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Science en lumière

Les tatouages et la santé

Les tatouages et la santé

09min |17/08/2025|

16

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Les tatouages et la santé

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09min |17/08/2025|

16

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Description

🎙️ Tatouages et santé : que dit vraiment la science ?

Les tatouages sont devenus un phénomène culturel incontournable : près d’un adulte sur trois est tatoué au Canada, et la tendance s’accroît dans le monde entier. Si les risques immédiats – infections, allergies – sont bien connus, une interrogation persiste : qu’en est-il des effets à long terme, notamment du risque de cancer ?

Dans cet épisode, nous faisons le point sur l’état actuel de la recherche. Composition des encres, présence de métaux lourds et de colorants chimiques, réglementation en France, en Europe et ailleurs, hypothèses autour du rôle des pigments qui migrent dans les ganglions lymphatiques… Nous passons en revue les études disponibles et leurs résultats parfois contradictoires, avec un focus particulier sur les lymphomes et certains cancers cutanés.

Entre incertitudes scientifiques, vigilance réglementaire et enjeux de santé publique, cet épisode invite à une réflexion : comment décider sereinement de se faire tatouer aujourd’hui, alors que la science n’a pas encore toutes les réponses ?

Un podcast écrit et réalisé par Christophe Blin pour Science en lumière.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, on va parler tatouage aujourd'hui. C'est devenu hyper courant, au Canada c'est presque un tiers des adultes, et même plus chez les femmes apparemment.

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait, les chiffres sont assez parlants. Et si on connaît bien les petits soucis immédiats, genre infections, allergies…

  • Speaker #0

    Oui, ça, on en entend parler.

  • Speaker #1

    Voilà. Mais la question qui monte, c'est les effets à long terme. Et notamment ce fameux risque de cancer.

  • Speaker #0

    C'est ça, la grosse interrogation. On va donc essayer de voir ce que dit la recherche actuelle, avec les infos qu'on a, les études, la réglementation.

  • Speaker #1

    Exactement, on va explorer ça. L'idée, c'est de faire le point sur les connaissances, même si, on le verra, la réponse est loin d'être simple. Bon,

  • Speaker #0

    alors, allons-y. Pourquoi c'est si compliqué justement de savoir s'il y a un lien réel entre se faire tatouer et développer un cancer ? On lit parfois des cas, mais bon.

  • Speaker #1

    C'est le nœud du problème. Déjà, prouver un lien de cause à effet, c'est toujours très difficile en épidémiologie. Surtout ici. Pourquoi ? Parce qu'il y a plein de facteurs qui compliquent la recherche. La variété des encres est immense. Les marques, les couleurs, les compositions changent tout le temps. Ah oui. Ensuite, la taille des tatouages, ça varie énormément. Les gens en ont souvent plusieurs, faits à des moments différents. Et puis, il faut réussir à distinguer l'effet du tatouage d'autres choses.

  • Speaker #0

    Comme le tabac, l'alcool ?

  • Speaker #1

    Exactement. Le mode de vie. le statut socio-économique, tout ça peut jouer sur le risque de cancer. C'est ce qu'on appelle les facteurs de confusion. Il faut réussir à les isoler. C'est très complexe.

  • Speaker #0

    D'accord. Parlons des encres. Alors, c'est quoi exactement qu'on nous injecte sous la peau ? J'imagine que ce n'est pas juste de l'eau colorée.

  • Speaker #1

    Ah non, loin de là, les encres qu'on dit myondiologiques, c'est souvent un sacré mélange chimique. Pour que les couleurs tiennent bien, elles contiennent des métaux.

  • Speaker #0

    Des métaux. Lesquels, par exemple ?

  • Speaker #1

    Alors, on peut trouver du barium. Du cadmium, du chrome, du cobalt, du fer, du nickel, du plomb, du titane. Et dans cette liste, il y en a qui sont classés cancérigènes certains, comme le cadmium, le chrome, le plomb, le nickel. D'autres sont suspectés, comme le cobalt ou le titane. Et c'est pas tout. Il y a aussi des colorants spécifiques, les colorants azoïques. Le problème, c'est qu'ils peuvent se dégrader en amines aromatiques. Et certaines sont cancérigènes. On trouve aussi parfois des hydrocarbures aromatiques. polycycliques, les HAP, ce sont des sous-produits de combustion et certains sont aussi connus pour être cancérigènes.

  • Speaker #0

    Ça fait beaucoup de substances potentiellement problématiques dans une seule encre.

  • Speaker #1

    Et les encres dites organiques, elles sont plus sûres.

  • Speaker #0

    Elles sont à base de pigments végétaux ou de carbone. Souvent, elles s'estompent un peu plus vite. Mais le vrai souci, peu importe l'encre, c'est qu'on ne sait pas toujours ce qu'il y a dedans. L'étiquetage est souvent défaillant.

  • Speaker #1

    Ah bon ? À ce point ?

  • Speaker #0

    Oui ! Une étude américaine a montré que, tenez-vous bien, 83% des étiquettes d'encre analysées n'étaient pas conformes. Elles ne listaient pas tous les ingrédients ou donnaient de fausses informations.

  • Speaker #1

    83% ! C'est énorme ! On a l'impression d'avancer un peu à l'aveugle, non ? Et la réglementation, elle fait quoi face à ça ?

  • Speaker #0

    Ça dépend des zones. En Europe, et donc en France, il y a eu un gros tour de vis avec le règlement REACH depuis 2022. Ça interdit ou limite plein de substances dangereuses dans les encres. D'accord, ça c'est... plutôt récent.

  • Speaker #1

    Oui. Et en France, l'ANSM, l'agence du médicament, a aussi un système de vigilance depuis 2008 pour surveiller les effets indésirables qui sont signalés. Au Canada, il y a une liste d'ingrédients interdits et des tests. Aux Etats-Unis, la FDA est plus passive. Elle intervient surtout s'il y a des problèmes avérés.

  • Speaker #0

    Ok, donc des approches différentes. Revenons au risque de cancer lui-même. Les études, elles disent quoi ? Est-ce qu'il y a des cancers qui ressortent ? plus que d'autres ?

  • Speaker #1

    Oui, l'attention se porte beaucoup sur les lymphomes. C'est un type de cancer du système lymphatique.

  • Speaker #0

    Pourquoi les lymphomes en particulier ?

  • Speaker #1

    L'hypothèse principale, c'est que les pigments de l'encre ne restent pas juste là où on les a injectés. Ils sont petits, et le corps les traite comme des corps étrangers. Ils sont transportés par le système immunitaire et vont s'accumuler dans les ganglions lymphatiques.

  • Speaker #0

    Ah oui, les ganglions qu'on sent parfois quand on est malade.

  • Speaker #1

    Exactement. Et cette accumulation de pigments, qui sont des substances étrangères pourrait créer une inflammation chronique dans ses ganglions. Et on sait que l'inflammation chronique, sur le long terme, peut être un facteur de risque pour certains cancers. D'où l'hypothèse pour le lymphome.

  • Speaker #0

    C'est logique comme hypothèse. Et est-ce que les études la confirment ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est là que ça se complique. Les résultats sont assez contradictoires pour l'instant.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire ?

  • Speaker #1

    Certaines études, qu'on appelle Qu'à témoin, on compare des personnes qui ont un lymphome avec des personnes qui n'en ont pas, on trouvait un risque significativement plus élevé chez les personnes tatouées.

  • Speaker #0

    Ah quand même !

  • Speaker #1

    Oui. Une autre étude intéressante, faite sur des jumeaux, pour mieux contrôler les facteurs génétiques et environnementaux, a suggéré que le risque augmentait avec la taille du tatouage, surtout pour ceux qui sont plus grands que la paume de la main.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais, d'un autre côté, d'autres études, comme une assez grande étude en Suède ou une autre au Canada, n'ont pas trouvé ce lien de façon claire et statistiquement significative. Ou alors un risque élevé mais juste à la limite.

  • Speaker #0

    Donc on ne sait pas trop quoi en penser ?

  • Speaker #1

    Pour l'instant, non. Les différences peuvent venir de plein de choses. Les populations étudiées, le type d'encre utilisé il y a 10, 20, 30 ans, parce que le cancer met du temps à se développer, la méthodologie. C'est vraiment difficile de trancher.

  • Speaker #0

    Et pour le cancer de la peau ? Ça semble logique de regarder là, puisque c'est là qu'est le tatouage.

  • Speaker #1

    Oui, on pourrait penser que c'est le premier endroit à risque. Mais là aussi, les résultats sont mitigés. Encore ? Oui. Une étude a trouvé un risque légèrement plus élevé pour un type de cancer de la peau, le carcinome basocellulaire. C'est le plus fréquent, souvent pas très méchant. D'autres études ont aussi vu un risque accru, là encore, surtout avec de grands tatouages. Mais une étude récente, elle n'a pas trouvé de preuve de lien pour un autre type, le carcinome épidermoïde. Donc bon.

  • Speaker #0

    Et pour d'autres types de cancers, comme les cancers du sang ?

  • Speaker #1

    Pour l'instant, les recherches n'ont pas montré de signal d'alerte significatif pour d'autres cancers hématologiques. Mais encore une fois, la recherche continue. L'incertitude reste vraiment le maître mot actuellement.

  • Speaker #0

    C'est fou cette idée des pigments qui voyagent jusque ganglions. Et du coup, si on regrette son tatouage et qu'on le fait enlever au laser, est-ce que ça élimine le risque EMTA ou est-ce que ça change quelque chose ?

  • Speaker #1

    C'est une très bonne question. Le laser, en fait, il... Ils pulvérisent les pigments de l'encre en plus petits morceaux pour que le corps puisse les éliminer plus facilement. Oui. Mais ces fragments plus petits, ils prennent aussi le chemin des ganglions lymphatiques. Donc, on ne sait pas du tout si ça réduit, augmente ou ne change rien aux risques potentiels liés à l'accumulation dans les ganglions. Ça reste une inconnue.

  • Speaker #0

    D'accord. Et le soleil, il a un rôle là-dedans ? On dit souvent de protéger ses tatouages du soleil.

  • Speaker #1

    Absolument. Le soleil, ou plutôt les UV, ça accélère la dégradation de l'encre dans la peau. Et cette dégradation peut libérer des substances potentiellement nocives. Et puis, de toute façon, l'exposition au soleil augmente le risque de cancer de la peau en général, et donc aussi sur la zone tatouée. Donc oui, le conseil, c'est vraiment de bien protéger ses tatouages, soit avec une crème solaire à indices élevés, soit en les couvrant avec des vêtements.

  • Speaker #0

    Ok. Donc si on essaye de résumer tout ça, on a beaucoup de questions, des pistes, des hypothèses sérieuses. notamment sur le lien avec les lymphomes à cause de cette migration des pigments. C'est ça. Mais finalement, très peu de certitude. On ne peut pas dire aujourd'hui, pas de souci, les tatouages sont sans danger à long terme.

  • Speaker #1

    Non, absolument pas. L'état actuel des connaissances ne permet pas de conclure à l'inocuité. L'incertitude est majeure. La science avance, mais lentement sur ce sujet qui est, comme on l'a vu, très complexe.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a des recherches en cours qui pourraient nous éclairer ?

  • Speaker #1

    Oui, heureusement. Il y a de grandes études de cohorte, c'est-à-dire qu'on suit des milliers de personnes, tatouées et non tatouées, sur de très longues années pour voir qui développe quoi. Il y en a une en Allemagne, Tattoo Inca, et en France aussi, des données sont collectées via la cohorte Constance.

  • Speaker #0

    Ah, c'est une bonne nouvelle !

  • Speaker #1

    Oui, mais il faut être patient. Ce genre d'études, ça prend du temps pour avoir des résultats fiables sur des maladies comme le cancer qui apparaissent tardivement. On parle sans doute de 10, 15, voire 20 ans avant d'avoir des réponses plus solides.

  • Speaker #0

    10 ou 20 ans, d'accord. En attendant, ça laisse songeur, non ? Les tatouages sont partout. C'est un vrai phénomène culturel, esthétique. Mais on injecte quand même dans son corps des substances complexes dont on ne maîtrise pas totalement la composition, ni les effets à long terme.

  • Speaker #1

    Tout à fait.

  • Speaker #0

    Donc, la question qu'on peut peut-être laisser en suspens, c'est, face à cette incertitude scientifique qui va durer encore des années, Comment chacun peut prendre une décision éclairée aujourd'hui, au-delà de l'envie esthétique ? C'est une réflexion personnelle, finalement.

  • Speaker #1

    C'est exactement ça. Une question ouverte.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup pour cet éclairage.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

Description

🎙️ Tatouages et santé : que dit vraiment la science ?

Les tatouages sont devenus un phénomène culturel incontournable : près d’un adulte sur trois est tatoué au Canada, et la tendance s’accroît dans le monde entier. Si les risques immédiats – infections, allergies – sont bien connus, une interrogation persiste : qu’en est-il des effets à long terme, notamment du risque de cancer ?

Dans cet épisode, nous faisons le point sur l’état actuel de la recherche. Composition des encres, présence de métaux lourds et de colorants chimiques, réglementation en France, en Europe et ailleurs, hypothèses autour du rôle des pigments qui migrent dans les ganglions lymphatiques… Nous passons en revue les études disponibles et leurs résultats parfois contradictoires, avec un focus particulier sur les lymphomes et certains cancers cutanés.

Entre incertitudes scientifiques, vigilance réglementaire et enjeux de santé publique, cet épisode invite à une réflexion : comment décider sereinement de se faire tatouer aujourd’hui, alors que la science n’a pas encore toutes les réponses ?

Un podcast écrit et réalisé par Christophe Blin pour Science en lumière.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, on va parler tatouage aujourd'hui. C'est devenu hyper courant, au Canada c'est presque un tiers des adultes, et même plus chez les femmes apparemment.

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait, les chiffres sont assez parlants. Et si on connaît bien les petits soucis immédiats, genre infections, allergies…

  • Speaker #0

    Oui, ça, on en entend parler.

  • Speaker #1

    Voilà. Mais la question qui monte, c'est les effets à long terme. Et notamment ce fameux risque de cancer.

  • Speaker #0

    C'est ça, la grosse interrogation. On va donc essayer de voir ce que dit la recherche actuelle, avec les infos qu'on a, les études, la réglementation.

  • Speaker #1

    Exactement, on va explorer ça. L'idée, c'est de faire le point sur les connaissances, même si, on le verra, la réponse est loin d'être simple. Bon,

  • Speaker #0

    alors, allons-y. Pourquoi c'est si compliqué justement de savoir s'il y a un lien réel entre se faire tatouer et développer un cancer ? On lit parfois des cas, mais bon.

  • Speaker #1

    C'est le nœud du problème. Déjà, prouver un lien de cause à effet, c'est toujours très difficile en épidémiologie. Surtout ici. Pourquoi ? Parce qu'il y a plein de facteurs qui compliquent la recherche. La variété des encres est immense. Les marques, les couleurs, les compositions changent tout le temps. Ah oui. Ensuite, la taille des tatouages, ça varie énormément. Les gens en ont souvent plusieurs, faits à des moments différents. Et puis, il faut réussir à distinguer l'effet du tatouage d'autres choses.

  • Speaker #0

    Comme le tabac, l'alcool ?

  • Speaker #1

    Exactement. Le mode de vie. le statut socio-économique, tout ça peut jouer sur le risque de cancer. C'est ce qu'on appelle les facteurs de confusion. Il faut réussir à les isoler. C'est très complexe.

  • Speaker #0

    D'accord. Parlons des encres. Alors, c'est quoi exactement qu'on nous injecte sous la peau ? J'imagine que ce n'est pas juste de l'eau colorée.

  • Speaker #1

    Ah non, loin de là, les encres qu'on dit myondiologiques, c'est souvent un sacré mélange chimique. Pour que les couleurs tiennent bien, elles contiennent des métaux.

  • Speaker #0

    Des métaux. Lesquels, par exemple ?

  • Speaker #1

    Alors, on peut trouver du barium. Du cadmium, du chrome, du cobalt, du fer, du nickel, du plomb, du titane. Et dans cette liste, il y en a qui sont classés cancérigènes certains, comme le cadmium, le chrome, le plomb, le nickel. D'autres sont suspectés, comme le cobalt ou le titane. Et c'est pas tout. Il y a aussi des colorants spécifiques, les colorants azoïques. Le problème, c'est qu'ils peuvent se dégrader en amines aromatiques. Et certaines sont cancérigènes. On trouve aussi parfois des hydrocarbures aromatiques. polycycliques, les HAP, ce sont des sous-produits de combustion et certains sont aussi connus pour être cancérigènes.

  • Speaker #0

    Ça fait beaucoup de substances potentiellement problématiques dans une seule encre.

  • Speaker #1

    Et les encres dites organiques, elles sont plus sûres.

  • Speaker #0

    Elles sont à base de pigments végétaux ou de carbone. Souvent, elles s'estompent un peu plus vite. Mais le vrai souci, peu importe l'encre, c'est qu'on ne sait pas toujours ce qu'il y a dedans. L'étiquetage est souvent défaillant.

  • Speaker #1

    Ah bon ? À ce point ?

  • Speaker #0

    Oui ! Une étude américaine a montré que, tenez-vous bien, 83% des étiquettes d'encre analysées n'étaient pas conformes. Elles ne listaient pas tous les ingrédients ou donnaient de fausses informations.

  • Speaker #1

    83% ! C'est énorme ! On a l'impression d'avancer un peu à l'aveugle, non ? Et la réglementation, elle fait quoi face à ça ?

  • Speaker #0

    Ça dépend des zones. En Europe, et donc en France, il y a eu un gros tour de vis avec le règlement REACH depuis 2022. Ça interdit ou limite plein de substances dangereuses dans les encres. D'accord, ça c'est... plutôt récent.

  • Speaker #1

    Oui. Et en France, l'ANSM, l'agence du médicament, a aussi un système de vigilance depuis 2008 pour surveiller les effets indésirables qui sont signalés. Au Canada, il y a une liste d'ingrédients interdits et des tests. Aux Etats-Unis, la FDA est plus passive. Elle intervient surtout s'il y a des problèmes avérés.

  • Speaker #0

    Ok, donc des approches différentes. Revenons au risque de cancer lui-même. Les études, elles disent quoi ? Est-ce qu'il y a des cancers qui ressortent ? plus que d'autres ?

  • Speaker #1

    Oui, l'attention se porte beaucoup sur les lymphomes. C'est un type de cancer du système lymphatique.

  • Speaker #0

    Pourquoi les lymphomes en particulier ?

  • Speaker #1

    L'hypothèse principale, c'est que les pigments de l'encre ne restent pas juste là où on les a injectés. Ils sont petits, et le corps les traite comme des corps étrangers. Ils sont transportés par le système immunitaire et vont s'accumuler dans les ganglions lymphatiques.

  • Speaker #0

    Ah oui, les ganglions qu'on sent parfois quand on est malade.

  • Speaker #1

    Exactement. Et cette accumulation de pigments, qui sont des substances étrangères pourrait créer une inflammation chronique dans ses ganglions. Et on sait que l'inflammation chronique, sur le long terme, peut être un facteur de risque pour certains cancers. D'où l'hypothèse pour le lymphome.

  • Speaker #0

    C'est logique comme hypothèse. Et est-ce que les études la confirment ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est là que ça se complique. Les résultats sont assez contradictoires pour l'instant.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire ?

  • Speaker #1

    Certaines études, qu'on appelle Qu'à témoin, on compare des personnes qui ont un lymphome avec des personnes qui n'en ont pas, on trouvait un risque significativement plus élevé chez les personnes tatouées.

  • Speaker #0

    Ah quand même !

  • Speaker #1

    Oui. Une autre étude intéressante, faite sur des jumeaux, pour mieux contrôler les facteurs génétiques et environnementaux, a suggéré que le risque augmentait avec la taille du tatouage, surtout pour ceux qui sont plus grands que la paume de la main.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais, d'un autre côté, d'autres études, comme une assez grande étude en Suède ou une autre au Canada, n'ont pas trouvé ce lien de façon claire et statistiquement significative. Ou alors un risque élevé mais juste à la limite.

  • Speaker #0

    Donc on ne sait pas trop quoi en penser ?

  • Speaker #1

    Pour l'instant, non. Les différences peuvent venir de plein de choses. Les populations étudiées, le type d'encre utilisé il y a 10, 20, 30 ans, parce que le cancer met du temps à se développer, la méthodologie. C'est vraiment difficile de trancher.

  • Speaker #0

    Et pour le cancer de la peau ? Ça semble logique de regarder là, puisque c'est là qu'est le tatouage.

  • Speaker #1

    Oui, on pourrait penser que c'est le premier endroit à risque. Mais là aussi, les résultats sont mitigés. Encore ? Oui. Une étude a trouvé un risque légèrement plus élevé pour un type de cancer de la peau, le carcinome basocellulaire. C'est le plus fréquent, souvent pas très méchant. D'autres études ont aussi vu un risque accru, là encore, surtout avec de grands tatouages. Mais une étude récente, elle n'a pas trouvé de preuve de lien pour un autre type, le carcinome épidermoïde. Donc bon.

  • Speaker #0

    Et pour d'autres types de cancers, comme les cancers du sang ?

  • Speaker #1

    Pour l'instant, les recherches n'ont pas montré de signal d'alerte significatif pour d'autres cancers hématologiques. Mais encore une fois, la recherche continue. L'incertitude reste vraiment le maître mot actuellement.

  • Speaker #0

    C'est fou cette idée des pigments qui voyagent jusque ganglions. Et du coup, si on regrette son tatouage et qu'on le fait enlever au laser, est-ce que ça élimine le risque EMTA ou est-ce que ça change quelque chose ?

  • Speaker #1

    C'est une très bonne question. Le laser, en fait, il... Ils pulvérisent les pigments de l'encre en plus petits morceaux pour que le corps puisse les éliminer plus facilement. Oui. Mais ces fragments plus petits, ils prennent aussi le chemin des ganglions lymphatiques. Donc, on ne sait pas du tout si ça réduit, augmente ou ne change rien aux risques potentiels liés à l'accumulation dans les ganglions. Ça reste une inconnue.

  • Speaker #0

    D'accord. Et le soleil, il a un rôle là-dedans ? On dit souvent de protéger ses tatouages du soleil.

  • Speaker #1

    Absolument. Le soleil, ou plutôt les UV, ça accélère la dégradation de l'encre dans la peau. Et cette dégradation peut libérer des substances potentiellement nocives. Et puis, de toute façon, l'exposition au soleil augmente le risque de cancer de la peau en général, et donc aussi sur la zone tatouée. Donc oui, le conseil, c'est vraiment de bien protéger ses tatouages, soit avec une crème solaire à indices élevés, soit en les couvrant avec des vêtements.

  • Speaker #0

    Ok. Donc si on essaye de résumer tout ça, on a beaucoup de questions, des pistes, des hypothèses sérieuses. notamment sur le lien avec les lymphomes à cause de cette migration des pigments. C'est ça. Mais finalement, très peu de certitude. On ne peut pas dire aujourd'hui, pas de souci, les tatouages sont sans danger à long terme.

  • Speaker #1

    Non, absolument pas. L'état actuel des connaissances ne permet pas de conclure à l'inocuité. L'incertitude est majeure. La science avance, mais lentement sur ce sujet qui est, comme on l'a vu, très complexe.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a des recherches en cours qui pourraient nous éclairer ?

  • Speaker #1

    Oui, heureusement. Il y a de grandes études de cohorte, c'est-à-dire qu'on suit des milliers de personnes, tatouées et non tatouées, sur de très longues années pour voir qui développe quoi. Il y en a une en Allemagne, Tattoo Inca, et en France aussi, des données sont collectées via la cohorte Constance.

  • Speaker #0

    Ah, c'est une bonne nouvelle !

  • Speaker #1

    Oui, mais il faut être patient. Ce genre d'études, ça prend du temps pour avoir des résultats fiables sur des maladies comme le cancer qui apparaissent tardivement. On parle sans doute de 10, 15, voire 20 ans avant d'avoir des réponses plus solides.

  • Speaker #0

    10 ou 20 ans, d'accord. En attendant, ça laisse songeur, non ? Les tatouages sont partout. C'est un vrai phénomène culturel, esthétique. Mais on injecte quand même dans son corps des substances complexes dont on ne maîtrise pas totalement la composition, ni les effets à long terme.

  • Speaker #1

    Tout à fait.

  • Speaker #0

    Donc, la question qu'on peut peut-être laisser en suspens, c'est, face à cette incertitude scientifique qui va durer encore des années, Comment chacun peut prendre une décision éclairée aujourd'hui, au-delà de l'envie esthétique ? C'est une réflexion personnelle, finalement.

  • Speaker #1

    C'est exactement ça. Une question ouverte.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup pour cet éclairage.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

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🎙️ Tatouages et santé : que dit vraiment la science ?

Les tatouages sont devenus un phénomène culturel incontournable : près d’un adulte sur trois est tatoué au Canada, et la tendance s’accroît dans le monde entier. Si les risques immédiats – infections, allergies – sont bien connus, une interrogation persiste : qu’en est-il des effets à long terme, notamment du risque de cancer ?

Dans cet épisode, nous faisons le point sur l’état actuel de la recherche. Composition des encres, présence de métaux lourds et de colorants chimiques, réglementation en France, en Europe et ailleurs, hypothèses autour du rôle des pigments qui migrent dans les ganglions lymphatiques… Nous passons en revue les études disponibles et leurs résultats parfois contradictoires, avec un focus particulier sur les lymphomes et certains cancers cutanés.

Entre incertitudes scientifiques, vigilance réglementaire et enjeux de santé publique, cet épisode invite à une réflexion : comment décider sereinement de se faire tatouer aujourd’hui, alors que la science n’a pas encore toutes les réponses ?

Un podcast écrit et réalisé par Christophe Blin pour Science en lumière.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, on va parler tatouage aujourd'hui. C'est devenu hyper courant, au Canada c'est presque un tiers des adultes, et même plus chez les femmes apparemment.

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait, les chiffres sont assez parlants. Et si on connaît bien les petits soucis immédiats, genre infections, allergies…

  • Speaker #0

    Oui, ça, on en entend parler.

  • Speaker #1

    Voilà. Mais la question qui monte, c'est les effets à long terme. Et notamment ce fameux risque de cancer.

  • Speaker #0

    C'est ça, la grosse interrogation. On va donc essayer de voir ce que dit la recherche actuelle, avec les infos qu'on a, les études, la réglementation.

  • Speaker #1

    Exactement, on va explorer ça. L'idée, c'est de faire le point sur les connaissances, même si, on le verra, la réponse est loin d'être simple. Bon,

  • Speaker #0

    alors, allons-y. Pourquoi c'est si compliqué justement de savoir s'il y a un lien réel entre se faire tatouer et développer un cancer ? On lit parfois des cas, mais bon.

  • Speaker #1

    C'est le nœud du problème. Déjà, prouver un lien de cause à effet, c'est toujours très difficile en épidémiologie. Surtout ici. Pourquoi ? Parce qu'il y a plein de facteurs qui compliquent la recherche. La variété des encres est immense. Les marques, les couleurs, les compositions changent tout le temps. Ah oui. Ensuite, la taille des tatouages, ça varie énormément. Les gens en ont souvent plusieurs, faits à des moments différents. Et puis, il faut réussir à distinguer l'effet du tatouage d'autres choses.

  • Speaker #0

    Comme le tabac, l'alcool ?

  • Speaker #1

    Exactement. Le mode de vie. le statut socio-économique, tout ça peut jouer sur le risque de cancer. C'est ce qu'on appelle les facteurs de confusion. Il faut réussir à les isoler. C'est très complexe.

  • Speaker #0

    D'accord. Parlons des encres. Alors, c'est quoi exactement qu'on nous injecte sous la peau ? J'imagine que ce n'est pas juste de l'eau colorée.

  • Speaker #1

    Ah non, loin de là, les encres qu'on dit myondiologiques, c'est souvent un sacré mélange chimique. Pour que les couleurs tiennent bien, elles contiennent des métaux.

  • Speaker #0

    Des métaux. Lesquels, par exemple ?

  • Speaker #1

    Alors, on peut trouver du barium. Du cadmium, du chrome, du cobalt, du fer, du nickel, du plomb, du titane. Et dans cette liste, il y en a qui sont classés cancérigènes certains, comme le cadmium, le chrome, le plomb, le nickel. D'autres sont suspectés, comme le cobalt ou le titane. Et c'est pas tout. Il y a aussi des colorants spécifiques, les colorants azoïques. Le problème, c'est qu'ils peuvent se dégrader en amines aromatiques. Et certaines sont cancérigènes. On trouve aussi parfois des hydrocarbures aromatiques. polycycliques, les HAP, ce sont des sous-produits de combustion et certains sont aussi connus pour être cancérigènes.

  • Speaker #0

    Ça fait beaucoup de substances potentiellement problématiques dans une seule encre.

  • Speaker #1

    Et les encres dites organiques, elles sont plus sûres.

  • Speaker #0

    Elles sont à base de pigments végétaux ou de carbone. Souvent, elles s'estompent un peu plus vite. Mais le vrai souci, peu importe l'encre, c'est qu'on ne sait pas toujours ce qu'il y a dedans. L'étiquetage est souvent défaillant.

  • Speaker #1

    Ah bon ? À ce point ?

  • Speaker #0

    Oui ! Une étude américaine a montré que, tenez-vous bien, 83% des étiquettes d'encre analysées n'étaient pas conformes. Elles ne listaient pas tous les ingrédients ou donnaient de fausses informations.

  • Speaker #1

    83% ! C'est énorme ! On a l'impression d'avancer un peu à l'aveugle, non ? Et la réglementation, elle fait quoi face à ça ?

  • Speaker #0

    Ça dépend des zones. En Europe, et donc en France, il y a eu un gros tour de vis avec le règlement REACH depuis 2022. Ça interdit ou limite plein de substances dangereuses dans les encres. D'accord, ça c'est... plutôt récent.

  • Speaker #1

    Oui. Et en France, l'ANSM, l'agence du médicament, a aussi un système de vigilance depuis 2008 pour surveiller les effets indésirables qui sont signalés. Au Canada, il y a une liste d'ingrédients interdits et des tests. Aux Etats-Unis, la FDA est plus passive. Elle intervient surtout s'il y a des problèmes avérés.

  • Speaker #0

    Ok, donc des approches différentes. Revenons au risque de cancer lui-même. Les études, elles disent quoi ? Est-ce qu'il y a des cancers qui ressortent ? plus que d'autres ?

  • Speaker #1

    Oui, l'attention se porte beaucoup sur les lymphomes. C'est un type de cancer du système lymphatique.

  • Speaker #0

    Pourquoi les lymphomes en particulier ?

  • Speaker #1

    L'hypothèse principale, c'est que les pigments de l'encre ne restent pas juste là où on les a injectés. Ils sont petits, et le corps les traite comme des corps étrangers. Ils sont transportés par le système immunitaire et vont s'accumuler dans les ganglions lymphatiques.

  • Speaker #0

    Ah oui, les ganglions qu'on sent parfois quand on est malade.

  • Speaker #1

    Exactement. Et cette accumulation de pigments, qui sont des substances étrangères pourrait créer une inflammation chronique dans ses ganglions. Et on sait que l'inflammation chronique, sur le long terme, peut être un facteur de risque pour certains cancers. D'où l'hypothèse pour le lymphome.

  • Speaker #0

    C'est logique comme hypothèse. Et est-ce que les études la confirment ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est là que ça se complique. Les résultats sont assez contradictoires pour l'instant.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire ?

  • Speaker #1

    Certaines études, qu'on appelle Qu'à témoin, on compare des personnes qui ont un lymphome avec des personnes qui n'en ont pas, on trouvait un risque significativement plus élevé chez les personnes tatouées.

  • Speaker #0

    Ah quand même !

  • Speaker #1

    Oui. Une autre étude intéressante, faite sur des jumeaux, pour mieux contrôler les facteurs génétiques et environnementaux, a suggéré que le risque augmentait avec la taille du tatouage, surtout pour ceux qui sont plus grands que la paume de la main.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais, d'un autre côté, d'autres études, comme une assez grande étude en Suède ou une autre au Canada, n'ont pas trouvé ce lien de façon claire et statistiquement significative. Ou alors un risque élevé mais juste à la limite.

  • Speaker #0

    Donc on ne sait pas trop quoi en penser ?

  • Speaker #1

    Pour l'instant, non. Les différences peuvent venir de plein de choses. Les populations étudiées, le type d'encre utilisé il y a 10, 20, 30 ans, parce que le cancer met du temps à se développer, la méthodologie. C'est vraiment difficile de trancher.

  • Speaker #0

    Et pour le cancer de la peau ? Ça semble logique de regarder là, puisque c'est là qu'est le tatouage.

  • Speaker #1

    Oui, on pourrait penser que c'est le premier endroit à risque. Mais là aussi, les résultats sont mitigés. Encore ? Oui. Une étude a trouvé un risque légèrement plus élevé pour un type de cancer de la peau, le carcinome basocellulaire. C'est le plus fréquent, souvent pas très méchant. D'autres études ont aussi vu un risque accru, là encore, surtout avec de grands tatouages. Mais une étude récente, elle n'a pas trouvé de preuve de lien pour un autre type, le carcinome épidermoïde. Donc bon.

  • Speaker #0

    Et pour d'autres types de cancers, comme les cancers du sang ?

  • Speaker #1

    Pour l'instant, les recherches n'ont pas montré de signal d'alerte significatif pour d'autres cancers hématologiques. Mais encore une fois, la recherche continue. L'incertitude reste vraiment le maître mot actuellement.

  • Speaker #0

    C'est fou cette idée des pigments qui voyagent jusque ganglions. Et du coup, si on regrette son tatouage et qu'on le fait enlever au laser, est-ce que ça élimine le risque EMTA ou est-ce que ça change quelque chose ?

  • Speaker #1

    C'est une très bonne question. Le laser, en fait, il... Ils pulvérisent les pigments de l'encre en plus petits morceaux pour que le corps puisse les éliminer plus facilement. Oui. Mais ces fragments plus petits, ils prennent aussi le chemin des ganglions lymphatiques. Donc, on ne sait pas du tout si ça réduit, augmente ou ne change rien aux risques potentiels liés à l'accumulation dans les ganglions. Ça reste une inconnue.

  • Speaker #0

    D'accord. Et le soleil, il a un rôle là-dedans ? On dit souvent de protéger ses tatouages du soleil.

  • Speaker #1

    Absolument. Le soleil, ou plutôt les UV, ça accélère la dégradation de l'encre dans la peau. Et cette dégradation peut libérer des substances potentiellement nocives. Et puis, de toute façon, l'exposition au soleil augmente le risque de cancer de la peau en général, et donc aussi sur la zone tatouée. Donc oui, le conseil, c'est vraiment de bien protéger ses tatouages, soit avec une crème solaire à indices élevés, soit en les couvrant avec des vêtements.

  • Speaker #0

    Ok. Donc si on essaye de résumer tout ça, on a beaucoup de questions, des pistes, des hypothèses sérieuses. notamment sur le lien avec les lymphomes à cause de cette migration des pigments. C'est ça. Mais finalement, très peu de certitude. On ne peut pas dire aujourd'hui, pas de souci, les tatouages sont sans danger à long terme.

  • Speaker #1

    Non, absolument pas. L'état actuel des connaissances ne permet pas de conclure à l'inocuité. L'incertitude est majeure. La science avance, mais lentement sur ce sujet qui est, comme on l'a vu, très complexe.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a des recherches en cours qui pourraient nous éclairer ?

  • Speaker #1

    Oui, heureusement. Il y a de grandes études de cohorte, c'est-à-dire qu'on suit des milliers de personnes, tatouées et non tatouées, sur de très longues années pour voir qui développe quoi. Il y en a une en Allemagne, Tattoo Inca, et en France aussi, des données sont collectées via la cohorte Constance.

  • Speaker #0

    Ah, c'est une bonne nouvelle !

  • Speaker #1

    Oui, mais il faut être patient. Ce genre d'études, ça prend du temps pour avoir des résultats fiables sur des maladies comme le cancer qui apparaissent tardivement. On parle sans doute de 10, 15, voire 20 ans avant d'avoir des réponses plus solides.

  • Speaker #0

    10 ou 20 ans, d'accord. En attendant, ça laisse songeur, non ? Les tatouages sont partout. C'est un vrai phénomène culturel, esthétique. Mais on injecte quand même dans son corps des substances complexes dont on ne maîtrise pas totalement la composition, ni les effets à long terme.

  • Speaker #1

    Tout à fait.

  • Speaker #0

    Donc, la question qu'on peut peut-être laisser en suspens, c'est, face à cette incertitude scientifique qui va durer encore des années, Comment chacun peut prendre une décision éclairée aujourd'hui, au-delà de l'envie esthétique ? C'est une réflexion personnelle, finalement.

  • Speaker #1

    C'est exactement ça. Une question ouverte.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup pour cet éclairage.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

Description

🎙️ Tatouages et santé : que dit vraiment la science ?

Les tatouages sont devenus un phénomène culturel incontournable : près d’un adulte sur trois est tatoué au Canada, et la tendance s’accroît dans le monde entier. Si les risques immédiats – infections, allergies – sont bien connus, une interrogation persiste : qu’en est-il des effets à long terme, notamment du risque de cancer ?

Dans cet épisode, nous faisons le point sur l’état actuel de la recherche. Composition des encres, présence de métaux lourds et de colorants chimiques, réglementation en France, en Europe et ailleurs, hypothèses autour du rôle des pigments qui migrent dans les ganglions lymphatiques… Nous passons en revue les études disponibles et leurs résultats parfois contradictoires, avec un focus particulier sur les lymphomes et certains cancers cutanés.

Entre incertitudes scientifiques, vigilance réglementaire et enjeux de santé publique, cet épisode invite à une réflexion : comment décider sereinement de se faire tatouer aujourd’hui, alors que la science n’a pas encore toutes les réponses ?

Un podcast écrit et réalisé par Christophe Blin pour Science en lumière.


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, on va parler tatouage aujourd'hui. C'est devenu hyper courant, au Canada c'est presque un tiers des adultes, et même plus chez les femmes apparemment.

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait, les chiffres sont assez parlants. Et si on connaît bien les petits soucis immédiats, genre infections, allergies…

  • Speaker #0

    Oui, ça, on en entend parler.

  • Speaker #1

    Voilà. Mais la question qui monte, c'est les effets à long terme. Et notamment ce fameux risque de cancer.

  • Speaker #0

    C'est ça, la grosse interrogation. On va donc essayer de voir ce que dit la recherche actuelle, avec les infos qu'on a, les études, la réglementation.

  • Speaker #1

    Exactement, on va explorer ça. L'idée, c'est de faire le point sur les connaissances, même si, on le verra, la réponse est loin d'être simple. Bon,

  • Speaker #0

    alors, allons-y. Pourquoi c'est si compliqué justement de savoir s'il y a un lien réel entre se faire tatouer et développer un cancer ? On lit parfois des cas, mais bon.

  • Speaker #1

    C'est le nœud du problème. Déjà, prouver un lien de cause à effet, c'est toujours très difficile en épidémiologie. Surtout ici. Pourquoi ? Parce qu'il y a plein de facteurs qui compliquent la recherche. La variété des encres est immense. Les marques, les couleurs, les compositions changent tout le temps. Ah oui. Ensuite, la taille des tatouages, ça varie énormément. Les gens en ont souvent plusieurs, faits à des moments différents. Et puis, il faut réussir à distinguer l'effet du tatouage d'autres choses.

  • Speaker #0

    Comme le tabac, l'alcool ?

  • Speaker #1

    Exactement. Le mode de vie. le statut socio-économique, tout ça peut jouer sur le risque de cancer. C'est ce qu'on appelle les facteurs de confusion. Il faut réussir à les isoler. C'est très complexe.

  • Speaker #0

    D'accord. Parlons des encres. Alors, c'est quoi exactement qu'on nous injecte sous la peau ? J'imagine que ce n'est pas juste de l'eau colorée.

  • Speaker #1

    Ah non, loin de là, les encres qu'on dit myondiologiques, c'est souvent un sacré mélange chimique. Pour que les couleurs tiennent bien, elles contiennent des métaux.

  • Speaker #0

    Des métaux. Lesquels, par exemple ?

  • Speaker #1

    Alors, on peut trouver du barium. Du cadmium, du chrome, du cobalt, du fer, du nickel, du plomb, du titane. Et dans cette liste, il y en a qui sont classés cancérigènes certains, comme le cadmium, le chrome, le plomb, le nickel. D'autres sont suspectés, comme le cobalt ou le titane. Et c'est pas tout. Il y a aussi des colorants spécifiques, les colorants azoïques. Le problème, c'est qu'ils peuvent se dégrader en amines aromatiques. Et certaines sont cancérigènes. On trouve aussi parfois des hydrocarbures aromatiques. polycycliques, les HAP, ce sont des sous-produits de combustion et certains sont aussi connus pour être cancérigènes.

  • Speaker #0

    Ça fait beaucoup de substances potentiellement problématiques dans une seule encre.

  • Speaker #1

    Et les encres dites organiques, elles sont plus sûres.

  • Speaker #0

    Elles sont à base de pigments végétaux ou de carbone. Souvent, elles s'estompent un peu plus vite. Mais le vrai souci, peu importe l'encre, c'est qu'on ne sait pas toujours ce qu'il y a dedans. L'étiquetage est souvent défaillant.

  • Speaker #1

    Ah bon ? À ce point ?

  • Speaker #0

    Oui ! Une étude américaine a montré que, tenez-vous bien, 83% des étiquettes d'encre analysées n'étaient pas conformes. Elles ne listaient pas tous les ingrédients ou donnaient de fausses informations.

  • Speaker #1

    83% ! C'est énorme ! On a l'impression d'avancer un peu à l'aveugle, non ? Et la réglementation, elle fait quoi face à ça ?

  • Speaker #0

    Ça dépend des zones. En Europe, et donc en France, il y a eu un gros tour de vis avec le règlement REACH depuis 2022. Ça interdit ou limite plein de substances dangereuses dans les encres. D'accord, ça c'est... plutôt récent.

  • Speaker #1

    Oui. Et en France, l'ANSM, l'agence du médicament, a aussi un système de vigilance depuis 2008 pour surveiller les effets indésirables qui sont signalés. Au Canada, il y a une liste d'ingrédients interdits et des tests. Aux Etats-Unis, la FDA est plus passive. Elle intervient surtout s'il y a des problèmes avérés.

  • Speaker #0

    Ok, donc des approches différentes. Revenons au risque de cancer lui-même. Les études, elles disent quoi ? Est-ce qu'il y a des cancers qui ressortent ? plus que d'autres ?

  • Speaker #1

    Oui, l'attention se porte beaucoup sur les lymphomes. C'est un type de cancer du système lymphatique.

  • Speaker #0

    Pourquoi les lymphomes en particulier ?

  • Speaker #1

    L'hypothèse principale, c'est que les pigments de l'encre ne restent pas juste là où on les a injectés. Ils sont petits, et le corps les traite comme des corps étrangers. Ils sont transportés par le système immunitaire et vont s'accumuler dans les ganglions lymphatiques.

  • Speaker #0

    Ah oui, les ganglions qu'on sent parfois quand on est malade.

  • Speaker #1

    Exactement. Et cette accumulation de pigments, qui sont des substances étrangères pourrait créer une inflammation chronique dans ses ganglions. Et on sait que l'inflammation chronique, sur le long terme, peut être un facteur de risque pour certains cancers. D'où l'hypothèse pour le lymphome.

  • Speaker #0

    C'est logique comme hypothèse. Et est-ce que les études la confirment ?

  • Speaker #1

    Alors, c'est là que ça se complique. Les résultats sont assez contradictoires pour l'instant.

  • Speaker #0

    C'est-à-dire ?

  • Speaker #1

    Certaines études, qu'on appelle Qu'à témoin, on compare des personnes qui ont un lymphome avec des personnes qui n'en ont pas, on trouvait un risque significativement plus élevé chez les personnes tatouées.

  • Speaker #0

    Ah quand même !

  • Speaker #1

    Oui. Une autre étude intéressante, faite sur des jumeaux, pour mieux contrôler les facteurs génétiques et environnementaux, a suggéré que le risque augmentait avec la taille du tatouage, surtout pour ceux qui sont plus grands que la paume de la main.

  • Speaker #0

    D'accord.

  • Speaker #1

    Mais, d'un autre côté, d'autres études, comme une assez grande étude en Suède ou une autre au Canada, n'ont pas trouvé ce lien de façon claire et statistiquement significative. Ou alors un risque élevé mais juste à la limite.

  • Speaker #0

    Donc on ne sait pas trop quoi en penser ?

  • Speaker #1

    Pour l'instant, non. Les différences peuvent venir de plein de choses. Les populations étudiées, le type d'encre utilisé il y a 10, 20, 30 ans, parce que le cancer met du temps à se développer, la méthodologie. C'est vraiment difficile de trancher.

  • Speaker #0

    Et pour le cancer de la peau ? Ça semble logique de regarder là, puisque c'est là qu'est le tatouage.

  • Speaker #1

    Oui, on pourrait penser que c'est le premier endroit à risque. Mais là aussi, les résultats sont mitigés. Encore ? Oui. Une étude a trouvé un risque légèrement plus élevé pour un type de cancer de la peau, le carcinome basocellulaire. C'est le plus fréquent, souvent pas très méchant. D'autres études ont aussi vu un risque accru, là encore, surtout avec de grands tatouages. Mais une étude récente, elle n'a pas trouvé de preuve de lien pour un autre type, le carcinome épidermoïde. Donc bon.

  • Speaker #0

    Et pour d'autres types de cancers, comme les cancers du sang ?

  • Speaker #1

    Pour l'instant, les recherches n'ont pas montré de signal d'alerte significatif pour d'autres cancers hématologiques. Mais encore une fois, la recherche continue. L'incertitude reste vraiment le maître mot actuellement.

  • Speaker #0

    C'est fou cette idée des pigments qui voyagent jusque ganglions. Et du coup, si on regrette son tatouage et qu'on le fait enlever au laser, est-ce que ça élimine le risque EMTA ou est-ce que ça change quelque chose ?

  • Speaker #1

    C'est une très bonne question. Le laser, en fait, il... Ils pulvérisent les pigments de l'encre en plus petits morceaux pour que le corps puisse les éliminer plus facilement. Oui. Mais ces fragments plus petits, ils prennent aussi le chemin des ganglions lymphatiques. Donc, on ne sait pas du tout si ça réduit, augmente ou ne change rien aux risques potentiels liés à l'accumulation dans les ganglions. Ça reste une inconnue.

  • Speaker #0

    D'accord. Et le soleil, il a un rôle là-dedans ? On dit souvent de protéger ses tatouages du soleil.

  • Speaker #1

    Absolument. Le soleil, ou plutôt les UV, ça accélère la dégradation de l'encre dans la peau. Et cette dégradation peut libérer des substances potentiellement nocives. Et puis, de toute façon, l'exposition au soleil augmente le risque de cancer de la peau en général, et donc aussi sur la zone tatouée. Donc oui, le conseil, c'est vraiment de bien protéger ses tatouages, soit avec une crème solaire à indices élevés, soit en les couvrant avec des vêtements.

  • Speaker #0

    Ok. Donc si on essaye de résumer tout ça, on a beaucoup de questions, des pistes, des hypothèses sérieuses. notamment sur le lien avec les lymphomes à cause de cette migration des pigments. C'est ça. Mais finalement, très peu de certitude. On ne peut pas dire aujourd'hui, pas de souci, les tatouages sont sans danger à long terme.

  • Speaker #1

    Non, absolument pas. L'état actuel des connaissances ne permet pas de conclure à l'inocuité. L'incertitude est majeure. La science avance, mais lentement sur ce sujet qui est, comme on l'a vu, très complexe.

  • Speaker #0

    Est-ce qu'il y a des recherches en cours qui pourraient nous éclairer ?

  • Speaker #1

    Oui, heureusement. Il y a de grandes études de cohorte, c'est-à-dire qu'on suit des milliers de personnes, tatouées et non tatouées, sur de très longues années pour voir qui développe quoi. Il y en a une en Allemagne, Tattoo Inca, et en France aussi, des données sont collectées via la cohorte Constance.

  • Speaker #0

    Ah, c'est une bonne nouvelle !

  • Speaker #1

    Oui, mais il faut être patient. Ce genre d'études, ça prend du temps pour avoir des résultats fiables sur des maladies comme le cancer qui apparaissent tardivement. On parle sans doute de 10, 15, voire 20 ans avant d'avoir des réponses plus solides.

  • Speaker #0

    10 ou 20 ans, d'accord. En attendant, ça laisse songeur, non ? Les tatouages sont partout. C'est un vrai phénomène culturel, esthétique. Mais on injecte quand même dans son corps des substances complexes dont on ne maîtrise pas totalement la composition, ni les effets à long terme.

  • Speaker #1

    Tout à fait.

  • Speaker #0

    Donc, la question qu'on peut peut-être laisser en suspens, c'est, face à cette incertitude scientifique qui va durer encore des années, Comment chacun peut prendre une décision éclairée aujourd'hui, au-delà de l'envie esthétique ? C'est une réflexion personnelle, finalement.

  • Speaker #1

    C'est exactement ça. Une question ouverte.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup pour cet éclairage.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

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