- Speaker #0
A quoi ressemblerait ta crèche si tu pouvais t'entourer des meilleurs ? Moi, c'est ce que j'ai fait. Pendant les 15 dernières années, de la crèche collective associative à la micro-crèche privée, j'ai tout expérimenté. La petite enfance est un métier à forte contrainte, mais aussi à forte valeur ajoutée. Avec les meilleurs psys, pédiatres, directeurs pédagogiques et les meilleures formations, j'ai pu développer la qualité d'accueil et la qualité de vie au travail. Alors si toi aussi tu es motivé par la qualité, Bienvenue dans Références Petite Enfance, bienvenue dans ton podcast. Mon invité du jour a un regard à 380 degrés sur la petite enfance. Céline a exercé tous les métiers de la petite enfance et même du Care. Avec six diplômes différents, elle passe de l'accueil collectif à individuel, du sanitaire à l'éducatif, du terrain à la direction, de la pratique à la formation des professionnels. C'est donc une vision globale basée sur près de 20 ans d'expérience. que je vous propose d'entendre aujourd'hui. Alors, qu'est-ce qu'apportent les différentes formations ? Quels sont les points forts de chaque métier ? Comment fidéliser les professionnels de la petite enfance ? Et quel management résoudra le problème de la qualité d'accueil ? Ce sont les questions de l'épisode d'aujourd'hui. Bonne écoute ! Alors Céline, moi je t'ai entendue au Girafes Awards, au ministère des Solidarités, où j'ai découvert ton parcours qui est hyper riche, parce qu'en fait, toi t'as fait... T'es passée un peu par tous les diplômes et tous les métiers dans la petite enfance et t'es aussi allée en EHPAD. Donc on peut dire que t'as une vision de l'accueil qui est large, à la fois l'accueil des jeunes enfants mais aussi des personnes âgées. T'as travaillé auprès des petits-enfants, même à l'hôpital. Et t'as un peu tous les diplômes, le côté sanitaire et le côté éducatif. Si j'ai bien fait mes devoirs, je crois que t'as fait, après ton bac, t'as fait la psycho. Ensuite t'as fait un CAP petite enfance. Ensuite... t'es devenue auxiliaire de puriculture, ensuite t'es devenue aide-soignante, ensuite t'es devenue assistante maternelle et ensuite t'es devenue éducatrice de jeunes enfants. C'est ça,
- Speaker #1
t'as tout dans l'ordre.
- Speaker #0
Et maintenant t'es formatrice en plus. Donc ça fait quand même un large, très large panel de métiers, d'expériences et de compétences. Qu'est-ce qui t'a amenée en fait à avoir envie de travailler avec les jeunes enfants déjà ?
- Speaker #1
Je trouve ça assez rigolo parce que finalement ma vision du métier a beaucoup évolué. Je suis arrivée effectivement parce que j'avais un feeling qui passait bien avec les enfants, que j'étais attirée par le fait de les voir sourire et de voir qu'il y avait un échange fluide entre nous, juste par du non-verbal. C'était ça qui m'attirait au démarrage, de voir ce côté un peu magique du non-verbal qui se met en place où en quelques secondes, on a un sourire et du coup, ça nous encourage à continuer l'échange.
- Speaker #0
Mais ça, tu l'as découvert quand ?
- Speaker #1
Très jeune, j'ai fait des babysitting très tôt. Très jeune, c'était quelque chose qui était facile pour moi et qui m'attirait, cette communication non-verbale.
- Speaker #0
Donc, tu avais de la facilité dans ce rapport à l'enfant, dans le non-verbal, et tu t'ai dit, il faut que je trouve des études dans cette direction ?
- Speaker #1
Comme beaucoup de jeunes, j'ai cherché un peu mon orientation. Ça s'est un peu imposé comme une évidence que cette compétence-là était déjà... était déjà en partie là.
- Speaker #0
Ouais, sujet très actuel, l'orientation. Alors pour moi en plus, parce que ma fille est en terminale et qu'on doit remplir Parcoursup et que c'est vraiment, je trouve, très stressant à cet âge-là de savoir ce que tu veux faire. Toi, tu avais déjà une idée. Comment ça a été perçu ? Tu viens de quel milieu déjà au niveau de ta famille ? Parce que c'est vrai que les métiers de la petite enfance ne sont pas forcément valorisés. Donc, comment ça a été perçu ? Et dans quel contexte familial tu as évolué ?
- Speaker #1
Et bien, pour rien de cacher, ma mère rêvait que je sois avocate.
- Speaker #0
Voilà, donc elle a été déçue.
- Speaker #1
Bah du coup, voilà, pour eux, c'était une évidence. Et puis en fait, pour les profs aussi, voilà, j'avais des bonnes notes. Donc c'était une évidence que je fasse du général et on m'a jamais parlé des filières pro. Donc voilà, j'ai fait bêtement du général jusqu'au bout. Et c'est pour ça que j'ai atterri en psycho. En fait, c'est le domaine en études sup à la fac où je me sentais, voilà, le plus... Enfin, où ça me restait le plus évident, le plus adapté. Enfin voilà, la psycho, ça m'intéressait, bon. Sauf qu'en fait, on nous a dit très rapidement qu'il y avait très peu de débouchés. Et voilà, du coup, je me suis questionnée sur qu'est-ce que je peux faire qui m'intéresse et qui soit dans quelque chose d'un peu plus concret où il y a des débouchés. Et en fait, j'ai commencé par le concours d'orthophoniste. Puis, en fait, c'est des métiers où l'accès se fait que par concours. Et ou bien souvent, il faut avoir fait plusieurs années de prépa, etc. pour pouvoir rentrer en fait. Donc voilà, j'ai vite compris que finalement, les compétences et l'expérience étaient nécessaires pour rentrer en formation en fait sur ces filières-là. Parce que donc j'ai fait au démarrage le concours d'orthophoniste et dans la foulée le concours d'éduc de jeunes enfants.
- Speaker #0
D'accord, et tu n'as eu ni l'un ni l'autre ?
- Speaker #1
Et j'ai eu ni l'un ni l'autre, et en fait j'ai compris, parce que vraiment c'était dans les questions des examinateurs, j'ai compris qu'il fallait de l'expérience pour rentrer.
- Speaker #0
D'accord, mais il n'y a pas de... Pour toi, il n'y a pas de... Enfin, il y en a quand même beaucoup qui entrent sans expérience. Tu dirais que c'est étonnamment élitiste ? Enfin, c'est quoi ton regard là-dessus, justement ?
- Speaker #1
Moi, j'ai eu l'impression, sur les retours que j'ai eus ensuite, que c'est quand même de plus en plus souvent le cas. où ça devient de plus en plus élitiste, en fait, avec cette histoire de prépa qui coûte une fortune en plus pour accéder au concours.
- Speaker #0
C'était en quelle année, ça ?
- Speaker #1
2005, donc ça date un peu.
- Speaker #0
Et tes parents, ils y faisaient quoi comme job ?
- Speaker #1
Mon père, il était dans les assurances. Il avait déjà fait, lui, une reconversion parce qu'il vient de la restauration à la base, donc très bon niveau de salaire et niveau bac plus deux, grosso modo. Et ma mère venait de la restauration aussi avec un niveau bac et déjà une reconversion aussi.
- Speaker #0
Donc, il savait aussi que... On pouvait évoluer sans avoir forcément des bacs plus 5.
- Speaker #1
C'est ça. Après, ça a quand même mis un coup. Tu vois, quand je suis passée de la fac de psycho au CAP petite enfance, voilà, ils ont un peu accusé le coup quand même. Ce n'est pas si simple que ça d'accepter que je retourne à un CAP alors que j'avais déjà un bac.
- Speaker #0
Ils étaient inquiets ou déçus ? C'était quoi leur réaction ?
- Speaker #1
Oui, je dirais un peu des deux. Un peu inquiets, un peu déçus. Et puis en fait, moi, j'étais persuadée que c'était ce qu'il fallait faire. Et je n'ai pas trop laissé le choix. Voilà, j'ai dit je fonce, c'est ça que je veux faire. Et en fait, dès les premiers stages, c'est devenu une évidence en fait que c'était le métier que je voulais faire.
- Speaker #0
Alors le CAP petite enfance, tu le passes assez vite en fait ?
- Speaker #1
Oui, je l'ai passé tout de suite après. En fait, j'ai fait une année de psycho et j'ai passé le CAP tout de suite après.
- Speaker #0
Qu'est-ce que tu en as pensé, toi qui avais justement un parcours académique ? plutôt fort, des bonnes notes, etc. Intellectuellement, ça allait pour toi ? Tu avais un milieu social où on a des relations assez riches. Comment tu t'es sentie dans le CAP ? Est-ce que tu as eu l'impression que ce n'est pas du tout pour les personnes comme toi ? Que c'est un peu une voie de garage ? Comment tu l'as vécu ?
- Speaker #1
En fait, je l'ai fait par correspondance, le CAP. Tu n'as pas été confrontée. Donc, je n'ai pas été confrontée aux autres. Parce que je l'ai fait en parallèle de la fac. Donc, je ne me suis pas trop posé ce genre de questions. Et c'est même drôle parce que j'y suis allée un peu en dilettante, en me disant, c'est facile, c'est un niveau CAP, c'est facile. Et en fait, j'ai vite compris que non, il fallait travailler pour l'obtenir. Donc non, je ne dirais pas du tout que c'est une voie de garage. Il y a des connaissances et des compétences à acquérir.
- Speaker #0
C'était quoi les aspects que tu as dû le plus travailler ? Les apports qui t'ont semblé les plus... important, technique ?
- Speaker #1
Les choses qui étaient les moins évidentes pour moi, c'était les choses très techniques, les cours autour de la bactérie, le virus, même les différents produits d'entretien, etc. En fait, c'est très technique, quand on est sur ces apports-là théoriques, c'est poussé finalement et ça ne s'improvise pas. Il y a vraiment du contenu à acquérir.
- Speaker #0
Alors, tu sais qu'aujourd'hui, il y a un projet de loi qui est à l'étude. dans lequel on remet en question la possibilité de passer le CAP en distance. Donc aujourd'hui, on dit en distanciel. Toi, tu dis par correspondance parce que tu es de la génération précédente,
- Speaker #1
on va dire. C'est que par le CNED, on recevait par correspondance des manuels papiers. En fait, c'est pour ça. Maintenant, ce n'est plus le cas. Effectivement, tout est numérisé, mais voilà.
- Speaker #0
Oui, on va dire que c'est un peu le même principe. L'idée, c'est quand même de le passer par correspondance. Donc toi... Par rapport à cette remise en question du mode de fonctionnement, qu'est-ce que tu en penses ? Moi, j'ai l'impression que tous ces formats digitaux, ils permettent d'élargir quand même la capacité de formation, puisqu'on est dans des difficultés aussi de territoire, etc. Pour que les élèves puissent passer leur diplôme, il y a pas mal de freins. Mais voilà, il y a toute une polémique qui dit que peut-être qu'on est moins bien formés à distance. Qu'est-ce que tu en penses, toi ? Toi qui l'as vécu de l'intérieur.
- Speaker #1
Non, moi je ne suis pas trop d'accord avec ça. En fait, il y avait des stages déjà obligatoires, donc la partie pratique, elle était là aussi. Et en fait, moi, la problématique que je soulèverais plus, c'est l'autonomie du candidat. Parce que forcément, quand on est en distanciel, il faut trouver un rythme de travail suffisant pour acquérir ses compétences théoriques. Donc, moi, la problématique, je la verrais plutôt là parce qu'effectivement, les formateurs qui accompagnent sont moins présents. Enfin, voilà, il faut les solliciter, ils ne viennent pas à nous. Enfin, voilà, il y a des freins plus sur l'autonomie, je dirais, du candidat.
- Speaker #0
Est-ce que ces freins-là ne sont pas… Une forme de barrière à l'entrée qui peut être intéressante aussi, puisque quand tu recrutes un pro de la petite enfance, et s'il a réussi à le faire en autonomie, c'est peut-être une preuve aussi de son autonomie, disons, dans un contexte professionnel.
- Speaker #1
L'un n'enlève pas l'autre. En fait, quand on est en présentiel, on peut développer de l'autonomie aussi, ça n'empêche rien. Mais effectivement, pour moi, c'est même une gageur de travail personnel et d'engagement dans le travail, effectivement, d'être en distanciel. Donc moi, je vois plutôt ça d'un œil positif, effectivement.
- Speaker #0
Alors, tu commences à l'hôpital et puis ensuite, tu te tournes vers la crèche et tu découvres le métier dans une grosse structure de 60 berceaux qui, en plus, fait partie d'un grand groupe. Donc là, tu as découvert plusieurs aspects du métier qui nous intéressent en ce moment dans le secteur, avec tout ce qui se passe, toutes les réformes en cours, les réflexions. D'une part, la taille de la structure et d'autre part, la taille du groupe et le fait que ce soit un groupe privé. Maintenant, avec le recul, parce que c'était il y a quand même presque 20 ans, comment tu as vécu cette expérience et quel regard tu portes sur les grandes crèches et les grands groupes de crèches ? Toi qui l'as vécu, encore une fois, de l'intérieur, je ne te parle pas d'opinion politique.
- Speaker #1
C'est assez mitigé. En fait, ça me questionne beaucoup sur la mobilité qui serait choisie par les professionnels. Parce qu'en fait, moi, je suis venue à la crèche parce que le projet me faisait de l'œil. Parce que, voilà, à la lecture du projet de cette structure-là, j'avais des étoiles dans les yeux. Je me sentais très bien dans mon travail à l'hôpital, mais voilà, j'étais jeune professionnelle aussi, j'avais envie de découvrir plein de choses, et ce projet m'a vraiment mis des étoiles dans les yeux, et du coup, j'ai eu envie de foncer. Donc pour moi, effectivement, un projet pédagogique, ça peut déjà donner envie à un candidat. Après, on voit se développer des projets hyper ambitieux. Et puis à l'écoute aussi de tes podcasts, j'ai fait du lien avec tout ça parce qu'un projet hyper ambitieux, c'est bien, mais ça peut être de la poudre aux yeux et ça peut favoriser aussi la déception des professionnels derrière. Et donc, pour le coup, c'est quand même un peu ce que j'ai vécu, même si ce que j'ai trouvé très riche à l'époque et que je n'ai jamais vécu ensuite, c'est qu'il y avait un référent pédagogique dans ce groupe. qui étaient garants du projet, qui venaient régulièrement dans les structures, qui observaient et qui valorisaient les postures professionnelles qui allaient dans le sens du projet. Donc, il y avait vraiment un travail pédagogique fort et ça, j'ai trouvé que c'était très porteur.
- Speaker #0
Donc, les moyens mis en œuvre dans un grand groupe et avec une grosse crèche, c'est ça qui t'a plu. Je pense que ça dépend aussi de la taille de la structure, pas que du groupe, de pouvoir avoir plusieurs types de métiers qui se concertent. Et d'être entourée. Alors, c'est assez hétérogène, en fait, dans le secteur en ce moment. C'est-à-dire que ce qui est difficile, c'est qu'il n'y a pas vraiment de moyens d'être sûre que si je choisis tel type d'employeur ou tel type de crèche, je vais pouvoir bénéficier de tel encadrement, d'un pédiatre, une psychologue, un référent pédagogique, etc. En fait, on ne sait pas trop quoi aujourd'hui. C'est très hétérogène.
- Speaker #1
C'est ça. Et puis, en fait, entre ce qu'il y a sur le papier et ce qu'on va vivre dans la réalité, C'est yap. plein d'autres facteurs en fait, même si effectivement il y a une équipe pluridisciplinaire hyper riche, hyper intéressante sur le papier. Est-ce que réellement, sur le terrain, ça va se vivre comme un ensemble d'individualités riches et complémentaires ou est-ce que ça va être vécu comme de la concurrence dans tous les sens et chacun qui se retranche derrière ses connaissances à critiquer les autres, etc. Parce que ça aussi, on le voit souvent.
- Speaker #0
Les rivalités sont humaines. Est-ce que Merci. D'après toi, et ton vécu aujourd'hui qui est quand même très riche, c'était aléatoire. Est-ce que tu penses que le groupe va plutôt se tourner dans un style rivalité et guerre des personnalités ou dans un style collaboratif de façon entre guillemets aléatoire ? Ou est-ce que tu as la conviction comme moi qu'on peut, grâce à notre façon d'organiser le travail et grâce à notre encadrement et notre management, réussir à aller dans un sens positif ?
- Speaker #1
Je suis tout à fait d'accord avec toi. En fait, ça se joue sur la volonté d'une personne, bien souvent. Cette posture managériale, pour moi, elle fait beaucoup de choses. À partir du moment où l'autre est vu comme empêcheur de tourner en rond, comme une difficulté, ça favorise les conflits et ça n'aide pas sur quelque chose qui serait plus coopératif, collaboratif, où l'équipe pourrait voir l'autre. comme complémentaire et en faire une force. Donc effectivement, pour moi, cette posture managériale, elle est très importante. Après, c'est potentiellement inconfortable de fonctionner comme ça, parce que pour que chacun soit vu comme pouvant apporter des choses à l'ensemble du groupe, il faut aussi pouvoir être à l'écoute de ce qui est vivant en chacun. Et ce qui est vivant en chacun, ce n'est pas toujours confortable. Certaines fois, ce qui est vivant, c'est plus difficile que la veille. Donc pour moi, cette écoute, elle est aussi hyper importante, elle est fondamentale. On ne peut pas espérer une qualité d'accueil auprès des enfants si on n'est pas à l'écoute de ce qui est vivant dans l'instant.
- Speaker #0
Le problème, je pense aujourd'hui, de l'écoute des professionnels, c'est peut-être, oui, la posture managériale et le style de management qui n'est pas acquis, mais c'est aussi le temps. temps, c'est qu'on n'a pas le temps de les écouter. Je pense que si on avait un petit peu plus de temps, puisqu'aujourd'hui, notre fonctionnement, notre financement, en fait, dans les crèches est basé vraiment sur un style très productif, où le temps doit être utilisé pour être actif auprès de l'enfant et pas trop pour se réunir et réfléchir. Donc, on n'a pas le temps de les écouter, clairement. Moi, je suis très pragmatique, comme tu le sais, donc dans mes crèches, et chez les personnes avec qui je travaille, pour les aider dans leur crèche à eux. Ce que je préconise, c'est quand même des temps de réunion courts, parce qu'on ne peut pas faire autrement. Et aussi parce que c'est vrai que les temps longs, en général, je pense que parfois, on ne finit pas par faire du blablabla. Donc, pourquoi pas recentrer des temps plus réguliers, mais plus courts ? Pas forcément avec beaucoup de monde. On peut être deux dans une réunion, ce n'est pas grave. Mais au moins, être sûr que le professionnel, il sait qu'il a un temps. Il sait qu'il va y avoir un moment où on va l'entendre, où on va l'écouter. Et que ce n'est pas une fois tous les six mois. mais au moins une fois toutes les semaines ou une fois tous les 15 jours. Allez, tous les trois semaines s'il le faut, mais bon, qu'il y ait un roulement prévu et que ce ne soit pas, j'espère qu'on va avoir un temps. Non, ce n'est pas j'espère, c'est tous les jeudis ou tous les troisième jeudi du mois. J'aime, on met 20 minutes avec le manager et je vais pouvoir exprimer des choses. Et je pense qu'à ce moment-là, déjà, on va pouvoir faire baisser la pression et entendre ce que la personne a à dire. Ça peut être des choses très simples. On n'est pas obligé d'être toujours dans la créativité. On peut juste exprimer ce qu'on vit, en fait. Ce qui nous pose difficultés, ce qui nous pose questions.
- Speaker #1
Ça, c'est une certitude que les temps de réunion sont hyper importants pour construire ce lien. Les professionnels se sentent en confiance et se sentent écoutés, entendus dans leurs problématiques. Après, je pense qu'on ne peut pas faire fi du quotidien, de cette observation du non-verbal aussi. On en parle beaucoup vis-à-vis des enfants, mais en fait, vis-à-vis des collègues, de l'ensemble de l'équipe qu'on accompagne, pour moi, c'est hyper important aussi d'être dans l'observation de ce non-verbal. Des tensions potentielles, de la fatigue un peu plus importante, du moment où la professionnelle, elle est en souffrance et pas loin de craquer. Enfin, voilà, pour moi, cette observation au quotidien et cette disponibilité au quotidien, malheureusement, on ne peut pas en faire fi. Après, c'est ce que tu disais. effectivement, on est aujourd'hui dans un fonctionnement financier aussi, dans des structures qui permettent peu ça, où le temps est limité.
- Speaker #0
Le temps est compté, oui.
- Speaker #1
Mais après, je pense que vraiment, ne serait-ce que le petit mot ou la petite attention, le petit regard, ça peut jouer à des choses aussi très fines. Pour moi, à aucun moment, il ne faut perdre le lien avec l'équipe.
- Speaker #0
Clairement.
- Speaker #1
Et ça, ça se construit vraiment dans le quotidien.
- Speaker #0
Ça se construit, oui. Alors... Alors ça, c'est très personnel. C'est-à-dire que si tu es un manager qui arrive à garder vraiment cet équilibre de bonne distance professionnelle, de cadre, etc., tu peux avoir ce regard, je pense, très bienveillant et soutenant envers ton équipe. Et surtout, tu as une observation qui te donne des éléments. Ton observation, elle te permet de recueillir beaucoup d'éléments de réflexion et d'appuyer en fait ton équipe. Après, la difficulté, c'est, je trouve, moi qui ai beaucoup managé de personnel de crèche, C'est cette bonne distance parce que parfois, les jeunes managers qui ne connaissent pas spécialement le management et qui sont un peu parachutés sur le terrain, elles se disent « il faut que je sois sympa, il faut que j'écoute » . Alors du coup, elles écoutent à tout va, tous azimuts. Donc, elles se retrouvent à faire des sortes de pseudo-réunions pendant la sieste dans le dortoir, à avoir des sollicitations entre deux portes alors que ce n'est pas du tout le moment, on est en plein rush. Tout d'un coup, on va les interpeller sur tout et n'importe quoi. Et ça, je trouve que c'est extrêmement pressurisant et ça déstabilise énormément ces personnes qui se disent « Mais au secours, en fait, être manager en crèche, c'est l'enfer. » Parce qu'il n'y a pas justement ce cadre où on sait que la parole, elle va être entendue, mais à tel moment, à tel endroit, et pas toute la journée, à n'importe quel moment. Après,
- Speaker #1
clairement, la posture managériale, c'est quelque chose qu'on acquiert aussi, je pense, avec le temps, avec l'expérience, en sentant ce qui fonctionne, ce qui fonctionne moins bien. L'équipe a besoin d'un manager aussi qui, par moment, va pouvoir trancher. Quand il y a des désaccords, à un moment donné, pour avancer, il faut aussi que le manager sache se positionner et trancher. J'ai effectivement déjà été confrontée à des managers qui étaient super sympas, mais qui ne tranchaient jamais. C'est juste l'horreur pour l'équipe.
- Speaker #0
Et pour le manager, c'est l'horreur pour tout le monde.
- Speaker #1
C'est ça. C'est super important. Après, oui, je pense que quand on a cette expérience, je pense qu'au fur et à mesure on doit pouvoir affiner et trouver effectivement le juste milieu entre des temps d'écoute, des temps juste d'attention et d'observation finalement, et des temps que de toute façon il faut trancher parce que l'équipe a besoin de ça pour avancer.
- Speaker #0
Quand tu es arrivée dans cette crèche, je crois, si j'ai bien compté, que tu étais déjà auxiliaire de puriculture ou bien tu avais encore ton CAP petite enfance ?
- Speaker #1
Je n'ai jamais travaillé juste avec le CAP, j'ai travaillé, j'étais auxiliaire. En fait, j'ai enchaîné les deux.
- Speaker #0
Oui, c'est bien ce qui me semblait. Qu'est-ce que tu as vu comme différence entre les deux formations et pourquoi justement après ton CAP, tu ne t'es pas lancée directement en crèche ?
- Speaker #1
Disons que j'étais sur le tout début du parcours et je ne connaissais pas encore très bien les différents milieux professionnels dans lesquels je serais amenée à travailler. Et j'avais quand même une attirance aussi pour le milieu hospitalier. Les connaissances médicales des différentes pathologies, tout ça, c'était quelque chose qui m'intéressait. Et puis d'accompagner les jeunes mamans à la maternité, c'était quelque chose qui me faisait envie aussi. Donc je me disais que... la formation d'auxiliaire me permettrait aussi d'aller sur le milieu hospitalier. Et du coup, de m'ouvrir le plus de portes possibles, en fin de compte.
- Speaker #0
Et tu as trouvé que la formation était, disons, dans la continuité du CAP petite enfance ou très différente ? Quel lien tu fais entre ces deux formations ?
- Speaker #1
Alors, c'est des formations qui ont évolué. Depuis, il y a eu beaucoup de changements. Le CAP, ce n'est plus du tout le même aujourd'hui, donc on ne peut pas vraiment comparer. Il y a des choses quand même qui étaient différentes sur le métier d'auxiliaire. La formation d'auxiliaire de puériculture, je trouvais qu'il y avait moins d'attendus sur la mise en place d'activités, par exemple auprès d'un groupe de jeunes enfants. Il y avait plus d'attendus sur le fait de pouvoir travailler avec une infirmière, le fait de pouvoir travailler en binôme. Il y avait beaucoup plus d'attendus là-dessus que sur la gestion d'un groupe. Ça, c'est quelque chose que je n'ai pas appris, finalement, la gestion d'un groupe.
- Speaker #0
Ni en CAP, ni en auxiliaire ?
- Speaker #1
Non, parce qu'en fait, en CAP, on était plus sur la relation individuelle et la mise en place d'activités, mais plus d'activités manuelles finalement sur le CAP et pas sur comment on gère un groupe de huit enfants seul.
- Speaker #0
Oui, donc il y a plutôt le côté individuel avec l'enfant et aussi en tant que pro. Mais par contre, dans la formation d'AP, tu as quand même cette notion de binôme qui commence à être un petit peu de la collaboration et du collectif.
- Speaker #1
Après, avec le CAP aussi, on parlait du travail en équipe, mais dans les attendus de la formation d'auxiliaire de pluriculture, c'est vraiment d'être dans ce binôme autour des observations des constantes vitales de l'enfant, etc., avec l'infirmière. Donc c'est un volet qui est beaucoup plus médical, beaucoup moins dans l'éducatif.
- Speaker #0
C'est une formation qui aujourd'hui te semble pertinente, tu en retiens quelque chose de plutôt positif ?
- Speaker #1
Pour moi, clairement, toutes ces formations, tous ces diplômes sont complémentaires. Et c'est ce que je regrette des équipes de crèche dans lesquelles j'ai pu passer. Après, c'est qu'il y a beaucoup de concurrence entre les différents diplômes. Chacun veut essayer de faire sa place et d'être reconnu. C'est une grande problématique de la reconnaissance. Alors que, voilà, pour moi, chacun a sa place et on s'apporte tous énormément, en fait. Chaque formation a ses spécificités qui apportent aux autres. Parce que sur la formation d'éduc de jeunes enfants, par exemple, le volet médical, il est très peu existant, quoi.
- Speaker #0
Effectivement, ça moi je l'ai beaucoup vécu, cette rivalité, cette compétition au sein des équipes. On a beaucoup de débats théoriques sur est-ce que c'est mieux de prendre une éducatrice ou une infirmière. En ce moment d'ailleurs, il y a une sorte de sanitaire bashing dans les crèches. On dit, oh là là, au secours, surtout pas de sanitaire, mon Dieu, maintenant ça y est, on est dans l'éducatif. Moi je suis assez sceptique sur ces considérations. Je pense que ce n'est pas parce qu'on enlève les infirmières et les auxiliaires de puriculture qu'on a de la qualité. Et au contraire, je pense que, comme tu dis, les professions sont complémentaires. Il me semble que les infirmières, qu'elles soient puricultrices ou pas d'ailleurs, mais bon, il y a aussi cette spécificité, mais apporte aussi beaucoup. Le sanitaire, je pense, apporte beaucoup dans le secteur. Alors toi qui as fait des métiers dans les deux styles, sanitaire et éducatif, qu'est-ce que tu penses ? Est-ce que toi aussi, tu as remarqué qu'il y avait cette... cette sorte de rejet du sanitaire dans les crèches ? Et qu'est-ce que tu en retires ?
- Speaker #1
Pour le coup, j'ai fait la formation d'éthique de jeunes enfants depuis. Donc forcément, moi aussi, j'ai mis des bémols un peu sur le volet sanitaire pour favoriser le bien-être de l'enfant et la réponse pleine à ses besoins. Parce que c'est vrai que le sanitaire, ça peut être enfermant. On l'a bien vu avec le Covid aussi.
- Speaker #0
Le Covid, c'est une... Prise particulière.
- Speaker #1
Oui, bien sûr.
- Speaker #0
Si on parle plutôt des temps classiques d'accueil.
- Speaker #1
Après, moi, ce que je remarque, en fait, c'est que les auxiliaires de puer et les infirmières, elles apportent beaucoup sur l'observation de l'enfant et sur l'observation un peu plus médicale de l'enfant, en fin de compte, de pouvoir soit rassurer les parents et de dire que non, il n'y a pas de quoi s'affoler, c'est juste un gros rhume, qu'il faut intensifier les lavages de nez. Il y a des réponses qui sont adaptées. en face qu'une personne qui a un CAP aura peut-être moins de facilité à avoir ces réponses adaptées en face. Et une éducatrice de jeunes enfants, pareil, peut être plus facilement dans le questionnement sur la réponse la plus juste à donner à telle ou telle observation. Donc soit rassurer les parents, soit à l'inverse, orienter les familles vers la consultation du généraliste ou d'un spécialiste quand il y a un questionnement un peu plus important. Et du coup, le travail d'observation autour de l'enfant, pour moi, il doit être fait en pluridisciplinarité.
- Speaker #0
On est d'accord. C'est vraiment cette complémentarité des professions. Alors, est-ce qu'on peut imaginer dans un monde idéal qu'il y aurait un diplôme qui réussirait à allier le sanitaire et l'éducatif dans un seul professionnel et qu'on n'aurait plus besoin de ces équipes pluridisciplinaires ?
- Speaker #1
Pour moi, il faut rester sur une complémentarité. le... Le gros souci finalement, c'est que tout le monde a besoin d'être reconnu. Et donc c'est là où pour moi le manager a un sacré rôle à jouer. C'est pour favoriser le sentiment d'appartenance de chacun à cet ensemble que forme l'équipe et de valoriser chacun dans son poste, dans ses compétences, au-delà du diplôme, vraiment dans ses compétences professionnelles parce qu'on peut avoir un CAP et avoir des compétences d'éduc. Moi, je l'ai déjà vécu plusieurs fois avec. plusieurs collègues et puis surtout se connecter encore une fois à ce qui est vivant en chacun. Le pourquoi tu es là, pourquoi tu te lèves tous les jours pour venir au travail et de quoi tu as besoin, de quoi tu as peur. Pour moi, c'est tout ça qui va faire qu'on va pouvoir travailler en coopération, en équipe, sans être dans des rivalités qui sont mauvaises pour tout le monde.
- Speaker #0
On en revient à ce gros problème qu'on a aujourd'hui, c'est ce qui va faire que l'ambiance va fonctionner. que la crèche va fonctionner, que l'équipe va être opérationnelle et que ça va bien se passer et qu'on va pouvoir faire de la qualité d'accueil, c'est le management. Et en fait, c'est vraiment le point faible qu'on a aujourd'hui sur le secteur. C'est qu'on forme beaucoup sur, comme tu disais, un petit peu le côté plus individuel, comment faire une activité avec un enfant, plein de compétences sur l'enfant, sur le comportement professionnel ou autre. Mais le plus gros point d'interrogation, c'est comment on fait pour bien manager une équipe de crèche. Bon, moi, j'ai ma petite idée là-dessus, comme tu le sais. Mais voilà, je pense que ce qui pêche aujourd'hui, à la fois pour faire que ça fonctionne bien dans la crèche et à la fois pour faire rester les professionnels, leur donner le goût du travail et donc avoir ce cercle vertueux qui va faire qu'on va aussi attirer des professionnels, c'est que le management soit bon, que le cadre soit bien posé et que du coup, on se sente bien dans notre travail.
- Speaker #1
Effectivement, le management demande énormément de compétences. Après, pour moi, le point de départ, c'est quand même de bien se connaître soi. Et ça, ce n'est pas toujours le cas. Et puis, au-delà de ça, je pense qu'il y a des formations qui devraient être finalement obligatoires dans les formations des managers, comme la communication non-violente. Je pense que quand on a travaillé ça, déjà, on voit l'autre différemment et on est effectivement plus à l'écoute de ce qui est vivant, des émotions, des besoins du moment. Ça apporterait déjà beaucoup de choses dans les équipes.
- Speaker #0
Finalement, la communication non violente, ça peut être quelque chose qui est de l'ordre de notre éducation, de notre savoir-être. C'est vrai qu'on est assez inégaux. Il y a des personnes qui ont été bien traitées, qui ont été entendues en tant qu'enfants, en tant que jeunes, et qui arrivent avec cette capacité à communiquer avec les autres de façon, disons, assez neutre et bienveillante. Et puis d'autres personnes qui arrivent là avec un passif plus lourd. Peut-être qui n'ont pas forcément été entendus dans leur construction et qui ont besoin d'être formés, c'est ça que tu veux dire ?
- Speaker #1
Oui, c'est pour ça que je disais, la première étape, c'est de se connaître soi et d'avoir réparé les blessures du passé, en fin de compte. On ne peut pas, pour moi, être dans une posture managériale juste. ajuster aux besoins de chacun si ça c'est pas déjà impréalable et après la communication non violente alors à ne surtout pas entendre sous l'aspect d'une simple technique de communication parce que en fait la base de tout pour que ça fonctionne la communication non violente c'est le lien si on n'est pas en lien avec l'autre en connexion avec l'autre ça ne fonctionnera pas donc c'est pour ça que je disais connecté à ce qui est vivant en chacun. Si ça ne s'est pas fait en toute authenticité, le reste ne fonctionnera pas.
- Speaker #0
Alors moi, je n'ai pas le même vécu que toi là-dessus parce qu'en tant que manager, je n'ai pas les mêmes diplômes que toi du tout et donc pas du tout le même parcours. Je suis très admirative de tout ce que tu as fait. Moi, du coup, je suis complètement dans une posture managériale de chef d'entreprise. J'ai créé mes crèches, j'ai géré des équipes et donc mes équipes n'ont pas fait ce type de formation. En revanche, je pense que dans ma façon de recruter peut-être et de conserver ou pas les personnes, il y a cette sélection sur ce caractère bienveillant. Et puis, il y a aussi le fait que je pense, je suis assez convaincue parce que je l'ai exercé comme ça, qu'en fixant un bon cadre qui lui est bienveillant et qui permet d'avoir des conditions favorables au travail d'équipe. Comme je disais par exemple, si on reprend l'exemple de tout à l'heure, une réunion sur laquelle on sait qu'on va pouvoir compter. typiquement c'est un cadre rassurant pour un professionnel qui sait qu'il va pouvoir être entendu tel jour, telle heure, etc. Donc moi j'ai réussi je pense à imposer d'une certaine manière cette communication bienveillante par le cadre en fait. Et donc je pense que ces deux aspects qui peuvent être peut-être complémentaires l'un n'empêche pas l'autre. Mais c'est vrai que je ne pense pas que ça se suffit à lui-même d'être juste dans la communication bienveillante. Je pense qu'il faut vraiment... que le cadre soit extrêmement bienveillant et qu'il soit très clair et très lisible pour que l'équipe soit rassurée et sache qu'elle peut compter sur des choses qui sont fiables.
- Speaker #1
On est tout à fait d'accord. C'est comme avec les enfants. Il y a besoin d'un cadre qui soit ferme et bienveillant. Il n'y a que comme ça que ça fonctionne.
- Speaker #0
Ensuite, tu es passée par une crèche beaucoup plus petite, de 25 berceaux. Si j'ai bien compris ton parcours, Je pense que tu as eu un regard un petit peu différent parce que plus petite crèche, plus petit moyen. Qu'est-ce que ça donne ?
- Speaker #1
Qu'est-ce que ça donne ? Ça donne des situations assez aberrantes, pour ne pas dire ubuesques, où je me suis vue faire des choses en tant que professionnelle que jamais j'aurais imaginé faire. Donc, on était loin de la relation individuelle.
- Speaker #0
Qu'est-ce que tu veux dire ? Donne-moi un exemple.
- Speaker #1
Un exemple ? Alors, c'était il y a plusieurs années. Mais voilà, quatre transates alignées avec un bébé dans chaque transate, une compote ouverte devant chaque transate. Et je donnais une cuillère à chacun en alternance tout en gérant la table de huit moyens à côté qui est en train de prendre le goûter aussi.
- Speaker #0
Là, c'est la situation de crise.
- Speaker #1
Voilà, c'est ça. Sauf qu'en fait,
- Speaker #0
ce n'était pas tous les jours quand même, rassure-moi.
- Speaker #1
C'était très, très, très souvent parce que c'était une petite structure, un petit groupe où il n'y avait pas... De polyvalente, par exemple, ça c'est quelque chose que je trouve vraiment précieux dans les structures qui vont être un peu plus grandes ou dans les communautés de communes qui vont être un peu plus grandes. Quand il y a une ou plusieurs polyvalentes qui peuvent remplacer les arrêts de courte durée ou la collègue qui est partie en formation pour la journée, ça change tout.
- Speaker #0
Alors, c'est sûr que quand on est une équipe qui est vraiment prévue pile poil pour le nombre d'enfants, etc., tous les aléas, tous les imprévus ou toutes les absences, même si elles sont prévues d'ailleurs, c'est très, très compliqué. Donc, effectivement, dès qu'on a quelques crèches... Donc, moi, par exemple, quand j'ai eu quatre micro-crèches, j'ai recruté une volante. On appelle ça une volante. Je déteste ce mot. Je n'aime pas polyvalent non plus. Je trouve qu'il y a eu toute une période... Alors, je ne sais pas où on en est là-dessus, mais j'avais ressenti cette... ce côté un peu, il faut que tout le monde soit polyvalent dans les crèches et comme ça c'est la clé quoi, tout le monde peut tout faire donc tout est résolu quoi
- Speaker #1
En tant que polyvalente sur une grosse commune, enfin une grosse ville métropole en fait maintenant, je faisais le linge, la cuisine tout quoi, effectivement de pouvoir tenir tous les postes
- Speaker #0
C'est à la fois le fait d'être volante c'est-à-dire de pouvoir aller d'une structure à l'autre mais aussi le fait de pouvoir prendre n'importe quelle fonction dans ces structures En fait, le mot polyvalent, moi, je l'entends souvent sur des postes, en fait, sur le terrain où on dit elles sont polyvalentes. Et là, je trouve que, enfin, je pense que maintenant, ça y est, on a compris. Mais moi, j'ai vraiment un combat là-dessus. C'est de dire non, les pros ne doivent pas être polyvalentes. Chacun ses compétences, chacun son poste, chacun son groupe d'enfants. Enfin, voilà, on ne peut pas tout savoir faire et tout faire. Et il faut que chacun ait des responsabilités bien définies. Donc là, toi, tu l'utilises dans un autre contexte. Et en effet, avoir des personnes qui sont capables d'arriver dans la structure et de prendre des fonctions un peu au pied levé et de soutenir une équipe, ça n'a pas de prix, quoi. Mais c'est très rare.
- Speaker #1
C'est rare et puis après, c'est vraiment un poste sur lequel il faut se sentir à l'aise aussi. Voilà, ce n'est pas donné à tout le monde de pouvoir être polyvalente, d'arriver en un quart d'heure assise au sol au milieu du groupe d'enfants, de réussir à rassurer tout le monde de façon à ce qu'il y ait beaucoup moins de pleurs sur tout. toute la journée.
- Speaker #0
Exactement.
- Speaker #1
C'est loin d'être évident.
- Speaker #0
En fait, je pense qu'il y a un problème de reconnaissance, encore une fois, parce que quand tu recrutes une personne sur ce poste-là, ce poste de volante ou de polyvalente, eh bien, souvent, c'est des profils un peu, entre guillemets, bas de gamme, petits niveaux, un peu des filles qui ne trouvent pas de boulot, etc., alors que ça devrait être le contraire. Ce n'est pas du tout un poste qu'on peut prendre, justement, quand on est peu compétent. C'est plutôt un poste où il faut être très opérationnel, pouvoir soutenir une équipe. et être un petit peu une sorte de pilier. Et c'est l'inverse qui se produit. Souvent, ça va être plutôt les filles qui sont dans des situations précaires, qui n'ont pas le choix, parce qu'il y a des trajets, etc. Donc moi, je pense qu'il vaut mieux avoir soit des personnes qui vont faire peu de trajets, des petits trajets, donc qui vont être sur un secteur restreint géographiquement, pour que ce ne soit pas justement des non-choix et de la précarité, soit des personnes qui peuvent avoir des grosses distances, mais qui vont rester longtemps sur des structures. Moi, c'est ce que j'avais, c'est-à-dire que mes structures, elle faisait On ne restait pas dans des départements très éloignés, c'était quand même assez petit. Mais la personne, elle ne venait pas pour une journée, en fait. C'était des remplacements pour au moins, je ne sais pas moi, deux semaines, un mois, trois mois parfois, pour j'ai maternité, etc. Et je trouvais que faire passer les gens d'une structure à l'autre pour une journée, c'était quand même assez dur. Et en tout cas, il faut avoir, je pense, les nerfs solides.
- Speaker #1
Sur la ville où moi j'étais, en fin de compte c'était le choix qui était fait. Effectivement les polyvalentes étaient sur les arrêts longues durées en priorité, avec un rattachement sur une structure de toute façon quand il n'y avait pas besoin sur les autres. Et par contre c'était un poste qui était quand même avantageux pour ces professionnels-là, parce qu'elles étaient de toute façon à 9h-17h. C'était quand même confortable parce que ce n'est pas des horaires qu'on trouve habituellement sur les structures petites enfances.
- Speaker #0
Non mais c'est bien parce que faire l'accueil ou la fermeture... quand on n'est pas affilié à la structure, ce n'est pas non plus évident pour les parents et les enfants et pour la pro. Donc, c'est vrai que si on peut éviter qu'elle fasse l'ouverture ou la fermeture, c'est quand même mieux pour la continuité.
- Speaker #1
Oui, et puis ça permet aussi éventuellement de faire un temps de trajet pour aller dans la structure qui a besoin dès qu'on a l'appel.
- Speaker #0
C'est ça. Bon, après, les gestionnaires vont dire « Oui, mais comment on fait quand on n'a personne pour l'ouverture ? » Donc bon, ça ne résout pas forcément toutes les questions. Mais en tout cas, c'est un poste vraiment à valoriser, à utiliser à bon escient, avec une réflexion. Ce n'est pas juste des pions qu'on déplace sur un échiquier. Et il faut qu'elles aient, comme tu disais, un rattachement aussi. C'est-à-dire que parfois, on oublie que quand on a une personne qui navigue entre dix structures, ou cinq, enfin peu importe, mais elle n'a pas de chef tous les jours à côté d'elle. Donc, qui est son rattachement et qui la suit, la personne en fait, qui l'écoute ? Je pense que ça, ça peut être oublié parfois. Alors après, tu as décidé d'être assistante maternelle. Donc là, pour moi, ça me semble être quand même un revirement assez important. Qu'est-ce qui s'est passé ?
- Speaker #1
Je parlais tout à l'heure des mobilités qui peuvent être choisies quand il y a un projet pédagogique qui nous met des étoiles dans les yeux. Et puis, il y a des mobilités qui peuvent aussi être subies. Et dans mon parcours professionnel, en fait, il y a eu plusieurs fois aussi des mobilités qui n'étaient pas forcément choisies parce que déménagement, voilà, c'est arrivé aussi. Puis là, c'était parce qu'il y avait un mal-être, en fin de compte, et que j'avais besoin de sortir de ce mal-être. Et en fait, j'avais déjà passé l'agrément. J'aime bien toujours être sûre que je vais pouvoir avoir un travail. C'est pour ça aussi que j'avais fait la formation d'aide-soignante, c'était pour être sûre d'avoir un travail.
- Speaker #0
Oui, toi, c'est ceinture bretelle, tu passes toutes les formations comme ça, au moins, t'es sûre de trouver un poste quelque part.
- Speaker #1
C'est tout à fait ça. Et donc, j'avais ça sous le coude et j'ai dit, bon, ben voilà, je vais tester, quoi.
- Speaker #0
Donc, quand tu dis un mal-être, tu veux dire professionnel, à la vie de la crèche. Donc, t'avais envie de tester autre chose.
- Speaker #1
C'est ça. Et puis, plusieurs grandes découvertes en tant qu'assistante maternelle. Déjà, la liberté. de pouvoir mettre en place le projet souhaité, avoir plus de créativité, une organisation plus souple, beaucoup plus souple, parce qu'il n'y a pas la personne qui fait la plonge qui doit partir à telle heure, donc il faut que les goûters soient faits à telle heure. Je pouvais m'adapter beaucoup plus facilement au rythme de l'enfant. Donc ça, je pense que c'est plutôt bien pour tout le monde. Et puis par contre, oui, j'ai fait aussi la découverte de la solitude, parce que... Le service agrément nous dit qu'on ne réveille pas un bébé qui dort le matin. Tout ça, oui, mais en fait, j'avais tout le temps un bébé qui dormait le matin pendant plusieurs années. Et puis, au bout d'un moment, j'ai bien senti qu'il fallait que je sorte et qu'il fallait que j'aille au relais parce que je n'en pouvais plus. D'avoir travaillé en équipe pendant des années, la solitude du métier d'asthmate était un peu difficile pour moi.
- Speaker #0
Oui, donc il n'y a pas de solution miracle. Il y a des côtés positifs et négatifs dans tous les métiers. C'est ça que tu es en train de me dire ?
- Speaker #1
C'est tout à fait ça. Bon, c'était une période particulière parce que moi, j'ai été assistante maternelle en plein Covid, en fin de compte. Donc, d'autant plus enfermée sur la période où à 18h, on n'avait plus le droit de sortir. Du coup, moi, j'étais du lundi au vendredi à la maison parce que les parents arrivaient à 18h. Et bon, c'était aussi une période un peu particulière.
- Speaker #0
En fait, tu étais assistante maternelle diplômée de CAP Petite Enfance et d'Oxyde de Puriculture, c'est ça ? Oui,
- Speaker #1
c'est ça.
- Speaker #0
Et aussi d'aide-soignante. Donc, tu étais quand même une assistante maternelle qui a un peu plus que le minimum requis, qui n'est quand même pas très énorme. D'ailleurs, les assistantes maternelles réclament une meilleure formation. C'est quoi ton regard là-dessus par rapport à tes anciennes collègues à SMAT ?
- Speaker #1
Pour le coup, j'accompagne aussi des assistantes maternelles au quotidien sur le poste que j'ai actuellement. Oui,
- Speaker #0
parce qu'en ce moment, je sais que tu t'occupes d'une crèche familiale. Oui,
- Speaker #1
c'est ça. C'est une crèche familiale assez atypique et expérimentale sur l'ensemble du département dans lequel j'habite.
- Speaker #0
Alors, est-ce que tu peux développer pour les auditeurs Scalade atypique ?
- Speaker #1
Alors, Scalade atypique, c'est que les assistantes maternelles ont un contrat normalement de trois mois. Trois mois, en fin de compte, c'est un dispositif qui est financé par le département, la CAF et France Travail sur notre département pour favoriser l'insertion professionnelle des familles. Donc, on peut proposer un contrat d'accueil que quand la famille entre en formation ou entre en emploi. Et donc, l'objectif, c'est d'aider les familles à devenir particuliers employeurs de l'assistante maternelle. Donc, c'est un peu le challenge. Pendant trois mois, l'assistante maternelle est salariée de la crèche familiale. Et pendant ces trois mois, on accompagne la famille au devenir particulier employeur conjointement avec un prescripteur, un travailleur socio-professionnel et le relais petite enfance.
- Speaker #0
C'est assez génial. En fait, l'assistante maternelle, elle sort du dispositif si elle garde la famille. Le but, c'est que ça se continue avec la famille.
- Speaker #1
Voilà, c'est vraiment l'objectif, c'est que la famille devienne le particulier employeur de cette assistante maternelle qui aura accueilli en tant que salarié pendant trois mois. Du coup, c'est une crèche familiale qui n'a... pas de mur finalement. Le lieu d'accueil collectif proposé, c'est le relais petite enfance de proximité. Et l'autre grande particularité, c'est qu'elles ne sont pas en CDI, elles sont en CDD parce que le critère principal pour les embaucher, c'est la proximité avec la famille ou avec le trajet que la famille fait pour aller sur le lieu de travail ou la formation.
- Speaker #0
Est-ce que tu penses que c'est un système qui pourrait se généraliser ?
- Speaker #1
C'est à l'étude, oui. C'est l'objectif.
- Speaker #0
Et sur la formation de ces assistantes maternelles, c'est quoi ton retour ?
- Speaker #1
Alors, je déteste le mot de professionnalisation qu'on entend tout le temps. Je ne le trouve pas du tout valorisant pour les professionnels qui disent déjà qu'elles ont besoin de reconnaissance. Pour moi, elles sont professionnelles à partir du moment où elles ont fait cette formation minimale du service agrément. Pour les auditeurs,
- Speaker #0
encore une fois, est-ce que tu peux préciser ce que c'est la formation minimale pour l'agrément ? Tout le monde ne le sait pas.
- Speaker #1
La formation initiale actuellement c'est 80 heures de formation dispensée par le service agrément du département. et 40 heures supplémentaires dans les deux premières années d'exercice de l'assistante maternelle, ce qui fait donc 120 heures au total.
- Speaker #0
Et je crois qu'il y a de plus en plus d'assistantes maternelles maintenant qui essayent de passer quand même le CAP.
- Speaker #1
Oui, il y en a beaucoup qui essayent effectivement d'obtenir le CAP complet. Après, ça demande un travail personnel pour celles qui font ce parcours-là. Donc pour les accompagner, pour en côtoyer beaucoup, effectivement, on voit bien que ... Il y a des domaines sur lesquels ce serait nécessaire d'aller plus loin. Après, de là à dire qu'elles ne sont pas professionnelles et qu'il faut les professionnaliser, je dis non, non, non, non, non.
- Speaker #0
Oui, c'est ce que tu entends beaucoup.
- Speaker #1
Oui, oui. Et puis, les relais petite enfance, malheureusement, sont certaines fois dans ce discours-là aussi, alors qu'elles ont déjà beaucoup de compétences et qu'elles ont surtout l'envie. de bien faire l'envie, de favoriser le bien-être. Et ça, c'est pour moi une première garantie, en fin de compte, de qualité d'accueil. C'est qu'elles aient cette envie, qu'elles aient cette attention vis-à-vis de l'enfant.
- Speaker #0
Oui, après, c'est un peu le même problème dont on parlait tout à l'heure, c'est qu'on vient avec ce qu'on est. Donc, selon notre vécu, on apporte des choses différentes. Moi, je sais qu'en tant que manager, je n'ai pas eu que des professionnels formidables qui arrivaient avec une autonomie et une bienveillance impeccables. Qu'elles aient n'importe quel diplôme, d'ailleurs, que ce soit le CAP. que ce soit auxiliaire, que ce soit UJE, que ce soit infirmière ou même puerre. Et donc, en fait, ce qui fait la différence, c'est encore une fois, le cadre de travail et le management. Alors qu'on peut amener des professionnels très loin, parce que souvent, comme tu dis, elles ont envie et elles ont ce désir de bien faire et de qualité. Maintenant, c'est vrai qu'une assistante maternelle hors crèche familiale, elle est quand même très seule, elle n'a pas forcément d'appui, de cadre, etc. Donc, c'est quoi la clé du succès ?
- Speaker #1
Elles ont normalement toutes un relais petite enfance en proximité. Après, pour le voir là au quotidien, il y a des relais petite enfance qui sont suffisamment éloignés pour que les assistantes maternelles n'y aillent pas. Parce que difficulté de mobilité pure aussi. Quand on n'est pas véhiculé et que le relais est trop loin pour y aller à pied ou en transport, la question est réglée.
- Speaker #0
C'est vite plié, oui, avec des enfants bas âge. C'est ça.
- Speaker #1
après Je ne sais pas si, pour moi, la solution, entre guillemets, ce ne serait pas que la formation continue soit pas seulement sur envie et volontariat, et qu'il y ait une part, en tout cas, de formation continue qui soit obligatoire. Je pense que ce serait utile.
- Speaker #0
Oui, comme c'est 40 heures sur les deux premières années, quoi.
- Speaker #1
Oui, ça pose plein d'autres questions, parce qu'effectivement, il y a des familles derrière qui sont en difficulté pour faire garder leurs enfants quand l'assistante maternelle est en formation. Mais voilà, sur cette montée en compétences souhaitées, ça pourrait être un des leviers. Après, il faut savoir aussi qu'en ce moment, il y a des gros gros problèmes de financement de la formation continue des assistantes maternelles, qui du coup fait obstacle de fait, parce que normalement elles ont quand même droit à énormément d'heures. 58 heures de formation continue par an, c'est énorme. Et pour le coup, elles ne peuvent pas les faire parce que les financements sont bloqués depuis plusieurs années.
- Speaker #0
Quand tu dis bloqués, tu veux dire que les budgets sont vite épuisés, c'est ça que tu veux dire ?
- Speaker #1
À partir du mois de septembre, voire même avant, je crois que c'était juillet cette année, les formations sont réservées à celles qui n'ont pas fait de formation dans l'année, parce que plus de financement.
- Speaker #0
Oui, c'est comme dans les crèches en fait, le budget des opcos est vite épuisé et puis il faut s'y prendre très tôt dans l'année.
- Speaker #1
C'est quelque chose qui est revu, ça fait beaucoup de bruit ces derniers temps, donc ça va sûrement bouger aussi, parce qu'effectivement, elles ont besoin de cette formation continue, il y a plein de formations qui sont intéressantes, et c'est très bien pour tout le monde, pour les enfants et pour les professionnels, qu'elles puissent y avoir accès. Après, ce que tu disais aussi tout à l'heure sur ce qu'on apporte de notre vécu, de notre expérience personnelle, tout ce passif qu'on apporte quand on arrive en tant que professionnel, il est important à considérer. Et aujourd'hui, j'ai l'impression, en tout cas, de ma fenêtre, qu'il y a peu de formations où on va venir travailler sur le vécu personnel de chacune. Et la supervision des assistantes maternelles par des psychologues, par exemple, ça n'est pas dans les missions obligatoires des relais petite enfance. Je pense que ce serait nécessaire qu'il y ait un travail personnel de fait de la part des assistantes maternelles.
- Speaker #0
C'est vrai que moi, j'ai toujours eu une psychologue qui intervenait dans mes crèches. Enfin, peut-être pas toujours, mais assez rapidement. Je trouve que ça fait vraiment la différence, ce regard-là. Après, moi, personnellement, j'ai fait ma petite psychothérapie, quand je dis petite, très longue, de mon côté. Et je pense que je ne serais pas qui je suis aujourd'hui et que je ne comprendrais pas les professionnels comme je les ai comprises si je n'avais pas fait, moi, ce parcours personnel pour justement comprendre mes réactions vis-à-vis de l'autre.
- Speaker #1
Il y a des transferts qui se font facilement quand on travaille avec les enfants et voilà, c'est indéniable que ce travail-là, il est nécessaire. Alors, j'ai compris il y a peu de temps la différence entre les analyses de pratiques et la supervision et effectivement, c'est de la supervision qu'il faudrait pouvoir proposer aux professionnels pour faire ce travail personnel parce que les analyses de pratiques doivent être normalement plutôt centrées sur l'accompagnement de l'enfant au quotidien, une situation vécue avec l'enfant.
- Speaker #0
Alors tu l'as dit, aujourd'hui tu diriges une crèche familiale, après tout ce parcours, et je sais que tu fais aussi de la formation. Tu en es où ? C'est quoi tes perspectives dans le métier ?
- Speaker #1
Dans les choses qui font rester un professionnel sur un poste. Trouver du sens au quotidien à ce qu'on fait, je pense que c'est un levier important. Et donc là actuellement je suis sur un projet pour lequel je trouve beaucoup de sens, parce que voilà j'accompagne des familles qui sont... en insertion, en difficulté, que je vois évoluer, progresser. Et ça, c'est quelque chose qui me porte. Et donc, mon poste à temps plein en tant que responsable de crèche. Et après, c'est vrai que j'aime bien avoir des expériences un peu complémentaires. Donc, la formation, c'est une autre casquette. Ça me permet aussi d'être en lien et de prendre soin des personnes que j'accompagne. Parce que c'est un peu mes deux grands besoins que j'ai pu identifier. Pour l'instant, je n'anime que deux formations, mais vraiment, c'est un souhait de n'en animer que deux parce que j'ai un temps plein à côté.
- Speaker #0
Et c'est quoi ?
- Speaker #1
J'anime la formation « Bientraitance et prévention des douces violences auprès des assistantes maternelles » et en parallèle de ça, la formation « Un éveil artistique et culturel » nommé « Éclat » avec l'association Agir pour la petite enfance.
- Speaker #0
Je sais que tu collabores beaucoup avec Agir. Tu as deux formations, la « Bientraitance » et l' « Éveil artistique » . Tu as abordé un sujet qui est très important en ce moment, c'est comment motiver les professionnels pour qu'elles restent dans le métier. Aujourd'hui, on parle beaucoup de la pénurie de professionnels. Est-ce que tu as déjà une opinion sur ce qui fait qu'on n'a plus assez de professionnels aujourd'hui ? Pourquoi elles ne viennent pas dans le métier d'une part et pourquoi elles ne restent pas dans le métier d'autre part ? Oui,
- Speaker #1
j'ai déjà réfléchi à la question. Après, est-ce que je vois tout de ma fenêtre à moi ? Je ne sais pas. Voilà, après moi, ce que je mets beaucoup en avant, donc on a déjà abordé pas mal de choses ensemble, le fait effectivement que le cadre soit clair, ferme et bienveillant, je pense que ça fait beaucoup. Après, au-delà de ça, ce qui souvent je trouve m'a manqué dans mes différentes expériences professionnelles, c'est le fait que prendre du plaisir au travail, c'est non seulement normal, mais au-delà de ça, c'est la garantie d'une qualité d'accueil pour l'enfant. Je trouve que même dans les médias, aujourd'hui, c'est mal vu. Une professionnelle qui joue avec les enfants et qui s'amuse avec les enfants. Les assistantes maternelles le disent aussi beaucoup, elles souffrent beaucoup de ça. Alors que, clairement, pour que l'enfant soit bien, il faut que la professionnelle soit bien. Donc, voilà, il y a de nombreuses études maintenant qui montrent que l'enfant sécrète de l'ocytocine quand la professionnelle sécrète de l'ocytocine. Voilà, c'est l'hormone de l'amour et du bien-être. Enfin, voilà, c'est pour que la professionnelle en sécrète. il faut qu'elles se sentent bien. Donc pour moi, au cœur du projet pédagogique de toutes les structures, ça devrait être écrit en gros, c'est un préalable à la qualité d'accueil. Il faut que les professionnels puissent prendre du plaisir au travail.
- Speaker #0
Je comprends ce que tu veux dire par le fait que c'est important de prendre du plaisir dans son travail. Moi-même, je me suis reconvertie et j'ai fait pas mal de choses différentes, diverses et variées. Donc je sais que parfois, ce n'est pas le plaisir absolu et que quand on se sent bien, on a envie de rester et ça peut durer beaucoup plus longtemps. En revanche, ce que tu dis sur l'image des professionnels qui jouent avec les enfants, ça par contre, je ne le ressens pas trop, le fait que c'est mal vu de voir un professionnel s'amuser avec les enfants. Au contraire, on dit souvent que oui, les parents, ils disent amusez-vous bien, etc. Ça nous énerve, nous les pros, on n'est pas des enfants, on n'est pas là en train de jouer, etc. Donc j'aurais plutôt dit le contraire, que les gens trouvent ça super de jouer avec les enfants.
- Speaker #1
En fait, c'est de la méconnaissance. J'ai lu un article encore dans la presse il y a peu de temps. Autant, par rapport à ça, il y a une confusion en fait. Les professionnels, elles ne sont pas en train de jouer avec les enfants, même si elles prennent du plaisir avec les enfants. Elles sont dans l'accompagnement de l'acquisition des connaissances de l'enfant. Et voilà, c'est un travail en tant que tel. Ce n'est pas juste je m'amuse.
- Speaker #0
Je comprends mieux ce que tu veux dire.
- Speaker #1
Et donc en fait, il y a tout ce volet de reconnaissance professionnelle derrière. Ce n'est pas juste la récré quoi. Non, on ne fait pas du gardiennage récréatif, ça n'a rien à voir. Le fait de prendre du plaisir au travail, ça fait partie pour moi du savoir-être d'une professionnelle finalement. C'est un préalable pour moi hyper important.
- Speaker #0
C'est le sens aussi de notre travail, c'est pourquoi je suis là. Si ça ne me fait pas plaisir du tout, ça va être compliqué de faire ce métier-là qui est quand même très humain. C'est aussi ce qu'on disait tout à l'heure, c'est qu'on a un temps assez compté, assez limité et qu'on est quand même très concentré. C'est important aussi d'être très concentré dans la petite enfance parce qu'on a des responsabilités énormes, on s'occupe de très jeunes enfants, ils sont vulnérables. Donc c'est aussi un équilibre qui est fragile entre le plaisir, la concentration, parce qu'on est, comme tu dis, des professionnels. mais bon je comprends ce que tu veux dire Donc là, on parle plus de comment conserver les professionnels en poste. Et effectivement, je pense que c'est très important qu'elles aiment vraiment le métier, qu'elles soient bien dans leur métier, dans leur travail. Mais comment on fait pour les attirer ? Toi, tu as été attirée spontanément dans le métier. Aujourd'hui, le métier n'attire plus. D'après toi, c'est quoi ? C'est le bouche à oreille qui fait entendre aux jeunes qu'au secours, ça ne va pas dans la petite enfance ? C'est des modes ? C'est quoi pour toi aujourd'hui le problème ?
- Speaker #1
Après, les médias nous font mauvaise presse, clairement, donc je pense que ça n'aide pas. Juste pour finir sur ce qu'on disait sur le plaisir au travail, c'est quelque chose dont je parle beaucoup quand j'anime la formation en éveil artistique et culturel. Pour moi, c'est un levier possible pour reprendre du plaisir au travail, pour retrouver du plaisir au travail. C'est de se connecter à nos sens. à ce qui nous attire comme matière, ce qui nous attire aussi dans l'art et faire des liens avec des artistes autour de soi, ouvrir la structure à des partenariats extérieurs, etc. C'est pour moi un des leviers pour retrouver du plaisir au travail. Après, ça va dans le sens de ce que je disais tout à l'heure sur les projets pédagogiques de chaque structure qui peuvent être un peu différents, qui peuvent attirer les professionnels.
- Speaker #0
Mais toi, quand tu fais cette formation-là, j'imagine, alors tu vas me dire si je me trompe, que tu arrives dans des équipes quand même assez structurées, parce qu'on ne va pas faire venir éclat si on est complètement dans le dawa et que personne ne sait ce qu'il a à faire et qu'on n'a même pas le temps de respirer.
- Speaker #1
Ça arrive que je sente, quand j'anime la formation, que j'ai affaire à une équipe justement qui est moins structurée. Ça arrive tout à fait. Et moi, ça fait partie de l'animation de la formation que de leur dire que le préalable à mettre en place des installations d'éveil artistique et culturel, c'est d'avoir déjà travaillé. sur l'organisation, la posture professionnelle, qui fait quoi, à quel moment, etc. Donc ça fait partie de la formation que j'anime.
- Speaker #0
Alors pour peut-être conclure cet entretien, est-ce que tu as une idée, quelque chose qui pour toi serait innovant dans le secteur de la petite enfance et qui pourrait aider les professionnels ou les gestionnaires justement pour valoriser le métier aujourd'hui ?
- Speaker #1
Pour le coup, il y a une chose qui, dans mon pourquoi, Je fais ce métier au quotidien. Quand je questionne les professionnels que j'accompagne aussi sur l'heure, pourquoi ? Il y a une chose qui me saute aux yeux, que je mets du coup en valeur, c'est le fait que les enfants sont connectés tout le temps à l'instant présent. Ils s'émerveillent de chaque petite chose qui se passe autour d'eux. Pour moi, c'est une compétence qu'on perd quand on devient adulte. On est tout le temps dans l'organisation, dans l'anticipation, encore plus en crèche parce qu'effectivement, il y a beaucoup de nécessités organisationnelles. Pour moi, le plaisir, il passe aussi par là, en fait. Ça va avec le fait de se connecter à l'ici et maintenant. Et ça, c'est vraiment quelque chose qui nous apporte au quotidien. Quand on l'oublie un peu, ils sont là pour nous le rappeler. Et je trouve que c'est vraiment le sel de notre métier, en fin de compte.
- Speaker #0
C'est vrai que je parle beaucoup d'organisation du travail. Parfois, j'ai des réactions en face de moi qui se disent « Oh là là, mais l'organisation, c'est trop militaire, etc. » Et en fait, ce que je réponds, c'est au contraire. C'est que plus tu vas maîtriser une organisation et la préparer pour ton équipe, Plus elle aura à se soucier d'autres choses, en fait. Elle ne sera plus concentrée sur « mais comment je dois faire ci ? » « Qu'est-ce que je dois faire ? » « À quelle heure ? » L'idée, c'est de libérer la créativité du professionnel, libérer sa charge mentale. Tu lui donnes déjà son organisation, il n'a plus qu'à l'appliquer, c'est routinier et du coup, on peut se concentrer sur d'autres choses. On n'est plus obligé de se poser mille questions toutes les cinq minutes.
- Speaker #1
Ça demande effectivement un temps d'acquisition. qui n'est pas forcément très confortable. En fin de compte, quand on arrive, on a envie d'être déjà expert de notre pause, surtout qu'on est en période d'essai, donc on a peur, etc. Mais effectivement, une fois que ce premier temps d'acquisition de l'organisation est fait, après, on a la disponibilité psychique pour se concentrer sur autre chose. Et effectivement, ça, c'est précieux.
- Speaker #0
Écoute, je crois qu'on est d'accord. Donc, ce sera peut-être le mot de la fin. Travailler ces organisations pour libérer la charge mentale du professionnel, qu'il puisse être dans le moment présent, avoir ne serait-ce que des moments, parce que ce n'est peut-être pas accessible toute la journée.
- Speaker #1
On sait bien que le portage psychique de l'enfant, c'est la garantie d'une qualité d'accueil plus importante.
- Speaker #0
C'est vraiment garantir qu'à un moment au moins, je vais être disponible dans ma tête pour cet enfant. Et les enfants le savent, ils voient tout de suite quand on est disponible pour eux. Il ne suffit pas d'être juste dans la pièce. Donc toi, tu parles de la disponibilité. Écoute, je ne sais pas comment on va faire passer ça dans les campagnes de valorisation des métiers de la petite enfance. Donc on n'a pas encore la solution pour faire venir les gens dans notre métier. Mais déjà dans les crèches, pour garder nos professionnels, c'est leur... leur... permettent d'être disponibles pour les enfants, d'avoir cette conscience du moment présent en les soutenant en tant que manager. J'ai l'impression que c'est un petit peu ça ton message. Oui,
- Speaker #1
on est d'accord.
- Speaker #0
Eh bien, écoute, bravo pour ce parcours incroyable. Tu seras toujours la bienvenue sur le podcast si tu as d'autres choses à partager avec les auditeurs. Et puis, je te dis à très bientôt, Céline.
- Speaker #1
Merci beaucoup à toi, Amal. Et voilà, merci pour ta confiance. Et puis, à plus. Avec plaisir pour une prochaine fois, effectivement.