- Speaker #0
Salut, c'est Lucie.
- Speaker #1
Salut, c'est Alban.
- Speaker #0
Trentenaire et parent de deux petites filles.
- Speaker #1
Bienvenue dans Sous les Aurores.
- Speaker #0
Le premier podcast réalisé par un couple de Français en Norvège.
- Speaker #1
Sous les Aurores, c'est le podcast haut en couleurs qui vous emmène vivre toutes les nuances de l'expatriation et de l'immigration en Norvège et bien au-delà.
- Speaker #0
Que vous soyez déjà expatrié, immigré, que vous rêviez de le devenir ou que vous soyez simplement curieux de découvrir d'autres façons de vivre, ce podcast est fait pour vous.
- Speaker #1
Alors, mettez-vous à l'aise, servez-vous une bonne tasse de thé ou un verre de vin. Et rejoignez-nous sous les aurores. Au menu, discussion sincère,
- Speaker #0
moment de rire et d'émotion,
- Speaker #1
et surtout, beaucoup de belles découvertes.
- Speaker #0
Alors, bienvenue chez nous sur un nouvel épisode de Sous les aurores. Bonjour Céline. Aujourd'hui, on reçoit une vieille connaissance, parce que Céline a travaillé avec moi dans ma première entreprise quand je suis arrivée en Norvège. Donc je suis contente aujourd'hui de te recevoir pour un peu faire le point sur ton expérience en Norvège parce que sans spoiler, il y a eu du mouvement, on va dire. Donc trop hâte de découvrir tout ça. Avant toute chose, je vais te poser quelques questions pour te présenter. Alors est-ce que tu peux nous dire d'abord comment tu t'appelles, depuis combien de temps vis-tu en Norvège, dans quel domaine travailles-tu et enfin si tu peux nous partager un petit peu. culture-choc que tu as remarqué quand tu es arrivée en Norvège ou que tu continues de remarquer ?
- Speaker #2
Moi, c'est Céline. Ça fait presque 20 ans que j'habite en Norvège. Par intérêt, maintenant. Je ne sais pas si on peut compter, mais en gros, je suis arrivée en 2005. Ce qui s'est passé, c'est que j'ai rencontré un grand Suédois. Quand j'étais étudiante et quand j'ai fini mes études, je suis venue ici. Et c'était en 2005, à peu près. Je suis arrivée, je me souviens, c'était au mois de septembre, fin septembre, début octobre. Donc, t'imagines, le premier culture-choc, c'est l'hiver norvégien. Ou plutôt, pas l'hiver, mais l'automne norvégien. Le mois de novembre, si tu veux.
- Speaker #0
On est en plein dedans.
- Speaker #2
C'était un peu intense. Surtout qu'en plus, on habitait dans un tout petit appartement. Ça devait faire genre 14 mètres carrés. Donc, voilà, il faut s'aimer beaucoup. Quand il fait froid, qu'il pleut, il n'y a pas de lumière, tu es loin de chez toi, tes amis te manquent, ta famille te manque. Enfin voilà, c'est la loose. Donc ça, c'était vraiment la première partie, l'arrivée qui était dure. En plus, il n'y avait pas de travail. Du coup, je me suis dit, OK, je vais faire quoi ? Ce n'était pas si simple que ça de trouver. Voilà. Mais bon, quand on aime, des fois, on fait des choses un peu folles.
- Speaker #1
On ne compte pas.
- Speaker #2
Non, mais voilà. Tu vois, on était un peu sur le nuage. Donc, ça s'est bien passé. Finalement, j'ai trouvé un travail. Donc, aujourd'hui, je travaille pour une petite boîte de consultants IT. Donc, moi, je suis chef de projet agile et pas agile.
- Speaker #0
Et du coup, je reviens sur ce que tu disais. Tu dis que ça s'est bien passé au final, au début. Comment s'est passée la recherche d'emploi ? Est-ce que tu as trouvé rapidement ?
- Speaker #2
Alors déjà, il faut savoir que quand je suis arrivée, moi, j'avais 22 ans. Donc, je sortais juste d'école de commerce. Et déjà, je ne savais pas ce que je voulais faire de ma vie.
- Speaker #0
C'est commun en école de commerce.
- Speaker #2
J'avais appris à apprendre. J'avais fait une école de commerce parce que je n'avais pas envie de faire des études. Mais ce n'était pas une option dans ma famille de ne pas faire d'études. Donc, en gros, j'avais choisi le truc qui me permettait de réfléchir à ce que je voulais faire. Parce qu'en fait, je ne savais pas. Et moi, ce dont j'avais envie, c'était de voyager, de découvrir le monde, de parler English. Je parlais bien anglais parce que j'avais étudié aux États-Unis. Et qu'en fait, moi, j'avais toujours aimé parler anglais. J'aime bien les langues en général. Mais moi, j'ai toujours voulu habiter à l'étranger. En fait, c'était pas à la Norvège, c'était l'étranger. Et c'était la Norvège par chance, parce que j'ai rencontré ce gars. En fait, il habitait à Oslo et que du coup, je l'ai suivi. Mais c'était compliqué, la recherche d'emploi, parce qu'en Norvège, il y a toujours ce frein lorsque tu ne parles pas le norvégien. À l'époque, c'était beaucoup plus simple parce qu'en fait, il n'y avait pas beaucoup d'étrangers. Les Norvégiens avaient envie de parler anglais. Ils aimaient ça. Ils trouvaient ça intéressant. Ils trouvaient que c'était bizarre que leur petit pays attire quelqu'un qui n'était pas scandinave. Et il y avait une demande de main-d'œuvre sur le marché qui était énorme. Donc en fait, en gros, peu importe ce que tu faisais, à partir du moment où tu voulais travailler, tu trouvais un boulot facilement. Que ce soit dans la restauration. Moi, j'ai travaillé comme prof de français et prof d'anglais au début. Parce qu'en fait, du coup, c'était en freelance pour Berlitz et des écoles de langue. Et j'ai très vite trouvé un travail dans une boîte d'IT, donc je faisais du IT support. pour le marché anglais, français et espagnol. Ça n'a pas été très compliqué, en fait, de trouver. C'était plus compliqué parce que je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire. Et j'avais peut-être envie de travailler dans l'hôtellerie. C'était un peu un truc de famille. Donc, j'ai trouvé assez vite. Le problème à l'époque, c'est que quand tu rentres dans une boîte et que tu parles anglais, les Norvégiens, ils ont un peu ce truc de... Voilà, tu n'es pas Norvégien, donc tu ne parles pas norvégien. Donc en fait, ils vont te mettre un peu à l'écart, ils vont te parler en anglais, ils ne vont pas te parler en norvégien. Et c'est un peu compliqué de s'intégrer. Donc en fait, il faut vraiment faire un effort. Et moi, je sais qu'au bout de deux ans, j'en ai eu un peu marre de ce truc-là. J'ai dit, ok, je ne parle pas norvégien, ça fait deux ans que je suis ici. Il faut vraiment faire quelque chose, quoi. Parce que si je veux rester ici, je ne peux pas passer ma vie, en fait, sans parler norvégien. Donc moi, j'ai fait un choix drastique, j'ai démissionné. Et j'ai voulu travailler dans un restaurant. donc j'étais travailler dans dans un café oui Et je parlais norvégien tout le temps. Et du coup, en fait, en six mois, j'ai parlé norvégien bien. Et du coup, après, j'ai repris un autre travail qui correspondait plus à mes qualifications. Mais vraiment, je trouvais que c'était un hommage essentiel. Et en fait, j'étais jeune, je n'avais pas d'enfant, je n'avais pas de crédit, je n'avais rien. Donc, je me suis dit, OK, je vais reculer pour mieux sauter. Et j'ai vraiment bien fait parce que du coup, ça m'a permis après de trouver des boulots où... C'était peut-être pas essentiel de parler norvégien ou d'être norvégien, mais le fait de parler norvégien faisait la différence.
- Speaker #1
Bon ben, c'est ce qu'il nous reste à faire, du coup.
- Speaker #2
Ouais,
- Speaker #0
démissionner. Et tu as trouvé que ton intégration, du coup, se faisait plus facilement avec tes collègues, le fait que tu parles norvégien, ensuite ?
- Speaker #2
À l'époque, et dans ce cadre-là, si tu veux, quand tu travailles dans des cafés, à l'époque, il y avait beaucoup de suédois. Donc au final, je parlais swachk. et pas norvégien. Donc, c'est un peu un mélange de suédois et de norvégien. Mais j'ai travaillé dans l'hôtellerie pendant cinq ans. Et ce qui s'est passé, c'est que le fait que je parle norvégien faisait qu'il n'y avait pas de distance. Parce qu'en fait, ils comprenaient que je comprenais. Tu vois ? Mais clairement, comme c'est un milieu international, l'hôtellerie aussi, le fait que je ne parle pas que norvégien, c'était un avantage. Après, lorsque j'ai commencé à travailler chez Mondelez, Certes, c'est une boîte internationale où le fait de parler anglais, c'était primordial puisque le travail était en anglais. Comme le milieu norvégien en Norvège, chez Mondelez, le fait que tu parles norvégien, je veux dire, c'était vraiment important. Parce qu'en fait, les Norvégiens ont un peu une sorte de protectionnisme qui n'est pas ouvert, mais qui est indirect et qui se joue à travers la maîtrise de la langue. Et donc, en fait, tu peux maîtriser la langue, c'est déjà bien. Mais je dirais même plus, en fait, ce qui va faire que tu vas vraiment être considéré, intégré, regardé différemment et pas comme un étranger, va être le fait que tu maîtrises non seulement la langue, mais aussi les codes culturels et sociaux. Ce n'est pas les mêmes dans une boîte internationale et dans une boîte norvégienne. Et souvent, en fait, je ne sais pas si vous, vous l'avez remarqué, mais vous voyez bien que même dans des boîtes internationales, tu as quand même un groupe norvégien. Et souvent, en fait, quand tu arrives à un certain niveau, tu n'as plus que des Norvégiens.
- Speaker #1
Ça, c'est clair.
- Speaker #2
Et moi, je ne pense pas qu'il y a une véritable discrimination active, mais en fait, il y a une sorte de... toute une série de codes et de normes que nous, on ne connaît pas, parce qu'on n'a pas grandi ici. Et au-delà du langage, en fait, il y a une sorte de façon de se comprendre que nous, on ne maîtrise pas, qui fait qu'en fait, tu vas être considéré pour certains postes, ou alors tu ne vas pas l'être. Parce qu'en fait, tu ne vas pas rentrer dans cette manière. désiré, en fait, d'être lead, en fait, de mener.
- Speaker #0
Et c'est vraiment un bon point ce que tu dis, parce qu'à Monde Ilyse, c'est là où on travaillait ensemble, et moi, ça a été la raison principale pour laquelle je suis très vite partie, c'est parce que je me sentais pas du tout intégrée, je sentais que le norvégien était un problème, même si on m'avait embauchée en me disant que c'était l'anglais la langue et qu'il n'y aurait aucun souci, je me suis très vite rendue compte que ça allait être... Un gros souci, en fait. Et donc, c'est vrai, ce côté qui, même dans une boîte internationale, en fait, tu peux avoir ce côté norvégien qui reste très fort. Pour autant, après, je suis allée dans une autre boîte internationale, américaine aussi. Et au final, là, c'était quand même beaucoup moins fort. Je l'ai beaucoup moins ressenti.
- Speaker #2
En fait, je pense que souvent, on oublie que la Norvège, c'est un petit pays. Et que non seulement c'est un petit pays, mais c'est un petit pays qui est fait de vallées. Donc, en fait, il y a une vraie mentalité village. que nous, on connaît plus ou moins, ça dépend d'où tu viens en France, en fait. Mais moi, j'ai grandi dans le sud de la France et la mentalité petit village, je la connais, tu vois. Après, tu aimes ou tu n'aimes pas, je ne juge pas, ce n'est pas du tout un jugement de valeur. C'est juste un constat qui est que lorsque tu as l'habitude, en fait, d'être avec les mêmes personnes depuis toujours, en fait, tu... tu as cette façon de penser qui n'est pas, par défaut, intégrative, qui n'est pas intégrante. Donc, en fait, tu vas vraiment avoir besoin de ces codes comme une sorte de coussin de sécurité. Et si tu as une personne qui est en dehors de ces codes, c'est compliqué, ça demande un effort supplémentaire. Et nous, en fait, les êtres humains, on est un peu fainéants. On n'a pas toujours envie de faire un effort en plus pour intégrer des gens. Et il y a une vraie question. Il y a une vraie question. Je pense qu'il y a beaucoup de Norvégiens qui se la posent aussi. parce qu'il y a la discussion sur la diversité qui arrive dans beaucoup d'endroits. La vraie diversité, pas celle qui fait joli sur la photo. Et en fait, en Norvège, il n'y a pas vraiment de vraie diversité parce que même les Norvégiens issus de l'immigration, ils vont avoir les codes, ils vont aller dans des... S'ils veulent réussir, ils vont aller dans certaines écoles, dans certaines universités et ils vont devoir se comporter d'une certaine manière. Et en fait, tu n'as plus de diversité, même s'ils n'ont pas la même couleur de peau.
- Speaker #1
Oui, c'est vrai qu'on en a parlé un petit peu avant. Après, j'imagine que ça existe aussi en France. J'étais peut-être juste moins exposé. Ça peut aussi dépendre en fonction de l'âge, j'imagine. Mais il y a un peu cette notion de moule. Je trouve que dans les boîtes, dans les postes, certains... Nous, on est dans une conversion très corporate. On va recevoir aussi des invités d'autres milieux. Mais dans des jobs très corporate, j'ai l'impression qu'il y a quand même un bon moule dans lequel il faut rentrer, comme tu dis, pour espérer...
- Speaker #0
Même là où on habite. Nous, on a vécu dans différentes parties d'Oslo. En ce moment, on est dans une partie où je trouve que, pareil, il y a un moule.
- Speaker #1
Vestimentaire, capillaire, voiture, tout.
- Speaker #2
Vous avez choisi quand même un endroit qui est connu pour avoir un type de référence. Après, je ne sais pas, vous réfléchirez pour vos enfants ce que vous avez envie de leur donner, parce que c'est une vraie question. Nous, on a choisi d'habiter à Nessoden, qui est de l'autre côté du fjord. Et une des raisons principales pour lesquelles on a choisi d'habiter là-bas, c'est justement l'accès à la diversité. Même si, si tu veux, après plusieurs années, en fait...
- Speaker #0
Est-ce qu'il n'y a pas un moule Nesoden ?
- Speaker #2
Est-ce qu'il n'y a pas un moule Nesoden qui est justement le moule alternatif, qui est aussi un moule différent ? Est-ce que justement le moule, c'est d'être différent peut-être à l'extrême aussi ? Mais voilà, c'est une vraie question. Je pense qu'il y a une beauté, si tu veux, dans le... le mindset norvégien qui est qu'il y a quand même un respect de l'individu. Et pour moi, c'est un avantage et un inconvénient, ce respect, parce qu'en fait, en gros, là où dans certains pays, comme nous en France, où on dit les choses, parce que c'est notre nature, c'est notre façon de grandir, on va faire des feedbacks aux gens, on va leur dire, tu vois, là, par exemple, peut-être essaye de communiquer un peu comme ça, fais pas ça. Si on voit quelqu'un qui a envie de réussir ou qui a envie d'avancer, on va essayer. de peut-être lui donner les codes. Bon, pas tout le monde, mais il y a beaucoup de bienveillance. Moi, je sais que j'ai beaucoup travaillé avec la France quand j'étais à Mont-Délice ou même après, dans mon dernier job. Il y a une vraie bienveillance. En fait, on essaye d'aider les gens à partir du moment où on voit que les gens ont envie de réussir. Il y a une volonté de supporter l'ambition. En Norvège, il y a, mais je n'ai encore pas rencontré un Norvégien qui va te donner les codes. OK. C'est-à-dire qu'en fait, il ne va rien te dire. Il va te laisser te débrouiller. Et si ça ne marche pas, il ne va pas te dire que ça ne va pas. Il ne va pas te dire que ça va bien non plus. Si tu rentres dans le moule, si tu choppes les codes, il va te faire avancer, mais il ne va pas activement t'aider. Après, si tu poses des questions, je pense que la plupart des Norvégiens vont te répondre, certes à moitié mot, mais il n'y a pas cette volonté active d'aider les gens. manger. Je n'ai jamais rencontré. J'ai beaucoup parlé même avec des Norvégiens, des jeunes, etc. Ils ont un peu ce respect. Ils disent, OK, si la personne, elle veut, elle va faire. Je ne vais pas aller essayer un avantage et un inconvénient. L'avantage, c'est que du coup, tu fais un peu ce que tu veux. Mais si tu n'es pas sûr de comment faire, c'est compliqué d'avoir des pointers, d'avoir un peu des indices sur ce qui est correct et ce qui ne l'est pas. Ce qui est plus facile, à contrario en France, mais à double tranchant, parce que des fois en France, tu te prends un peu des retours pas toujours souhaités. Ou même des fois avec les Américains, c'est un peu aussi comme ça, où des fois tu te prends des retours du style, je n'avais pas demandé ce feedback-là. Mais bon, c'est une vraie réalité. C'est-à-dire que si tu viens en Norvège et que tu veux apprendre la culture, il faut vraiment donner du sien, il faut vraiment demander, il faut vraiment le vouloir, parce que les Norvégiens, naturellement, ne vont pas forcément t'aider. c'est pas qu'ils veulent pas que tu réussisses c'est pas qu'ils veulent pas t'aider c'est que c'est pas dans leur nature d'intervenir
- Speaker #0
Est-ce qu'il y a des choses qui t'ont... Très positive ou plus facile à adopter, que ce soit dans le milieu professionnel ou dans la vie privée, à ton arrivée et puis après les premières années dans tes jobs ?
- Speaker #2
Alors, je pense qu'en fait, il faut vraiment faire une différence entre la vie quand tu viens d'avoir ton diplôme et qu'en fait, tu es jeune et que tu fais la fête. Soit tu bosses comme un taré et tu fais la fête, soit tu veux voyager ou alors plein d'autres choses. Il y a plein de choses sur le spectre. Mais au début, pour moi, c'était fun. Tu vois, je suis arrivée, en plus c'était une boîte d'IT, la plupart des gens sortaient de l'université aussi, on faisait la fête, on sortait, on rigolait. C'était chouette de faire l'expérience de la Norvège, on faisait du ski, tu vois. J'avais une expérience très multiculturelle, on prenait les bons côtés un peu fun de la Norvège. Je gagnais relativement bien ma vie, donc j'avais pas trop de problèmes, si tu veux, d'argent. Après, il y a la vie quand tu commences à t'installer. Et là, c'est vrai que... Moi, ce que j'aime avec la Norvège en tant que parent, en tant qu'adulte, qui passe dans une autre phase de ta vie, c'est qu'en fait, en Norvège, si tu décides que tu veux faire une pause professionnelle, t'as pas trop envie, si tu veux te bosser des heures de fou, eh bien, il y a un vrai respect pour le fait que tu peux tout de même être productif sans y mettre dix heures par jour. Il y a une vraie possibilité, si tu veux, d'accomplir en respectant les horaires de crèche. Parce qu'en fait, la plupart des gens en Norvège le font. Après, si tu veux atteindre un certain niveau, c'est plus possible. Parce que les vrais forums où tu fais avancer à travers le réseau, à travers les décisions, c'est en dehors des heures de la crèche. Et ça, c'est une vraie question.
- Speaker #1
Mais là, tu parles justement de créer son réseau, d'aller à la rencontre des gens, et ça ne se passe pas forcément dans ta boîte. Tu ne dis pas, il faut se tuer 10 heures dans son poste. Non, je ne vais pas avoir ma journée de travail, et à côté de ça, je vais investir du temps pour rencontrer des gens, étendre mon réseau. C'est ça quand même.
- Speaker #2
C'est les deux, donc il y a ça. Mais il y a aussi le fait que si tu veux vraiment atteindre un certain niveau, en Norvège, il va falloir que tu travailles en dehors des heures de travail. Parce qu'en fait, tu vas passer ta journée en réunion, et le travail,
- Speaker #1
tu vas le faire après.
- Speaker #2
Et ça, je dirais, c'est un défaut du corporate, que ce soit n'importe où. Mais en Norvège, tu as quand même cette fenêtre où si tu pars à 4h pour aller chercher ton gamin, même si tu te mets à bosser après à 20h, c'est accepté. alors qu'en France, mon expérience c'est qu'en fait, t'as les réunions à 17h, de 17h à 19h et puis tu fais ton choix ce que tu dis m'intéresse et en même temps me révolte mais oui,
- Speaker #1
mais moi aussi parce que je me dis et d'ailleurs c'est un peu mon fer de lance et je le rabâche à qui veut l'entendre ou pas d'ailleurs mais je suis venu en Norvège je fais des concessions pour avoir ce, en gros 9h, 16h ou plus ou moins donc le fait qu'il faille peut-être... Et j'ai des collègues, y compris des femmes notamment, je pense à une, qui disent « Ah ben moi, je pars à 15, mais je me reconnecte après. » Mais moi, il est hors de question que je me reconnecte après. Parce que déjà, il y a pour ma famille et moi-même, si je suis chez moi, c'est pour d'abord m'occuper de mes enfants. Une fois qu'ils sont couchés, c'est pour m'occuper de mon couple ou m'occuper de moi ou m'occuper de mon chien. Et au-delà de ça, si moi, en tant que, par exemple, leader ou avec des relations hiérarchiques, jeu. montre l'exemple que c'est ok de se reconnecter quel message j'envoie à des gens plus jeunes ou plus vieux ou de mon âge, quel est le message que j'envoie et donc c'est pour ça que d'ailleurs ça s'entend dans ma manière de m'exprimer mais c'est hyper intéressant que toi avec ton regard tu soulèves cette notion là, parce que pour moi en Norvège, alors en France en parlons pas inacceptable, même pour les très jeunes mais en Norvège encore plus et c'est, j'espère moi qu'avec les nouvelles générations, on puisse se dire même quand j'ai envie de cravacher et d'évoluer, ça rentrera dans mon 8h, 16h ou 17h maximum.
- Speaker #2
C'est très intéressant ce que tu dis. Ce que je te décris, ça part d'un constat actuel. J'aime pas trop parler de génération, j'aime pas trop les cases. J'essaye en général de pas trop parler genre Gen X, Millennials, tout ça. Mais moi, ce que j'observe, c'est qu'il y a une véritable... véritable différence de génération entre la génération qui a 45 ans plus et 45 ans moins. Et bon, moi je suis un peu au milieu, si tu veux. Et puis il y a encore plus de générations en fonction d'où tu viens. Moi, quand j'ai grandi, si tu ne cravachais pas et que tu ne prenais pas ce qu'il y avait, c'était la porte. La génération d'après, pas forcément. Tu vois, parce que ce n'était pas le même contexte. Mais, et d'autant mieux. Je ne suis pas... Je pense que cet esprit où il faut cravacher, il faut galérer pour réussir, je pense que c'est un non-sens. Ce n'est pas vrai. Mais par contre, il y a un véritable problème, parce qu'il y a des Norvégiens qui ont 45 ans plus, qui ont oublié que quand eux, ils étaient jeunes, ils n'ont pas forcément bossé comme des tarés, ils n'avaient pas forcément besoin d'avoir un diplôme, ils n'avaient pas forcément besoin, si tu veux, d'avoir fait XYZ, et d'avoir telle compétence, parce qu'en fait, il y avait tellement besoin de main-d'oeuvre qu'en gros, si tu voulais apprendre des choses, c'était là, c'était disponible, il fallait travailler un peu, il fallait le faire. et en fait il y a un peu ce point de vue de si tu ne travailles pas toutes ces heures-là, en gros, c'est que tu n'es pas motivé. Et tu as vraiment une vraie partie de la société norvégienne qui pense ça, notamment dans mon milieu qui est le milieu du consulting, où le modèle par lui-même fait que tu es payé à l'heure, donc plus tu bosses, plus tu gagnes. Je veux dire, enfin, voilà. Donc, il y a une véritable discussion sur qu'est-ce que c'est la vraie productivité. Et moi, personnellement, mon point de vue, c'est que... Je ne suis pas fan de ce modèle où tu es payé à l'heure. J'en discute d'ailleurs avec mon management et j'ai des vraies discussions compliquées, difficiles, où je pose des questions sur le modèle de rémunération qui existe et le fait qu'aujourd'hui, en scale-up, est-ce que ça vaut vraiment le coup ? On continue ce modèle où en fait, on est payé à l'heure ? Ou est-ce qu'il n'y a pas une véritable question à se poser sur, nous, notre point de vue, c'est qu'on ne veut pas être des consultants qui vont saigner des boîtes à vie. Nous, on veut venir faire en sorte qu'on améliore quelque chose pour que la boîte puisse être mieux et se débrouiller toute seule. Donc, si notre point de vue, c'est ça, est-ce que ça ne vaut pas le coup peut-être de prendre, je ne sais pas, un tarif horaire un peu moins, mais de se faire payer en equity, en retour sur investissement, sur un point de vue XY ? Est-ce que c'est plus de trafic ? Est-ce que c'est plus de clients ? Est-ce que c'est plus de... Je ne sais pas. Je n'ai pas la réponse. Mais ma question, elle est vraiment là. Parce qu'en fait, moi, ce que je vois, c'est qu'il y a beaucoup de Norvégiens qui ne sont pas du tout efficaces. Nous, on a une culture où on a appris à extrêmement structurer. D'ailleurs, je le vois avec mes enfants qui sont à l'école norvégienne. C'est compliqué. La structure, ce n'est pas inné chez les Norvégiens. Et qu'en fait, je n'ai pas forcément envie, si tu veux, d'être huit heures au bureau à montrer mon visage. Parce que c'est ce que j'ai fait quand j'étais étudiante et un petit peu après. Et qu'en fait, je ne vois pas l'intérêt. Moi, je me pose vraiment la question de ce qu'on demande aux nouvelles générations. Parce qu'eux, ils vont avoir besoin de ces 8 heures pour apprendre. Parce que quand tu commences, tu es obligé d'apprendre. Il y a plein de choses, si tu veux, où tu vas mettre beaucoup de temps pour le faire. Mais moi, avec 15 ans d'expérience, est-ce que ça vaut vraiment le coup que je passe 8 heures à faire la même chose que celui qui vient de l'université, qui n'a pas encore appris ? Non. Donc moi, forcément, mon tarif devrait être différent. Moi, forcément, si tu veux, est-ce que j'ai besoin de passer 8 ans ? Ma valeur ajoutée, elle n'est pas dans les 8 heures que je mets. Elle est dans ce que je produis, elle est dans ce que j'apporte. Mais ça demande en fait un changement d'état d'esprit de qu'est-ce qu'on rémunère ? En fait, est-ce qu'on rémunère ton temps ou est-ce qu'on rémunère ta valeur ajoutée ? Et ça, c'est la vraie question. C'est pas est-ce qu'on est disponible pour les enfants entre 15h et 17h ? Est-ce qu'on se reconnecte après ? Et c'est une discussion compliquée. Parce qu'en fait, souvent, on part de la mauvaise question.
- Speaker #0
Moi, je te rejoins là-dessus parce que je trouve que... de ma propre expérience. Je ne suis pas efficace toutes les heures de la journée. Je ne suis pas efficace sur une semaine, sur l'autre. Ça ne va pas être la même efficacité. Et je trouve que plus on me donne de flexibilité, plus je sais où et quand je vais être efficace. Donc, laissez-moi faire et je vais vous montrer que je vais produire ce que vous voulez, peut-être en moins de temps si je le fais à ma manière. Bon, après, bien sûr, il y a des contraintes. On doit se réunir avec des gens. qui ont aussi, eux, des contraintes et tout. Mais c'est vrai que moi, j'ai observé que plus j'ai de flexibilité et plus je suis efficace. Pour rebondir, parce que tu parlais de tes enfants qui sont dans le système norvégien, est-ce que tu pourrais revenir un peu sur cette partie de ta vie ? Donc, quand est-ce que tu as formé ta famille ici ? Et comment ça s'est passé dans une culture norvégienne ?
- Speaker #2
Donc, moi, en fait... Ce grand Suédois, au bout d'un moment, ça s'est fini, cette relation. Mais je suis restée en Norvège parce que j'aimais la vie, j'aimais l'accès à la nature. J'avais créé un réseau. Et puis, c'est vrai que du coup, je ne m'étais pas rendue compte jusqu'à dernièrement à quel point le fait de vivre dans un environnement beau, où tu as cette nature qui est majestique, qui est accessible, qui n'est pas sale, était important pour moi. Il a fallu qu'on déménage au Portugal. pour que je me rende compte à quel point c'était vraiment important pour moi. Mais on peut y revenir après. En fait, du coup, ça s'est fini, cette histoire. Et puis, j'ai rencontré mon partenaire qui est portugais, qui habitait aussi en Norvège. On a décidé de fonder une famille. Et maintenant, j'ai deux enfants, une qui a 9 ans et une qui a 4 ans. Et donc, moi, je suis fan de la crèche norvégienne. J'adore ce système. Déjà, en Norvège, tu as un an de congé maternité. À la fin, ton enfant, il va à la crèche. Du coup, ça veut dire que tu n'as pas besoin de galérer avec la nounou, même si tu as un peu des technicalités qui font que ce n'est pas tout à fait vrai. Pour un bon,
- Speaker #1
il faut parler de notre expérience.
- Speaker #2
Voilà. Si tu times bien le truc. Oui,
- Speaker #1
voilà. Exactement.
- Speaker #0
Il faut juste savoir à quel moment...
- Speaker #1
C'est la petite astérisque.
- Speaker #0
son enfant.
- Speaker #1
Si tu peux choisir quand qu'on se voit, c'est quand même mieux, mais on reviendra là-dessus.
- Speaker #2
Dans un prochain épisode. Donc en gros, si tu fais ton enfant et que tu accouches entre le mois de, on va dire, juin et octobre, quand t'as fini ton congé maternité, ton enfant, il va directement à la crèche. Après, tu peux choisir si tu veux de ne pas le mettre et de prendre un congé plus long, c'est ton choix, et c'est relativement bien rémunéré. Donc le système est fait. pour qu'en fait, tu n'aies pas ce système à la française où au bout de trois mois, quand physiquement, intellectuellement, émotionnellement, tu es complètement à la ramasse, on te demande de retourner au bureau, si tu veux, et de faire bonne mine. C'est impossible.
- Speaker #1
Et produire pendant tes huit heures.
- Speaker #2
Oui, c'est ça. Donc, le système est bien fait. Et cette crèche norvégienne, nous, en tant que famille, on est très fans de l'éducation bienveillante et l'éducation en fait, non autoritatives. Je vais faire attention d'utiliser ce mot, autorité. Mais en gros, si tu veux, on ne fait pas vraiment de place à la violence verbale ou à la punition, et carrément pas à la violence physique. C'est interdit chez nous. Et c'est compliqué, parce que nous, tous les deux, on a grandi dans un système, si tu veux, où on s'est fait punir, on s'est fait crier dessus. Des fois, on s'est pris des torgnoles. Bon, pas mon mari, mais moi. Donc, si tu veux, c'est compliqué. de choisir quelque chose de différent parce que même si tu le choisis et tu le veux vraiment il y a des moments où en fait physiquement tu sens qu'en fait t'as un réflexe qui a été mis en toi quand t'étais petit et t'es là non, maman va prendre l'air maman va se mettre une grosse boule de neige dans la bouche je reviens plus tard mais donc le système norvégien est basé là dessus, donc c'est plus simple quand même, si tu veux, d'avoir cette éducation bienveillante lorsque tu es dans un système dont c'est la base. Tu vois, à la crèche, par exemple, il y a vraiment cette volonté d'écouter l'enfant, d'écouter le besoin de l'enfant. Et moi, j'adore d'être dehors. Après, comme c'est tout un spectre et que tu as forcément les extrêmes, je trouve que dans l'éducation norvégienne, ils ont poussé l'éducation bienveillante, des fois, à l'éducation où, en fait, tu laisses faire. Et pour moi, l'éducation bienveillante, ce n'est pas de laisser faire. Il faut quand même des limites. Il faut des limites, il faut qu'elles soient claires. Et en fait, nous, on a des limites très strictes chez nous. C'est juste qu'elles ne sont pas posées avec des cris et qu'elles sont discutables parce qu'elles sont explicables. Mais voilà, c'est compliqué quand les enfants grandissent parce qu'en fait, il n'y a pas les mêmes règles. Des fois, chez les Norvégiens, les enfants ont peu de limites et du coup, ça crée des... des discussions compliquées. Et même, ça crée des enfants malheureux, en fait. Parce que tu as des enfants qui, en fait, n'ont pas de sécurité. Parce que ces limites amènent beaucoup de sécurité.
- Speaker #1
Le manque de cadre,
- Speaker #2
oui.
- Speaker #0
Est-ce que tu as un exemple précis ?
- Speaker #2
Tout à fait. Par exemple, ma fille qui a 9 ans, elle a une copine à l'école, et toutes les deux, elles s'entendent très bien. Mais elles sont un peu similaires en personnalité. Donc, ma fille de 9 ans, c'est une enfant qui a extrêmement d'énergie. C'est un peu une enfant hypersensible et genre... Il faut s'accrocher, c'est une pile duracelle.
- Speaker #1
On starre it.
- Speaker #2
Voilà, c'est ça. C'est un enfant qui a extrêmement d'énergie, qui a extrêmement de gaieté. C'est le soleil de la maison, tu vois, il est toujours en train de chanter, de crier, de danser. Donc, c'est vraiment un enfant qui est génial. Mais c'est vrai que...
- Speaker #0
Par exemple, si toi, tu as une personnalité où tu as besoin un peu d'espace, c'est compliqué d'avoir un enfant comme ça. Et donc, elle a trouvé une copine qui est un peu comme elle. Mais donc, avec mon enfant qui est toujours en train de sauter, de vouloir apprendre, de vouloir comprendre, il faut mettre un cadre. Parce qu'en fait, sans cadre, elle se perd toute seule. Et en fait, elle passe du moment où elle a utilisé toute son énergie et elle est fatiguée, en ce que moi j'appelle le overdrive, où en fait, elle est surfatiguée. donc en fait elle va compenser par par un niveau d'activité encore plus haut. Alors qu'en fait, ce dont elle aurait besoin, c'est de se poser, de se reposer, mais comme elle ne sait pas faire autre chose, c'est notre job de parent de lui apprendre, là, tu es fatigué. La réponse, ce n'est pas d'aller courir plus, parce qu'en fait, c'est ta nature, si tu veux, d'être dans l'action.
- Speaker #1
Elle évacue, après, elle passe en espèce de...
- Speaker #0
Là, il faudrait que tu te poses, et que tu te calmes, et que tu respires. Et là, c'est fini. C'est fini l'écran. C'est fini... d'aller courir. C'est fini de crier. Maintenant, c'est on se pose, on prend un livre, on lit. Ou alors, on se pose, toutes les deux, toi et moi, on parle, on boit un thé. Mais on pose un cadre, on dit voilà, là, à partir de 17h30, il n'y a plus d'écran. C'est fini. Il n'y a pas d'écran du lundi au jeudi. Les écrans, c'est OK le vendredi. C'est sous supervision le week-end. Mais voilà. Et à côté de ça, j'ai la même enfant. C'est pas les mêmes, mais le même type de personnalité.
- Speaker #1
Donc la copine.
- Speaker #0
La copine. dont les parents n'ont aucune limite en termes d'écran. Ils ont l'écran quand ils veulent. Après l'école, ils peuvent rentrer à la maison, ils peuvent aller faire des amis, ils peuvent faire ce qu'ils veulent, les parents. Parce que l'école nord-végétale finit à 14h. Donc de 14h à 17h, soit tu peux mettre ton enfant à la garde après l'école, mais chez nous, en fait, les enfants, ils ne font pas de choses chouettes. Donc moi, ma fille, elle a très vite émis le souhait de ne pas y aller, parce qu'en fait, ils étaient beaucoup dehors. Donc du coup, ma fille était encore plus fatiguée, donc elle rentrait, elle était encore... plus en overdrive. Donc, on a fait le choix de ne pas la mettre. Donc, elle entre à la maison. Elle a, en fait, une liste d'activités qu'elle fait. Et à côté, on a la copine qui a carte blanche. Et donc, la copine, elle est venue plusieurs fois chez nous. Donc, elle n'a pas... Elle ne sait pas comment se comporter. Donc, ça veut dire que quand tu lui dis quelque chose, elle se vexe souvent parce qu'elle ne comprend pas pourquoi on lui met une limite. parce qu'elle n'en a pas. Donc forcément, c'est normal que...
- Speaker #1
Oui, les premières réactions, c'est...
- Speaker #0
Elle insiste tout le temps. Elle insiste au point où, en fait, elle se met à crier, à pleurer et à avoir des réactions qui sont typiques, en fait, d'une enfant de 4 ans, 5 ans, parce qu'en fait, ils n'ont pas le développement neurologique pour accepter un non, mais qui sont plus typiques chez un enfant de 9 ans qui a quand même la capacité cognitive de discuter la décision. Et tu as une enfant, en fait, qui est jalouse. de l'autre enfant. Parce qu'en fait, moi, ma fille, elle connaît ses limites. Donc, en fait, elle sait ce qu'elle peut faire, ce qu'elle ne peut pas faire. Donc, en fait, elle a une certaine confiance en elle. Et à côté, tu as une enfant qui a tellement de choix qu'en fait, elle ne sait pas. Et qui, en fait, à partir du moment où on lui dit non, elle remet en question sa propre valeur au lieu de remettre en question la décision. Donc, en fait, ça crée des situations compliquées parce que tu as une enfant qui est toujours en train d'observer pour savoir ce qui est OK. Parce qu'en fait, comme elle n'a pas de limite, elle est toujours en train de jauger. Elle ne sait pas ce qui est OK, ce qui n'est pas OK. Est-ce que là, je peux ? Est-ce que je ne peux pas ? Donc, en fait, il y a une enfant qui est tout le temps à marcher sur des œufs. Parce que quand tu as des enfants comme ça, qui sont extrêmement intelligents, tu vois, qui cherchent, qui s'observent, qui regardent, qui ont plein d'énergie, donc en fait, qui réfléchissent tout le temps, c'est toujours pa-pa-pa-pa-pa-pa. Ils ont besoin du cadre. ils ont besoin de cette sécurité pour savoir Ça, c'est OK. Ils ont besoin aussi d'avoir cette sécurité pour savoir si je fais une erreur. Je sais que ça ne va pas être OK, mais on va en discuter parce que c'est en dehors du cadre. Alors qu'en fait, si tu n'as pas de cadre, en gros, tu ne fais jamais d'erreur. Donc, le jour où tu as quelqu'un qui dit non, ça, ce n'est pas OK, panique à bord.
- Speaker #1
C'est super intéressant parce que ce que tu appliques à des jeunes enfants, je pense qu'il y a... quelqu'un avec qui ça ne s'est pas forcément bien passé au boulot, je pense que c'est la même chose. On peut être très vieux et peut-être toujours manquer de cadre au final. Bien sûr. De ne pas savoir...
- Speaker #2
Tu n'as jamais été habitué à avoir ce cadre. D'ailleurs, j'ai toujours un peu entendu ces rumeurs que les enfants norvégiens, c'est des enfants rois, sans cadre et tout.
- Speaker #1
On ne s'en est encore jamais vraiment rendu compte à notre échelle, mais c'est super intéressant de discuter avec toi pour aussi donner les clés, les enfants d'aujourd'hui, mais certains adultes qui peut-être ne sont pas partis. sorti de ça, c'est fou.
- Speaker #0
Je pense qu'en fait, moi je le vois avec surtout les jeunes dans le cadre de mon travail, qui en fait, il y a un vrai problème pour moi dans l'éducation norvégienne, c'est-à-dire qu'en fait, et ça revient à ce qu'on disait, cette non-intervention, où ils n'ont pas vraiment de feedback. Moi, ma fille, elle a du mal à l'école norvégienne parce qu'en fait, elle ne reçoit jamais vraiment de retour de la part de sa maîtresse sur ce qu'elle fait. Elle reçoit bien de retour sur ce qu'elle fait bien, mais elle ne reçoit pas de retour sur ce qu'elle ne fait pas bien. Et bon, ma fille, c'est un vrai problème parce qu'en fait, ma fille a cette vraie volonté de s'améliorer. Elle aime bien qu'on lui dise ça, c'est pas bien parce qu'en fait, elle comprend pourquoi elle a fait l'erreur. Donc, elle ne la refait pas. Il y a une vraie volonté. C'est quelque chose qui est naturel chez elle. et qui est une de ses plus grandes qualités, c'est vraiment cette volonté, si tu veux, de comprendre pourquoi ça n'a pas marché. Et quand tu es dans le système norvégien, en fait, par nature, ils ne vont pas te dire ce qui ne va pas. Ils vont te dire ce qui va bien parce qu'ils veulent que tu continues à faire bien. Ce qui est bien. Mais en fait, du coup, ça crée des gens qui sont boostés au positif. Et le truc, c'est que dans la vie, tu n'as pas que du positif, en fait,
- Speaker #2
en vrai.
- Speaker #0
Et que des fois, tu fais des conneries. Des fois, tu as besoin qu'on te dise bah oui je suis désolée t'as merdé quoi. Et t'as merdé parce que Et donc, la prochaine fois, peut-être tu ne refais pas la même chose. Et donc, en fait, moi, j'observe la même chose dans le cadre du travail avec des jeunes diplômés qui, en fait, sont excellents. Parce que moi, je travaille vraiment avec des diplômés qui viennent de NTNU. Donc, tu vois, c'est la meilleure université de Norvège. Donc, on ne parle pas de jeunes ni non intelligents, ni non motivés. Non seulement, c'est des gamins qui ont bossé, mais pendant des années, parce que pour rentrer à NTNU, c'est difficile. En plus, il faut bosser. Donc, c'est vraiment des jeunes intelligents qui ont envie, qui connaissent plein de trucs. Mais c'est des jeunes qui ont vraiment un vrai problème parce qu'en fait, ils ne sont pas habitués à recevoir des feedbacks concrets, pas positifs. Et du coup, lorsqu'ils reçoivent des feedbacks concrets, pas positifs, ils remettent facilement en cause leur valeur. Et quand on remet en cause notre valeur, ça affecte la confiance en soi et c'est compliqué. Donc, en fait, je pense qu'il y a... Une vraie question, si tu veux, à se poser dans le système norvégien. Est-ce qu'il ne faudrait peut-être pas un peu plus faire des feedbacks négatifs dans le sens, dans un but positif ?
- Speaker #2
Et malgré ce point qui a l'air quand même important pour toi, pour ta fille, vous avez quand même décidé de rester dans le système norvégien. Est-ce que ça a toujours été le cas ?
- Speaker #0
Oui, alors par rapport à l'école. Donc nous, on a aujourd'hui une enfant qui a 9 ans. Il y a deux ans, on a décidé de partir au Portugal parce qu'après Covid, on était fatigués d'être seuls et de ne pas avoir un village. Et ça a été très compliqué pour nous pendant le Covid parce qu'on n'a pas vraiment pu faire venir nos parents. C'était compliqué d'aller au Portugal et en France. Moi, j'ai accouché pendant le Covid. Et c'était assez... C'est compliqué, en fait. C'était très...
- Speaker #1
Est-ce que si bien la grossesse que l'accouchement, du coup, étaient lourds, le postpartum ? Est-ce que c'est un peu le tout ?
- Speaker #0
Ouais, c'était un peu le tout, en fait. Donc, la grossesse, ça a été un peu compliqué. Parce que quand t'as déjà un enfant et qu'en fait, c'est un peu... Tu vois, la crèche marche pas vraiment bien. Le boulot, c'est à la maison. Enfin, moi, j'ai cumulé les trucs pendant la grossesse, en fait, parce que j'ai commencé un burn-out. C'était vraiment le shit-layer-cake. les étoiles se sont alignées sans s'aligner c'était vraiment tout en même temps donc il y a eu ça donc en fait on a dit non on peut plus il faut vraiment qu'on fasse quelque chose donc du coup en fait on avait beaucoup réfléchi et on s'est dit ok on tente moi j'avais eu un boulot que je pouvais faire de n'importe où Mon mari avait négocié de faire son boulot depuis le Portugal avec des allers-retours réguliers. OK, on s'est dit allez, on tente. Sauf qu'en fait, ça ne s'est pas super bien passé. Donc la partie où on avait la famille proche, ça c'était super. La partie où on avait le climat, c'était super. Par contre, la partie où on n'avait plus la nature disponible, ça c'était plus là. Et en fait, moi ça m'a affectée d'une manière... que je n'avais pas du tout anticipé.
- Speaker #1
Tu ne t'y attendais pas.
- Speaker #0
C'était vraiment... La façon de vivre ne me correspondait plus. Je pense qu'on ne réalise pas quand on vit en Norvège et qu'on a cet accès à la nature, qu'on a les horaires de travail, qu'on a...
- Speaker #1
Le respect aussi qui est très présent. Il n'y a pas la notion de micro-agression, alors je ne sais pas s'il y a lié au Portugal.
- Speaker #0
Au Portugal, tu n'as pas cette notion de micro-agression. C'est un pays qui est très bienveillant également. C'est assez proche de la Norvège en termes de relations entre les gens. Par contre, tu as une vraie dureté de la vie, parce qu'en fait, les Portugais travaillent beaucoup, et travaillent pour de la misère. Donc en fait, tu as beaucoup de misère ambiante. Donc en fait, même si toi, tu n'es pas dans la misère, en fait, cette grosse différence entre les gens fait que tu ne peux pas ne pas le voir. Et surtout quand tu as grandi en Norvège, où tout le monde a plus ou moins ce qu'il faut pour vivre, en fait, c'est dur. Parce qu'en fait, tu te rends compte que tu ne peux pas faire grand-chose. et en fait du coup les questions de où est-ce que tu mets tes enfants avec qui vont grandir c'est des questions qui deviennent tout de suite beaucoup plus complètes Comment ont réagi les filles à cette transition ? Alors la petite elle a adoré parce qu'en fait elle est toute petite en plus elle adore ses grands-parents donc la crèche portugaise est assez proche de la crèche norvégienne sauf si t'avais pas l'extérieur donc là par contre c'était vraiment ça c'était dur en fait Mais on sortait beaucoup avec les enfants, on allait beaucoup dehors. Donc, en fait, ça compensait un peu. Par contre, la grande, le retour dans un système un peu à la française, extrêmement strict, avec un professeur pas bienveillant ou si tu veux, c'est l'autorité roi.
- Speaker #2
Elle était en quelle classe quand elle est arrivée là-bas ?
- Speaker #0
Elle était en CE1.
- Speaker #2
Et jusqu'à ce que vous partiez au Portugal, elle a été exclusivement...
- Speaker #0
Elle était CP à l'école française. Ah d'accord. Donc, c'est pour ça, je sais que je fais un aller-retour, mais je vais y revenir. Ok,
- Speaker #2
d'accord.
- Speaker #0
Donc, c'est pour ça que je te raconte ça maintenant. parce qu'en fait ce ce Ça t'a l'air tout où tu te retrouves dans une classe où, en fait, tu ne peux pas vraiment te poser de questions. Alors que ma fille, c'est l'enfant qui pose trop de questions. Eh bien, ça a été très compliqué. Moi, je suis passée d'une enfant qui adorait l'école. Si tu veux, c'est une enfant qui joue à la maîtresse quand elle rentre à l'école. Pour te dire, tu vas à une enfant qui avait de l'anxiété scolaire. Donc, en fait, elle... Elle faisait de l'eczéma. Elle ne pouvait pas dormir toute seule. Elle se réveillait à 5h du matin en panique parce qu'elle ne voulait pas aller à l'école. En deux mois. Donc, on s'est vraiment posé des questions. Donc, au final, je te passe les détails, mais on est rentrés.
- Speaker #1
Et ça a duré combien de temps, l'épisode Portugal,
- Speaker #0
déjà ? Neuf mois.
- Speaker #1
D'accord.
- Speaker #0
Parce qu'il a fallu quand même organiser le retour. Parce qu'en fait, ce qui s'est passé, c'est que mon mari aussi s'est fait licencier.
- Speaker #1
Ah ben.
- Speaker #2
Il avait toujours un contrat norvégien ?
- Speaker #1
À la base, c'était ça,
- Speaker #0
oui. Il s'est fait licencier parce qu'en fait, ils ont déplacé le département où il travaillait en Pologne. Et la question, c'est est-ce qu'il retrouvait un boulot au Portugal, où tu travailles de 7h à 17h, avec les transports, enfin 19h. Ou alors, est-ce qu'on rentre ? On s'est posé la question, ça a été compliqué. D'un point de vue familial, émotionnel.
- Speaker #2
Oui, parce que du coup, c'était la famille.
- Speaker #0
Pour lui aussi, si tu veux, tu vois un peu l'espoir de rentrer chez toi, où tu connais les codes, tu n'as pas besoin de te poser la question, tu n'as pas besoin de parler une langue qui n'est pas la tienne, tu manges la nourriture que tu aimes, tu n'as pas pas aimé maman à côté. Ça a une vraie valeur. Donc c'est vraiment dur.
- Speaker #1
Et est-ce que votre questionnement a été de... Est-ce qu'on rentre en Norvège ? Ou est-ce qu'il y a eu un autre pays potentiellement sur la liste ?
- Speaker #0
Alors, on s'est posé la question, est-ce qu'on va en France ? Mais pour nous, en fait, cette société bienveillante dont tu parles, où il n'y a pas de micro-agression, où en fait, les enfants grandissent dans une sorte d'amour présent dans la vie de tous les jours envers les gens, la famille, la nature. Moi, c'est quelque chose que je ne trouve plus en France. Tu l'as dans ton cercle proche, mais dans ta vie de tous les jours où en fait, tu es obligé d'être en relation avec des gens. qui sont un peu sur le guet à chercher la première excuse pour te rentrer dans l'art, qui est mon expérience en fait ces dernières années en France. Malheureusement, je n'ai plus envie. Et on avait essayé de trouver peut-être un peu des communautés plus petites ou tout ça. Mais on s'est dit non, en fait, mon mari est un enfant de la ville. Il a grandi à Lisbonne. Et en fait, il ne se voyait pas au milieu de la Cambrousse. Pour lui, ce n'était pas une option. Du coup, on a dit non, non, on rentre en Norvège. En plus, après, je me suis posé vraiment la question, tu vois, en termes de réseau. Si moi, je perds mon travail, je n'ai pas de réseau en France, en fait. Je n'ai pas de réseau professionnel. Je n'ai jamais travaillé en France. Donc, on s'est vraiment posé la question. Puis, on s'est dit non, non, on rentre parce que s'il y a un réseau, c'est moi qui ai un réseau en Norvège. là aujourd'hui si on a besoin financièrement si tu veux de... on ne peut pas se permettre de galérer. En plus, si tu veux, on avait essayé de vendre notre appart, notre appart, il ne s'était pas vendu. Donc, du coup, on l'avait loué. Donc, en fait, on avait vraiment, si tu veux, quelque chose pour se retourner. C'était un peu genre un message de l'univers, appelle-le comme tu veux. En gros, il y a plein de trucs qui n'avaient pas marché, qui faisaient qu'en fait, on était obligés de garder une accroche en Norvège. De toute façon, on était obligés de payer des impôts, on était obligés de gérer l'appartement.
- Speaker #2
Google à la base aussi.
- Speaker #0
Moi, voilà, etc. Il y avait l'entreprise qui disait, oui, c'est chouette que tu sois en remote, mais en fait, on trouve que tu gères vraiment bien les gens. Donc, on voudrait que tu, peut-être, sois un peu plus présente. Donc, en fait, ils me proposaient peut-être d'aller un peu plus, soit en Espagne, à Grenade, soit... Norvège, et donc du coup,
- Speaker #2
ça c'est un peu...
- Speaker #0
Là, les étoiles, elles sont alignées pour le coup.
- Speaker #2
Dans le bon sens.
- Speaker #0
Lui, il a trouvé un boulot beaucoup mieux payé, beaucoup plus bienveillant, avec des opportunités de développement. Donc tu vois, pour le coup, tout est vraiment...
- Speaker #2
Ça roule,
- Speaker #0
ça roule.
- Speaker #1
C'est génial, parce que tu parlais de ces planètes qui étaient alignées, mais dans le mauvais sens.
- Speaker #2
Tout s'est remis dans le bon sens.
- Speaker #1
Et ça finit par se rétablir.
- Speaker #2
Je trouvais ça aussi marrant, le fait que tu dises, on rentre, Parce que ça vient à ce côté de, en fait, chez nous, c'était en Norvège et on rentre.
- Speaker #0
C'est ça. En fait, c'est ce qu'on a compris. On a compris par ce détour qu'en fait, c'était chez nous. Et non seulement c'était chez nous en Norvège, mais c'était chez nous là où on était, tu vois. Parce qu'en fait, nos voisins, ils n'arrêtaient pas de nous appeler. Nos voisins, ils nous envoyaient des messages. Moi, ma voisine d'en dessous, elle m'envoyait des messages désespérés pour me dire « Oui, tes locataires, ils sont horribles ! » je peux pas t'aider, je suis désolée le voisin d'à côté si tu veux qui est un homme un peu plus âgé en fait je garde des contacts avec lui parce qu'il a une santé un peu vacillante et en
- Speaker #2
fait il y a plein de trucs qui font que je pense que c'est quand tu t'éloignes que tu réalises aussi combien les gens comptaient t'avais ton petit village au final
- Speaker #0
ça a été votre petite cure de rappel c'est ça et en fait si tu veux je pense que du coup des fois tu prends un peu pour acquis les trucs qui sont autour de toi et en fait tu mets pas assez d'efforts et je pense que le problème il était pas avec la Norvège où on habite c'était avec nous, en fait on avait oublié si tu veux d'investir et c'est comme je t'écrivais je te dis en fait l'herbe elle est plus verte là où tu l'arroses