Speaker #1Bonjour et bienvenue dans ce dernier épisode de la mini-série de l'été, dans laquelle on met en lumière certains clichés et croyances qui collent au monde du yoga. Aujourd'hui, on parle d'alignement. Parce que ça aussi, c'est un truc bien bien accroché, bien ancré dans les têtes et souvent difficile à remettre en perspective. Je dis ça parce que j'ai souvent reçu des messages me demandant si je corrigeais les postures dans mes cours en ligne, parce que les personnes ont peur d'être mal placées, mal positionnées, pas alignées et donc peur de se blesser. et j'ai observé que quand j'apportais une réponse nuancé, disant que selon moi, la meilleure personne pour se corriger, c'est la personne qui pratique parce que le prof ne peut pas être dans le corps de l'élève. Je sentais un peu de résistance, de réticence et de croyance vraiment profondément ancrée sur le fait que le professeur doit corriger absolument l'élève. Donc bien sûr que le professeur a un rôle à jouer. dans les indications d'alignement, les directions à donner pour les postures, etc. Mais je pense que ça mérite largement d'être nuancé, parce que croire aveuglément à des alignements comme une règle universelle, ça sous-entend que si on ne rentre pas dans l'alignement auquel une posture est destinée, on risque de se blesser, de se faire mal, ou en tout cas, on ne va pas atteindre l'objectif. qu'on cherche dans une posture ou une pratique. Et ça voudrait dire aussi qu'on est un peu tordu. Sauf que quand on sait un petit peu que tous les corps sont différents et qu'il n'y a pas une norme et qu'il n'y a pas de symétrie dans le corps, ça n'existe pas, finalement un corps tordu, c'est la norme. Donc à quoi servent les alignements ? L'alignement, c'est d'abord une direction. Chaque posture a une essence, une intention, une direction. rien ne nous empêche d'en changer et de jouer avec, de varier. C'est-à-dire que, par exemple, si dans mon chien tête en bas, de façon générale, je cherche à allonger la colonne vertébrale, si pour une fois, au lieu de chercher à tout prix à allonger mon dos, je décide de me concentrer aujourd'hui uniquement sur, par exemple, l'étirement de l'arrière des cuisses, des ischios jambiers, est-ce que ça devient dangereux ? Non, c'est juste un autre chemin, une autre perspective, un autre point de vue. Donc l'alignement, c'est une direction, c'est une base, mais qui n'est pas figée. C'est aussi un repère, une sorte de boussole. On part d'une base et puis ensuite on peut ajuster en fonction. Parfois, l'alignement est nécessaire à la structure d'une posture. Pour, par exemple, certaines postures d'équilibre, architecturalement parlant, je ne sais pas si ça se dit, mais ça va vous parler, ça ne va pas pouvoir fonctionner mécaniquement si on n'est pas dans un alignement précis. Pour des postures, si on n'a pas les genoux qui viennent se poser sur les bras, pour faire une posture comme le corbeau, ça ne peut pas fonctionner. Donc dans ces postures-là, bien sûr que l'alignement est pertinent, il est nécessaire. Mais ce n'est pas pour autant qu'on doit suivre aveuglément tous les alignements dans toutes les postures. Parfois, la recherche d'alignement à tout prix, elle est contre-productive, voire dangereuse. Et c'est un comble ! Puisque du coup, souvent, l'argument, un des arguments de l'alignement, d'un bon alignement, c'est pour protéger telle articulation, pour éviter de se blesser. Alors que finalement, parfois, réellement, le fait de chercher cet alignement-là, c'est ce qui va nous blesser, selon notre morphologie. Donc le problème, ce n'est pas l'alignement. Le problème, c'est quand on fige les choses. Quand l'alignement devient une règle rigide, presque militaire, et en fait ça c'est parce qu'on a tellement entendu des phrases comme « attention à ne pas faire comme ça, surtout faites pas comme ça, sinon vous allez vous blesser, protégez votre dos, protégez vos lombaires, attention à garder le dos droit » , qu'on a fini par croire qu'on devait être corrigé en permanence, qu'on devait être aligné en permanence, se tenir droit pour ne pas avoir mal, etc. On sait aujourd'hui que tout ça c'est faux, on sait que ce qui est bon pour notre corps, ce n'est pas un alignement ou une posture précisément, c'est le mouvement, c'est d'être en mouvement, c'est d'aller dans différentes directions, et c'est vraiment d'utiliser toutes les possibilités que nous offre notre corps. Donc ces croyances-là, elles ont fini un peu par ancrer dans nos têtes la peur de se blesser, de se faire mal. Et donc, je l'ai déjà dit, mais un bon alignement, ça ne devrait jamais être une règle figée, fixe et stricte. C'est une base qu'on va s'autoriser à modifier si nécessaire. Parce que certains corps ne peuvent pas et ne doivent pas prendre certains alignements qu'on aurait tendance à considérer comme idéaux. Un alignement intelligent, c'est sortir de la forme qu'on imagine étant la bonne pour aller vers la forme... fonctionnel pour la personne qui pratique. Et pour ça, il faut accepter une chose, c'est qu'il n'y a pas de norme anatomique. Aucun corps ne ressemble à un autre et aucun corps n'est symétrique. Je vais encore une fois ici citer Bernie Clark, parce que c'est un peu le champion sur le sujet. Dans son livre « Votre corps, votre yoga » , que je vous recommande surtout si vous êtes prof de yoga, il nous dit « Traitez les gens comme s'ils étaient tous pareils, C'est courir le grave risque de maltraiter tout le monde. Considérer tous les élèves de yoga de façon identique, c'est aussi courir le risque que certains se fassent mal pendant que d'autres s'ennuient. Je trouve ça très juste, c'est-à-dire que dans une même séance, on peut avoir des élèves qui ont des amplitudes articulaires très différentes et des niveaux de pratiques très différents. Et donc, il se peut qu'une proposition, une variation soit trop pour un élève, alors que pas assez pour un autre. D'où l'intérêt, quand on est prof, d'avoir cette capacité d'observation, d'adaptation et de proposer, bien évidemment, des variations. C'est un autre sujet. Donc, comment est-ce qu'on corrige quelqu'un quand on ne sait pas ce qui se passe vraiment dans son corps, quand on sait qu'il n'y a pas de normes anatomiques et que tous les corps sont différents ? Je cite Bernie Clark encore, toujours dans le même livre, « Un des plus grands cadeaux que puisse faire un professeur de yoga à ses élèves est l'attention, et ainsi la capacité à trouver soi-même la réponse. Pour savoir si ce que l'on ressent dans cette zone vient d'une tension ou d'une compression, il faut beaucoup de concentration et d'attention, des qualités que l'on développe avec le temps. » J'ajouterai cette attention, cette écoute. Le prof ne peut pas le développer à la place de l'élève. Et c'est tout l'intérêt du yoga finalement, apprendre à se connaître, connaître ses limites, faire des choix adaptés à soi. Et donc ne plus se reposer uniquement sur la validation d'autrui, sur la consigne d'autrui. Connaître son corps suffisamment pour se faire confiance et aller dans les alignements qui nous correspondent. Donc souvent les élèves n'ont pas envie d'entendre ça, puisqu'ils préfèrent qu'on leur dise ça c'est bien, ça c'est mal, et au moins... c'est bonne note ou mauvaise note et c'est plus facile finalement de s'en remettre à autrui. Sauf que nous, ce qu'on veut en tant que prof de yoga, en tout cas moi ce que je veux en tant que prof de yoga, c'est que mes élèves puissent développer une certaine autonomie dans leur pratique et une certaine confiance et conscience de leur corps. Donc enfin, dernière citation promis, dans une posture, ce qui est important, ce n'est pas à quoi on ressemble, mais ce que l'on ressent. Je vais la répéter parce qu'elle vibre fort pour moi. Dans une posture, ce qui est important, ce n'est pas à quoi on ressemble, mais ce que l'on ressent. Et je trouve que cette phrase, elle est juste, et bien au-delà d'une posture, d'un alignement dans une posture de yoga. Enfin, c'est vraiment, même dans la vie, ce qui est important, ce n'est finalement pas l'apparence ou en tout cas ce qui peut être perçu de l'extérieur, mais ce qu'on ressent à l'intérieur. Donc, pour conclure, l'alignement, il est intéressant dans certains cas, et dans d'autres cas, il peut être contre-productif. Donc, il est intéressant à condition qu'il ne devienne pas un carcan si on arrive à discerner l'utile du superflu. Tout l'intérêt, en tant que prof, mais aussi en tant que pratiquant, de développer notre discernement. L'alignement, ce n'est pas une règle absolue, c'est vraiment une conversation entre le corps et... la conscience. Et ça, je trouve que c'est tellement plus riche que d'essayer de rentrer tout le monde dans une même case, d'essayer de rentrer dans un moule et dans une forme esthétique tellement plus riche de développer une conscience et une conversation avec son corps. Voilà ce que j'avais envie de partager aujourd'hui. On arrive au bout de cette mini-série, ce qui veut dire que c'est bientôt la rentrée. Je lance un programme de rentrée sur mon studio en ligne, un yoga qui s'adapte à la vraie vie avec des thématiques choisies en fonction des besoins des élèves chaque semaine. Parce que la rentrée, c'est souvent une période de rush, et donc on n'a pas besoin de se créer un stress supplémentaire avec des obligations dans sa pratique de yoga. Donc je vous propose à cette rentrée... un programme dans lequel je viens faire un mini-sondage chaque début de semaine auprès des abonnés pour voir un petit peu quelle est la météo de chacun et adapter les thématiques et les pratiques chaque semaine en fonction. Vous pourrez trouver plus d'infos via le lien que je laisse dans la description du podcast. Il est toujours temps, si tu es prof de yoga, de t'inscrire à ma formation à Montpellier fin octobre et de profiter du tarif Early Bird qui est valable jusqu'au 31 août. Même chose, je mets le lien en description. Cette formation, elle est à destination des profs de yoga qui souhaitent développer leur discernement, gagner en clarté, gagner en confiance dans leur enseignement. Voilà, j'arrive au bout. Merci de m'avoir écouté jusqu'ici. Je te souhaite une bonne journée, bonne fin de journée. Je te dis à très bientôt, j'espère sur le tapis ou sous le tapis.