- Speaker #0
Bonjour à toutes et tous, je suis Stéphanie Pelleret-Delga. Vous écoutez le podcast Sois, Vie, Aime. Oser un leadership authentique et inspirant, au service de soi, des autres, de son écosystème et du vivant. Tous les mois, je reçois des dirigeantes, dirigeants, experts, expertes. entrepreneurs, entrepreneuses qui ont fait ce chemin entre vulnérabilité et puissance, qui ouvrent leur cœur et partagent leurs expériences professionnelles et plus personnelles. Par leur parcours et personnalité, ils, elles, sèment des graines sources d'inspiration. Et vous, quelles graines avez-vous envie de semer ? Quel leadership souhaitez-vous incarner ? À mon micro ! Aujourd'hui, j'ai le plaisir d'accueillir Guillaume Capelle. Bonjour Guillaume.
- Speaker #1
Bonjour.
- Speaker #0
Merci d'avoir accepté mon invitation dans Sois, Vie, Aime. Je suis très heureuse de cette rencontre. Et on enregistre aujourd'hui cette interview dans mon salon, transformée en studio, pour l'occasion, après une petite balade en forêt. Et puis j'en profite aussi pour remercier notre ami Armel Dupelou.
- Speaker #1
Merci.
- Speaker #0
Qui nous a mis en lien. Alors cher Guillaume, tu es entrepreneur social et investisseur à impact, tu fondes l'ONG Singa en 2012, organisation internationale qui œuvre pour l'inclusion des personnes réfugiées et des nouveaux arrivants, en les connectant avec les sociétés d'accueil, et qui accompagne des projets entrepreneuriaux portés par des réfugiés via l'incubation et le tutorat de professionnels. Tu es également cofondateur et président de l'association J'accueille. Tu es considéré comme l'un des jeunes Français les plus talentueux de ta génération par le magazine Forbes en 2016, rien que ça, et tu apparaît notamment dans la nouvelle photo du siècle de Yann Arthus-Bertrand en 2020, mettant à l'honneur des entrepreneurs et des activistes sociaux et environnementaux. En 2023, tu rejoins Impact Partners en tant que directeur associé.
- Speaker #1
Tout à fait.
- Speaker #0
Waouh ! Alors, qu'est-ce qui fait, Guillaume, que déjà en 2012, alors que tu as seulement 25 ans, tu fondes une ONG comme Singa ? Ça te vient d'où, ça ?
- Speaker #1
L'envie de fonder quelque chose ou spécifiquement fonder Singa ?
- Speaker #0
On va pouvoir aborder les deux sujets et cet aspect entrepreneurial. Et puis, tu es déjà dans l'impact et tu as cette idée. Ce n'est pas rien d'avoir cette idée de fonder une communauté comme celle de Singa.
- Speaker #1
Je pense que pour moi, c'était une évidence au moment où on a créé Singa. La raison qui m'a amené à créer une organisation sur le sujet de l'intégration, de la cohésion sociale, je pense que ça, pour le coup, c'est du hasard. J'ai toujours eu envie de créer des choses. J'ai écrit, en fait, avant même de créer Singa, j'ai écrit deux romans. J'ai écrit un roman, tu ne savais pas ? Non,
- Speaker #0
je ne suis pas assez mince alors !
- Speaker #1
Je les ai retirés de la publication. En fait, ils ont été publiés pendant une dizaine d'années. Et là, je n'assumais plus trop parce que j'étais quand même très jeune quand je les ai écrits. Le premier, j'avais 19 ans et je revenais de mon premier stage au Japon. J'avais fait un peu une science-fiction, en fait, digestion de mon expérience là-bas. Et à 22 ans, j'ai écrit un deuxième roman qui était plutôt en fait une histoire liée à ce que j'avais vécu en Australie et qui là est un peu la genèse de ce que Singa est devenu. J'étais parti aussi sur une histoire, un roman un peu plus d'apprentissage, mais avec toute une philosophie, enfin je ne sais pas comment on peut dire, plutôt mythologie en fait liée aux Torres Strait Islanders et aux aborigènes. Donc j'avais utilisé plein de notions en fait des peuples autochtones australiens pour faire avancer mon personnage dans son histoire et tout ça. J'ai aussi créé une marque, je voulais lancer un magazine avec mes potes. donc on avait déposé à l'Inpi tout un projet etc ça s'appelait comment ce magazine ? ça s'appelait Potland franchement s'ils écoutent le podcast ils vont se marrer parce que je les avais emmenés dans cette aventure et donc bon heureusement on n'a jamais lancé ce truc là parce que le nom franchement je pense qu'on aurait eu du mal à l'assumer sur du long terme mais non c'était en tout cas je vois que j'ai toujours eu envie en fait de de lancer des projets. J'ai été aussi effrayé à l'idée de faire quelque chose pendant 40 ans. C'est-à-dire, j'ai fait des études, mais franchement, atterrir sur un métier et devoir faire ce même métier pendant 40 ans, en fait, ça a vraiment posé question. Je ne savais pas comment j'allais pouvoir faire ça. Et en fait, quand j'ai été en Australie, chez Amnesty International, je me suis retrouvé dans une équipe qui accompagnait des demandeurs d'asile et des personnes réfugiées. Et là, en fait, j'ai tout de suite su que c'est ça que j'allais faire parce que je me suis retrouvé en face de plein de personnes qui étaient complètement sous le radar de nos sociétés, mais que moi, je trouvais fascinante. Et donc, je voyais qu'aucun espace n'était créé, aucun outil n'était créé pour qu'on se rencontre les uns avec les autres. Et je voyais que parmi toutes ces personnes, il y avait des super entrepreneurs, porteurs de projets. Et que... j'avais l'opportunité de passer du temps avec eux. Et donc, ça a été le début de cette idée de créer Singa. Et puis, je suis rentré en France. J'en ai parlé avec un très bon copain à moi qui s'appelle Nathan Elmol. Et je crois que le lendemain, on était déjà en train de travailler sur le projet.
- Speaker #0
Ok, donc un esprit entrepreneur un peu par essence. J'ai l'impression, un rapport à la liberté, j'entends aussi. dans ce que tu nous partages. Et puis, tu m'as dit au tout début, finalement, l'impact social presque par hasard. Et en même temps, j'entends, quand tu décris cette expérience avec Amnesty International, des évidences dans le fait qu'il y ait quelque chose à faire.
- Speaker #1
Aussi, j'ai toujours eu envie de bosser sur des choses essentielles. Et c'est pour ça, je pense que j'ai fait des études aussi en sécurité internationale et défense. Je voulais, moi, être plutôt dans la diplomatie au départ, et je rêvais de travailler, quand je suis rentré dans ces études, plutôt aux Nations Unies, plutôt dans des ambassades, en me disant que si je pouvais être un pont entre plusieurs pays, si je pouvais être dans les conversations qui permettent d'assurer la paix dans notre monde, etc., je serais au bon endroit, et je voulais aller sur les sujets les plus épineux. En fait, je trouvais qu'il n'y a rien de plus intéressant que d'aller sur tout ce qui crée quelque part du conflit et faire en sorte de trouver des solutions. Je me suis rendu compte qu'il n'y avait pas de meilleur moyen de faire ça. Et ça, je ne l'avais pas envisagé avant Singa, mais il n'y avait pas de meilleur moyen de faire ça que de travailler directement avec les personnes qui avaient été confrontées à ces crises, à ces conflits qui avaient été confrontés. directement dans leur vie, en fait, aux pires choses qui puissent nous arriver, nous, en tant qu'humains, et qui entreprenaient, c'est-à-dire qu'elles apportaient des solutions malgré le fait qu'elles avaient vécu tout ça. Et donc, il y avait un peu le sentiment que j'allais croiser des super humains, en fait, dans ces communautés qu'on était en train de créer. Les personnes qui, comme une Maryse Klaudowska devenue Marie Curie, allaient faire progresser l'humanité. sur des centaines d'années en fait. Et donc je pense qu'il y a, quand j'ai compris ça, quand j'ai compris que l'exil, c'était pas un truc de réfugiés ou de migrants, que c'était pas une population en fait extérieure, mais que c'était des membres de l'humanité qui, confrontés à une situation extrême, devaient continuer leur vie et devaient potentiellement continuer d'apporter des solutions et qu'ils avaient d'autres solutions. gagner une expérience et des compétences qu'aucun d'entre nous n'avait dans malheureusement ce qui leur est arrivé et bien je me suis dit ok en fait je suis vraiment au bon endroit parce qu'il y a des chances que je croise les personnes les plus passionnantes de notre époque en fait Et beaucoup plus passionnant que les diplomates, finalement, avec qui j'aurais bien aimé être au départ.
- Speaker #0
Donc, en fait, sur ce chemin-là, comme une évidence, comme une raison d'être que, face à l'adversité en commun dans cette humanité, il y a quelque chose qui se déploie chez quelqu'un et que toi, tu as envie d'être au plus proche de ces personnes qui ont quelque chose à l'intérieur à déployer, qui a pu être renforcé par l'adversité.
- Speaker #1
Oui, et puis, même il y a... En 2012, je sais qu'on écrivait déjà sur les sujets de transition environnementale. La crise climatique, en fait, on la voit venir depuis de très nombreuses années. Le magazine Potland, dont je te parlais tout à l'heure en rigolant, en fait, le thème, c'était de trouver... En fait, il fallait écrire des articles sur comment on pouvait... C'était un magazine vert et, je ne sais plus, sportif, je crois. Mais donc du coup, l'idée, c'était déjà d'apporter des solutions sur les sujets de climat, etc. Donc je pense que ça me pesait déjà, moi, en tant que jeune, en fait, de trouver des solutions par rapport à la transition sociale et environnementale qui est nécessaire. Et donc, pour y arriver... Pour y contribuer en fait de mon vivant, j'avais besoin de rencontrer des gens qui ne pensaient pas comme ceux qui m'entouraient. Parce qu'en fait, ceux qui m'entouraient, j'avais l'impression qu'ils n'étaient pas du tout porteurs de solutions sur ces sujets-là. Et j'avais l'impression qu'ils étaient soit complètement autruches et ils ne regardaient pas le problème en face, soit en fait ils étaient anxieux, paniqués, ils n'étaient pas en capacité en fait d'apporter des solutions. Et donc c'était aussi pour ça que j'étais tout de suite... très heureux de me retrouver finalement dans cet univers et dans cet écosystème qu'on a créé avec Singa, parce que pour la première fois, j'étais confronté à des perspectives que je n'avais jamais entendues nulle part ailleurs. Et donc je me disais, au sein de cette oasis qu'on est en train de créer chez Singa, on va faire émerger aussi des idées, des projets qui n'auraient jamais pu voir le jour dans des entreprises plus classiques, des associations qui existent déjà. Et donc, je ne me serais jamais vu, en fait, au moment où on crée Singa, je ne me serais jamais vu bosser, en fait, dans une entreprise, une organisation publique ou une association autre que Singa. Parce qu'il n'y avait pas un endroit qui me satisfaisait, en fait.
- Speaker #0
Donc là, je ressens comme une évidence absolue, comme un terrain, comme un flot, un chemin ouvert. Ça paraît presque facile quand on parle comme ça. J'imagine bien que ça ne l'est pas du tout, nécessairement.
- Speaker #1
Pas forcément.
- Speaker #0
Pas forcément, tu souris. Mais surtout, je suis frappée par ta conscience, déjà si jeune, en fait, aux sujets qui, à l'époque, ne sont pas, comme tu le dis, pas évidents pour tous, ces sujets sociaux et environnementaux. Et cette conscience-là, cette sensibilité-là, est-ce que tu sais d'où elle vient ?
- Speaker #1
Je ne sais pas exactement d'où elle vient. En fait, je sais que j'en étais très conscient très rapidement. Je n'ai pas eu d'éducation spécialement sur le sujet. Je sais que j'ai eu, en tant que collégien, lycéen, je ne sais plus exactement quand, mais j'ai eu une vraie fascination pour le travail de Léonard de Vinci. Et du coup, j'ai été en particulier fasciné par tout ce qui est biomimétisme et comment on s'inspire de la nature pour inventer des innovations, que ce soit des ailes pour pouvoir voler, des hélicoptères, etc., en regardant les oiseaux. Et donc, du coup, il y avait un vrai sujet sur la protection de... Je ne sais pas, j'étais animé par cette idée qu'il fallait protéger la nature, la biodiversité, parce qu'on en a besoin, tout simplement, pour que ce soit viable pour nous aussi en tant qu'humains. Écoute, franchement, je ne sais pas tout à fait d'où ça vient, parce qu'à l'école, finalement, on n'a pas trop appris ça. Donc, je pense que ça vient de la lecture. Je pense que ça vient beaucoup des livres, en fait. Et j'ai passé beaucoup, beaucoup de temps à lire.
- Speaker #0
Merci. Merci de le partager avec autant de simplicité. Il n'y a pas forcément un événement qui vient expliquer une prise de conscience. Il y a une curiosité. Il y a une appétence.
- Speaker #1
Non, il y a un amour des animaux aussi. J'ai grandi avec des chiens. J'ai toujours aimé les animaux de manière générale. Et donc, s'imaginer un monde où... c'est OK qu'il y en ait plein qui disparaissent. C'est quelque chose qui était effrayant. Et ça m'a toujours un peu étonné qu'il n'y ait pas plus de monde qui se dise qu'il faut qu'on fasse quelque chose, qu'il faut qu'on se bouge. Donc voilà, oui, c'est pour ça que ça fait... Moi aussi, dès qu'on a commencé Singa, j'avais écrit des articles, etc. pour essayer d'éveiller un peu les consciences sur les rapports aussi entre migration et environnement. Enfin... Pour moi, les deux sujets sont liés. Force est de constater que la prise de conscience est très lente.
- Speaker #0
Elle est lente. Et si tu pouvais expliquer pour ceux pour qui ce n'est pas évident, en quoi justement la migration, l'environnement, les sujets d'immigration et d'environnement sont liés ?
- Speaker #1
Tout simplement parce que l'humain utilise ses jambes. En fait, on est né avec le moyen de se déplacer. C'est vraisemblablement pas possible. pour rester planté quelque part. Donc pour moi, les gens qui veulent réguler la manière dont les gens bougent, en fait, je trouve que c'est contre-humain de vouloir faire ça, puisqu'on est littéralement morphologiquement fait pour bouger. On s'est toujours déplacé pour s'adapter aux changements de notre environnement. Il y a eu, en fait, dans l'histoire de l'humanité, plein de changements climatiques. Il y a eu... des conflits et en fait systématiquement on a utilisé nos jambes, on a utilisé nos véhicules pour se déplacer et donc pour moi c'est déjà... Les changements climatiques qui changent certains territoires, avec la désertification, avec l'acidification des océans, etc., fait nécessairement que des gens vont devoir se déplacer. Donc ça, c'est, on va dire, l'impact des changements climatiques sur l'humain. Mais après, ces déplacements, en fait, ils font aussi que des gens bougent leurs connaissances, leurs compétences et leurs capacités de travail à différents endroits. Et donc, du coup... Ils font partie de la solution sur ces sujets climatiques. Et donc, du coup, ils apportent parfois de l'innovation frugale, ils apportent de la résilience, ils apportent parfois aussi, ils sont un peu lanceurs d'alerte, parce que si, en fait, tu as des gens qui ont dû se déplacer à cause de changements climatiques, en fait, ils peuvent éveiller un peu les consciences du nouvel endroit où ils arrivent pour dire, réveillez-vous, nous, on a dû partir de chez nous, parce qu'en fait, rien n'avait été fait pour s'adapter. au changement climatique. Donc voilà, les migrations font partie et sont complètement liées aux événements environnementaux, en fait, de mon point de vue.
- Speaker #0
Je partage ton point de vue. Justement, ce que tu viens de partager ici, en plus, ils apportent quelque chose de la résilience, des projets, un autre regard à viser aussi. Est-ce que, pour revenir justement à ce que tu as dit, créé avec Singa. Il y a des belles histoires qui ont été faites. Est-ce que tu aurais envie d'en partager quelques-unes ?
- Speaker #1
C'est toujours dur pour moi de choisir qui que ce soit. Singa, simplement pour expliquer, c'est au départ une association de loi 1901 qui avait vocation à accompagner des entrepreneurs en exil. Très rapidement, Singa s'est devenu Une organisation qui faisait aussi énormément d'événementiels pour favoriser la rencontre entre ceux qui arrivent et ceux qui sont déjà là. Et l'accompagnement des entrepreneurs ne s'est plus limité à des entrepreneurs en exil, mais est devenu aussi l'accompagnement de tous les entrepreneurs, y compris européens, qui voulaient faire de l'innovation dans le domaine. Donc on a accompagné dans des programmes d'incubateurs, d'accélérateurs, plus de 2000 entreprises dans 7 pays. Et on a réuni plus de 80 000 personnes dans des événements, etc. Donc, c'est devenu une organisation internationale. Maintenant, tu as 120 salariés qui sont dans sept pays et qui animent des programmes d'entrepreneuriat ou animent des programmes de ce qu'on appelle community management, donc faire en sorte que les gens se rencontrent. Il y a des tas d'histoires fantastiques. Dans les... Dans les projets, peut-être que je retiens, parce que je l'ai vu juste tout à l'heure, en fait, il a fait un post sur LinkedIn. Il y a un entrepreneur que j'aime beaucoup qui s'appelle Carlos Arbeles, qui est colombien, qui est devenu réfugié en France, qui a lancé plusieurs entreprises. La première qu'il a faite, c'est une entreprise pour relancer des filières de miel en France. puisqu'il disait que le miel vient de très loin. Et donc lui, il avait aussi une approche très écologique. Il disait que c'est quand même dommage parce qu'on peut faire des ruches en France et donc le miel coûterait moins cher et serait de meilleure qualité, etc. Et on va utiliser les savoir-faire de gens qui gèrent des ruches en Syrie et qui sont réfugiés aujourd'hui en France. Et donc du coup, ils avaient relancé ça. L'organisation s'appelle Espero. Maintenant, elle fait... pas que du miel, elle fait plein d'autres activités sur des métiers de l'économie circulaire. Donc en fait, ils font de l'insertion sociale et de l'économie circulaire, en accompagnant les réfugiés vers tout un tas de métiers de l'économie de demain. Et lui, il est parti, il a lancé un nouveau projet. Il a lancé une entreprise sur le café. À la fois, il a son coffee shop à Paris maintenant qui s'appelle Plural Café. Mais il a aussi tout un service de café, Fairtrade. Il a refait des partenariats avec des petits producteurs là-bas, etc. Et en fait, il livre tout à vélo. C'est intéressant, c'est des entrepreneurs comme ça qui nous poussent aussi à réfléchir sur nos pratiques. notre impact environnemental. Et voilà, c'est toujours une source d'inspiration pour moi d'avoir des conversations avec lui.
- Speaker #0
Génial, merci. Et alors justement, comment Singa, au départ, a pu porter, accompagner Carlos ? Ça a été quoi, en fait, le rôle, l'appui de Singa ?
- Speaker #1
En fait, je dirais que l'appui, c'est déjà... de créer un lieu dans lequel, pour la première fois, on ne s'adresse pas aux réfugiés en tant que bénéficiaires. Pour leur première fois, on ne leur demande pas c'est quoi vos besoins ou c'est quoi vos problèmes, mais en fait, on leur dit quels sont vos projets. Et en fait, moi, j'adore ce moment où une petite étincelle s'allume dans les yeux de la personne à qui tu demandes ça parce que tu lui redonnes énormément de dignité. Quand tu demandes à quelqu'un quels sont tes problèmes, évidemment la personne va s'étendre sur tous les trucs horribles qui lui sont arrivés. Tu ne vas apporter des solutions que à ses grands problèmes. Mais cette même personne qui a évidemment des problèmes, elle a aussi des projets, des rêves, etc. Et quand tu commences à lui poser ces questions-là, du coup en fait il y a une perspective d'avenir qui se dessine, on rentre dans une nouvelle conversation parce que finalement... Autour du projet, on peut dire « Ah oui, mais elle a un problème de logement, donc du coup, il faut trouver le moyen d'adresser ce problème. » Mais on n'est plus bloqué et complètement enfermé dans cette perspective de « tout va mal » . On est dans « demain, mon objectif, c'est de retrouver un emploi, créer une entreprise, retourner à l'université. » Il y a quelque chose qui anime la personne et qui facilite aussi l'engagement de tous les autres acteurs. Parce que toi, en tant que citoyen, tu te dis, ah, je peux accompagner quelqu'un à retrouver un emploi ou je peux filer un coup de main à un jeune étudiant qui a envie de choisir la bonne université, mais qui n'y connaît rien aux universités françaises. Et en fait, on réactive aussi la capacité de chacun à participer à ces projets-là. Parce que quand tu dis à tout le monde, bon, cette personne, elle n'a pas d'argent, elle n'a pas de logement, elle a des problèmes de français, etc. En fait, les gens qui vont vraiment s'engager là-dessus... C'est un engagement très, très, très fort. Et parfois, ça nous laisse démunis parce qu'en fait, on ne sait pas comment faire. La personne a des traumas, peut-être psychologiques, etc. En fait, si on n'est pas professionnel, il n'y a pas grand-chose auquel on puisse contribuer. Je pense que Singa, déjà, c'est simplement de reposer des nouvelles questions.
- Speaker #0
Singa, c'est avant tout un espace.
- Speaker #1
Oui, je pense que d'abord, Singa, c'est les conditions idéales de la rencontre. En fait, pour moi, c'est vraiment ça la vocation de Singha. Alors Singha, ça veut dire le lien aussi en Lingala. Et pour moi, c'est un peu un cabinet d'architecture ou d'archiculture, comme je l'appelle. C'est d'essayer de penser tout l'espace pour que ceux qui arrivent, les réfugiés, les immigrés dans nos villes, dans notre pays, etc. Et... les meilleures opportunités de croiser ceux qui sont là. Et donc, ça va dans les deux sens. Et donc, ça veut aussi dire penser le lieu, littéralement, les tables. Est-ce qu'elles sont assez longues ? Est-ce qu'elles favorisent la rencontre ? Et voilà, on ne pense pas assez souvent à cet endroit où on va se rencontrer. Il a son importance parce que si c'est un endroit dans lequel on n'a pas envie de traîner, la rencontre ne sera pas si intéressante que ça. Il faut que ce soit un endroit chaleureux, il faut que ce soit un endroit où on peut se sentir soi-même. Ça me fait toujours penser à McDo, avec « Venez comme vous êtes » , c'est leur slogan. Je me dis, on aurait dû prendre ce slogan-là avant qu'ils le trouvent.
- Speaker #0
C'est marrant, cette petite comparaison à McDo. « Venez comme vous êtes » . Moi, j'ai l'impression que les lieux que tu décris, personnellement, ils ne sont pas exactement comme ceux de McDo, mais j'ai peut-être des gros préjugés.
- Speaker #1
Non, ils ne le sont pas, mais en fait, je pense que par contre... L'ambition que j'ai toujours mis derrière Singa et derrière les projets que je porte, c'est de devenir des organisations à la hauteur d'entreprises de cette taille-là. Dans le sens où aujourd'hui, elles sont arrivées dans nos imaginaires, elles sont synonymes de création de valeur quand même, même si pas toujours. Tout n'est pas positif. Je ne suis certainement pas en train de défendre McDo. Moi, je n'y vais quasi jamais. Mais en tout cas, ce que je veux dire, c'est que si on a envie de porter aussi un changement sur ce qu'est la migration aujourd'hui, vu que c'est un phénomène majeur de nos sociétés, on ne peut pas créer une petite entreprise. On est obligé de penser immédiatement à une organisation internationale. qui a un poids dans la société, dans l'économie. Après la comparaison, c'est plus parce que je pense que pour pouvoir être à ce niveau-là, il faut aussi un marketing, il faut aussi un branding, il faut aussi toute une réflexion sur comment on est accessible. à ses clients, en fait, même si ce sont des citoyens, mais comment chacun peut s'approprier Singa et ce qu'on peut y faire.
- Speaker #0
Et merci d'en parler en ces termes-là, justement, de... J'entends donc une ambition à la hauteur des enjeux, en fait, et donc de pouvoir porter cet impact que tu as en toi. Et ça nécessite un marketing. Et tu fais le lien entre la taille à développer, de l'impact de Singa. Et le fait de proposer des espaces où on peut être en toute authenticité. Et j'aime en fait, ça résonne bien pour moi, ce lien que tu fais entre l'authenticité, permettre des espaces d'authenticité, et la taille de l'impact.
- Speaker #1
Et tu veux dire que, et le lien entre les deux, avec ces deux choses-là ? Bah en fait, oui, bon l'impact il est évident, c'est que de toute manière, les migrations en fait, elles ne vont faire que... que augmenter dans les années qui viennent. L'illusion que certains peuvent avoir que c'est un phénomène qu'on peut contrôler, en fait, elle est complètement fausse parce qu'en fait, on est arrivé à un niveau... Les migrations ont augmenté énormément du fait de la mondialisation, l'économie, etc. a fait que beaucoup de gens ont bougé, sont liés à plein de territoires, donc ils vont continuer de bouger puisqu'ils appartiennent aussi à plusieurs pays. Mais aussi parce qu'en fait, les conflits se sont aussi multipliés ces dernières années. Et donc, du coup, on a beaucoup de gens qui se sont déplacés à cause de ça. On l'a vu ces dix dernières années. Plus de deux fois et demi le nombre de personnes qui étaient forcées de se déplacer. Donc, ça veut dire qu'on est passé d'à peu près 40 millions de personnes à 110 millions de personnes. Et les Nations Unies, là, du fait des changements climatiques, font des projections à... D'ici 2050, plus de 300 millions de personnes qui se déplacent. Donc, c'est-à-dire qu'on multiplierait encore par trois le nombre de personnes actuellement déplacées. Donc, pour moi, l'enjeu, ce n'est pas forcément de se dire, il faut qu'on limite l'immigration. Enfin, ou du moins, le meilleur moyen de limiter l'immigration, c'est aujourd'hui d'essayer d'éviter qu'on passe à plus de 2 degrés au niveau climatique. Parce que c'est ça, en fait, qui va pousser plus de gens à... à se déplacer. Donc, par exemple, si on se positionne contre l'immigration, le meilleur moyen, c'est de faire passer notre économie à, je veux dire, le moins d'empreintes carbone possibles. C'est ça le seul truc qui pourrait faire qu'il y ait moins de déplacements, forcés en tout cas.
- Speaker #0
Ok, et je reviens à cette notion d'authenticité, de pouvoir découpler en fait l'impact en permettant des espaces d'authenticité, en permettant cette rencontre. entre des personnes avec des talents, réfugiés, immigrés, et ceux qui vont être sur leur chemin, pouvant accompagner un bout de chemin.
- Speaker #1
Moi, c'est une croyance très forte que j'ai, qui est que le changement ne vient pas par l'information, mais vient par l'expérience. Oui. Et en fait, ou du moins par la connaissance. Et donc, du coup, on peut être bombardé d'informations, parfois factuelles. C'est pas pour ça qu'on va, en fait, les synthétiser et les transformer en connaissances. pour nous-mêmes, et surtout qu'on va réussir à prendre des décisions par rapport à ces sujets-là, etc. Et la migration, c'est un très bon exemple. Je pense qu'il n'y a quasiment aucun sujet qui est plus médiatisé aujourd'hui que l'immigration, etc. On en parle tout le temps, c'est dans les débats publics constamment, et pourtant, la majorité des gens sont ignorants sur ce sujet. En fait, toute l'information dont nous bombardent ne devient pas connaissance et ne sert pas à agir. En revanche, l'expérience, c'est-à-dire
- Speaker #0
Plutôt que de parler des migrants et d'en entendre parler, mais du coup, de vivre ensemble et de construire des projets ensemble. En fait, là, tout de suite, on voit de la transformation. Tout de suite, on sent sa capacité de devenir un acteur. Donc, du coup, pour moi, ce que tu appelles authenticité, en fait, pour moi, c'est plutôt de l'expérience utilisateur. Tu sais, j'utilise plein de termes de boîte, mais c'est parce qu'en fait, je pense que c'est ça qui est réellement... apporte du changement. C'est quand tu fais en sorte de créer des choses dans lesquelles les gens ont envie de contribuer, passer du temps, etc. Et les choses que font les gens les transforment. Et que ce soit de manière passive à regarder des séries Netflix toute la journée, en fait, ça bombarde ton imaginaire d'images, de mots, etc. Ou de manière active. Et donc, évidemment, moi, je pousse beaucoup plus pour des choses actives. et je crois que la transition elle viendra du des expériences par lesquelles on va faire passer tous les gens au sein de nos sociétés et donc moi mon rêve c'est plutôt que dans quand on a lancé Singa le rêve c'était que au bout de 10 ans tous les français connaissent au moins une personne réfugiée plutôt qu'ils en aient entendu parler à la télé et bon on est encore loin du compte mais on aura quand même permis à plus de 100 000 personnes de se croiser. Et en fait, on se rend compte qu'à chaque fois que les gens se rencontrent au sein de Singa, ça les transforme. Ça transforme les Français sur leur opinion de ce qu'est la migration, de qui sont les réfugiés, mais ça transforme aussi complètement les réfugiés sur leur capacité aussi à agir dans la société et à leur sentiment d'appartenance, etc.
- Speaker #1
Merci de cet espace vertueux, un bel espace qui permet une rencontre. Cette rencontre, c'est l'expérience et l'expérience, ça vaut toutes les informations du monde. Et donc, c'est là, j'entends cette raison d'être de Singha. Merci pour ça.
- Speaker #0
Tout à fait.
- Speaker #1
Et tu parlais, tu as fait une allusion au récit. Alors, effectivement, sur Netflix, il y a pas mal de dystopie. Alors, ça tombe bien parce que moi, j'ai envie de te parler d'utopie, justement. Tu as contribué à un livre collectif, Les Utopiennes, des nouvelles de 2043, qui a été publié en octobre 2023 par les éditions La Mer Salée. Et donc, il y a 30 auteurs et autrices qui imaginent des récits au sein de cet ouvrage. Et toi, tu as signé un chapitre, La migration est un humanisme. Est-ce que tu veux bien m'en dire un peu plus, s'il te plaît ?
- Speaker #0
Déjà, ce que je peux dire, c'est que l'exercice de prospective, c'est quelque chose que je fais régulièrement et assez naturellement. Souvent, les gens avec qui j'ai travaillé disent que je suis visionnaire et je pense que je porte souvent mon regard loin. Et j'essaie toujours d'imaginer quel serait l'impact des choses qu'on va faire et de toujours essayer d'alterner entre un regard proche. avec les équipes, avec les personnes qui sont dans nos incubateurs, etc. Il y a un regard loin pour se rappeler. Mais en fait, pourquoi on fait tout ça ? Ça va servir à quoi au final ? Et je pense que c'est toujours important de se rappeler ce pourquoi. Et en fait, j'ai trouvé un univers dans lequel j'ai croisé tout un tas de gens qui fonctionnaient un peu de la même manière. C'est l'Institut des Futurs Souhaitables. Et donc, j'ai eu la chance d'être surtout, comment dire ? conférenciers pour toutes les personnes qui font cette espèce de parcours où ils rencontrent plein de gens qui leur racontent le futur sur plein de thématiques. Ça peut être la biologie, ça peut être sociologie, ça peut être comme moi les sujets de migration. Ils ont plein d'intervenants qui les emmènent 20 ans plus tard. Et c'est là que j'ai rencontré Yannick et Sandrine qui sont à la tête des éditions de la Mer Salée et qui font les Utopiennes. Et il m'avait demandé de commettre un chapitre dans 2043. Et donc voilà, j'ai imaginé une petite histoire. Je ne vais pas tout vous dire, mais il y a une interview avec Novak Djokovic qui, dans 20 ans, est devenu une personnalité tout à fait différente de ce qu'il est aujourd'hui du fait de son enfermement en Australie. pendant la pandémie dans un centre d'hébergement avec des demandeurs d'asile. Centre que je connaissais très bien puisque quand j'étais en Australie, je travaillais avec ce centre-là.
- Speaker #1
Tu es assez complet en fait, Guillaume. Tu as des visions, tu écris, tu as un sens marketing, tu as une sensibilité, tu as des convictions et tu es un homme d'action.
- Speaker #0
J'aime beaucoup cette idée de polyvalence. En vrai, tu sais, ça revient à l'homme de Vitruve. En fait... C'est ce côté d'essayer de, pas forcément être parfait, bien au contraire, mais en fait être harmonieux. Et donc du coup, de développer l'esprit, mais aussi le corps, développer l'âme, ou la partie plutôt, on va dire, sociale, altruiste, etc.
- Speaker #1
On peut dire spirituelle ?
- Speaker #0
Oui, tout à fait. mais c'est peut-être l'un des endroits où je suis le moins développé je pense que en fait je pense que le spirituel et aussi tout ce qui est je sais pas comment on peut l'appeler mais plutôt la danse, la musique la méditation tout à l'heure t'as vu les efforts qu'il m'a fallu pour me mettre dedans je pense que cette partie là je suis clairement très très loin du compte il y a du jugement je t'ai vu ouvert et bien sûr aussi de Oui, mais c'est quand même un exercice qui est beaucoup plus difficile pour moi de me lâcher prise.
- Speaker #1
Alors peut-être que le lâcher prise est moins dans ta zone d'évidence, mais l'harmonie y est quand même.
- Speaker #0
Oui, tout à fait.
- Speaker #1
Et accéder à l'harmonie, c'est quoi ta recette pour accéder à l'harmonie ? Qu'est-ce que tu aurais envie de dire ?
- Speaker #0
La recette pour accéder à l'harmonie, je pense que... C'est déjà de s'aimer soi. Et donc, ça passe par consacrer du temps à soi-même, à mon avis. Donc, ça veut dire consacrer à faire les choses qu'on aime, mais consacrer aussi à faire les choses qui font qu'on va s'aimer. Et donc, ça peut être pour certains faire du sport, ça peut être développer des compétences, ça peut être... Mais je pense qu'il faut s'accorder du temps et il faut se... Être, comment dire, aussi de temps en temps, on a le droit de rater des choses, il faut s'apprécier. Et je pense qu'il y a une part de la réussite qui passe par ça. Je pense qu'il y a une part aussi qui est dans le bon équilibre entre vie sociale, vie professionnelle. Et donc ça, ça veut dire aussi ne pas oublier de consacrer du temps à ce qu'on aime. Et donc, moi, je le mettrais un peu dans cet ordre-là. Et donc, ne pas oublier aussi que chaque moment peut être très important et parfois un peu éphémère, parce qu'en fait, il y a aussi des gens qu'on aime qui disparaissent. Et on regrette très souvent. Là, ça m'est arrivé très récemment. Et donc, c'est toujours aussi dans ces moments-là qu'on se dit... J'aurais dû plus profiter. Il y a une petite part. Donc, je pense que ne jamais négliger. En fait, les bons moments, ils sont quand même très, très, très précieux. Il faut les apprécier à leur juste valeur. Et puis après, la dernière chose pour moi et de mettre de l'harmonie, c'est de me sentir acteur. En fait, je ne peux pas supporter l'idée d'être un pion. dans l'échiquier de certains autres. Pour sentir que je suis acteur et que je contribue à développer le monde qui, moi, j'estime juste, etc., d'abord, j'essaie de me nourrir d'informations qui vont me servir à agir. Donc, du coup, ça veut dire quoi ? Ça veut dire que, par exemple, moi, je ne regarde pas du tout la télé. Je n'ai pas la télé, d'ailleurs. Ça fait 20 ans que je n'ai pas la... Depuis que je suis étudiant, je n'ai pas la télévision, etc. Mais j'essaie de lire des choses où il y a soit qui m'emmènent, qui me font rêver, etc. Soit des utopies, soit des études qui me permettent d'avoir de la connaissance. Mais j'essaie de nourrir mon cerveau, entre guillemets, de la même manière dont j'essaierais de me nourrir moi en mangeant. C'est-à-dire de ne pas manger. que du fast news qui va te bousiller la tête, qui va faire appel systématiquement à ton système sympathique, le truc où tu es soit dans la fuite, soit dans le combat. Sympathique. Donc du coup, d'essayer aussi de me nourrir intellectuellement de choses qui vont me permettre, moi, derrière, d'être un acteur. Et après, j'ai un peu une méthode d'organisation assez propre, mais je suis quand même assez structuré en fait. J'ai des gros tableaux avec des visions long terme, moyen terme et court terme. J'ai tout un tas de tâches à effectuer jour par jour et ça me permet aussi de monitorer un peu ce que je fais. Ça, c'est mon organisation personnelle pour atteindre l'harmonie.
- Speaker #1
Il est précieux ce programme, j'entends, dans ce chemin d'harmonie, d'amour de soi. De tolérance aussi vis-à-vis de soi. J'entendais une juste exigence entre la tolérance et en même temps se donner les moyens d'eux. D'être acteur de ce que tu fais, de te nourrir sainement de ce que tu laisses. Tu filtres les informations, tu es plus porté par les utopies que le flot d'informations qu'il pourrait y avoir dans nos vies. Et puis, tu es aussi très structuré pour porter cette action-là, avec des visions très long terme, moyen terme, court terme.
- Speaker #0
Et puis, il y a une vitamine aussi qu'on oublie toujours de prendre. Et malheureusement, elle est nécessaire à l'harmonie, mais c'est la vitamine N, c'est de dire non. Il faut apprendre aussi à dire non. Ce n'est pas si facile, mais il y a des choses qu'on n'a pas envie de faire. Et malgré soi, on se retrouve à les faire. Pour ne pas... Parce qu'on n'ose pas blesser. Ça, j'ai appris, moi, un peu à mes dépens. C'est qu'au début, je disais oui à quasiment tout. Et en fait, je me suis retrouvé à être en très mauvaise santé à cause de ça. Et donc, je pense que ça, c'est quelque chose que j'ai aussi découvert. C'est qu'il y a des moments où, en fait, on fait déjà énormément de choses. Et c'est OK de ne pas en faire plus. En fait, on est déjà à la limite de ce que nous, on est capable d'offrir. Et ce n'est pas parce qu'on n'en offre pas un petit peu plus qu'on n'est pas quelqu'un de bien.
- Speaker #1
Et que tu as le droit de t'aimer quand même, même si tu dis non.
- Speaker #0
Et tu as le droit de t'aimer quand même, même si tu dis non. Et que les gens ne sont pas non plus totalement diminués. C'est-à-dire que ce n'est pas parce que tu leur as dit non qu'ils sont foutus.
- Speaker #1
Et donc savoir dire non aussi. Et puis dans ce que je n'ai pas renommé, que tu as dit tout à l'heure et que je trouve tellement précieux, c'est de savoir accorder du temps qui soit harmonieux. pour l'harmonie entre le boulot, la famille et se rappeler qu'il y a des moments précieux et de savoir aussi en profiter. C'est beaucoup de sagesse quand même tout ça pour quelqu'un qui s'est dit tout à l'heure pas trop spirituel.
- Speaker #0
Alors ouais, j'ai très bonne note en philosophie. Je ne sais pas si ça, ça compte. Mais pour moi, spirituel, c'est peut-être que je le relie trop à des dimensions religieuses ou à quelque chose de... d'autre chose. Mais oui, je suis très philosophe, je pense.
- Speaker #1
Et j'ai l'impression que cette philosophie, elle a toujours dessiné tes projets de vie dans nos différents échanges, que ce soit là maintenant pendant l'interview ou tout à l'heure dans la forêt. J'ai l'impression que cette curiosité, ces lectures, ton écriture, tes ouvrages que tu as nommés tout à l'heure, ils sont emprunts de ton appétence à une certaine philosophie et je trouve en lien avec en fait un humanisme, l'histoire. des hommes et des femmes. Et tu parlais de vision et de... Moi, je vois beaucoup de perspectives entre avant et ce que pourrait être demain et toi, ce que tu as envie d'en faire aujourd'hui.
- Speaker #0
Oui, complètement. Écoute, je n'ai jamais pensé à ça comme ça. Je pense qu'on a... En fait, j'ai toujours pensé les livres comme des fenêtres nous permettant d'avoir des copains de différentes époques. Parce qu'en fait, un livre, c'est l'accès à la pensée. quasiment résumé de quelqu'un d'autre et donc du coup tu peux te faire en lisant certains bouquins tu peux quasiment avoir le sentiment d'être le pote de Ernest Hemingway parce qu'en fait t'as pigé ce qu'il voulait dire et donc j'adore cette idée en fait qu'on a comme ça un peu un accès à plein plein de personnes et à leurs pensées et on a c'est quand même une chance incroyable et je m'en suis beaucoup nourri ... J'ai l'impression qu'il y a plein de choses qui se répètent aussi à travers l'histoire. Et c'est vrai qu'on peut tirer plein de leçons de ce qui s'est déjà passé et essayer de voir comment on peut s'inspirer des meilleures décisions qui ont été prises. Après, ça ne se reproduit jamais tout à fait de la même manière. Donc, c'est aussi à nous de trouver notre chemin dans tout ça. Mais oui, moi, j'adore tisser des liens, en fait. J'ai l'impression qu'une des choses qui me définit, c'est aussi ça, c'est de pouvoir relier peut-être des... des époques, mais aussi reliées des peuples. En fait, je me souviens très bien, chez Amnesty International, j'avais cette base de données, tu vas voir où je veux en venir avec tout ça, qui était un tableau Excel, pour faire très simple, où on me présentait les gens avec lesquels on travaillait par leur nationalité, leur statut juridique, puis leurs difficultés, c'est-à-dire ne parlent pas la langue anglaise. n'a pas de logement, n'a pas d'emploi, etc. Pour moi, ça, c'était une approche très physique de ce qu'était la situation de ces gens et qui ne peut que nous opposer. C'est-à-dire, si tu me dis, ce gars-là est syrien, bon, moi, je suis français. Il est réfugié, bon, moi, je suis citoyen australien. Il ne parle pas l'anglais, bon, moi, je parle l'anglais. Il n'a pas de logement, bon, j'ai un logement. Et en fait, tu as une base de données, que de choses qui font qu'on est différents l'un de l'autre. Mais je te prends la même personne, parce que moi, je leur parlais aux gens, et je me rends compte qu'il adore Beyoncé. Il a fait des études en mathématiques. Il cherche un emploi dans les médias. Elle a envie de créer une entreprise dans la restauration. Et en fait, avec cette base de données-là, que moi j'appelle plutôt physique quantique. En gros, tu crées quelque chose qui est transnational. On s'en fout que le mec, il est syrien, il adore la musique. Donc comme il adore la musique, tu peux le connecter avec plein d'autres gens qui adorent la musique. Il a fait des études en pharmacie. Ok, c'est intéressant pour potentiellement qu'il bosse dans une pharmacie. Il veut créer une entreprise dans les médias. Moi, j'ai bossé dans les médias. Donc du coup, je peux peut-être lui raconter comment ça fonctionne, etc. Et donc... Moi, ce qui m'a toujours intéressé, c'est de créer les bases de données ou de collecter les informations qui font qu'on peut se relier. Et donc, je me rends compte que beaucoup de nos organisations internationales, à l'échelle publique, etc., en fait, elles ne collectent que de la donnée qui nous oppose. Et donc, il y a aussi un enjeu, il y a une mission ici, qui est de collecter les données qui vont faire qu'on va pouvoir... Créer de la cohésion sociale, créer du lien, parce qu'en fait les données, c'est ce qu'on va analyser, ce qui va nous permettre de prendre des décisions. Et donc si à tous nos députés, à chaque fois on leur file que les premières données de ma base de données et on leur dit « prenez des décisions sur la migration » , en réalité je comprends que certains prennent les décisions qu'ils prennent aujourd'hui, c'est-à-dire des décisions quasiment exclusivement sécuritaires ou humanitaires. Il faut sauver les gens ou il faut se protéger de ces gens. Mais s'ils avaient la base de données que moi j'essaye de construire depuis maintenant 15 ans, sans doute qu'ils prendraient d'autres décisions. Parce qu'en fait, ils verraient qu'on a des opportunités de créer de la valeur, que la migration, ce n'est pas seulement des coûts d'installation de certaines personnes et de réparation quand certains dépassent les bornes. La migration, c'est aussi un capital que se forge la société. Parce que quand j'entends, c'est quoi le coût de la migration ? Et que personne ne prend en compte dans les revenus de la migration le capital que produit une maricurie, il est inestimable ce capital-là. Et donc, du coup, on ne prend pas en compte la richesse à long terme qui est produite par nos interactions culturelles. Et donc, je ne sais plus pourquoi je suis parti loin.
- Speaker #1
Tu es parti là parce que tu aimes relier les époques.
- Speaker #0
Oui, voilà. Et j'adore ce lien qu'on peut construire.
- Speaker #1
Et donc, c'est créer de la reliance à l'endroit du plein plutôt que des creux dans ce qui relie, plutôt que ce qui oppose. Et dans ce que tu dis, je ne peux pas m'empêcher de voir quelque chose de l'ordre de l'homo biospheris. cher à
- Speaker #0
Jean-Pierre Gou,
- Speaker #1
cette humanité mondiale, on est tous interreliés évidemment. Et du coup, toi concrètement, ça fait déjà des années que tu œuvres justement par l'expérience, faire vivre l'expérience et donc j'ai envie de dire les émotions aussi entre humains, faire vivre cette reliance-là.
- Speaker #0
Oui, parce qu'elle est évidente pour moi en fait. J'ai passé... Tellement de temps. Là, je ne sais pas combien de milliers de personnes j'ai rencontrées aussi ces dernières années. Clairement, de au moins 150 pays. Je n'ai pas compté. Ce serait d'ailleurs amusant. tellement de gens avec qui j'ai senti une résonance forte, peu importe leur nationalité ou leur statut juridique, que c'est difficile pour moi de mettre plus en avant le fait que je suis un Français et que j'appartiens au groupe des Français versus j'appartiens au groupe des gens qui créent, peut-être des emplois, qui créent de la valeur, qui innovent. Et ces gens-là, ils n'ont pas de nationalité, en fait. Et donc, oui, je suis d'accord avec toi. Moi, je ressens cette appartenance à une humanité. Et après, même si je suis très attaché au territoire dans lequel j'ai grandi, je me sens aussi normand, je me sens aussi breton, je me sens aussi même un peu en bourgeois, puisqu'on a habité en Allemagne avec la famille pendant un petit temps, et je me sens français, européen. Mais... Mais ce n'est pas exclusif, en fait. C'est plutôt... Ça s'ajoute, en fait, un peu comme des couches, les unes avec les autres, et ça s'entremêle.
- Speaker #1
Merci, Guillaume. Concrètement, j'ai envie de te questionner aussi. Donc là, moi, je ressens ta vision, ton humanisme, ton écologie intérieure avec cette recherche d'harmonie, ton action, ton sens de la structure. Concrètement ? Quand tu as l'idée, tu as la vision, puis tu as une équipe après, comment ça se passe pour toi ? C'est quoi le leader que tu es en tant qu'entrepreneur à impact chez Singa qui emploie quand même, tu disais, une centaine de personnes ?
- Speaker #0
120, oui. 120 salariés aujourd'hui. Et puis moi, je ne suis plus chez Singa aussi depuis deux ans. On en parlera tout à l'heure. En fait, je suis devenu dirigeant d'une organisation à l'âge de 23 ans. puisque Singa, Nathanel avait 24, moi 23 quand on a démarré. Et par contre,
- Speaker #1
c'est pas l'heure, j'ai dit 25.
- Speaker #0
Écoute, c'est pas très loin. Du coup, on n'avait absolument pas eu d'expérience professionnelle avant. J'avais fait un peu de management parce que je me suis retrouvé avec une équipe d'une trentaine de juristes chez Amnesty International. C'est pas rien. Non, c'est pas rien, mais disons que ça avait duré sept mois. J'avais 22 ans, je pense que je m'en suis bien tiré honnêtement, mais je ne pouvais pas dire que j'avais 10 ans de management derrière moi, que je lançais une boîte et que je m'y connaissais. Donc vraiment, j'ai le sentiment qu'on a appris tout sur le tas, qu'on a fait franchement sans doute toutes les erreurs dans le bouquin de « Toutes les erreurs à ne pas faire » .
- Speaker #1
Merci de le dire.
- Speaker #0
Oui, c'est sûr. Après, je regrette un peu sur plein de choses. Je pense qu'il y a plein de personnes qui... qu'on a mal accompagné en fait, tu vois, je me dis aujourd'hui, dans le sens, dans les équipes, nous on a découvert ce qu'était le management au fur et à mesure. Et même, on a essayé de mettre en place parfois des méthodes de management. Tu vois, on était beaucoup inspiré du, comment dire, du Reinventing Organization de LALOU. Donc, on a essayé de mettre en place plein de choses, mais avec des gens qui, eux, venaient parfois d'ONG super structurées, hyper descendantes, etc., qui n'avaient pas du tout envie d'être dans ce système-là, mais qui avaient juste envie d'un truc où ils avaient un manager responsable d'eux. Et nous, on a essayé de faire quelque chose où on espérait qu'un peu chacun se sente entrepreneur lui-même. Je ne sais pas comment dire.
- Speaker #1
C'est aussi ça le leadership, de pouvoir donner le pouvoir d'agir. Créer ces espaces de pouvoir d'agir, j'entends cette intention-là.
- Speaker #0
Mais peut-être qu'on avait aussi mal mesuré que certaines personnes sont juste plus rassurées quand elles ont un truc précis à suivre, etc. Mais pour te dire quel type de leader... Moi, j'ai toujours essayé d'être un leader à l'écoute. déjà, au moins de ce que ressentaient les uns les autres. Et je pense que parfois, ça m'a un peu joué des tours parce que du coup, dès que ça n'allait pas, les gens venaient me voir. Et donc, je pense que ce n'est pas bon non plus. Donc ça, j'ai appris aussi à le transformer. J'ai essayé de toujours réexpliquer pourquoi on faisait les choses. C'est-à-dire, même quand on faisait un programme d'incubateur pour dix personnes, dix entrepreneurs, alors que... On parlait d'avoir une ambition, je te disais, on va concurrencer McDonald's, mais c'était un peu ça, du coup, il y avait des gens qui ne comprenaient pas. Attends, là, on accompagne dix personnes. En quoi, demain, en fait, on va peser sur les décisions qui sont prises au niveau de la société sur les sujets de migration ? Et donc, du coup, moi, j'ai essayé de toujours donner du contexte, de toujours réexpliquer la raison d'être de l'organisation, peu importe les activités parfois très triviales qu'on pouvait faire. Et c'est très important pour moi que chacun sache pourquoi il est là et en fait, à quoi il contribue.
- Speaker #1
Donner la vision, la raison d'être, être à l'écoute et en même temps, ne pas être le sauveur.
- Speaker #0
Oui, alors ça, c'est aussi un truc qui est difficile parce que... éviter donc d'être d'être dans ce rôle de sauveur dans lequel tous les médias et tous les je dirais les partenaires te mettent alors pas forcément de sauveur mais de héros donc et en fait tu as aussi tout le paradoxe c'est que tu es obligé aussi de jouer un peu ce rôle là pour obtenir certaines récompenses et certains prix qui font en sorte que tu puisses aussi avancer ton entreprise donc par exemple on s'est retrouvé à être des entrepreneurs sociaux Alors que pour nous, en fait, on s'en foutait. En fait, on faisait Singa. On n'était pas là pour être des entrepreneurs sociaux. Mais on s'est rendu compte que... C'est le projet de la petite étiquette,
- Speaker #1
pardon.
- Speaker #0
Ouais, c'est ça. Enfin, je veux dire, je ne sais même pas si on se prenait pour des entrepreneurs réellement au début. On ne se prenait pour personne, en fait. On voulait juste faire Singa, en fait, parce qu'on estimait que c'était important. Et après, on voulait développer cette organisation. on s'est rendu compte qu'il y avait tout un écosystème autour de l'entrepreneuriat social et que là-dedans, il y avait des gens qui pouvaient t'aider à structurer, y compris financièrement les projets, etc. Donc, petit à petit, on est devenu un certain nombre d'étiquettes parce que ça permettait d'aider à booster le projet. Et donc, tu es filmé, tu es interviewé, tu es je ne sais pas quoi. Et puis après, tu te retrouves... devant les équipes qui, elles, en fait, ont contribué parfois autant que toi, en fait, au projet, mais ce n'est pas elles qui sont visibles. Donc, il y a tout un tas de choses aussi qu'on a découvert et qu'il fallait gérer. Donc, comment tu donnes du crédit, en fait, aussi à chacun ?
- Speaker #1
La reconnaissance.
- Speaker #0
Oui. Comment tu permets aussi de multiplier les voix sur ton sujet ? Parce que nous, tout l'objectif, c'était de dire, la migration, en fait, ce n'est pas... qu'un leader associatif qui va aider des gens. C'est une communauté dans laquelle il y a plein de gens super intéressants qui vont créer. Et donc du coup, il fallait qu'il y ait plusieurs visages et plusieurs voix chez Singa. Mais ça nous a aussi joué des tours parce qu'en fait, derrière, il y avait 10, 15 personnes qui étaient visibles. Et donc, plus personne disait, on ne comprend pas. Les gens qui avaient des fonctionnements très classiques disaient, on ne comprend plus qui c'est qui gère cette boîte. Et donc, c'est là qu'on en a parlé tout à l'heure dans la forêt. Le principe source. Oui, et puis de ne pas mettre l'humilité au mauvais endroit. Et donc, ça aussi, ça a été des vrais apprentissages en termes de leadership. C'est que parfois, ce n'est pas bon d'avoir de l'humilité à tout moment. Il y a certains moments où il faut assumer, prendre ses responsabilités, de ce qu'on pense et dire, écoutez, c'est moi qui ai posé cette vision-là. Maintenant, si vous n'êtes pas d'accord, on en parle. Tout ça, c'était aussi des... Pour moi, leadership, c'est aussi apprentissage. J'ai l'impression que je n'en parle pas souvent de leadership. Mais je me rends compte que pour moi, c'est très lié à apprendre aussi en même temps que tu transmets.
- Speaker #1
Apprendre par l'expérience. Je vois beaucoup de systémie par rapport au projet que tu as créé, c'est-à-dire créer des espaces où par l'expérience, il y a des apprentissages. Et donc, c'est un peu comme ça que tu parles. Là, j'ai l'impression du leadership. Et pour le coup, merci de ton humilité. On apprend à marcher en marchant. Et donc, j'entends que... Tu es le leader que tu es aussi par les expériences que tu as vécues. Donc il y a quelque chose d'assez naturel et inné chez toi dans la vision, le partage, l'écoute, l'authenticité, cette recherche d'harmonie. Et après, de fait, il y a des ajustements. par l'expérience dans un groupe ou nécessairement, surtout quand tu es visionnaire et que tu commences à 23 ans,
- Speaker #0
tu penses que c'est l'expérience qui t'apprend. Tu fais des erreurs. Et aussi, je pense à une autre chose, le leadership pour moi. Et en fait, c'est vraiment, je l'ai ressenti. En fait, je me suis senti leader souvent dans ces moments-là. C'est quand tout va mal.
- Speaker #1
Oui.
- Speaker #0
En fait, quand tout va bien, quelque part, c'est facile d'être un leader. parce que t'apportes des revenus, parce que t'as trouvé un partenaire, tu apportes des idées et on a l'argent pour mettre en place les idées. Donc en fait, là, il n'y a personne qui va contester ou qui va... je ne sais pas, t'es reconnu assez facilement, etc.
- Speaker #1
Il y a comme une fluidité.
- Speaker #0
Oui, il y a une fluidité. Le partage d'informations se fait facilement, etc. Je trouve que ce qui est plus intéressant, c'est quand les choses ne vont pas bien, on n'arrive plus éventuellement à financer ce qu'on aimerait. Dans les médias, le sujet s'enflamme sur l'émigration et on voit des personnes de notre communauté en souffrir. Et là, je trouve que le rôle du leader, c'est d'apporter du calme. Et en fait, de la sérénité, parce que très vite, on voit des gens qui vont lâcher, qui vont exploser, qui vont en fait dire tout est fini, alors que tout n'est pas en fait fini. Simplement, oui, on aura peut-être besoin de se réinventer. On va avoir besoin de penser différemment. On ne pourra plus travailler avec ce partenaire puisqu'il nous a lâchés. Mais donc, du coup, on va trouver un autre partenaire. Et en fait, c'est ce moment de lucidité. Et aussi cette capacité à proposer des nouvelles solutions que je retrouve chez finalement assez peu de personnes. Et j'ai l'impression que parfois, on se reconnaît entre guillemets entre leaders. Je pense que les gens peuvent évoluer. Ils ne peuvent pas forcément être leaders à un moment et puis ils le sont à un autre moment de leur vie. Mais moi, c'est toujours dans ces moments-là où tout partait à volo que j'ai vu que je réagissais un peu différemment des autres. espèce de truc où...
- Speaker #1
Sur le bateau, il y a la tempête. C'est ça.
- Speaker #0
Et plus ça va, et plus c'est le bordel, plus je me sens focus et je me sens aussi en partie utile. Donc du coup, ça nous est arrivé en 15 ans d'avoir des problèmes comme ça. Et c'est dans ces moments-là que je me suis senti le plus utile. Parce qu'en fait, c'est des moments où on n'est pas trop dans l'optimisation de ce qui existe. En fait, on est dans réinventer. Et j'aime beaucoup, moi, ces moments de créativité, en fait.
- Speaker #1
Effectivement, la créativité qui te caractérise tellement dans ton leadership et le goût du défi aussi dans ce que tu nous partages là, dans la tempête. Il y a tout à réinventer et moi, j'aime assurer la sérénité. Et en plus, dans la façon dont tu le partages,
- Speaker #0
je ressens la sérénité.
- Speaker #1
Et donc aussi, j'entends une espèce... entre guillemets, enfin pas une espèce, mais un goût du défi dans la créativité, aller chercher de façon peut-être un peu plus originale encore ?
- Speaker #0
En fait, tu vois, la vie, je me dis, la vie est courte. Pour s'amuser, en fait, il faut quand même se donner quelques défis. Et en fait, moi, j'aimerais pas faire... Le même travail tout le temps et aller sur des projets qui sont simples. En fait, j'aime bien quand je me lance dans un truc et ça me paraît impossible. Et j'adore ce moment où tu comprends rien. Et puis, en fait, petit à petit, tu pièges un truc et tu avances et tu t'y terres. Et puis, en fait, tu arrives à rassembler quelques personnes autour de toi. Et puis, elles aussi, elles embarquent d'autres gens. Ça devient des ambassadeurs. J'adore en fait... Partir de rien, ce côté ex nihilo et en fait, petit à petit, voir les réalisations. Et j'adore le faire sur des sujets qui me paraissent fondamentaux. Que ce soit le climat, que ce soit les migrations. Ça pourrait être d'autres sujets demain, je ne sais pas encore.
- Speaker #1
Et alors, tu parlais de changement. Alors, je veux bien justement qu'on parle en 2023. Tu es directeur associé, tu rejoins Impact Partners. Qu'est-ce qui t'a poussé ? à quitter Singa et à aller dans cette direction-là ?
- Speaker #0
En même temps, c'est un lien avec ce qu'on a fait depuis le début puisque la première idée de Singa, c'était de financer les entrepreneurs. On voulait se doter d'une capacité de financement des entrepreneurs. On voulait le faire via la foule. On voulait faire une plateforme de financement participatif, du crowdlending à l'époque. On n'a jamais mis ça en place parce que finalement, on s'est rendu compte qu'il y avait plein de plateformes qui existaient. Et puis, on a travaillé avec des partenaires qui étaient soit des business angels, soit des plateformes de microcrédit, etc. Mais cette idée ne m'a jamais quitté que si je voulais une transformation culturelle sur ces sujets-là, il fallait petit à petit mettre en place l'infrastructure. Et l'infrastructure, ça voulait dire quoi ? Ça voulait dire l'immobilier, ça voulait dire pénétrer dans toutes les entreprises avec de l'activité de conseil, et ça voulait dire la finance. En fait, ça voulait dire tout ce qui reste sur de nombreuses années. Et c'est pour ça que, comment dire, plein d'autres gens qui ont une vision opposée de la mienne sur les sujets de migration se sont emparés des médias pour pouvoir proposer des imaginaires sur ces sujets, se sont emparés de... comment dire, de l'immobilier, se sont emparés de plein de choses. Si on veut, en fait, poser sur le long terme sur des sujets, en fait, il faut rentrer dans ce qui est la culture, mais il faut aussi rentrer dans l'infrastructure, parce que l'infrastructure, c'est des choses qui restent pendant au moins dix ans. Typiquement, tu crées un fonds d'investissement, pendant dix ans, en fait, il va exister. Et donc, c'est du temps long par rapport à ce que font beaucoup d'associations qui sont... permanence dans l'urgence, elles font des choses à 15 jours, 3 mois, parfois quand celles qui ont une grande vision long terme, elles arrivent à faire du 3 ans mais c'est tout. Et pareil, le temps politique est très court. Les élections des députés ou même d'un président, en fait, c'est 5 ans. Et là, toutes ces choses-là, en fait, ça dure plus longtemps. Et donc la finance, c'était clé pour faire aussi avancer l'agenda que j'ai depuis longtemps en tête. Surtout, c'était clé pour accélérer des solutions qui existent aujourd'hui en Europe. En ayant accompagné pendant 12 ans des entreprises dans nos incubateurs et accélérateurs, j'ai vu émerger un écosystème de milliers d'entreprises qui peuvent changer la donne sur les sujets d'intégration et de cohésion sociale. Donc j'ai envie de prendre la crème de la crème de ces entreprises et lorsqu'elles ne sont que sur un territoire, elles ne sont qu'aux Pays-Bas ou elles ne sont qu'en France, les aider à se déployer à l'échelle du continent européen. Et quand j'ai une entreprise qui, par exemple, permet aux enfants continuer d'apprendre les maths, continuer d'apprendre la chimie, ce qu'ils veulent, dans leur langue natale et dans la langue locale. Ce qui fait qu'ils ne vont pas perdre deux ans de scolarité, ce qui fait apprendre juste le suédois ou le néerlandais. Mais qui vont pouvoir, grâce à une plateforme numérique où les cours, tout le cursus suédois va être traduit dans leur langue. Ils vont pouvoir continuer à se sentir bons en maths, parce que c'est des gamins, ça se trouve, ils adoraient, je ne sais pas, telle matière. Là, ils vont pouvoir continuer, ne pas perdre trop de temps. Du coup, leurs parents vont se sentir mieux parce qu'ils n'ont pas des enfants qui, pendant deux ans, se sentent mal à l'école, etc. Et tout ça, en fait, ça produit une accélération de l'inclusion qui change tout. Et des solutions comme ça sur la santé, sur le logement, sur l'éducation, sur la formation professionnelle, il en existe plein. Et moi, je veux qu'elles se déploient immédiatement parce que d'abord, on en a besoin maintenant sur plein de sujets d'intégration et de cohésion sociale. Mais surtout, on en aura encore plus besoin demain avec les migrations climatiques. Et donc, pour pouvoir faire cette accélération, j'ai besoin d'investir. Et donc, du coup, c'est pour ça que j'ai rejoint Impact Partner. pour créer une nouvelle stratégie d'investissement sur les sujets d'inclusion. À l'échelle européenne, parce que c'est l'échelle sur laquelle j'ai travaillé ces dernières années, c'est l'échelle à laquelle Synga et Impact Partners travaillent. Et donc là, on est en pleine levée de fonds. Et l'objectif, c'est dans le courant de l'année, de commencer nos premiers investissements. Donc voilà, on est...
- Speaker #1
2025, une sacrée année.
- Speaker #0
2025, ce serait en tout cas, si les choses arrivent à bien se goupiller, ce sera une grosse année. Et ce sera une année aussi un peu de réalisation parce que là, moi, ça fait trois ans que je travaille dans l'ombre sur ces projets-là. Et j'ai hâte de pouvoir enfin repasser de l'autre côté, c'est-à-dire travailler avec les entrepreneurs. Le fundraising, la levée de fonds, il y avait tout un travail de structuration qui était nécessaire, mais j'en ai un peu marre.
- Speaker #1
T'as envie de retourner à tes premiers amours dans le pérationnel en lien, sur le terrain Merci, merci beaucoup Guillaume, on arrive vers la fin de cette interview et je vais te poser je vais te proposer un petit voyage est-ce que t'es d'accord ? Ce petit voyage je vais te proposer peut-être de fermer les yeux éventuellement mettre la main sur ton cœur et Et je te propose d'aller te balader en 2035. On est en 2035, qu'est-ce qui fait battre ton cœur ?
- Speaker #0
Là, tu veux que je te réponde ? 2035, qu'est-ce qui fait battre mon cœur ? Normalement, en 2035, je suis arrivé au bout du fond. C'est-à-dire qu'on a pu soutenir une vingtaine de solutions à l'échelle européenne. qui ont permis à des millions de personnes d'accéder à un compte bancaire, à des millions d'enfants d'avoir des cours dans leur langue et de pouvoir s'adapter plus facilement à l'école, qui ont permis à des centaines de milliers de personnes de trouver un emploi qui correspond à leurs compétences et donc qui n'ont pas été déclassées socialement et professionnellement, qui ont permis à... des dizaines d'entrepreneurs en exil de lancer leur entreprise et donc d'innover, de créer de l'emploi, de prouver que la migration, l'exil, peuvent être synonymes aussi de richesse et d'innovation. Donc toutes ces histoires ont été reprises dans la presse, ont donné lieu à des fictions. des romans, mais aussi des films, des séries télévisées qu'on adore regarder. Et du coup, sont rentrés aussi dans nos têtes, dans nos conversations autour de la table. Et donc, on a complètement changé notre rapport à, pas forcément la migration, mais la rencontre à l'échelle locale. Parce que plutôt que de devenir un phénomène... médiatique et un peu extérieur avec lequel on a le sentiment d'avoir une distance, c'est devenu quelque chose de très concret dans nos vies et on a gagné en compétences tous sur comment aller à la rencontre de gens qui n'ont pas la même culture et on sait comment en retirer de la richesse. Moi personnellement je me sens bien, je fais Toujours du sport. Je ne pense pas que ça m'aura quitté. Je suis entouré des gens que j'aime. Voilà, 2035.
- Speaker #1
Merci beaucoup, Guillaume.
- Speaker #0
Merci à toi.
- Speaker #1
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