qui s'appelle Manger Citoyens, aussi pour mobiliser les citoyens. Donc comment tu vois les choses là-dessus ?

  • Arnaud

    Première chose, c'est qu'il faut être exemplaire. Tout ce qu'on essaie de promouvoir, tout ce qu'on dit, il faut le faire. Il faut être convaincant, et pour être convaincant, il faut que les gens viennent et constatent ce que ça veut dire. in situ, donc d'être dans le pratique, le discours théorique est très bien, mais de faire comprendre, de montrer in situ ce que c'est, mais aussi bien avec des producteurs qui pour eux ne se correspondent pas forcément à leur façon de faire, à leur vision, d'arriver à les convaincre, donc c'est un vrai travail du quotidien, mais au-delà de la théorie, de la pratique, de la pratique, de la pratique et de l'exemplarité.

  • Christian

    Dernier point avant de conclure, je te propose qu'on ouvre maintenant le... peau de moutarde.

  • Speaker #1

    La moutarde me montonnait.

  • Christian

    Pour coup de gueule, sur quoi ? Sur ce qui existe ? Sur une pratique ? Sur une loi ? Je sais pas.

  • Arnaud

    Il y en a beaucoup, il y a beaucoup de sujets, mais en fait, c'est plus une inquiétude, une peur, c'est la montée en puissance de l'intelligence artificielle, qui est un sujet très très vaste, qui ne concerne pas que la restauration et le bien-danger. J'ai peur que cette nouvelle technologie-là pose d'énormes problèmes dans le futur. C'est quelque chose qui m'inquiète fondamentalement.

  • Christian

    Un sujet à débattre évidemment au Collège Culière de France. Merci, en tout cas, merci Arnaud de nous avoir reçus. En plus, nous enregistrons chez toi, au Mojo, qui est devenu un studio d'enregistrement. Et peut-être en toute confidence. Peux-tu nous donner une ou deux bonnes adresses de restos, indépendamment du tien, bien évidemment ?

  • Arnaud

    Il y a beaucoup de belles adresses à Paris. J'aime beaucoup un restaurant qui se retrouve rue Saint-Roch, qui s'appelle La Cordonnerie, qui est un établissement qui se retrouve dans le flanc de l'église Saint-Roch, comme il y en avait à l'époque du Moyen-Âge. Et un tout petit établissement avec poutre apparente. Il doit y avoir 8-10 tables avec une cuisine ouverte et avec un... avec un gars passionné en cuisine qui a un petit jardin, la chance d'avoir un petit jardin, et qui produit et qui sert ce qu'il a chez lui. Donc c'est un bel endroit, la cordonnerie rue Saint-Roch.

  • Christian

    C'est génial, donc on vient au Mojo puis on a en même temps plein d'autres appareils. Voilà, c'est génial. Alors Arnaud, avant de nous quitter, est-ce que tu connais Émilie et Lucille Batafahano ? Ce sont deux passionnarias de la gastronomie et du pouvoir de la passion artisanale. Elles viennent elles aussi d'être amenées au Collège Culinaire de France il y a quelques mois. Mais natives de Malakoff, elles ont une démarche qui renverse la table. Alors, si on veut tout savoir, c'est vendredi dans 15 jours, un nouvel épisode à surtout ne pas manquer.

  • Speaker #1

    Vous venez de déguster un épisode de La Terre à l'assiette, le podcast qui vous donne envie de bien manger. Nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie. Si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef, et en vous abonnant. Vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous.

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Description

Découvrez Arnaud Sauvé, artisan engagé et propriétaire du restaurant Mojo à Paris, reconnu par le Collège Culinaire de France.

Dans cet épisode, il partage sa vision d’une cuisine artisanale de convivialité,authenticité et innovation se rencontrent.

Comment Arnaud insuffle-t-il ses principes dans l’assiette ? Comment conjugue-t-il passion, qualité et défis économiques ?

Une conversation inspirante sur l’importance des relations humaines, le respect des producteurs derrière les produits et l’avenir de la gastronomie artisanale.


"L'obstacle principal aujourd'hui, la vraie difficulté, c'est le manque d'éducation et de formation des gens qui ont été habitués pendant des années à des goûts stéréotypés, à des choses extrêmement industrielles, très linéaires, et leur apporter et leur faire découvrir autre chose, il y a deux étapes. Un, les convaincre d'essayer, et deux, leur expliquer pourquoi ? est-ce qu'on fait, est évidemment différent et mieux et transporte des valeurs que les autres choses, les choses industrielles, ne véhiculent pas. Donc c'est extrêmement important, mais c'est un travail de longue haleine."

Arnaud Sauvé


Le Collège Culinaire de France est une association fondée en 2011 à l'initiative de quinze grands chefs restaurateurs à l'instar d'Alain Ducasse, Joël Robuchon, Yannick Alléno, Paul Bocuse, Alain Dutournier, Gilles Goujon, Michel Guérard, Marc Haeberlin, Régis Marcon, Thierry Marx, Gérald Passedat, Laurent Petit, Anne-Sophie Pic, Guy Savoy et Pierre Troisgros. Le Collège Culinaire de France est la seule association, à ce jour, initiée par le plus grand rassemblement de chefs français reconnus et incontestés, qui s’emploie, concrètement, sur le terrain, à relier des Producteurs et Artisans de Qualité avec des Restaurants de Qualité de toutes catégories. Elle rassemble ceux qui œuvrent pour une vision d’avenir du métier, et fédère tous ceux qui s’engagent sur des synergies de valeurs et de pratiques partagées.


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Crédits

En cuisine :

Un foodcast mitonnée aux petits oignons par Suniwan

Illustration servie par Hugo Girard

Un épisode enregistré au Mojo dans le 17éme arrondissement de Paris


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Christian

    Neuf rues du général L'Enreusac à Paris, dans le 17e arrondissement, vient d'être reconnue par le Collège Culinaire de France. C'est un établissement où il insuffle ses valeurs et son engagement pour une cuisine de gastronomie artisanale. Aujourd'hui, Arnaud décrypte sans cesse les mécanismes et les actualités qui font obstacle à sa passion pour la gastronomie. Il essaie en continu des pistes de solutions et d'innovation dans sa façon de travailler. Alors comment cet engagement se concrétise-t-il dans l'assiette et dans le pilotage de son restaurant ? Pourquoi a-t-il fait de l'innovation un des moteurs de son activité ? Comment faire face à l'industrialisation galopante lorsqu'on est un restaurateur indépendant ? Autant de questions complexes mais passionnants auxquelles nous allons tenter de répondre avec Arnaud.

  • Speaker #1

    Une émission présentée par Christian Regouby.

  • Christian

    Bonjour Arnaud.

  • Arnaud

    Bonjour Christian, bonjour à tous.

  • Christian

    Alors Arnaud, raconte-nous un petit peu la manière dont tu te définis, c'est quoi ton projet ? Quelles sont tes principales convictions ?

  • Arnaud

    Alors déjà, moi je ne suis pas issu du serail de la restauration, ce qui me donne une vision un petit peu différente de pas mal de mes collègues restaurateurs. Mon ambition et mon projet est avant toute chose de créer des lieux qui sont des lieux de convivialité et de partage. Et pour arriver à cet objectif, j'ai monté différents établissements, dont le Mojo, en prenant des règles de base qui sont assez simples. Convivialité, conviction et partage.

  • Christian

    Alors ce partage, bien évidemment, c'est un partage d'abord avec les convives qui viennent chez toi. Donc ça veut dire que ton lieu, il émane de ton lieu un certain nombre de choses.

  • Arnaud

    Oui, alors la restauration, avant toute chose, est un endroit, un lieu de partage et de convivialité. Ce qu'il y a dans l'assiette est important et primordial, mais l'accueil, l'atmosphère, l'ambiance et tout ce qui fait la restauration tournent autour de différentes règles. Qualité d'accueil, qualité des produits, sourire, convivialité. On vient dans un restaurant évidemment pour manger, mais aussi pour vivre une expérience et partager des moments avec ses convives.

  • Christian

    C'est pour ça que souvent on dit, on en a parlé ensemble, c'est comme à la maison, c'est un peu un faux-semblant. Parce que si on est comme à la maison...

  • Arnaud

    C'est ça, c'est si on est à la maison, si on est comme à la maison, on reste à la maison. Donc charge au restaurateur d'amener autre chose que ce que les gens peuvent faire à la maison. Ce qu'ils peuvent très bien faire chez eux. Mais on se doit d'apporter autre chose. Donc ça, c'est un équilibre assez subtil et surtout c'est très subjectif. Et c'est quelque chose qui change en permanence. Les attentes des gens, des consommateurs, des convives, changent régulièrement. Donc il faut être en permanence à l'écoute, mais on en parlera tout à l'heure, à l'écoute des tendances du marché et de ce qui fait l'ambiance du moment.

  • Christian

    Quand tu dis c'est subjectif, c'est fondamental parce qu'on pourrait dire c'est du marketing, mais tel que tu le conçois en termes d'artisan, c'est pas du marketing. C'est quelque chose qui émane aussi de ta subjectivité et de qui tu es.

  • Arnaud

    Complètement, oui. On ne fait pas les choses uniquement pour faire tourner une entreprise, même si nous sommes aussi avant tout des chefs d'entreprise. On fait ça aussi pour se faire plaisir, pour faire plaisir aux gens qui viennent dans nos établissements. Donc si on ne raisonnait exclusivement qu'en termes de marketing, avec une dimension un tout petit peu plus large que juste marketing, ça serait aussi une dimension de gestion, d'achat, de maîtrise au cordeau des coûts. Et si on ne raisonne, il y en a qui raisonnent comme ça. Mais si on raisonne comme ça, on passe à côté de beaucoup de choses, je crois. Donc j'ai d'autres règles. Je me suis construit d'autres règles.

  • Christian

    C'est-à-dire une restauration qui a une âme, en fait.

  • Arnaud

    Avant toute chose, la restauration sans âme, c'est pas de la restauration. Il faut faire autre chose. Donc la restauration, c'est une âme. Et cette âme, elle est non seulement incarnée par le restaurateur, mais également par l'équipe. C'est un travail d'équipe. Même si la personne qui dirige le restaurant est le chef d'orchestre, les autres sont les... Les premiers violons, et ils jouent la partition.

  • Christian

    C'est un point important, on va en reparler, mais sur cette première phase, j'aurais posé une dernière question. Comment intègres-tu le temps ? Le passé, le présent, le futur, parce qu'on est toujours dans l'immédiateté aujourd'hui. Comment toi tu intègres le temps ?

  • Arnaud

    C'est un difficile équilibre entre le temps long et le temps court, arriver à construire quelque chose dans la longueur sans oublier le quotidien. Donc c'est-à-dire que... Alors il y a quand même quelque chose d'extrêmement intéressant et important à comprendre, c'est que nous sommes dans des métiers... En tout cas pour les restaurateurs, on voit très vite le résultat de ce qu'on fait. Si on décide un plat du jour le matin, si à midi il ne plaît pas, on a le résultat immédiatement.

  • Christian

    Donc c'est une sanction.

  • Arnaud

    Elle est immédiate et puis elle se paye cash. Non seulement elle se paye avec un avis négatif du client et qui aujourd'hui a la possibilité sur les réseaux sociaux de mettre une mauvaise note ou un mauvais commentaire. Donc la gestion du temps est quelque chose de primordial. Il ne faut pas perdre de vue ce qu'on est. Et où est-ce qu'on veut aller ? Et les choix au quotidien ne sont que la construction d'un futur, d'un futur à venir qui se veut plus ou moins long. Mais les deux vont ensemble, on ne peut pas séparer les deux.

  • Christian

    Alors on va aller plus loin dans tout ça, mais avant on va se faire une petite parenthèse qui s'appelle Toc toc qui est là ?

  • Speaker #1

    Toc toc qui est là ?

  • Christian

    Alors Arnaud, si tu étais un animal, tu serais quoi ?

  • Arnaud

    Alors je serais un animal de terre, je ne suis pas montagnard, je ne suis pas marin, la flotte me fout une trouille colossale. Donc plutôt un animal de terre, de forêt, allez, soyons un petit peu orgueilleux, un cerf.

  • Christian

    Bravo, et une saison ?

  • Arnaud

    L'automne, l'automne pour les couleurs et les odeurs.

  • Christian

    Un des cinq sens toi qui es cuisinier ?

  • Arnaud

    Le goût.

  • Christian

    Un mot ? Un mot central pour toi ?

  • Arnaud

    Envie. Sans envie, on ne fait rien.

  • Christian

    Un plat ?

  • Arnaud

    Un plat, oula, alors là ça se bouscule, il y en aurait beaucoup, beaucoup, beaucoup. Un peu le côté Madeleine de Proust, j'irais... Allez, je vais en citer deux, si tu m'autorises. Je vais faire un classique et un petit peu plus déluré. Le classique, ça serait des joues de bœuf braisé au vin blanc. Et le... un petit peu plus fou, ayant des origines scandinaves, des filets de filets de harangue marinés avec une marinade sucrée. C'est très particulier, il faut être originaire de là-haut pour apprécier. Mais sinon, c'est... Arrête de compliquer !

  • Christian

    Tu nous mets l'eau à la bouche.

  • Arnaud

    Avec du pain noir, servi sur du pain grillé, bien sûr.

  • Christian

    Et ta boisson préférée ?

  • Arnaud

    Le vin. Bien,

  • Christian

    alors maintenant, on passe à une deuxième phase. En fait, au Collège Culinaire de France, vous vous définissez comme artisan militant de la qualité. Ça veut dire quoi ?

  • Arnaud

    Ça veut dire qu'au quotidien, on s'oblige, non parce que c'est notre nature, on fait un choix, on fait un ensemble de sélections, aussi bien sur les solides, sur les liquides, de manière genre, de travailler avec des gens qui ont non seulement des produits de qualité, qui ont également des produits de saison et qui partagent notre vision. Et très souvent, on se rend compte... que les producteurs, que ce soit des maraîchers ou des vignerons, ont des produits qui leur ressemblent. Si le vigneron n'est pas généreux, il va avoir un vin sec, un petit peu austère. Si le gars n'aime pas sa betterave, elle va être un petit peu... Elle ne va pas être très sucrée, elle ne va pas avoir beaucoup de goût. Donc d'arriver à trouver au quotidien, ce qui prend du temps, ce qui donne parfois des dégustations un petit peu improbables à 9h du matin avec des bouteilles de blanc. Mais trouver des gens qui sont passionnés, qui ont les mêmes critères et les mêmes recherches que nous. Donc d'arriver à trouver ces personnes-là avec qui on va partager des moments et mettre en valeur leurs produits aussi. Ils sont extrêmement heureux et très sensibles à ce qu'on fait de leurs produits et au fait que nos clients, nos convives apprécient.

  • Christian

    Ce qui est génial dans ce que tu dis, c'est que je vous entends souvent dire derrière chaque produit, il y a un visage. Et en fait, ça dit bien, ce n'est pas simplement le produit, c'est l'homme ou la femme qui est derrière.

  • Arnaud

    C'est fondamental. Sans ça, on ne fait absolument rien. Donc on est très loin de... des stéréotypes et de l'industrialisation.

  • Christian

    C'est pourquoi peut-être vous ne définissiez pas comme un label au collège, vous définissiez plutôt comme une appellation, un drapeau, une cause à défendre.

  • Arnaud

    Oui, une ligne commune, une vision commune à défendre. Mais le côté à défendre, on va dire qu'on est uniquement sur une phase défensive et je veux qu'il y ait une phase offensive, une phase partagée, très important.

  • Christian

    Vous conquérez l'avenir plutôt que défendre le...

  • Arnaud

    Oui, alors on ne va pas remporter toutes les victoires, mais en tout cas, au-delà de s'inscrire juste dans une sauvegarde, je pense qu'il y a une véritable attente de fond, au-delà de la qualité, mais d'une vision de valeur, de partage. Et on doit être les chantres au quotidien de cette vision-là.

  • Christian

    C'est quoi les obstacles à surmonter pour faire ce métier de cette façon-là ?

  • Arnaud

    Alors, je pense qu'il nous faudrait des heures. pour faire la liste de tous les obstacles. Mais l'obstacle principal aujourd'hui, la vraie difficulté, c'est le manque d'éducation et de formation des gens qui ont été habitués pendant des années à des goûts stéréotypés, à des choses extrêmement industrielles, très linéaires, et leur apporter et leur faire découvrir autre chose, il y a deux étapes. Un, les convaincre d'essayer, et deux, leur expliquer pourquoi ? est-ce qu'on fait, est évidemment différent et mieux et transporte des valeurs que les autres choses, les choses industrielles, ne véhiculent pas. Donc c'est extrêmement important, mais c'est un travail de longue haleine. On ne gagnera pas tout le monde, mais en tout cas, on y arrivera petit à petit, non seulement à partager ces valeurs-là, et surtout, surtout, arriver à ce que les producteurs, quels qu'ils soient, les gens qui partagent ces valeurs-là, qui sont... Les petits artisans du quotidien, les vignerons, tous ces gens-là continuent à vivre, se développent et se redéveloppent. Reprennent le pas, pas qu'à Paris ou dans les grandes villes, mais dans tous les territoires français, replènent le pas petit à petit.

  • Christian

    Ça éclaire ce que vous dites en disant que c'est de la relation humaine ajoutée, en fait, c'est ça que vous apportez au premier.

  • Arnaud

    Mais c'est que du bonheur. C'est le fondement même des choses. S'il n'y a pas de relation humaine, s'il n'y a pas ce côté... On reçoit, on voit, on se serre, ça serre la main et on trinque ensemble. Virtuel, c'est bien, il en faut, on ne peut pas faire fi de tout ça. Mais il faut impérativement vivre les choses, sentir, recevoir, pouvoir serrer les gens dans ses bras. C'est extrêmement important.

  • Christian

    Alors, deuxième petite parenthèse, justement, pour avoir un peu en transparence ton cœur sur la table, on va dire. Je te propose de paster à l'instant fromage ou dessert.

  • Speaker #1

    C'est fromage ou dessert ?

  • Christian

    T'es dans la logique ou dans l'émotion ?

  • Arnaud

    J'aimerais bien être un petit peu plus dans la logique. L'émotion, je ne me laisse pas emporter par toutes les émotions, mais si on n'écoute pas ces émotions, la logique c'est froid. Donc il faut une bonne dose d'émotion et un peu de logique pour éviter de partir complètement dans tous les sens.

  • Christian

    Compétition ou coopération ?

  • Arnaud

    Alors il n'y a qu'une seule compétition qui vaille à mon sens, c'est la compétition contre soi-même, se fixer des objectifs et développer. développer cette lutte contre soi-même, arriver à être meilleur, à rendre les choses meilleures. Donc compétition contre soi-même, coopération, oui, c'est au quotidien, tout n'est que coopération.

  • Christian

    Vie personnelle ou vie professionnelle ?

  • Arnaud

    Il faut arriver à mélanger les deux. Si on ne fait que l'un, c'est impossible. Je vais même te raconter une petite anecdote. Avant le Covid, même si je recommence à faire ça actuellement, avant le Covid, j'arrivais à partir entre 5 et 7 jours tous les mois. Partir en vacances. Alors en vacances, c'est aussi aller sourcer des fournisseurs, trouver des vignerons, mettre absente mes établissements pendant une semaine, quasiment une semaine par mois. Donc, d'arriver à y joindre l'utile et l'agréable.

  • Christian

    Non, mais c'est bien. Donc, il n'y a pas de séparation. C'est ce que tu dis.

  • Arnaud

    Difficile.

  • Christian

    Temps court ou temps long ?

  • Arnaud

    Les deux. Les deux, parce que le temps court construit le temps long, donc on ne peut pas viser que là.

  • Christian

    Merci Arnaud, on va passer à la troisième phase de ton engagement. Comment tu conçois justement ces relations de coopération avec les producteurs ou avec d'autres restaurants du Collège Culinaire de France ?

  • Arnaud

    Avec les producteurs, avec les gens, avec les échelles de travail, c'est un travail, d'abord c'est une relation de confiance. C'est une relation qui se construit, qui met du temps à se construire, mais où on fixe des objectifs communs et puis on construit les choses ensemble. Quand on a des demandes, quand on a des attentes, on fait appel à eux. Donc ça c'est extrêmement important. Et puis avec les autres restaurateurs du collège ou d'autres, c'est partager des expériences, partager des visions. Et comme je disais tout à l'heure, c'est aussi le fait d'être en permanence à l'écoute des tendances et de ce qui se fait. Voilà, de pouvoir partager des expériences et d'avoir en permanence les antennes sorties pour être capable de dire Attention, ça, ça monte, ça, ça descend, ça, ça ne va pas. Il faut faire très attention.

  • Christian

    Alors, tu l'as évoqué rapidement tout à l'heure, mais c'est important de comprendre quelle est ta relation avec tes équipes en interne. Parce qu'on sait bien qu'aujourd'hui, c'est difficile le recrutement, la gestion de ce qu'on appelle des ressources humaines. Comment tu conçois ça, toi, dans ton métier ?

  • Arnaud

    C'est fondamental. Il y a deux choses qui sont primordiales dans la restauration. Ce sont, un, les fournisseurs, la relation, comme on en a parlé, et les équipes. Sans les équipes, on a beau avoir le plus bel établissement, le mieux décoré de la terre, le plus bel emplacement, sans les équipes, rien, absolument rien n'est possible. Donc, je leur dis souvent, vous ne travaillez pas pour moi, mais vous travaillez avec moi. On travaille ensemble. On va réfléchir à des objectifs. Vous allez me donner les moyens dont vous avez besoin pour atteindre ces objectifs-là. Et c'est une relation confiance. Je fais confiance très, très, très rapidement. Il y a deux choses qui m'énervent particulièrement. C'est évidemment quand on trahit la confiance, mais aussi quand on n'assume pas ses erreurs. Celui dans mon entreprise, dans mon restaurant Mojo. Celui qui fait le plus derrière, c'est sans doute moi, mais parce que c'est peut-être moi qui en fais le plus. Se tromper, c'est pas très très grave. J'essaie de leur expliquer ça en leur disant faites, prenez des risques, engagez-vous. Si vous vous trompez, c'est pas très grave. Ce qui est grave, c'est de recommencer une deuxième fois. Vous vous trompez, comprenez pourquoi vous vous êtes trompé et remettez. Churchill disait, la réussite c'est savoir aller d'échec en échec avec enthousiasme. Donc c'est leur faire passer cette passion, leur faire confiance, les laisser... s'exprimer, les mettre en valeur, les écouter et puis vivre ce petit moment de vie ensemble, quand ils travaillent ensemble.

  • Christian

    Est-ce que tu observes des changements au niveau des nouvelles générations qui arrivent aujourd'hui dans ce métier, surtout après la Covid ?

  • Arnaud

    Oui, il y a eu beaucoup d'évolutions. On est sortis heureusement un petit peu de cette période où les jeunes faisaient de la restauration, non pas par passion mais par obligation, parce que c'était une voie de garage. en sortant de 3ème, et il y a une montée en puissance de jeunes passionnés, grâce à des émissions de télévision, grâce à Instagram, grâce à plein de choses, et oui, aujourd'hui, il y a une vraie montée de générations qui aiment les belles choses, et qui a envie de s'impliquer, de découvrir, et de partager nos valeurs.

  • Christian

    Tu l'as largement décrit tout à l'heure, mais comment mieux sensibiliser les citoyens sur le bien manger ? Le Collège Culinaire de France, vous avez, à côté du Collège Culinaire de France, développé une association qui s'appelle Manger Citoyens, aussi pour mobiliser les citoyens. Donc comment tu vois les choses là-dessus ?

  • Arnaud

    Première chose, c'est qu'il faut être exemplaire. Tout ce qu'on essaie de promouvoir, tout ce qu'on dit, il faut le faire. Il faut être convaincant, et pour être convaincant, il faut que les gens viennent et constatent ce que ça veut dire. in situ, donc d'être dans le pratique, le discours théorique est très bien, mais de faire comprendre, de montrer in situ ce que c'est, mais aussi bien avec des producteurs qui pour eux ne se correspondent pas forcément à leur façon de faire, à leur vision, d'arriver à les convaincre, donc c'est un vrai travail du quotidien, mais au-delà de la théorie, de la pratique, de la pratique, de la pratique et de l'exemplarité.

  • Christian

    Dernier point avant de conclure, je te propose qu'on ouvre maintenant le... peau de moutarde.

  • Speaker #1

    La moutarde me montonnait.

  • Christian

    Pour coup de gueule, sur quoi ? Sur ce qui existe ? Sur une pratique ? Sur une loi ? Je sais pas.

  • Arnaud

    Il y en a beaucoup, il y a beaucoup de sujets, mais en fait, c'est plus une inquiétude, une peur, c'est la montée en puissance de l'intelligence artificielle, qui est un sujet très très vaste, qui ne concerne pas que la restauration et le bien-danger. J'ai peur que cette nouvelle technologie-là pose d'énormes problèmes dans le futur. C'est quelque chose qui m'inquiète fondamentalement.

  • Christian

    Un sujet à débattre évidemment au Collège Culière de France. Merci, en tout cas, merci Arnaud de nous avoir reçus. En plus, nous enregistrons chez toi, au Mojo, qui est devenu un studio d'enregistrement. Et peut-être en toute confidence. Peux-tu nous donner une ou deux bonnes adresses de restos, indépendamment du tien, bien évidemment ?

  • Arnaud

    Il y a beaucoup de belles adresses à Paris. J'aime beaucoup un restaurant qui se retrouve rue Saint-Roch, qui s'appelle La Cordonnerie, qui est un établissement qui se retrouve dans le flanc de l'église Saint-Roch, comme il y en avait à l'époque du Moyen-Âge. Et un tout petit établissement avec poutre apparente. Il doit y avoir 8-10 tables avec une cuisine ouverte et avec un... avec un gars passionné en cuisine qui a un petit jardin, la chance d'avoir un petit jardin, et qui produit et qui sert ce qu'il a chez lui. Donc c'est un bel endroit, la cordonnerie rue Saint-Roch.

  • Christian

    C'est génial, donc on vient au Mojo puis on a en même temps plein d'autres appareils. Voilà, c'est génial. Alors Arnaud, avant de nous quitter, est-ce que tu connais Émilie et Lucille Batafahano ? Ce sont deux passionnarias de la gastronomie et du pouvoir de la passion artisanale. Elles viennent elles aussi d'être amenées au Collège Culinaire de France il y a quelques mois. Mais natives de Malakoff, elles ont une démarche qui renverse la table. Alors, si on veut tout savoir, c'est vendredi dans 15 jours, un nouvel épisode à surtout ne pas manquer.

  • Speaker #1

    Vous venez de déguster un épisode de La Terre à l'assiette, le podcast qui vous donne envie de bien manger. Nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie. Si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef, et en vous abonnant. Vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous.

Description

Découvrez Arnaud Sauvé, artisan engagé et propriétaire du restaurant Mojo à Paris, reconnu par le Collège Culinaire de France.

Dans cet épisode, il partage sa vision d’une cuisine artisanale de convivialité,authenticité et innovation se rencontrent.

Comment Arnaud insuffle-t-il ses principes dans l’assiette ? Comment conjugue-t-il passion, qualité et défis économiques ?

Une conversation inspirante sur l’importance des relations humaines, le respect des producteurs derrière les produits et l’avenir de la gastronomie artisanale.


"L'obstacle principal aujourd'hui, la vraie difficulté, c'est le manque d'éducation et de formation des gens qui ont été habitués pendant des années à des goûts stéréotypés, à des choses extrêmement industrielles, très linéaires, et leur apporter et leur faire découvrir autre chose, il y a deux étapes. Un, les convaincre d'essayer, et deux, leur expliquer pourquoi ? est-ce qu'on fait, est évidemment différent et mieux et transporte des valeurs que les autres choses, les choses industrielles, ne véhiculent pas. Donc c'est extrêmement important, mais c'est un travail de longue haleine."

Arnaud Sauvé


Le Collège Culinaire de France est une association fondée en 2011 à l'initiative de quinze grands chefs restaurateurs à l'instar d'Alain Ducasse, Joël Robuchon, Yannick Alléno, Paul Bocuse, Alain Dutournier, Gilles Goujon, Michel Guérard, Marc Haeberlin, Régis Marcon, Thierry Marx, Gérald Passedat, Laurent Petit, Anne-Sophie Pic, Guy Savoy et Pierre Troisgros. Le Collège Culinaire de France est la seule association, à ce jour, initiée par le plus grand rassemblement de chefs français reconnus et incontestés, qui s’emploie, concrètement, sur le terrain, à relier des Producteurs et Artisans de Qualité avec des Restaurants de Qualité de toutes catégories. Elle rassemble ceux qui œuvrent pour une vision d’avenir du métier, et fédère tous ceux qui s’engagent sur des synergies de valeurs et de pratiques partagées.


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Crédits

En cuisine :

Un foodcast mitonnée aux petits oignons par Suniwan

Illustration servie par Hugo Girard

Un épisode enregistré au Mojo dans le 17éme arrondissement de Paris


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Christian

    Neuf rues du général L'Enreusac à Paris, dans le 17e arrondissement, vient d'être reconnue par le Collège Culinaire de France. C'est un établissement où il insuffle ses valeurs et son engagement pour une cuisine de gastronomie artisanale. Aujourd'hui, Arnaud décrypte sans cesse les mécanismes et les actualités qui font obstacle à sa passion pour la gastronomie. Il essaie en continu des pistes de solutions et d'innovation dans sa façon de travailler. Alors comment cet engagement se concrétise-t-il dans l'assiette et dans le pilotage de son restaurant ? Pourquoi a-t-il fait de l'innovation un des moteurs de son activité ? Comment faire face à l'industrialisation galopante lorsqu'on est un restaurateur indépendant ? Autant de questions complexes mais passionnants auxquelles nous allons tenter de répondre avec Arnaud.

  • Speaker #1

    Une émission présentée par Christian Regouby.

  • Christian

    Bonjour Arnaud.

  • Arnaud

    Bonjour Christian, bonjour à tous.

  • Christian

    Alors Arnaud, raconte-nous un petit peu la manière dont tu te définis, c'est quoi ton projet ? Quelles sont tes principales convictions ?

  • Arnaud

    Alors déjà, moi je ne suis pas issu du serail de la restauration, ce qui me donne une vision un petit peu différente de pas mal de mes collègues restaurateurs. Mon ambition et mon projet est avant toute chose de créer des lieux qui sont des lieux de convivialité et de partage. Et pour arriver à cet objectif, j'ai monté différents établissements, dont le Mojo, en prenant des règles de base qui sont assez simples. Convivialité, conviction et partage.

  • Christian

    Alors ce partage, bien évidemment, c'est un partage d'abord avec les convives qui viennent chez toi. Donc ça veut dire que ton lieu, il émane de ton lieu un certain nombre de choses.

  • Arnaud

    Oui, alors la restauration, avant toute chose, est un endroit, un lieu de partage et de convivialité. Ce qu'il y a dans l'assiette est important et primordial, mais l'accueil, l'atmosphère, l'ambiance et tout ce qui fait la restauration tournent autour de différentes règles. Qualité d'accueil, qualité des produits, sourire, convivialité. On vient dans un restaurant évidemment pour manger, mais aussi pour vivre une expérience et partager des moments avec ses convives.

  • Christian

    C'est pour ça que souvent on dit, on en a parlé ensemble, c'est comme à la maison, c'est un peu un faux-semblant. Parce que si on est comme à la maison...

  • Arnaud

    C'est ça, c'est si on est à la maison, si on est comme à la maison, on reste à la maison. Donc charge au restaurateur d'amener autre chose que ce que les gens peuvent faire à la maison. Ce qu'ils peuvent très bien faire chez eux. Mais on se doit d'apporter autre chose. Donc ça, c'est un équilibre assez subtil et surtout c'est très subjectif. Et c'est quelque chose qui change en permanence. Les attentes des gens, des consommateurs, des convives, changent régulièrement. Donc il faut être en permanence à l'écoute, mais on en parlera tout à l'heure, à l'écoute des tendances du marché et de ce qui fait l'ambiance du moment.

  • Christian

    Quand tu dis c'est subjectif, c'est fondamental parce qu'on pourrait dire c'est du marketing, mais tel que tu le conçois en termes d'artisan, c'est pas du marketing. C'est quelque chose qui émane aussi de ta subjectivité et de qui tu es.

  • Arnaud

    Complètement, oui. On ne fait pas les choses uniquement pour faire tourner une entreprise, même si nous sommes aussi avant tout des chefs d'entreprise. On fait ça aussi pour se faire plaisir, pour faire plaisir aux gens qui viennent dans nos établissements. Donc si on ne raisonnait exclusivement qu'en termes de marketing, avec une dimension un tout petit peu plus large que juste marketing, ça serait aussi une dimension de gestion, d'achat, de maîtrise au cordeau des coûts. Et si on ne raisonne, il y en a qui raisonnent comme ça. Mais si on raisonne comme ça, on passe à côté de beaucoup de choses, je crois. Donc j'ai d'autres règles. Je me suis construit d'autres règles.

  • Christian

    C'est-à-dire une restauration qui a une âme, en fait.

  • Arnaud

    Avant toute chose, la restauration sans âme, c'est pas de la restauration. Il faut faire autre chose. Donc la restauration, c'est une âme. Et cette âme, elle est non seulement incarnée par le restaurateur, mais également par l'équipe. C'est un travail d'équipe. Même si la personne qui dirige le restaurant est le chef d'orchestre, les autres sont les... Les premiers violons, et ils jouent la partition.

  • Christian

    C'est un point important, on va en reparler, mais sur cette première phase, j'aurais posé une dernière question. Comment intègres-tu le temps ? Le passé, le présent, le futur, parce qu'on est toujours dans l'immédiateté aujourd'hui. Comment toi tu intègres le temps ?

  • Arnaud

    C'est un difficile équilibre entre le temps long et le temps court, arriver à construire quelque chose dans la longueur sans oublier le quotidien. Donc c'est-à-dire que... Alors il y a quand même quelque chose d'extrêmement intéressant et important à comprendre, c'est que nous sommes dans des métiers... En tout cas pour les restaurateurs, on voit très vite le résultat de ce qu'on fait. Si on décide un plat du jour le matin, si à midi il ne plaît pas, on a le résultat immédiatement.

  • Christian

    Donc c'est une sanction.

  • Arnaud

    Elle est immédiate et puis elle se paye cash. Non seulement elle se paye avec un avis négatif du client et qui aujourd'hui a la possibilité sur les réseaux sociaux de mettre une mauvaise note ou un mauvais commentaire. Donc la gestion du temps est quelque chose de primordial. Il ne faut pas perdre de vue ce qu'on est. Et où est-ce qu'on veut aller ? Et les choix au quotidien ne sont que la construction d'un futur, d'un futur à venir qui se veut plus ou moins long. Mais les deux vont ensemble, on ne peut pas séparer les deux.

  • Christian

    Alors on va aller plus loin dans tout ça, mais avant on va se faire une petite parenthèse qui s'appelle Toc toc qui est là ?

  • Speaker #1

    Toc toc qui est là ?

  • Christian

    Alors Arnaud, si tu étais un animal, tu serais quoi ?

  • Arnaud

    Alors je serais un animal de terre, je ne suis pas montagnard, je ne suis pas marin, la flotte me fout une trouille colossale. Donc plutôt un animal de terre, de forêt, allez, soyons un petit peu orgueilleux, un cerf.

  • Christian

    Bravo, et une saison ?

  • Arnaud

    L'automne, l'automne pour les couleurs et les odeurs.

  • Christian

    Un des cinq sens toi qui es cuisinier ?

  • Arnaud

    Le goût.

  • Christian

    Un mot ? Un mot central pour toi ?

  • Arnaud

    Envie. Sans envie, on ne fait rien.

  • Christian

    Un plat ?

  • Arnaud

    Un plat, oula, alors là ça se bouscule, il y en aurait beaucoup, beaucoup, beaucoup. Un peu le côté Madeleine de Proust, j'irais... Allez, je vais en citer deux, si tu m'autorises. Je vais faire un classique et un petit peu plus déluré. Le classique, ça serait des joues de bœuf braisé au vin blanc. Et le... un petit peu plus fou, ayant des origines scandinaves, des filets de filets de harangue marinés avec une marinade sucrée. C'est très particulier, il faut être originaire de là-haut pour apprécier. Mais sinon, c'est... Arrête de compliquer !

  • Christian

    Tu nous mets l'eau à la bouche.

  • Arnaud

    Avec du pain noir, servi sur du pain grillé, bien sûr.

  • Christian

    Et ta boisson préférée ?

  • Arnaud

    Le vin. Bien,

  • Christian

    alors maintenant, on passe à une deuxième phase. En fait, au Collège Culinaire de France, vous vous définissez comme artisan militant de la qualité. Ça veut dire quoi ?

  • Arnaud

    Ça veut dire qu'au quotidien, on s'oblige, non parce que c'est notre nature, on fait un choix, on fait un ensemble de sélections, aussi bien sur les solides, sur les liquides, de manière genre, de travailler avec des gens qui ont non seulement des produits de qualité, qui ont également des produits de saison et qui partagent notre vision. Et très souvent, on se rend compte... que les producteurs, que ce soit des maraîchers ou des vignerons, ont des produits qui leur ressemblent. Si le vigneron n'est pas généreux, il va avoir un vin sec, un petit peu austère. Si le gars n'aime pas sa betterave, elle va être un petit peu... Elle ne va pas être très sucrée, elle ne va pas avoir beaucoup de goût. Donc d'arriver à trouver au quotidien, ce qui prend du temps, ce qui donne parfois des dégustations un petit peu improbables à 9h du matin avec des bouteilles de blanc. Mais trouver des gens qui sont passionnés, qui ont les mêmes critères et les mêmes recherches que nous. Donc d'arriver à trouver ces personnes-là avec qui on va partager des moments et mettre en valeur leurs produits aussi. Ils sont extrêmement heureux et très sensibles à ce qu'on fait de leurs produits et au fait que nos clients, nos convives apprécient.

  • Christian

    Ce qui est génial dans ce que tu dis, c'est que je vous entends souvent dire derrière chaque produit, il y a un visage. Et en fait, ça dit bien, ce n'est pas simplement le produit, c'est l'homme ou la femme qui est derrière.

  • Arnaud

    C'est fondamental. Sans ça, on ne fait absolument rien. Donc on est très loin de... des stéréotypes et de l'industrialisation.

  • Christian

    C'est pourquoi peut-être vous ne définissiez pas comme un label au collège, vous définissiez plutôt comme une appellation, un drapeau, une cause à défendre.

  • Arnaud

    Oui, une ligne commune, une vision commune à défendre. Mais le côté à défendre, on va dire qu'on est uniquement sur une phase défensive et je veux qu'il y ait une phase offensive, une phase partagée, très important.

  • Christian

    Vous conquérez l'avenir plutôt que défendre le...

  • Arnaud

    Oui, alors on ne va pas remporter toutes les victoires, mais en tout cas, au-delà de s'inscrire juste dans une sauvegarde, je pense qu'il y a une véritable attente de fond, au-delà de la qualité, mais d'une vision de valeur, de partage. Et on doit être les chantres au quotidien de cette vision-là.

  • Christian

    C'est quoi les obstacles à surmonter pour faire ce métier de cette façon-là ?

  • Arnaud

    Alors, je pense qu'il nous faudrait des heures. pour faire la liste de tous les obstacles. Mais l'obstacle principal aujourd'hui, la vraie difficulté, c'est le manque d'éducation et de formation des gens qui ont été habitués pendant des années à des goûts stéréotypés, à des choses extrêmement industrielles, très linéaires, et leur apporter et leur faire découvrir autre chose, il y a deux étapes. Un, les convaincre d'essayer, et deux, leur expliquer pourquoi ? est-ce qu'on fait, est évidemment différent et mieux et transporte des valeurs que les autres choses, les choses industrielles, ne véhiculent pas. Donc c'est extrêmement important, mais c'est un travail de longue haleine. On ne gagnera pas tout le monde, mais en tout cas, on y arrivera petit à petit, non seulement à partager ces valeurs-là, et surtout, surtout, arriver à ce que les producteurs, quels qu'ils soient, les gens qui partagent ces valeurs-là, qui sont... Les petits artisans du quotidien, les vignerons, tous ces gens-là continuent à vivre, se développent et se redéveloppent. Reprennent le pas, pas qu'à Paris ou dans les grandes villes, mais dans tous les territoires français, replènent le pas petit à petit.

  • Christian

    Ça éclaire ce que vous dites en disant que c'est de la relation humaine ajoutée, en fait, c'est ça que vous apportez au premier.

  • Arnaud

    Mais c'est que du bonheur. C'est le fondement même des choses. S'il n'y a pas de relation humaine, s'il n'y a pas ce côté... On reçoit, on voit, on se serre, ça serre la main et on trinque ensemble. Virtuel, c'est bien, il en faut, on ne peut pas faire fi de tout ça. Mais il faut impérativement vivre les choses, sentir, recevoir, pouvoir serrer les gens dans ses bras. C'est extrêmement important.

  • Christian

    Alors, deuxième petite parenthèse, justement, pour avoir un peu en transparence ton cœur sur la table, on va dire. Je te propose de paster à l'instant fromage ou dessert.

  • Speaker #1

    C'est fromage ou dessert ?

  • Christian

    T'es dans la logique ou dans l'émotion ?

  • Arnaud

    J'aimerais bien être un petit peu plus dans la logique. L'émotion, je ne me laisse pas emporter par toutes les émotions, mais si on n'écoute pas ces émotions, la logique c'est froid. Donc il faut une bonne dose d'émotion et un peu de logique pour éviter de partir complètement dans tous les sens.

  • Christian

    Compétition ou coopération ?

  • Arnaud

    Alors il n'y a qu'une seule compétition qui vaille à mon sens, c'est la compétition contre soi-même, se fixer des objectifs et développer. développer cette lutte contre soi-même, arriver à être meilleur, à rendre les choses meilleures. Donc compétition contre soi-même, coopération, oui, c'est au quotidien, tout n'est que coopération.

  • Christian

    Vie personnelle ou vie professionnelle ?

  • Arnaud

    Il faut arriver à mélanger les deux. Si on ne fait que l'un, c'est impossible. Je vais même te raconter une petite anecdote. Avant le Covid, même si je recommence à faire ça actuellement, avant le Covid, j'arrivais à partir entre 5 et 7 jours tous les mois. Partir en vacances. Alors en vacances, c'est aussi aller sourcer des fournisseurs, trouver des vignerons, mettre absente mes établissements pendant une semaine, quasiment une semaine par mois. Donc, d'arriver à y joindre l'utile et l'agréable.

  • Christian

    Non, mais c'est bien. Donc, il n'y a pas de séparation. C'est ce que tu dis.

  • Arnaud

    Difficile.

  • Christian

    Temps court ou temps long ?

  • Arnaud

    Les deux. Les deux, parce que le temps court construit le temps long, donc on ne peut pas viser que là.

  • Christian

    Merci Arnaud, on va passer à la troisième phase de ton engagement. Comment tu conçois justement ces relations de coopération avec les producteurs ou avec d'autres restaurants du Collège Culinaire de France ?

  • Arnaud

    Avec les producteurs, avec les gens, avec les échelles de travail, c'est un travail, d'abord c'est une relation de confiance. C'est une relation qui se construit, qui met du temps à se construire, mais où on fixe des objectifs communs et puis on construit les choses ensemble. Quand on a des demandes, quand on a des attentes, on fait appel à eux. Donc ça c'est extrêmement important. Et puis avec les autres restaurateurs du collège ou d'autres, c'est partager des expériences, partager des visions. Et comme je disais tout à l'heure, c'est aussi le fait d'être en permanence à l'écoute des tendances et de ce qui se fait. Voilà, de pouvoir partager des expériences et d'avoir en permanence les antennes sorties pour être capable de dire Attention, ça, ça monte, ça, ça descend, ça, ça ne va pas. Il faut faire très attention.

  • Christian

    Alors, tu l'as évoqué rapidement tout à l'heure, mais c'est important de comprendre quelle est ta relation avec tes équipes en interne. Parce qu'on sait bien qu'aujourd'hui, c'est difficile le recrutement, la gestion de ce qu'on appelle des ressources humaines. Comment tu conçois ça, toi, dans ton métier ?

  • Arnaud

    C'est fondamental. Il y a deux choses qui sont primordiales dans la restauration. Ce sont, un, les fournisseurs, la relation, comme on en a parlé, et les équipes. Sans les équipes, on a beau avoir le plus bel établissement, le mieux décoré de la terre, le plus bel emplacement, sans les équipes, rien, absolument rien n'est possible. Donc, je leur dis souvent, vous ne travaillez pas pour moi, mais vous travaillez avec moi. On travaille ensemble. On va réfléchir à des objectifs. Vous allez me donner les moyens dont vous avez besoin pour atteindre ces objectifs-là. Et c'est une relation confiance. Je fais confiance très, très, très rapidement. Il y a deux choses qui m'énervent particulièrement. C'est évidemment quand on trahit la confiance, mais aussi quand on n'assume pas ses erreurs. Celui dans mon entreprise, dans mon restaurant Mojo. Celui qui fait le plus derrière, c'est sans doute moi, mais parce que c'est peut-être moi qui en fais le plus. Se tromper, c'est pas très très grave. J'essaie de leur expliquer ça en leur disant faites, prenez des risques, engagez-vous. Si vous vous trompez, c'est pas très grave. Ce qui est grave, c'est de recommencer une deuxième fois. Vous vous trompez, comprenez pourquoi vous vous êtes trompé et remettez. Churchill disait, la réussite c'est savoir aller d'échec en échec avec enthousiasme. Donc c'est leur faire passer cette passion, leur faire confiance, les laisser... s'exprimer, les mettre en valeur, les écouter et puis vivre ce petit moment de vie ensemble, quand ils travaillent ensemble.

  • Christian

    Est-ce que tu observes des changements au niveau des nouvelles générations qui arrivent aujourd'hui dans ce métier, surtout après la Covid ?

  • Arnaud

    Oui, il y a eu beaucoup d'évolutions. On est sortis heureusement un petit peu de cette période où les jeunes faisaient de la restauration, non pas par passion mais par obligation, parce que c'était une voie de garage. en sortant de 3ème, et il y a une montée en puissance de jeunes passionnés, grâce à des émissions de télévision, grâce à Instagram, grâce à plein de choses, et oui, aujourd'hui, il y a une vraie montée de générations qui aiment les belles choses, et qui a envie de s'impliquer, de découvrir, et de partager nos valeurs.

  • Christian

    Tu l'as largement décrit tout à l'heure, mais comment mieux sensibiliser les citoyens sur le bien manger ? Le Collège Culinaire de France, vous avez, à côté du Collège Culinaire de France, développé une association qui s'appelle Manger Citoyens, aussi pour mobiliser les citoyens. Donc comment tu vois les choses là-dessus ?

  • Arnaud

    Première chose, c'est qu'il faut être exemplaire. Tout ce qu'on essaie de promouvoir, tout ce qu'on dit, il faut le faire. Il faut être convaincant, et pour être convaincant, il faut que les gens viennent et constatent ce que ça veut dire. in situ, donc d'être dans le pratique, le discours théorique est très bien, mais de faire comprendre, de montrer in situ ce que c'est, mais aussi bien avec des producteurs qui pour eux ne se correspondent pas forcément à leur façon de faire, à leur vision, d'arriver à les convaincre, donc c'est un vrai travail du quotidien, mais au-delà de la théorie, de la pratique, de la pratique, de la pratique et de l'exemplarité.

  • Christian

    Dernier point avant de conclure, je te propose qu'on ouvre maintenant le... peau de moutarde.

  • Speaker #1

    La moutarde me montonnait.

  • Christian

    Pour coup de gueule, sur quoi ? Sur ce qui existe ? Sur une pratique ? Sur une loi ? Je sais pas.

  • Arnaud

    Il y en a beaucoup, il y a beaucoup de sujets, mais en fait, c'est plus une inquiétude, une peur, c'est la montée en puissance de l'intelligence artificielle, qui est un sujet très très vaste, qui ne concerne pas que la restauration et le bien-danger. J'ai peur que cette nouvelle technologie-là pose d'énormes problèmes dans le futur. C'est quelque chose qui m'inquiète fondamentalement.

  • Christian

    Un sujet à débattre évidemment au Collège Culière de France. Merci, en tout cas, merci Arnaud de nous avoir reçus. En plus, nous enregistrons chez toi, au Mojo, qui est devenu un studio d'enregistrement. Et peut-être en toute confidence. Peux-tu nous donner une ou deux bonnes adresses de restos, indépendamment du tien, bien évidemment ?

  • Arnaud

    Il y a beaucoup de belles adresses à Paris. J'aime beaucoup un restaurant qui se retrouve rue Saint-Roch, qui s'appelle La Cordonnerie, qui est un établissement qui se retrouve dans le flanc de l'église Saint-Roch, comme il y en avait à l'époque du Moyen-Âge. Et un tout petit établissement avec poutre apparente. Il doit y avoir 8-10 tables avec une cuisine ouverte et avec un... avec un gars passionné en cuisine qui a un petit jardin, la chance d'avoir un petit jardin, et qui produit et qui sert ce qu'il a chez lui. Donc c'est un bel endroit, la cordonnerie rue Saint-Roch.

  • Christian

    C'est génial, donc on vient au Mojo puis on a en même temps plein d'autres appareils. Voilà, c'est génial. Alors Arnaud, avant de nous quitter, est-ce que tu connais Émilie et Lucille Batafahano ? Ce sont deux passionnarias de la gastronomie et du pouvoir de la passion artisanale. Elles viennent elles aussi d'être amenées au Collège Culinaire de France il y a quelques mois. Mais natives de Malakoff, elles ont une démarche qui renverse la table. Alors, si on veut tout savoir, c'est vendredi dans 15 jours, un nouvel épisode à surtout ne pas manquer.

  • Speaker #1

    Vous venez de déguster un épisode de La Terre à l'assiette, le podcast qui vous donne envie de bien manger. Nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie. Si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef, et en vous abonnant. Vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous.

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