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#7 - JARDIN D’ENFANTS EN NORVÈGE : AUTONOMIE, JEU LIBRE & PROTECTION DE L'ENFANCE – TEMOIGNAGE DE CHLOÉ cover
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Sous les Aurores

#7 - JARDIN D’ENFANTS EN NORVÈGE : AUTONOMIE, JEU LIBRE & PROTECTION DE L'ENFANCE – TEMOIGNAGE DE CHLOÉ

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1h36 |29/04/2025
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1h36 |29/04/2025
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Description

Dans cet épisode de Sous les Aurores, Lucie et Alban reçoivent Chloé, expatriée à Oslo depuis 2014, ancienne institutrice en jardin d’enfants et aujourd’hui doula et formatrice. Elle nous plonge dans l’univers des structures de petite enfance norvégiennes, où :

  • Les tout-petits sont encouragés à s’habiller et s’organiser seuls,

  • Les temps de jeu libre sont pensés comme moteur d’apprentissage,

  • Les repas et les siestes deviennent de véritables moments-calmes,

  • Le barnevern (protection de l’enfance) intervient de façon préventive et proactive (trop?) pour garantir le bien-être des enfants.


De ses débuts en tant qu’étudiante à ses remplacements en jardins d’enfants communaux, Chloé partage ses plus belles découvertes et les défis culturels qu’elle a dû relever. Un éclairage unique pour tous les parents, professionnels de l’enfance et curieux-se de la pédagogie scandinave.


Prêt-es à embarquer pour un voyage au cœur des jardins d’enfants norvégiens, entre autonomie, jeu libre et protection de l’enfance ? Installez-vous confortablement et rejoignez-nous Sous les Aurores ! ✨


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Site web: souslesaurores.com


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Lucie

    Salut, c'est Lucie.

  • Alban

    Salut, c'est Alban.

  • Lucie

    Trentenaire et parent de deux petites filles.

  • Alban

    Bienvenue dans Sous les Aurores.

  • Lucie

    Le premier podcast réalisé par un couple de Français en Norvège.

  • Alban

    Sous les Aurores, c'est le podcast haut en couleur qui vous emmène vivre toutes les nuances de l'expatriation et de l'immigration en Norvège et bien au-delà.

  • Lucie

    Que vous soyez déjà expatrié, immigré, que vous rêviez de le devenir ou que vous soyez simplement curieux de découvrir d'autres façons de vivre, ce podcast est fait pour vous.

  • Alban

    Alors, mettez-vous à l'aise, servez-vous une bonne tasse de thé ou un verre de vin. et rejoignez-nous sous les aurores. Au menu, discussion sincère,

  • Lucie

    moment de rire et d'émotion,

  • Alban

    et surtout, beaucoup de belles découvertes.

  • Lucie

    Alors, bienvenue chez nous sur un nouvel épisode de Sous les aurores.

  • Alban

    Bonjour à tous et bienvenue dans un nouvel épisode de Sous les aurores. Aujourd'hui, une nouvelle invitée qui n'est une fois de plus pas complètement inconnu, car elle nous a suivi pour un événement important de la vie qui dure en général neuf mois, quand tout se passerait bien.

  • Lucie

    Alors d'abord, on va commencer par une petite présentation. Est-ce que tu pourrais nous dire comment tu t'appelles ? Depuis combien de temps tu vis en Norvège ? Dans quel domaine travailles-tu ? Et enfin, un culture-choc que tu as remarqué quand tu es arrivé en Norvège ou que tu continues de vivre au quotidien ?

  • Chloé

    Je m'appelle Chloé, ça fait dix ans que j'habite en Norvège maintenant, donc août 2014. Je suis arrivée comme étudiante en linguistique et pédagogie. J'ai travaillé comme institutrice, ensuite j'ai travaillé comme doula, je le fais encore aujourd'hui. Et je suis aussi masseuse, spécialisée du coup sur la santé de la femme, la santé hormonale, la fertilité, la grossesse, etc. Et aussi, j'ai une spécialisation en massage visage. Et maintenant, je suis en train d'ouvrir un centre de formation spécialisé. Donc, je suis retournée du côté enseignement. Maintenant, j'enseigne le massage. Pour le choc des cultures, ça ne m'a pas marquée en arrivant. Mais c'est quelque chose qui commence à vraiment être un peu plus compliqué pour moi. Donc, comme je suis arrivée en tant qu'étudiante, il y avait aussi un mélange de... d'autres étrangers beaucoup. Je parlais déjà un petit peu norvégien. Donc, ce n'était pas vraiment marqué à l'université. Mais maintenant, en tant que vrai adulte, passé 30 ans, c'est le manque de proximité avec les autres humains. Ça fait un an qu'on a déménagé. J'ai dix voisins de palier. Il n'y en a pas un qui dit bonjour. Ah oui.

  • Alban

    Oui. C'est vrai que c'est vraiment quelque chose qu'on retrouve et tu n'es certainement pas la seule à vivre ça.

  • Lucie

    Oui, mais c'est marrant parce que tu vois, il y a une invitée hier. qui nous a parlé de ce culture-choc, mais qui nous a dit qu'elle, elle adorait parce qu'elle prend ça comme « je garde mon espace, chacun garde son espace et on respecte l'espace de l'autre » . Donc c'est marrant de voir...

  • Alban

    Quel effet ça peut avoir sur nous ?

  • Chloé

    Oui, c'est vraiment très différent. Je comprends le marqueur culturel, mais pour moi... qui est toujours grandi en communauté proche des autres, même à Paris ou Paris proche, où quand même, de toute façon, tout le monde se dit bonjour dans la rue, même si tu ne les connais pas. Là, ça commence à être un petit peu...

  • Lucie

    J'avoue, les voisins, quand même, c'est...

  • Chloé

    Les voisins, c'est chaud. On a les enfants qui vont à l'école ensemble.

  • Lucie

    En plus, ils ont des enfants, c'est vrai que je trouve ça bizarre.

  • Alban

    Bon, un peu malaise, quoi.

  • Chloé

    Un peu malaise, oui. Mais comme il y a le marqueur culturel que je... connais, je ne le prends pas comme une forme de racisme, de respect ou ce genre de choses. Je sais que c'est vraiment juste une bulle individualiste et personnelle, mais ce n'est pas...

  • Alban

    Ça ne rend pas la chose plus facile parfois, mais complètement.

  • Lucie

    Tu peux nous dire un peu comment tu es arrivé en Norvège, pourquoi, qu'est-ce qui t'a amené ici ?

  • Chloé

    Le fruit du hasard. du coup, vous le savez peut-être pas mais j'ai fait une licence en lettres, langues culture et civilisation étrangères en Scandinave et en spécialisation norvégien donc j'avais des cours de norvégien à la fac à Paris trop drôle pourquoi c'est la question à la base de... À la base, tu vois, tu as 18 ans, ton bac, et tu te dis, qu'est-ce que je vais faire ? Donc moi, je voulais faire une école d'art. J'étais vraiment sûre que c'est ce que je voulais faire. Sauf que je n'avais pas préparé mon dossier. C'est sur admission, quand tu veux faire une école d'art à Paris, c'est... C'est un peu tendu, ils ne prennent pas n'importe qui. Donc j'étais un peu en retard sur le dossier d'admission, et puis toutes les personnes avec qui j'avais travaillé m'avaient dit « De toute manière, les écoles d'art, il faut être mûres, donc tu ne rentres pas directement après le bac. Il faut une petite expérience de la vie, il faut des choses. » Et mon frère, lui, m'a mis la pression en me disant « Écoute, moi j'ai redoublé pour aller où je voulais, donc on a un an d'écart, donc on était tous les deux au bac à cette année-là. » Et il m'a dit maintenant que je peux y aller et qu'on a le droit d'être boursier parce que justement, on est tous les deux étudiants. Tu ne vas pas rien faire. Tu t'inscris quelque part. Je m'en fiche, mais tu fais quelque chose. Donc, du coup, j'ai regardé le dossier admission post-bac, le FAC de l'ADP et j'ai vu à l'LCE norvégien. Je me suis dit, pourquoi pas ?

  • Alban

    Donc, à la base, tu t'es dit ça limite pour un ou deux ans jusqu'à rebasculer.

  • Chloé

    Tu t'es dit, en fait, si ça me plaît. tant mieux, si ça me plaît pas c'est pas grave et en fait c'était 18h de cours par semaine, enfin je m'engageais vraiment pas sur un truc énorme, je sortais d'une L spécialisation arts plastiques j'allais pas m'engager en géopolitique donc du coup j'avais jamais même le premier jour de la rentrée, même pendant l'été et tout, j'avais pas eu la curiosité d'écouter du norvégien ou de regarder la géographie, enfin voilà de base, pour eux Je savais qu'Oslo, c'était en Norvège.

  • Alban

    C'est déjà pas mal.

  • Chloé

    Je savais que c'était le dernier pays avant l'Angleterre. Mais du coup, j'ai vraiment été les mains dans les poches. Donc on était un petit groupe, on était 11 je crois sur ma promo. Il y avait donc mon compagnon, on s'est rencontrés à la rentrée. Lui aussi, il était le seul à avoir aucune relation avec la Norvège, vraiment de près ou de loin. Donc voilà, après la licence, on a fait un Erasmus ici et on est restés.

  • Alban

    Ah mais génial ! Trop bien ! Et ça a été directement sur Oslo l'Erasmus ?

  • Chloé

    Ouais, moi j'ai fait un essai raté. à ma deuxième année de licence à Christian Sand. Il y avait un accord Erasmus ouvert, mais en fait, c'était vraiment... Je pense qu'il a été fermé depuis, d'ailleurs, on en avait pas mal repéré. Depuis ton passage ? Le coordinateur, ouais. En fait, ils sont pas du tout... Donc quand tu fais un Erasmus, tu dois valider des crédits qui sont en rapport avec tes études. Et moi, j'avais accès à aucun cours de norvégien à Christian Sand, parce que, en fait, c'est... Les accords, c'était surtout pour les étudiants en commerce ou d'autres choses. Donc, j'avais accès quasiment qu'à des cours en anglais et pas du tout au cursus des Norvégiens eux-mêmes. Et puis, de toute façon, je n'avais pas le niveau. Je pouvais à peine me présenter. Donc, ça a été raté. Après, l'année d'après, mon copain, lui, a fait l'Erasmus à Oslo. Et ensuite, un an et demi après, on est revenu. Donc, moi, j'ai fait mon Erasmus pour le M1 ici.

  • Lucie

    Et du coup, c'est directement après l'Erasmus que vous vous êtes installée ?

  • Chloé

    Oui, en fait, pour moi, c'était vraiment la porte de sortie ou d'entrée d'une certaine manière, parce que je connaissais un peu le système norvégien. Et je savais qu'obtenir un percheur de numéros, donc le numéro d'identité, c'était super facile quand on était étudiante. Avoir un logement, être boursière, s'inclure dans la vie norvégienne à mon niveau, c'était vraiment la meilleure façon.

  • Alban

    Est-ce que tu penses que c'est toujours vrai aujourd'hui qu'en tant qu'étudiant, ça rend les démarches plus faciles peut-être ?

  • Chloé

    Oui, clairement. Surtout que moi j'avais un Erasmus d'un an, donc j'avais vraiment tout... En tant qu'Européen en tout cas, c'est très différent quand on est en dehors de l'Europe ou de l'Union Européenne. Pour moi, c'est vraiment la porte d'entrée la plus simple. Après, vous, je sais que c'est des cas différents, par exemple, parce que vous êtes arrivé avec du boulot.

  • Alban

    Oui, voilà.

  • Chloé

    Donc forcément, il y a l'entreprise qui fait la démarche, vous avez un soutien, il y a tout le monde qui vous explique, etc. Mais quand on est un petit peu plus à l'arrache ou qu'on n'a pas complètement fini nos études, s'inscrire à la fac, pour moi, c'est vraiment le meilleur truc à faire. Même à n'importe quel âge, en vrai, tu as... 30 ans et tu te dis, moi, je vais découvrir la Norvège. Tu te prends six mois, n'importe quel programme à la fac. Et du coup,

  • Lucie

    ça facilite les démarches.

  • Chloé

    Oui, t'es étudiant.

  • Lucie

    C'est génial. C'est un bon conseil. Au-delà des démarches facilitées, qu'est-ce qui vous a donné envie de rester à Oslo et en Norvège ?

  • Chloé

    La facilité. Tout, en fait. La vie, le cadre. Donc, nous, on vient tous les deux de banlieues parisiennes. Je ne sais pas, marcher dans les parcs. Enfin, juste le fait d'avoir le droit de marcher sur la pelouse d'un parc, c'était fou.

  • Lucie

    C'est exactement ce que je dis à Alban en étant parisienne, parce que lui, il avait peut-être plus accès aux pelouses dans les parcs.

  • Alban

    La ferme d'Himède.

  • Chloé

    L'une des premières fois que je suis venue, c'était les 200 ans de la Constitution pour la fête nationale. C'était un énorme truc. Et il y avait... des gens qui faisaient des barbecues portatifs sur la pelouse du parc du château. Et je me suis dit, waouh, la liberté !

  • Alban

    Excellent de se souvenir, parce qu'avant de vivre à Oslo, quand j'étais en Erasmus, moi en Finlande, on avait fait avec des amis un long week-end à Oslo, et on s'était retrouvés à Ekeberg, un grand, grand parc très, très connu d'Oslo. Et pareil, tout le monde sur la pelouse, avec ses barbecues à usage unique. Et j'avais trouvé ça incroyable.

  • Chloé

    Oui, c'est dingue. Les poubelles à recycler ce type de barbecue et tout, c'était vraiment... Pour moi, c'était fou. Et la proximité avec la nature, se déplacer partout à pied ou à vélo. Après, il faut avoir des jambes, quoi. C'est un peu vallonné. Mais ça, l'organisation autour de la vie, de manière générale. Je n'avais pas encore de famille à ce moment-là, du tout. mais de me rendre compte du fait que... que le travail, ce n'est pas la vie. Tu ne vis pas pour travailler du tout, en fait. C'est un accompagnement, il y a un espèce d'équilibre pour la plupart des gens qui est quand même extrêmement confortable. Et ça, c'est très inspirant. Moi, j'ai vu mes parents galérer, vraiment, depuis que je suis toute petite. Et du coup, ils nous ont toujours encouragés à faire un boulot qu'on aime, toujours. On leur a tout fait. Moi, je leur ai dit, je veux être tatoueuse. psychologue en prison...

  • Alban

    Juste à l'un de ces temps-là ? Non,

  • Chloé

    j'avais vraiment des objectifs professionnels un peu étranges, et à chaque fois ils étaient à fond quoi, mais vas-y, fais ça ! Parce que pour eux, il n'y avait pas d'épanouissement du tout dans leur travail, et c'est tout l'inverse qu'ils nous souhaitaient. Donc j'ai découvert qu'ici c'était quand même le quotidien de beaucoup de gens, et je me suis dit, c'est dingue !

  • Lucie

    Et à contrario, est-ce que tu as eu des difficultés au départ ou des choses qui ont été difficiles à adopter ?

  • Chloé

    Non. Non ? Pour moi, déjà, je parlais un petit peu norvégien. Pendant mon Erasmus, j'ai fait un semestre entier où j'avais 8 heures, 10 heures, 12 heures de norvégien avancé par semaine. Ouf ! Ah ouais, j'étais en master.

  • Alban

    Bah

  • Chloé

    à un moment. Donc, j'ai eu des cours de dialecte, des cours de prononciation. C'était assez passionnant. Et puis après, je suis rentrée dans le lecteur programme, c'est pour devenir prof. Donc, pas juste institutrice, mais avec des choses assez spécifiques et tout ça. Pour moi, la fac, ça a été... Après, pendant que j'étais étudiante en France, j'ai travaillé à l'Eau-Roi-Merlin pendant toutes mes années d'études. Donc comme je parlais un petit peu norvégien et que j'avais une expérience professionnelle, j'ai travaillé à Maxbo. J'ai été embauchée comme ça avec une poignée de main et un rendez-vous. Ça a été hyper facile. J'étais boursière, j'avais un logement étudiant, j'avais un nouveau mec. Enfin le fameux, mais on n'était pas encore ensemble. Ça s'est fait dans le même temps. Donc, nous, on découvrait plein de choses. En plus, on vivait une idylle.

  • Alban

    Vous alliez au même rythme.

  • Chloé

    À l'étranger, un autre rythme. C'était l'été, il fait jour tout le temps. Les gens sont hyper détendus. Il y a la rivière qui traverse Oslo. Non, je ne sais pas.

  • Lucie

    Les planètes étaient alignées. Ah ouais,

  • Chloé

    aucune difficulté.

  • Alban

    Génial.

  • Lucie

    Même quand l'hiver est arrivé, ou l'automne,

  • Chloé

    je dirais. Non, trop bien, j'adore la neige, j'adore l'hiver c'était un automne pas trop moisi genre une semaine de pluie et puis après ça s'est vite transformé Vraiment tout a été extrêmement facile. La liaison Paris-Oslo se fait très facilement. On avait des tarifs étudiants. Je prenais l'avion, je faisais l'aller-retour pour 70 euros, je crois, quelque chose comme ça. Donc quand tu as cours du mardi au jeudi, tu as quand même des longs week-ends. Après on ne roulait pas sur l'or, donc on ne se permettait pas de partir en week-end n'importe où, etc. Mais vraiment, c'était facile. Après, il y avait juste des produits d'hygiène. les oeufs blancs, trop bizarre ça faut s'habituer, c'est vrai s'habituer,

  • Alban

    c'est trop surprenant,

  • Chloé

    ouais, au début je voulais rien cuisiner avec des oeufs voilà, le lait alors ils ont fait du progrès mais il y a 10 ans, le lait tournait très vite donc ce genre de petits détails au début, voilà, il faut s'adapter un petit peu, mais pour même retrouver les choses que je cherchais, j'avais déjà le vocabulaire moins, donc j'avais vraiment pas de difficultés majeures.

  • Alban

    Mais ça c'est intéressant, tu parles un peu de faire ces courses. Lucie et moi, on a eu des expériences dans plusieurs pays et c'est vraiment un gros culture shock à chaque fois de savoir comment tu vas soit essayer de recuisiner un peu tes plats de base. Ça demande vraiment une traduction compliquée. Les agencements dans les rayons peuvent être différents, les noms, la présentation produit. Ou alors, si tu te sens d'essayer la culture locale, comment consommer local aussi et cuisiner ? Donc, ça fait partie de tout l'apprentissage quand tu arrives dans un pays. Oui,

  • Chloé

    et puis c'est très dur ici parce que la plupart des produits sont importés. On est sur des terres non cultivables deux tiers de l'année minimum. En même temps, encore une fois, ça a beaucoup évolué. Mais vraiment, il y a dix ans, je pense que quand je suis arrivée, c'était le début du changement, de diversifier le rayon yaourt, par exemple. Parce que moi, il y avait vraiment vanille, fruits des bois, nature, et c'est tout. Pas de textures différentes, pas de marques. Vraiment, c'était le monopole sur tous les produits. Et là, on trouve des danettes, je ne sais pas.

  • Lucie

    Et encore, moi, je trouve que c'est quand même réduit, toujours le choix. comparé à quand je vais en France, dans les rayons et tout. Mais du coup, j'imagine qu'il y a dix ans, c'était pire.

  • Chloé

    Ah ouais, ouais. Enfin, même l'autre marque, la Kumel, l'autre marque de produits laitiers, était un peu naissante, tu vois, sur les rayons. Tu ne les trouvais pas dans tous les distributeurs. C'était vraiment... En même temps, ça donne une simplicité, une facilité. Tu n'as pas le choix, en fait. Si tu veux du sucre, c'est celui-là. Si tu veux un yaourt, c'est celui-là. Tu fais avec.

  • Alban

    Et c'est vrai que c'est un peu à l'image de certains... certains aspects de la culture norvégienne. T'as un peu moins le choix, il n'y a plus cette notion de rentrer dans le moule. Après, il faut voir si tu es confortable avec ça ou pas, mais je trouve ça intéressant de le soulever parce que, comme tu le dis, on va faire mes courses avec moins de choix. Alors, pas du tout de choix pas bons, mais les choix qu'on trouve en France, je me dis, c'est n'importe quoi aussi.

  • Chloé

    Oui, la charge mentale de faire les courses en France, c'est fou. Quand on y va, on a un énorme Leclerc à côté de chez ma mère. Tu peux passer vraiment 1h30 à... à faire tes courses.

  • Alban

    C'est le cas maintenant, on évite, notamment en vacances ou quoi, les hypermarchés, c'est vraiment devenu la phobie, parce qu'on préfère avoir moins de choix, mais faire ça plus rapidement.

  • Chloé

    Ah ouais, clairement, je comprends trop les gens qui font leurs courses sur Internet en France.

  • Alban

    Ouais, voilà, c'est continuer.

  • Chloé

    Là, au moins, c'est vite fait, quoi. Mais c'est vrai que nous, on a habité surtout en centre-ville, il n'y a pas vraiment des caddies, c'est que des surfaces qui sont quand même assez réduites. Les gens font leurs courses plus ou moins au jour le jour, pour aujourd'hui, demain, ils vont à la boutique hyper régulièrement. Mais il n'y a jamais la queue.

  • Alban

    C'est rapide, voilà.

  • Chloé

    C'est rapide et tout ça. J'ai pas pris cette habitude-là. Je fais mes courses une fois par semaine.

  • Lucie

    Non, mais c'est très vrai ce que tu dis, parce que moi, quand je travaillais chez Mondelez, et qu'on vendait du chocolat notamment, forcément, on étudiait beaucoup les habitudes des consommateurs en Norvège. La caractéristique principale, c'est que ce sont des petits supermarchés et les Norvégiens vont faire leurs courses pratiquement tous les jours pour le soir même, tous les deux jours. Si tu cherches des petites courses,

  • Chloé

    surtout pour Oslo après.

  • Alban

    Voilà, c'est ça. Tu sors un peu, mais tu trouves un peu plus hyper. Il y a des vraiment gros hypermarchés comme Ops, je crois.

  • Chloé

    Ouais, Ops,

  • Alban

    ouais. Voilà, ça c'est vraiment énorme. On y est allé une fois, c'est toujours un malentendu. Mais sinon, c'est vrai que les supermarchés en dehors d'Oslo, c'est un peu plus style supermarché, mais je trouve que ça reste toujours humain. Il n'y a pas trop d'hyper en général.

  • Chloé

    Non, pas vraiment, mais en même temps, il n'y a pas... Comme il n'y a pas la diversité, les rayons ont moins besoin d'être grands.

  • Lucie

    Donc, tu es arrivée étudiante, tu faisais un job à côté étudiant. Et quand est-ce que tu as trouvé ton premier vrai job, entre guillemets ?

  • Chloé

    Moi, j'ai fait longtemps. Job, études. Ouais. Parce que je me suis inscrite à plein de types d'études différentes. Je restais longtemps étudiante, en fait. D'accord. Donc, quand j'ai compris que j'avais vraiment envie de travailler dans l'enseignement, j'ai arrêté Max Boo et j'ai trouvé un job de remplaçante en jardin d'enfants. Et en fait, ça s'appelle « til kalingsvikaar » . Donc, en fait, ils t'appellent quand ils ont besoin. Donc, tu as un espèce de contrat zéro. et je... tu es dispo, tu n'es pas dispo. À savoir que dans ce genre de structure, il y a forcément un adulte malade à l'année. Il manque tout le temps du personnel, parce qu'ils ont un nombre d'adultes à respecter par enfant. C'est un milieu où il y a des enfants de 1 à 6 ans, où les bactéries, les virus prolifèrent. Et donc, tu as forcément besoin de... De personnel en plus, en permanence. Donc, à partir du moment où, dans une structure, tu as compris les routines, tu connais le prénom des enfants, ton travail, il est bon, tu es apprécié, tu es quasiment sûr de travailler tous les jours.

  • Lucie

    D'accord, donc même si tu es remplaçante, au final, tu travailles souvent.

  • Alban

    Mais du coup, tu étais souvent dans le même jardin d'enfants ?

  • Chloé

    Ah ouais, j'ai bossé plusieurs années. J'ai eu trois expériences différentes en jardin d'enfants. un qui était une très mauvaise expérience qui a duré un mois et demi maximum. Et du coup, je suis restée trois ans et trois ans et demi.

  • Alban

    Donc après, les deux autres expériences se sont super bien passées.

  • Chloé

    C'était incroyable. J'ai adoré. Le premier dans lequel j'ai travaillé, c'était un communal qui avait beaucoup de classes. Trois étages, deux bâtiments. Vraiment un...

  • Alban

    Un gros jardin d'enfants.

  • Chloé

    Un gros. Donc eux, clairement, ils avaient tout le temps besoin de monde. Et moi, je suis tombée sur une classe où il y avait une fille en arrêt long, mais qui prolongeait par deux semaines, trois semaines. Moi, j'ai travaillé vraiment trois ans là-bas, je ne l'ai jamais vue. Et donc, j'ai récupéré ses fringues, ses chaussures. C'était pratique. Mais du coup, c'était vraiment une bonne expérience. Et puis moi, je découvrais vraiment la vision de comment... Les Norvégiens, ou la Norvège en tout cas, considèrent l'enfant à bord de la pédagogie, la petite enfance, même jusqu'à plus grand, parce qu'on a des enfants jusqu'à 6 ans sur ces structures. C'est un autre monde. Et en fait, en même temps, c'est quelque chose qui me parlait beaucoup parce que c'est le monde dans lequel moi j'ai grandi, avec ma mère qui avait vraiment ce type d'éducation-là, avec beaucoup de respect, par exemple. L'autorité dans ma famille n'existe pas. Enfin, l'autorité autoritaire. Bien sûr, après, il y a une hiérarchie. Il y a des choses qui sont imposées, etc. Bon, on ne revient pas, bien sûr, mais moi, j'ai vraiment grandi avec beaucoup de respect, à être considérée comme une personne, même si j'étais un enfant. Ce qui n'était pas le cas de toutes mes copines, par exemple. Et c'est vraiment ce que j'ai retrouvé ici. Et j'étais hyper heureuse. Je me sentais très, très à l'aise et j'apprenais énormément. Et je voyais tous ces enfants avec une... C'est une jeunesse dorée quand même. On sait que la Scandinavie est un peu avant-gardiste aussi sur ce genre de choses-là. Alors je ne connais pas les conditions à l'école de tous les enfants du monde, dans tous les pays, dans toutes les cultures, mais on est quand même extrêmement privilégiés. Et c'est aussi une des raisons qui nous poussent, nous, à... à laisser grandir nos enfants là et dans des structures aussi norvégiennes, sans se tourner sur des choses plus alternatives.

  • Lucie

    Et qu'est-ce qui t'a tout de suite sauté aux yeux dans les différences avec un jardin d'enfants français ?

  • Chloé

    Tout.

  • Alban

    La liste est longue.

  • Chloé

    La liste est extrêmement longue. En plus, ma mère travaille en petite enfance.

  • Alban

    D'accord.

  • Chloé

    Elle gère des crèches à l'émer, aux mères adjointes. Elle s'occupe de tout ce qui est la petite enfance. On a eu énormément de discussions sur les différences entre les crèches. Elle faisait surtout crèches et transitions maternelles. Et tout. L'organisation, la considération aussi, le nombre d'adultes par enfant. Quand c'est des enfants de 1 à 3 ans, on est sur 3 enfants pour 1 adulte. Déjà, rien que ça, c'est fou. C'est incroyable. Et puis après, ils sont un peu plus grands, etc. Et puis on peut monter jusqu'à 18 enfants maximum, si le groupe est assez âgé, donc entre 4 ans et demi et 6 ans. Là, tu vas avoir 18 enfants pour 3 personnes. Ce qui reste quand même assez luxueux, parce qu'après, on est loin des institutrices qui ont 25 enfants, une atsem. Ça fait une sacrée différence. Et en fait, chaque enfant apprend à attendre. à s'organiser, à évoluer avec d'autres enfants, à ne pas voler les jouets, ce genre de choses-là. Et en même temps, nous, on a le temps de leur montrer, on a le temps de leur expliquer. On passe beaucoup de temps dehors aussi, et on a le temps de les faire s'habiller. Ils apprennent à le faire tout seuls, et c'est OK. On peut passer une heure dans la garde-robe pour qu'ils mettent tous leurs habits, ou même juste une chaussure, et c'est OK. Maintenant,

  • Alban

    on comprend mieux.

  • Lucie

    C'est pour ça qu'elle n'a pas autant de temps le matin à s'habiller.

  • Alban

    Le soir, en ce moment, on est dans une phase, on va la chercher. C'est parti pour trois quarts d'heure. Je monte sur le banc, je saute et regarde moi. Et puis, je ne m'habille pas et je reste à l'école. C'est trop bien. Mais voilà, en fait, il y a vraiment le temps. C'est intéressant parce que nous, on n'a pas tous les codes non plus. En tant que parent français d'une petite fille qui est dans un système norvégien.

  • Chloé

    Le temps, c'est une énorme différence. Il n'y a pas de... Les repas sont timés. Les repas sont timés et ça c'est un problème que nous on rencontre vraiment au quotidien. Petite anecdote, ma fille a 6 ans, elle est à l'école maintenant, l'équivalent du CP. Ils ont 30 minutes pour manger, ils vont chercher leur boîte, ils ramènent leur boîte, ils mangent leur boîte, ils ferment leur boîte, ils se lavent les mains et il s'est passé 30 minutes. Elle n'a pas le temps de manger. Et même quand elle était, ça s'appelle le born-out à gueule, même quand elle y était, souvent on avait... Alors moi, elle était dans le même... dans lequel moi j'ai travaillé, mais bon après quand elle a commencé, j'ai arrêté et en fait, souvent j'avais des retours de mes anciens collègues qui me disaient, mais ta fille c'est une heure qu'il lui faut à table, qu'est-ce qui se passe ? Elle s'assoit et puis elle commence à discuter avec tout le monde, et je dis ouais mais ça...

  • Alban

    Le pire c'est qu'elle nous a sorti un petit verre de vin la dernière fois !

  • Chloé

    Non, mais on a toujours eu ce problème-là, parce que pour nous, le repas, c'est vraiment un moment social. Et on passe du temps en famille, vraiment. Et puis moi, tout le monde me dit, mais attends, quoi ? Tes enfants passent une heure à table ? Mais c'est possible ! Quand ? Bah oui, mes enfants passent une heure à table. On est assis ensemble, on discute, on se raconte nos journées, on se fait des blagues, on parle de demain, etc. Donc du coup, ma fille, elle n'associe pas du tout le moment du repas à « il faut manger pour donner de l'énergie à ton corps, pour survivre le reste de ta journée » . Donc là, c'est un peu compliqué.

  • Lucie

    D'ailleurs, c'est pareil pour les adultes au bureau. Ils mangent tous très rapidement, en 30 minutes, voire parfois devant les ordi si c'est des boulots en entreprise. Et c'est vrai que nous, en tant que Français, on est là, ben non, venez, on va se poser, on va discuter en même temps.

  • Chloé

    Et ça, pour nous aussi, c'était un choc pour moi. Quand on parlait des chocs de culture, alors Max Bouge commençait à 6h du matin, à 10h30, le téléphone sonnait, Chloé va en pause. Comment ça en pause ? Goûter ?

  • Alban

    Va en pause, petit déj. Ouais.

  • Chloé

    Pause-déjeuner ? Waouh ! Alors, j'avais 30 minutes, clairement, je prenais un petit déjeuner. Ça, pour moi, c'était trop bizarre. Sur les jardins d'enfants, étrange aussi. Parce qu'en fait, tout le monde est très... Enfin, t'imagines, tu travailles en pyjama, plus ou moins. T'as le temps tout le temps, t'es en chaussettes, tu joues au sol avec les enfants. Il n'y a pas non plus vraiment de hiérarchie, même au sein de la classe. Donc, il y a une structure. Il y a des pédagogues qui ont... des études spécifiques. Après, il y a des espèces d'ATSEM qui ont des études spécifiques, mais moins hautes. Et puis après, il y a les remplaçants, les assistants, etc. Mais bon, tout le monde est quand même largement au même niveau face aux enfants, en tout cas. Et l'ambiance est hyper chaleureuse, disons. Et avec beaucoup de proximité, aussi du contact, on caline beaucoup les enfants, etc. Et tu vas dans la salle repas, il y a un silence de plomb. Chacun mange son truc. Et ouais, mais en fait, alors quand tu travailles avec les petits, donc jusqu'à 3 ans, il y a la sieste. Donc t'as cette espèce de moment de calme dans ta journée. Mais quand t'es avec les 3-6 ans, qui ne s'arrêtent jamais, qui parlent tout le temps, qui se chamaillent, fille-garçon, garçon-garçon, fille-fille, joue au coiffeur avec moi, oui mon épée elle s'est cassée, fais-moi un avion, n'importe tout. Tout et n'importe quoi, on a énormément de jeux libres. Tu comprends en fait que, bon déjà, c'est des Norvégiens, ils ont besoin de leur bulle. Pas tout le monde, j'ai pas envie de mettre beaucoup trop d'étiquettes, mais comme on disait au début. Et ensuite, tu comprends que t'as besoin de ces 30 minutes de silence pendant ta journée.

  • Alban

    C'est comme un temps calme, en fait, le repas pour eux.

  • Chloé

    C'est ton propre temps calme. Et ça,

  • Lucie

    c'était toi forcément avec tes collègues à ce moment-là,

  • Chloé

    en tout cas pendant la pause repas. J'avais. Trop bizarre.

  • Lucie

    Et comment tu as été traitée en tant qu'employée ? Sur les structures communales, il y a un espèce de standard. À savoir qu'il y a une énorme majeure différence entre la France et la Norvège. Quand tu travailles dans le public, au niveau de l'enseignement en tout cas, tu es beaucoup mieux payée et tu as beaucoup plus d'avantages. Ah ok !

  • Alban

    Donc là, en Norvège, dans le public norvégien, mieux payée et plus d'avantages que dans le privé norvégien ?

  • Lucie

    Oui, dans l'enseignement en tout cas. Wow, ok. Clairement. Pour exemple... du coup on travaille 7h30 continue, donc c'est le forfait horaire norvégien notre pause déjeuner est comprise et payée, parce qu'on est obligé de rester sur la structure vu qu'il y a un nombre d'enfants par adulte, en cas d'incendie ou n'importe, donc ça c'est comme ça normalement partout et normalement sur toutes les structures que ce soit public ou privé, mais après il y a des différences, par exemple quand tu fais une heure supplémentaire donc une fois par mois il y a des réunions, ce genre de trucs, tu vas rester deux heures de plus où ils ont besoin d'un extra, une collègue malade, n'importe. Tu fais une heure supplémentaire. Déjà, elle était payée à 300%, je crois. C'était vraiment un truc énorme. Donc, elle est payée. Et en plus de ça, tu l'as en récup.

  • Alban

    Ah wow !

  • Lucie

    Tu peux mettre les deux. Et elle est payée et tu l'as en récup. Donc, ça, dans le privé, ce n'est pas comme ça.

  • Alban

    À toutes nos entreprises, si vous nous entendez, on est OK pour avoir les mêmes conditions. Je plaisante, mais en général, c'est vrai que selon le contrat qu'on a, il n'y a pas vraiment la notion de cadre, pas cadre, mais un peu indirectement. Et en général, les heures sup, c'est l'un ou l'autre. Soit on se les fait payer plus, soit on les récupère. Dans les grandes entreprises, en général, c'est ça le système.

  • Lucie

    Il y a beaucoup d'accords de branches. Donc vous, vous êtes tous les deux dans les branches ingénieurs. Donc vous êtes effectivement sur ce système-là. Après, ce n'est pas partout pareil. C'est un peu différent, mais oui. Après, en Norvège, par expérience, et donc du coup, pas sur le même secteur que le vôtre, mon conjoint est ingénieur aussi, et en fait, on remarque qu'on nous encourage vraiment à ne pas faire d'heures supérieures. Vraiment, ce n'est pas du tout bien vu. Un employé qui va faire plus d'heures, un patron qui va te dire, « Non, en fait, tu n'as pas fini ton dossier, tu restes. » Ce genre de choses-là, c'est très mal vu.

  • Chloé

    Et sur ce point, dernièrement, j'ai été représentante des employés dans mon entreprise. Et effectivement, quand il y avait des heures sup, les employés devaient justifier pourquoi ils avaient fait ces heures sup et devaient rendre des comptes au RH et à moi pour être sûre que c'était fait dans de bonnes conditions et pour de bonnes raisons. Oui,

  • Lucie

    et en fait, ça, ça fait partie vraiment du... C'est quelque chose d'intégrant. pour déjà le bien-être au travail. Et ensuite, comme je disais tout à l'heure, le boulot, ton métier, c'est un accompagnement de ta vie. Tu ne travailles pas pour ton métier. Tu ne vis pas pour ton boulot, en fait. Et donc, du coup, ça fait aussi partie du contrat social et du contrat de confiance et du contrat de travail à ne pas encourager les personnes à faire des heures sup. Parce que ça développe aussi plus facilement des environnements de travail un peu toxiques. Après, je n'ai pas énormément d'exemples, mais mes deux parents sont fonctionnaires, donc c'est légèrement différent. J'ai un ami en France qui a exactement le même statut que mon conjoint. Et lui, s'il part du boulot avant 18h30, c'est hyper mal vu.

  • Chloé

    Bien sûr.

  • Lucie

    Alors qu'il fait son travail, il s'organise, il prend des pauses déjeuner plus courtes. Enfin voilà, lui, il n'a rien à se reprocher, mais il est tout le temps montré du doigt. Il a de la pression, etc. Parce qu'il part trop tôt du boulot.

  • Alban

    Oui, rien que le volume horaire, le présentéisme, tout ça, c'est vraiment encore un sujet. Oui,

  • Lucie

    bien sûr. Et le fait que ça n'en soit pas un ici, c'est incroyable. De dire, je vais chercher les enfants, 15h c'est terminé. Par exemple, dans une entreprise dans laquelle mon conjoint a travaillé, il était interdit de programmer une réunion qui devait se finir après 15h.

  • Alban

    Ah mais oui.

  • Lucie

    Si tu as une réunion, c'est 13h max. Oui,

  • Alban

    j'adore. Il faudrait que tu me donnes le nom. Non, mais c'est vrai.

  • Lucie

    En tout cas, le vendredi, il y a des trucs religieux où tu ne touches pas au vendredi.

  • Alban

    Tout le monde part en hutte, en cabine, Ausha.

  • Lucie

    Quand tu es adulte et que tu as une vie de famille et tout ça, tu vas chercher tes enfants, c'est normal.

  • Chloé

    Comment font d'ailleurs les employés des Barnagues, des jardins d'enfants, parce que pour les chercher leurs propres enfants ?

  • Lucie

    Alors, on se repose sur le conjoint. Non, en fait, on a des... je ne sais pas comment ça s'appelle en français donc en fait soit tu as le premier service, le service du milieu donc quand tu es sur un roulement à 3 et le service du soir, donc du coup soit tu commences à 9h30 et tu finis à 17h grosso modo, soit tu commences à 7h ou 7h30 selon les structures et tu finis à 14h30 ou 15h et donc du coup dans ta semaine c'est quand même assez changeant parce que ça c'est tous les jours une fois premier, deuxième, troisième premier, deuxième, troisième, etc Moi j'ai travaillé dans des... des classes où après on était quatre. Même organisation. Et du coup, on essaye de s'arranger pour avoir... Déjà, souvent, on travaille proche de là où on habite. Après, je sais qu'il y a aussi quand même... Alors pour nous, non. Pour les personnes qui travaillent en physique tout le temps, je ne sais pas moi, les menuisiers, les caissiers, dans la vente directe, etc. Oui, c'est une autre organisation, mais je sais qu'il y a ce système aussi de roulement. Et puis après, par exemple, la maîtresse de ma fille, elle n'a pas de roulement. C'est 8h tous les matins. Et par contre, c'est elle qui va chercher son petit à l'école. Alors l'école en Norvège, soyez prêts quand ça va vous arriver. C'est 8h15, 13h15. Après, il y a le périscolaire, etc. Mais donc, du coup, elle, en tant que maîtresse, elle a forcément de l'administratif, préparer des choses, etc. Mais elle finit rarement après 15 heures. Donc, c'est systématiquement son conjoint qui dépose leur fils au jardin d'enfants. Et c'est moi, elle, qui récupère une organisation. Ça se trouve.

  • Alban

    J'adore que tu donnes les clés du fonctionnement du jardin d'enfants. Parce qu'en fait, il y a vraiment cette... Même si on n'a jamais eu d'enfants en France, On garde malgré tout des codes et des repères français, peut-être nos propres expériences, ou la famille, des cousins, ou que sais-je. Et ça nous aide, je trouve, à comprendre un peu. Parfois, on peut se poser des questions sans aller chercher à avoir les réponses. Sur, on a la crèche, enfin, Jordan enfant, on va voir des... Tiens, ce matin, c'est cette personne. Tiens, ce soir, c'est une autre personne. Mais c'est intéressant de voir quel est le derrière, le roulement, faire de la place aussi pour leur propre vie.

  • Chloé

    Bien sûr, et c'est important. Quand je vois, moi, je peux comparer, parce que ma sœur a travaillé en crèche à Paris.

  • Lucie

    Wow.

  • Chloé

    et en fait c'est pas les mêmes horaires elle commençait très souvent tôt et elle terminait très souvent tard parfois un peu moins tard mais quoi qu'il arrive c'était tard et un nombre d'enfants et pour le coup ils ont pas de remplaçant quand quelqu'un est absent parce qu'il y a des autorisations pour le coup en Norvège aussi si tu veux travailler

  • Lucie

    en jardin d'enfants ou avec des enfants, quoi qu'il arrive, même si c'est pour un remplacement, tu dois donner un extrait de casier judiciaire. Il y a des espèces de boîtes d'intérim spécialisées pour les remplaçants en jardin d'enfants et en temps périscolaire à l'école. Donc, eux s'occupent d'enquêter plus ou moins sur les personnes qu'ils vont envoyer, etc. Moi, je ne suis jamais passée par là. Je suis toujours passée directement par les structures. Mais après, tu as un espèce d'entretien. En Norvège, on est très... en tout cas professionnellement parlant, c'est très humain. Donc, ils vont regarder un peu ton CV, mais ils sont surtout intéressés à t'entendre parler, savoir d'où tu viens, surtout pour travailler avec les enfants.

  • Chloé

    On va vérifier que tu n'es pas un psychopathe caché.

  • Lucie

    J'ai fait un entretien, par exemple, d'embauche à l'école française d'Oslo. Et ils m'ont dit... Ils avaient un problème sur mon rapport à l'autorité, par exemple. Ils m'ont dit, en fait, ce n'est pas question que tu travailles avec nous. Enfin, je les intéressais beaucoup parce que j'ai un FLE, donc ça c'est très intéressant. Et en même temps, moi je parlais beaucoup. Qu'est-ce que c'est un FLE ? Un FLE, pardon, c'est des études spécifiques, ça s'appelle Français Langue Étrangère. Et en fait, normalement, si tu enseignes en structure francophone ou le français aux étrangers, ou ce genre de choses, rapport France-étranger, il faut normalement... avoir des études en FLE. Moi, j'ai une mention FLE sur ma licence, par exemple. Je fais un bicursus.

  • Alban

    Ce qui fait que normalement, tu es encore plus apte, on va dire, à apprendre le français à quelqu'un qui ne parle pas à la base.

  • Lucie

    Oui, d'une certaine manière. Grosse. Par exemple, il y a des personnes qui étudient le FLE en France de manière très poussée et qui vont travailler avec des entreprises et donner des cours de français aux personnes étrangères. Ça, ça se fait aussi. Mais du coup, quand même, la mention FLE est très appréciée sur les structures francophones à l'étranger, etc. Et vraiment, les questions qu'on m'a posées à l'entretien, déjà, il y avait une commission, ils étaient 11. Je me suis dit, franchement, ils exagèrent. Tu entrais dans cette salle et tu n'avais pas juste une personne ou deux, comme j'ai toujours eu. C'était vraiment, il y avait 11 personnes. Il y avait même des représentants de parents d'élèves, la comptable.

  • Alban

    Par exemple, Elon Musk.

  • Lucie

    Toute une délégation avec tous ces gens-là ont eu devant toi. Je me suis dit, moi, je vais en prendre un entretien. Je vais m'envocher les mains dans les poches. Et donc, les questions étaient vraiment très orientées par rapport au fait que, parce que j'avais l'air jeune, j'ai une voix fluette, ce genre de choses-là, ils disaient, tu vas te faire manger avec des gamins de 11 ans. Tu ne te rends pas compte ? J'ai toujours travaillé avec des enfants, je n'ai jamais eu de problème. Et en fait, il y avait cette espèce de choc culturel quand même. À la sortie de l'entretien, je me suis dit... De quoi qu'il arrive, je n'ai pas envie de travailler là. Le fait de me retrouver dans un système franco-français scolaire avec ce genre de structure brute et élitiste sur beaucoup de choses, après avoir connu la souplesse en Norvège, et notamment avec les enfants qui sont si jeunes. C'était un peu « waouh » , les entretiens d'embauche en Norvège. en tout cas de mon expérience extrêmement humain. Tu dis oui, alors et du coup, nous on aimerait bien expliquer ça aux enfants, comment tu ferais, ce genre de choses-là. Il y a un enfant qui joue avec l'eau, il en fout partout, il est trempé, c'est trempé partout. Les autres, ils arrivent, ils glissent. Qu'est-ce que tu fais ? Des mises en situation.

  • Chloé

    Pour voir comment tu vas,

  • Lucie

    Julienne. Qu'est-ce que tu fais ? La première réponse, c'est tu prends le temps. On va aller ensemble chercher du papier, essuyer, fermer le robinet. Ensemble, on va aller chercher du change, changer les chaussettes des autres qu'on glissait.

  • Alban

    On dit souvent qu'il n'y a pas vraiment d'apprentissage au jardin d'enfants norvégien. Ça peut être un des reproches de ceux qui aiment l'éducation plus française. Toi, est-ce que tu dirais que, notamment via l'exemple que tu donnes d'entretien, est-ce que tu trouves que la première des choses qu'on apprend, c'est qu'est-ce qu'on aime faire et l'autonomie, par exemple ?

  • Lucie

    Je dirais que c'est faux pour les personnes qui pensent qu'il n'y a pas d'apprentissage en jardin d'enfants. Déjà, les enfants sont quand même au jardin d'enfants jusqu'à 6 ans. C'est une énorme période de leur vie. C'est très personnel, mais j'aime beaucoup qu'on mélange les âges. Souvent, c'est 1 à 3 ans et 3 à 6 ans. Ça autonomise les plus petits qui ont envie de faire comme les grands et ça sensibilise les grands à aider les plus petits. À aussi prendre le temps, à être plus respectueux aussi sur le fait que lui, il ne sait pas. Parce que du coup, personne n'est montré du doigt parce qu'il est dans l'incapacité de tartiner son pain tout seul. Ou de mettre ses chaussures tout seul. En place de le montrer, tu le dois, et de dire, il n'a pas appris à faire ses lacets, il ne sait pas mettre ses chaussures, etc. On va en fait encourager les plus grands, ou les autres, à aider ceux plus petits. Et en fait, ça part aussi du principe qu'on a le temps, parce que encore une fois, je pense qu'il n'y a pas vraiment de comparaison réalistique possible, ou réaliste, pardon, avec la France. Si tu vas dehors et que tu as 15 minutes, parce que c'est les 15 minutes de récré, et que déjà, tu as tes chaussures sur toi tout le temps. un peu différent. Il faut que tu mettes tes chaussures. Tu n'as pas le temps de passer 15 minutes à mettre tes chaussures, ou à essayer de le faire tout seul, ou à essayer de faire en sorte qu'il y ait un autre enfant qui va l'aider. Parce que nous, on est des adultes. C'est qu'à tard, un enfant de 4 ans qui aide un enfant de 2 ans à mettre des chaussures.

  • Alban

    Il faut avoir du temps dans soi, c'est clair.

  • Lucie

    Oui, du temps et de la patience. Il ne faut pas du tout être dans l'urgence de « attends, c'est bon, c'est bon, hop là, c'est fait, c'est fait. Tiens, je vais te remonter ton zip, on va mettre le bonnet, les moufles sont à l'envers, les chaussures... Les enfants qui ont des chaussures à l'envers, c'est OK, ils l'ont fait tout seuls, ils sont trop fiers, on leur laisse leurs chaussures à l'envers. Ça, c'est vraiment... Moi, je pense que ça donne aussi beaucoup plus de respect et de patience aux autres envers les autres. Ça inculque un peu plus de tolérance, ne serait-ce que juste dans la structure, dans le fait que personne n'est montré du doigt parce qu'il ne peut pas. Et à l'inverse, personne n'est montré du doigt parce qu'il peut. Et en fait, on ne va pas spécifiquement, en tout cas à cet âge-là, encourager les enfants qui sont bons ou naturellement bons. à exceller. On a quand même un espèce de truc de groupe. Et là, nous, on le voit beaucoup avec ma fille qui est sur le CP. Elle est plus petite que les autres. Elle est née en fin d'année. Elle a beaucoup d'enfants de sa classe qui ont bientôt 7 ans et elle en a encore 5. C'est la plus petite. Elle a toujours été la plus petite. Mais elle est très responsable. Elle est très posée. Elle adore les trucs intellectuels. Elle lit, elle écrit. Et en fait, elle a fait ça toute seule. Parce que, bien sûr, ils ne l'ont pas fait au jardin d'enfants. Et bien sûr, ils ne le font pas au CP.

  • Chloé

    Ils ne le font pas au CP ?

  • Lucie

    Non, on apprend à l'alphabet, tranquille.

  • Chloé

    Mais à partir de quand ils apprennent à écrire et lire ?

  • Lucie

    Ah là là ! C'est 8-9 ans. En fait, le truc, c'est qu'on va favoriser les périodes sensibles. On va favoriser l'autonomie. Donc là, par exemple, dans sa classe, il y a beaucoup d'enfants qui ne savent ni lire ni écrire. Ce qu'ils demandaient, c'est qu'ils sachent écrire leur prénom. Normalement, tu te dis qu'un enfant de 6 ans, 6 ans et demi, il sait écrire son prénom. A priori, ça va. Et donc, du coup, c'est vraiment ça qui est demandé. C'est le mot qui nous a été passé avant la rentrée. Reconnaître ses affaires, être autonome sur s'habiller, se déshabiller, aller aux toilettes. et savoir écrire son prénom. Pour le moment, elle ne s'ennuie pas. Mais nous, on a beaucoup de gens qui nous disent « Attention, qu'elle ne s'ennuie pas. » Parce que, en fait, c'est assez l'inverse. En France, on va avoir le groupe de tête qui va être encouragé à être tiré vers le haut. Le groupe du milieu qui va être encouragé à suivre ce groupe de tête. Et puis, les moins bons qui vont malheureusement rester dans le fond la plupart du temps parce qu'ils ne sont pas assez bons. Ils ne suivent pas le rythme, ils ont des difficultés scolaires, ce genre de choses-là. Si tu ne rentres pas dans le moule du mieux, tu vas être un petit peu laissé sur le côté, grosso modo. En tout cas, moi, c'est ce que j'ai vécu. J'imagine qu'on a à peu près le même âge. Vous êtes sur l'expérience scolaire. En Norvège, ça va être l'inverse. Il faut laisser personne derrière. Donc, quitte à baisser le niveau général du groupe moyen, parce que tu as toujours deux, trois têtes, trois, quatre qui se perdent en route, et une dizaine, quinzaine d'enfants qui sont quand même... plus ou moins homogène. Et en fait, là, quitte à baisser le niveau général pour que ceux qui sont derrière ne soient pas derrière. En fait, les Norvégiens me disent « Quoi ? Ta fille lit et écrit ? » Ils sont vraiment là-dedans. Mais non, c'est oui des Français, mais aussi beaucoup d'étrangers. Nous, on a dans la même classe de ma fille, il y a un petit garçon qui est moitié sud-africain, moitié... un pays de l'Est, je ne sais plus lequel, et ses parents font en sorte qu'il ait des cours privés. En plus, lui, il a des leçons en plus, etc. Parce qu'il ne croit pas au système norvégien. Alors que moi, qui ai travaillé avec des Norvégiens toute ma vie, au final, ça fait dix ans que je travaille avec des Norvégiens, en tant qu'adulte, je n'ai pas la sensation qu'ils sont plus bêtes que moi. Qui ai été à l'école avec des bons résultats.

  • Chloé

    Parce que moi, c'est marrant qu'on parle de ce point. Quand j'ai visité un jardin d'enfants Pour notre fille, j'avais posé la question quels devaient être les acquis pour après passer au CP. Et elle m'avait répondu ce que tu disais. Elle s'est posée le problème. Il faut qu'elle sache écrire son prénom. J'avais dit c'est tout. Elle me dit oui. Je dis ok. Et donc j'étais revenue un peu inquiète. J'en fais part à Alban et je lui dis franchement, je ne sais pas. Est-ce qu'il ne faudrait pas plutôt la mettre à l'école française et tout ? Et puis Alban m'avait dit... Mais Lucie, tous les Norvégiens que tu connais, ils savent très bien lire et écrire. Donc, ce n'est pas l'importance qu'ils sachent le faire à 3 ans ou à 8 ans.

  • Lucie

    Une petite différence sur la structure de la langue aussi. Parce que, par exemple, on prononce... plutôt mon approche linguiste qui va intervenir, c'est-à-dire que le français, c'est une langue quand même intrinsèquement plus complexe à apprendre que le norvégien, dans le sens où la moitié des lettres, des mots tombent. Je ne les prononce pas. Et on le voit chez les enfants francophones qui apprennent le norvégien. Ma fille n'a jamais mélangé le français et le norvégien. Jamais. Alors que mon fils, lui, c'est un parfait mélange. J'utilise un mot ici, là. Il s'en fout complètement. Mais alors, elle, jamais. Par contre, elle était... Parce qu'en fait, les langues, c'est des maths. Quand même. Donc, elle, elle était quand même hyper perturbée, même à deux ans, sur le fait que... pluriel en français ne se prononce pas. Et ça, c'était vraiment difficile pour elle. Et du coup, en fait, elle la collait, le pluriel norvégien au mot français. Et j'imagine que vous allez le remarquer assez rapidement.

  • Alban

    Je pense que cet épisode est déjà passé, mais il me semble, maintenant que tu le dis, que ça nous est arrivé.

  • Lucie

    Donc,

  • Chloé

    elle mettait une structure norvégienne, mais avec des mots français.

  • Alban

    Aussi.

  • Lucie

    Tu finis une phrase avec.

  • Alban

    Typique.

  • Lucie

    même moi je le fais je me rends compte des fois que je me dis mais oula je ne parle plus bien français mais en fait ça tu vois il y a un truc où le cerveau il a quand même besoin d'avoir des repères etc et en fait le français c'est une langue qui est extrêmement réglée donc je comprends qu'on justifie d'apprendre vraiment le côté systématique de la langue un peu plus tôt Oui.

  • Chloé

    Pour le français.

  • Lucie

    Parce que c'est quand même beaucoup moins phonétique. Le norvégien, qui est une langue qui reste extrêmement simple à apprendre et à maîtriser. Donc voilà, il y a des mots bizarres, il faut apprendre le truc à plus.

  • Alban

    Il y a quand même des cas qu'on prononce « che » . Je dis ça, je dis rien, mais bon,

  • Lucie

    quand même ! Ça dépend de l'environnement linguistique. Mais en fait, oui, il y a deux, trois prononciations un peu étranges, mais c'est une langue qui est beaucoup plus sensible. Oui, genre tu sens plus la langue. Et puis, en fait, tu es un Norvégien, tu grandis avec tes parents qui ont un dialecte d'ici, un dialecte de là. Parce qu'en même temps, on est plus libre en Norvège. La langue est extrêmement plus libre en France, où on est encore extrêmement académique, super strict sur... Tu envoies un mail administratif.

  • Alban

    Oui, il y a les formules. Je vous prie de bien agréer. Mais ça, ça...

  • Lucie

    Voilà, c'est ce genre de choses où tu vas devoir t'en tenir quand même à des formules, à un vocabulaire soutenu, ou même une prononciation, parce que tu es en entretien d'embauche ou parce que tu es au café avec un copain. C'est quand même différent. On ne retrouve pas beaucoup ça en Norvège. Et puis, chacun est libre de sa propre langue.

  • Alban

    Ta fille, elle a l'air, on va dire, en avance sur le système norvégien. Est-ce que tu l'as aidée avec ça ? Est-ce que c'est elle vraiment qui s'est intéressée ? Et du coup, tu l'as soutenue, on va dire, plus qu'encouragée ? Comment tu vois ça ?

  • Lucie

    C'est que elle. C'est que elle. Oui, parce que moi, j'ai été profondément trempée dans la société norvégienne, en tout cas au niveau de la pédagogie, de la petite enfance, des apprentissages et du reste. On essaye bien sûr de respecter ces périodes sensibles. Voilà si on voit qu'elle est. extrêmement intéressée par ça. On va essayer de lui trouver deux, trois trucs qui ont rapport, etc. Par exemple, elle a appris à sauter à pieds joints, à deux ans passés. Elle a regardé les autres sauter pendant des mois et des mois. Elle n'aimait pas aller jouer dehors. Elle n'est pas norvégienne sur ça, par exemple. Et en fait, elle a développé des capacités moteurs. Donc, on a la motricité fine et les capacités moteurs. Donc, elle a... motricité fine, ouais, elle attrapait des cheveux par terre en petites pinces comme ça à 4 mois mais bon, voilà, marcher, sauter, grimper faire tout ce genre de motricité un petit peu plus avancée avec le corps c'est venu super tard par contre intellectuellement, ça Ausha donc elle est très différente sur ça elle adore faire les trucs calmes posés donc moi j'ai pas la sensation qu'elle soit en avance et ça je suis très apaisée avec ça et je suis pas trop angoissée. Donc oui, forcément, elle, par exemple, elle est le profil type d'une enfant brillante qui réussirait à son âge, dans le système français.

  • Alban

    Le bon profil, on va dire. L'inverse.

  • Lucie

    Lui, il est comme un poisson dans l'eau sur le système norvégien. Pour rien au monde. On essaierait de l'enlever de là. Mais elle, on s'est posé la question. Elle déteste. Elle adore l'école, bien sûr. Mais il y a trop de temps libre, à son goût.

  • Alban

    De temps libre dans l'école norvégienne ? Oui,

  • Lucie

    parce qu'il faut savoir qu'ils sont à l'école de 8h15 à 15h15. Mais ils ont une pause déjeuner de 30 minutes. Ils ne rentrent dans l'école qu'à partir de 9h et quelques. Donc la première heure, ils sont dehors. Et ils ont aussi deux pauses entre. et pendant la classe, ils peuvent aussi avoir du temps libre où ils vont sur l'activité. Donc en fait, souvent dans les classes, c'est organisé par, alors ça je ne sais pas le dire en français, par espaces dédiés à un type de choses. Donc par exemple, sur les jardins d'enfants, tu vas avoir l'espace construction, où tu vas trouver des Legos, des Kaplas, ce genre de choses. Tu vas avoir l'espace livre et temps calme. Tu vas avoir l'espace jeu de rôle, où du coup tu as des poupées, une cuisine, ce genre de choses. En fait, les espaces, ils sont quand même construits et séparés de manière à ce que l'enfant... puisse s'intéresser et se construire avec ce qui lui l'intéresse. Et en fait, c'est là que l'apprentissage se fait par le jeu. Et c'est énorme. Et aussi, les enfants nous donnent énormément d'informations par rapport à ce qui se passe chez eux. Nous, on est formés aussi, en tout cas en jardin d'enfants, à jouer énormément et encourager les enfants à faire les jeux de rôle de la maison pour détecter s'il y a, par exemple, des enfants qui sont dans des foyers violents ou il y a certaines choses qui ne sont pas respectées, des choses sur les habitudes alimentaires. Et en fait, c'est une manière aussi de nous, de regarder l'enfant et d'essayer de pouvoir lui venir en aide. C'est aussi une manière d'être intrusif dans la vie d'un foyer. Alors ça, moi, c'est quelque chose qui me dérange un peu plus parce que du coup... Oui, on prend énormément d'informations aux enfants. Donc oui, on sait beaucoup de choses de ce qui se passe chez eux. Après, c'est des enfants et il y a des âges. Il y a des âges où il y a la fantaisie qui est très, très développée et où du coup, une parole sur deux, tu sais qu'il faut le prendre vraiment avec des pincettes. Mais en tout cas, vraiment chez les tout-petits, eux vont vraiment reproduire leur quotidien. Ils n'ont pas encore assez de fantaisie ou d'imagination pour faire d'autres choses. Donc quand tu vois une petite fille qui traite super bien sa poupée, qui l'emmène bien au dodo, qui lui tient la main pour qu'elle s'endorme, Tu dis, ça, c'est ce qui se passe chez elles. Et à contrario, des enfants qui vont... Alors, on ne parle pas des enfants qui jettent les poupées par terre. La colère, ça existe. Ça,

  • Alban

    on a carrément droit.

  • Lucie

    Après, on ne catégorise pas. Mais ça nous permet vraiment d'enquêter quand même.

  • Chloé

    Tu as eu un cas où tu as repéré ?

  • Lucie

    Alors, moi, j'ai eu une classe très difficile. Et c'est ce qui m'avait fait arrêter d'ailleurs cette structure-là.

  • Alban

    Est-ce que c'était ta toute première expérience qui a duré un mois ? Non,

  • Lucie

    pas du tout. Alors, je vais essayer de faire rapidement. J'ai donc travaillé à remplacer une personne pendant... plus d'un an et demi, quasiment deux ans, où en fait finalement j'avais pris sa place. Donc c'était ma classe et c'était des tout petits. Donc là, moi j'étais très bien, c'était super et tout ça. Mais ça restait que je n'avais pas encore de CDI. Et là, en fait, je finissais mes études ou en tout cas, là, je n'allais pas continuer sur des études et j'avais envie vraiment d'avoir un CDI pour diverses raisons, même si en fait, dans les fêtes, c'est la même condition en Norvège. en tout cas sur ce genre de choses. Donc j'ai dû passer un entretien parce qu'en fait, par les structures communales, tu dois envoyer ton CV, tu dois envoyer ce dossier-là sur une plateforme qui est traitée au niveau communal et ensuite ils sélectionnent des dossiers qu'ils envoient au RH ou aux directrices, etc., qui ensuite te convoquent en entretien. Donc elles peuvent pas dire, moi j'ai un dossier à proposer en entretien. T'es obligé de passer de toute façon par l'utri sélectif avant de la communiquer. Donc j'ai envoyé ma candidature, j'ai reçu le fait que j'allais être reçue en entretien, etc. Et j'ai passé un vrai entretien d'embauche. Alors que ça faisait deux ans que je travaillais avec eux. Et en fait, il y avait 479 personnes qui avaient postulé, je crois, entre quand même. Ah oui. Énorme. Et donc j'ai été prise. Wow. Et donc ils m'ont proposé une place dans une classe de 3-6 ans. Choc. Pour moi, ça a été un choc.

  • Alban

    Parce qu'avant, tu étais chez les tout-petits ?

  • Lucie

    Moi, j'étais chez les petits. Il y avait la sieste, il y avait l'apprentissage de la langue, parce que moi, ça ne faisait pas si longtemps non plus, ça faisait peut-être deux ans que j'étais en Orveille. Et en fait, les 4-5 ans qui parlent en permanence, et en plus, ils inventent plein d'histoires. Vraiment, j'avais la tête, la salle de pause, mais je l'ai savourée en silence. Parce que du coup, en plus, c'est en norvégien. dur. Il commençait à avoir des dialectes à cet âge-là, déjà, selon les parents et tout. Et puis moi, j'étais vraiment... Je comprenais pas qu'il y avait une licorne sur un nuage, qu'il avait été chercher un seau magique et tout ça. Enfin, tu vois, c'est du vocabulaire que t'as pas en tant qu'étranger. T'as pas grandi ici, t'as pas les références. Quand on me parlait de Cap-Tel-Sabeltan, c'est vraiment en train de... de commencer à découvrir la culture norvégienne, en tout cas des petits. Et en fait, cette classe-là était vraiment particulière parce qu'on n'avait pas de « pedleded » . En fait, c'était une personne qui était sur un remplacement long. C'était une personne qui était en fait « barn-o-barn » , donc assistante sociale. La Norvège et la culture des assistantes sociales, j'imagine que vous le réaborderez sûrement plus tard avec d'autres personnes, mais c'est un gros, vaste sujet. Et en fait, elle, c'était vraiment ça, son boulot. Elle avait avant été assistante sociale pendant plusieurs années. Et là, elle faisait ce remplacement. Et en fait, on s'était retrouvés avec tous les cas sociaux qui étaient dans cette classe. Donc, elle, elle passait son temps à suivre des dossiers plutôt que de faire la tâche pédagogique, coordination avec les parents, etc. Enfin, elle faisait la coordination, mais avec les enfants à dossier, en fait. Et donc, du coup, nous, enfin moi, en tout cas, j'ai été énormément sensibilisée à ça aussi. J'ai été beaucoup formée, j'ai eu beaucoup de cours en extra pour vraiment savoir comment me comporter avec les parents. Parce que des fois, il y a des enquêtes sur leurs enfants et sur eux, et ils ne sont pas encore au courant. Mais des fois, légalement, il faut qu'ils soient au courant de quelque chose quand même. Qu'est-ce que tu peux dire ? Qu'est-ce que tu ne peux pas dire ? L'attitude que tu as, comment tu vas devoir noter tout ce que l'enfant dit, ce genre de choses. Ça, ça a été très dur pour moi et très lourd. et de me rendre compte. compte aussi à quel point on est attentif aux enfants, mais pas qu'eux, et à quel point on ferait tout pour le bien-être d'un enfant parce qu'on juge que ça, c'est limite. Moi, ça m'a posé quand même quelques...

  • Chloé

    Que tu trouvais parfois que ça allait trop loin, peut-être ?

  • Lucie

    Oui, je trouvais parfois que ça allait trop loin. Après, moi, en tant qu'étrangère, j'ai toujours entendu des histoires sur les injustices des barnevernes, en fait, en Norvège, sur... Oui, on m'a pris mon bébé de deux mois parce que j'étais sous antidépresseur, ce genre d'histoire. J'avais cette espèce de spectre. Alors oui, on avait des enfants qui étaient dans des situations terribles, clairement, dans ma classe. C'était vraiment très difficile. Il y avait des choses dont moi-même, je n'étais pas au courant. Par exemple, il y avait certains enfants, il n'y a qu'une seule personne qui était autorisée à les accompagner aux toilettes ou à leur changer la couche. Et là, tu fais, c'est dur quand même. Parce que moi, j'aurais, par exemple, adoré être infirmière puéricultrice, par exemple. vraiment travailler avec des enfants malades, mais ma sensibilité m'en empêche. Et en fait, de me retrouver là dans une classe avec que des enfants en difficulté dans leur foyer, parce qu'après, en fait, à chaque fois, du coup, comme elle était super calée, elle traitait super bien avec les parents, elle traitait super bien avec la police, avec les assistantes sociales, avec toute la coordination et le reste. Et ça, je trouvais que c'était un peu mal fait aussi, personnellement. Je l'aurais dit, d'ailleurs. Je l'aurais dit.

  • Alban

    Oui, répartir un peu.

  • Lucie

    c'est trop en fait même pour eux d'avoir que des copains qui font face à des difficultés alors là ils le voient pas vraiment t'as quand même ce truc de moule où tous les enfants sont égaux où tout va être pareil alors oui des fois il y a machin qui partait avec tel adulte parce qu'il devait aller à la police ce genre de choses mais ça non les enfants ils le voient pas ils sont petits Merci. Il faut savoir que du coup, nous, on avait une classe de 18 enfants. Et en fait, il y en avait peut-être une dizaine qui avaient des dossiers de progrès.

  • Alban

    Moi aussi, en tant qu'étrangère, on m'a beaucoup parlé de cette protection de l'enfance qui est très proactive. Et parfois, ça fait peur. Donc, je me dis, oh là là, parfois, je la presse pour qu'elle s'habille et tout. Est-ce que ça, ils vont prendre ça comme remarque ? Ça fait peur. Est-ce que c'est vraiment des cas extrêmes dont tu parles ? en mode violence ? Ou est-ce que parfois, ça peut être aussi ce que je considérais des petits signaux ?

  • Lucie

    On a eu tout et rien. On avait des cas très extrêmes. On avait un enfant qui allait être placé, des choses comme ça. Après, il y avait, non, des soupçons, des suspicions, des on n'est pas sûr, de la négligence.

  • Chloé

    Ah, aussi.

  • Lucie

    Oui. ils font hyper attention à la négligence et moi ça j'en suis consciente, par exemple ma fille elle aime pas s'habiller, donc là c'est le début de l'hiver il fait à peu près zéro elle aurait besoin quand même de mettre une vraie combinaison l'équipement d'hiver et elle veut pas mettre des chaussures qui sont rembourrées parce que ses pieds sont serrés dedans et elle est hyper sensible au contact et tous les matins on se bat pour lui dire non, il faut que tu aies des chaussures qui tiennent chaud, qui isolent du sol, etc. Il faut savoir que dans son école et dans beaucoup d'écoles à Oslo, il y a deux jours par semaine qui sont entièrement à l'extérieur. Ils ne rentrent pas dans l'école,

  • Alban

    même au CP.

  • Chloé

    À partir du CP, parce que nous c'est un jour, tu as le turdag.

  • Lucie

    Oui, en jardin d'enfant, tu as une journée à l'extérieur. Chez les petits, c'est différent. On rentre avant 11h30 parce qu'après, il y a la sieste et tout. Mais ils mangent dehors, oui. À l'école, c'est deux jours par semaine sans aucune exception. S'il fait moins que moins 10, on raccourcit la journée. Mais sinon... On a eu quelques déluges quand même, là, en début de saison, où il pleuvait vraiment extrêmement, etc. Ils passaient six heures par jour dehors dans un bar. Et ça s'appelle l'école à l'extérieur. Ça ne s'appelle plus une sortie. Ça s'appelle on fait l'école. Donc, ils sont censés apprendre des choses, ramasser, apprendre à compter de manière différente, etc. Il y a beaucoup d'enfants qui aiment. Ma fille déteste. Et quand elle a appris qu'à l'école française, c'était quasiment pas de sortie, elle a quand même hésité. Et en fait, sur ce côté négligence, par exemple, nous, on a du mal à lui faire porter des chaussures chaudes. Et on n'a pas peur, mais on a quand même une crainte de se dire...

  • Chloé

    Il pourrait relever ça.

  • Lucie

    C'est relevé, c'est sûr.

  • Chloé

    Ah, c'est relevé, c'est sûr.

  • Lucie

    Oui, oui. Mais tu vois, de se dire, en fait, c'est mal vu. Oui, oui. Donc, on essaye et on est un peu... C'est vrai qu'on est quand même tout le temps dernière minute.

  • Chloé

    Là, je fais une petite pause parce que je connais Lucia en train de se dire, est-ce que j'ai mis la chaussure sous couche ce matin ? Est-ce que j'ai mis les gants ? Est-ce que j'ai doublé les gants ? Est-ce que j'ai mis les chaussures ?

  • Alban

    Non, mais c'est clair, je vais y faire attention.

  • Chloé

    Non, mais c'est vrai que c'est inquiétant un peu ces histoires de, comme tu dis, l'aide sociale, proactive, mais trop.

  • Lucie

    Oui, la protection de l'enfance.

  • Chloé

    Protection de l'enfance, voilà, qui, de manière générale, nous, quand on devait présenter comme ça notre arrivée, en gros, un peu scandale. En France, on va attendre qu'il se passe quelque chose de mal pour placer les enfants. Éventuellement, tu as raison, c'est même en retard ou voir trop. En Norvège, on ne va pas attendre que quelque chose de grave se passe.

  • Lucie

    C'est un peu l'inverse de la médecine, par exemple. En France, on va être un peu plus prévention. Tu veux dire, je ne me sens pas top en ce moment. Prévention. Être sûre qu'il n'y a rien de grave qui se trame, ou quelque chose de ci, de ça, etc. En Norvège, c'est l'inverse. On attend que tu aies tous les symptômes d'un truc pour te dire, ok, en fait, t'es malade, on va s'occuper de toi. À ce niveau-là, c'est l'inverse. En Norvège, on fait énormément de prévention sur les enfants. Je trouve que c'est bien, mais c'est vrai quand même que nous, en tant qu'étrangers, et avec tout ce qu'on entend, ça peut faire un peu peur.

  • Alban

    Parce qu'on n'a pas tous les codes sociaux. La première année de ma fille, vu qu'elle était de décembre, elle n'avait pas de crèche tout au début. Et là, quand je reprenais ses affaires la première année pour ma seconde fille, je disais à Alban, mais on n'avait pas de laine pour elle au moment de l'hiver. Et je me dis, mais maintenant, si un jardin d'enfants avait vu que notre fille venait sans laine tout l'hiver, ils auraient peut-être relevé ça.

  • Lucie

    En fait, nous non plus, on n'a pas de laine. Ils ont du mal. Mais oui,

  • Chloé

    il y a tellement un lobby dans la culture de la laine. Je jure que par ça.

  • Lucie

    je sais mais en fait oui ça tient chaud oui non c'est vrai que c'est son tête bon on va parler de ma fille du coup c'est le meilleur exemple c'est plus souple elle déteste avoir deux couches fines en pleurel tu vois genre deux pantalons tout ça c'est pop et je la comprends moi deux pantalons mais jamais tu me verras avec deux pantalons ou un collant mais moi c'est trop drôle moi je suis comme ça et en fait le truc c'est que moi j'ai travaillé là et il fait 25 degrés Merci. On n'aère pas beaucoup. Les fenêtres sont souvent condamnées ou avec seulement des petites ouvertures parce que la sécurité enfant.

  • Alban

    Dans les classes, tu veux dire ?

  • Lucie

    Oui. Il fait une chaleur pas possible. Et il y a des enfants, ils ont leur sous-couche de laine, leur t-shirt et leur pull toute la journée.

  • Chloé

    Moi, je suis le seul parent qui me déçape à fond quand je vais la déposer. Mais quand tu vas la récupérer, c'est la seule gamine ou une des rares qui n'a quasiment plus rien sur elle. Donc, comme tu dis, problématique d'aller essayer de remettre les couches une par une avant de sortir.

  • Alban

    Généralement, on n'arrive pas à lui remettre toutes les couches.

  • Lucie

    Oui, parce qu'en fait, elle a... pas forcément besoin, tu vois. Et ma fille, elle est... Moi, j'ai pas froid facilement, visiblement, elle non plus. Et en fait, la laine, en tout cas, les sous-couches thermiques, laine comme ça, etc. Alors là, oui, il y a un intérêt. Je veux dire, elle passe 6h, 7h un jour, dehors. Elle a à peine 6 ans, il fait quand même bien froid. Ouais, tu vois, quand tu choisis, par exemple, la combinaison de cosmonautes, là, qu'il faut porter tout l'hiver, tu dis, bon, ouais, on va aller... Peut-être sur une marque un peu mieux isolée ou un truc où on sait que... Et en fait, là, nous, on a le problème. C'est pas un vrai problème. C'est plus peut-être un problème de riche. Mais on se dit, elle va être beaucoup dehors. C'est pas un gros gabarit. Il faut qu'elle puisse bouger, parce qu'elle aime pas être dehors. Parce qu'elle aime pas... En fait, elle est trop coincée dans toutes ses couches.

  • Chloé

    Comme tu dis, c'est des cosmonautes.

  • Lucie

    C'est des artistes de cosmonautes. Donc du coup, on avait ce truc de en fait, il faut un vêtement technique. Il faut un truc de cosmonautique, ça coûte hyper cher. Et en fait, c'est un tissu qui est aussi un peu plus fragile, qui fait des trous plus facilement. Donc des fois, tu ne le gardes pas d'un enfant à l'autre, malheureusement. Donc oui, tu finis la saison avec. Tu ne vas pas en racheter 12, quoi. Mais je vois, nous, on habite dans un quartier assez aisé, avec beaucoup de Norvégiens. Il n'y a pas énormément d'étrangers. Ou alors, il y a des étrangers, mais des Allemands mariés avec des Norvégiens. Des trucs comme ça. et en fait Les enfants sont sureéquipés. C'est quelque chose qu'on voit, et j'imagine que vous, c'est plus ou moins la même chose. Et nous, c'était très commun, par exemple, au jardin d'enfants, que toutes les affaires restent, parce que de toute façon, ils ont le double à la maison. Tu vois, ils vont avoir le week-end.

  • Alban

    Parfois, je ne comprenais pas au Barnaille, pourquoi toutes leurs affaires restaient, mais c'est parce qu'ils sont tout en double.

  • Chloé

    Oui, mais ici, c'est très commun.

  • Lucie

    C'est pas du tout notre approche de vie, la surconsommation et ce genre de choses. Donc on n'a pas 12 dresses pour les enfants. Et du coup, on transporte de la maison aux jardins de soins,

  • Chloé

    aux jardins de soins,

  • Lucie

    à la maison, etc. Beaucoup plus. Et c'est vrai qu'ils en ont deux, voire trois. Ça dépend, il y a des cas extrêmes où tu en as trois parce que des fois, il faut les laver. Et je me dis, en fait, c'est un autre monde. Et donc, du coup, il ne faut pas non plus tomber dans la... paranoïa de te dire ils vont penser que je suis négligente.

  • Chloé

    Complètement.

  • Alban

    Non, mais moi, je suis...

  • Chloé

    Alors, je pense qu'on allait faire deux commentaires complètement différents. J'allais dire moi, maintenant, je suis en paix avec ça et je me pose ma question et là, je suis là, parano.

  • Alban

    Elle a fait sa rentrée dans le jardin d'enfants chez les grands et à la rentrée, s'est posée la question du sac à dos. En fait, j'ai juste regardé les sacs à dos des autres et ils avaient tous le même sac à dos de la même marque. Alors, avec des dessins différents. Quand j'ai demandé à la maîtresse quel sac fallait, elle m'a dit celui-là, il est vraiment très bien parce qu'il s'attache en haut, il s'attache en bas pour partir en rando. Je me suis dit, je sais que je ne suis pas obligée d'acheter ce sac, mais en même temps, je n'ai pas envie que ma fille soit la seule à ne pas avoir ce sac parce que j'aurais l'impression que c'est la seule qui n'a pas le sac qu'il faut, en fait.

  • Lucie

    Ouais, ça c'est un truc, moi je m'en fiche un peu plus. Du moment que ça leur plaît et que c'est pratique. Mais on a eu la même chose là à la rentrée, parce que le sac de première classe...

  • Chloé

    Sac en 10 !

  • Lucie

    Oh là là là là ! Et alors là, pour le coup, il n'y a pas un enfant. Il y a 88 enfants qui sont rentrés dans l'école de ma fille en première classe cette année. Il n'y en a pas un qui n'a pas ce sac.

  • Alban

    On parle du Beckman ?

  • Lucie

    On parle du Beckman.

  • Chloé

    Et en fait... Notre lobby norvégien. Les lobbyons norvégiens, j'imagine. Le lait, le chocolat, le fromage, tout ça.

  • Lucie

    Mais enfin, c'est dingue, tu vois, de dire... Parce qu'il a un coût, ce sac. On est sur un sac extrêmement cher. Et en fait, il est beaucoup trop gros pour elle. Ils sont là, oui, le sac le plus léger du marché. Non, il est lourd. Il est lourd par rapport à elle. Elle ne fait encore que 18 kilos. Son sac, il en fait 4. Je ne sais pas quoi qu'il aille. Le rapport. En fait, elle passe sa journée, pour le coup, dehors. C'est encore différent. Mais le truc étant que moi, je m'en fiche de quel est un sac différent, même si je lui couds un sac ou je ne fais rien, parce que aussi, j'ai grandi de cette manière-là. On a toujours été un peu marginaux, pour le coup, parce que notre niveau de vie ne passait pas exactement dans... le milieu dans lequel j'ai évolué, dans le quartier, etc. Donc ouais, on avait des affaires un peu différentes, on avait pas mal de trucs de récup, je garde mes fringues pendant 10 ans, 15 ans, c'est pas très grave. Et en fait, là, je vois qu'on est sur quelque chose de très différent, et ma fille, elle, ça lui tenait énormément à cœur d'avoir le même sac que les autres. alors que pourtant elle n'a jamais eu ce genre de choses donc oui bien sûr qu'elle a eu son sac et qu'elle a fait sa rentrée avec son sac en étant très fière et moi je pense que pour l'instant Gisèle elle ne se rend pas compte que tout le monde a le même sac enfin quoique peut-être un peu mais moi c'est surtout je me disais ah non ça ne va pas être la seule étrangère qui n'a pas le sac ça se regarde là parce que vous êtes encore alors nous on a quelques étrangers c'est de plus en plus rare plus on s'éloigne mais et... Après, en tout cas, pour la surveillance, la négligence et tout ça, il ne faut pas être inquiet.

  • Alban

    Ils ne vont pas appeler les services sociaux parce qu'elle n'a pas un Beckman à la rentrée.

  • Lucie

    Non. Et moi, j'ai une voisine qui nous a menacé un jour d'appeler les services sociaux. Ouais,

  • Alban

    non, raconte.

  • Lucie

    En fait, on vivait dans un immeuble où, entre chez elle et chez nous, c'était du papier. Vraiment, je pense que c'était qu'un appartement et qu'ils ont séparé. C'est comme quand tu rajoutes une chambre,

  • Alban

    ils ont mis un rideau.

  • Chloé

    Oui, limite.

  • Lucie

    Franchement, c'était assez vieux comme truc et tout. Donc, j'étais enceinte de mon fils et ma fille avait moins de deux ans. Et elle faisait énormément de terreurs nocturnes. Donc, moi, c'est quelque chose que je connaissais. Mon petit frère en avait eu, etc. Pour les gens qui ne connaissent pas les terreurs nocturnes, ça porte trop bien son nom. C'est horrible. C'est un espèce de cauchemar, en fait, terrible. Et tu ne peux pas et tu ne dois pas réveiller l'enfant. Il faut qu'il trouve la solution tout seul à sa situation à ce moment-là. Parce qu'en fait, si tu le réveilles, déjà, c'est un énorme stress pour lui. Et c'est super dur de réveiller un enfant en terreur nocturne. Je ne sais pas si vous avez déjà essayé. C'est impossible. Et en fait, il n'y a rien à faire. Tu ne peux pas te mettre à crier plus fort que ton enfant, secouer ton enfant. Là, on va dans des trucs impensables, mais c'est le milieu de la nuit, c'est toutes les nuits, c'est quatre fois par nuit. La enfant hurle à la mort, c'est compliqué. Et donc, ma fille hurlait extrêmement fort. Mais vraiment, elle hurlait. Des fois, elle n'avait pas de voix le matin. Elle avait vraiment des terrés en nocturne hyper intenses.

  • Chloé

    Ça pouvait durer longtemps ?

  • Lucie

    Ça peut durer assez longtemps, oui. Ça peut durer... Alors, en plus, si elle se réveille, il faut savoir que si si elle est réveillée par un facteur extérieur que ce n'est pas elle qui a solutionné son problème, il se rendorme et il se réveille 20 minutes après dans la même situation. C'est la différence d'un cauchemar. Le cauchemar, tu vas te rendre compte que ça va être dans la réalité. En fait, tu es chez toi, tout va bien, tu peux te rendormir tranquille, etc. Les terrains nocturnes, non. Donc, c'était très difficile. J'ai eu une grossesse vraiment moisie avec mon fils. Donc j'ai été hospitalisée par exemple deux, trois fois. C'était le Covid, je devais être toute seule. Et toute cette espèce d'environnement-là qui était un peu compliqué. Et une nuit, ma voisine, elle a complètement dérapé. Elle nous a dit, je vais appeler les assistantes sociaux, il faut arrêter de battre votre fille, de l'enfermer dans une pièce pendant que vous allez vous isoler avec un casque et jouer à des jeux vidéo dans une autre pièce. Et en fait, elle avait des problèmes. Pour résumer, son mec avait fait ça à sa fille quand elle était petite. Donc en fait, elle a transposé la maltraitance. En fait, elle pensait qu'on enfermait notre fille dans une pièce.

  • Chloé

    C'était ce qu'elle vivait elle ?

  • Lucie

    C'était ce qu'elle avait vécu elle quand sa fille était petite. Donc là, elle avait 10 ans, sa fille déjà. Mais donc du coup, oui, en fait, elle avait dit ça. Et moi, j'étais hospitalisée une nuit. Chris, il ne pouvait pas, donc mon conjoint ne pouvait pas calmer notre fille. C'était un enfer. Déjà, la nuit, elle n'acceptait que moi et encore, c'était difficile. Et en fait, c'était une nuit ultra dure. Moi, j'étais donc hospitalisée. Je lui réponds à une heure et demie du matin à son SMS en lui disant, écoute, je suis hospitalisée. C'est sûrement une terreur nocturne. Je suis désolée, il n'y a rien à faire. Prends ton mal en patient. Et après, elle a dit, il ne faut pas maltraiter les enfants comme ça. Vous, les Français, elle est partie d'un des délires un peu. Oui,

  • Alban

    les clichés. Les français clichés. Ils mettent encore beaucoup de fessées.

  • Lucie

    Voilà.

  • Alban

    Elle est mal tombée en plus, parce que toi, c'est l'opposé, quoi.

  • Lucie

    Et en fait, elle ne savait pas, par exemple. Mais du coup, on l'a un peu calmée. J'ai dit, viens, vas-y, passe à la maison. Viens voir les portes et les verrous. Parce que nous, il faut savoir qu'on avait enlevé toutes les portes. Parce qu'en fait, c'était hyper mal agencé. Donc, on n'avait plus aucune porte à part à la salle de bain. et surtout pas dans les chambres. Et en fait, il y avait... on avait mis des gros rideaux épais à la place.

  • Chloé

    Ah, mais pour jouer aux jeux vidéo toute la nuit.

  • Lucie

    Ah bah ouais. Et son lit, donc ma fille, forcément, elle avait un lit au sol, elle était libre de se déplacer si elle avait besoin, etc. Et donc du coup, on lui avait dit, bah viens, alors dans quel lit elle est enfermée, dans quelle pièce ? Ça avait fait un peu calmer, quoi. Mais elle nous a quand même menacé de nous balancer aux services sociaux. Pour maltraitance.

  • Chloé

    À l'issue de ça, c'est là que vous avez décidé de quand même lui montrer, pour un peu essayer d'apaiser les choses, comment vous avez réagi ?

  • Lucie

    On a déménagé.

  • Chloé

    Et oui, voilà. Non, mais je l'ai dit, il n'y a pas de...

  • Lucie

    Et puis, elle était quand même alcoolique. Merci, les motifs alcooliques. Il y avait quand même d'autres choses derrière. Et aussi, bon. Mais non, non, on a déménagé de toute manière. on allait accueillir un deuxième. et puis c'était un logement quand même assez vituste on était très content de déménager mais ouais on a été menacé et franchement ça fait peur et tu vois de me dire mais attends moi je travaille dans un jardin d'enfants tout le monde me connait je sais que ça n'ira jamais plus loin que ma voisine un peu tarée Ça fait flipper.

  • Alban

    Ça fait flipper, ouais.

  • Lucie

    Ouais, quand même, ouais. Et en fait, c'est aussi un petit moyen de pression sur les enfants, c'est pas très bien, mais tu vois, ce matin, quand ma fille ne voulait pas mettre ses chaussures embourrées, je lui ai dit, mais ma chérie, ils nous écrivent des messages, en fait. Nous, tous les deux semaines, on reçoit un message qui rappelle qu'il faut que tes enfants soient assez couverts, qu'il faut avoir ça, ça, ça, ça en chant. J'ai dit, on ne veut pas de problème, en fait.

  • Alban

    Je voulais revenir sur le fait que ta fille est un peu en avance sur le système norvégien et que d'ailleurs, peut-être qu'une structure plus à la française, entre guillemets, pourrait peut-être mieux lui convenir. Pourquoi vous faites le choix néanmoins de la laisser dans le système norvégien ?

  • Lucie

    Je pense qu'il y a certaines convictions. Je ne suis pas fondamentalement contre l'école française, mais presque, je dois être honnête. Je n'ai pas envie, je n'en ai pas une bonne image.

  • Alban

    Qu'est-ce qui te rebute le plus de l'école française ?

  • Lucie

    La structure, la vision élitiste, en demander trop, les horaires. Ce n'est pas adapté à la vie norvégienne. C'est mon point de vue extérieur parce que je n'y ai jamais travaillé et je connais des gens qui y ont été. Et c'était du coup, maintenant, il y a un petit moment. la réalité je la connais pas pas pour de vrai. Mais de mon point de vue, on a pris une école en France et on l'a posée en Norvège. Et ce n'est pas adapté. Les horaires ne sont pas adaptés, le volume n'est pas adapté, le nombre d'heures de Norvégiens par semaine n'est pas adapté, la culture... Vraiment, il n'y a rien qui est adapté, ne serait-ce qu'un minimum pour que les enfants évoluent dans une culture. commune avec leur environnement. Et ça, pour moi, c'est un problème. Après, on est quand même deux Français, toutes notre famille sont en France, nos enfants parlent le français, c'est vraiment leur langue maternelle. Donc moi, j'ai même pas le besoin que mes enfants parlent le français pour communiquer avec les grands-parents. C'est juste inné et il n'y a aucun souci là-dessus. Donc l'école française, pour nous, c'est pas un choix et c'est pas une option. aussi parce que c'est pas super bien placé par rapport à là où on habite c'est cher de rien ça coûte un coup et en plus il me semble que plus les années passent plus c'est cher et après on a réfléchi, on a quand même on garde en tête la possibilité de l'école internationale parce que en fait du coup oui le niveau est un petit peu plus élevé, c'est un peu plus scolaire, un peu plus académique et en même temps assez à la norvégienne C'est quand même un espèce de...

  • Alban

    Oui, c'est des journées assez courtes.

  • Lucie

    C'est une ville assez sympa. Par contre, c'est hyper loin de là où on habite. Pour le coup, parce que l'école française, autant elle est dans Oslo, l'école internationale, elle est en dehors d'Oslo. Et on habite carrément de l'autre côté. presque en dehors. Ça engagerait un déménagement quand même. C'est ça qui est compliqué aussi. Nous, on sait qu'elle, elle ne sera pas en retard. Donc tant qu'elle continue à avoir les bonnes stimulations, qu'elle continue de s'épanouir et qu'elle ne nous demande pas autre chose, on va la laisser au moins le temps que son frère rentre à l'école. Donc on a encore un an et demi. Et après, quand ce sera le moment que lui rentre à l'école, on verra déjà. On ne sait pas où on sera dans deux ans. On est un peu au jour le jour.

  • Chloé

    Est-ce que vous ne savez pas où vous serez dans Oslo en Norvège ? Ou est-ce que ça vous a...

  • Lucie

    Ah, c'est pas du tout. Non, non, on n'a pas... Là, en ce moment, ça fait dix ans qu'on est là. Nos amis nous manquent, nos familles nous manquent. On a vraiment, nous, une différence de avant et après Covid, d'une certaine manière, dans le sens où on avait l'habitude d'avoir de la visite. Plus du tout. On a des... Enfin, nous, comme nos amis, sommes assez concernés par l'environnement. On a... pas envie de prendre l'avion pour passer un week-end de trois jours avec des copains, malheureusement.

  • Chloé

    C'est un vrai sujet, ça aussi.

  • Lucie

    Il faut respecter ça au maximum. Moi l'avion, j'essaye quand même de prendre un petit peu de recul. Mon conjoint, lui l'avion, il est zéro recul. Au premier degré, ça le rend presque malade qu'on prenne l'avion pour aller fêter Noël, et en plus on passe trois semaines. Donc vraiment, et je le comprends, c'est quelque chose qui pèse dans le quotidien, et ses amis, plus que les mains pour le coup, sont quand même largement du même avis. On a beaucoup moins de visites. Il y a aussi qu'on a tous passé 30 ans. on n'est pas les seuls à avoir des enfants maintenant. Enfin voilà, ça implique une organisation différente. Et du coup, nos familles et nos amis nous manquent assez. On ne s'y retrouve pas beaucoup avec notre cercle en Norvège.

  • Alban

    Vous envisagez peut-être de rentrer en France ?

  • Lucie

    Non, pour le coup, quand même pas. En fait, pour le contexte, il y a mon grand frère qui a habité au Canada pendant des années, qui est retourné s'installer en France il y a quatre semaines. Avec sa famille.

  • Chloé

    Il veut déjà repartir ? Non, je peux les en faire, ça va.

  • Lucie

    Non, non, c'est assez nouveau. Mais du coup, ils sont allés vers Nîmes. Donc, je les ai eus au téléphone. Pour l'anniversaire de ma belle-sœur, il faisait 18 degrés, ils étaient en t-shirt.

  • Alban

    Ça te donnait envie ?

  • Lucie

    Ouais, il faisait encore jour et tout. Quand il était 16h30, même pas, il faisait déjà bien nuit, très froid. Ils étaient tous des esquimaux et tout. Les hivers, là, c'est vrai que ça commence à me peser un peu. Il y a certaines choses qui évoluent, qui sont un peu différentes. Je pense que ne serait-ce que si on changeait de quartier et d'environnement. on aurait une approche assez différente. On aurait peut-être des voisins qui disent bonjour.

  • Chloé

    Oui,

  • Alban

    parce que j'allais dire, pour le coup, nous, tous nos voisins, ils disent bonjour.

  • Chloé

    Et donc, on vit ici en Requehus, qui sont des maisons mitoyennes. Et en fait, autant pour des raisons de budget que d'entretien, que de plein de raisons, on est passé d'appart à maison mitoyenne et ça nous va très bien comme ça pour garder la vie un peu de quartier.

  • Lucie

    Clairement. C'est des choses assez différentes, mais il y a un côté social du Norvégien qui doit organiser une vie sociale. dans tous les boulots, tu as le social comité où du coup, tu vas organiser que le vendredi, après la paye, tout le monde va boire un verre, j'en sais rien, ce genre de choses. Là, hier soir, je suis sortie avec les mamans de la classe de ma fille. Donc voilà, il y a une organisation sociale aussi à ce niveau-là.

  • Chloé

    Spontanée ?

  • Lucie

    Eh ben non, il n'y a rien de spontané ou ponctuel.

  • Chloé

    C'est vrai que le manque de spontanéité, je te rejoins parce que quand on parle de nos expériences passées en Amérique latine, Ben là on est on était en plein dedans. Ah waouh,

  • Lucie

    la chaleur...

  • Chloé

    Et pareil, quand on vient du sud de la France, on va s'y rendre en vacances, et tous les terrasses, la chaleur humaine, les imprévus, ça c'est quelque chose qui nous manque, et c'est pour ça que parfois on se dit, si on avait l'occasion, peut-être repartir deux ans, trois ans dans l'Amérique latine, tout en revenant en Norvège, mais regoutter un peu à ça, peut-être pour ensuite se dire, ah non mais je préfère l'ordre, c'est bon. Ouais,

  • Lucie

    bonne structure. Non, non, mais il y a des choses qui... qui manque un peu, cette légèreté-là, on la trouve Quand il commence à faire des boucles. En fait, c'est vraiment une période très courte.

  • Chloé

    Ça ne dure pas longtemps.

  • Lucie

    Proportionnellement, c'est le même temps. Il fait très jour, il fait très nuit.

  • Alban

    On a l'impression que ça dure moins longtemps.

  • Lucie

    Oui, parce qu'on part en vacances. On est moins là, etc. Mais c'est vrai que ça, c'est... Non, pour le moment, on n'envisage pas de rentrer en France. Mais c'est vrai que, par exemple, sur la scolarisation, ça, c'est difficile. Parce que tu dis, elle est en structure... je me réfère à ma fille. Elle est en structure norvégienne. Par exemple, ils ne veulent pas lui faire sauter une classe. Parce qu'en fait, elle serait avec des enfants qui ont un an... Parce qu'elle est née l'hiver. En Norvège, beaucoup d'enfants, pas tous, mais beaucoup naissent l'été. Donc elle, elle a déjà... quasiment six mois de moins que les autres, même facilement. Elle a ça et en plus, ce serait encore un an de moins, un an et demi de moins que les autres. Tu ne mets pas une enfant de six ans avec des enfants de presque huit ans. Ce n'est pas top. Alors, elle est très mûre et elle a plein de copines en troisième classe. Donc, c'est payé sur ce deux. Elle serait sûrement mieux avec des enfants plus grands. ça se fait pas trop. On fait pas redoubler, on fait pas sauter de classe. C'est pas trop un truc qui se fait. Et en même temps, je me dis, on déménage en France, je sais pas, dans trois ans. Elle va devoir être fatalement dans une classe d'enfants qui ont deux ans de moins. Parce qu'elle sera en retard au problème français. Et ça, c'est trop dur, tu vois, de se dire en tant que parent étranger, oui, toute notre vie est ici, mais toute notre famille et toute notre culture, tout le reste est là-bas. De se dire... Et il est possible, je ne sais pas, ma mère tombe, alors je ne le souhaite pas, mais ma mère tombe malade, je dois m'occuper d'elle, on va passer deux ans en France. C'est non négociable. Et donc, du coup, qu'est-ce qu'on fait avec les enfants ?

  • Alban

    Moi, c'est ce que je dis à Alban, si on doit rentrer en France pour x ou y raison, ou qu'on doit déménager autre part, en fait, dans un autre pays, c'est ça qui me donne envie de la mettre dans un circuit, soit anglais, soit français, pour être sûre que n'importe où on aille, elle m'aidera. puisse continuer sa scolarité sans...

  • Lucie

    Ou avec des enceintes son âge en fait. De me dire qu'elle va être la fille qui arrive de Norvège et qui doit avoir redoublé deux classes parce qu'elle n'a pas le niveau en maths, ça fait trop mal,

  • Alban

    tu vois.

  • Lucie

    Et je me dis, je ne souhaite pas qu'elle à 12 ans elle se retrouve dans une classe de petite 10 ans alors qu'en plus elle s'entend toujours mieux avec les plus grands, etc. Alors je ne sais pas. comment elle va grandir. C'est que des projections. Mais ça, c'est difficile d'avoir ce point d'incertitude et de se dire...

  • Chloé

    C'est super intéressant parce que je trouve que dans un parcours d'expatrié, mais même là, je pense qu'on n'est plus sur le parcours d'immigré. Il va y avoir complètement... Il y a toute une phase où tout semble... Surtout que tu es arrivé très jeune, on est arrivé encore relativement jeune. Tu as les débuts, tout semble facile, tu t'intègres aussi parce que tu as cette communauté très internationale, tu peux toujours l'avoir, et on l'a aujourd'hui, on se sent en termes d'amis, de social, tout se passe bien. Par contre, les enfants, le fait que toi tu sois première génération d'immigrés, qu'est-ce que ça renvoie sur eux, comment ils sont intégrés, leur futur, est-ce que je suis français, est-ce que je suis norvégien, qu'est-ce qu'ils sont eux ? Ce sont des thématiques plus délicates, je trouve, à gérer. C'est là qu'on soulève une autre notion de l'immigration. Est-ce que j'ai encore le choix de repartir ? Est-ce qu'au final, il faut mieux que je continue ma vie ici pour mes enfants ? C'est hyper lourd au final comme thématique, mais très, très intéressant. Et je pense que beaucoup de personnes s'y heurtent au bout de quelques années de vie dans un autre pays.

  • Lucie

    Surtout avec les enfants, en fait. Et justement... Quand tu m'as demandé tout à l'heure si... Mais attends, parce que vous envisagez de retourner vivre en France et tout ça, la question ne se pose même pas parce que les enfants... Oui, mais en même temps, tu dis, si demain ta mère est malade, vous rentrez.

  • Alban

    Ah bah oui, parce qu'en fait, il y a des choses dans la vie qui font que c'est plus important. Il y a des choses qui vont être plus importantes que d'autres. Et ce serait rentrer temporairement. D'accord. Aucun de nous n'adhère à la politique, par exemple, en France. Ce genre de choses, c'est des débats, c'est des idéaux et des choses qui sont assez personnelles. Mais aussi les structures, le système, le reste. De me dire que mes enfants, ils ont la chance de s'épanouir dans le système norvégien. Mais je n'ai pas envie.

  • Lucie

    Donc malgré l'isolement, l'éloignement de la famille, des amis, vous considérez rester en Norvège ?

  • Alban

    Pour l'instant, ce n'est pas un sacrifice en tout cas. Pour le moment, on y trouve largement notre compte. Mon conjoint est extrêmement heureux au travail. Moi, je me sens très libre, assez épanouie aussi. Et on sait qu'avec le boulot qu'il a en France, on serait dans des conditions extrêmement différentes. Les journées sont longues pour les enfants, les journées sont longues pour les parents. Le temps, la qualité que tu as de temps avec ta famille, avec ton bien-être, avec tout ce genre de choses-là. Pour le moment, on retrouve largement notre compte ici, clairement. Mais oui, les interactions sociales, ça commence à être un peu compliqué de mon côté. Comme tu disais, je n'ai pas envie que ma fille soit la seule à avoir un sac à dos différent. Moi, mes enfants, ils ont quatre cousins en France. Je n'ai pas envie que ce soit ceux qui sont nuls parce qu'ils n'ont pas appris ça à l'école. J'essaye de garder ces projections-là pour moi-même.

  • Chloé

    D'accord. Ce sont nos peurs aussi qu'on projette.

  • Alban

    Alors que ma fille n'a pas peur d'être bête. Et elle ne l'est pas. Et moi, je n'ai jamais eu peur d'être bête, en plus. Personnellement, mes parents, ils ont toujours été... quand même assez encourageant. Pourtant, je n'étais pas la plus brillante et le système scolaire français ne me convenait pas beaucoup. Mais je n'ai jamais eu l'impression d'être bête.

  • Lucie

    Non, et puis,

  • Alban

    c'est vraiment...

  • Lucie

    Il faut définir ce que c'est être intelligent, être intelligent dans le système français et être intelligent dans le système norvégien. C'est aussi différent. Et c'est pour ça que, d'un système à l'autre,

  • Alban

    il y a la capacité d'adaptation, à ingérer un nombre d'informations. Là, on est vraiment sur des trucs beaucoup plus profonds. Pour le moment, c'est clairement pas un sacrifice. Et on est très heureux ici. Et on pense aussi beaucoup à l'avenir. Et à se dire que, bah oui, je sais pas, moi, des choses un peu bêtes, mais la montée des eaux, les famines, les sécheresses...

  • Chloé

    Le réchauffement climatique.

  • Alban

    Ouais, ça fait extrêmement peur, en tout cas quand t'as des enfants à élever. Enfin, tu vois, t'as mis des enfants au monde, et tu te dis bah eux, ils ont pas choisi d'être là. Nous, on a choisi qu'ils soient là. Et notre responsabilité, c'est de faire en sorte qu'ils soient les plus heureux. et avertis possibles pour leur avenir. On a aussi envie que nos enfants grandissent dans la réalité du monde qui les attend. Après, je vais passer ma journée de stressée maintenant, mais c'est des énormes questions qui se posent et qu'on ne se pose pas avant un certain âge et avant d'avoir des enfants. c'est un peu difficile mais après il y a d'autres générations, mon petit frère a 10 ans de moins et lui il est une génération dans son groupe et dans d'autres gens, de sa génération c'est pas d'enfant c'est une réalité,

  • Chloé

    l'expatrié peut-être ou l'immigré peut-être très isolé en tant que parent

  • Alban

    Ça dépend des cultures. Il y a des cultures plus communautaires. On a des amis indiens.

  • Chloé

    Ils sont expatriés,

  • Alban

    mais ils sont cousins. Ils sont tous en famille. Ils vont au temple, ils ont leurs fêtes, les cultes. Tu vois, nous, on n'a pas ça, je trouve. Et en plus, mon copain et moi, quand on est arrivé ici, on a fui le milieu français. On ne voulait pas faire tous les trucs de franco-français parce qu'on voulait s'imprégner de la culture, on voulait parler norvégien. en plus il y a dix ans, on n'était pas sur le même profil d'ex On n'était pas sur le même profil d'immigrés, j'ai envie de dire. On était vraiment sur le profil d'expat. Genre, je suis ingénieur en tuyau, je travaille dans le pétrole, et on me propose un très gros salaire, je vais habiter à Frogner, et jamais apprendre le norvégien. Et ça, c'est quelque chose qui ne nous correspondait pas du tout, parce qu'en même temps, on vient d'études de culture scandinave. En plus, on connaît quand même les fondements de la société, on a appris la littérature, la géographie, la culture, tout ce genre de choses-là. et c'est trop dommage d'habiter dans ce monde. dans un endroit et se limiter à vivre les yeux fermés.

  • Lucie

    Et tout ça, est-ce que ça vous a aidé à vous faire des amis norvégiens ? Et un cercle norvégien ?

  • Alban

    Oui et non. Si je parle pour mon conjoint, oui. Et je pense qu'en fait, ça ne relève pas que de ça. Et si je parle pour moi, non. J'ai mes collègues avec qui je m'entends très bien. Ce n'est pas des amis, la famille, tu vois. Ce n'est pas des amis comme j'ai pu avoir en France. Ma meilleure amie ici est française. Et les gens avec qui je me suis sentie le plus proche, ça n'a jamais été des Norvégiens. Jamais. vraiment jamais. J'ai eu une amie norvégienne qui était cool à la fac, mais non, je ne sais pas. En fait, on est trop fondamentalement différents sur d'autres trucs. Ah, si là, j'ai une amie norvégienne, on est très proches, en fait. Dis-moi pour toi si elle ne m'entendra pas, mais elle ne se considère pas norvégienne. Voilà, je veux dire ça. Et la plupart de ses potes, c'est des étrangers. Donc, elle comprend, c'est sa culture, etc. Mais une autre amie ou collègue, On a 15 ans d'écart à l'époque. 15 ans plus vieille que moi, mais elle a habité au Portugal, au Brésil, elle est mariée avec un Portugais, elle a vécu un petit peu en France, elle est assez portée sur l'étranger, et en fait, ouais, on s'entend bien. Pour le coup, j'ai tout essayé. Parce que tu vois, je me disais, je travaille au jardin d'enfants, on a tous un intérêt commun, c'est les enfants, la pédagogie, ce genre de choses. Ça n'a pas pris. Pourtant, vraiment, comme je te disais, tu crées des liens un peu étranges en pyjama, assis par terre. Tu vois ce que je veux dire ? On partage des choses un peu intimes au final et en fait, non. J'ai essayé des clubs de sport différents. J'ai même essayé un sport d'équipe, par exemple. Non. J'ai... jamais trouvé de lien ou de trucs comme ça. J'ai étudié, j'ai étudié même à des parcours norvégiens, où tu t'inscris en tant qu'étudiant norvégien, grosso modo. Toujours pas. Donc je pense qu'il y a quelque chose qui fait que ça prend pas. Et ça vient certainement de moi aussi. Je ne peux pas juste dire le monde entier ne veut pas de moi.

  • Lucie

    Tu disais d'ailleurs que ton mari, ton conjoint...

  • Alban

    Mais lui, ouais, trop. Lui, il attire les Norvégiens. C'est un aimant. Pourtant, moi, physiquement, j'ai plus l'air d'être norvégienne que lui. Et en plus, nous, on a ce truc de... Oh, t'es français ! Les Norvégiens, c'est une petite fascination pour quand même la France. Ouais, ça va. Mais t'es français ! 2.

  • Chloé

    qu'est-ce que tu fais là ?

  • Alban

    C'est dingue, tu viens de Paris, tu vois. Ouais, ouais, ce truc de qu'est-ce que tu fais là et tout. Mais en même temps, je veux dire, on est des étrangers, on est des immigrés première classe, quoi. Tu vois, enfin, je veux dire, je pense qu'il y a quand même, dans leur vision, en tout cas, il y a une espèce de hiérarchie. Et on est tout en haut de la hiérarchie de l'immigré. Mais en tout cas, lui, non, pas du tout. Il s'est toujours méga bien intégré avec des Norvégiens. Même à notre mariage, il avait des potes norvégiens et tout. Pourquoi est-ce ce que je n'ai pas réussi à faire.

  • Chloé

    Qu'est-ce que tu conseillerais à quelqu'un qui arrive en Norvège ? Parce qu'on a abordé plein de thèmes. Est-ce que tu as un conseil à partager ?

  • Alban

    Savoir pourquoi tu es là. Si tu arrives parce que tu es dans l'industrie du pétrole et que tu as un super boulot qui t'est proposé avec des super avantages, un logement, tout ça. tu sais pourquoi t'es là, tu sais pourquoi t'arrives et après pour s'intégrer ben non tu t'intégreras à ton propre cercle en fait, après vraiment en termes d'intégration tu veux dire ben tu vois moi j'ai tout essayé et j'ai pas réussi je veux dire ça fait 10 ans que j'échoue à l'intégration donc maintenant mais t'en es pas malheureuse pour autant non non non ça va parce que aussi j'ai ma famille et puis non je suis pas malheureuse, je suis pas intégrée mais je suis pas désintégrée non plus et puis il y a ce truc de, moi ça me dérange pas de rencontrer des nouvelles personnes. Alors j'ai des amitiés très anciennes et très stables, mais ça me dérange pas de rencontrer des nouvelles personnes, des nouveaux groupes. Donc du coup, je peux papillonner avec des gens sans vraiment avoir des relations vraiment plus profondes. Par mon métier maintenant, un petit peu plus. Je suis respectée dans ce que je fais. Je le fais à peu près bien. Et du coup, tu vois, les relations que je noue avec mes clientes maintenant, c'est une sorte de relation sociale. Alors oui, on reste c'est professionnel. Il y en a quelques-unes qui se transforment en amis, et ça c'est exceptionnel.

  • Chloé

    Qu'est-ce qui est difficile pour toi en Norvège ?

  • Alban

    Rien. Je ne dirais pas que tout est facile, mais difficile, pas grand-chose. Juste le bas, le manque, l'éloignement, le manque. Mais encore une fois, par exemple, si mon mari n'était pas français, je ne sais pas, je pense que ce serait dur.

  • Chloé

    Oui,

  • Alban

    je comprends. Je pense que là, je serais vraiment dans un... Tu vois, j'ai besoin d'avoir des références à Astérix Oblix, Mission Clémopâtre, et quelqu'un rigole en face de moi, tu vois. et si mon mari était norvégien je suis pas sûre que ça l'aurait fait à long terme. Par exemple, si mes enfants parlaient pas français, ou très mal, ou très peu, ça, ce serait dur pour moi. J'ai une amie qui est ici. Elle est arrivée étudiante il y a 14 ans, je crois, un truc comme ça. Elle est mariée avec une norvégienne. Elles ont deux enfants qui sont dans le même jardin d'enfants que les miens. Et c'est vraiment une amie que j'ai depuis le jour où je suis arrivée. On s'est rencontrées très rapidement. Elle, elle n'a pas... presque plus aucun contact avec sa famille en France. Ses enfants, ils me regardent comme un extraterrestre quand je leur parle français. Parce qu'en fait, même elle, au final, tu as un moment où tu te prends au jeu et où c'est plus facile de parler norvégien, parce qu'elle parle norvégien et avec sa compagne aussi. Et elle ne passe pas par l'anglais, elle ne parle que norvégien. Et du coup, avec les enfants, tu as cette facilité aussi de... De toute façon, ils te répondent tout le temps en norvégien.

  • Chloé

    Tu vois ?

  • Alban

    et moi elle je lui pose la question et en fait elle me dit que elle ça va très bien c'est pas du tout un problème pour elle donc je pense que c'est quand même extrêmement personnel et à contrarier est-ce qu'il y a quelque chose que tu adores,

  • Lucie

    que tu as adopté de la Norvège et dont tu pourrais pas te passer juste le cadre alors je déteste la campagne

  • Alban

    Une super parisienne. Montagne, mer, ville, ça fonctionne. Mais campagne, rase, c'est mort. Mais pour autant, j'adore la nature, j'adore l'eau. Et en fait, on est entouré d'eau. Et juste... Pour le coup, c'est une condition. On a déménagé sept fois en neuf ans. Ah oui,

  • Lucie

    quand même !

  • Alban

    Nous, on fait beaucoup de vélo et tu vas te baigner à vélo. Genre, tu prends ton vélo, tu pédales 20 minutes et t'es à la plage. Alors, pas toute l'année, tu vois. Toute l'année, tu peux, mais voilà, je conseille pas. Et en même temps, tu peux prendre un bus et skier.

  • Chloé

    Merci beaucoup Chloé d'être venue nous rencontrer aujourd'hui. C'était génial d'apprendre à connaître une partie de ton parcours qu'on ne connaissait pas encore.

  • Alban

    C'est vrai qu'on se connaît plus professionnellement.

  • Chloé

    Et ce qui est trop bien, c'est qu'on va avoir l'occasion d'en parler une prochaine fois, de revenir sur l'expérience plus doula.

  • Lucie

    Merci d'être venue jusqu'à nous. Et on te recevra pour aborder d'autres thèmes, car tu as plus d'une corde à ton arc. Donc trop hâte de partager tout ça une prochaine fois. Et en attendant, on vous dit à bientôt chez nous.

  • Chloé

    Sous les aurores.

  • Lucie

    Si cet épisode vous a plu, pensez à nous laisser une note et un avis sur votre application d'écoute préférée.

  • Chloé

    Ou un commentaire sur YouTube, ça nous aide énormément à faire grandir le podcast.

  • Lucie

    Merci et à très vite pour le prochain épisode.

Description

Dans cet épisode de Sous les Aurores, Lucie et Alban reçoivent Chloé, expatriée à Oslo depuis 2014, ancienne institutrice en jardin d’enfants et aujourd’hui doula et formatrice. Elle nous plonge dans l’univers des structures de petite enfance norvégiennes, où :

  • Les tout-petits sont encouragés à s’habiller et s’organiser seuls,

  • Les temps de jeu libre sont pensés comme moteur d’apprentissage,

  • Les repas et les siestes deviennent de véritables moments-calmes,

  • Le barnevern (protection de l’enfance) intervient de façon préventive et proactive (trop?) pour garantir le bien-être des enfants.


De ses débuts en tant qu’étudiante à ses remplacements en jardins d’enfants communaux, Chloé partage ses plus belles découvertes et les défis culturels qu’elle a dû relever. Un éclairage unique pour tous les parents, professionnels de l’enfance et curieux-se de la pédagogie scandinave.


Prêt-es à embarquer pour un voyage au cœur des jardins d’enfants norvégiens, entre autonomie, jeu libre et protection de l’enfance ? Installez-vous confortablement et rejoignez-nous Sous les Aurores ! ✨


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Transcription

  • Lucie

    Salut, c'est Lucie.

  • Alban

    Salut, c'est Alban.

  • Lucie

    Trentenaire et parent de deux petites filles.

  • Alban

    Bienvenue dans Sous les Aurores.

  • Lucie

    Le premier podcast réalisé par un couple de Français en Norvège.

  • Alban

    Sous les Aurores, c'est le podcast haut en couleur qui vous emmène vivre toutes les nuances de l'expatriation et de l'immigration en Norvège et bien au-delà.

  • Lucie

    Que vous soyez déjà expatrié, immigré, que vous rêviez de le devenir ou que vous soyez simplement curieux de découvrir d'autres façons de vivre, ce podcast est fait pour vous.

  • Alban

    Alors, mettez-vous à l'aise, servez-vous une bonne tasse de thé ou un verre de vin. et rejoignez-nous sous les aurores. Au menu, discussion sincère,

  • Lucie

    moment de rire et d'émotion,

  • Alban

    et surtout, beaucoup de belles découvertes.

  • Lucie

    Alors, bienvenue chez nous sur un nouvel épisode de Sous les aurores.

  • Alban

    Bonjour à tous et bienvenue dans un nouvel épisode de Sous les aurores. Aujourd'hui, une nouvelle invitée qui n'est une fois de plus pas complètement inconnu, car elle nous a suivi pour un événement important de la vie qui dure en général neuf mois, quand tout se passerait bien.

  • Lucie

    Alors d'abord, on va commencer par une petite présentation. Est-ce que tu pourrais nous dire comment tu t'appelles ? Depuis combien de temps tu vis en Norvège ? Dans quel domaine travailles-tu ? Et enfin, un culture-choc que tu as remarqué quand tu es arrivé en Norvège ou que tu continues de vivre au quotidien ?

  • Chloé

    Je m'appelle Chloé, ça fait dix ans que j'habite en Norvège maintenant, donc août 2014. Je suis arrivée comme étudiante en linguistique et pédagogie. J'ai travaillé comme institutrice, ensuite j'ai travaillé comme doula, je le fais encore aujourd'hui. Et je suis aussi masseuse, spécialisée du coup sur la santé de la femme, la santé hormonale, la fertilité, la grossesse, etc. Et aussi, j'ai une spécialisation en massage visage. Et maintenant, je suis en train d'ouvrir un centre de formation spécialisé. Donc, je suis retournée du côté enseignement. Maintenant, j'enseigne le massage. Pour le choc des cultures, ça ne m'a pas marquée en arrivant. Mais c'est quelque chose qui commence à vraiment être un peu plus compliqué pour moi. Donc, comme je suis arrivée en tant qu'étudiante, il y avait aussi un mélange de... d'autres étrangers beaucoup. Je parlais déjà un petit peu norvégien. Donc, ce n'était pas vraiment marqué à l'université. Mais maintenant, en tant que vrai adulte, passé 30 ans, c'est le manque de proximité avec les autres humains. Ça fait un an qu'on a déménagé. J'ai dix voisins de palier. Il n'y en a pas un qui dit bonjour. Ah oui.

  • Alban

    Oui. C'est vrai que c'est vraiment quelque chose qu'on retrouve et tu n'es certainement pas la seule à vivre ça.

  • Lucie

    Oui, mais c'est marrant parce que tu vois, il y a une invitée hier. qui nous a parlé de ce culture-choc, mais qui nous a dit qu'elle, elle adorait parce qu'elle prend ça comme « je garde mon espace, chacun garde son espace et on respecte l'espace de l'autre » . Donc c'est marrant de voir...

  • Alban

    Quel effet ça peut avoir sur nous ?

  • Chloé

    Oui, c'est vraiment très différent. Je comprends le marqueur culturel, mais pour moi... qui est toujours grandi en communauté proche des autres, même à Paris ou Paris proche, où quand même, de toute façon, tout le monde se dit bonjour dans la rue, même si tu ne les connais pas. Là, ça commence à être un petit peu...

  • Lucie

    J'avoue, les voisins, quand même, c'est...

  • Chloé

    Les voisins, c'est chaud. On a les enfants qui vont à l'école ensemble.

  • Lucie

    En plus, ils ont des enfants, c'est vrai que je trouve ça bizarre.

  • Alban

    Bon, un peu malaise, quoi.

  • Chloé

    Un peu malaise, oui. Mais comme il y a le marqueur culturel que je... connais, je ne le prends pas comme une forme de racisme, de respect ou ce genre de choses. Je sais que c'est vraiment juste une bulle individualiste et personnelle, mais ce n'est pas...

  • Alban

    Ça ne rend pas la chose plus facile parfois, mais complètement.

  • Lucie

    Tu peux nous dire un peu comment tu es arrivé en Norvège, pourquoi, qu'est-ce qui t'a amené ici ?

  • Chloé

    Le fruit du hasard. du coup, vous le savez peut-être pas mais j'ai fait une licence en lettres, langues culture et civilisation étrangères en Scandinave et en spécialisation norvégien donc j'avais des cours de norvégien à la fac à Paris trop drôle pourquoi c'est la question à la base de... À la base, tu vois, tu as 18 ans, ton bac, et tu te dis, qu'est-ce que je vais faire ? Donc moi, je voulais faire une école d'art. J'étais vraiment sûre que c'est ce que je voulais faire. Sauf que je n'avais pas préparé mon dossier. C'est sur admission, quand tu veux faire une école d'art à Paris, c'est... C'est un peu tendu, ils ne prennent pas n'importe qui. Donc j'étais un peu en retard sur le dossier d'admission, et puis toutes les personnes avec qui j'avais travaillé m'avaient dit « De toute manière, les écoles d'art, il faut être mûres, donc tu ne rentres pas directement après le bac. Il faut une petite expérience de la vie, il faut des choses. » Et mon frère, lui, m'a mis la pression en me disant « Écoute, moi j'ai redoublé pour aller où je voulais, donc on a un an d'écart, donc on était tous les deux au bac à cette année-là. » Et il m'a dit maintenant que je peux y aller et qu'on a le droit d'être boursier parce que justement, on est tous les deux étudiants. Tu ne vas pas rien faire. Tu t'inscris quelque part. Je m'en fiche, mais tu fais quelque chose. Donc, du coup, j'ai regardé le dossier admission post-bac, le FAC de l'ADP et j'ai vu à l'LCE norvégien. Je me suis dit, pourquoi pas ?

  • Alban

    Donc, à la base, tu t'es dit ça limite pour un ou deux ans jusqu'à rebasculer.

  • Chloé

    Tu t'es dit, en fait, si ça me plaît. tant mieux, si ça me plaît pas c'est pas grave et en fait c'était 18h de cours par semaine, enfin je m'engageais vraiment pas sur un truc énorme, je sortais d'une L spécialisation arts plastiques j'allais pas m'engager en géopolitique donc du coup j'avais jamais même le premier jour de la rentrée, même pendant l'été et tout, j'avais pas eu la curiosité d'écouter du norvégien ou de regarder la géographie, enfin voilà de base, pour eux Je savais qu'Oslo, c'était en Norvège.

  • Alban

    C'est déjà pas mal.

  • Chloé

    Je savais que c'était le dernier pays avant l'Angleterre. Mais du coup, j'ai vraiment été les mains dans les poches. Donc on était un petit groupe, on était 11 je crois sur ma promo. Il y avait donc mon compagnon, on s'est rencontrés à la rentrée. Lui aussi, il était le seul à avoir aucune relation avec la Norvège, vraiment de près ou de loin. Donc voilà, après la licence, on a fait un Erasmus ici et on est restés.

  • Alban

    Ah mais génial ! Trop bien ! Et ça a été directement sur Oslo l'Erasmus ?

  • Chloé

    Ouais, moi j'ai fait un essai raté. à ma deuxième année de licence à Christian Sand. Il y avait un accord Erasmus ouvert, mais en fait, c'était vraiment... Je pense qu'il a été fermé depuis, d'ailleurs, on en avait pas mal repéré. Depuis ton passage ? Le coordinateur, ouais. En fait, ils sont pas du tout... Donc quand tu fais un Erasmus, tu dois valider des crédits qui sont en rapport avec tes études. Et moi, j'avais accès à aucun cours de norvégien à Christian Sand, parce que, en fait, c'est... Les accords, c'était surtout pour les étudiants en commerce ou d'autres choses. Donc, j'avais accès quasiment qu'à des cours en anglais et pas du tout au cursus des Norvégiens eux-mêmes. Et puis, de toute façon, je n'avais pas le niveau. Je pouvais à peine me présenter. Donc, ça a été raté. Après, l'année d'après, mon copain, lui, a fait l'Erasmus à Oslo. Et ensuite, un an et demi après, on est revenu. Donc, moi, j'ai fait mon Erasmus pour le M1 ici.

  • Lucie

    Et du coup, c'est directement après l'Erasmus que vous vous êtes installée ?

  • Chloé

    Oui, en fait, pour moi, c'était vraiment la porte de sortie ou d'entrée d'une certaine manière, parce que je connaissais un peu le système norvégien. Et je savais qu'obtenir un percheur de numéros, donc le numéro d'identité, c'était super facile quand on était étudiante. Avoir un logement, être boursière, s'inclure dans la vie norvégienne à mon niveau, c'était vraiment la meilleure façon.

  • Alban

    Est-ce que tu penses que c'est toujours vrai aujourd'hui qu'en tant qu'étudiant, ça rend les démarches plus faciles peut-être ?

  • Chloé

    Oui, clairement. Surtout que moi j'avais un Erasmus d'un an, donc j'avais vraiment tout... En tant qu'Européen en tout cas, c'est très différent quand on est en dehors de l'Europe ou de l'Union Européenne. Pour moi, c'est vraiment la porte d'entrée la plus simple. Après, vous, je sais que c'est des cas différents, par exemple, parce que vous êtes arrivé avec du boulot.

  • Alban

    Oui, voilà.

  • Chloé

    Donc forcément, il y a l'entreprise qui fait la démarche, vous avez un soutien, il y a tout le monde qui vous explique, etc. Mais quand on est un petit peu plus à l'arrache ou qu'on n'a pas complètement fini nos études, s'inscrire à la fac, pour moi, c'est vraiment le meilleur truc à faire. Même à n'importe quel âge, en vrai, tu as... 30 ans et tu te dis, moi, je vais découvrir la Norvège. Tu te prends six mois, n'importe quel programme à la fac. Et du coup,

  • Lucie

    ça facilite les démarches.

  • Chloé

    Oui, t'es étudiant.

  • Lucie

    C'est génial. C'est un bon conseil. Au-delà des démarches facilitées, qu'est-ce qui vous a donné envie de rester à Oslo et en Norvège ?

  • Chloé

    La facilité. Tout, en fait. La vie, le cadre. Donc, nous, on vient tous les deux de banlieues parisiennes. Je ne sais pas, marcher dans les parcs. Enfin, juste le fait d'avoir le droit de marcher sur la pelouse d'un parc, c'était fou.

  • Lucie

    C'est exactement ce que je dis à Alban en étant parisienne, parce que lui, il avait peut-être plus accès aux pelouses dans les parcs.

  • Alban

    La ferme d'Himède.

  • Chloé

    L'une des premières fois que je suis venue, c'était les 200 ans de la Constitution pour la fête nationale. C'était un énorme truc. Et il y avait... des gens qui faisaient des barbecues portatifs sur la pelouse du parc du château. Et je me suis dit, waouh, la liberté !

  • Alban

    Excellent de se souvenir, parce qu'avant de vivre à Oslo, quand j'étais en Erasmus, moi en Finlande, on avait fait avec des amis un long week-end à Oslo, et on s'était retrouvés à Ekeberg, un grand, grand parc très, très connu d'Oslo. Et pareil, tout le monde sur la pelouse, avec ses barbecues à usage unique. Et j'avais trouvé ça incroyable.

  • Chloé

    Oui, c'est dingue. Les poubelles à recycler ce type de barbecue et tout, c'était vraiment... Pour moi, c'était fou. Et la proximité avec la nature, se déplacer partout à pied ou à vélo. Après, il faut avoir des jambes, quoi. C'est un peu vallonné. Mais ça, l'organisation autour de la vie, de manière générale. Je n'avais pas encore de famille à ce moment-là, du tout. mais de me rendre compte du fait que... que le travail, ce n'est pas la vie. Tu ne vis pas pour travailler du tout, en fait. C'est un accompagnement, il y a un espèce d'équilibre pour la plupart des gens qui est quand même extrêmement confortable. Et ça, c'est très inspirant. Moi, j'ai vu mes parents galérer, vraiment, depuis que je suis toute petite. Et du coup, ils nous ont toujours encouragés à faire un boulot qu'on aime, toujours. On leur a tout fait. Moi, je leur ai dit, je veux être tatoueuse. psychologue en prison...

  • Alban

    Juste à l'un de ces temps-là ? Non,

  • Chloé

    j'avais vraiment des objectifs professionnels un peu étranges, et à chaque fois ils étaient à fond quoi, mais vas-y, fais ça ! Parce que pour eux, il n'y avait pas d'épanouissement du tout dans leur travail, et c'est tout l'inverse qu'ils nous souhaitaient. Donc j'ai découvert qu'ici c'était quand même le quotidien de beaucoup de gens, et je me suis dit, c'est dingue !

  • Lucie

    Et à contrario, est-ce que tu as eu des difficultés au départ ou des choses qui ont été difficiles à adopter ?

  • Chloé

    Non. Non ? Pour moi, déjà, je parlais un petit peu norvégien. Pendant mon Erasmus, j'ai fait un semestre entier où j'avais 8 heures, 10 heures, 12 heures de norvégien avancé par semaine. Ouf ! Ah ouais, j'étais en master.

  • Alban

    Bah

  • Chloé

    à un moment. Donc, j'ai eu des cours de dialecte, des cours de prononciation. C'était assez passionnant. Et puis après, je suis rentrée dans le lecteur programme, c'est pour devenir prof. Donc, pas juste institutrice, mais avec des choses assez spécifiques et tout ça. Pour moi, la fac, ça a été... Après, pendant que j'étais étudiante en France, j'ai travaillé à l'Eau-Roi-Merlin pendant toutes mes années d'études. Donc comme je parlais un petit peu norvégien et que j'avais une expérience professionnelle, j'ai travaillé à Maxbo. J'ai été embauchée comme ça avec une poignée de main et un rendez-vous. Ça a été hyper facile. J'étais boursière, j'avais un logement étudiant, j'avais un nouveau mec. Enfin le fameux, mais on n'était pas encore ensemble. Ça s'est fait dans le même temps. Donc, nous, on découvrait plein de choses. En plus, on vivait une idylle.

  • Alban

    Vous alliez au même rythme.

  • Chloé

    À l'étranger, un autre rythme. C'était l'été, il fait jour tout le temps. Les gens sont hyper détendus. Il y a la rivière qui traverse Oslo. Non, je ne sais pas.

  • Lucie

    Les planètes étaient alignées. Ah ouais,

  • Chloé

    aucune difficulté.

  • Alban

    Génial.

  • Lucie

    Même quand l'hiver est arrivé, ou l'automne,

  • Chloé

    je dirais. Non, trop bien, j'adore la neige, j'adore l'hiver c'était un automne pas trop moisi genre une semaine de pluie et puis après ça s'est vite transformé Vraiment tout a été extrêmement facile. La liaison Paris-Oslo se fait très facilement. On avait des tarifs étudiants. Je prenais l'avion, je faisais l'aller-retour pour 70 euros, je crois, quelque chose comme ça. Donc quand tu as cours du mardi au jeudi, tu as quand même des longs week-ends. Après on ne roulait pas sur l'or, donc on ne se permettait pas de partir en week-end n'importe où, etc. Mais vraiment, c'était facile. Après, il y avait juste des produits d'hygiène. les oeufs blancs, trop bizarre ça faut s'habituer, c'est vrai s'habituer,

  • Alban

    c'est trop surprenant,

  • Chloé

    ouais, au début je voulais rien cuisiner avec des oeufs voilà, le lait alors ils ont fait du progrès mais il y a 10 ans, le lait tournait très vite donc ce genre de petits détails au début, voilà, il faut s'adapter un petit peu, mais pour même retrouver les choses que je cherchais, j'avais déjà le vocabulaire moins, donc j'avais vraiment pas de difficultés majeures.

  • Alban

    Mais ça c'est intéressant, tu parles un peu de faire ces courses. Lucie et moi, on a eu des expériences dans plusieurs pays et c'est vraiment un gros culture shock à chaque fois de savoir comment tu vas soit essayer de recuisiner un peu tes plats de base. Ça demande vraiment une traduction compliquée. Les agencements dans les rayons peuvent être différents, les noms, la présentation produit. Ou alors, si tu te sens d'essayer la culture locale, comment consommer local aussi et cuisiner ? Donc, ça fait partie de tout l'apprentissage quand tu arrives dans un pays. Oui,

  • Chloé

    et puis c'est très dur ici parce que la plupart des produits sont importés. On est sur des terres non cultivables deux tiers de l'année minimum. En même temps, encore une fois, ça a beaucoup évolué. Mais vraiment, il y a dix ans, je pense que quand je suis arrivée, c'était le début du changement, de diversifier le rayon yaourt, par exemple. Parce que moi, il y avait vraiment vanille, fruits des bois, nature, et c'est tout. Pas de textures différentes, pas de marques. Vraiment, c'était le monopole sur tous les produits. Et là, on trouve des danettes, je ne sais pas.

  • Lucie

    Et encore, moi, je trouve que c'est quand même réduit, toujours le choix. comparé à quand je vais en France, dans les rayons et tout. Mais du coup, j'imagine qu'il y a dix ans, c'était pire.

  • Chloé

    Ah ouais, ouais. Enfin, même l'autre marque, la Kumel, l'autre marque de produits laitiers, était un peu naissante, tu vois, sur les rayons. Tu ne les trouvais pas dans tous les distributeurs. C'était vraiment... En même temps, ça donne une simplicité, une facilité. Tu n'as pas le choix, en fait. Si tu veux du sucre, c'est celui-là. Si tu veux un yaourt, c'est celui-là. Tu fais avec.

  • Alban

    Et c'est vrai que c'est un peu à l'image de certains... certains aspects de la culture norvégienne. T'as un peu moins le choix, il n'y a plus cette notion de rentrer dans le moule. Après, il faut voir si tu es confortable avec ça ou pas, mais je trouve ça intéressant de le soulever parce que, comme tu le dis, on va faire mes courses avec moins de choix. Alors, pas du tout de choix pas bons, mais les choix qu'on trouve en France, je me dis, c'est n'importe quoi aussi.

  • Chloé

    Oui, la charge mentale de faire les courses en France, c'est fou. Quand on y va, on a un énorme Leclerc à côté de chez ma mère. Tu peux passer vraiment 1h30 à... à faire tes courses.

  • Alban

    C'est le cas maintenant, on évite, notamment en vacances ou quoi, les hypermarchés, c'est vraiment devenu la phobie, parce qu'on préfère avoir moins de choix, mais faire ça plus rapidement.

  • Chloé

    Ah ouais, clairement, je comprends trop les gens qui font leurs courses sur Internet en France.

  • Alban

    Ouais, voilà, c'est continuer.

  • Chloé

    Là, au moins, c'est vite fait, quoi. Mais c'est vrai que nous, on a habité surtout en centre-ville, il n'y a pas vraiment des caddies, c'est que des surfaces qui sont quand même assez réduites. Les gens font leurs courses plus ou moins au jour le jour, pour aujourd'hui, demain, ils vont à la boutique hyper régulièrement. Mais il n'y a jamais la queue.

  • Alban

    C'est rapide, voilà.

  • Chloé

    C'est rapide et tout ça. J'ai pas pris cette habitude-là. Je fais mes courses une fois par semaine.

  • Lucie

    Non, mais c'est très vrai ce que tu dis, parce que moi, quand je travaillais chez Mondelez, et qu'on vendait du chocolat notamment, forcément, on étudiait beaucoup les habitudes des consommateurs en Norvège. La caractéristique principale, c'est que ce sont des petits supermarchés et les Norvégiens vont faire leurs courses pratiquement tous les jours pour le soir même, tous les deux jours. Si tu cherches des petites courses,

  • Chloé

    surtout pour Oslo après.

  • Alban

    Voilà, c'est ça. Tu sors un peu, mais tu trouves un peu plus hyper. Il y a des vraiment gros hypermarchés comme Ops, je crois.

  • Chloé

    Ouais, Ops,

  • Alban

    ouais. Voilà, ça c'est vraiment énorme. On y est allé une fois, c'est toujours un malentendu. Mais sinon, c'est vrai que les supermarchés en dehors d'Oslo, c'est un peu plus style supermarché, mais je trouve que ça reste toujours humain. Il n'y a pas trop d'hyper en général.

  • Chloé

    Non, pas vraiment, mais en même temps, il n'y a pas... Comme il n'y a pas la diversité, les rayons ont moins besoin d'être grands.

  • Lucie

    Donc, tu es arrivée étudiante, tu faisais un job à côté étudiant. Et quand est-ce que tu as trouvé ton premier vrai job, entre guillemets ?

  • Chloé

    Moi, j'ai fait longtemps. Job, études. Ouais. Parce que je me suis inscrite à plein de types d'études différentes. Je restais longtemps étudiante, en fait. D'accord. Donc, quand j'ai compris que j'avais vraiment envie de travailler dans l'enseignement, j'ai arrêté Max Boo et j'ai trouvé un job de remplaçante en jardin d'enfants. Et en fait, ça s'appelle « til kalingsvikaar » . Donc, en fait, ils t'appellent quand ils ont besoin. Donc, tu as un espèce de contrat zéro. et je... tu es dispo, tu n'es pas dispo. À savoir que dans ce genre de structure, il y a forcément un adulte malade à l'année. Il manque tout le temps du personnel, parce qu'ils ont un nombre d'adultes à respecter par enfant. C'est un milieu où il y a des enfants de 1 à 6 ans, où les bactéries, les virus prolifèrent. Et donc, tu as forcément besoin de... De personnel en plus, en permanence. Donc, à partir du moment où, dans une structure, tu as compris les routines, tu connais le prénom des enfants, ton travail, il est bon, tu es apprécié, tu es quasiment sûr de travailler tous les jours.

  • Lucie

    D'accord, donc même si tu es remplaçante, au final, tu travailles souvent.

  • Alban

    Mais du coup, tu étais souvent dans le même jardin d'enfants ?

  • Chloé

    Ah ouais, j'ai bossé plusieurs années. J'ai eu trois expériences différentes en jardin d'enfants. un qui était une très mauvaise expérience qui a duré un mois et demi maximum. Et du coup, je suis restée trois ans et trois ans et demi.

  • Alban

    Donc après, les deux autres expériences se sont super bien passées.

  • Chloé

    C'était incroyable. J'ai adoré. Le premier dans lequel j'ai travaillé, c'était un communal qui avait beaucoup de classes. Trois étages, deux bâtiments. Vraiment un...

  • Alban

    Un gros jardin d'enfants.

  • Chloé

    Un gros. Donc eux, clairement, ils avaient tout le temps besoin de monde. Et moi, je suis tombée sur une classe où il y avait une fille en arrêt long, mais qui prolongeait par deux semaines, trois semaines. Moi, j'ai travaillé vraiment trois ans là-bas, je ne l'ai jamais vue. Et donc, j'ai récupéré ses fringues, ses chaussures. C'était pratique. Mais du coup, c'était vraiment une bonne expérience. Et puis moi, je découvrais vraiment la vision de comment... Les Norvégiens, ou la Norvège en tout cas, considèrent l'enfant à bord de la pédagogie, la petite enfance, même jusqu'à plus grand, parce qu'on a des enfants jusqu'à 6 ans sur ces structures. C'est un autre monde. Et en fait, en même temps, c'est quelque chose qui me parlait beaucoup parce que c'est le monde dans lequel moi j'ai grandi, avec ma mère qui avait vraiment ce type d'éducation-là, avec beaucoup de respect, par exemple. L'autorité dans ma famille n'existe pas. Enfin, l'autorité autoritaire. Bien sûr, après, il y a une hiérarchie. Il y a des choses qui sont imposées, etc. Bon, on ne revient pas, bien sûr, mais moi, j'ai vraiment grandi avec beaucoup de respect, à être considérée comme une personne, même si j'étais un enfant. Ce qui n'était pas le cas de toutes mes copines, par exemple. Et c'est vraiment ce que j'ai retrouvé ici. Et j'étais hyper heureuse. Je me sentais très, très à l'aise et j'apprenais énormément. Et je voyais tous ces enfants avec une... C'est une jeunesse dorée quand même. On sait que la Scandinavie est un peu avant-gardiste aussi sur ce genre de choses-là. Alors je ne connais pas les conditions à l'école de tous les enfants du monde, dans tous les pays, dans toutes les cultures, mais on est quand même extrêmement privilégiés. Et c'est aussi une des raisons qui nous poussent, nous, à... à laisser grandir nos enfants là et dans des structures aussi norvégiennes, sans se tourner sur des choses plus alternatives.

  • Lucie

    Et qu'est-ce qui t'a tout de suite sauté aux yeux dans les différences avec un jardin d'enfants français ?

  • Chloé

    Tout.

  • Alban

    La liste est longue.

  • Chloé

    La liste est extrêmement longue. En plus, ma mère travaille en petite enfance.

  • Alban

    D'accord.

  • Chloé

    Elle gère des crèches à l'émer, aux mères adjointes. Elle s'occupe de tout ce qui est la petite enfance. On a eu énormément de discussions sur les différences entre les crèches. Elle faisait surtout crèches et transitions maternelles. Et tout. L'organisation, la considération aussi, le nombre d'adultes par enfant. Quand c'est des enfants de 1 à 3 ans, on est sur 3 enfants pour 1 adulte. Déjà, rien que ça, c'est fou. C'est incroyable. Et puis après, ils sont un peu plus grands, etc. Et puis on peut monter jusqu'à 18 enfants maximum, si le groupe est assez âgé, donc entre 4 ans et demi et 6 ans. Là, tu vas avoir 18 enfants pour 3 personnes. Ce qui reste quand même assez luxueux, parce qu'après, on est loin des institutrices qui ont 25 enfants, une atsem. Ça fait une sacrée différence. Et en fait, chaque enfant apprend à attendre. à s'organiser, à évoluer avec d'autres enfants, à ne pas voler les jouets, ce genre de choses-là. Et en même temps, nous, on a le temps de leur montrer, on a le temps de leur expliquer. On passe beaucoup de temps dehors aussi, et on a le temps de les faire s'habiller. Ils apprennent à le faire tout seuls, et c'est OK. On peut passer une heure dans la garde-robe pour qu'ils mettent tous leurs habits, ou même juste une chaussure, et c'est OK. Maintenant,

  • Alban

    on comprend mieux.

  • Lucie

    C'est pour ça qu'elle n'a pas autant de temps le matin à s'habiller.

  • Alban

    Le soir, en ce moment, on est dans une phase, on va la chercher. C'est parti pour trois quarts d'heure. Je monte sur le banc, je saute et regarde moi. Et puis, je ne m'habille pas et je reste à l'école. C'est trop bien. Mais voilà, en fait, il y a vraiment le temps. C'est intéressant parce que nous, on n'a pas tous les codes non plus. En tant que parent français d'une petite fille qui est dans un système norvégien.

  • Chloé

    Le temps, c'est une énorme différence. Il n'y a pas de... Les repas sont timés. Les repas sont timés et ça c'est un problème que nous on rencontre vraiment au quotidien. Petite anecdote, ma fille a 6 ans, elle est à l'école maintenant, l'équivalent du CP. Ils ont 30 minutes pour manger, ils vont chercher leur boîte, ils ramènent leur boîte, ils mangent leur boîte, ils ferment leur boîte, ils se lavent les mains et il s'est passé 30 minutes. Elle n'a pas le temps de manger. Et même quand elle était, ça s'appelle le born-out à gueule, même quand elle y était, souvent on avait... Alors moi, elle était dans le même... dans lequel moi j'ai travaillé, mais bon après quand elle a commencé, j'ai arrêté et en fait, souvent j'avais des retours de mes anciens collègues qui me disaient, mais ta fille c'est une heure qu'il lui faut à table, qu'est-ce qui se passe ? Elle s'assoit et puis elle commence à discuter avec tout le monde, et je dis ouais mais ça...

  • Alban

    Le pire c'est qu'elle nous a sorti un petit verre de vin la dernière fois !

  • Chloé

    Non, mais on a toujours eu ce problème-là, parce que pour nous, le repas, c'est vraiment un moment social. Et on passe du temps en famille, vraiment. Et puis moi, tout le monde me dit, mais attends, quoi ? Tes enfants passent une heure à table ? Mais c'est possible ! Quand ? Bah oui, mes enfants passent une heure à table. On est assis ensemble, on discute, on se raconte nos journées, on se fait des blagues, on parle de demain, etc. Donc du coup, ma fille, elle n'associe pas du tout le moment du repas à « il faut manger pour donner de l'énergie à ton corps, pour survivre le reste de ta journée » . Donc là, c'est un peu compliqué.

  • Lucie

    D'ailleurs, c'est pareil pour les adultes au bureau. Ils mangent tous très rapidement, en 30 minutes, voire parfois devant les ordi si c'est des boulots en entreprise. Et c'est vrai que nous, en tant que Français, on est là, ben non, venez, on va se poser, on va discuter en même temps.

  • Chloé

    Et ça, pour nous aussi, c'était un choc pour moi. Quand on parlait des chocs de culture, alors Max Bouge commençait à 6h du matin, à 10h30, le téléphone sonnait, Chloé va en pause. Comment ça en pause ? Goûter ?

  • Alban

    Va en pause, petit déj. Ouais.

  • Chloé

    Pause-déjeuner ? Waouh ! Alors, j'avais 30 minutes, clairement, je prenais un petit déjeuner. Ça, pour moi, c'était trop bizarre. Sur les jardins d'enfants, étrange aussi. Parce qu'en fait, tout le monde est très... Enfin, t'imagines, tu travailles en pyjama, plus ou moins. T'as le temps tout le temps, t'es en chaussettes, tu joues au sol avec les enfants. Il n'y a pas non plus vraiment de hiérarchie, même au sein de la classe. Donc, il y a une structure. Il y a des pédagogues qui ont... des études spécifiques. Après, il y a des espèces d'ATSEM qui ont des études spécifiques, mais moins hautes. Et puis après, il y a les remplaçants, les assistants, etc. Mais bon, tout le monde est quand même largement au même niveau face aux enfants, en tout cas. Et l'ambiance est hyper chaleureuse, disons. Et avec beaucoup de proximité, aussi du contact, on caline beaucoup les enfants, etc. Et tu vas dans la salle repas, il y a un silence de plomb. Chacun mange son truc. Et ouais, mais en fait, alors quand tu travailles avec les petits, donc jusqu'à 3 ans, il y a la sieste. Donc t'as cette espèce de moment de calme dans ta journée. Mais quand t'es avec les 3-6 ans, qui ne s'arrêtent jamais, qui parlent tout le temps, qui se chamaillent, fille-garçon, garçon-garçon, fille-fille, joue au coiffeur avec moi, oui mon épée elle s'est cassée, fais-moi un avion, n'importe tout. Tout et n'importe quoi, on a énormément de jeux libres. Tu comprends en fait que, bon déjà, c'est des Norvégiens, ils ont besoin de leur bulle. Pas tout le monde, j'ai pas envie de mettre beaucoup trop d'étiquettes, mais comme on disait au début. Et ensuite, tu comprends que t'as besoin de ces 30 minutes de silence pendant ta journée.

  • Alban

    C'est comme un temps calme, en fait, le repas pour eux.

  • Chloé

    C'est ton propre temps calme. Et ça,

  • Lucie

    c'était toi forcément avec tes collègues à ce moment-là,

  • Chloé

    en tout cas pendant la pause repas. J'avais. Trop bizarre.

  • Lucie

    Et comment tu as été traitée en tant qu'employée ? Sur les structures communales, il y a un espèce de standard. À savoir qu'il y a une énorme majeure différence entre la France et la Norvège. Quand tu travailles dans le public, au niveau de l'enseignement en tout cas, tu es beaucoup mieux payée et tu as beaucoup plus d'avantages. Ah ok !

  • Alban

    Donc là, en Norvège, dans le public norvégien, mieux payée et plus d'avantages que dans le privé norvégien ?

  • Lucie

    Oui, dans l'enseignement en tout cas. Wow, ok. Clairement. Pour exemple... du coup on travaille 7h30 continue, donc c'est le forfait horaire norvégien notre pause déjeuner est comprise et payée, parce qu'on est obligé de rester sur la structure vu qu'il y a un nombre d'enfants par adulte, en cas d'incendie ou n'importe, donc ça c'est comme ça normalement partout et normalement sur toutes les structures que ce soit public ou privé, mais après il y a des différences, par exemple quand tu fais une heure supplémentaire donc une fois par mois il y a des réunions, ce genre de trucs, tu vas rester deux heures de plus où ils ont besoin d'un extra, une collègue malade, n'importe. Tu fais une heure supplémentaire. Déjà, elle était payée à 300%, je crois. C'était vraiment un truc énorme. Donc, elle est payée. Et en plus de ça, tu l'as en récup.

  • Alban

    Ah wow !

  • Lucie

    Tu peux mettre les deux. Et elle est payée et tu l'as en récup. Donc, ça, dans le privé, ce n'est pas comme ça.

  • Alban

    À toutes nos entreprises, si vous nous entendez, on est OK pour avoir les mêmes conditions. Je plaisante, mais en général, c'est vrai que selon le contrat qu'on a, il n'y a pas vraiment la notion de cadre, pas cadre, mais un peu indirectement. Et en général, les heures sup, c'est l'un ou l'autre. Soit on se les fait payer plus, soit on les récupère. Dans les grandes entreprises, en général, c'est ça le système.

  • Lucie

    Il y a beaucoup d'accords de branches. Donc vous, vous êtes tous les deux dans les branches ingénieurs. Donc vous êtes effectivement sur ce système-là. Après, ce n'est pas partout pareil. C'est un peu différent, mais oui. Après, en Norvège, par expérience, et donc du coup, pas sur le même secteur que le vôtre, mon conjoint est ingénieur aussi, et en fait, on remarque qu'on nous encourage vraiment à ne pas faire d'heures supérieures. Vraiment, ce n'est pas du tout bien vu. Un employé qui va faire plus d'heures, un patron qui va te dire, « Non, en fait, tu n'as pas fini ton dossier, tu restes. » Ce genre de choses-là, c'est très mal vu.

  • Chloé

    Et sur ce point, dernièrement, j'ai été représentante des employés dans mon entreprise. Et effectivement, quand il y avait des heures sup, les employés devaient justifier pourquoi ils avaient fait ces heures sup et devaient rendre des comptes au RH et à moi pour être sûre que c'était fait dans de bonnes conditions et pour de bonnes raisons. Oui,

  • Lucie

    et en fait, ça, ça fait partie vraiment du... C'est quelque chose d'intégrant. pour déjà le bien-être au travail. Et ensuite, comme je disais tout à l'heure, le boulot, ton métier, c'est un accompagnement de ta vie. Tu ne travailles pas pour ton métier. Tu ne vis pas pour ton boulot, en fait. Et donc, du coup, ça fait aussi partie du contrat social et du contrat de confiance et du contrat de travail à ne pas encourager les personnes à faire des heures sup. Parce que ça développe aussi plus facilement des environnements de travail un peu toxiques. Après, je n'ai pas énormément d'exemples, mais mes deux parents sont fonctionnaires, donc c'est légèrement différent. J'ai un ami en France qui a exactement le même statut que mon conjoint. Et lui, s'il part du boulot avant 18h30, c'est hyper mal vu.

  • Chloé

    Bien sûr.

  • Lucie

    Alors qu'il fait son travail, il s'organise, il prend des pauses déjeuner plus courtes. Enfin voilà, lui, il n'a rien à se reprocher, mais il est tout le temps montré du doigt. Il a de la pression, etc. Parce qu'il part trop tôt du boulot.

  • Alban

    Oui, rien que le volume horaire, le présentéisme, tout ça, c'est vraiment encore un sujet. Oui,

  • Lucie

    bien sûr. Et le fait que ça n'en soit pas un ici, c'est incroyable. De dire, je vais chercher les enfants, 15h c'est terminé. Par exemple, dans une entreprise dans laquelle mon conjoint a travaillé, il était interdit de programmer une réunion qui devait se finir après 15h.

  • Alban

    Ah mais oui.

  • Lucie

    Si tu as une réunion, c'est 13h max. Oui,

  • Alban

    j'adore. Il faudrait que tu me donnes le nom. Non, mais c'est vrai.

  • Lucie

    En tout cas, le vendredi, il y a des trucs religieux où tu ne touches pas au vendredi.

  • Alban

    Tout le monde part en hutte, en cabine, Ausha.

  • Lucie

    Quand tu es adulte et que tu as une vie de famille et tout ça, tu vas chercher tes enfants, c'est normal.

  • Chloé

    Comment font d'ailleurs les employés des Barnagues, des jardins d'enfants, parce que pour les chercher leurs propres enfants ?

  • Lucie

    Alors, on se repose sur le conjoint. Non, en fait, on a des... je ne sais pas comment ça s'appelle en français donc en fait soit tu as le premier service, le service du milieu donc quand tu es sur un roulement à 3 et le service du soir, donc du coup soit tu commences à 9h30 et tu finis à 17h grosso modo, soit tu commences à 7h ou 7h30 selon les structures et tu finis à 14h30 ou 15h et donc du coup dans ta semaine c'est quand même assez changeant parce que ça c'est tous les jours une fois premier, deuxième, troisième premier, deuxième, troisième, etc Moi j'ai travaillé dans des... des classes où après on était quatre. Même organisation. Et du coup, on essaye de s'arranger pour avoir... Déjà, souvent, on travaille proche de là où on habite. Après, je sais qu'il y a aussi quand même... Alors pour nous, non. Pour les personnes qui travaillent en physique tout le temps, je ne sais pas moi, les menuisiers, les caissiers, dans la vente directe, etc. Oui, c'est une autre organisation, mais je sais qu'il y a ce système aussi de roulement. Et puis après, par exemple, la maîtresse de ma fille, elle n'a pas de roulement. C'est 8h tous les matins. Et par contre, c'est elle qui va chercher son petit à l'école. Alors l'école en Norvège, soyez prêts quand ça va vous arriver. C'est 8h15, 13h15. Après, il y a le périscolaire, etc. Mais donc, du coup, elle, en tant que maîtresse, elle a forcément de l'administratif, préparer des choses, etc. Mais elle finit rarement après 15 heures. Donc, c'est systématiquement son conjoint qui dépose leur fils au jardin d'enfants. Et c'est moi, elle, qui récupère une organisation. Ça se trouve.

  • Alban

    J'adore que tu donnes les clés du fonctionnement du jardin d'enfants. Parce qu'en fait, il y a vraiment cette... Même si on n'a jamais eu d'enfants en France, On garde malgré tout des codes et des repères français, peut-être nos propres expériences, ou la famille, des cousins, ou que sais-je. Et ça nous aide, je trouve, à comprendre un peu. Parfois, on peut se poser des questions sans aller chercher à avoir les réponses. Sur, on a la crèche, enfin, Jordan enfant, on va voir des... Tiens, ce matin, c'est cette personne. Tiens, ce soir, c'est une autre personne. Mais c'est intéressant de voir quel est le derrière, le roulement, faire de la place aussi pour leur propre vie.

  • Chloé

    Bien sûr, et c'est important. Quand je vois, moi, je peux comparer, parce que ma sœur a travaillé en crèche à Paris.

  • Lucie

    Wow.

  • Chloé

    et en fait c'est pas les mêmes horaires elle commençait très souvent tôt et elle terminait très souvent tard parfois un peu moins tard mais quoi qu'il arrive c'était tard et un nombre d'enfants et pour le coup ils ont pas de remplaçant quand quelqu'un est absent parce qu'il y a des autorisations pour le coup en Norvège aussi si tu veux travailler

  • Lucie

    en jardin d'enfants ou avec des enfants, quoi qu'il arrive, même si c'est pour un remplacement, tu dois donner un extrait de casier judiciaire. Il y a des espèces de boîtes d'intérim spécialisées pour les remplaçants en jardin d'enfants et en temps périscolaire à l'école. Donc, eux s'occupent d'enquêter plus ou moins sur les personnes qu'ils vont envoyer, etc. Moi, je ne suis jamais passée par là. Je suis toujours passée directement par les structures. Mais après, tu as un espèce d'entretien. En Norvège, on est très... en tout cas professionnellement parlant, c'est très humain. Donc, ils vont regarder un peu ton CV, mais ils sont surtout intéressés à t'entendre parler, savoir d'où tu viens, surtout pour travailler avec les enfants.

  • Chloé

    On va vérifier que tu n'es pas un psychopathe caché.

  • Lucie

    J'ai fait un entretien, par exemple, d'embauche à l'école française d'Oslo. Et ils m'ont dit... Ils avaient un problème sur mon rapport à l'autorité, par exemple. Ils m'ont dit, en fait, ce n'est pas question que tu travailles avec nous. Enfin, je les intéressais beaucoup parce que j'ai un FLE, donc ça c'est très intéressant. Et en même temps, moi je parlais beaucoup. Qu'est-ce que c'est un FLE ? Un FLE, pardon, c'est des études spécifiques, ça s'appelle Français Langue Étrangère. Et en fait, normalement, si tu enseignes en structure francophone ou le français aux étrangers, ou ce genre de choses, rapport France-étranger, il faut normalement... avoir des études en FLE. Moi, j'ai une mention FLE sur ma licence, par exemple. Je fais un bicursus.

  • Alban

    Ce qui fait que normalement, tu es encore plus apte, on va dire, à apprendre le français à quelqu'un qui ne parle pas à la base.

  • Lucie

    Oui, d'une certaine manière. Grosse. Par exemple, il y a des personnes qui étudient le FLE en France de manière très poussée et qui vont travailler avec des entreprises et donner des cours de français aux personnes étrangères. Ça, ça se fait aussi. Mais du coup, quand même, la mention FLE est très appréciée sur les structures francophones à l'étranger, etc. Et vraiment, les questions qu'on m'a posées à l'entretien, déjà, il y avait une commission, ils étaient 11. Je me suis dit, franchement, ils exagèrent. Tu entrais dans cette salle et tu n'avais pas juste une personne ou deux, comme j'ai toujours eu. C'était vraiment, il y avait 11 personnes. Il y avait même des représentants de parents d'élèves, la comptable.

  • Alban

    Par exemple, Elon Musk.

  • Lucie

    Toute une délégation avec tous ces gens-là ont eu devant toi. Je me suis dit, moi, je vais en prendre un entretien. Je vais m'envocher les mains dans les poches. Et donc, les questions étaient vraiment très orientées par rapport au fait que, parce que j'avais l'air jeune, j'ai une voix fluette, ce genre de choses-là, ils disaient, tu vas te faire manger avec des gamins de 11 ans. Tu ne te rends pas compte ? J'ai toujours travaillé avec des enfants, je n'ai jamais eu de problème. Et en fait, il y avait cette espèce de choc culturel quand même. À la sortie de l'entretien, je me suis dit... De quoi qu'il arrive, je n'ai pas envie de travailler là. Le fait de me retrouver dans un système franco-français scolaire avec ce genre de structure brute et élitiste sur beaucoup de choses, après avoir connu la souplesse en Norvège, et notamment avec les enfants qui sont si jeunes. C'était un peu « waouh » , les entretiens d'embauche en Norvège. en tout cas de mon expérience extrêmement humain. Tu dis oui, alors et du coup, nous on aimerait bien expliquer ça aux enfants, comment tu ferais, ce genre de choses-là. Il y a un enfant qui joue avec l'eau, il en fout partout, il est trempé, c'est trempé partout. Les autres, ils arrivent, ils glissent. Qu'est-ce que tu fais ? Des mises en situation.

  • Chloé

    Pour voir comment tu vas,

  • Lucie

    Julienne. Qu'est-ce que tu fais ? La première réponse, c'est tu prends le temps. On va aller ensemble chercher du papier, essuyer, fermer le robinet. Ensemble, on va aller chercher du change, changer les chaussettes des autres qu'on glissait.

  • Alban

    On dit souvent qu'il n'y a pas vraiment d'apprentissage au jardin d'enfants norvégien. Ça peut être un des reproches de ceux qui aiment l'éducation plus française. Toi, est-ce que tu dirais que, notamment via l'exemple que tu donnes d'entretien, est-ce que tu trouves que la première des choses qu'on apprend, c'est qu'est-ce qu'on aime faire et l'autonomie, par exemple ?

  • Lucie

    Je dirais que c'est faux pour les personnes qui pensent qu'il n'y a pas d'apprentissage en jardin d'enfants. Déjà, les enfants sont quand même au jardin d'enfants jusqu'à 6 ans. C'est une énorme période de leur vie. C'est très personnel, mais j'aime beaucoup qu'on mélange les âges. Souvent, c'est 1 à 3 ans et 3 à 6 ans. Ça autonomise les plus petits qui ont envie de faire comme les grands et ça sensibilise les grands à aider les plus petits. À aussi prendre le temps, à être plus respectueux aussi sur le fait que lui, il ne sait pas. Parce que du coup, personne n'est montré du doigt parce qu'il est dans l'incapacité de tartiner son pain tout seul. Ou de mettre ses chaussures tout seul. En place de le montrer, tu le dois, et de dire, il n'a pas appris à faire ses lacets, il ne sait pas mettre ses chaussures, etc. On va en fait encourager les plus grands, ou les autres, à aider ceux plus petits. Et en fait, ça part aussi du principe qu'on a le temps, parce que encore une fois, je pense qu'il n'y a pas vraiment de comparaison réalistique possible, ou réaliste, pardon, avec la France. Si tu vas dehors et que tu as 15 minutes, parce que c'est les 15 minutes de récré, et que déjà, tu as tes chaussures sur toi tout le temps. un peu différent. Il faut que tu mettes tes chaussures. Tu n'as pas le temps de passer 15 minutes à mettre tes chaussures, ou à essayer de le faire tout seul, ou à essayer de faire en sorte qu'il y ait un autre enfant qui va l'aider. Parce que nous, on est des adultes. C'est qu'à tard, un enfant de 4 ans qui aide un enfant de 2 ans à mettre des chaussures.

  • Alban

    Il faut avoir du temps dans soi, c'est clair.

  • Lucie

    Oui, du temps et de la patience. Il ne faut pas du tout être dans l'urgence de « attends, c'est bon, c'est bon, hop là, c'est fait, c'est fait. Tiens, je vais te remonter ton zip, on va mettre le bonnet, les moufles sont à l'envers, les chaussures... Les enfants qui ont des chaussures à l'envers, c'est OK, ils l'ont fait tout seuls, ils sont trop fiers, on leur laisse leurs chaussures à l'envers. Ça, c'est vraiment... Moi, je pense que ça donne aussi beaucoup plus de respect et de patience aux autres envers les autres. Ça inculque un peu plus de tolérance, ne serait-ce que juste dans la structure, dans le fait que personne n'est montré du doigt parce qu'il ne peut pas. Et à l'inverse, personne n'est montré du doigt parce qu'il peut. Et en fait, on ne va pas spécifiquement, en tout cas à cet âge-là, encourager les enfants qui sont bons ou naturellement bons. à exceller. On a quand même un espèce de truc de groupe. Et là, nous, on le voit beaucoup avec ma fille qui est sur le CP. Elle est plus petite que les autres. Elle est née en fin d'année. Elle a beaucoup d'enfants de sa classe qui ont bientôt 7 ans et elle en a encore 5. C'est la plus petite. Elle a toujours été la plus petite. Mais elle est très responsable. Elle est très posée. Elle adore les trucs intellectuels. Elle lit, elle écrit. Et en fait, elle a fait ça toute seule. Parce que, bien sûr, ils ne l'ont pas fait au jardin d'enfants. Et bien sûr, ils ne le font pas au CP.

  • Chloé

    Ils ne le font pas au CP ?

  • Lucie

    Non, on apprend à l'alphabet, tranquille.

  • Chloé

    Mais à partir de quand ils apprennent à écrire et lire ?

  • Lucie

    Ah là là ! C'est 8-9 ans. En fait, le truc, c'est qu'on va favoriser les périodes sensibles. On va favoriser l'autonomie. Donc là, par exemple, dans sa classe, il y a beaucoup d'enfants qui ne savent ni lire ni écrire. Ce qu'ils demandaient, c'est qu'ils sachent écrire leur prénom. Normalement, tu te dis qu'un enfant de 6 ans, 6 ans et demi, il sait écrire son prénom. A priori, ça va. Et donc, du coup, c'est vraiment ça qui est demandé. C'est le mot qui nous a été passé avant la rentrée. Reconnaître ses affaires, être autonome sur s'habiller, se déshabiller, aller aux toilettes. et savoir écrire son prénom. Pour le moment, elle ne s'ennuie pas. Mais nous, on a beaucoup de gens qui nous disent « Attention, qu'elle ne s'ennuie pas. » Parce que, en fait, c'est assez l'inverse. En France, on va avoir le groupe de tête qui va être encouragé à être tiré vers le haut. Le groupe du milieu qui va être encouragé à suivre ce groupe de tête. Et puis, les moins bons qui vont malheureusement rester dans le fond la plupart du temps parce qu'ils ne sont pas assez bons. Ils ne suivent pas le rythme, ils ont des difficultés scolaires, ce genre de choses-là. Si tu ne rentres pas dans le moule du mieux, tu vas être un petit peu laissé sur le côté, grosso modo. En tout cas, moi, c'est ce que j'ai vécu. J'imagine qu'on a à peu près le même âge. Vous êtes sur l'expérience scolaire. En Norvège, ça va être l'inverse. Il faut laisser personne derrière. Donc, quitte à baisser le niveau général du groupe moyen, parce que tu as toujours deux, trois têtes, trois, quatre qui se perdent en route, et une dizaine, quinzaine d'enfants qui sont quand même... plus ou moins homogène. Et en fait, là, quitte à baisser le niveau général pour que ceux qui sont derrière ne soient pas derrière. En fait, les Norvégiens me disent « Quoi ? Ta fille lit et écrit ? » Ils sont vraiment là-dedans. Mais non, c'est oui des Français, mais aussi beaucoup d'étrangers. Nous, on a dans la même classe de ma fille, il y a un petit garçon qui est moitié sud-africain, moitié... un pays de l'Est, je ne sais plus lequel, et ses parents font en sorte qu'il ait des cours privés. En plus, lui, il a des leçons en plus, etc. Parce qu'il ne croit pas au système norvégien. Alors que moi, qui ai travaillé avec des Norvégiens toute ma vie, au final, ça fait dix ans que je travaille avec des Norvégiens, en tant qu'adulte, je n'ai pas la sensation qu'ils sont plus bêtes que moi. Qui ai été à l'école avec des bons résultats.

  • Chloé

    Parce que moi, c'est marrant qu'on parle de ce point. Quand j'ai visité un jardin d'enfants Pour notre fille, j'avais posé la question quels devaient être les acquis pour après passer au CP. Et elle m'avait répondu ce que tu disais. Elle s'est posée le problème. Il faut qu'elle sache écrire son prénom. J'avais dit c'est tout. Elle me dit oui. Je dis ok. Et donc j'étais revenue un peu inquiète. J'en fais part à Alban et je lui dis franchement, je ne sais pas. Est-ce qu'il ne faudrait pas plutôt la mettre à l'école française et tout ? Et puis Alban m'avait dit... Mais Lucie, tous les Norvégiens que tu connais, ils savent très bien lire et écrire. Donc, ce n'est pas l'importance qu'ils sachent le faire à 3 ans ou à 8 ans.

  • Lucie

    Une petite différence sur la structure de la langue aussi. Parce que, par exemple, on prononce... plutôt mon approche linguiste qui va intervenir, c'est-à-dire que le français, c'est une langue quand même intrinsèquement plus complexe à apprendre que le norvégien, dans le sens où la moitié des lettres, des mots tombent. Je ne les prononce pas. Et on le voit chez les enfants francophones qui apprennent le norvégien. Ma fille n'a jamais mélangé le français et le norvégien. Jamais. Alors que mon fils, lui, c'est un parfait mélange. J'utilise un mot ici, là. Il s'en fout complètement. Mais alors, elle, jamais. Par contre, elle était... Parce qu'en fait, les langues, c'est des maths. Quand même. Donc, elle, elle était quand même hyper perturbée, même à deux ans, sur le fait que... pluriel en français ne se prononce pas. Et ça, c'était vraiment difficile pour elle. Et du coup, en fait, elle la collait, le pluriel norvégien au mot français. Et j'imagine que vous allez le remarquer assez rapidement.

  • Alban

    Je pense que cet épisode est déjà passé, mais il me semble, maintenant que tu le dis, que ça nous est arrivé.

  • Lucie

    Donc,

  • Chloé

    elle mettait une structure norvégienne, mais avec des mots français.

  • Alban

    Aussi.

  • Lucie

    Tu finis une phrase avec.

  • Alban

    Typique.

  • Lucie

    même moi je le fais je me rends compte des fois que je me dis mais oula je ne parle plus bien français mais en fait ça tu vois il y a un truc où le cerveau il a quand même besoin d'avoir des repères etc et en fait le français c'est une langue qui est extrêmement réglée donc je comprends qu'on justifie d'apprendre vraiment le côté systématique de la langue un peu plus tôt Oui.

  • Chloé

    Pour le français.

  • Lucie

    Parce que c'est quand même beaucoup moins phonétique. Le norvégien, qui est une langue qui reste extrêmement simple à apprendre et à maîtriser. Donc voilà, il y a des mots bizarres, il faut apprendre le truc à plus.

  • Alban

    Il y a quand même des cas qu'on prononce « che » . Je dis ça, je dis rien, mais bon,

  • Lucie

    quand même ! Ça dépend de l'environnement linguistique. Mais en fait, oui, il y a deux, trois prononciations un peu étranges, mais c'est une langue qui est beaucoup plus sensible. Oui, genre tu sens plus la langue. Et puis, en fait, tu es un Norvégien, tu grandis avec tes parents qui ont un dialecte d'ici, un dialecte de là. Parce qu'en même temps, on est plus libre en Norvège. La langue est extrêmement plus libre en France, où on est encore extrêmement académique, super strict sur... Tu envoies un mail administratif.

  • Alban

    Oui, il y a les formules. Je vous prie de bien agréer. Mais ça, ça...

  • Lucie

    Voilà, c'est ce genre de choses où tu vas devoir t'en tenir quand même à des formules, à un vocabulaire soutenu, ou même une prononciation, parce que tu es en entretien d'embauche ou parce que tu es au café avec un copain. C'est quand même différent. On ne retrouve pas beaucoup ça en Norvège. Et puis, chacun est libre de sa propre langue.

  • Alban

    Ta fille, elle a l'air, on va dire, en avance sur le système norvégien. Est-ce que tu l'as aidée avec ça ? Est-ce que c'est elle vraiment qui s'est intéressée ? Et du coup, tu l'as soutenue, on va dire, plus qu'encouragée ? Comment tu vois ça ?

  • Lucie

    C'est que elle. C'est que elle. Oui, parce que moi, j'ai été profondément trempée dans la société norvégienne, en tout cas au niveau de la pédagogie, de la petite enfance, des apprentissages et du reste. On essaye bien sûr de respecter ces périodes sensibles. Voilà si on voit qu'elle est. extrêmement intéressée par ça. On va essayer de lui trouver deux, trois trucs qui ont rapport, etc. Par exemple, elle a appris à sauter à pieds joints, à deux ans passés. Elle a regardé les autres sauter pendant des mois et des mois. Elle n'aimait pas aller jouer dehors. Elle n'est pas norvégienne sur ça, par exemple. Et en fait, elle a développé des capacités moteurs. Donc, on a la motricité fine et les capacités moteurs. Donc, elle a... motricité fine, ouais, elle attrapait des cheveux par terre en petites pinces comme ça à 4 mois mais bon, voilà, marcher, sauter, grimper faire tout ce genre de motricité un petit peu plus avancée avec le corps c'est venu super tard par contre intellectuellement, ça Ausha donc elle est très différente sur ça elle adore faire les trucs calmes posés donc moi j'ai pas la sensation qu'elle soit en avance et ça je suis très apaisée avec ça et je suis pas trop angoissée. Donc oui, forcément, elle, par exemple, elle est le profil type d'une enfant brillante qui réussirait à son âge, dans le système français.

  • Alban

    Le bon profil, on va dire. L'inverse.

  • Lucie

    Lui, il est comme un poisson dans l'eau sur le système norvégien. Pour rien au monde. On essaierait de l'enlever de là. Mais elle, on s'est posé la question. Elle déteste. Elle adore l'école, bien sûr. Mais il y a trop de temps libre, à son goût.

  • Alban

    De temps libre dans l'école norvégienne ? Oui,

  • Lucie

    parce qu'il faut savoir qu'ils sont à l'école de 8h15 à 15h15. Mais ils ont une pause déjeuner de 30 minutes. Ils ne rentrent dans l'école qu'à partir de 9h et quelques. Donc la première heure, ils sont dehors. Et ils ont aussi deux pauses entre. et pendant la classe, ils peuvent aussi avoir du temps libre où ils vont sur l'activité. Donc en fait, souvent dans les classes, c'est organisé par, alors ça je ne sais pas le dire en français, par espaces dédiés à un type de choses. Donc par exemple, sur les jardins d'enfants, tu vas avoir l'espace construction, où tu vas trouver des Legos, des Kaplas, ce genre de choses. Tu vas avoir l'espace livre et temps calme. Tu vas avoir l'espace jeu de rôle, où du coup tu as des poupées, une cuisine, ce genre de choses. En fait, les espaces, ils sont quand même construits et séparés de manière à ce que l'enfant... puisse s'intéresser et se construire avec ce qui lui l'intéresse. Et en fait, c'est là que l'apprentissage se fait par le jeu. Et c'est énorme. Et aussi, les enfants nous donnent énormément d'informations par rapport à ce qui se passe chez eux. Nous, on est formés aussi, en tout cas en jardin d'enfants, à jouer énormément et encourager les enfants à faire les jeux de rôle de la maison pour détecter s'il y a, par exemple, des enfants qui sont dans des foyers violents ou il y a certaines choses qui ne sont pas respectées, des choses sur les habitudes alimentaires. Et en fait, c'est une manière aussi de nous, de regarder l'enfant et d'essayer de pouvoir lui venir en aide. C'est aussi une manière d'être intrusif dans la vie d'un foyer. Alors ça, moi, c'est quelque chose qui me dérange un peu plus parce que du coup... Oui, on prend énormément d'informations aux enfants. Donc oui, on sait beaucoup de choses de ce qui se passe chez eux. Après, c'est des enfants et il y a des âges. Il y a des âges où il y a la fantaisie qui est très, très développée et où du coup, une parole sur deux, tu sais qu'il faut le prendre vraiment avec des pincettes. Mais en tout cas, vraiment chez les tout-petits, eux vont vraiment reproduire leur quotidien. Ils n'ont pas encore assez de fantaisie ou d'imagination pour faire d'autres choses. Donc quand tu vois une petite fille qui traite super bien sa poupée, qui l'emmène bien au dodo, qui lui tient la main pour qu'elle s'endorme, Tu dis, ça, c'est ce qui se passe chez elles. Et à contrario, des enfants qui vont... Alors, on ne parle pas des enfants qui jettent les poupées par terre. La colère, ça existe. Ça,

  • Alban

    on a carrément droit.

  • Lucie

    Après, on ne catégorise pas. Mais ça nous permet vraiment d'enquêter quand même.

  • Chloé

    Tu as eu un cas où tu as repéré ?

  • Lucie

    Alors, moi, j'ai eu une classe très difficile. Et c'est ce qui m'avait fait arrêter d'ailleurs cette structure-là.

  • Alban

    Est-ce que c'était ta toute première expérience qui a duré un mois ? Non,

  • Lucie

    pas du tout. Alors, je vais essayer de faire rapidement. J'ai donc travaillé à remplacer une personne pendant... plus d'un an et demi, quasiment deux ans, où en fait finalement j'avais pris sa place. Donc c'était ma classe et c'était des tout petits. Donc là, moi j'étais très bien, c'était super et tout ça. Mais ça restait que je n'avais pas encore de CDI. Et là, en fait, je finissais mes études ou en tout cas, là, je n'allais pas continuer sur des études et j'avais envie vraiment d'avoir un CDI pour diverses raisons, même si en fait, dans les fêtes, c'est la même condition en Norvège. en tout cas sur ce genre de choses. Donc j'ai dû passer un entretien parce qu'en fait, par les structures communales, tu dois envoyer ton CV, tu dois envoyer ce dossier-là sur une plateforme qui est traitée au niveau communal et ensuite ils sélectionnent des dossiers qu'ils envoient au RH ou aux directrices, etc., qui ensuite te convoquent en entretien. Donc elles peuvent pas dire, moi j'ai un dossier à proposer en entretien. T'es obligé de passer de toute façon par l'utri sélectif avant de la communiquer. Donc j'ai envoyé ma candidature, j'ai reçu le fait que j'allais être reçue en entretien, etc. Et j'ai passé un vrai entretien d'embauche. Alors que ça faisait deux ans que je travaillais avec eux. Et en fait, il y avait 479 personnes qui avaient postulé, je crois, entre quand même. Ah oui. Énorme. Et donc j'ai été prise. Wow. Et donc ils m'ont proposé une place dans une classe de 3-6 ans. Choc. Pour moi, ça a été un choc.

  • Alban

    Parce qu'avant, tu étais chez les tout-petits ?

  • Lucie

    Moi, j'étais chez les petits. Il y avait la sieste, il y avait l'apprentissage de la langue, parce que moi, ça ne faisait pas si longtemps non plus, ça faisait peut-être deux ans que j'étais en Orveille. Et en fait, les 4-5 ans qui parlent en permanence, et en plus, ils inventent plein d'histoires. Vraiment, j'avais la tête, la salle de pause, mais je l'ai savourée en silence. Parce que du coup, en plus, c'est en norvégien. dur. Il commençait à avoir des dialectes à cet âge-là, déjà, selon les parents et tout. Et puis moi, j'étais vraiment... Je comprenais pas qu'il y avait une licorne sur un nuage, qu'il avait été chercher un seau magique et tout ça. Enfin, tu vois, c'est du vocabulaire que t'as pas en tant qu'étranger. T'as pas grandi ici, t'as pas les références. Quand on me parlait de Cap-Tel-Sabeltan, c'est vraiment en train de... de commencer à découvrir la culture norvégienne, en tout cas des petits. Et en fait, cette classe-là était vraiment particulière parce qu'on n'avait pas de « pedleded » . En fait, c'était une personne qui était sur un remplacement long. C'était une personne qui était en fait « barn-o-barn » , donc assistante sociale. La Norvège et la culture des assistantes sociales, j'imagine que vous le réaborderez sûrement plus tard avec d'autres personnes, mais c'est un gros, vaste sujet. Et en fait, elle, c'était vraiment ça, son boulot. Elle avait avant été assistante sociale pendant plusieurs années. Et là, elle faisait ce remplacement. Et en fait, on s'était retrouvés avec tous les cas sociaux qui étaient dans cette classe. Donc, elle, elle passait son temps à suivre des dossiers plutôt que de faire la tâche pédagogique, coordination avec les parents, etc. Enfin, elle faisait la coordination, mais avec les enfants à dossier, en fait. Et donc, du coup, nous, enfin moi, en tout cas, j'ai été énormément sensibilisée à ça aussi. J'ai été beaucoup formée, j'ai eu beaucoup de cours en extra pour vraiment savoir comment me comporter avec les parents. Parce que des fois, il y a des enquêtes sur leurs enfants et sur eux, et ils ne sont pas encore au courant. Mais des fois, légalement, il faut qu'ils soient au courant de quelque chose quand même. Qu'est-ce que tu peux dire ? Qu'est-ce que tu ne peux pas dire ? L'attitude que tu as, comment tu vas devoir noter tout ce que l'enfant dit, ce genre de choses. Ça, ça a été très dur pour moi et très lourd. et de me rendre compte. compte aussi à quel point on est attentif aux enfants, mais pas qu'eux, et à quel point on ferait tout pour le bien-être d'un enfant parce qu'on juge que ça, c'est limite. Moi, ça m'a posé quand même quelques...

  • Chloé

    Que tu trouvais parfois que ça allait trop loin, peut-être ?

  • Lucie

    Oui, je trouvais parfois que ça allait trop loin. Après, moi, en tant qu'étrangère, j'ai toujours entendu des histoires sur les injustices des barnevernes, en fait, en Norvège, sur... Oui, on m'a pris mon bébé de deux mois parce que j'étais sous antidépresseur, ce genre d'histoire. J'avais cette espèce de spectre. Alors oui, on avait des enfants qui étaient dans des situations terribles, clairement, dans ma classe. C'était vraiment très difficile. Il y avait des choses dont moi-même, je n'étais pas au courant. Par exemple, il y avait certains enfants, il n'y a qu'une seule personne qui était autorisée à les accompagner aux toilettes ou à leur changer la couche. Et là, tu fais, c'est dur quand même. Parce que moi, j'aurais, par exemple, adoré être infirmière puéricultrice, par exemple. vraiment travailler avec des enfants malades, mais ma sensibilité m'en empêche. Et en fait, de me retrouver là dans une classe avec que des enfants en difficulté dans leur foyer, parce qu'après, en fait, à chaque fois, du coup, comme elle était super calée, elle traitait super bien avec les parents, elle traitait super bien avec la police, avec les assistantes sociales, avec toute la coordination et le reste. Et ça, je trouvais que c'était un peu mal fait aussi, personnellement. Je l'aurais dit, d'ailleurs. Je l'aurais dit.

  • Alban

    Oui, répartir un peu.

  • Lucie

    c'est trop en fait même pour eux d'avoir que des copains qui font face à des difficultés alors là ils le voient pas vraiment t'as quand même ce truc de moule où tous les enfants sont égaux où tout va être pareil alors oui des fois il y a machin qui partait avec tel adulte parce qu'il devait aller à la police ce genre de choses mais ça non les enfants ils le voient pas ils sont petits Merci. Il faut savoir que du coup, nous, on avait une classe de 18 enfants. Et en fait, il y en avait peut-être une dizaine qui avaient des dossiers de progrès.

  • Alban

    Moi aussi, en tant qu'étrangère, on m'a beaucoup parlé de cette protection de l'enfance qui est très proactive. Et parfois, ça fait peur. Donc, je me dis, oh là là, parfois, je la presse pour qu'elle s'habille et tout. Est-ce que ça, ils vont prendre ça comme remarque ? Ça fait peur. Est-ce que c'est vraiment des cas extrêmes dont tu parles ? en mode violence ? Ou est-ce que parfois, ça peut être aussi ce que je considérais des petits signaux ?

  • Lucie

    On a eu tout et rien. On avait des cas très extrêmes. On avait un enfant qui allait être placé, des choses comme ça. Après, il y avait, non, des soupçons, des suspicions, des on n'est pas sûr, de la négligence.

  • Chloé

    Ah, aussi.

  • Lucie

    Oui. ils font hyper attention à la négligence et moi ça j'en suis consciente, par exemple ma fille elle aime pas s'habiller, donc là c'est le début de l'hiver il fait à peu près zéro elle aurait besoin quand même de mettre une vraie combinaison l'équipement d'hiver et elle veut pas mettre des chaussures qui sont rembourrées parce que ses pieds sont serrés dedans et elle est hyper sensible au contact et tous les matins on se bat pour lui dire non, il faut que tu aies des chaussures qui tiennent chaud, qui isolent du sol, etc. Il faut savoir que dans son école et dans beaucoup d'écoles à Oslo, il y a deux jours par semaine qui sont entièrement à l'extérieur. Ils ne rentrent pas dans l'école,

  • Alban

    même au CP.

  • Chloé

    À partir du CP, parce que nous c'est un jour, tu as le turdag.

  • Lucie

    Oui, en jardin d'enfant, tu as une journée à l'extérieur. Chez les petits, c'est différent. On rentre avant 11h30 parce qu'après, il y a la sieste et tout. Mais ils mangent dehors, oui. À l'école, c'est deux jours par semaine sans aucune exception. S'il fait moins que moins 10, on raccourcit la journée. Mais sinon... On a eu quelques déluges quand même, là, en début de saison, où il pleuvait vraiment extrêmement, etc. Ils passaient six heures par jour dehors dans un bar. Et ça s'appelle l'école à l'extérieur. Ça ne s'appelle plus une sortie. Ça s'appelle on fait l'école. Donc, ils sont censés apprendre des choses, ramasser, apprendre à compter de manière différente, etc. Il y a beaucoup d'enfants qui aiment. Ma fille déteste. Et quand elle a appris qu'à l'école française, c'était quasiment pas de sortie, elle a quand même hésité. Et en fait, sur ce côté négligence, par exemple, nous, on a du mal à lui faire porter des chaussures chaudes. Et on n'a pas peur, mais on a quand même une crainte de se dire...

  • Chloé

    Il pourrait relever ça.

  • Lucie

    C'est relevé, c'est sûr.

  • Chloé

    Ah, c'est relevé, c'est sûr.

  • Lucie

    Oui, oui. Mais tu vois, de se dire, en fait, c'est mal vu. Oui, oui. Donc, on essaye et on est un peu... C'est vrai qu'on est quand même tout le temps dernière minute.

  • Chloé

    Là, je fais une petite pause parce que je connais Lucia en train de se dire, est-ce que j'ai mis la chaussure sous couche ce matin ? Est-ce que j'ai mis les gants ? Est-ce que j'ai doublé les gants ? Est-ce que j'ai mis les chaussures ?

  • Alban

    Non, mais c'est clair, je vais y faire attention.

  • Chloé

    Non, mais c'est vrai que c'est inquiétant un peu ces histoires de, comme tu dis, l'aide sociale, proactive, mais trop.

  • Lucie

    Oui, la protection de l'enfance.

  • Chloé

    Protection de l'enfance, voilà, qui, de manière générale, nous, quand on devait présenter comme ça notre arrivée, en gros, un peu scandale. En France, on va attendre qu'il se passe quelque chose de mal pour placer les enfants. Éventuellement, tu as raison, c'est même en retard ou voir trop. En Norvège, on ne va pas attendre que quelque chose de grave se passe.

  • Lucie

    C'est un peu l'inverse de la médecine, par exemple. En France, on va être un peu plus prévention. Tu veux dire, je ne me sens pas top en ce moment. Prévention. Être sûre qu'il n'y a rien de grave qui se trame, ou quelque chose de ci, de ça, etc. En Norvège, c'est l'inverse. On attend que tu aies tous les symptômes d'un truc pour te dire, ok, en fait, t'es malade, on va s'occuper de toi. À ce niveau-là, c'est l'inverse. En Norvège, on fait énormément de prévention sur les enfants. Je trouve que c'est bien, mais c'est vrai quand même que nous, en tant qu'étrangers, et avec tout ce qu'on entend, ça peut faire un peu peur.

  • Alban

    Parce qu'on n'a pas tous les codes sociaux. La première année de ma fille, vu qu'elle était de décembre, elle n'avait pas de crèche tout au début. Et là, quand je reprenais ses affaires la première année pour ma seconde fille, je disais à Alban, mais on n'avait pas de laine pour elle au moment de l'hiver. Et je me dis, mais maintenant, si un jardin d'enfants avait vu que notre fille venait sans laine tout l'hiver, ils auraient peut-être relevé ça.

  • Lucie

    En fait, nous non plus, on n'a pas de laine. Ils ont du mal. Mais oui,

  • Chloé

    il y a tellement un lobby dans la culture de la laine. Je jure que par ça.

  • Lucie

    je sais mais en fait oui ça tient chaud oui non c'est vrai que c'est son tête bon on va parler de ma fille du coup c'est le meilleur exemple c'est plus souple elle déteste avoir deux couches fines en pleurel tu vois genre deux pantalons tout ça c'est pop et je la comprends moi deux pantalons mais jamais tu me verras avec deux pantalons ou un collant mais moi c'est trop drôle moi je suis comme ça et en fait le truc c'est que moi j'ai travaillé là et il fait 25 degrés Merci. On n'aère pas beaucoup. Les fenêtres sont souvent condamnées ou avec seulement des petites ouvertures parce que la sécurité enfant.

  • Alban

    Dans les classes, tu veux dire ?

  • Lucie

    Oui. Il fait une chaleur pas possible. Et il y a des enfants, ils ont leur sous-couche de laine, leur t-shirt et leur pull toute la journée.

  • Chloé

    Moi, je suis le seul parent qui me déçape à fond quand je vais la déposer. Mais quand tu vas la récupérer, c'est la seule gamine ou une des rares qui n'a quasiment plus rien sur elle. Donc, comme tu dis, problématique d'aller essayer de remettre les couches une par une avant de sortir.

  • Alban

    Généralement, on n'arrive pas à lui remettre toutes les couches.

  • Lucie

    Oui, parce qu'en fait, elle a... pas forcément besoin, tu vois. Et ma fille, elle est... Moi, j'ai pas froid facilement, visiblement, elle non plus. Et en fait, la laine, en tout cas, les sous-couches thermiques, laine comme ça, etc. Alors là, oui, il y a un intérêt. Je veux dire, elle passe 6h, 7h un jour, dehors. Elle a à peine 6 ans, il fait quand même bien froid. Ouais, tu vois, quand tu choisis, par exemple, la combinaison de cosmonautes, là, qu'il faut porter tout l'hiver, tu dis, bon, ouais, on va aller... Peut-être sur une marque un peu mieux isolée ou un truc où on sait que... Et en fait, là, nous, on a le problème. C'est pas un vrai problème. C'est plus peut-être un problème de riche. Mais on se dit, elle va être beaucoup dehors. C'est pas un gros gabarit. Il faut qu'elle puisse bouger, parce qu'elle aime pas être dehors. Parce qu'elle aime pas... En fait, elle est trop coincée dans toutes ses couches.

  • Chloé

    Comme tu dis, c'est des cosmonautes.

  • Lucie

    C'est des artistes de cosmonautes. Donc du coup, on avait ce truc de en fait, il faut un vêtement technique. Il faut un truc de cosmonautique, ça coûte hyper cher. Et en fait, c'est un tissu qui est aussi un peu plus fragile, qui fait des trous plus facilement. Donc des fois, tu ne le gardes pas d'un enfant à l'autre, malheureusement. Donc oui, tu finis la saison avec. Tu ne vas pas en racheter 12, quoi. Mais je vois, nous, on habite dans un quartier assez aisé, avec beaucoup de Norvégiens. Il n'y a pas énormément d'étrangers. Ou alors, il y a des étrangers, mais des Allemands mariés avec des Norvégiens. Des trucs comme ça. et en fait Les enfants sont sureéquipés. C'est quelque chose qu'on voit, et j'imagine que vous, c'est plus ou moins la même chose. Et nous, c'était très commun, par exemple, au jardin d'enfants, que toutes les affaires restent, parce que de toute façon, ils ont le double à la maison. Tu vois, ils vont avoir le week-end.

  • Alban

    Parfois, je ne comprenais pas au Barnaille, pourquoi toutes leurs affaires restaient, mais c'est parce qu'ils sont tout en double.

  • Chloé

    Oui, mais ici, c'est très commun.

  • Lucie

    C'est pas du tout notre approche de vie, la surconsommation et ce genre de choses. Donc on n'a pas 12 dresses pour les enfants. Et du coup, on transporte de la maison aux jardins de soins,

  • Chloé

    aux jardins de soins,

  • Lucie

    à la maison, etc. Beaucoup plus. Et c'est vrai qu'ils en ont deux, voire trois. Ça dépend, il y a des cas extrêmes où tu en as trois parce que des fois, il faut les laver. Et je me dis, en fait, c'est un autre monde. Et donc, du coup, il ne faut pas non plus tomber dans la... paranoïa de te dire ils vont penser que je suis négligente.

  • Chloé

    Complètement.

  • Alban

    Non, mais moi, je suis...

  • Chloé

    Alors, je pense qu'on allait faire deux commentaires complètement différents. J'allais dire moi, maintenant, je suis en paix avec ça et je me pose ma question et là, je suis là, parano.

  • Alban

    Elle a fait sa rentrée dans le jardin d'enfants chez les grands et à la rentrée, s'est posée la question du sac à dos. En fait, j'ai juste regardé les sacs à dos des autres et ils avaient tous le même sac à dos de la même marque. Alors, avec des dessins différents. Quand j'ai demandé à la maîtresse quel sac fallait, elle m'a dit celui-là, il est vraiment très bien parce qu'il s'attache en haut, il s'attache en bas pour partir en rando. Je me suis dit, je sais que je ne suis pas obligée d'acheter ce sac, mais en même temps, je n'ai pas envie que ma fille soit la seule à ne pas avoir ce sac parce que j'aurais l'impression que c'est la seule qui n'a pas le sac qu'il faut, en fait.

  • Lucie

    Ouais, ça c'est un truc, moi je m'en fiche un peu plus. Du moment que ça leur plaît et que c'est pratique. Mais on a eu la même chose là à la rentrée, parce que le sac de première classe...

  • Chloé

    Sac en 10 !

  • Lucie

    Oh là là là là ! Et alors là, pour le coup, il n'y a pas un enfant. Il y a 88 enfants qui sont rentrés dans l'école de ma fille en première classe cette année. Il n'y en a pas un qui n'a pas ce sac.

  • Alban

    On parle du Beckman ?

  • Lucie

    On parle du Beckman.

  • Chloé

    Et en fait... Notre lobby norvégien. Les lobbyons norvégiens, j'imagine. Le lait, le chocolat, le fromage, tout ça.

  • Lucie

    Mais enfin, c'est dingue, tu vois, de dire... Parce qu'il a un coût, ce sac. On est sur un sac extrêmement cher. Et en fait, il est beaucoup trop gros pour elle. Ils sont là, oui, le sac le plus léger du marché. Non, il est lourd. Il est lourd par rapport à elle. Elle ne fait encore que 18 kilos. Son sac, il en fait 4. Je ne sais pas quoi qu'il aille. Le rapport. En fait, elle passe sa journée, pour le coup, dehors. C'est encore différent. Mais le truc étant que moi, je m'en fiche de quel est un sac différent, même si je lui couds un sac ou je ne fais rien, parce que aussi, j'ai grandi de cette manière-là. On a toujours été un peu marginaux, pour le coup, parce que notre niveau de vie ne passait pas exactement dans... le milieu dans lequel j'ai évolué, dans le quartier, etc. Donc ouais, on avait des affaires un peu différentes, on avait pas mal de trucs de récup, je garde mes fringues pendant 10 ans, 15 ans, c'est pas très grave. Et en fait, là, je vois qu'on est sur quelque chose de très différent, et ma fille, elle, ça lui tenait énormément à cœur d'avoir le même sac que les autres. alors que pourtant elle n'a jamais eu ce genre de choses donc oui bien sûr qu'elle a eu son sac et qu'elle a fait sa rentrée avec son sac en étant très fière et moi je pense que pour l'instant Gisèle elle ne se rend pas compte que tout le monde a le même sac enfin quoique peut-être un peu mais moi c'est surtout je me disais ah non ça ne va pas être la seule étrangère qui n'a pas le sac ça se regarde là parce que vous êtes encore alors nous on a quelques étrangers c'est de plus en plus rare plus on s'éloigne mais et... Après, en tout cas, pour la surveillance, la négligence et tout ça, il ne faut pas être inquiet.

  • Alban

    Ils ne vont pas appeler les services sociaux parce qu'elle n'a pas un Beckman à la rentrée.

  • Lucie

    Non. Et moi, j'ai une voisine qui nous a menacé un jour d'appeler les services sociaux. Ouais,

  • Alban

    non, raconte.

  • Lucie

    En fait, on vivait dans un immeuble où, entre chez elle et chez nous, c'était du papier. Vraiment, je pense que c'était qu'un appartement et qu'ils ont séparé. C'est comme quand tu rajoutes une chambre,

  • Alban

    ils ont mis un rideau.

  • Chloé

    Oui, limite.

  • Lucie

    Franchement, c'était assez vieux comme truc et tout. Donc, j'étais enceinte de mon fils et ma fille avait moins de deux ans. Et elle faisait énormément de terreurs nocturnes. Donc, moi, c'est quelque chose que je connaissais. Mon petit frère en avait eu, etc. Pour les gens qui ne connaissent pas les terreurs nocturnes, ça porte trop bien son nom. C'est horrible. C'est un espèce de cauchemar, en fait, terrible. Et tu ne peux pas et tu ne dois pas réveiller l'enfant. Il faut qu'il trouve la solution tout seul à sa situation à ce moment-là. Parce qu'en fait, si tu le réveilles, déjà, c'est un énorme stress pour lui. Et c'est super dur de réveiller un enfant en terreur nocturne. Je ne sais pas si vous avez déjà essayé. C'est impossible. Et en fait, il n'y a rien à faire. Tu ne peux pas te mettre à crier plus fort que ton enfant, secouer ton enfant. Là, on va dans des trucs impensables, mais c'est le milieu de la nuit, c'est toutes les nuits, c'est quatre fois par nuit. La enfant hurle à la mort, c'est compliqué. Et donc, ma fille hurlait extrêmement fort. Mais vraiment, elle hurlait. Des fois, elle n'avait pas de voix le matin. Elle avait vraiment des terrés en nocturne hyper intenses.

  • Chloé

    Ça pouvait durer longtemps ?

  • Lucie

    Ça peut durer assez longtemps, oui. Ça peut durer... Alors, en plus, si elle se réveille, il faut savoir que si si elle est réveillée par un facteur extérieur que ce n'est pas elle qui a solutionné son problème, il se rendorme et il se réveille 20 minutes après dans la même situation. C'est la différence d'un cauchemar. Le cauchemar, tu vas te rendre compte que ça va être dans la réalité. En fait, tu es chez toi, tout va bien, tu peux te rendormir tranquille, etc. Les terrains nocturnes, non. Donc, c'était très difficile. J'ai eu une grossesse vraiment moisie avec mon fils. Donc j'ai été hospitalisée par exemple deux, trois fois. C'était le Covid, je devais être toute seule. Et toute cette espèce d'environnement-là qui était un peu compliqué. Et une nuit, ma voisine, elle a complètement dérapé. Elle nous a dit, je vais appeler les assistantes sociaux, il faut arrêter de battre votre fille, de l'enfermer dans une pièce pendant que vous allez vous isoler avec un casque et jouer à des jeux vidéo dans une autre pièce. Et en fait, elle avait des problèmes. Pour résumer, son mec avait fait ça à sa fille quand elle était petite. Donc en fait, elle a transposé la maltraitance. En fait, elle pensait qu'on enfermait notre fille dans une pièce.

  • Chloé

    C'était ce qu'elle vivait elle ?

  • Lucie

    C'était ce qu'elle avait vécu elle quand sa fille était petite. Donc là, elle avait 10 ans, sa fille déjà. Mais donc du coup, oui, en fait, elle avait dit ça. Et moi, j'étais hospitalisée une nuit. Chris, il ne pouvait pas, donc mon conjoint ne pouvait pas calmer notre fille. C'était un enfer. Déjà, la nuit, elle n'acceptait que moi et encore, c'était difficile. Et en fait, c'était une nuit ultra dure. Moi, j'étais donc hospitalisée. Je lui réponds à une heure et demie du matin à son SMS en lui disant, écoute, je suis hospitalisée. C'est sûrement une terreur nocturne. Je suis désolée, il n'y a rien à faire. Prends ton mal en patient. Et après, elle a dit, il ne faut pas maltraiter les enfants comme ça. Vous, les Français, elle est partie d'un des délires un peu. Oui,

  • Alban

    les clichés. Les français clichés. Ils mettent encore beaucoup de fessées.

  • Lucie

    Voilà.

  • Alban

    Elle est mal tombée en plus, parce que toi, c'est l'opposé, quoi.

  • Lucie

    Et en fait, elle ne savait pas, par exemple. Mais du coup, on l'a un peu calmée. J'ai dit, viens, vas-y, passe à la maison. Viens voir les portes et les verrous. Parce que nous, il faut savoir qu'on avait enlevé toutes les portes. Parce qu'en fait, c'était hyper mal agencé. Donc, on n'avait plus aucune porte à part à la salle de bain. et surtout pas dans les chambres. Et en fait, il y avait... on avait mis des gros rideaux épais à la place.

  • Chloé

    Ah, mais pour jouer aux jeux vidéo toute la nuit.

  • Lucie

    Ah bah ouais. Et son lit, donc ma fille, forcément, elle avait un lit au sol, elle était libre de se déplacer si elle avait besoin, etc. Et donc du coup, on lui avait dit, bah viens, alors dans quel lit elle est enfermée, dans quelle pièce ? Ça avait fait un peu calmer, quoi. Mais elle nous a quand même menacé de nous balancer aux services sociaux. Pour maltraitance.

  • Chloé

    À l'issue de ça, c'est là que vous avez décidé de quand même lui montrer, pour un peu essayer d'apaiser les choses, comment vous avez réagi ?

  • Lucie

    On a déménagé.

  • Chloé

    Et oui, voilà. Non, mais je l'ai dit, il n'y a pas de...

  • Lucie

    Et puis, elle était quand même alcoolique. Merci, les motifs alcooliques. Il y avait quand même d'autres choses derrière. Et aussi, bon. Mais non, non, on a déménagé de toute manière. on allait accueillir un deuxième. et puis c'était un logement quand même assez vituste on était très content de déménager mais ouais on a été menacé et franchement ça fait peur et tu vois de me dire mais attends moi je travaille dans un jardin d'enfants tout le monde me connait je sais que ça n'ira jamais plus loin que ma voisine un peu tarée Ça fait flipper.

  • Alban

    Ça fait flipper, ouais.

  • Lucie

    Ouais, quand même, ouais. Et en fait, c'est aussi un petit moyen de pression sur les enfants, c'est pas très bien, mais tu vois, ce matin, quand ma fille ne voulait pas mettre ses chaussures embourrées, je lui ai dit, mais ma chérie, ils nous écrivent des messages, en fait. Nous, tous les deux semaines, on reçoit un message qui rappelle qu'il faut que tes enfants soient assez couverts, qu'il faut avoir ça, ça, ça, ça en chant. J'ai dit, on ne veut pas de problème, en fait.

  • Alban

    Je voulais revenir sur le fait que ta fille est un peu en avance sur le système norvégien et que d'ailleurs, peut-être qu'une structure plus à la française, entre guillemets, pourrait peut-être mieux lui convenir. Pourquoi vous faites le choix néanmoins de la laisser dans le système norvégien ?

  • Lucie

    Je pense qu'il y a certaines convictions. Je ne suis pas fondamentalement contre l'école française, mais presque, je dois être honnête. Je n'ai pas envie, je n'en ai pas une bonne image.

  • Alban

    Qu'est-ce qui te rebute le plus de l'école française ?

  • Lucie

    La structure, la vision élitiste, en demander trop, les horaires. Ce n'est pas adapté à la vie norvégienne. C'est mon point de vue extérieur parce que je n'y ai jamais travaillé et je connais des gens qui y ont été. Et c'était du coup, maintenant, il y a un petit moment. la réalité je la connais pas pas pour de vrai. Mais de mon point de vue, on a pris une école en France et on l'a posée en Norvège. Et ce n'est pas adapté. Les horaires ne sont pas adaptés, le volume n'est pas adapté, le nombre d'heures de Norvégiens par semaine n'est pas adapté, la culture... Vraiment, il n'y a rien qui est adapté, ne serait-ce qu'un minimum pour que les enfants évoluent dans une culture. commune avec leur environnement. Et ça, pour moi, c'est un problème. Après, on est quand même deux Français, toutes notre famille sont en France, nos enfants parlent le français, c'est vraiment leur langue maternelle. Donc moi, j'ai même pas le besoin que mes enfants parlent le français pour communiquer avec les grands-parents. C'est juste inné et il n'y a aucun souci là-dessus. Donc l'école française, pour nous, c'est pas un choix et c'est pas une option. aussi parce que c'est pas super bien placé par rapport à là où on habite c'est cher de rien ça coûte un coup et en plus il me semble que plus les années passent plus c'est cher et après on a réfléchi, on a quand même on garde en tête la possibilité de l'école internationale parce que en fait du coup oui le niveau est un petit peu plus élevé, c'est un peu plus scolaire, un peu plus académique et en même temps assez à la norvégienne C'est quand même un espèce de...

  • Alban

    Oui, c'est des journées assez courtes.

  • Lucie

    C'est une ville assez sympa. Par contre, c'est hyper loin de là où on habite. Pour le coup, parce que l'école française, autant elle est dans Oslo, l'école internationale, elle est en dehors d'Oslo. Et on habite carrément de l'autre côté. presque en dehors. Ça engagerait un déménagement quand même. C'est ça qui est compliqué aussi. Nous, on sait qu'elle, elle ne sera pas en retard. Donc tant qu'elle continue à avoir les bonnes stimulations, qu'elle continue de s'épanouir et qu'elle ne nous demande pas autre chose, on va la laisser au moins le temps que son frère rentre à l'école. Donc on a encore un an et demi. Et après, quand ce sera le moment que lui rentre à l'école, on verra déjà. On ne sait pas où on sera dans deux ans. On est un peu au jour le jour.

  • Chloé

    Est-ce que vous ne savez pas où vous serez dans Oslo en Norvège ? Ou est-ce que ça vous a...

  • Lucie

    Ah, c'est pas du tout. Non, non, on n'a pas... Là, en ce moment, ça fait dix ans qu'on est là. Nos amis nous manquent, nos familles nous manquent. On a vraiment, nous, une différence de avant et après Covid, d'une certaine manière, dans le sens où on avait l'habitude d'avoir de la visite. Plus du tout. On a des... Enfin, nous, comme nos amis, sommes assez concernés par l'environnement. On a... pas envie de prendre l'avion pour passer un week-end de trois jours avec des copains, malheureusement.

  • Chloé

    C'est un vrai sujet, ça aussi.

  • Lucie

    Il faut respecter ça au maximum. Moi l'avion, j'essaye quand même de prendre un petit peu de recul. Mon conjoint, lui l'avion, il est zéro recul. Au premier degré, ça le rend presque malade qu'on prenne l'avion pour aller fêter Noël, et en plus on passe trois semaines. Donc vraiment, et je le comprends, c'est quelque chose qui pèse dans le quotidien, et ses amis, plus que les mains pour le coup, sont quand même largement du même avis. On a beaucoup moins de visites. Il y a aussi qu'on a tous passé 30 ans. on n'est pas les seuls à avoir des enfants maintenant. Enfin voilà, ça implique une organisation différente. Et du coup, nos familles et nos amis nous manquent assez. On ne s'y retrouve pas beaucoup avec notre cercle en Norvège.

  • Alban

    Vous envisagez peut-être de rentrer en France ?

  • Lucie

    Non, pour le coup, quand même pas. En fait, pour le contexte, il y a mon grand frère qui a habité au Canada pendant des années, qui est retourné s'installer en France il y a quatre semaines. Avec sa famille.

  • Chloé

    Il veut déjà repartir ? Non, je peux les en faire, ça va.

  • Lucie

    Non, non, c'est assez nouveau. Mais du coup, ils sont allés vers Nîmes. Donc, je les ai eus au téléphone. Pour l'anniversaire de ma belle-sœur, il faisait 18 degrés, ils étaient en t-shirt.

  • Alban

    Ça te donnait envie ?

  • Lucie

    Ouais, il faisait encore jour et tout. Quand il était 16h30, même pas, il faisait déjà bien nuit, très froid. Ils étaient tous des esquimaux et tout. Les hivers, là, c'est vrai que ça commence à me peser un peu. Il y a certaines choses qui évoluent, qui sont un peu différentes. Je pense que ne serait-ce que si on changeait de quartier et d'environnement. on aurait une approche assez différente. On aurait peut-être des voisins qui disent bonjour.

  • Chloé

    Oui,

  • Alban

    parce que j'allais dire, pour le coup, nous, tous nos voisins, ils disent bonjour.

  • Chloé

    Et donc, on vit ici en Requehus, qui sont des maisons mitoyennes. Et en fait, autant pour des raisons de budget que d'entretien, que de plein de raisons, on est passé d'appart à maison mitoyenne et ça nous va très bien comme ça pour garder la vie un peu de quartier.

  • Lucie

    Clairement. C'est des choses assez différentes, mais il y a un côté social du Norvégien qui doit organiser une vie sociale. dans tous les boulots, tu as le social comité où du coup, tu vas organiser que le vendredi, après la paye, tout le monde va boire un verre, j'en sais rien, ce genre de choses. Là, hier soir, je suis sortie avec les mamans de la classe de ma fille. Donc voilà, il y a une organisation sociale aussi à ce niveau-là.

  • Chloé

    Spontanée ?

  • Lucie

    Eh ben non, il n'y a rien de spontané ou ponctuel.

  • Chloé

    C'est vrai que le manque de spontanéité, je te rejoins parce que quand on parle de nos expériences passées en Amérique latine, Ben là on est on était en plein dedans. Ah waouh,

  • Lucie

    la chaleur...

  • Chloé

    Et pareil, quand on vient du sud de la France, on va s'y rendre en vacances, et tous les terrasses, la chaleur humaine, les imprévus, ça c'est quelque chose qui nous manque, et c'est pour ça que parfois on se dit, si on avait l'occasion, peut-être repartir deux ans, trois ans dans l'Amérique latine, tout en revenant en Norvège, mais regoutter un peu à ça, peut-être pour ensuite se dire, ah non mais je préfère l'ordre, c'est bon. Ouais,

  • Lucie

    bonne structure. Non, non, mais il y a des choses qui... qui manque un peu, cette légèreté-là, on la trouve Quand il commence à faire des boucles. En fait, c'est vraiment une période très courte.

  • Chloé

    Ça ne dure pas longtemps.

  • Lucie

    Proportionnellement, c'est le même temps. Il fait très jour, il fait très nuit.

  • Alban

    On a l'impression que ça dure moins longtemps.

  • Lucie

    Oui, parce qu'on part en vacances. On est moins là, etc. Mais c'est vrai que ça, c'est... Non, pour le moment, on n'envisage pas de rentrer en France. Mais c'est vrai que, par exemple, sur la scolarisation, ça, c'est difficile. Parce que tu dis, elle est en structure... je me réfère à ma fille. Elle est en structure norvégienne. Par exemple, ils ne veulent pas lui faire sauter une classe. Parce qu'en fait, elle serait avec des enfants qui ont un an... Parce qu'elle est née l'hiver. En Norvège, beaucoup d'enfants, pas tous, mais beaucoup naissent l'été. Donc elle, elle a déjà... quasiment six mois de moins que les autres, même facilement. Elle a ça et en plus, ce serait encore un an de moins, un an et demi de moins que les autres. Tu ne mets pas une enfant de six ans avec des enfants de presque huit ans. Ce n'est pas top. Alors, elle est très mûre et elle a plein de copines en troisième classe. Donc, c'est payé sur ce deux. Elle serait sûrement mieux avec des enfants plus grands. ça se fait pas trop. On fait pas redoubler, on fait pas sauter de classe. C'est pas trop un truc qui se fait. Et en même temps, je me dis, on déménage en France, je sais pas, dans trois ans. Elle va devoir être fatalement dans une classe d'enfants qui ont deux ans de moins. Parce qu'elle sera en retard au problème français. Et ça, c'est trop dur, tu vois, de se dire en tant que parent étranger, oui, toute notre vie est ici, mais toute notre famille et toute notre culture, tout le reste est là-bas. De se dire... Et il est possible, je ne sais pas, ma mère tombe, alors je ne le souhaite pas, mais ma mère tombe malade, je dois m'occuper d'elle, on va passer deux ans en France. C'est non négociable. Et donc, du coup, qu'est-ce qu'on fait avec les enfants ?

  • Alban

    Moi, c'est ce que je dis à Alban, si on doit rentrer en France pour x ou y raison, ou qu'on doit déménager autre part, en fait, dans un autre pays, c'est ça qui me donne envie de la mettre dans un circuit, soit anglais, soit français, pour être sûre que n'importe où on aille, elle m'aidera. puisse continuer sa scolarité sans...

  • Lucie

    Ou avec des enceintes son âge en fait. De me dire qu'elle va être la fille qui arrive de Norvège et qui doit avoir redoublé deux classes parce qu'elle n'a pas le niveau en maths, ça fait trop mal,

  • Alban

    tu vois.

  • Lucie

    Et je me dis, je ne souhaite pas qu'elle à 12 ans elle se retrouve dans une classe de petite 10 ans alors qu'en plus elle s'entend toujours mieux avec les plus grands, etc. Alors je ne sais pas. comment elle va grandir. C'est que des projections. Mais ça, c'est difficile d'avoir ce point d'incertitude et de se dire...

  • Chloé

    C'est super intéressant parce que je trouve que dans un parcours d'expatrié, mais même là, je pense qu'on n'est plus sur le parcours d'immigré. Il va y avoir complètement... Il y a toute une phase où tout semble... Surtout que tu es arrivé très jeune, on est arrivé encore relativement jeune. Tu as les débuts, tout semble facile, tu t'intègres aussi parce que tu as cette communauté très internationale, tu peux toujours l'avoir, et on l'a aujourd'hui, on se sent en termes d'amis, de social, tout se passe bien. Par contre, les enfants, le fait que toi tu sois première génération d'immigrés, qu'est-ce que ça renvoie sur eux, comment ils sont intégrés, leur futur, est-ce que je suis français, est-ce que je suis norvégien, qu'est-ce qu'ils sont eux ? Ce sont des thématiques plus délicates, je trouve, à gérer. C'est là qu'on soulève une autre notion de l'immigration. Est-ce que j'ai encore le choix de repartir ? Est-ce qu'au final, il faut mieux que je continue ma vie ici pour mes enfants ? C'est hyper lourd au final comme thématique, mais très, très intéressant. Et je pense que beaucoup de personnes s'y heurtent au bout de quelques années de vie dans un autre pays.

  • Lucie

    Surtout avec les enfants, en fait. Et justement... Quand tu m'as demandé tout à l'heure si... Mais attends, parce que vous envisagez de retourner vivre en France et tout ça, la question ne se pose même pas parce que les enfants... Oui, mais en même temps, tu dis, si demain ta mère est malade, vous rentrez.

  • Alban

    Ah bah oui, parce qu'en fait, il y a des choses dans la vie qui font que c'est plus important. Il y a des choses qui vont être plus importantes que d'autres. Et ce serait rentrer temporairement. D'accord. Aucun de nous n'adhère à la politique, par exemple, en France. Ce genre de choses, c'est des débats, c'est des idéaux et des choses qui sont assez personnelles. Mais aussi les structures, le système, le reste. De me dire que mes enfants, ils ont la chance de s'épanouir dans le système norvégien. Mais je n'ai pas envie.

  • Lucie

    Donc malgré l'isolement, l'éloignement de la famille, des amis, vous considérez rester en Norvège ?

  • Alban

    Pour l'instant, ce n'est pas un sacrifice en tout cas. Pour le moment, on y trouve largement notre compte. Mon conjoint est extrêmement heureux au travail. Moi, je me sens très libre, assez épanouie aussi. Et on sait qu'avec le boulot qu'il a en France, on serait dans des conditions extrêmement différentes. Les journées sont longues pour les enfants, les journées sont longues pour les parents. Le temps, la qualité que tu as de temps avec ta famille, avec ton bien-être, avec tout ce genre de choses-là. Pour le moment, on retrouve largement notre compte ici, clairement. Mais oui, les interactions sociales, ça commence à être un peu compliqué de mon côté. Comme tu disais, je n'ai pas envie que ma fille soit la seule à avoir un sac à dos différent. Moi, mes enfants, ils ont quatre cousins en France. Je n'ai pas envie que ce soit ceux qui sont nuls parce qu'ils n'ont pas appris ça à l'école. J'essaye de garder ces projections-là pour moi-même.

  • Chloé

    D'accord. Ce sont nos peurs aussi qu'on projette.

  • Alban

    Alors que ma fille n'a pas peur d'être bête. Et elle ne l'est pas. Et moi, je n'ai jamais eu peur d'être bête, en plus. Personnellement, mes parents, ils ont toujours été... quand même assez encourageant. Pourtant, je n'étais pas la plus brillante et le système scolaire français ne me convenait pas beaucoup. Mais je n'ai jamais eu l'impression d'être bête.

  • Lucie

    Non, et puis,

  • Alban

    c'est vraiment...

  • Lucie

    Il faut définir ce que c'est être intelligent, être intelligent dans le système français et être intelligent dans le système norvégien. C'est aussi différent. Et c'est pour ça que, d'un système à l'autre,

  • Alban

    il y a la capacité d'adaptation, à ingérer un nombre d'informations. Là, on est vraiment sur des trucs beaucoup plus profonds. Pour le moment, c'est clairement pas un sacrifice. Et on est très heureux ici. Et on pense aussi beaucoup à l'avenir. Et à se dire que, bah oui, je sais pas, moi, des choses un peu bêtes, mais la montée des eaux, les famines, les sécheresses...

  • Chloé

    Le réchauffement climatique.

  • Alban

    Ouais, ça fait extrêmement peur, en tout cas quand t'as des enfants à élever. Enfin, tu vois, t'as mis des enfants au monde, et tu te dis bah eux, ils ont pas choisi d'être là. Nous, on a choisi qu'ils soient là. Et notre responsabilité, c'est de faire en sorte qu'ils soient les plus heureux. et avertis possibles pour leur avenir. On a aussi envie que nos enfants grandissent dans la réalité du monde qui les attend. Après, je vais passer ma journée de stressée maintenant, mais c'est des énormes questions qui se posent et qu'on ne se pose pas avant un certain âge et avant d'avoir des enfants. c'est un peu difficile mais après il y a d'autres générations, mon petit frère a 10 ans de moins et lui il est une génération dans son groupe et dans d'autres gens, de sa génération c'est pas d'enfant c'est une réalité,

  • Chloé

    l'expatrié peut-être ou l'immigré peut-être très isolé en tant que parent

  • Alban

    Ça dépend des cultures. Il y a des cultures plus communautaires. On a des amis indiens.

  • Chloé

    Ils sont expatriés,

  • Alban

    mais ils sont cousins. Ils sont tous en famille. Ils vont au temple, ils ont leurs fêtes, les cultes. Tu vois, nous, on n'a pas ça, je trouve. Et en plus, mon copain et moi, quand on est arrivé ici, on a fui le milieu français. On ne voulait pas faire tous les trucs de franco-français parce qu'on voulait s'imprégner de la culture, on voulait parler norvégien. en plus il y a dix ans, on n'était pas sur le même profil d'ex On n'était pas sur le même profil d'immigrés, j'ai envie de dire. On était vraiment sur le profil d'expat. Genre, je suis ingénieur en tuyau, je travaille dans le pétrole, et on me propose un très gros salaire, je vais habiter à Frogner, et jamais apprendre le norvégien. Et ça, c'est quelque chose qui ne nous correspondait pas du tout, parce qu'en même temps, on vient d'études de culture scandinave. En plus, on connaît quand même les fondements de la société, on a appris la littérature, la géographie, la culture, tout ce genre de choses-là. et c'est trop dommage d'habiter dans ce monde. dans un endroit et se limiter à vivre les yeux fermés.

  • Lucie

    Et tout ça, est-ce que ça vous a aidé à vous faire des amis norvégiens ? Et un cercle norvégien ?

  • Alban

    Oui et non. Si je parle pour mon conjoint, oui. Et je pense qu'en fait, ça ne relève pas que de ça. Et si je parle pour moi, non. J'ai mes collègues avec qui je m'entends très bien. Ce n'est pas des amis, la famille, tu vois. Ce n'est pas des amis comme j'ai pu avoir en France. Ma meilleure amie ici est française. Et les gens avec qui je me suis sentie le plus proche, ça n'a jamais été des Norvégiens. Jamais. vraiment jamais. J'ai eu une amie norvégienne qui était cool à la fac, mais non, je ne sais pas. En fait, on est trop fondamentalement différents sur d'autres trucs. Ah, si là, j'ai une amie norvégienne, on est très proches, en fait. Dis-moi pour toi si elle ne m'entendra pas, mais elle ne se considère pas norvégienne. Voilà, je veux dire ça. Et la plupart de ses potes, c'est des étrangers. Donc, elle comprend, c'est sa culture, etc. Mais une autre amie ou collègue, On a 15 ans d'écart à l'époque. 15 ans plus vieille que moi, mais elle a habité au Portugal, au Brésil, elle est mariée avec un Portugais, elle a vécu un petit peu en France, elle est assez portée sur l'étranger, et en fait, ouais, on s'entend bien. Pour le coup, j'ai tout essayé. Parce que tu vois, je me disais, je travaille au jardin d'enfants, on a tous un intérêt commun, c'est les enfants, la pédagogie, ce genre de choses. Ça n'a pas pris. Pourtant, vraiment, comme je te disais, tu crées des liens un peu étranges en pyjama, assis par terre. Tu vois ce que je veux dire ? On partage des choses un peu intimes au final et en fait, non. J'ai essayé des clubs de sport différents. J'ai même essayé un sport d'équipe, par exemple. Non. J'ai... jamais trouvé de lien ou de trucs comme ça. J'ai étudié, j'ai étudié même à des parcours norvégiens, où tu t'inscris en tant qu'étudiant norvégien, grosso modo. Toujours pas. Donc je pense qu'il y a quelque chose qui fait que ça prend pas. Et ça vient certainement de moi aussi. Je ne peux pas juste dire le monde entier ne veut pas de moi.

  • Lucie

    Tu disais d'ailleurs que ton mari, ton conjoint...

  • Alban

    Mais lui, ouais, trop. Lui, il attire les Norvégiens. C'est un aimant. Pourtant, moi, physiquement, j'ai plus l'air d'être norvégienne que lui. Et en plus, nous, on a ce truc de... Oh, t'es français ! Les Norvégiens, c'est une petite fascination pour quand même la France. Ouais, ça va. Mais t'es français ! 2.

  • Chloé

    qu'est-ce que tu fais là ?

  • Alban

    C'est dingue, tu viens de Paris, tu vois. Ouais, ouais, ce truc de qu'est-ce que tu fais là et tout. Mais en même temps, je veux dire, on est des étrangers, on est des immigrés première classe, quoi. Tu vois, enfin, je veux dire, je pense qu'il y a quand même, dans leur vision, en tout cas, il y a une espèce de hiérarchie. Et on est tout en haut de la hiérarchie de l'immigré. Mais en tout cas, lui, non, pas du tout. Il s'est toujours méga bien intégré avec des Norvégiens. Même à notre mariage, il avait des potes norvégiens et tout. Pourquoi est-ce ce que je n'ai pas réussi à faire.

  • Chloé

    Qu'est-ce que tu conseillerais à quelqu'un qui arrive en Norvège ? Parce qu'on a abordé plein de thèmes. Est-ce que tu as un conseil à partager ?

  • Alban

    Savoir pourquoi tu es là. Si tu arrives parce que tu es dans l'industrie du pétrole et que tu as un super boulot qui t'est proposé avec des super avantages, un logement, tout ça. tu sais pourquoi t'es là, tu sais pourquoi t'arrives et après pour s'intégrer ben non tu t'intégreras à ton propre cercle en fait, après vraiment en termes d'intégration tu veux dire ben tu vois moi j'ai tout essayé et j'ai pas réussi je veux dire ça fait 10 ans que j'échoue à l'intégration donc maintenant mais t'en es pas malheureuse pour autant non non non ça va parce que aussi j'ai ma famille et puis non je suis pas malheureuse, je suis pas intégrée mais je suis pas désintégrée non plus et puis il y a ce truc de, moi ça me dérange pas de rencontrer des nouvelles personnes. Alors j'ai des amitiés très anciennes et très stables, mais ça me dérange pas de rencontrer des nouvelles personnes, des nouveaux groupes. Donc du coup, je peux papillonner avec des gens sans vraiment avoir des relations vraiment plus profondes. Par mon métier maintenant, un petit peu plus. Je suis respectée dans ce que je fais. Je le fais à peu près bien. Et du coup, tu vois, les relations que je noue avec mes clientes maintenant, c'est une sorte de relation sociale. Alors oui, on reste c'est professionnel. Il y en a quelques-unes qui se transforment en amis, et ça c'est exceptionnel.

  • Chloé

    Qu'est-ce qui est difficile pour toi en Norvège ?

  • Alban

    Rien. Je ne dirais pas que tout est facile, mais difficile, pas grand-chose. Juste le bas, le manque, l'éloignement, le manque. Mais encore une fois, par exemple, si mon mari n'était pas français, je ne sais pas, je pense que ce serait dur.

  • Chloé

    Oui,

  • Alban

    je comprends. Je pense que là, je serais vraiment dans un... Tu vois, j'ai besoin d'avoir des références à Astérix Oblix, Mission Clémopâtre, et quelqu'un rigole en face de moi, tu vois. et si mon mari était norvégien je suis pas sûre que ça l'aurait fait à long terme. Par exemple, si mes enfants parlaient pas français, ou très mal, ou très peu, ça, ce serait dur pour moi. J'ai une amie qui est ici. Elle est arrivée étudiante il y a 14 ans, je crois, un truc comme ça. Elle est mariée avec une norvégienne. Elles ont deux enfants qui sont dans le même jardin d'enfants que les miens. Et c'est vraiment une amie que j'ai depuis le jour où je suis arrivée. On s'est rencontrées très rapidement. Elle, elle n'a pas... presque plus aucun contact avec sa famille en France. Ses enfants, ils me regardent comme un extraterrestre quand je leur parle français. Parce qu'en fait, même elle, au final, tu as un moment où tu te prends au jeu et où c'est plus facile de parler norvégien, parce qu'elle parle norvégien et avec sa compagne aussi. Et elle ne passe pas par l'anglais, elle ne parle que norvégien. Et du coup, avec les enfants, tu as cette facilité aussi de... De toute façon, ils te répondent tout le temps en norvégien.

  • Chloé

    Tu vois ?

  • Alban

    et moi elle je lui pose la question et en fait elle me dit que elle ça va très bien c'est pas du tout un problème pour elle donc je pense que c'est quand même extrêmement personnel et à contrarier est-ce qu'il y a quelque chose que tu adores,

  • Lucie

    que tu as adopté de la Norvège et dont tu pourrais pas te passer juste le cadre alors je déteste la campagne

  • Alban

    Une super parisienne. Montagne, mer, ville, ça fonctionne. Mais campagne, rase, c'est mort. Mais pour autant, j'adore la nature, j'adore l'eau. Et en fait, on est entouré d'eau. Et juste... Pour le coup, c'est une condition. On a déménagé sept fois en neuf ans. Ah oui,

  • Lucie

    quand même !

  • Alban

    Nous, on fait beaucoup de vélo et tu vas te baigner à vélo. Genre, tu prends ton vélo, tu pédales 20 minutes et t'es à la plage. Alors, pas toute l'année, tu vois. Toute l'année, tu peux, mais voilà, je conseille pas. Et en même temps, tu peux prendre un bus et skier.

  • Chloé

    Merci beaucoup Chloé d'être venue nous rencontrer aujourd'hui. C'était génial d'apprendre à connaître une partie de ton parcours qu'on ne connaissait pas encore.

  • Alban

    C'est vrai qu'on se connaît plus professionnellement.

  • Chloé

    Et ce qui est trop bien, c'est qu'on va avoir l'occasion d'en parler une prochaine fois, de revenir sur l'expérience plus doula.

  • Lucie

    Merci d'être venue jusqu'à nous. Et on te recevra pour aborder d'autres thèmes, car tu as plus d'une corde à ton arc. Donc trop hâte de partager tout ça une prochaine fois. Et en attendant, on vous dit à bientôt chez nous.

  • Chloé

    Sous les aurores.

  • Lucie

    Si cet épisode vous a plu, pensez à nous laisser une note et un avis sur votre application d'écoute préférée.

  • Chloé

    Ou un commentaire sur YouTube, ça nous aide énormément à faire grandir le podcast.

  • Lucie

    Merci et à très vite pour le prochain épisode.

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Description

Dans cet épisode de Sous les Aurores, Lucie et Alban reçoivent Chloé, expatriée à Oslo depuis 2014, ancienne institutrice en jardin d’enfants et aujourd’hui doula et formatrice. Elle nous plonge dans l’univers des structures de petite enfance norvégiennes, où :

  • Les tout-petits sont encouragés à s’habiller et s’organiser seuls,

  • Les temps de jeu libre sont pensés comme moteur d’apprentissage,

  • Les repas et les siestes deviennent de véritables moments-calmes,

  • Le barnevern (protection de l’enfance) intervient de façon préventive et proactive (trop?) pour garantir le bien-être des enfants.


De ses débuts en tant qu’étudiante à ses remplacements en jardins d’enfants communaux, Chloé partage ses plus belles découvertes et les défis culturels qu’elle a dû relever. Un éclairage unique pour tous les parents, professionnels de l’enfance et curieux-se de la pédagogie scandinave.


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Transcription

  • Lucie

    Salut, c'est Lucie.

  • Alban

    Salut, c'est Alban.

  • Lucie

    Trentenaire et parent de deux petites filles.

  • Alban

    Bienvenue dans Sous les Aurores.

  • Lucie

    Le premier podcast réalisé par un couple de Français en Norvège.

  • Alban

    Sous les Aurores, c'est le podcast haut en couleur qui vous emmène vivre toutes les nuances de l'expatriation et de l'immigration en Norvège et bien au-delà.

  • Lucie

    Que vous soyez déjà expatrié, immigré, que vous rêviez de le devenir ou que vous soyez simplement curieux de découvrir d'autres façons de vivre, ce podcast est fait pour vous.

  • Alban

    Alors, mettez-vous à l'aise, servez-vous une bonne tasse de thé ou un verre de vin. et rejoignez-nous sous les aurores. Au menu, discussion sincère,

  • Lucie

    moment de rire et d'émotion,

  • Alban

    et surtout, beaucoup de belles découvertes.

  • Lucie

    Alors, bienvenue chez nous sur un nouvel épisode de Sous les aurores.

  • Alban

    Bonjour à tous et bienvenue dans un nouvel épisode de Sous les aurores. Aujourd'hui, une nouvelle invitée qui n'est une fois de plus pas complètement inconnu, car elle nous a suivi pour un événement important de la vie qui dure en général neuf mois, quand tout se passerait bien.

  • Lucie

    Alors d'abord, on va commencer par une petite présentation. Est-ce que tu pourrais nous dire comment tu t'appelles ? Depuis combien de temps tu vis en Norvège ? Dans quel domaine travailles-tu ? Et enfin, un culture-choc que tu as remarqué quand tu es arrivé en Norvège ou que tu continues de vivre au quotidien ?

  • Chloé

    Je m'appelle Chloé, ça fait dix ans que j'habite en Norvège maintenant, donc août 2014. Je suis arrivée comme étudiante en linguistique et pédagogie. J'ai travaillé comme institutrice, ensuite j'ai travaillé comme doula, je le fais encore aujourd'hui. Et je suis aussi masseuse, spécialisée du coup sur la santé de la femme, la santé hormonale, la fertilité, la grossesse, etc. Et aussi, j'ai une spécialisation en massage visage. Et maintenant, je suis en train d'ouvrir un centre de formation spécialisé. Donc, je suis retournée du côté enseignement. Maintenant, j'enseigne le massage. Pour le choc des cultures, ça ne m'a pas marquée en arrivant. Mais c'est quelque chose qui commence à vraiment être un peu plus compliqué pour moi. Donc, comme je suis arrivée en tant qu'étudiante, il y avait aussi un mélange de... d'autres étrangers beaucoup. Je parlais déjà un petit peu norvégien. Donc, ce n'était pas vraiment marqué à l'université. Mais maintenant, en tant que vrai adulte, passé 30 ans, c'est le manque de proximité avec les autres humains. Ça fait un an qu'on a déménagé. J'ai dix voisins de palier. Il n'y en a pas un qui dit bonjour. Ah oui.

  • Alban

    Oui. C'est vrai que c'est vraiment quelque chose qu'on retrouve et tu n'es certainement pas la seule à vivre ça.

  • Lucie

    Oui, mais c'est marrant parce que tu vois, il y a une invitée hier. qui nous a parlé de ce culture-choc, mais qui nous a dit qu'elle, elle adorait parce qu'elle prend ça comme « je garde mon espace, chacun garde son espace et on respecte l'espace de l'autre » . Donc c'est marrant de voir...

  • Alban

    Quel effet ça peut avoir sur nous ?

  • Chloé

    Oui, c'est vraiment très différent. Je comprends le marqueur culturel, mais pour moi... qui est toujours grandi en communauté proche des autres, même à Paris ou Paris proche, où quand même, de toute façon, tout le monde se dit bonjour dans la rue, même si tu ne les connais pas. Là, ça commence à être un petit peu...

  • Lucie

    J'avoue, les voisins, quand même, c'est...

  • Chloé

    Les voisins, c'est chaud. On a les enfants qui vont à l'école ensemble.

  • Lucie

    En plus, ils ont des enfants, c'est vrai que je trouve ça bizarre.

  • Alban

    Bon, un peu malaise, quoi.

  • Chloé

    Un peu malaise, oui. Mais comme il y a le marqueur culturel que je... connais, je ne le prends pas comme une forme de racisme, de respect ou ce genre de choses. Je sais que c'est vraiment juste une bulle individualiste et personnelle, mais ce n'est pas...

  • Alban

    Ça ne rend pas la chose plus facile parfois, mais complètement.

  • Lucie

    Tu peux nous dire un peu comment tu es arrivé en Norvège, pourquoi, qu'est-ce qui t'a amené ici ?

  • Chloé

    Le fruit du hasard. du coup, vous le savez peut-être pas mais j'ai fait une licence en lettres, langues culture et civilisation étrangères en Scandinave et en spécialisation norvégien donc j'avais des cours de norvégien à la fac à Paris trop drôle pourquoi c'est la question à la base de... À la base, tu vois, tu as 18 ans, ton bac, et tu te dis, qu'est-ce que je vais faire ? Donc moi, je voulais faire une école d'art. J'étais vraiment sûre que c'est ce que je voulais faire. Sauf que je n'avais pas préparé mon dossier. C'est sur admission, quand tu veux faire une école d'art à Paris, c'est... C'est un peu tendu, ils ne prennent pas n'importe qui. Donc j'étais un peu en retard sur le dossier d'admission, et puis toutes les personnes avec qui j'avais travaillé m'avaient dit « De toute manière, les écoles d'art, il faut être mûres, donc tu ne rentres pas directement après le bac. Il faut une petite expérience de la vie, il faut des choses. » Et mon frère, lui, m'a mis la pression en me disant « Écoute, moi j'ai redoublé pour aller où je voulais, donc on a un an d'écart, donc on était tous les deux au bac à cette année-là. » Et il m'a dit maintenant que je peux y aller et qu'on a le droit d'être boursier parce que justement, on est tous les deux étudiants. Tu ne vas pas rien faire. Tu t'inscris quelque part. Je m'en fiche, mais tu fais quelque chose. Donc, du coup, j'ai regardé le dossier admission post-bac, le FAC de l'ADP et j'ai vu à l'LCE norvégien. Je me suis dit, pourquoi pas ?

  • Alban

    Donc, à la base, tu t'es dit ça limite pour un ou deux ans jusqu'à rebasculer.

  • Chloé

    Tu t'es dit, en fait, si ça me plaît. tant mieux, si ça me plaît pas c'est pas grave et en fait c'était 18h de cours par semaine, enfin je m'engageais vraiment pas sur un truc énorme, je sortais d'une L spécialisation arts plastiques j'allais pas m'engager en géopolitique donc du coup j'avais jamais même le premier jour de la rentrée, même pendant l'été et tout, j'avais pas eu la curiosité d'écouter du norvégien ou de regarder la géographie, enfin voilà de base, pour eux Je savais qu'Oslo, c'était en Norvège.

  • Alban

    C'est déjà pas mal.

  • Chloé

    Je savais que c'était le dernier pays avant l'Angleterre. Mais du coup, j'ai vraiment été les mains dans les poches. Donc on était un petit groupe, on était 11 je crois sur ma promo. Il y avait donc mon compagnon, on s'est rencontrés à la rentrée. Lui aussi, il était le seul à avoir aucune relation avec la Norvège, vraiment de près ou de loin. Donc voilà, après la licence, on a fait un Erasmus ici et on est restés.

  • Alban

    Ah mais génial ! Trop bien ! Et ça a été directement sur Oslo l'Erasmus ?

  • Chloé

    Ouais, moi j'ai fait un essai raté. à ma deuxième année de licence à Christian Sand. Il y avait un accord Erasmus ouvert, mais en fait, c'était vraiment... Je pense qu'il a été fermé depuis, d'ailleurs, on en avait pas mal repéré. Depuis ton passage ? Le coordinateur, ouais. En fait, ils sont pas du tout... Donc quand tu fais un Erasmus, tu dois valider des crédits qui sont en rapport avec tes études. Et moi, j'avais accès à aucun cours de norvégien à Christian Sand, parce que, en fait, c'est... Les accords, c'était surtout pour les étudiants en commerce ou d'autres choses. Donc, j'avais accès quasiment qu'à des cours en anglais et pas du tout au cursus des Norvégiens eux-mêmes. Et puis, de toute façon, je n'avais pas le niveau. Je pouvais à peine me présenter. Donc, ça a été raté. Après, l'année d'après, mon copain, lui, a fait l'Erasmus à Oslo. Et ensuite, un an et demi après, on est revenu. Donc, moi, j'ai fait mon Erasmus pour le M1 ici.

  • Lucie

    Et du coup, c'est directement après l'Erasmus que vous vous êtes installée ?

  • Chloé

    Oui, en fait, pour moi, c'était vraiment la porte de sortie ou d'entrée d'une certaine manière, parce que je connaissais un peu le système norvégien. Et je savais qu'obtenir un percheur de numéros, donc le numéro d'identité, c'était super facile quand on était étudiante. Avoir un logement, être boursière, s'inclure dans la vie norvégienne à mon niveau, c'était vraiment la meilleure façon.

  • Alban

    Est-ce que tu penses que c'est toujours vrai aujourd'hui qu'en tant qu'étudiant, ça rend les démarches plus faciles peut-être ?

  • Chloé

    Oui, clairement. Surtout que moi j'avais un Erasmus d'un an, donc j'avais vraiment tout... En tant qu'Européen en tout cas, c'est très différent quand on est en dehors de l'Europe ou de l'Union Européenne. Pour moi, c'est vraiment la porte d'entrée la plus simple. Après, vous, je sais que c'est des cas différents, par exemple, parce que vous êtes arrivé avec du boulot.

  • Alban

    Oui, voilà.

  • Chloé

    Donc forcément, il y a l'entreprise qui fait la démarche, vous avez un soutien, il y a tout le monde qui vous explique, etc. Mais quand on est un petit peu plus à l'arrache ou qu'on n'a pas complètement fini nos études, s'inscrire à la fac, pour moi, c'est vraiment le meilleur truc à faire. Même à n'importe quel âge, en vrai, tu as... 30 ans et tu te dis, moi, je vais découvrir la Norvège. Tu te prends six mois, n'importe quel programme à la fac. Et du coup,

  • Lucie

    ça facilite les démarches.

  • Chloé

    Oui, t'es étudiant.

  • Lucie

    C'est génial. C'est un bon conseil. Au-delà des démarches facilitées, qu'est-ce qui vous a donné envie de rester à Oslo et en Norvège ?

  • Chloé

    La facilité. Tout, en fait. La vie, le cadre. Donc, nous, on vient tous les deux de banlieues parisiennes. Je ne sais pas, marcher dans les parcs. Enfin, juste le fait d'avoir le droit de marcher sur la pelouse d'un parc, c'était fou.

  • Lucie

    C'est exactement ce que je dis à Alban en étant parisienne, parce que lui, il avait peut-être plus accès aux pelouses dans les parcs.

  • Alban

    La ferme d'Himède.

  • Chloé

    L'une des premières fois que je suis venue, c'était les 200 ans de la Constitution pour la fête nationale. C'était un énorme truc. Et il y avait... des gens qui faisaient des barbecues portatifs sur la pelouse du parc du château. Et je me suis dit, waouh, la liberté !

  • Alban

    Excellent de se souvenir, parce qu'avant de vivre à Oslo, quand j'étais en Erasmus, moi en Finlande, on avait fait avec des amis un long week-end à Oslo, et on s'était retrouvés à Ekeberg, un grand, grand parc très, très connu d'Oslo. Et pareil, tout le monde sur la pelouse, avec ses barbecues à usage unique. Et j'avais trouvé ça incroyable.

  • Chloé

    Oui, c'est dingue. Les poubelles à recycler ce type de barbecue et tout, c'était vraiment... Pour moi, c'était fou. Et la proximité avec la nature, se déplacer partout à pied ou à vélo. Après, il faut avoir des jambes, quoi. C'est un peu vallonné. Mais ça, l'organisation autour de la vie, de manière générale. Je n'avais pas encore de famille à ce moment-là, du tout. mais de me rendre compte du fait que... que le travail, ce n'est pas la vie. Tu ne vis pas pour travailler du tout, en fait. C'est un accompagnement, il y a un espèce d'équilibre pour la plupart des gens qui est quand même extrêmement confortable. Et ça, c'est très inspirant. Moi, j'ai vu mes parents galérer, vraiment, depuis que je suis toute petite. Et du coup, ils nous ont toujours encouragés à faire un boulot qu'on aime, toujours. On leur a tout fait. Moi, je leur ai dit, je veux être tatoueuse. psychologue en prison...

  • Alban

    Juste à l'un de ces temps-là ? Non,

  • Chloé

    j'avais vraiment des objectifs professionnels un peu étranges, et à chaque fois ils étaient à fond quoi, mais vas-y, fais ça ! Parce que pour eux, il n'y avait pas d'épanouissement du tout dans leur travail, et c'est tout l'inverse qu'ils nous souhaitaient. Donc j'ai découvert qu'ici c'était quand même le quotidien de beaucoup de gens, et je me suis dit, c'est dingue !

  • Lucie

    Et à contrario, est-ce que tu as eu des difficultés au départ ou des choses qui ont été difficiles à adopter ?

  • Chloé

    Non. Non ? Pour moi, déjà, je parlais un petit peu norvégien. Pendant mon Erasmus, j'ai fait un semestre entier où j'avais 8 heures, 10 heures, 12 heures de norvégien avancé par semaine. Ouf ! Ah ouais, j'étais en master.

  • Alban

    Bah

  • Chloé

    à un moment. Donc, j'ai eu des cours de dialecte, des cours de prononciation. C'était assez passionnant. Et puis après, je suis rentrée dans le lecteur programme, c'est pour devenir prof. Donc, pas juste institutrice, mais avec des choses assez spécifiques et tout ça. Pour moi, la fac, ça a été... Après, pendant que j'étais étudiante en France, j'ai travaillé à l'Eau-Roi-Merlin pendant toutes mes années d'études. Donc comme je parlais un petit peu norvégien et que j'avais une expérience professionnelle, j'ai travaillé à Maxbo. J'ai été embauchée comme ça avec une poignée de main et un rendez-vous. Ça a été hyper facile. J'étais boursière, j'avais un logement étudiant, j'avais un nouveau mec. Enfin le fameux, mais on n'était pas encore ensemble. Ça s'est fait dans le même temps. Donc, nous, on découvrait plein de choses. En plus, on vivait une idylle.

  • Alban

    Vous alliez au même rythme.

  • Chloé

    À l'étranger, un autre rythme. C'était l'été, il fait jour tout le temps. Les gens sont hyper détendus. Il y a la rivière qui traverse Oslo. Non, je ne sais pas.

  • Lucie

    Les planètes étaient alignées. Ah ouais,

  • Chloé

    aucune difficulté.

  • Alban

    Génial.

  • Lucie

    Même quand l'hiver est arrivé, ou l'automne,

  • Chloé

    je dirais. Non, trop bien, j'adore la neige, j'adore l'hiver c'était un automne pas trop moisi genre une semaine de pluie et puis après ça s'est vite transformé Vraiment tout a été extrêmement facile. La liaison Paris-Oslo se fait très facilement. On avait des tarifs étudiants. Je prenais l'avion, je faisais l'aller-retour pour 70 euros, je crois, quelque chose comme ça. Donc quand tu as cours du mardi au jeudi, tu as quand même des longs week-ends. Après on ne roulait pas sur l'or, donc on ne se permettait pas de partir en week-end n'importe où, etc. Mais vraiment, c'était facile. Après, il y avait juste des produits d'hygiène. les oeufs blancs, trop bizarre ça faut s'habituer, c'est vrai s'habituer,

  • Alban

    c'est trop surprenant,

  • Chloé

    ouais, au début je voulais rien cuisiner avec des oeufs voilà, le lait alors ils ont fait du progrès mais il y a 10 ans, le lait tournait très vite donc ce genre de petits détails au début, voilà, il faut s'adapter un petit peu, mais pour même retrouver les choses que je cherchais, j'avais déjà le vocabulaire moins, donc j'avais vraiment pas de difficultés majeures.

  • Alban

    Mais ça c'est intéressant, tu parles un peu de faire ces courses. Lucie et moi, on a eu des expériences dans plusieurs pays et c'est vraiment un gros culture shock à chaque fois de savoir comment tu vas soit essayer de recuisiner un peu tes plats de base. Ça demande vraiment une traduction compliquée. Les agencements dans les rayons peuvent être différents, les noms, la présentation produit. Ou alors, si tu te sens d'essayer la culture locale, comment consommer local aussi et cuisiner ? Donc, ça fait partie de tout l'apprentissage quand tu arrives dans un pays. Oui,

  • Chloé

    et puis c'est très dur ici parce que la plupart des produits sont importés. On est sur des terres non cultivables deux tiers de l'année minimum. En même temps, encore une fois, ça a beaucoup évolué. Mais vraiment, il y a dix ans, je pense que quand je suis arrivée, c'était le début du changement, de diversifier le rayon yaourt, par exemple. Parce que moi, il y avait vraiment vanille, fruits des bois, nature, et c'est tout. Pas de textures différentes, pas de marques. Vraiment, c'était le monopole sur tous les produits. Et là, on trouve des danettes, je ne sais pas.

  • Lucie

    Et encore, moi, je trouve que c'est quand même réduit, toujours le choix. comparé à quand je vais en France, dans les rayons et tout. Mais du coup, j'imagine qu'il y a dix ans, c'était pire.

  • Chloé

    Ah ouais, ouais. Enfin, même l'autre marque, la Kumel, l'autre marque de produits laitiers, était un peu naissante, tu vois, sur les rayons. Tu ne les trouvais pas dans tous les distributeurs. C'était vraiment... En même temps, ça donne une simplicité, une facilité. Tu n'as pas le choix, en fait. Si tu veux du sucre, c'est celui-là. Si tu veux un yaourt, c'est celui-là. Tu fais avec.

  • Alban

    Et c'est vrai que c'est un peu à l'image de certains... certains aspects de la culture norvégienne. T'as un peu moins le choix, il n'y a plus cette notion de rentrer dans le moule. Après, il faut voir si tu es confortable avec ça ou pas, mais je trouve ça intéressant de le soulever parce que, comme tu le dis, on va faire mes courses avec moins de choix. Alors, pas du tout de choix pas bons, mais les choix qu'on trouve en France, je me dis, c'est n'importe quoi aussi.

  • Chloé

    Oui, la charge mentale de faire les courses en France, c'est fou. Quand on y va, on a un énorme Leclerc à côté de chez ma mère. Tu peux passer vraiment 1h30 à... à faire tes courses.

  • Alban

    C'est le cas maintenant, on évite, notamment en vacances ou quoi, les hypermarchés, c'est vraiment devenu la phobie, parce qu'on préfère avoir moins de choix, mais faire ça plus rapidement.

  • Chloé

    Ah ouais, clairement, je comprends trop les gens qui font leurs courses sur Internet en France.

  • Alban

    Ouais, voilà, c'est continuer.

  • Chloé

    Là, au moins, c'est vite fait, quoi. Mais c'est vrai que nous, on a habité surtout en centre-ville, il n'y a pas vraiment des caddies, c'est que des surfaces qui sont quand même assez réduites. Les gens font leurs courses plus ou moins au jour le jour, pour aujourd'hui, demain, ils vont à la boutique hyper régulièrement. Mais il n'y a jamais la queue.

  • Alban

    C'est rapide, voilà.

  • Chloé

    C'est rapide et tout ça. J'ai pas pris cette habitude-là. Je fais mes courses une fois par semaine.

  • Lucie

    Non, mais c'est très vrai ce que tu dis, parce que moi, quand je travaillais chez Mondelez, et qu'on vendait du chocolat notamment, forcément, on étudiait beaucoup les habitudes des consommateurs en Norvège. La caractéristique principale, c'est que ce sont des petits supermarchés et les Norvégiens vont faire leurs courses pratiquement tous les jours pour le soir même, tous les deux jours. Si tu cherches des petites courses,

  • Chloé

    surtout pour Oslo après.

  • Alban

    Voilà, c'est ça. Tu sors un peu, mais tu trouves un peu plus hyper. Il y a des vraiment gros hypermarchés comme Ops, je crois.

  • Chloé

    Ouais, Ops,

  • Alban

    ouais. Voilà, ça c'est vraiment énorme. On y est allé une fois, c'est toujours un malentendu. Mais sinon, c'est vrai que les supermarchés en dehors d'Oslo, c'est un peu plus style supermarché, mais je trouve que ça reste toujours humain. Il n'y a pas trop d'hyper en général.

  • Chloé

    Non, pas vraiment, mais en même temps, il n'y a pas... Comme il n'y a pas la diversité, les rayons ont moins besoin d'être grands.

  • Lucie

    Donc, tu es arrivée étudiante, tu faisais un job à côté étudiant. Et quand est-ce que tu as trouvé ton premier vrai job, entre guillemets ?

  • Chloé

    Moi, j'ai fait longtemps. Job, études. Ouais. Parce que je me suis inscrite à plein de types d'études différentes. Je restais longtemps étudiante, en fait. D'accord. Donc, quand j'ai compris que j'avais vraiment envie de travailler dans l'enseignement, j'ai arrêté Max Boo et j'ai trouvé un job de remplaçante en jardin d'enfants. Et en fait, ça s'appelle « til kalingsvikaar » . Donc, en fait, ils t'appellent quand ils ont besoin. Donc, tu as un espèce de contrat zéro. et je... tu es dispo, tu n'es pas dispo. À savoir que dans ce genre de structure, il y a forcément un adulte malade à l'année. Il manque tout le temps du personnel, parce qu'ils ont un nombre d'adultes à respecter par enfant. C'est un milieu où il y a des enfants de 1 à 6 ans, où les bactéries, les virus prolifèrent. Et donc, tu as forcément besoin de... De personnel en plus, en permanence. Donc, à partir du moment où, dans une structure, tu as compris les routines, tu connais le prénom des enfants, ton travail, il est bon, tu es apprécié, tu es quasiment sûr de travailler tous les jours.

  • Lucie

    D'accord, donc même si tu es remplaçante, au final, tu travailles souvent.

  • Alban

    Mais du coup, tu étais souvent dans le même jardin d'enfants ?

  • Chloé

    Ah ouais, j'ai bossé plusieurs années. J'ai eu trois expériences différentes en jardin d'enfants. un qui était une très mauvaise expérience qui a duré un mois et demi maximum. Et du coup, je suis restée trois ans et trois ans et demi.

  • Alban

    Donc après, les deux autres expériences se sont super bien passées.

  • Chloé

    C'était incroyable. J'ai adoré. Le premier dans lequel j'ai travaillé, c'était un communal qui avait beaucoup de classes. Trois étages, deux bâtiments. Vraiment un...

  • Alban

    Un gros jardin d'enfants.

  • Chloé

    Un gros. Donc eux, clairement, ils avaient tout le temps besoin de monde. Et moi, je suis tombée sur une classe où il y avait une fille en arrêt long, mais qui prolongeait par deux semaines, trois semaines. Moi, j'ai travaillé vraiment trois ans là-bas, je ne l'ai jamais vue. Et donc, j'ai récupéré ses fringues, ses chaussures. C'était pratique. Mais du coup, c'était vraiment une bonne expérience. Et puis moi, je découvrais vraiment la vision de comment... Les Norvégiens, ou la Norvège en tout cas, considèrent l'enfant à bord de la pédagogie, la petite enfance, même jusqu'à plus grand, parce qu'on a des enfants jusqu'à 6 ans sur ces structures. C'est un autre monde. Et en fait, en même temps, c'est quelque chose qui me parlait beaucoup parce que c'est le monde dans lequel moi j'ai grandi, avec ma mère qui avait vraiment ce type d'éducation-là, avec beaucoup de respect, par exemple. L'autorité dans ma famille n'existe pas. Enfin, l'autorité autoritaire. Bien sûr, après, il y a une hiérarchie. Il y a des choses qui sont imposées, etc. Bon, on ne revient pas, bien sûr, mais moi, j'ai vraiment grandi avec beaucoup de respect, à être considérée comme une personne, même si j'étais un enfant. Ce qui n'était pas le cas de toutes mes copines, par exemple. Et c'est vraiment ce que j'ai retrouvé ici. Et j'étais hyper heureuse. Je me sentais très, très à l'aise et j'apprenais énormément. Et je voyais tous ces enfants avec une... C'est une jeunesse dorée quand même. On sait que la Scandinavie est un peu avant-gardiste aussi sur ce genre de choses-là. Alors je ne connais pas les conditions à l'école de tous les enfants du monde, dans tous les pays, dans toutes les cultures, mais on est quand même extrêmement privilégiés. Et c'est aussi une des raisons qui nous poussent, nous, à... à laisser grandir nos enfants là et dans des structures aussi norvégiennes, sans se tourner sur des choses plus alternatives.

  • Lucie

    Et qu'est-ce qui t'a tout de suite sauté aux yeux dans les différences avec un jardin d'enfants français ?

  • Chloé

    Tout.

  • Alban

    La liste est longue.

  • Chloé

    La liste est extrêmement longue. En plus, ma mère travaille en petite enfance.

  • Alban

    D'accord.

  • Chloé

    Elle gère des crèches à l'émer, aux mères adjointes. Elle s'occupe de tout ce qui est la petite enfance. On a eu énormément de discussions sur les différences entre les crèches. Elle faisait surtout crèches et transitions maternelles. Et tout. L'organisation, la considération aussi, le nombre d'adultes par enfant. Quand c'est des enfants de 1 à 3 ans, on est sur 3 enfants pour 1 adulte. Déjà, rien que ça, c'est fou. C'est incroyable. Et puis après, ils sont un peu plus grands, etc. Et puis on peut monter jusqu'à 18 enfants maximum, si le groupe est assez âgé, donc entre 4 ans et demi et 6 ans. Là, tu vas avoir 18 enfants pour 3 personnes. Ce qui reste quand même assez luxueux, parce qu'après, on est loin des institutrices qui ont 25 enfants, une atsem. Ça fait une sacrée différence. Et en fait, chaque enfant apprend à attendre. à s'organiser, à évoluer avec d'autres enfants, à ne pas voler les jouets, ce genre de choses-là. Et en même temps, nous, on a le temps de leur montrer, on a le temps de leur expliquer. On passe beaucoup de temps dehors aussi, et on a le temps de les faire s'habiller. Ils apprennent à le faire tout seuls, et c'est OK. On peut passer une heure dans la garde-robe pour qu'ils mettent tous leurs habits, ou même juste une chaussure, et c'est OK. Maintenant,

  • Alban

    on comprend mieux.

  • Lucie

    C'est pour ça qu'elle n'a pas autant de temps le matin à s'habiller.

  • Alban

    Le soir, en ce moment, on est dans une phase, on va la chercher. C'est parti pour trois quarts d'heure. Je monte sur le banc, je saute et regarde moi. Et puis, je ne m'habille pas et je reste à l'école. C'est trop bien. Mais voilà, en fait, il y a vraiment le temps. C'est intéressant parce que nous, on n'a pas tous les codes non plus. En tant que parent français d'une petite fille qui est dans un système norvégien.

  • Chloé

    Le temps, c'est une énorme différence. Il n'y a pas de... Les repas sont timés. Les repas sont timés et ça c'est un problème que nous on rencontre vraiment au quotidien. Petite anecdote, ma fille a 6 ans, elle est à l'école maintenant, l'équivalent du CP. Ils ont 30 minutes pour manger, ils vont chercher leur boîte, ils ramènent leur boîte, ils mangent leur boîte, ils ferment leur boîte, ils se lavent les mains et il s'est passé 30 minutes. Elle n'a pas le temps de manger. Et même quand elle était, ça s'appelle le born-out à gueule, même quand elle y était, souvent on avait... Alors moi, elle était dans le même... dans lequel moi j'ai travaillé, mais bon après quand elle a commencé, j'ai arrêté et en fait, souvent j'avais des retours de mes anciens collègues qui me disaient, mais ta fille c'est une heure qu'il lui faut à table, qu'est-ce qui se passe ? Elle s'assoit et puis elle commence à discuter avec tout le monde, et je dis ouais mais ça...

  • Alban

    Le pire c'est qu'elle nous a sorti un petit verre de vin la dernière fois !

  • Chloé

    Non, mais on a toujours eu ce problème-là, parce que pour nous, le repas, c'est vraiment un moment social. Et on passe du temps en famille, vraiment. Et puis moi, tout le monde me dit, mais attends, quoi ? Tes enfants passent une heure à table ? Mais c'est possible ! Quand ? Bah oui, mes enfants passent une heure à table. On est assis ensemble, on discute, on se raconte nos journées, on se fait des blagues, on parle de demain, etc. Donc du coup, ma fille, elle n'associe pas du tout le moment du repas à « il faut manger pour donner de l'énergie à ton corps, pour survivre le reste de ta journée » . Donc là, c'est un peu compliqué.

  • Lucie

    D'ailleurs, c'est pareil pour les adultes au bureau. Ils mangent tous très rapidement, en 30 minutes, voire parfois devant les ordi si c'est des boulots en entreprise. Et c'est vrai que nous, en tant que Français, on est là, ben non, venez, on va se poser, on va discuter en même temps.

  • Chloé

    Et ça, pour nous aussi, c'était un choc pour moi. Quand on parlait des chocs de culture, alors Max Bouge commençait à 6h du matin, à 10h30, le téléphone sonnait, Chloé va en pause. Comment ça en pause ? Goûter ?

  • Alban

    Va en pause, petit déj. Ouais.

  • Chloé

    Pause-déjeuner ? Waouh ! Alors, j'avais 30 minutes, clairement, je prenais un petit déjeuner. Ça, pour moi, c'était trop bizarre. Sur les jardins d'enfants, étrange aussi. Parce qu'en fait, tout le monde est très... Enfin, t'imagines, tu travailles en pyjama, plus ou moins. T'as le temps tout le temps, t'es en chaussettes, tu joues au sol avec les enfants. Il n'y a pas non plus vraiment de hiérarchie, même au sein de la classe. Donc, il y a une structure. Il y a des pédagogues qui ont... des études spécifiques. Après, il y a des espèces d'ATSEM qui ont des études spécifiques, mais moins hautes. Et puis après, il y a les remplaçants, les assistants, etc. Mais bon, tout le monde est quand même largement au même niveau face aux enfants, en tout cas. Et l'ambiance est hyper chaleureuse, disons. Et avec beaucoup de proximité, aussi du contact, on caline beaucoup les enfants, etc. Et tu vas dans la salle repas, il y a un silence de plomb. Chacun mange son truc. Et ouais, mais en fait, alors quand tu travailles avec les petits, donc jusqu'à 3 ans, il y a la sieste. Donc t'as cette espèce de moment de calme dans ta journée. Mais quand t'es avec les 3-6 ans, qui ne s'arrêtent jamais, qui parlent tout le temps, qui se chamaillent, fille-garçon, garçon-garçon, fille-fille, joue au coiffeur avec moi, oui mon épée elle s'est cassée, fais-moi un avion, n'importe tout. Tout et n'importe quoi, on a énormément de jeux libres. Tu comprends en fait que, bon déjà, c'est des Norvégiens, ils ont besoin de leur bulle. Pas tout le monde, j'ai pas envie de mettre beaucoup trop d'étiquettes, mais comme on disait au début. Et ensuite, tu comprends que t'as besoin de ces 30 minutes de silence pendant ta journée.

  • Alban

    C'est comme un temps calme, en fait, le repas pour eux.

  • Chloé

    C'est ton propre temps calme. Et ça,

  • Lucie

    c'était toi forcément avec tes collègues à ce moment-là,

  • Chloé

    en tout cas pendant la pause repas. J'avais. Trop bizarre.

  • Lucie

    Et comment tu as été traitée en tant qu'employée ? Sur les structures communales, il y a un espèce de standard. À savoir qu'il y a une énorme majeure différence entre la France et la Norvège. Quand tu travailles dans le public, au niveau de l'enseignement en tout cas, tu es beaucoup mieux payée et tu as beaucoup plus d'avantages. Ah ok !

  • Alban

    Donc là, en Norvège, dans le public norvégien, mieux payée et plus d'avantages que dans le privé norvégien ?

  • Lucie

    Oui, dans l'enseignement en tout cas. Wow, ok. Clairement. Pour exemple... du coup on travaille 7h30 continue, donc c'est le forfait horaire norvégien notre pause déjeuner est comprise et payée, parce qu'on est obligé de rester sur la structure vu qu'il y a un nombre d'enfants par adulte, en cas d'incendie ou n'importe, donc ça c'est comme ça normalement partout et normalement sur toutes les structures que ce soit public ou privé, mais après il y a des différences, par exemple quand tu fais une heure supplémentaire donc une fois par mois il y a des réunions, ce genre de trucs, tu vas rester deux heures de plus où ils ont besoin d'un extra, une collègue malade, n'importe. Tu fais une heure supplémentaire. Déjà, elle était payée à 300%, je crois. C'était vraiment un truc énorme. Donc, elle est payée. Et en plus de ça, tu l'as en récup.

  • Alban

    Ah wow !

  • Lucie

    Tu peux mettre les deux. Et elle est payée et tu l'as en récup. Donc, ça, dans le privé, ce n'est pas comme ça.

  • Alban

    À toutes nos entreprises, si vous nous entendez, on est OK pour avoir les mêmes conditions. Je plaisante, mais en général, c'est vrai que selon le contrat qu'on a, il n'y a pas vraiment la notion de cadre, pas cadre, mais un peu indirectement. Et en général, les heures sup, c'est l'un ou l'autre. Soit on se les fait payer plus, soit on les récupère. Dans les grandes entreprises, en général, c'est ça le système.

  • Lucie

    Il y a beaucoup d'accords de branches. Donc vous, vous êtes tous les deux dans les branches ingénieurs. Donc vous êtes effectivement sur ce système-là. Après, ce n'est pas partout pareil. C'est un peu différent, mais oui. Après, en Norvège, par expérience, et donc du coup, pas sur le même secteur que le vôtre, mon conjoint est ingénieur aussi, et en fait, on remarque qu'on nous encourage vraiment à ne pas faire d'heures supérieures. Vraiment, ce n'est pas du tout bien vu. Un employé qui va faire plus d'heures, un patron qui va te dire, « Non, en fait, tu n'as pas fini ton dossier, tu restes. » Ce genre de choses-là, c'est très mal vu.

  • Chloé

    Et sur ce point, dernièrement, j'ai été représentante des employés dans mon entreprise. Et effectivement, quand il y avait des heures sup, les employés devaient justifier pourquoi ils avaient fait ces heures sup et devaient rendre des comptes au RH et à moi pour être sûre que c'était fait dans de bonnes conditions et pour de bonnes raisons. Oui,

  • Lucie

    et en fait, ça, ça fait partie vraiment du... C'est quelque chose d'intégrant. pour déjà le bien-être au travail. Et ensuite, comme je disais tout à l'heure, le boulot, ton métier, c'est un accompagnement de ta vie. Tu ne travailles pas pour ton métier. Tu ne vis pas pour ton boulot, en fait. Et donc, du coup, ça fait aussi partie du contrat social et du contrat de confiance et du contrat de travail à ne pas encourager les personnes à faire des heures sup. Parce que ça développe aussi plus facilement des environnements de travail un peu toxiques. Après, je n'ai pas énormément d'exemples, mais mes deux parents sont fonctionnaires, donc c'est légèrement différent. J'ai un ami en France qui a exactement le même statut que mon conjoint. Et lui, s'il part du boulot avant 18h30, c'est hyper mal vu.

  • Chloé

    Bien sûr.

  • Lucie

    Alors qu'il fait son travail, il s'organise, il prend des pauses déjeuner plus courtes. Enfin voilà, lui, il n'a rien à se reprocher, mais il est tout le temps montré du doigt. Il a de la pression, etc. Parce qu'il part trop tôt du boulot.

  • Alban

    Oui, rien que le volume horaire, le présentéisme, tout ça, c'est vraiment encore un sujet. Oui,

  • Lucie

    bien sûr. Et le fait que ça n'en soit pas un ici, c'est incroyable. De dire, je vais chercher les enfants, 15h c'est terminé. Par exemple, dans une entreprise dans laquelle mon conjoint a travaillé, il était interdit de programmer une réunion qui devait se finir après 15h.

  • Alban

    Ah mais oui.

  • Lucie

    Si tu as une réunion, c'est 13h max. Oui,

  • Alban

    j'adore. Il faudrait que tu me donnes le nom. Non, mais c'est vrai.

  • Lucie

    En tout cas, le vendredi, il y a des trucs religieux où tu ne touches pas au vendredi.

  • Alban

    Tout le monde part en hutte, en cabine, Ausha.

  • Lucie

    Quand tu es adulte et que tu as une vie de famille et tout ça, tu vas chercher tes enfants, c'est normal.

  • Chloé

    Comment font d'ailleurs les employés des Barnagues, des jardins d'enfants, parce que pour les chercher leurs propres enfants ?

  • Lucie

    Alors, on se repose sur le conjoint. Non, en fait, on a des... je ne sais pas comment ça s'appelle en français donc en fait soit tu as le premier service, le service du milieu donc quand tu es sur un roulement à 3 et le service du soir, donc du coup soit tu commences à 9h30 et tu finis à 17h grosso modo, soit tu commences à 7h ou 7h30 selon les structures et tu finis à 14h30 ou 15h et donc du coup dans ta semaine c'est quand même assez changeant parce que ça c'est tous les jours une fois premier, deuxième, troisième premier, deuxième, troisième, etc Moi j'ai travaillé dans des... des classes où après on était quatre. Même organisation. Et du coup, on essaye de s'arranger pour avoir... Déjà, souvent, on travaille proche de là où on habite. Après, je sais qu'il y a aussi quand même... Alors pour nous, non. Pour les personnes qui travaillent en physique tout le temps, je ne sais pas moi, les menuisiers, les caissiers, dans la vente directe, etc. Oui, c'est une autre organisation, mais je sais qu'il y a ce système aussi de roulement. Et puis après, par exemple, la maîtresse de ma fille, elle n'a pas de roulement. C'est 8h tous les matins. Et par contre, c'est elle qui va chercher son petit à l'école. Alors l'école en Norvège, soyez prêts quand ça va vous arriver. C'est 8h15, 13h15. Après, il y a le périscolaire, etc. Mais donc, du coup, elle, en tant que maîtresse, elle a forcément de l'administratif, préparer des choses, etc. Mais elle finit rarement après 15 heures. Donc, c'est systématiquement son conjoint qui dépose leur fils au jardin d'enfants. Et c'est moi, elle, qui récupère une organisation. Ça se trouve.

  • Alban

    J'adore que tu donnes les clés du fonctionnement du jardin d'enfants. Parce qu'en fait, il y a vraiment cette... Même si on n'a jamais eu d'enfants en France, On garde malgré tout des codes et des repères français, peut-être nos propres expériences, ou la famille, des cousins, ou que sais-je. Et ça nous aide, je trouve, à comprendre un peu. Parfois, on peut se poser des questions sans aller chercher à avoir les réponses. Sur, on a la crèche, enfin, Jordan enfant, on va voir des... Tiens, ce matin, c'est cette personne. Tiens, ce soir, c'est une autre personne. Mais c'est intéressant de voir quel est le derrière, le roulement, faire de la place aussi pour leur propre vie.

  • Chloé

    Bien sûr, et c'est important. Quand je vois, moi, je peux comparer, parce que ma sœur a travaillé en crèche à Paris.

  • Lucie

    Wow.

  • Chloé

    et en fait c'est pas les mêmes horaires elle commençait très souvent tôt et elle terminait très souvent tard parfois un peu moins tard mais quoi qu'il arrive c'était tard et un nombre d'enfants et pour le coup ils ont pas de remplaçant quand quelqu'un est absent parce qu'il y a des autorisations pour le coup en Norvège aussi si tu veux travailler

  • Lucie

    en jardin d'enfants ou avec des enfants, quoi qu'il arrive, même si c'est pour un remplacement, tu dois donner un extrait de casier judiciaire. Il y a des espèces de boîtes d'intérim spécialisées pour les remplaçants en jardin d'enfants et en temps périscolaire à l'école. Donc, eux s'occupent d'enquêter plus ou moins sur les personnes qu'ils vont envoyer, etc. Moi, je ne suis jamais passée par là. Je suis toujours passée directement par les structures. Mais après, tu as un espèce d'entretien. En Norvège, on est très... en tout cas professionnellement parlant, c'est très humain. Donc, ils vont regarder un peu ton CV, mais ils sont surtout intéressés à t'entendre parler, savoir d'où tu viens, surtout pour travailler avec les enfants.

  • Chloé

    On va vérifier que tu n'es pas un psychopathe caché.

  • Lucie

    J'ai fait un entretien, par exemple, d'embauche à l'école française d'Oslo. Et ils m'ont dit... Ils avaient un problème sur mon rapport à l'autorité, par exemple. Ils m'ont dit, en fait, ce n'est pas question que tu travailles avec nous. Enfin, je les intéressais beaucoup parce que j'ai un FLE, donc ça c'est très intéressant. Et en même temps, moi je parlais beaucoup. Qu'est-ce que c'est un FLE ? Un FLE, pardon, c'est des études spécifiques, ça s'appelle Français Langue Étrangère. Et en fait, normalement, si tu enseignes en structure francophone ou le français aux étrangers, ou ce genre de choses, rapport France-étranger, il faut normalement... avoir des études en FLE. Moi, j'ai une mention FLE sur ma licence, par exemple. Je fais un bicursus.

  • Alban

    Ce qui fait que normalement, tu es encore plus apte, on va dire, à apprendre le français à quelqu'un qui ne parle pas à la base.

  • Lucie

    Oui, d'une certaine manière. Grosse. Par exemple, il y a des personnes qui étudient le FLE en France de manière très poussée et qui vont travailler avec des entreprises et donner des cours de français aux personnes étrangères. Ça, ça se fait aussi. Mais du coup, quand même, la mention FLE est très appréciée sur les structures francophones à l'étranger, etc. Et vraiment, les questions qu'on m'a posées à l'entretien, déjà, il y avait une commission, ils étaient 11. Je me suis dit, franchement, ils exagèrent. Tu entrais dans cette salle et tu n'avais pas juste une personne ou deux, comme j'ai toujours eu. C'était vraiment, il y avait 11 personnes. Il y avait même des représentants de parents d'élèves, la comptable.

  • Alban

    Par exemple, Elon Musk.

  • Lucie

    Toute une délégation avec tous ces gens-là ont eu devant toi. Je me suis dit, moi, je vais en prendre un entretien. Je vais m'envocher les mains dans les poches. Et donc, les questions étaient vraiment très orientées par rapport au fait que, parce que j'avais l'air jeune, j'ai une voix fluette, ce genre de choses-là, ils disaient, tu vas te faire manger avec des gamins de 11 ans. Tu ne te rends pas compte ? J'ai toujours travaillé avec des enfants, je n'ai jamais eu de problème. Et en fait, il y avait cette espèce de choc culturel quand même. À la sortie de l'entretien, je me suis dit... De quoi qu'il arrive, je n'ai pas envie de travailler là. Le fait de me retrouver dans un système franco-français scolaire avec ce genre de structure brute et élitiste sur beaucoup de choses, après avoir connu la souplesse en Norvège, et notamment avec les enfants qui sont si jeunes. C'était un peu « waouh » , les entretiens d'embauche en Norvège. en tout cas de mon expérience extrêmement humain. Tu dis oui, alors et du coup, nous on aimerait bien expliquer ça aux enfants, comment tu ferais, ce genre de choses-là. Il y a un enfant qui joue avec l'eau, il en fout partout, il est trempé, c'est trempé partout. Les autres, ils arrivent, ils glissent. Qu'est-ce que tu fais ? Des mises en situation.

  • Chloé

    Pour voir comment tu vas,

  • Lucie

    Julienne. Qu'est-ce que tu fais ? La première réponse, c'est tu prends le temps. On va aller ensemble chercher du papier, essuyer, fermer le robinet. Ensemble, on va aller chercher du change, changer les chaussettes des autres qu'on glissait.

  • Alban

    On dit souvent qu'il n'y a pas vraiment d'apprentissage au jardin d'enfants norvégien. Ça peut être un des reproches de ceux qui aiment l'éducation plus française. Toi, est-ce que tu dirais que, notamment via l'exemple que tu donnes d'entretien, est-ce que tu trouves que la première des choses qu'on apprend, c'est qu'est-ce qu'on aime faire et l'autonomie, par exemple ?

  • Lucie

    Je dirais que c'est faux pour les personnes qui pensent qu'il n'y a pas d'apprentissage en jardin d'enfants. Déjà, les enfants sont quand même au jardin d'enfants jusqu'à 6 ans. C'est une énorme période de leur vie. C'est très personnel, mais j'aime beaucoup qu'on mélange les âges. Souvent, c'est 1 à 3 ans et 3 à 6 ans. Ça autonomise les plus petits qui ont envie de faire comme les grands et ça sensibilise les grands à aider les plus petits. À aussi prendre le temps, à être plus respectueux aussi sur le fait que lui, il ne sait pas. Parce que du coup, personne n'est montré du doigt parce qu'il est dans l'incapacité de tartiner son pain tout seul. Ou de mettre ses chaussures tout seul. En place de le montrer, tu le dois, et de dire, il n'a pas appris à faire ses lacets, il ne sait pas mettre ses chaussures, etc. On va en fait encourager les plus grands, ou les autres, à aider ceux plus petits. Et en fait, ça part aussi du principe qu'on a le temps, parce que encore une fois, je pense qu'il n'y a pas vraiment de comparaison réalistique possible, ou réaliste, pardon, avec la France. Si tu vas dehors et que tu as 15 minutes, parce que c'est les 15 minutes de récré, et que déjà, tu as tes chaussures sur toi tout le temps. un peu différent. Il faut que tu mettes tes chaussures. Tu n'as pas le temps de passer 15 minutes à mettre tes chaussures, ou à essayer de le faire tout seul, ou à essayer de faire en sorte qu'il y ait un autre enfant qui va l'aider. Parce que nous, on est des adultes. C'est qu'à tard, un enfant de 4 ans qui aide un enfant de 2 ans à mettre des chaussures.

  • Alban

    Il faut avoir du temps dans soi, c'est clair.

  • Lucie

    Oui, du temps et de la patience. Il ne faut pas du tout être dans l'urgence de « attends, c'est bon, c'est bon, hop là, c'est fait, c'est fait. Tiens, je vais te remonter ton zip, on va mettre le bonnet, les moufles sont à l'envers, les chaussures... Les enfants qui ont des chaussures à l'envers, c'est OK, ils l'ont fait tout seuls, ils sont trop fiers, on leur laisse leurs chaussures à l'envers. Ça, c'est vraiment... Moi, je pense que ça donne aussi beaucoup plus de respect et de patience aux autres envers les autres. Ça inculque un peu plus de tolérance, ne serait-ce que juste dans la structure, dans le fait que personne n'est montré du doigt parce qu'il ne peut pas. Et à l'inverse, personne n'est montré du doigt parce qu'il peut. Et en fait, on ne va pas spécifiquement, en tout cas à cet âge-là, encourager les enfants qui sont bons ou naturellement bons. à exceller. On a quand même un espèce de truc de groupe. Et là, nous, on le voit beaucoup avec ma fille qui est sur le CP. Elle est plus petite que les autres. Elle est née en fin d'année. Elle a beaucoup d'enfants de sa classe qui ont bientôt 7 ans et elle en a encore 5. C'est la plus petite. Elle a toujours été la plus petite. Mais elle est très responsable. Elle est très posée. Elle adore les trucs intellectuels. Elle lit, elle écrit. Et en fait, elle a fait ça toute seule. Parce que, bien sûr, ils ne l'ont pas fait au jardin d'enfants. Et bien sûr, ils ne le font pas au CP.

  • Chloé

    Ils ne le font pas au CP ?

  • Lucie

    Non, on apprend à l'alphabet, tranquille.

  • Chloé

    Mais à partir de quand ils apprennent à écrire et lire ?

  • Lucie

    Ah là là ! C'est 8-9 ans. En fait, le truc, c'est qu'on va favoriser les périodes sensibles. On va favoriser l'autonomie. Donc là, par exemple, dans sa classe, il y a beaucoup d'enfants qui ne savent ni lire ni écrire. Ce qu'ils demandaient, c'est qu'ils sachent écrire leur prénom. Normalement, tu te dis qu'un enfant de 6 ans, 6 ans et demi, il sait écrire son prénom. A priori, ça va. Et donc, du coup, c'est vraiment ça qui est demandé. C'est le mot qui nous a été passé avant la rentrée. Reconnaître ses affaires, être autonome sur s'habiller, se déshabiller, aller aux toilettes. et savoir écrire son prénom. Pour le moment, elle ne s'ennuie pas. Mais nous, on a beaucoup de gens qui nous disent « Attention, qu'elle ne s'ennuie pas. » Parce que, en fait, c'est assez l'inverse. En France, on va avoir le groupe de tête qui va être encouragé à être tiré vers le haut. Le groupe du milieu qui va être encouragé à suivre ce groupe de tête. Et puis, les moins bons qui vont malheureusement rester dans le fond la plupart du temps parce qu'ils ne sont pas assez bons. Ils ne suivent pas le rythme, ils ont des difficultés scolaires, ce genre de choses-là. Si tu ne rentres pas dans le moule du mieux, tu vas être un petit peu laissé sur le côté, grosso modo. En tout cas, moi, c'est ce que j'ai vécu. J'imagine qu'on a à peu près le même âge. Vous êtes sur l'expérience scolaire. En Norvège, ça va être l'inverse. Il faut laisser personne derrière. Donc, quitte à baisser le niveau général du groupe moyen, parce que tu as toujours deux, trois têtes, trois, quatre qui se perdent en route, et une dizaine, quinzaine d'enfants qui sont quand même... plus ou moins homogène. Et en fait, là, quitte à baisser le niveau général pour que ceux qui sont derrière ne soient pas derrière. En fait, les Norvégiens me disent « Quoi ? Ta fille lit et écrit ? » Ils sont vraiment là-dedans. Mais non, c'est oui des Français, mais aussi beaucoup d'étrangers. Nous, on a dans la même classe de ma fille, il y a un petit garçon qui est moitié sud-africain, moitié... un pays de l'Est, je ne sais plus lequel, et ses parents font en sorte qu'il ait des cours privés. En plus, lui, il a des leçons en plus, etc. Parce qu'il ne croit pas au système norvégien. Alors que moi, qui ai travaillé avec des Norvégiens toute ma vie, au final, ça fait dix ans que je travaille avec des Norvégiens, en tant qu'adulte, je n'ai pas la sensation qu'ils sont plus bêtes que moi. Qui ai été à l'école avec des bons résultats.

  • Chloé

    Parce que moi, c'est marrant qu'on parle de ce point. Quand j'ai visité un jardin d'enfants Pour notre fille, j'avais posé la question quels devaient être les acquis pour après passer au CP. Et elle m'avait répondu ce que tu disais. Elle s'est posée le problème. Il faut qu'elle sache écrire son prénom. J'avais dit c'est tout. Elle me dit oui. Je dis ok. Et donc j'étais revenue un peu inquiète. J'en fais part à Alban et je lui dis franchement, je ne sais pas. Est-ce qu'il ne faudrait pas plutôt la mettre à l'école française et tout ? Et puis Alban m'avait dit... Mais Lucie, tous les Norvégiens que tu connais, ils savent très bien lire et écrire. Donc, ce n'est pas l'importance qu'ils sachent le faire à 3 ans ou à 8 ans.

  • Lucie

    Une petite différence sur la structure de la langue aussi. Parce que, par exemple, on prononce... plutôt mon approche linguiste qui va intervenir, c'est-à-dire que le français, c'est une langue quand même intrinsèquement plus complexe à apprendre que le norvégien, dans le sens où la moitié des lettres, des mots tombent. Je ne les prononce pas. Et on le voit chez les enfants francophones qui apprennent le norvégien. Ma fille n'a jamais mélangé le français et le norvégien. Jamais. Alors que mon fils, lui, c'est un parfait mélange. J'utilise un mot ici, là. Il s'en fout complètement. Mais alors, elle, jamais. Par contre, elle était... Parce qu'en fait, les langues, c'est des maths. Quand même. Donc, elle, elle était quand même hyper perturbée, même à deux ans, sur le fait que... pluriel en français ne se prononce pas. Et ça, c'était vraiment difficile pour elle. Et du coup, en fait, elle la collait, le pluriel norvégien au mot français. Et j'imagine que vous allez le remarquer assez rapidement.

  • Alban

    Je pense que cet épisode est déjà passé, mais il me semble, maintenant que tu le dis, que ça nous est arrivé.

  • Lucie

    Donc,

  • Chloé

    elle mettait une structure norvégienne, mais avec des mots français.

  • Alban

    Aussi.

  • Lucie

    Tu finis une phrase avec.

  • Alban

    Typique.

  • Lucie

    même moi je le fais je me rends compte des fois que je me dis mais oula je ne parle plus bien français mais en fait ça tu vois il y a un truc où le cerveau il a quand même besoin d'avoir des repères etc et en fait le français c'est une langue qui est extrêmement réglée donc je comprends qu'on justifie d'apprendre vraiment le côté systématique de la langue un peu plus tôt Oui.

  • Chloé

    Pour le français.

  • Lucie

    Parce que c'est quand même beaucoup moins phonétique. Le norvégien, qui est une langue qui reste extrêmement simple à apprendre et à maîtriser. Donc voilà, il y a des mots bizarres, il faut apprendre le truc à plus.

  • Alban

    Il y a quand même des cas qu'on prononce « che » . Je dis ça, je dis rien, mais bon,

  • Lucie

    quand même ! Ça dépend de l'environnement linguistique. Mais en fait, oui, il y a deux, trois prononciations un peu étranges, mais c'est une langue qui est beaucoup plus sensible. Oui, genre tu sens plus la langue. Et puis, en fait, tu es un Norvégien, tu grandis avec tes parents qui ont un dialecte d'ici, un dialecte de là. Parce qu'en même temps, on est plus libre en Norvège. La langue est extrêmement plus libre en France, où on est encore extrêmement académique, super strict sur... Tu envoies un mail administratif.

  • Alban

    Oui, il y a les formules. Je vous prie de bien agréer. Mais ça, ça...

  • Lucie

    Voilà, c'est ce genre de choses où tu vas devoir t'en tenir quand même à des formules, à un vocabulaire soutenu, ou même une prononciation, parce que tu es en entretien d'embauche ou parce que tu es au café avec un copain. C'est quand même différent. On ne retrouve pas beaucoup ça en Norvège. Et puis, chacun est libre de sa propre langue.

  • Alban

    Ta fille, elle a l'air, on va dire, en avance sur le système norvégien. Est-ce que tu l'as aidée avec ça ? Est-ce que c'est elle vraiment qui s'est intéressée ? Et du coup, tu l'as soutenue, on va dire, plus qu'encouragée ? Comment tu vois ça ?

  • Lucie

    C'est que elle. C'est que elle. Oui, parce que moi, j'ai été profondément trempée dans la société norvégienne, en tout cas au niveau de la pédagogie, de la petite enfance, des apprentissages et du reste. On essaye bien sûr de respecter ces périodes sensibles. Voilà si on voit qu'elle est. extrêmement intéressée par ça. On va essayer de lui trouver deux, trois trucs qui ont rapport, etc. Par exemple, elle a appris à sauter à pieds joints, à deux ans passés. Elle a regardé les autres sauter pendant des mois et des mois. Elle n'aimait pas aller jouer dehors. Elle n'est pas norvégienne sur ça, par exemple. Et en fait, elle a développé des capacités moteurs. Donc, on a la motricité fine et les capacités moteurs. Donc, elle a... motricité fine, ouais, elle attrapait des cheveux par terre en petites pinces comme ça à 4 mois mais bon, voilà, marcher, sauter, grimper faire tout ce genre de motricité un petit peu plus avancée avec le corps c'est venu super tard par contre intellectuellement, ça Ausha donc elle est très différente sur ça elle adore faire les trucs calmes posés donc moi j'ai pas la sensation qu'elle soit en avance et ça je suis très apaisée avec ça et je suis pas trop angoissée. Donc oui, forcément, elle, par exemple, elle est le profil type d'une enfant brillante qui réussirait à son âge, dans le système français.

  • Alban

    Le bon profil, on va dire. L'inverse.

  • Lucie

    Lui, il est comme un poisson dans l'eau sur le système norvégien. Pour rien au monde. On essaierait de l'enlever de là. Mais elle, on s'est posé la question. Elle déteste. Elle adore l'école, bien sûr. Mais il y a trop de temps libre, à son goût.

  • Alban

    De temps libre dans l'école norvégienne ? Oui,

  • Lucie

    parce qu'il faut savoir qu'ils sont à l'école de 8h15 à 15h15. Mais ils ont une pause déjeuner de 30 minutes. Ils ne rentrent dans l'école qu'à partir de 9h et quelques. Donc la première heure, ils sont dehors. Et ils ont aussi deux pauses entre. et pendant la classe, ils peuvent aussi avoir du temps libre où ils vont sur l'activité. Donc en fait, souvent dans les classes, c'est organisé par, alors ça je ne sais pas le dire en français, par espaces dédiés à un type de choses. Donc par exemple, sur les jardins d'enfants, tu vas avoir l'espace construction, où tu vas trouver des Legos, des Kaplas, ce genre de choses. Tu vas avoir l'espace livre et temps calme. Tu vas avoir l'espace jeu de rôle, où du coup tu as des poupées, une cuisine, ce genre de choses. En fait, les espaces, ils sont quand même construits et séparés de manière à ce que l'enfant... puisse s'intéresser et se construire avec ce qui lui l'intéresse. Et en fait, c'est là que l'apprentissage se fait par le jeu. Et c'est énorme. Et aussi, les enfants nous donnent énormément d'informations par rapport à ce qui se passe chez eux. Nous, on est formés aussi, en tout cas en jardin d'enfants, à jouer énormément et encourager les enfants à faire les jeux de rôle de la maison pour détecter s'il y a, par exemple, des enfants qui sont dans des foyers violents ou il y a certaines choses qui ne sont pas respectées, des choses sur les habitudes alimentaires. Et en fait, c'est une manière aussi de nous, de regarder l'enfant et d'essayer de pouvoir lui venir en aide. C'est aussi une manière d'être intrusif dans la vie d'un foyer. Alors ça, moi, c'est quelque chose qui me dérange un peu plus parce que du coup... Oui, on prend énormément d'informations aux enfants. Donc oui, on sait beaucoup de choses de ce qui se passe chez eux. Après, c'est des enfants et il y a des âges. Il y a des âges où il y a la fantaisie qui est très, très développée et où du coup, une parole sur deux, tu sais qu'il faut le prendre vraiment avec des pincettes. Mais en tout cas, vraiment chez les tout-petits, eux vont vraiment reproduire leur quotidien. Ils n'ont pas encore assez de fantaisie ou d'imagination pour faire d'autres choses. Donc quand tu vois une petite fille qui traite super bien sa poupée, qui l'emmène bien au dodo, qui lui tient la main pour qu'elle s'endorme, Tu dis, ça, c'est ce qui se passe chez elles. Et à contrario, des enfants qui vont... Alors, on ne parle pas des enfants qui jettent les poupées par terre. La colère, ça existe. Ça,

  • Alban

    on a carrément droit.

  • Lucie

    Après, on ne catégorise pas. Mais ça nous permet vraiment d'enquêter quand même.

  • Chloé

    Tu as eu un cas où tu as repéré ?

  • Lucie

    Alors, moi, j'ai eu une classe très difficile. Et c'est ce qui m'avait fait arrêter d'ailleurs cette structure-là.

  • Alban

    Est-ce que c'était ta toute première expérience qui a duré un mois ? Non,

  • Lucie

    pas du tout. Alors, je vais essayer de faire rapidement. J'ai donc travaillé à remplacer une personne pendant... plus d'un an et demi, quasiment deux ans, où en fait finalement j'avais pris sa place. Donc c'était ma classe et c'était des tout petits. Donc là, moi j'étais très bien, c'était super et tout ça. Mais ça restait que je n'avais pas encore de CDI. Et là, en fait, je finissais mes études ou en tout cas, là, je n'allais pas continuer sur des études et j'avais envie vraiment d'avoir un CDI pour diverses raisons, même si en fait, dans les fêtes, c'est la même condition en Norvège. en tout cas sur ce genre de choses. Donc j'ai dû passer un entretien parce qu'en fait, par les structures communales, tu dois envoyer ton CV, tu dois envoyer ce dossier-là sur une plateforme qui est traitée au niveau communal et ensuite ils sélectionnent des dossiers qu'ils envoient au RH ou aux directrices, etc., qui ensuite te convoquent en entretien. Donc elles peuvent pas dire, moi j'ai un dossier à proposer en entretien. T'es obligé de passer de toute façon par l'utri sélectif avant de la communiquer. Donc j'ai envoyé ma candidature, j'ai reçu le fait que j'allais être reçue en entretien, etc. Et j'ai passé un vrai entretien d'embauche. Alors que ça faisait deux ans que je travaillais avec eux. Et en fait, il y avait 479 personnes qui avaient postulé, je crois, entre quand même. Ah oui. Énorme. Et donc j'ai été prise. Wow. Et donc ils m'ont proposé une place dans une classe de 3-6 ans. Choc. Pour moi, ça a été un choc.

  • Alban

    Parce qu'avant, tu étais chez les tout-petits ?

  • Lucie

    Moi, j'étais chez les petits. Il y avait la sieste, il y avait l'apprentissage de la langue, parce que moi, ça ne faisait pas si longtemps non plus, ça faisait peut-être deux ans que j'étais en Orveille. Et en fait, les 4-5 ans qui parlent en permanence, et en plus, ils inventent plein d'histoires. Vraiment, j'avais la tête, la salle de pause, mais je l'ai savourée en silence. Parce que du coup, en plus, c'est en norvégien. dur. Il commençait à avoir des dialectes à cet âge-là, déjà, selon les parents et tout. Et puis moi, j'étais vraiment... Je comprenais pas qu'il y avait une licorne sur un nuage, qu'il avait été chercher un seau magique et tout ça. Enfin, tu vois, c'est du vocabulaire que t'as pas en tant qu'étranger. T'as pas grandi ici, t'as pas les références. Quand on me parlait de Cap-Tel-Sabeltan, c'est vraiment en train de... de commencer à découvrir la culture norvégienne, en tout cas des petits. Et en fait, cette classe-là était vraiment particulière parce qu'on n'avait pas de « pedleded » . En fait, c'était une personne qui était sur un remplacement long. C'était une personne qui était en fait « barn-o-barn » , donc assistante sociale. La Norvège et la culture des assistantes sociales, j'imagine que vous le réaborderez sûrement plus tard avec d'autres personnes, mais c'est un gros, vaste sujet. Et en fait, elle, c'était vraiment ça, son boulot. Elle avait avant été assistante sociale pendant plusieurs années. Et là, elle faisait ce remplacement. Et en fait, on s'était retrouvés avec tous les cas sociaux qui étaient dans cette classe. Donc, elle, elle passait son temps à suivre des dossiers plutôt que de faire la tâche pédagogique, coordination avec les parents, etc. Enfin, elle faisait la coordination, mais avec les enfants à dossier, en fait. Et donc, du coup, nous, enfin moi, en tout cas, j'ai été énormément sensibilisée à ça aussi. J'ai été beaucoup formée, j'ai eu beaucoup de cours en extra pour vraiment savoir comment me comporter avec les parents. Parce que des fois, il y a des enquêtes sur leurs enfants et sur eux, et ils ne sont pas encore au courant. Mais des fois, légalement, il faut qu'ils soient au courant de quelque chose quand même. Qu'est-ce que tu peux dire ? Qu'est-ce que tu ne peux pas dire ? L'attitude que tu as, comment tu vas devoir noter tout ce que l'enfant dit, ce genre de choses. Ça, ça a été très dur pour moi et très lourd. et de me rendre compte. compte aussi à quel point on est attentif aux enfants, mais pas qu'eux, et à quel point on ferait tout pour le bien-être d'un enfant parce qu'on juge que ça, c'est limite. Moi, ça m'a posé quand même quelques...

  • Chloé

    Que tu trouvais parfois que ça allait trop loin, peut-être ?

  • Lucie

    Oui, je trouvais parfois que ça allait trop loin. Après, moi, en tant qu'étrangère, j'ai toujours entendu des histoires sur les injustices des barnevernes, en fait, en Norvège, sur... Oui, on m'a pris mon bébé de deux mois parce que j'étais sous antidépresseur, ce genre d'histoire. J'avais cette espèce de spectre. Alors oui, on avait des enfants qui étaient dans des situations terribles, clairement, dans ma classe. C'était vraiment très difficile. Il y avait des choses dont moi-même, je n'étais pas au courant. Par exemple, il y avait certains enfants, il n'y a qu'une seule personne qui était autorisée à les accompagner aux toilettes ou à leur changer la couche. Et là, tu fais, c'est dur quand même. Parce que moi, j'aurais, par exemple, adoré être infirmière puéricultrice, par exemple. vraiment travailler avec des enfants malades, mais ma sensibilité m'en empêche. Et en fait, de me retrouver là dans une classe avec que des enfants en difficulté dans leur foyer, parce qu'après, en fait, à chaque fois, du coup, comme elle était super calée, elle traitait super bien avec les parents, elle traitait super bien avec la police, avec les assistantes sociales, avec toute la coordination et le reste. Et ça, je trouvais que c'était un peu mal fait aussi, personnellement. Je l'aurais dit, d'ailleurs. Je l'aurais dit.

  • Alban

    Oui, répartir un peu.

  • Lucie

    c'est trop en fait même pour eux d'avoir que des copains qui font face à des difficultés alors là ils le voient pas vraiment t'as quand même ce truc de moule où tous les enfants sont égaux où tout va être pareil alors oui des fois il y a machin qui partait avec tel adulte parce qu'il devait aller à la police ce genre de choses mais ça non les enfants ils le voient pas ils sont petits Merci. Il faut savoir que du coup, nous, on avait une classe de 18 enfants. Et en fait, il y en avait peut-être une dizaine qui avaient des dossiers de progrès.

  • Alban

    Moi aussi, en tant qu'étrangère, on m'a beaucoup parlé de cette protection de l'enfance qui est très proactive. Et parfois, ça fait peur. Donc, je me dis, oh là là, parfois, je la presse pour qu'elle s'habille et tout. Est-ce que ça, ils vont prendre ça comme remarque ? Ça fait peur. Est-ce que c'est vraiment des cas extrêmes dont tu parles ? en mode violence ? Ou est-ce que parfois, ça peut être aussi ce que je considérais des petits signaux ?

  • Lucie

    On a eu tout et rien. On avait des cas très extrêmes. On avait un enfant qui allait être placé, des choses comme ça. Après, il y avait, non, des soupçons, des suspicions, des on n'est pas sûr, de la négligence.

  • Chloé

    Ah, aussi.

  • Lucie

    Oui. ils font hyper attention à la négligence et moi ça j'en suis consciente, par exemple ma fille elle aime pas s'habiller, donc là c'est le début de l'hiver il fait à peu près zéro elle aurait besoin quand même de mettre une vraie combinaison l'équipement d'hiver et elle veut pas mettre des chaussures qui sont rembourrées parce que ses pieds sont serrés dedans et elle est hyper sensible au contact et tous les matins on se bat pour lui dire non, il faut que tu aies des chaussures qui tiennent chaud, qui isolent du sol, etc. Il faut savoir que dans son école et dans beaucoup d'écoles à Oslo, il y a deux jours par semaine qui sont entièrement à l'extérieur. Ils ne rentrent pas dans l'école,

  • Alban

    même au CP.

  • Chloé

    À partir du CP, parce que nous c'est un jour, tu as le turdag.

  • Lucie

    Oui, en jardin d'enfant, tu as une journée à l'extérieur. Chez les petits, c'est différent. On rentre avant 11h30 parce qu'après, il y a la sieste et tout. Mais ils mangent dehors, oui. À l'école, c'est deux jours par semaine sans aucune exception. S'il fait moins que moins 10, on raccourcit la journée. Mais sinon... On a eu quelques déluges quand même, là, en début de saison, où il pleuvait vraiment extrêmement, etc. Ils passaient six heures par jour dehors dans un bar. Et ça s'appelle l'école à l'extérieur. Ça ne s'appelle plus une sortie. Ça s'appelle on fait l'école. Donc, ils sont censés apprendre des choses, ramasser, apprendre à compter de manière différente, etc. Il y a beaucoup d'enfants qui aiment. Ma fille déteste. Et quand elle a appris qu'à l'école française, c'était quasiment pas de sortie, elle a quand même hésité. Et en fait, sur ce côté négligence, par exemple, nous, on a du mal à lui faire porter des chaussures chaudes. Et on n'a pas peur, mais on a quand même une crainte de se dire...

  • Chloé

    Il pourrait relever ça.

  • Lucie

    C'est relevé, c'est sûr.

  • Chloé

    Ah, c'est relevé, c'est sûr.

  • Lucie

    Oui, oui. Mais tu vois, de se dire, en fait, c'est mal vu. Oui, oui. Donc, on essaye et on est un peu... C'est vrai qu'on est quand même tout le temps dernière minute.

  • Chloé

    Là, je fais une petite pause parce que je connais Lucia en train de se dire, est-ce que j'ai mis la chaussure sous couche ce matin ? Est-ce que j'ai mis les gants ? Est-ce que j'ai doublé les gants ? Est-ce que j'ai mis les chaussures ?

  • Alban

    Non, mais c'est clair, je vais y faire attention.

  • Chloé

    Non, mais c'est vrai que c'est inquiétant un peu ces histoires de, comme tu dis, l'aide sociale, proactive, mais trop.

  • Lucie

    Oui, la protection de l'enfance.

  • Chloé

    Protection de l'enfance, voilà, qui, de manière générale, nous, quand on devait présenter comme ça notre arrivée, en gros, un peu scandale. En France, on va attendre qu'il se passe quelque chose de mal pour placer les enfants. Éventuellement, tu as raison, c'est même en retard ou voir trop. En Norvège, on ne va pas attendre que quelque chose de grave se passe.

  • Lucie

    C'est un peu l'inverse de la médecine, par exemple. En France, on va être un peu plus prévention. Tu veux dire, je ne me sens pas top en ce moment. Prévention. Être sûre qu'il n'y a rien de grave qui se trame, ou quelque chose de ci, de ça, etc. En Norvège, c'est l'inverse. On attend que tu aies tous les symptômes d'un truc pour te dire, ok, en fait, t'es malade, on va s'occuper de toi. À ce niveau-là, c'est l'inverse. En Norvège, on fait énormément de prévention sur les enfants. Je trouve que c'est bien, mais c'est vrai quand même que nous, en tant qu'étrangers, et avec tout ce qu'on entend, ça peut faire un peu peur.

  • Alban

    Parce qu'on n'a pas tous les codes sociaux. La première année de ma fille, vu qu'elle était de décembre, elle n'avait pas de crèche tout au début. Et là, quand je reprenais ses affaires la première année pour ma seconde fille, je disais à Alban, mais on n'avait pas de laine pour elle au moment de l'hiver. Et je me dis, mais maintenant, si un jardin d'enfants avait vu que notre fille venait sans laine tout l'hiver, ils auraient peut-être relevé ça.

  • Lucie

    En fait, nous non plus, on n'a pas de laine. Ils ont du mal. Mais oui,

  • Chloé

    il y a tellement un lobby dans la culture de la laine. Je jure que par ça.

  • Lucie

    je sais mais en fait oui ça tient chaud oui non c'est vrai que c'est son tête bon on va parler de ma fille du coup c'est le meilleur exemple c'est plus souple elle déteste avoir deux couches fines en pleurel tu vois genre deux pantalons tout ça c'est pop et je la comprends moi deux pantalons mais jamais tu me verras avec deux pantalons ou un collant mais moi c'est trop drôle moi je suis comme ça et en fait le truc c'est que moi j'ai travaillé là et il fait 25 degrés Merci. On n'aère pas beaucoup. Les fenêtres sont souvent condamnées ou avec seulement des petites ouvertures parce que la sécurité enfant.

  • Alban

    Dans les classes, tu veux dire ?

  • Lucie

    Oui. Il fait une chaleur pas possible. Et il y a des enfants, ils ont leur sous-couche de laine, leur t-shirt et leur pull toute la journée.

  • Chloé

    Moi, je suis le seul parent qui me déçape à fond quand je vais la déposer. Mais quand tu vas la récupérer, c'est la seule gamine ou une des rares qui n'a quasiment plus rien sur elle. Donc, comme tu dis, problématique d'aller essayer de remettre les couches une par une avant de sortir.

  • Alban

    Généralement, on n'arrive pas à lui remettre toutes les couches.

  • Lucie

    Oui, parce qu'en fait, elle a... pas forcément besoin, tu vois. Et ma fille, elle est... Moi, j'ai pas froid facilement, visiblement, elle non plus. Et en fait, la laine, en tout cas, les sous-couches thermiques, laine comme ça, etc. Alors là, oui, il y a un intérêt. Je veux dire, elle passe 6h, 7h un jour, dehors. Elle a à peine 6 ans, il fait quand même bien froid. Ouais, tu vois, quand tu choisis, par exemple, la combinaison de cosmonautes, là, qu'il faut porter tout l'hiver, tu dis, bon, ouais, on va aller... Peut-être sur une marque un peu mieux isolée ou un truc où on sait que... Et en fait, là, nous, on a le problème. C'est pas un vrai problème. C'est plus peut-être un problème de riche. Mais on se dit, elle va être beaucoup dehors. C'est pas un gros gabarit. Il faut qu'elle puisse bouger, parce qu'elle aime pas être dehors. Parce qu'elle aime pas... En fait, elle est trop coincée dans toutes ses couches.

  • Chloé

    Comme tu dis, c'est des cosmonautes.

  • Lucie

    C'est des artistes de cosmonautes. Donc du coup, on avait ce truc de en fait, il faut un vêtement technique. Il faut un truc de cosmonautique, ça coûte hyper cher. Et en fait, c'est un tissu qui est aussi un peu plus fragile, qui fait des trous plus facilement. Donc des fois, tu ne le gardes pas d'un enfant à l'autre, malheureusement. Donc oui, tu finis la saison avec. Tu ne vas pas en racheter 12, quoi. Mais je vois, nous, on habite dans un quartier assez aisé, avec beaucoup de Norvégiens. Il n'y a pas énormément d'étrangers. Ou alors, il y a des étrangers, mais des Allemands mariés avec des Norvégiens. Des trucs comme ça. et en fait Les enfants sont sureéquipés. C'est quelque chose qu'on voit, et j'imagine que vous, c'est plus ou moins la même chose. Et nous, c'était très commun, par exemple, au jardin d'enfants, que toutes les affaires restent, parce que de toute façon, ils ont le double à la maison. Tu vois, ils vont avoir le week-end.

  • Alban

    Parfois, je ne comprenais pas au Barnaille, pourquoi toutes leurs affaires restaient, mais c'est parce qu'ils sont tout en double.

  • Chloé

    Oui, mais ici, c'est très commun.

  • Lucie

    C'est pas du tout notre approche de vie, la surconsommation et ce genre de choses. Donc on n'a pas 12 dresses pour les enfants. Et du coup, on transporte de la maison aux jardins de soins,

  • Chloé

    aux jardins de soins,

  • Lucie

    à la maison, etc. Beaucoup plus. Et c'est vrai qu'ils en ont deux, voire trois. Ça dépend, il y a des cas extrêmes où tu en as trois parce que des fois, il faut les laver. Et je me dis, en fait, c'est un autre monde. Et donc, du coup, il ne faut pas non plus tomber dans la... paranoïa de te dire ils vont penser que je suis négligente.

  • Chloé

    Complètement.

  • Alban

    Non, mais moi, je suis...

  • Chloé

    Alors, je pense qu'on allait faire deux commentaires complètement différents. J'allais dire moi, maintenant, je suis en paix avec ça et je me pose ma question et là, je suis là, parano.

  • Alban

    Elle a fait sa rentrée dans le jardin d'enfants chez les grands et à la rentrée, s'est posée la question du sac à dos. En fait, j'ai juste regardé les sacs à dos des autres et ils avaient tous le même sac à dos de la même marque. Alors, avec des dessins différents. Quand j'ai demandé à la maîtresse quel sac fallait, elle m'a dit celui-là, il est vraiment très bien parce qu'il s'attache en haut, il s'attache en bas pour partir en rando. Je me suis dit, je sais que je ne suis pas obligée d'acheter ce sac, mais en même temps, je n'ai pas envie que ma fille soit la seule à ne pas avoir ce sac parce que j'aurais l'impression que c'est la seule qui n'a pas le sac qu'il faut, en fait.

  • Lucie

    Ouais, ça c'est un truc, moi je m'en fiche un peu plus. Du moment que ça leur plaît et que c'est pratique. Mais on a eu la même chose là à la rentrée, parce que le sac de première classe...

  • Chloé

    Sac en 10 !

  • Lucie

    Oh là là là là ! Et alors là, pour le coup, il n'y a pas un enfant. Il y a 88 enfants qui sont rentrés dans l'école de ma fille en première classe cette année. Il n'y en a pas un qui n'a pas ce sac.

  • Alban

    On parle du Beckman ?

  • Lucie

    On parle du Beckman.

  • Chloé

    Et en fait... Notre lobby norvégien. Les lobbyons norvégiens, j'imagine. Le lait, le chocolat, le fromage, tout ça.

  • Lucie

    Mais enfin, c'est dingue, tu vois, de dire... Parce qu'il a un coût, ce sac. On est sur un sac extrêmement cher. Et en fait, il est beaucoup trop gros pour elle. Ils sont là, oui, le sac le plus léger du marché. Non, il est lourd. Il est lourd par rapport à elle. Elle ne fait encore que 18 kilos. Son sac, il en fait 4. Je ne sais pas quoi qu'il aille. Le rapport. En fait, elle passe sa journée, pour le coup, dehors. C'est encore différent. Mais le truc étant que moi, je m'en fiche de quel est un sac différent, même si je lui couds un sac ou je ne fais rien, parce que aussi, j'ai grandi de cette manière-là. On a toujours été un peu marginaux, pour le coup, parce que notre niveau de vie ne passait pas exactement dans... le milieu dans lequel j'ai évolué, dans le quartier, etc. Donc ouais, on avait des affaires un peu différentes, on avait pas mal de trucs de récup, je garde mes fringues pendant 10 ans, 15 ans, c'est pas très grave. Et en fait, là, je vois qu'on est sur quelque chose de très différent, et ma fille, elle, ça lui tenait énormément à cœur d'avoir le même sac que les autres. alors que pourtant elle n'a jamais eu ce genre de choses donc oui bien sûr qu'elle a eu son sac et qu'elle a fait sa rentrée avec son sac en étant très fière et moi je pense que pour l'instant Gisèle elle ne se rend pas compte que tout le monde a le même sac enfin quoique peut-être un peu mais moi c'est surtout je me disais ah non ça ne va pas être la seule étrangère qui n'a pas le sac ça se regarde là parce que vous êtes encore alors nous on a quelques étrangers c'est de plus en plus rare plus on s'éloigne mais et... Après, en tout cas, pour la surveillance, la négligence et tout ça, il ne faut pas être inquiet.

  • Alban

    Ils ne vont pas appeler les services sociaux parce qu'elle n'a pas un Beckman à la rentrée.

  • Lucie

    Non. Et moi, j'ai une voisine qui nous a menacé un jour d'appeler les services sociaux. Ouais,

  • Alban

    non, raconte.

  • Lucie

    En fait, on vivait dans un immeuble où, entre chez elle et chez nous, c'était du papier. Vraiment, je pense que c'était qu'un appartement et qu'ils ont séparé. C'est comme quand tu rajoutes une chambre,

  • Alban

    ils ont mis un rideau.

  • Chloé

    Oui, limite.

  • Lucie

    Franchement, c'était assez vieux comme truc et tout. Donc, j'étais enceinte de mon fils et ma fille avait moins de deux ans. Et elle faisait énormément de terreurs nocturnes. Donc, moi, c'est quelque chose que je connaissais. Mon petit frère en avait eu, etc. Pour les gens qui ne connaissent pas les terreurs nocturnes, ça porte trop bien son nom. C'est horrible. C'est un espèce de cauchemar, en fait, terrible. Et tu ne peux pas et tu ne dois pas réveiller l'enfant. Il faut qu'il trouve la solution tout seul à sa situation à ce moment-là. Parce qu'en fait, si tu le réveilles, déjà, c'est un énorme stress pour lui. Et c'est super dur de réveiller un enfant en terreur nocturne. Je ne sais pas si vous avez déjà essayé. C'est impossible. Et en fait, il n'y a rien à faire. Tu ne peux pas te mettre à crier plus fort que ton enfant, secouer ton enfant. Là, on va dans des trucs impensables, mais c'est le milieu de la nuit, c'est toutes les nuits, c'est quatre fois par nuit. La enfant hurle à la mort, c'est compliqué. Et donc, ma fille hurlait extrêmement fort. Mais vraiment, elle hurlait. Des fois, elle n'avait pas de voix le matin. Elle avait vraiment des terrés en nocturne hyper intenses.

  • Chloé

    Ça pouvait durer longtemps ?

  • Lucie

    Ça peut durer assez longtemps, oui. Ça peut durer... Alors, en plus, si elle se réveille, il faut savoir que si si elle est réveillée par un facteur extérieur que ce n'est pas elle qui a solutionné son problème, il se rendorme et il se réveille 20 minutes après dans la même situation. C'est la différence d'un cauchemar. Le cauchemar, tu vas te rendre compte que ça va être dans la réalité. En fait, tu es chez toi, tout va bien, tu peux te rendormir tranquille, etc. Les terrains nocturnes, non. Donc, c'était très difficile. J'ai eu une grossesse vraiment moisie avec mon fils. Donc j'ai été hospitalisée par exemple deux, trois fois. C'était le Covid, je devais être toute seule. Et toute cette espèce d'environnement-là qui était un peu compliqué. Et une nuit, ma voisine, elle a complètement dérapé. Elle nous a dit, je vais appeler les assistantes sociaux, il faut arrêter de battre votre fille, de l'enfermer dans une pièce pendant que vous allez vous isoler avec un casque et jouer à des jeux vidéo dans une autre pièce. Et en fait, elle avait des problèmes. Pour résumer, son mec avait fait ça à sa fille quand elle était petite. Donc en fait, elle a transposé la maltraitance. En fait, elle pensait qu'on enfermait notre fille dans une pièce.

  • Chloé

    C'était ce qu'elle vivait elle ?

  • Lucie

    C'était ce qu'elle avait vécu elle quand sa fille était petite. Donc là, elle avait 10 ans, sa fille déjà. Mais donc du coup, oui, en fait, elle avait dit ça. Et moi, j'étais hospitalisée une nuit. Chris, il ne pouvait pas, donc mon conjoint ne pouvait pas calmer notre fille. C'était un enfer. Déjà, la nuit, elle n'acceptait que moi et encore, c'était difficile. Et en fait, c'était une nuit ultra dure. Moi, j'étais donc hospitalisée. Je lui réponds à une heure et demie du matin à son SMS en lui disant, écoute, je suis hospitalisée. C'est sûrement une terreur nocturne. Je suis désolée, il n'y a rien à faire. Prends ton mal en patient. Et après, elle a dit, il ne faut pas maltraiter les enfants comme ça. Vous, les Français, elle est partie d'un des délires un peu. Oui,

  • Alban

    les clichés. Les français clichés. Ils mettent encore beaucoup de fessées.

  • Lucie

    Voilà.

  • Alban

    Elle est mal tombée en plus, parce que toi, c'est l'opposé, quoi.

  • Lucie

    Et en fait, elle ne savait pas, par exemple. Mais du coup, on l'a un peu calmée. J'ai dit, viens, vas-y, passe à la maison. Viens voir les portes et les verrous. Parce que nous, il faut savoir qu'on avait enlevé toutes les portes. Parce qu'en fait, c'était hyper mal agencé. Donc, on n'avait plus aucune porte à part à la salle de bain. et surtout pas dans les chambres. Et en fait, il y avait... on avait mis des gros rideaux épais à la place.

  • Chloé

    Ah, mais pour jouer aux jeux vidéo toute la nuit.

  • Lucie

    Ah bah ouais. Et son lit, donc ma fille, forcément, elle avait un lit au sol, elle était libre de se déplacer si elle avait besoin, etc. Et donc du coup, on lui avait dit, bah viens, alors dans quel lit elle est enfermée, dans quelle pièce ? Ça avait fait un peu calmer, quoi. Mais elle nous a quand même menacé de nous balancer aux services sociaux. Pour maltraitance.

  • Chloé

    À l'issue de ça, c'est là que vous avez décidé de quand même lui montrer, pour un peu essayer d'apaiser les choses, comment vous avez réagi ?

  • Lucie

    On a déménagé.

  • Chloé

    Et oui, voilà. Non, mais je l'ai dit, il n'y a pas de...

  • Lucie

    Et puis, elle était quand même alcoolique. Merci, les motifs alcooliques. Il y avait quand même d'autres choses derrière. Et aussi, bon. Mais non, non, on a déménagé de toute manière. on allait accueillir un deuxième. et puis c'était un logement quand même assez vituste on était très content de déménager mais ouais on a été menacé et franchement ça fait peur et tu vois de me dire mais attends moi je travaille dans un jardin d'enfants tout le monde me connait je sais que ça n'ira jamais plus loin que ma voisine un peu tarée Ça fait flipper.

  • Alban

    Ça fait flipper, ouais.

  • Lucie

    Ouais, quand même, ouais. Et en fait, c'est aussi un petit moyen de pression sur les enfants, c'est pas très bien, mais tu vois, ce matin, quand ma fille ne voulait pas mettre ses chaussures embourrées, je lui ai dit, mais ma chérie, ils nous écrivent des messages, en fait. Nous, tous les deux semaines, on reçoit un message qui rappelle qu'il faut que tes enfants soient assez couverts, qu'il faut avoir ça, ça, ça, ça en chant. J'ai dit, on ne veut pas de problème, en fait.

  • Alban

    Je voulais revenir sur le fait que ta fille est un peu en avance sur le système norvégien et que d'ailleurs, peut-être qu'une structure plus à la française, entre guillemets, pourrait peut-être mieux lui convenir. Pourquoi vous faites le choix néanmoins de la laisser dans le système norvégien ?

  • Lucie

    Je pense qu'il y a certaines convictions. Je ne suis pas fondamentalement contre l'école française, mais presque, je dois être honnête. Je n'ai pas envie, je n'en ai pas une bonne image.

  • Alban

    Qu'est-ce qui te rebute le plus de l'école française ?

  • Lucie

    La structure, la vision élitiste, en demander trop, les horaires. Ce n'est pas adapté à la vie norvégienne. C'est mon point de vue extérieur parce que je n'y ai jamais travaillé et je connais des gens qui y ont été. Et c'était du coup, maintenant, il y a un petit moment. la réalité je la connais pas pas pour de vrai. Mais de mon point de vue, on a pris une école en France et on l'a posée en Norvège. Et ce n'est pas adapté. Les horaires ne sont pas adaptés, le volume n'est pas adapté, le nombre d'heures de Norvégiens par semaine n'est pas adapté, la culture... Vraiment, il n'y a rien qui est adapté, ne serait-ce qu'un minimum pour que les enfants évoluent dans une culture. commune avec leur environnement. Et ça, pour moi, c'est un problème. Après, on est quand même deux Français, toutes notre famille sont en France, nos enfants parlent le français, c'est vraiment leur langue maternelle. Donc moi, j'ai même pas le besoin que mes enfants parlent le français pour communiquer avec les grands-parents. C'est juste inné et il n'y a aucun souci là-dessus. Donc l'école française, pour nous, c'est pas un choix et c'est pas une option. aussi parce que c'est pas super bien placé par rapport à là où on habite c'est cher de rien ça coûte un coup et en plus il me semble que plus les années passent plus c'est cher et après on a réfléchi, on a quand même on garde en tête la possibilité de l'école internationale parce que en fait du coup oui le niveau est un petit peu plus élevé, c'est un peu plus scolaire, un peu plus académique et en même temps assez à la norvégienne C'est quand même un espèce de...

  • Alban

    Oui, c'est des journées assez courtes.

  • Lucie

    C'est une ville assez sympa. Par contre, c'est hyper loin de là où on habite. Pour le coup, parce que l'école française, autant elle est dans Oslo, l'école internationale, elle est en dehors d'Oslo. Et on habite carrément de l'autre côté. presque en dehors. Ça engagerait un déménagement quand même. C'est ça qui est compliqué aussi. Nous, on sait qu'elle, elle ne sera pas en retard. Donc tant qu'elle continue à avoir les bonnes stimulations, qu'elle continue de s'épanouir et qu'elle ne nous demande pas autre chose, on va la laisser au moins le temps que son frère rentre à l'école. Donc on a encore un an et demi. Et après, quand ce sera le moment que lui rentre à l'école, on verra déjà. On ne sait pas où on sera dans deux ans. On est un peu au jour le jour.

  • Chloé

    Est-ce que vous ne savez pas où vous serez dans Oslo en Norvège ? Ou est-ce que ça vous a...

  • Lucie

    Ah, c'est pas du tout. Non, non, on n'a pas... Là, en ce moment, ça fait dix ans qu'on est là. Nos amis nous manquent, nos familles nous manquent. On a vraiment, nous, une différence de avant et après Covid, d'une certaine manière, dans le sens où on avait l'habitude d'avoir de la visite. Plus du tout. On a des... Enfin, nous, comme nos amis, sommes assez concernés par l'environnement. On a... pas envie de prendre l'avion pour passer un week-end de trois jours avec des copains, malheureusement.

  • Chloé

    C'est un vrai sujet, ça aussi.

  • Lucie

    Il faut respecter ça au maximum. Moi l'avion, j'essaye quand même de prendre un petit peu de recul. Mon conjoint, lui l'avion, il est zéro recul. Au premier degré, ça le rend presque malade qu'on prenne l'avion pour aller fêter Noël, et en plus on passe trois semaines. Donc vraiment, et je le comprends, c'est quelque chose qui pèse dans le quotidien, et ses amis, plus que les mains pour le coup, sont quand même largement du même avis. On a beaucoup moins de visites. Il y a aussi qu'on a tous passé 30 ans. on n'est pas les seuls à avoir des enfants maintenant. Enfin voilà, ça implique une organisation différente. Et du coup, nos familles et nos amis nous manquent assez. On ne s'y retrouve pas beaucoup avec notre cercle en Norvège.

  • Alban

    Vous envisagez peut-être de rentrer en France ?

  • Lucie

    Non, pour le coup, quand même pas. En fait, pour le contexte, il y a mon grand frère qui a habité au Canada pendant des années, qui est retourné s'installer en France il y a quatre semaines. Avec sa famille.

  • Chloé

    Il veut déjà repartir ? Non, je peux les en faire, ça va.

  • Lucie

    Non, non, c'est assez nouveau. Mais du coup, ils sont allés vers Nîmes. Donc, je les ai eus au téléphone. Pour l'anniversaire de ma belle-sœur, il faisait 18 degrés, ils étaient en t-shirt.

  • Alban

    Ça te donnait envie ?

  • Lucie

    Ouais, il faisait encore jour et tout. Quand il était 16h30, même pas, il faisait déjà bien nuit, très froid. Ils étaient tous des esquimaux et tout. Les hivers, là, c'est vrai que ça commence à me peser un peu. Il y a certaines choses qui évoluent, qui sont un peu différentes. Je pense que ne serait-ce que si on changeait de quartier et d'environnement. on aurait une approche assez différente. On aurait peut-être des voisins qui disent bonjour.

  • Chloé

    Oui,

  • Alban

    parce que j'allais dire, pour le coup, nous, tous nos voisins, ils disent bonjour.

  • Chloé

    Et donc, on vit ici en Requehus, qui sont des maisons mitoyennes. Et en fait, autant pour des raisons de budget que d'entretien, que de plein de raisons, on est passé d'appart à maison mitoyenne et ça nous va très bien comme ça pour garder la vie un peu de quartier.

  • Lucie

    Clairement. C'est des choses assez différentes, mais il y a un côté social du Norvégien qui doit organiser une vie sociale. dans tous les boulots, tu as le social comité où du coup, tu vas organiser que le vendredi, après la paye, tout le monde va boire un verre, j'en sais rien, ce genre de choses. Là, hier soir, je suis sortie avec les mamans de la classe de ma fille. Donc voilà, il y a une organisation sociale aussi à ce niveau-là.

  • Chloé

    Spontanée ?

  • Lucie

    Eh ben non, il n'y a rien de spontané ou ponctuel.

  • Chloé

    C'est vrai que le manque de spontanéité, je te rejoins parce que quand on parle de nos expériences passées en Amérique latine, Ben là on est on était en plein dedans. Ah waouh,

  • Lucie

    la chaleur...

  • Chloé

    Et pareil, quand on vient du sud de la France, on va s'y rendre en vacances, et tous les terrasses, la chaleur humaine, les imprévus, ça c'est quelque chose qui nous manque, et c'est pour ça que parfois on se dit, si on avait l'occasion, peut-être repartir deux ans, trois ans dans l'Amérique latine, tout en revenant en Norvège, mais regoutter un peu à ça, peut-être pour ensuite se dire, ah non mais je préfère l'ordre, c'est bon. Ouais,

  • Lucie

    bonne structure. Non, non, mais il y a des choses qui... qui manque un peu, cette légèreté-là, on la trouve Quand il commence à faire des boucles. En fait, c'est vraiment une période très courte.

  • Chloé

    Ça ne dure pas longtemps.

  • Lucie

    Proportionnellement, c'est le même temps. Il fait très jour, il fait très nuit.

  • Alban

    On a l'impression que ça dure moins longtemps.

  • Lucie

    Oui, parce qu'on part en vacances. On est moins là, etc. Mais c'est vrai que ça, c'est... Non, pour le moment, on n'envisage pas de rentrer en France. Mais c'est vrai que, par exemple, sur la scolarisation, ça, c'est difficile. Parce que tu dis, elle est en structure... je me réfère à ma fille. Elle est en structure norvégienne. Par exemple, ils ne veulent pas lui faire sauter une classe. Parce qu'en fait, elle serait avec des enfants qui ont un an... Parce qu'elle est née l'hiver. En Norvège, beaucoup d'enfants, pas tous, mais beaucoup naissent l'été. Donc elle, elle a déjà... quasiment six mois de moins que les autres, même facilement. Elle a ça et en plus, ce serait encore un an de moins, un an et demi de moins que les autres. Tu ne mets pas une enfant de six ans avec des enfants de presque huit ans. Ce n'est pas top. Alors, elle est très mûre et elle a plein de copines en troisième classe. Donc, c'est payé sur ce deux. Elle serait sûrement mieux avec des enfants plus grands. ça se fait pas trop. On fait pas redoubler, on fait pas sauter de classe. C'est pas trop un truc qui se fait. Et en même temps, je me dis, on déménage en France, je sais pas, dans trois ans. Elle va devoir être fatalement dans une classe d'enfants qui ont deux ans de moins. Parce qu'elle sera en retard au problème français. Et ça, c'est trop dur, tu vois, de se dire en tant que parent étranger, oui, toute notre vie est ici, mais toute notre famille et toute notre culture, tout le reste est là-bas. De se dire... Et il est possible, je ne sais pas, ma mère tombe, alors je ne le souhaite pas, mais ma mère tombe malade, je dois m'occuper d'elle, on va passer deux ans en France. C'est non négociable. Et donc, du coup, qu'est-ce qu'on fait avec les enfants ?

  • Alban

    Moi, c'est ce que je dis à Alban, si on doit rentrer en France pour x ou y raison, ou qu'on doit déménager autre part, en fait, dans un autre pays, c'est ça qui me donne envie de la mettre dans un circuit, soit anglais, soit français, pour être sûre que n'importe où on aille, elle m'aidera. puisse continuer sa scolarité sans...

  • Lucie

    Ou avec des enceintes son âge en fait. De me dire qu'elle va être la fille qui arrive de Norvège et qui doit avoir redoublé deux classes parce qu'elle n'a pas le niveau en maths, ça fait trop mal,

  • Alban

    tu vois.

  • Lucie

    Et je me dis, je ne souhaite pas qu'elle à 12 ans elle se retrouve dans une classe de petite 10 ans alors qu'en plus elle s'entend toujours mieux avec les plus grands, etc. Alors je ne sais pas. comment elle va grandir. C'est que des projections. Mais ça, c'est difficile d'avoir ce point d'incertitude et de se dire...

  • Chloé

    C'est super intéressant parce que je trouve que dans un parcours d'expatrié, mais même là, je pense qu'on n'est plus sur le parcours d'immigré. Il va y avoir complètement... Il y a toute une phase où tout semble... Surtout que tu es arrivé très jeune, on est arrivé encore relativement jeune. Tu as les débuts, tout semble facile, tu t'intègres aussi parce que tu as cette communauté très internationale, tu peux toujours l'avoir, et on l'a aujourd'hui, on se sent en termes d'amis, de social, tout se passe bien. Par contre, les enfants, le fait que toi tu sois première génération d'immigrés, qu'est-ce que ça renvoie sur eux, comment ils sont intégrés, leur futur, est-ce que je suis français, est-ce que je suis norvégien, qu'est-ce qu'ils sont eux ? Ce sont des thématiques plus délicates, je trouve, à gérer. C'est là qu'on soulève une autre notion de l'immigration. Est-ce que j'ai encore le choix de repartir ? Est-ce qu'au final, il faut mieux que je continue ma vie ici pour mes enfants ? C'est hyper lourd au final comme thématique, mais très, très intéressant. Et je pense que beaucoup de personnes s'y heurtent au bout de quelques années de vie dans un autre pays.

  • Lucie

    Surtout avec les enfants, en fait. Et justement... Quand tu m'as demandé tout à l'heure si... Mais attends, parce que vous envisagez de retourner vivre en France et tout ça, la question ne se pose même pas parce que les enfants... Oui, mais en même temps, tu dis, si demain ta mère est malade, vous rentrez.

  • Alban

    Ah bah oui, parce qu'en fait, il y a des choses dans la vie qui font que c'est plus important. Il y a des choses qui vont être plus importantes que d'autres. Et ce serait rentrer temporairement. D'accord. Aucun de nous n'adhère à la politique, par exemple, en France. Ce genre de choses, c'est des débats, c'est des idéaux et des choses qui sont assez personnelles. Mais aussi les structures, le système, le reste. De me dire que mes enfants, ils ont la chance de s'épanouir dans le système norvégien. Mais je n'ai pas envie.

  • Lucie

    Donc malgré l'isolement, l'éloignement de la famille, des amis, vous considérez rester en Norvège ?

  • Alban

    Pour l'instant, ce n'est pas un sacrifice en tout cas. Pour le moment, on y trouve largement notre compte. Mon conjoint est extrêmement heureux au travail. Moi, je me sens très libre, assez épanouie aussi. Et on sait qu'avec le boulot qu'il a en France, on serait dans des conditions extrêmement différentes. Les journées sont longues pour les enfants, les journées sont longues pour les parents. Le temps, la qualité que tu as de temps avec ta famille, avec ton bien-être, avec tout ce genre de choses-là. Pour le moment, on retrouve largement notre compte ici, clairement. Mais oui, les interactions sociales, ça commence à être un peu compliqué de mon côté. Comme tu disais, je n'ai pas envie que ma fille soit la seule à avoir un sac à dos différent. Moi, mes enfants, ils ont quatre cousins en France. Je n'ai pas envie que ce soit ceux qui sont nuls parce qu'ils n'ont pas appris ça à l'école. J'essaye de garder ces projections-là pour moi-même.

  • Chloé

    D'accord. Ce sont nos peurs aussi qu'on projette.

  • Alban

    Alors que ma fille n'a pas peur d'être bête. Et elle ne l'est pas. Et moi, je n'ai jamais eu peur d'être bête, en plus. Personnellement, mes parents, ils ont toujours été... quand même assez encourageant. Pourtant, je n'étais pas la plus brillante et le système scolaire français ne me convenait pas beaucoup. Mais je n'ai jamais eu l'impression d'être bête.

  • Lucie

    Non, et puis,

  • Alban

    c'est vraiment...

  • Lucie

    Il faut définir ce que c'est être intelligent, être intelligent dans le système français et être intelligent dans le système norvégien. C'est aussi différent. Et c'est pour ça que, d'un système à l'autre,

  • Alban

    il y a la capacité d'adaptation, à ingérer un nombre d'informations. Là, on est vraiment sur des trucs beaucoup plus profonds. Pour le moment, c'est clairement pas un sacrifice. Et on est très heureux ici. Et on pense aussi beaucoup à l'avenir. Et à se dire que, bah oui, je sais pas, moi, des choses un peu bêtes, mais la montée des eaux, les famines, les sécheresses...

  • Chloé

    Le réchauffement climatique.

  • Alban

    Ouais, ça fait extrêmement peur, en tout cas quand t'as des enfants à élever. Enfin, tu vois, t'as mis des enfants au monde, et tu te dis bah eux, ils ont pas choisi d'être là. Nous, on a choisi qu'ils soient là. Et notre responsabilité, c'est de faire en sorte qu'ils soient les plus heureux. et avertis possibles pour leur avenir. On a aussi envie que nos enfants grandissent dans la réalité du monde qui les attend. Après, je vais passer ma journée de stressée maintenant, mais c'est des énormes questions qui se posent et qu'on ne se pose pas avant un certain âge et avant d'avoir des enfants. c'est un peu difficile mais après il y a d'autres générations, mon petit frère a 10 ans de moins et lui il est une génération dans son groupe et dans d'autres gens, de sa génération c'est pas d'enfant c'est une réalité,

  • Chloé

    l'expatrié peut-être ou l'immigré peut-être très isolé en tant que parent

  • Alban

    Ça dépend des cultures. Il y a des cultures plus communautaires. On a des amis indiens.

  • Chloé

    Ils sont expatriés,

  • Alban

    mais ils sont cousins. Ils sont tous en famille. Ils vont au temple, ils ont leurs fêtes, les cultes. Tu vois, nous, on n'a pas ça, je trouve. Et en plus, mon copain et moi, quand on est arrivé ici, on a fui le milieu français. On ne voulait pas faire tous les trucs de franco-français parce qu'on voulait s'imprégner de la culture, on voulait parler norvégien. en plus il y a dix ans, on n'était pas sur le même profil d'ex On n'était pas sur le même profil d'immigrés, j'ai envie de dire. On était vraiment sur le profil d'expat. Genre, je suis ingénieur en tuyau, je travaille dans le pétrole, et on me propose un très gros salaire, je vais habiter à Frogner, et jamais apprendre le norvégien. Et ça, c'est quelque chose qui ne nous correspondait pas du tout, parce qu'en même temps, on vient d'études de culture scandinave. En plus, on connaît quand même les fondements de la société, on a appris la littérature, la géographie, la culture, tout ce genre de choses-là. et c'est trop dommage d'habiter dans ce monde. dans un endroit et se limiter à vivre les yeux fermés.

  • Lucie

    Et tout ça, est-ce que ça vous a aidé à vous faire des amis norvégiens ? Et un cercle norvégien ?

  • Alban

    Oui et non. Si je parle pour mon conjoint, oui. Et je pense qu'en fait, ça ne relève pas que de ça. Et si je parle pour moi, non. J'ai mes collègues avec qui je m'entends très bien. Ce n'est pas des amis, la famille, tu vois. Ce n'est pas des amis comme j'ai pu avoir en France. Ma meilleure amie ici est française. Et les gens avec qui je me suis sentie le plus proche, ça n'a jamais été des Norvégiens. Jamais. vraiment jamais. J'ai eu une amie norvégienne qui était cool à la fac, mais non, je ne sais pas. En fait, on est trop fondamentalement différents sur d'autres trucs. Ah, si là, j'ai une amie norvégienne, on est très proches, en fait. Dis-moi pour toi si elle ne m'entendra pas, mais elle ne se considère pas norvégienne. Voilà, je veux dire ça. Et la plupart de ses potes, c'est des étrangers. Donc, elle comprend, c'est sa culture, etc. Mais une autre amie ou collègue, On a 15 ans d'écart à l'époque. 15 ans plus vieille que moi, mais elle a habité au Portugal, au Brésil, elle est mariée avec un Portugais, elle a vécu un petit peu en France, elle est assez portée sur l'étranger, et en fait, ouais, on s'entend bien. Pour le coup, j'ai tout essayé. Parce que tu vois, je me disais, je travaille au jardin d'enfants, on a tous un intérêt commun, c'est les enfants, la pédagogie, ce genre de choses. Ça n'a pas pris. Pourtant, vraiment, comme je te disais, tu crées des liens un peu étranges en pyjama, assis par terre. Tu vois ce que je veux dire ? On partage des choses un peu intimes au final et en fait, non. J'ai essayé des clubs de sport différents. J'ai même essayé un sport d'équipe, par exemple. Non. J'ai... jamais trouvé de lien ou de trucs comme ça. J'ai étudié, j'ai étudié même à des parcours norvégiens, où tu t'inscris en tant qu'étudiant norvégien, grosso modo. Toujours pas. Donc je pense qu'il y a quelque chose qui fait que ça prend pas. Et ça vient certainement de moi aussi. Je ne peux pas juste dire le monde entier ne veut pas de moi.

  • Lucie

    Tu disais d'ailleurs que ton mari, ton conjoint...

  • Alban

    Mais lui, ouais, trop. Lui, il attire les Norvégiens. C'est un aimant. Pourtant, moi, physiquement, j'ai plus l'air d'être norvégienne que lui. Et en plus, nous, on a ce truc de... Oh, t'es français ! Les Norvégiens, c'est une petite fascination pour quand même la France. Ouais, ça va. Mais t'es français ! 2.

  • Chloé

    qu'est-ce que tu fais là ?

  • Alban

    C'est dingue, tu viens de Paris, tu vois. Ouais, ouais, ce truc de qu'est-ce que tu fais là et tout. Mais en même temps, je veux dire, on est des étrangers, on est des immigrés première classe, quoi. Tu vois, enfin, je veux dire, je pense qu'il y a quand même, dans leur vision, en tout cas, il y a une espèce de hiérarchie. Et on est tout en haut de la hiérarchie de l'immigré. Mais en tout cas, lui, non, pas du tout. Il s'est toujours méga bien intégré avec des Norvégiens. Même à notre mariage, il avait des potes norvégiens et tout. Pourquoi est-ce ce que je n'ai pas réussi à faire.

  • Chloé

    Qu'est-ce que tu conseillerais à quelqu'un qui arrive en Norvège ? Parce qu'on a abordé plein de thèmes. Est-ce que tu as un conseil à partager ?

  • Alban

    Savoir pourquoi tu es là. Si tu arrives parce que tu es dans l'industrie du pétrole et que tu as un super boulot qui t'est proposé avec des super avantages, un logement, tout ça. tu sais pourquoi t'es là, tu sais pourquoi t'arrives et après pour s'intégrer ben non tu t'intégreras à ton propre cercle en fait, après vraiment en termes d'intégration tu veux dire ben tu vois moi j'ai tout essayé et j'ai pas réussi je veux dire ça fait 10 ans que j'échoue à l'intégration donc maintenant mais t'en es pas malheureuse pour autant non non non ça va parce que aussi j'ai ma famille et puis non je suis pas malheureuse, je suis pas intégrée mais je suis pas désintégrée non plus et puis il y a ce truc de, moi ça me dérange pas de rencontrer des nouvelles personnes. Alors j'ai des amitiés très anciennes et très stables, mais ça me dérange pas de rencontrer des nouvelles personnes, des nouveaux groupes. Donc du coup, je peux papillonner avec des gens sans vraiment avoir des relations vraiment plus profondes. Par mon métier maintenant, un petit peu plus. Je suis respectée dans ce que je fais. Je le fais à peu près bien. Et du coup, tu vois, les relations que je noue avec mes clientes maintenant, c'est une sorte de relation sociale. Alors oui, on reste c'est professionnel. Il y en a quelques-unes qui se transforment en amis, et ça c'est exceptionnel.

  • Chloé

    Qu'est-ce qui est difficile pour toi en Norvège ?

  • Alban

    Rien. Je ne dirais pas que tout est facile, mais difficile, pas grand-chose. Juste le bas, le manque, l'éloignement, le manque. Mais encore une fois, par exemple, si mon mari n'était pas français, je ne sais pas, je pense que ce serait dur.

  • Chloé

    Oui,

  • Alban

    je comprends. Je pense que là, je serais vraiment dans un... Tu vois, j'ai besoin d'avoir des références à Astérix Oblix, Mission Clémopâtre, et quelqu'un rigole en face de moi, tu vois. et si mon mari était norvégien je suis pas sûre que ça l'aurait fait à long terme. Par exemple, si mes enfants parlaient pas français, ou très mal, ou très peu, ça, ce serait dur pour moi. J'ai une amie qui est ici. Elle est arrivée étudiante il y a 14 ans, je crois, un truc comme ça. Elle est mariée avec une norvégienne. Elles ont deux enfants qui sont dans le même jardin d'enfants que les miens. Et c'est vraiment une amie que j'ai depuis le jour où je suis arrivée. On s'est rencontrées très rapidement. Elle, elle n'a pas... presque plus aucun contact avec sa famille en France. Ses enfants, ils me regardent comme un extraterrestre quand je leur parle français. Parce qu'en fait, même elle, au final, tu as un moment où tu te prends au jeu et où c'est plus facile de parler norvégien, parce qu'elle parle norvégien et avec sa compagne aussi. Et elle ne passe pas par l'anglais, elle ne parle que norvégien. Et du coup, avec les enfants, tu as cette facilité aussi de... De toute façon, ils te répondent tout le temps en norvégien.

  • Chloé

    Tu vois ?

  • Alban

    et moi elle je lui pose la question et en fait elle me dit que elle ça va très bien c'est pas du tout un problème pour elle donc je pense que c'est quand même extrêmement personnel et à contrarier est-ce qu'il y a quelque chose que tu adores,

  • Lucie

    que tu as adopté de la Norvège et dont tu pourrais pas te passer juste le cadre alors je déteste la campagne

  • Alban

    Une super parisienne. Montagne, mer, ville, ça fonctionne. Mais campagne, rase, c'est mort. Mais pour autant, j'adore la nature, j'adore l'eau. Et en fait, on est entouré d'eau. Et juste... Pour le coup, c'est une condition. On a déménagé sept fois en neuf ans. Ah oui,

  • Lucie

    quand même !

  • Alban

    Nous, on fait beaucoup de vélo et tu vas te baigner à vélo. Genre, tu prends ton vélo, tu pédales 20 minutes et t'es à la plage. Alors, pas toute l'année, tu vois. Toute l'année, tu peux, mais voilà, je conseille pas. Et en même temps, tu peux prendre un bus et skier.

  • Chloé

    Merci beaucoup Chloé d'être venue nous rencontrer aujourd'hui. C'était génial d'apprendre à connaître une partie de ton parcours qu'on ne connaissait pas encore.

  • Alban

    C'est vrai qu'on se connaît plus professionnellement.

  • Chloé

    Et ce qui est trop bien, c'est qu'on va avoir l'occasion d'en parler une prochaine fois, de revenir sur l'expérience plus doula.

  • Lucie

    Merci d'être venue jusqu'à nous. Et on te recevra pour aborder d'autres thèmes, car tu as plus d'une corde à ton arc. Donc trop hâte de partager tout ça une prochaine fois. Et en attendant, on vous dit à bientôt chez nous.

  • Chloé

    Sous les aurores.

  • Lucie

    Si cet épisode vous a plu, pensez à nous laisser une note et un avis sur votre application d'écoute préférée.

  • Chloé

    Ou un commentaire sur YouTube, ça nous aide énormément à faire grandir le podcast.

  • Lucie

    Merci et à très vite pour le prochain épisode.

Description

Dans cet épisode de Sous les Aurores, Lucie et Alban reçoivent Chloé, expatriée à Oslo depuis 2014, ancienne institutrice en jardin d’enfants et aujourd’hui doula et formatrice. Elle nous plonge dans l’univers des structures de petite enfance norvégiennes, où :

  • Les tout-petits sont encouragés à s’habiller et s’organiser seuls,

  • Les temps de jeu libre sont pensés comme moteur d’apprentissage,

  • Les repas et les siestes deviennent de véritables moments-calmes,

  • Le barnevern (protection de l’enfance) intervient de façon préventive et proactive (trop?) pour garantir le bien-être des enfants.


De ses débuts en tant qu’étudiante à ses remplacements en jardins d’enfants communaux, Chloé partage ses plus belles découvertes et les défis culturels qu’elle a dû relever. Un éclairage unique pour tous les parents, professionnels de l’enfance et curieux-se de la pédagogie scandinave.


Prêt-es à embarquer pour un voyage au cœur des jardins d’enfants norvégiens, entre autonomie, jeu libre et protection de l’enfance ? Installez-vous confortablement et rejoignez-nous Sous les Aurores ! ✨


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Transcription

  • Lucie

    Salut, c'est Lucie.

  • Alban

    Salut, c'est Alban.

  • Lucie

    Trentenaire et parent de deux petites filles.

  • Alban

    Bienvenue dans Sous les Aurores.

  • Lucie

    Le premier podcast réalisé par un couple de Français en Norvège.

  • Alban

    Sous les Aurores, c'est le podcast haut en couleur qui vous emmène vivre toutes les nuances de l'expatriation et de l'immigration en Norvège et bien au-delà.

  • Lucie

    Que vous soyez déjà expatrié, immigré, que vous rêviez de le devenir ou que vous soyez simplement curieux de découvrir d'autres façons de vivre, ce podcast est fait pour vous.

  • Alban

    Alors, mettez-vous à l'aise, servez-vous une bonne tasse de thé ou un verre de vin. et rejoignez-nous sous les aurores. Au menu, discussion sincère,

  • Lucie

    moment de rire et d'émotion,

  • Alban

    et surtout, beaucoup de belles découvertes.

  • Lucie

    Alors, bienvenue chez nous sur un nouvel épisode de Sous les aurores.

  • Alban

    Bonjour à tous et bienvenue dans un nouvel épisode de Sous les aurores. Aujourd'hui, une nouvelle invitée qui n'est une fois de plus pas complètement inconnu, car elle nous a suivi pour un événement important de la vie qui dure en général neuf mois, quand tout se passerait bien.

  • Lucie

    Alors d'abord, on va commencer par une petite présentation. Est-ce que tu pourrais nous dire comment tu t'appelles ? Depuis combien de temps tu vis en Norvège ? Dans quel domaine travailles-tu ? Et enfin, un culture-choc que tu as remarqué quand tu es arrivé en Norvège ou que tu continues de vivre au quotidien ?

  • Chloé

    Je m'appelle Chloé, ça fait dix ans que j'habite en Norvège maintenant, donc août 2014. Je suis arrivée comme étudiante en linguistique et pédagogie. J'ai travaillé comme institutrice, ensuite j'ai travaillé comme doula, je le fais encore aujourd'hui. Et je suis aussi masseuse, spécialisée du coup sur la santé de la femme, la santé hormonale, la fertilité, la grossesse, etc. Et aussi, j'ai une spécialisation en massage visage. Et maintenant, je suis en train d'ouvrir un centre de formation spécialisé. Donc, je suis retournée du côté enseignement. Maintenant, j'enseigne le massage. Pour le choc des cultures, ça ne m'a pas marquée en arrivant. Mais c'est quelque chose qui commence à vraiment être un peu plus compliqué pour moi. Donc, comme je suis arrivée en tant qu'étudiante, il y avait aussi un mélange de... d'autres étrangers beaucoup. Je parlais déjà un petit peu norvégien. Donc, ce n'était pas vraiment marqué à l'université. Mais maintenant, en tant que vrai adulte, passé 30 ans, c'est le manque de proximité avec les autres humains. Ça fait un an qu'on a déménagé. J'ai dix voisins de palier. Il n'y en a pas un qui dit bonjour. Ah oui.

  • Alban

    Oui. C'est vrai que c'est vraiment quelque chose qu'on retrouve et tu n'es certainement pas la seule à vivre ça.

  • Lucie

    Oui, mais c'est marrant parce que tu vois, il y a une invitée hier. qui nous a parlé de ce culture-choc, mais qui nous a dit qu'elle, elle adorait parce qu'elle prend ça comme « je garde mon espace, chacun garde son espace et on respecte l'espace de l'autre » . Donc c'est marrant de voir...

  • Alban

    Quel effet ça peut avoir sur nous ?

  • Chloé

    Oui, c'est vraiment très différent. Je comprends le marqueur culturel, mais pour moi... qui est toujours grandi en communauté proche des autres, même à Paris ou Paris proche, où quand même, de toute façon, tout le monde se dit bonjour dans la rue, même si tu ne les connais pas. Là, ça commence à être un petit peu...

  • Lucie

    J'avoue, les voisins, quand même, c'est...

  • Chloé

    Les voisins, c'est chaud. On a les enfants qui vont à l'école ensemble.

  • Lucie

    En plus, ils ont des enfants, c'est vrai que je trouve ça bizarre.

  • Alban

    Bon, un peu malaise, quoi.

  • Chloé

    Un peu malaise, oui. Mais comme il y a le marqueur culturel que je... connais, je ne le prends pas comme une forme de racisme, de respect ou ce genre de choses. Je sais que c'est vraiment juste une bulle individualiste et personnelle, mais ce n'est pas...

  • Alban

    Ça ne rend pas la chose plus facile parfois, mais complètement.

  • Lucie

    Tu peux nous dire un peu comment tu es arrivé en Norvège, pourquoi, qu'est-ce qui t'a amené ici ?

  • Chloé

    Le fruit du hasard. du coup, vous le savez peut-être pas mais j'ai fait une licence en lettres, langues culture et civilisation étrangères en Scandinave et en spécialisation norvégien donc j'avais des cours de norvégien à la fac à Paris trop drôle pourquoi c'est la question à la base de... À la base, tu vois, tu as 18 ans, ton bac, et tu te dis, qu'est-ce que je vais faire ? Donc moi, je voulais faire une école d'art. J'étais vraiment sûre que c'est ce que je voulais faire. Sauf que je n'avais pas préparé mon dossier. C'est sur admission, quand tu veux faire une école d'art à Paris, c'est... C'est un peu tendu, ils ne prennent pas n'importe qui. Donc j'étais un peu en retard sur le dossier d'admission, et puis toutes les personnes avec qui j'avais travaillé m'avaient dit « De toute manière, les écoles d'art, il faut être mûres, donc tu ne rentres pas directement après le bac. Il faut une petite expérience de la vie, il faut des choses. » Et mon frère, lui, m'a mis la pression en me disant « Écoute, moi j'ai redoublé pour aller où je voulais, donc on a un an d'écart, donc on était tous les deux au bac à cette année-là. » Et il m'a dit maintenant que je peux y aller et qu'on a le droit d'être boursier parce que justement, on est tous les deux étudiants. Tu ne vas pas rien faire. Tu t'inscris quelque part. Je m'en fiche, mais tu fais quelque chose. Donc, du coup, j'ai regardé le dossier admission post-bac, le FAC de l'ADP et j'ai vu à l'LCE norvégien. Je me suis dit, pourquoi pas ?

  • Alban

    Donc, à la base, tu t'es dit ça limite pour un ou deux ans jusqu'à rebasculer.

  • Chloé

    Tu t'es dit, en fait, si ça me plaît. tant mieux, si ça me plaît pas c'est pas grave et en fait c'était 18h de cours par semaine, enfin je m'engageais vraiment pas sur un truc énorme, je sortais d'une L spécialisation arts plastiques j'allais pas m'engager en géopolitique donc du coup j'avais jamais même le premier jour de la rentrée, même pendant l'été et tout, j'avais pas eu la curiosité d'écouter du norvégien ou de regarder la géographie, enfin voilà de base, pour eux Je savais qu'Oslo, c'était en Norvège.

  • Alban

    C'est déjà pas mal.

  • Chloé

    Je savais que c'était le dernier pays avant l'Angleterre. Mais du coup, j'ai vraiment été les mains dans les poches. Donc on était un petit groupe, on était 11 je crois sur ma promo. Il y avait donc mon compagnon, on s'est rencontrés à la rentrée. Lui aussi, il était le seul à avoir aucune relation avec la Norvège, vraiment de près ou de loin. Donc voilà, après la licence, on a fait un Erasmus ici et on est restés.

  • Alban

    Ah mais génial ! Trop bien ! Et ça a été directement sur Oslo l'Erasmus ?

  • Chloé

    Ouais, moi j'ai fait un essai raté. à ma deuxième année de licence à Christian Sand. Il y avait un accord Erasmus ouvert, mais en fait, c'était vraiment... Je pense qu'il a été fermé depuis, d'ailleurs, on en avait pas mal repéré. Depuis ton passage ? Le coordinateur, ouais. En fait, ils sont pas du tout... Donc quand tu fais un Erasmus, tu dois valider des crédits qui sont en rapport avec tes études. Et moi, j'avais accès à aucun cours de norvégien à Christian Sand, parce que, en fait, c'est... Les accords, c'était surtout pour les étudiants en commerce ou d'autres choses. Donc, j'avais accès quasiment qu'à des cours en anglais et pas du tout au cursus des Norvégiens eux-mêmes. Et puis, de toute façon, je n'avais pas le niveau. Je pouvais à peine me présenter. Donc, ça a été raté. Après, l'année d'après, mon copain, lui, a fait l'Erasmus à Oslo. Et ensuite, un an et demi après, on est revenu. Donc, moi, j'ai fait mon Erasmus pour le M1 ici.

  • Lucie

    Et du coup, c'est directement après l'Erasmus que vous vous êtes installée ?

  • Chloé

    Oui, en fait, pour moi, c'était vraiment la porte de sortie ou d'entrée d'une certaine manière, parce que je connaissais un peu le système norvégien. Et je savais qu'obtenir un percheur de numéros, donc le numéro d'identité, c'était super facile quand on était étudiante. Avoir un logement, être boursière, s'inclure dans la vie norvégienne à mon niveau, c'était vraiment la meilleure façon.

  • Alban

    Est-ce que tu penses que c'est toujours vrai aujourd'hui qu'en tant qu'étudiant, ça rend les démarches plus faciles peut-être ?

  • Chloé

    Oui, clairement. Surtout que moi j'avais un Erasmus d'un an, donc j'avais vraiment tout... En tant qu'Européen en tout cas, c'est très différent quand on est en dehors de l'Europe ou de l'Union Européenne. Pour moi, c'est vraiment la porte d'entrée la plus simple. Après, vous, je sais que c'est des cas différents, par exemple, parce que vous êtes arrivé avec du boulot.

  • Alban

    Oui, voilà.

  • Chloé

    Donc forcément, il y a l'entreprise qui fait la démarche, vous avez un soutien, il y a tout le monde qui vous explique, etc. Mais quand on est un petit peu plus à l'arrache ou qu'on n'a pas complètement fini nos études, s'inscrire à la fac, pour moi, c'est vraiment le meilleur truc à faire. Même à n'importe quel âge, en vrai, tu as... 30 ans et tu te dis, moi, je vais découvrir la Norvège. Tu te prends six mois, n'importe quel programme à la fac. Et du coup,

  • Lucie

    ça facilite les démarches.

  • Chloé

    Oui, t'es étudiant.

  • Lucie

    C'est génial. C'est un bon conseil. Au-delà des démarches facilitées, qu'est-ce qui vous a donné envie de rester à Oslo et en Norvège ?

  • Chloé

    La facilité. Tout, en fait. La vie, le cadre. Donc, nous, on vient tous les deux de banlieues parisiennes. Je ne sais pas, marcher dans les parcs. Enfin, juste le fait d'avoir le droit de marcher sur la pelouse d'un parc, c'était fou.

  • Lucie

    C'est exactement ce que je dis à Alban en étant parisienne, parce que lui, il avait peut-être plus accès aux pelouses dans les parcs.

  • Alban

    La ferme d'Himède.

  • Chloé

    L'une des premières fois que je suis venue, c'était les 200 ans de la Constitution pour la fête nationale. C'était un énorme truc. Et il y avait... des gens qui faisaient des barbecues portatifs sur la pelouse du parc du château. Et je me suis dit, waouh, la liberté !

  • Alban

    Excellent de se souvenir, parce qu'avant de vivre à Oslo, quand j'étais en Erasmus, moi en Finlande, on avait fait avec des amis un long week-end à Oslo, et on s'était retrouvés à Ekeberg, un grand, grand parc très, très connu d'Oslo. Et pareil, tout le monde sur la pelouse, avec ses barbecues à usage unique. Et j'avais trouvé ça incroyable.

  • Chloé

    Oui, c'est dingue. Les poubelles à recycler ce type de barbecue et tout, c'était vraiment... Pour moi, c'était fou. Et la proximité avec la nature, se déplacer partout à pied ou à vélo. Après, il faut avoir des jambes, quoi. C'est un peu vallonné. Mais ça, l'organisation autour de la vie, de manière générale. Je n'avais pas encore de famille à ce moment-là, du tout. mais de me rendre compte du fait que... que le travail, ce n'est pas la vie. Tu ne vis pas pour travailler du tout, en fait. C'est un accompagnement, il y a un espèce d'équilibre pour la plupart des gens qui est quand même extrêmement confortable. Et ça, c'est très inspirant. Moi, j'ai vu mes parents galérer, vraiment, depuis que je suis toute petite. Et du coup, ils nous ont toujours encouragés à faire un boulot qu'on aime, toujours. On leur a tout fait. Moi, je leur ai dit, je veux être tatoueuse. psychologue en prison...

  • Alban

    Juste à l'un de ces temps-là ? Non,

  • Chloé

    j'avais vraiment des objectifs professionnels un peu étranges, et à chaque fois ils étaient à fond quoi, mais vas-y, fais ça ! Parce que pour eux, il n'y avait pas d'épanouissement du tout dans leur travail, et c'est tout l'inverse qu'ils nous souhaitaient. Donc j'ai découvert qu'ici c'était quand même le quotidien de beaucoup de gens, et je me suis dit, c'est dingue !

  • Lucie

    Et à contrario, est-ce que tu as eu des difficultés au départ ou des choses qui ont été difficiles à adopter ?

  • Chloé

    Non. Non ? Pour moi, déjà, je parlais un petit peu norvégien. Pendant mon Erasmus, j'ai fait un semestre entier où j'avais 8 heures, 10 heures, 12 heures de norvégien avancé par semaine. Ouf ! Ah ouais, j'étais en master.

  • Alban

    Bah

  • Chloé

    à un moment. Donc, j'ai eu des cours de dialecte, des cours de prononciation. C'était assez passionnant. Et puis après, je suis rentrée dans le lecteur programme, c'est pour devenir prof. Donc, pas juste institutrice, mais avec des choses assez spécifiques et tout ça. Pour moi, la fac, ça a été... Après, pendant que j'étais étudiante en France, j'ai travaillé à l'Eau-Roi-Merlin pendant toutes mes années d'études. Donc comme je parlais un petit peu norvégien et que j'avais une expérience professionnelle, j'ai travaillé à Maxbo. J'ai été embauchée comme ça avec une poignée de main et un rendez-vous. Ça a été hyper facile. J'étais boursière, j'avais un logement étudiant, j'avais un nouveau mec. Enfin le fameux, mais on n'était pas encore ensemble. Ça s'est fait dans le même temps. Donc, nous, on découvrait plein de choses. En plus, on vivait une idylle.

  • Alban

    Vous alliez au même rythme.

  • Chloé

    À l'étranger, un autre rythme. C'était l'été, il fait jour tout le temps. Les gens sont hyper détendus. Il y a la rivière qui traverse Oslo. Non, je ne sais pas.

  • Lucie

    Les planètes étaient alignées. Ah ouais,

  • Chloé

    aucune difficulté.

  • Alban

    Génial.

  • Lucie

    Même quand l'hiver est arrivé, ou l'automne,

  • Chloé

    je dirais. Non, trop bien, j'adore la neige, j'adore l'hiver c'était un automne pas trop moisi genre une semaine de pluie et puis après ça s'est vite transformé Vraiment tout a été extrêmement facile. La liaison Paris-Oslo se fait très facilement. On avait des tarifs étudiants. Je prenais l'avion, je faisais l'aller-retour pour 70 euros, je crois, quelque chose comme ça. Donc quand tu as cours du mardi au jeudi, tu as quand même des longs week-ends. Après on ne roulait pas sur l'or, donc on ne se permettait pas de partir en week-end n'importe où, etc. Mais vraiment, c'était facile. Après, il y avait juste des produits d'hygiène. les oeufs blancs, trop bizarre ça faut s'habituer, c'est vrai s'habituer,

  • Alban

    c'est trop surprenant,

  • Chloé

    ouais, au début je voulais rien cuisiner avec des oeufs voilà, le lait alors ils ont fait du progrès mais il y a 10 ans, le lait tournait très vite donc ce genre de petits détails au début, voilà, il faut s'adapter un petit peu, mais pour même retrouver les choses que je cherchais, j'avais déjà le vocabulaire moins, donc j'avais vraiment pas de difficultés majeures.

  • Alban

    Mais ça c'est intéressant, tu parles un peu de faire ces courses. Lucie et moi, on a eu des expériences dans plusieurs pays et c'est vraiment un gros culture shock à chaque fois de savoir comment tu vas soit essayer de recuisiner un peu tes plats de base. Ça demande vraiment une traduction compliquée. Les agencements dans les rayons peuvent être différents, les noms, la présentation produit. Ou alors, si tu te sens d'essayer la culture locale, comment consommer local aussi et cuisiner ? Donc, ça fait partie de tout l'apprentissage quand tu arrives dans un pays. Oui,

  • Chloé

    et puis c'est très dur ici parce que la plupart des produits sont importés. On est sur des terres non cultivables deux tiers de l'année minimum. En même temps, encore une fois, ça a beaucoup évolué. Mais vraiment, il y a dix ans, je pense que quand je suis arrivée, c'était le début du changement, de diversifier le rayon yaourt, par exemple. Parce que moi, il y avait vraiment vanille, fruits des bois, nature, et c'est tout. Pas de textures différentes, pas de marques. Vraiment, c'était le monopole sur tous les produits. Et là, on trouve des danettes, je ne sais pas.

  • Lucie

    Et encore, moi, je trouve que c'est quand même réduit, toujours le choix. comparé à quand je vais en France, dans les rayons et tout. Mais du coup, j'imagine qu'il y a dix ans, c'était pire.

  • Chloé

    Ah ouais, ouais. Enfin, même l'autre marque, la Kumel, l'autre marque de produits laitiers, était un peu naissante, tu vois, sur les rayons. Tu ne les trouvais pas dans tous les distributeurs. C'était vraiment... En même temps, ça donne une simplicité, une facilité. Tu n'as pas le choix, en fait. Si tu veux du sucre, c'est celui-là. Si tu veux un yaourt, c'est celui-là. Tu fais avec.

  • Alban

    Et c'est vrai que c'est un peu à l'image de certains... certains aspects de la culture norvégienne. T'as un peu moins le choix, il n'y a plus cette notion de rentrer dans le moule. Après, il faut voir si tu es confortable avec ça ou pas, mais je trouve ça intéressant de le soulever parce que, comme tu le dis, on va faire mes courses avec moins de choix. Alors, pas du tout de choix pas bons, mais les choix qu'on trouve en France, je me dis, c'est n'importe quoi aussi.

  • Chloé

    Oui, la charge mentale de faire les courses en France, c'est fou. Quand on y va, on a un énorme Leclerc à côté de chez ma mère. Tu peux passer vraiment 1h30 à... à faire tes courses.

  • Alban

    C'est le cas maintenant, on évite, notamment en vacances ou quoi, les hypermarchés, c'est vraiment devenu la phobie, parce qu'on préfère avoir moins de choix, mais faire ça plus rapidement.

  • Chloé

    Ah ouais, clairement, je comprends trop les gens qui font leurs courses sur Internet en France.

  • Alban

    Ouais, voilà, c'est continuer.

  • Chloé

    Là, au moins, c'est vite fait, quoi. Mais c'est vrai que nous, on a habité surtout en centre-ville, il n'y a pas vraiment des caddies, c'est que des surfaces qui sont quand même assez réduites. Les gens font leurs courses plus ou moins au jour le jour, pour aujourd'hui, demain, ils vont à la boutique hyper régulièrement. Mais il n'y a jamais la queue.

  • Alban

    C'est rapide, voilà.

  • Chloé

    C'est rapide et tout ça. J'ai pas pris cette habitude-là. Je fais mes courses une fois par semaine.

  • Lucie

    Non, mais c'est très vrai ce que tu dis, parce que moi, quand je travaillais chez Mondelez, et qu'on vendait du chocolat notamment, forcément, on étudiait beaucoup les habitudes des consommateurs en Norvège. La caractéristique principale, c'est que ce sont des petits supermarchés et les Norvégiens vont faire leurs courses pratiquement tous les jours pour le soir même, tous les deux jours. Si tu cherches des petites courses,

  • Chloé

    surtout pour Oslo après.

  • Alban

    Voilà, c'est ça. Tu sors un peu, mais tu trouves un peu plus hyper. Il y a des vraiment gros hypermarchés comme Ops, je crois.

  • Chloé

    Ouais, Ops,

  • Alban

    ouais. Voilà, ça c'est vraiment énorme. On y est allé une fois, c'est toujours un malentendu. Mais sinon, c'est vrai que les supermarchés en dehors d'Oslo, c'est un peu plus style supermarché, mais je trouve que ça reste toujours humain. Il n'y a pas trop d'hyper en général.

  • Chloé

    Non, pas vraiment, mais en même temps, il n'y a pas... Comme il n'y a pas la diversité, les rayons ont moins besoin d'être grands.

  • Lucie

    Donc, tu es arrivée étudiante, tu faisais un job à côté étudiant. Et quand est-ce que tu as trouvé ton premier vrai job, entre guillemets ?

  • Chloé

    Moi, j'ai fait longtemps. Job, études. Ouais. Parce que je me suis inscrite à plein de types d'études différentes. Je restais longtemps étudiante, en fait. D'accord. Donc, quand j'ai compris que j'avais vraiment envie de travailler dans l'enseignement, j'ai arrêté Max Boo et j'ai trouvé un job de remplaçante en jardin d'enfants. Et en fait, ça s'appelle « til kalingsvikaar » . Donc, en fait, ils t'appellent quand ils ont besoin. Donc, tu as un espèce de contrat zéro. et je... tu es dispo, tu n'es pas dispo. À savoir que dans ce genre de structure, il y a forcément un adulte malade à l'année. Il manque tout le temps du personnel, parce qu'ils ont un nombre d'adultes à respecter par enfant. C'est un milieu où il y a des enfants de 1 à 6 ans, où les bactéries, les virus prolifèrent. Et donc, tu as forcément besoin de... De personnel en plus, en permanence. Donc, à partir du moment où, dans une structure, tu as compris les routines, tu connais le prénom des enfants, ton travail, il est bon, tu es apprécié, tu es quasiment sûr de travailler tous les jours.

  • Lucie

    D'accord, donc même si tu es remplaçante, au final, tu travailles souvent.

  • Alban

    Mais du coup, tu étais souvent dans le même jardin d'enfants ?

  • Chloé

    Ah ouais, j'ai bossé plusieurs années. J'ai eu trois expériences différentes en jardin d'enfants. un qui était une très mauvaise expérience qui a duré un mois et demi maximum. Et du coup, je suis restée trois ans et trois ans et demi.

  • Alban

    Donc après, les deux autres expériences se sont super bien passées.

  • Chloé

    C'était incroyable. J'ai adoré. Le premier dans lequel j'ai travaillé, c'était un communal qui avait beaucoup de classes. Trois étages, deux bâtiments. Vraiment un...

  • Alban

    Un gros jardin d'enfants.

  • Chloé

    Un gros. Donc eux, clairement, ils avaient tout le temps besoin de monde. Et moi, je suis tombée sur une classe où il y avait une fille en arrêt long, mais qui prolongeait par deux semaines, trois semaines. Moi, j'ai travaillé vraiment trois ans là-bas, je ne l'ai jamais vue. Et donc, j'ai récupéré ses fringues, ses chaussures. C'était pratique. Mais du coup, c'était vraiment une bonne expérience. Et puis moi, je découvrais vraiment la vision de comment... Les Norvégiens, ou la Norvège en tout cas, considèrent l'enfant à bord de la pédagogie, la petite enfance, même jusqu'à plus grand, parce qu'on a des enfants jusqu'à 6 ans sur ces structures. C'est un autre monde. Et en fait, en même temps, c'est quelque chose qui me parlait beaucoup parce que c'est le monde dans lequel moi j'ai grandi, avec ma mère qui avait vraiment ce type d'éducation-là, avec beaucoup de respect, par exemple. L'autorité dans ma famille n'existe pas. Enfin, l'autorité autoritaire. Bien sûr, après, il y a une hiérarchie. Il y a des choses qui sont imposées, etc. Bon, on ne revient pas, bien sûr, mais moi, j'ai vraiment grandi avec beaucoup de respect, à être considérée comme une personne, même si j'étais un enfant. Ce qui n'était pas le cas de toutes mes copines, par exemple. Et c'est vraiment ce que j'ai retrouvé ici. Et j'étais hyper heureuse. Je me sentais très, très à l'aise et j'apprenais énormément. Et je voyais tous ces enfants avec une... C'est une jeunesse dorée quand même. On sait que la Scandinavie est un peu avant-gardiste aussi sur ce genre de choses-là. Alors je ne connais pas les conditions à l'école de tous les enfants du monde, dans tous les pays, dans toutes les cultures, mais on est quand même extrêmement privilégiés. Et c'est aussi une des raisons qui nous poussent, nous, à... à laisser grandir nos enfants là et dans des structures aussi norvégiennes, sans se tourner sur des choses plus alternatives.

  • Lucie

    Et qu'est-ce qui t'a tout de suite sauté aux yeux dans les différences avec un jardin d'enfants français ?

  • Chloé

    Tout.

  • Alban

    La liste est longue.

  • Chloé

    La liste est extrêmement longue. En plus, ma mère travaille en petite enfance.

  • Alban

    D'accord.

  • Chloé

    Elle gère des crèches à l'émer, aux mères adjointes. Elle s'occupe de tout ce qui est la petite enfance. On a eu énormément de discussions sur les différences entre les crèches. Elle faisait surtout crèches et transitions maternelles. Et tout. L'organisation, la considération aussi, le nombre d'adultes par enfant. Quand c'est des enfants de 1 à 3 ans, on est sur 3 enfants pour 1 adulte. Déjà, rien que ça, c'est fou. C'est incroyable. Et puis après, ils sont un peu plus grands, etc. Et puis on peut monter jusqu'à 18 enfants maximum, si le groupe est assez âgé, donc entre 4 ans et demi et 6 ans. Là, tu vas avoir 18 enfants pour 3 personnes. Ce qui reste quand même assez luxueux, parce qu'après, on est loin des institutrices qui ont 25 enfants, une atsem. Ça fait une sacrée différence. Et en fait, chaque enfant apprend à attendre. à s'organiser, à évoluer avec d'autres enfants, à ne pas voler les jouets, ce genre de choses-là. Et en même temps, nous, on a le temps de leur montrer, on a le temps de leur expliquer. On passe beaucoup de temps dehors aussi, et on a le temps de les faire s'habiller. Ils apprennent à le faire tout seuls, et c'est OK. On peut passer une heure dans la garde-robe pour qu'ils mettent tous leurs habits, ou même juste une chaussure, et c'est OK. Maintenant,

  • Alban

    on comprend mieux.

  • Lucie

    C'est pour ça qu'elle n'a pas autant de temps le matin à s'habiller.

  • Alban

    Le soir, en ce moment, on est dans une phase, on va la chercher. C'est parti pour trois quarts d'heure. Je monte sur le banc, je saute et regarde moi. Et puis, je ne m'habille pas et je reste à l'école. C'est trop bien. Mais voilà, en fait, il y a vraiment le temps. C'est intéressant parce que nous, on n'a pas tous les codes non plus. En tant que parent français d'une petite fille qui est dans un système norvégien.

  • Chloé

    Le temps, c'est une énorme différence. Il n'y a pas de... Les repas sont timés. Les repas sont timés et ça c'est un problème que nous on rencontre vraiment au quotidien. Petite anecdote, ma fille a 6 ans, elle est à l'école maintenant, l'équivalent du CP. Ils ont 30 minutes pour manger, ils vont chercher leur boîte, ils ramènent leur boîte, ils mangent leur boîte, ils ferment leur boîte, ils se lavent les mains et il s'est passé 30 minutes. Elle n'a pas le temps de manger. Et même quand elle était, ça s'appelle le born-out à gueule, même quand elle y était, souvent on avait... Alors moi, elle était dans le même... dans lequel moi j'ai travaillé, mais bon après quand elle a commencé, j'ai arrêté et en fait, souvent j'avais des retours de mes anciens collègues qui me disaient, mais ta fille c'est une heure qu'il lui faut à table, qu'est-ce qui se passe ? Elle s'assoit et puis elle commence à discuter avec tout le monde, et je dis ouais mais ça...

  • Alban

    Le pire c'est qu'elle nous a sorti un petit verre de vin la dernière fois !

  • Chloé

    Non, mais on a toujours eu ce problème-là, parce que pour nous, le repas, c'est vraiment un moment social. Et on passe du temps en famille, vraiment. Et puis moi, tout le monde me dit, mais attends, quoi ? Tes enfants passent une heure à table ? Mais c'est possible ! Quand ? Bah oui, mes enfants passent une heure à table. On est assis ensemble, on discute, on se raconte nos journées, on se fait des blagues, on parle de demain, etc. Donc du coup, ma fille, elle n'associe pas du tout le moment du repas à « il faut manger pour donner de l'énergie à ton corps, pour survivre le reste de ta journée » . Donc là, c'est un peu compliqué.

  • Lucie

    D'ailleurs, c'est pareil pour les adultes au bureau. Ils mangent tous très rapidement, en 30 minutes, voire parfois devant les ordi si c'est des boulots en entreprise. Et c'est vrai que nous, en tant que Français, on est là, ben non, venez, on va se poser, on va discuter en même temps.

  • Chloé

    Et ça, pour nous aussi, c'était un choc pour moi. Quand on parlait des chocs de culture, alors Max Bouge commençait à 6h du matin, à 10h30, le téléphone sonnait, Chloé va en pause. Comment ça en pause ? Goûter ?

  • Alban

    Va en pause, petit déj. Ouais.

  • Chloé

    Pause-déjeuner ? Waouh ! Alors, j'avais 30 minutes, clairement, je prenais un petit déjeuner. Ça, pour moi, c'était trop bizarre. Sur les jardins d'enfants, étrange aussi. Parce qu'en fait, tout le monde est très... Enfin, t'imagines, tu travailles en pyjama, plus ou moins. T'as le temps tout le temps, t'es en chaussettes, tu joues au sol avec les enfants. Il n'y a pas non plus vraiment de hiérarchie, même au sein de la classe. Donc, il y a une structure. Il y a des pédagogues qui ont... des études spécifiques. Après, il y a des espèces d'ATSEM qui ont des études spécifiques, mais moins hautes. Et puis après, il y a les remplaçants, les assistants, etc. Mais bon, tout le monde est quand même largement au même niveau face aux enfants, en tout cas. Et l'ambiance est hyper chaleureuse, disons. Et avec beaucoup de proximité, aussi du contact, on caline beaucoup les enfants, etc. Et tu vas dans la salle repas, il y a un silence de plomb. Chacun mange son truc. Et ouais, mais en fait, alors quand tu travailles avec les petits, donc jusqu'à 3 ans, il y a la sieste. Donc t'as cette espèce de moment de calme dans ta journée. Mais quand t'es avec les 3-6 ans, qui ne s'arrêtent jamais, qui parlent tout le temps, qui se chamaillent, fille-garçon, garçon-garçon, fille-fille, joue au coiffeur avec moi, oui mon épée elle s'est cassée, fais-moi un avion, n'importe tout. Tout et n'importe quoi, on a énormément de jeux libres. Tu comprends en fait que, bon déjà, c'est des Norvégiens, ils ont besoin de leur bulle. Pas tout le monde, j'ai pas envie de mettre beaucoup trop d'étiquettes, mais comme on disait au début. Et ensuite, tu comprends que t'as besoin de ces 30 minutes de silence pendant ta journée.

  • Alban

    C'est comme un temps calme, en fait, le repas pour eux.

  • Chloé

    C'est ton propre temps calme. Et ça,

  • Lucie

    c'était toi forcément avec tes collègues à ce moment-là,

  • Chloé

    en tout cas pendant la pause repas. J'avais. Trop bizarre.

  • Lucie

    Et comment tu as été traitée en tant qu'employée ? Sur les structures communales, il y a un espèce de standard. À savoir qu'il y a une énorme majeure différence entre la France et la Norvège. Quand tu travailles dans le public, au niveau de l'enseignement en tout cas, tu es beaucoup mieux payée et tu as beaucoup plus d'avantages. Ah ok !

  • Alban

    Donc là, en Norvège, dans le public norvégien, mieux payée et plus d'avantages que dans le privé norvégien ?

  • Lucie

    Oui, dans l'enseignement en tout cas. Wow, ok. Clairement. Pour exemple... du coup on travaille 7h30 continue, donc c'est le forfait horaire norvégien notre pause déjeuner est comprise et payée, parce qu'on est obligé de rester sur la structure vu qu'il y a un nombre d'enfants par adulte, en cas d'incendie ou n'importe, donc ça c'est comme ça normalement partout et normalement sur toutes les structures que ce soit public ou privé, mais après il y a des différences, par exemple quand tu fais une heure supplémentaire donc une fois par mois il y a des réunions, ce genre de trucs, tu vas rester deux heures de plus où ils ont besoin d'un extra, une collègue malade, n'importe. Tu fais une heure supplémentaire. Déjà, elle était payée à 300%, je crois. C'était vraiment un truc énorme. Donc, elle est payée. Et en plus de ça, tu l'as en récup.

  • Alban

    Ah wow !

  • Lucie

    Tu peux mettre les deux. Et elle est payée et tu l'as en récup. Donc, ça, dans le privé, ce n'est pas comme ça.

  • Alban

    À toutes nos entreprises, si vous nous entendez, on est OK pour avoir les mêmes conditions. Je plaisante, mais en général, c'est vrai que selon le contrat qu'on a, il n'y a pas vraiment la notion de cadre, pas cadre, mais un peu indirectement. Et en général, les heures sup, c'est l'un ou l'autre. Soit on se les fait payer plus, soit on les récupère. Dans les grandes entreprises, en général, c'est ça le système.

  • Lucie

    Il y a beaucoup d'accords de branches. Donc vous, vous êtes tous les deux dans les branches ingénieurs. Donc vous êtes effectivement sur ce système-là. Après, ce n'est pas partout pareil. C'est un peu différent, mais oui. Après, en Norvège, par expérience, et donc du coup, pas sur le même secteur que le vôtre, mon conjoint est ingénieur aussi, et en fait, on remarque qu'on nous encourage vraiment à ne pas faire d'heures supérieures. Vraiment, ce n'est pas du tout bien vu. Un employé qui va faire plus d'heures, un patron qui va te dire, « Non, en fait, tu n'as pas fini ton dossier, tu restes. » Ce genre de choses-là, c'est très mal vu.

  • Chloé

    Et sur ce point, dernièrement, j'ai été représentante des employés dans mon entreprise. Et effectivement, quand il y avait des heures sup, les employés devaient justifier pourquoi ils avaient fait ces heures sup et devaient rendre des comptes au RH et à moi pour être sûre que c'était fait dans de bonnes conditions et pour de bonnes raisons. Oui,

  • Lucie

    et en fait, ça, ça fait partie vraiment du... C'est quelque chose d'intégrant. pour déjà le bien-être au travail. Et ensuite, comme je disais tout à l'heure, le boulot, ton métier, c'est un accompagnement de ta vie. Tu ne travailles pas pour ton métier. Tu ne vis pas pour ton boulot, en fait. Et donc, du coup, ça fait aussi partie du contrat social et du contrat de confiance et du contrat de travail à ne pas encourager les personnes à faire des heures sup. Parce que ça développe aussi plus facilement des environnements de travail un peu toxiques. Après, je n'ai pas énormément d'exemples, mais mes deux parents sont fonctionnaires, donc c'est légèrement différent. J'ai un ami en France qui a exactement le même statut que mon conjoint. Et lui, s'il part du boulot avant 18h30, c'est hyper mal vu.

  • Chloé

    Bien sûr.

  • Lucie

    Alors qu'il fait son travail, il s'organise, il prend des pauses déjeuner plus courtes. Enfin voilà, lui, il n'a rien à se reprocher, mais il est tout le temps montré du doigt. Il a de la pression, etc. Parce qu'il part trop tôt du boulot.

  • Alban

    Oui, rien que le volume horaire, le présentéisme, tout ça, c'est vraiment encore un sujet. Oui,

  • Lucie

    bien sûr. Et le fait que ça n'en soit pas un ici, c'est incroyable. De dire, je vais chercher les enfants, 15h c'est terminé. Par exemple, dans une entreprise dans laquelle mon conjoint a travaillé, il était interdit de programmer une réunion qui devait se finir après 15h.

  • Alban

    Ah mais oui.

  • Lucie

    Si tu as une réunion, c'est 13h max. Oui,

  • Alban

    j'adore. Il faudrait que tu me donnes le nom. Non, mais c'est vrai.

  • Lucie

    En tout cas, le vendredi, il y a des trucs religieux où tu ne touches pas au vendredi.

  • Alban

    Tout le monde part en hutte, en cabine, Ausha.

  • Lucie

    Quand tu es adulte et que tu as une vie de famille et tout ça, tu vas chercher tes enfants, c'est normal.

  • Chloé

    Comment font d'ailleurs les employés des Barnagues, des jardins d'enfants, parce que pour les chercher leurs propres enfants ?

  • Lucie

    Alors, on se repose sur le conjoint. Non, en fait, on a des... je ne sais pas comment ça s'appelle en français donc en fait soit tu as le premier service, le service du milieu donc quand tu es sur un roulement à 3 et le service du soir, donc du coup soit tu commences à 9h30 et tu finis à 17h grosso modo, soit tu commences à 7h ou 7h30 selon les structures et tu finis à 14h30 ou 15h et donc du coup dans ta semaine c'est quand même assez changeant parce que ça c'est tous les jours une fois premier, deuxième, troisième premier, deuxième, troisième, etc Moi j'ai travaillé dans des... des classes où après on était quatre. Même organisation. Et du coup, on essaye de s'arranger pour avoir... Déjà, souvent, on travaille proche de là où on habite. Après, je sais qu'il y a aussi quand même... Alors pour nous, non. Pour les personnes qui travaillent en physique tout le temps, je ne sais pas moi, les menuisiers, les caissiers, dans la vente directe, etc. Oui, c'est une autre organisation, mais je sais qu'il y a ce système aussi de roulement. Et puis après, par exemple, la maîtresse de ma fille, elle n'a pas de roulement. C'est 8h tous les matins. Et par contre, c'est elle qui va chercher son petit à l'école. Alors l'école en Norvège, soyez prêts quand ça va vous arriver. C'est 8h15, 13h15. Après, il y a le périscolaire, etc. Mais donc, du coup, elle, en tant que maîtresse, elle a forcément de l'administratif, préparer des choses, etc. Mais elle finit rarement après 15 heures. Donc, c'est systématiquement son conjoint qui dépose leur fils au jardin d'enfants. Et c'est moi, elle, qui récupère une organisation. Ça se trouve.

  • Alban

    J'adore que tu donnes les clés du fonctionnement du jardin d'enfants. Parce qu'en fait, il y a vraiment cette... Même si on n'a jamais eu d'enfants en France, On garde malgré tout des codes et des repères français, peut-être nos propres expériences, ou la famille, des cousins, ou que sais-je. Et ça nous aide, je trouve, à comprendre un peu. Parfois, on peut se poser des questions sans aller chercher à avoir les réponses. Sur, on a la crèche, enfin, Jordan enfant, on va voir des... Tiens, ce matin, c'est cette personne. Tiens, ce soir, c'est une autre personne. Mais c'est intéressant de voir quel est le derrière, le roulement, faire de la place aussi pour leur propre vie.

  • Chloé

    Bien sûr, et c'est important. Quand je vois, moi, je peux comparer, parce que ma sœur a travaillé en crèche à Paris.

  • Lucie

    Wow.

  • Chloé

    et en fait c'est pas les mêmes horaires elle commençait très souvent tôt et elle terminait très souvent tard parfois un peu moins tard mais quoi qu'il arrive c'était tard et un nombre d'enfants et pour le coup ils ont pas de remplaçant quand quelqu'un est absent parce qu'il y a des autorisations pour le coup en Norvège aussi si tu veux travailler

  • Lucie

    en jardin d'enfants ou avec des enfants, quoi qu'il arrive, même si c'est pour un remplacement, tu dois donner un extrait de casier judiciaire. Il y a des espèces de boîtes d'intérim spécialisées pour les remplaçants en jardin d'enfants et en temps périscolaire à l'école. Donc, eux s'occupent d'enquêter plus ou moins sur les personnes qu'ils vont envoyer, etc. Moi, je ne suis jamais passée par là. Je suis toujours passée directement par les structures. Mais après, tu as un espèce d'entretien. En Norvège, on est très... en tout cas professionnellement parlant, c'est très humain. Donc, ils vont regarder un peu ton CV, mais ils sont surtout intéressés à t'entendre parler, savoir d'où tu viens, surtout pour travailler avec les enfants.

  • Chloé

    On va vérifier que tu n'es pas un psychopathe caché.

  • Lucie

    J'ai fait un entretien, par exemple, d'embauche à l'école française d'Oslo. Et ils m'ont dit... Ils avaient un problème sur mon rapport à l'autorité, par exemple. Ils m'ont dit, en fait, ce n'est pas question que tu travailles avec nous. Enfin, je les intéressais beaucoup parce que j'ai un FLE, donc ça c'est très intéressant. Et en même temps, moi je parlais beaucoup. Qu'est-ce que c'est un FLE ? Un FLE, pardon, c'est des études spécifiques, ça s'appelle Français Langue Étrangère. Et en fait, normalement, si tu enseignes en structure francophone ou le français aux étrangers, ou ce genre de choses, rapport France-étranger, il faut normalement... avoir des études en FLE. Moi, j'ai une mention FLE sur ma licence, par exemple. Je fais un bicursus.

  • Alban

    Ce qui fait que normalement, tu es encore plus apte, on va dire, à apprendre le français à quelqu'un qui ne parle pas à la base.

  • Lucie

    Oui, d'une certaine manière. Grosse. Par exemple, il y a des personnes qui étudient le FLE en France de manière très poussée et qui vont travailler avec des entreprises et donner des cours de français aux personnes étrangères. Ça, ça se fait aussi. Mais du coup, quand même, la mention FLE est très appréciée sur les structures francophones à l'étranger, etc. Et vraiment, les questions qu'on m'a posées à l'entretien, déjà, il y avait une commission, ils étaient 11. Je me suis dit, franchement, ils exagèrent. Tu entrais dans cette salle et tu n'avais pas juste une personne ou deux, comme j'ai toujours eu. C'était vraiment, il y avait 11 personnes. Il y avait même des représentants de parents d'élèves, la comptable.

  • Alban

    Par exemple, Elon Musk.

  • Lucie

    Toute une délégation avec tous ces gens-là ont eu devant toi. Je me suis dit, moi, je vais en prendre un entretien. Je vais m'envocher les mains dans les poches. Et donc, les questions étaient vraiment très orientées par rapport au fait que, parce que j'avais l'air jeune, j'ai une voix fluette, ce genre de choses-là, ils disaient, tu vas te faire manger avec des gamins de 11 ans. Tu ne te rends pas compte ? J'ai toujours travaillé avec des enfants, je n'ai jamais eu de problème. Et en fait, il y avait cette espèce de choc culturel quand même. À la sortie de l'entretien, je me suis dit... De quoi qu'il arrive, je n'ai pas envie de travailler là. Le fait de me retrouver dans un système franco-français scolaire avec ce genre de structure brute et élitiste sur beaucoup de choses, après avoir connu la souplesse en Norvège, et notamment avec les enfants qui sont si jeunes. C'était un peu « waouh » , les entretiens d'embauche en Norvège. en tout cas de mon expérience extrêmement humain. Tu dis oui, alors et du coup, nous on aimerait bien expliquer ça aux enfants, comment tu ferais, ce genre de choses-là. Il y a un enfant qui joue avec l'eau, il en fout partout, il est trempé, c'est trempé partout. Les autres, ils arrivent, ils glissent. Qu'est-ce que tu fais ? Des mises en situation.

  • Chloé

    Pour voir comment tu vas,

  • Lucie

    Julienne. Qu'est-ce que tu fais ? La première réponse, c'est tu prends le temps. On va aller ensemble chercher du papier, essuyer, fermer le robinet. Ensemble, on va aller chercher du change, changer les chaussettes des autres qu'on glissait.

  • Alban

    On dit souvent qu'il n'y a pas vraiment d'apprentissage au jardin d'enfants norvégien. Ça peut être un des reproches de ceux qui aiment l'éducation plus française. Toi, est-ce que tu dirais que, notamment via l'exemple que tu donnes d'entretien, est-ce que tu trouves que la première des choses qu'on apprend, c'est qu'est-ce qu'on aime faire et l'autonomie, par exemple ?

  • Lucie

    Je dirais que c'est faux pour les personnes qui pensent qu'il n'y a pas d'apprentissage en jardin d'enfants. Déjà, les enfants sont quand même au jardin d'enfants jusqu'à 6 ans. C'est une énorme période de leur vie. C'est très personnel, mais j'aime beaucoup qu'on mélange les âges. Souvent, c'est 1 à 3 ans et 3 à 6 ans. Ça autonomise les plus petits qui ont envie de faire comme les grands et ça sensibilise les grands à aider les plus petits. À aussi prendre le temps, à être plus respectueux aussi sur le fait que lui, il ne sait pas. Parce que du coup, personne n'est montré du doigt parce qu'il est dans l'incapacité de tartiner son pain tout seul. Ou de mettre ses chaussures tout seul. En place de le montrer, tu le dois, et de dire, il n'a pas appris à faire ses lacets, il ne sait pas mettre ses chaussures, etc. On va en fait encourager les plus grands, ou les autres, à aider ceux plus petits. Et en fait, ça part aussi du principe qu'on a le temps, parce que encore une fois, je pense qu'il n'y a pas vraiment de comparaison réalistique possible, ou réaliste, pardon, avec la France. Si tu vas dehors et que tu as 15 minutes, parce que c'est les 15 minutes de récré, et que déjà, tu as tes chaussures sur toi tout le temps. un peu différent. Il faut que tu mettes tes chaussures. Tu n'as pas le temps de passer 15 minutes à mettre tes chaussures, ou à essayer de le faire tout seul, ou à essayer de faire en sorte qu'il y ait un autre enfant qui va l'aider. Parce que nous, on est des adultes. C'est qu'à tard, un enfant de 4 ans qui aide un enfant de 2 ans à mettre des chaussures.

  • Alban

    Il faut avoir du temps dans soi, c'est clair.

  • Lucie

    Oui, du temps et de la patience. Il ne faut pas du tout être dans l'urgence de « attends, c'est bon, c'est bon, hop là, c'est fait, c'est fait. Tiens, je vais te remonter ton zip, on va mettre le bonnet, les moufles sont à l'envers, les chaussures... Les enfants qui ont des chaussures à l'envers, c'est OK, ils l'ont fait tout seuls, ils sont trop fiers, on leur laisse leurs chaussures à l'envers. Ça, c'est vraiment... Moi, je pense que ça donne aussi beaucoup plus de respect et de patience aux autres envers les autres. Ça inculque un peu plus de tolérance, ne serait-ce que juste dans la structure, dans le fait que personne n'est montré du doigt parce qu'il ne peut pas. Et à l'inverse, personne n'est montré du doigt parce qu'il peut. Et en fait, on ne va pas spécifiquement, en tout cas à cet âge-là, encourager les enfants qui sont bons ou naturellement bons. à exceller. On a quand même un espèce de truc de groupe. Et là, nous, on le voit beaucoup avec ma fille qui est sur le CP. Elle est plus petite que les autres. Elle est née en fin d'année. Elle a beaucoup d'enfants de sa classe qui ont bientôt 7 ans et elle en a encore 5. C'est la plus petite. Elle a toujours été la plus petite. Mais elle est très responsable. Elle est très posée. Elle adore les trucs intellectuels. Elle lit, elle écrit. Et en fait, elle a fait ça toute seule. Parce que, bien sûr, ils ne l'ont pas fait au jardin d'enfants. Et bien sûr, ils ne le font pas au CP.

  • Chloé

    Ils ne le font pas au CP ?

  • Lucie

    Non, on apprend à l'alphabet, tranquille.

  • Chloé

    Mais à partir de quand ils apprennent à écrire et lire ?

  • Lucie

    Ah là là ! C'est 8-9 ans. En fait, le truc, c'est qu'on va favoriser les périodes sensibles. On va favoriser l'autonomie. Donc là, par exemple, dans sa classe, il y a beaucoup d'enfants qui ne savent ni lire ni écrire. Ce qu'ils demandaient, c'est qu'ils sachent écrire leur prénom. Normalement, tu te dis qu'un enfant de 6 ans, 6 ans et demi, il sait écrire son prénom. A priori, ça va. Et donc, du coup, c'est vraiment ça qui est demandé. C'est le mot qui nous a été passé avant la rentrée. Reconnaître ses affaires, être autonome sur s'habiller, se déshabiller, aller aux toilettes. et savoir écrire son prénom. Pour le moment, elle ne s'ennuie pas. Mais nous, on a beaucoup de gens qui nous disent « Attention, qu'elle ne s'ennuie pas. » Parce que, en fait, c'est assez l'inverse. En France, on va avoir le groupe de tête qui va être encouragé à être tiré vers le haut. Le groupe du milieu qui va être encouragé à suivre ce groupe de tête. Et puis, les moins bons qui vont malheureusement rester dans le fond la plupart du temps parce qu'ils ne sont pas assez bons. Ils ne suivent pas le rythme, ils ont des difficultés scolaires, ce genre de choses-là. Si tu ne rentres pas dans le moule du mieux, tu vas être un petit peu laissé sur le côté, grosso modo. En tout cas, moi, c'est ce que j'ai vécu. J'imagine qu'on a à peu près le même âge. Vous êtes sur l'expérience scolaire. En Norvège, ça va être l'inverse. Il faut laisser personne derrière. Donc, quitte à baisser le niveau général du groupe moyen, parce que tu as toujours deux, trois têtes, trois, quatre qui se perdent en route, et une dizaine, quinzaine d'enfants qui sont quand même... plus ou moins homogène. Et en fait, là, quitte à baisser le niveau général pour que ceux qui sont derrière ne soient pas derrière. En fait, les Norvégiens me disent « Quoi ? Ta fille lit et écrit ? » Ils sont vraiment là-dedans. Mais non, c'est oui des Français, mais aussi beaucoup d'étrangers. Nous, on a dans la même classe de ma fille, il y a un petit garçon qui est moitié sud-africain, moitié... un pays de l'Est, je ne sais plus lequel, et ses parents font en sorte qu'il ait des cours privés. En plus, lui, il a des leçons en plus, etc. Parce qu'il ne croit pas au système norvégien. Alors que moi, qui ai travaillé avec des Norvégiens toute ma vie, au final, ça fait dix ans que je travaille avec des Norvégiens, en tant qu'adulte, je n'ai pas la sensation qu'ils sont plus bêtes que moi. Qui ai été à l'école avec des bons résultats.

  • Chloé

    Parce que moi, c'est marrant qu'on parle de ce point. Quand j'ai visité un jardin d'enfants Pour notre fille, j'avais posé la question quels devaient être les acquis pour après passer au CP. Et elle m'avait répondu ce que tu disais. Elle s'est posée le problème. Il faut qu'elle sache écrire son prénom. J'avais dit c'est tout. Elle me dit oui. Je dis ok. Et donc j'étais revenue un peu inquiète. J'en fais part à Alban et je lui dis franchement, je ne sais pas. Est-ce qu'il ne faudrait pas plutôt la mettre à l'école française et tout ? Et puis Alban m'avait dit... Mais Lucie, tous les Norvégiens que tu connais, ils savent très bien lire et écrire. Donc, ce n'est pas l'importance qu'ils sachent le faire à 3 ans ou à 8 ans.

  • Lucie

    Une petite différence sur la structure de la langue aussi. Parce que, par exemple, on prononce... plutôt mon approche linguiste qui va intervenir, c'est-à-dire que le français, c'est une langue quand même intrinsèquement plus complexe à apprendre que le norvégien, dans le sens où la moitié des lettres, des mots tombent. Je ne les prononce pas. Et on le voit chez les enfants francophones qui apprennent le norvégien. Ma fille n'a jamais mélangé le français et le norvégien. Jamais. Alors que mon fils, lui, c'est un parfait mélange. J'utilise un mot ici, là. Il s'en fout complètement. Mais alors, elle, jamais. Par contre, elle était... Parce qu'en fait, les langues, c'est des maths. Quand même. Donc, elle, elle était quand même hyper perturbée, même à deux ans, sur le fait que... pluriel en français ne se prononce pas. Et ça, c'était vraiment difficile pour elle. Et du coup, en fait, elle la collait, le pluriel norvégien au mot français. Et j'imagine que vous allez le remarquer assez rapidement.

  • Alban

    Je pense que cet épisode est déjà passé, mais il me semble, maintenant que tu le dis, que ça nous est arrivé.

  • Lucie

    Donc,

  • Chloé

    elle mettait une structure norvégienne, mais avec des mots français.

  • Alban

    Aussi.

  • Lucie

    Tu finis une phrase avec.

  • Alban

    Typique.

  • Lucie

    même moi je le fais je me rends compte des fois que je me dis mais oula je ne parle plus bien français mais en fait ça tu vois il y a un truc où le cerveau il a quand même besoin d'avoir des repères etc et en fait le français c'est une langue qui est extrêmement réglée donc je comprends qu'on justifie d'apprendre vraiment le côté systématique de la langue un peu plus tôt Oui.

  • Chloé

    Pour le français.

  • Lucie

    Parce que c'est quand même beaucoup moins phonétique. Le norvégien, qui est une langue qui reste extrêmement simple à apprendre et à maîtriser. Donc voilà, il y a des mots bizarres, il faut apprendre le truc à plus.

  • Alban

    Il y a quand même des cas qu'on prononce « che » . Je dis ça, je dis rien, mais bon,

  • Lucie

    quand même ! Ça dépend de l'environnement linguistique. Mais en fait, oui, il y a deux, trois prononciations un peu étranges, mais c'est une langue qui est beaucoup plus sensible. Oui, genre tu sens plus la langue. Et puis, en fait, tu es un Norvégien, tu grandis avec tes parents qui ont un dialecte d'ici, un dialecte de là. Parce qu'en même temps, on est plus libre en Norvège. La langue est extrêmement plus libre en France, où on est encore extrêmement académique, super strict sur... Tu envoies un mail administratif.

  • Alban

    Oui, il y a les formules. Je vous prie de bien agréer. Mais ça, ça...

  • Lucie

    Voilà, c'est ce genre de choses où tu vas devoir t'en tenir quand même à des formules, à un vocabulaire soutenu, ou même une prononciation, parce que tu es en entretien d'embauche ou parce que tu es au café avec un copain. C'est quand même différent. On ne retrouve pas beaucoup ça en Norvège. Et puis, chacun est libre de sa propre langue.

  • Alban

    Ta fille, elle a l'air, on va dire, en avance sur le système norvégien. Est-ce que tu l'as aidée avec ça ? Est-ce que c'est elle vraiment qui s'est intéressée ? Et du coup, tu l'as soutenue, on va dire, plus qu'encouragée ? Comment tu vois ça ?

  • Lucie

    C'est que elle. C'est que elle. Oui, parce que moi, j'ai été profondément trempée dans la société norvégienne, en tout cas au niveau de la pédagogie, de la petite enfance, des apprentissages et du reste. On essaye bien sûr de respecter ces périodes sensibles. Voilà si on voit qu'elle est. extrêmement intéressée par ça. On va essayer de lui trouver deux, trois trucs qui ont rapport, etc. Par exemple, elle a appris à sauter à pieds joints, à deux ans passés. Elle a regardé les autres sauter pendant des mois et des mois. Elle n'aimait pas aller jouer dehors. Elle n'est pas norvégienne sur ça, par exemple. Et en fait, elle a développé des capacités moteurs. Donc, on a la motricité fine et les capacités moteurs. Donc, elle a... motricité fine, ouais, elle attrapait des cheveux par terre en petites pinces comme ça à 4 mois mais bon, voilà, marcher, sauter, grimper faire tout ce genre de motricité un petit peu plus avancée avec le corps c'est venu super tard par contre intellectuellement, ça Ausha donc elle est très différente sur ça elle adore faire les trucs calmes posés donc moi j'ai pas la sensation qu'elle soit en avance et ça je suis très apaisée avec ça et je suis pas trop angoissée. Donc oui, forcément, elle, par exemple, elle est le profil type d'une enfant brillante qui réussirait à son âge, dans le système français.

  • Alban

    Le bon profil, on va dire. L'inverse.

  • Lucie

    Lui, il est comme un poisson dans l'eau sur le système norvégien. Pour rien au monde. On essaierait de l'enlever de là. Mais elle, on s'est posé la question. Elle déteste. Elle adore l'école, bien sûr. Mais il y a trop de temps libre, à son goût.

  • Alban

    De temps libre dans l'école norvégienne ? Oui,

  • Lucie

    parce qu'il faut savoir qu'ils sont à l'école de 8h15 à 15h15. Mais ils ont une pause déjeuner de 30 minutes. Ils ne rentrent dans l'école qu'à partir de 9h et quelques. Donc la première heure, ils sont dehors. Et ils ont aussi deux pauses entre. et pendant la classe, ils peuvent aussi avoir du temps libre où ils vont sur l'activité. Donc en fait, souvent dans les classes, c'est organisé par, alors ça je ne sais pas le dire en français, par espaces dédiés à un type de choses. Donc par exemple, sur les jardins d'enfants, tu vas avoir l'espace construction, où tu vas trouver des Legos, des Kaplas, ce genre de choses. Tu vas avoir l'espace livre et temps calme. Tu vas avoir l'espace jeu de rôle, où du coup tu as des poupées, une cuisine, ce genre de choses. En fait, les espaces, ils sont quand même construits et séparés de manière à ce que l'enfant... puisse s'intéresser et se construire avec ce qui lui l'intéresse. Et en fait, c'est là que l'apprentissage se fait par le jeu. Et c'est énorme. Et aussi, les enfants nous donnent énormément d'informations par rapport à ce qui se passe chez eux. Nous, on est formés aussi, en tout cas en jardin d'enfants, à jouer énormément et encourager les enfants à faire les jeux de rôle de la maison pour détecter s'il y a, par exemple, des enfants qui sont dans des foyers violents ou il y a certaines choses qui ne sont pas respectées, des choses sur les habitudes alimentaires. Et en fait, c'est une manière aussi de nous, de regarder l'enfant et d'essayer de pouvoir lui venir en aide. C'est aussi une manière d'être intrusif dans la vie d'un foyer. Alors ça, moi, c'est quelque chose qui me dérange un peu plus parce que du coup... Oui, on prend énormément d'informations aux enfants. Donc oui, on sait beaucoup de choses de ce qui se passe chez eux. Après, c'est des enfants et il y a des âges. Il y a des âges où il y a la fantaisie qui est très, très développée et où du coup, une parole sur deux, tu sais qu'il faut le prendre vraiment avec des pincettes. Mais en tout cas, vraiment chez les tout-petits, eux vont vraiment reproduire leur quotidien. Ils n'ont pas encore assez de fantaisie ou d'imagination pour faire d'autres choses. Donc quand tu vois une petite fille qui traite super bien sa poupée, qui l'emmène bien au dodo, qui lui tient la main pour qu'elle s'endorme, Tu dis, ça, c'est ce qui se passe chez elles. Et à contrario, des enfants qui vont... Alors, on ne parle pas des enfants qui jettent les poupées par terre. La colère, ça existe. Ça,

  • Alban

    on a carrément droit.

  • Lucie

    Après, on ne catégorise pas. Mais ça nous permet vraiment d'enquêter quand même.

  • Chloé

    Tu as eu un cas où tu as repéré ?

  • Lucie

    Alors, moi, j'ai eu une classe très difficile. Et c'est ce qui m'avait fait arrêter d'ailleurs cette structure-là.

  • Alban

    Est-ce que c'était ta toute première expérience qui a duré un mois ? Non,

  • Lucie

    pas du tout. Alors, je vais essayer de faire rapidement. J'ai donc travaillé à remplacer une personne pendant... plus d'un an et demi, quasiment deux ans, où en fait finalement j'avais pris sa place. Donc c'était ma classe et c'était des tout petits. Donc là, moi j'étais très bien, c'était super et tout ça. Mais ça restait que je n'avais pas encore de CDI. Et là, en fait, je finissais mes études ou en tout cas, là, je n'allais pas continuer sur des études et j'avais envie vraiment d'avoir un CDI pour diverses raisons, même si en fait, dans les fêtes, c'est la même condition en Norvège. en tout cas sur ce genre de choses. Donc j'ai dû passer un entretien parce qu'en fait, par les structures communales, tu dois envoyer ton CV, tu dois envoyer ce dossier-là sur une plateforme qui est traitée au niveau communal et ensuite ils sélectionnent des dossiers qu'ils envoient au RH ou aux directrices, etc., qui ensuite te convoquent en entretien. Donc elles peuvent pas dire, moi j'ai un dossier à proposer en entretien. T'es obligé de passer de toute façon par l'utri sélectif avant de la communiquer. Donc j'ai envoyé ma candidature, j'ai reçu le fait que j'allais être reçue en entretien, etc. Et j'ai passé un vrai entretien d'embauche. Alors que ça faisait deux ans que je travaillais avec eux. Et en fait, il y avait 479 personnes qui avaient postulé, je crois, entre quand même. Ah oui. Énorme. Et donc j'ai été prise. Wow. Et donc ils m'ont proposé une place dans une classe de 3-6 ans. Choc. Pour moi, ça a été un choc.

  • Alban

    Parce qu'avant, tu étais chez les tout-petits ?

  • Lucie

    Moi, j'étais chez les petits. Il y avait la sieste, il y avait l'apprentissage de la langue, parce que moi, ça ne faisait pas si longtemps non plus, ça faisait peut-être deux ans que j'étais en Orveille. Et en fait, les 4-5 ans qui parlent en permanence, et en plus, ils inventent plein d'histoires. Vraiment, j'avais la tête, la salle de pause, mais je l'ai savourée en silence. Parce que du coup, en plus, c'est en norvégien. dur. Il commençait à avoir des dialectes à cet âge-là, déjà, selon les parents et tout. Et puis moi, j'étais vraiment... Je comprenais pas qu'il y avait une licorne sur un nuage, qu'il avait été chercher un seau magique et tout ça. Enfin, tu vois, c'est du vocabulaire que t'as pas en tant qu'étranger. T'as pas grandi ici, t'as pas les références. Quand on me parlait de Cap-Tel-Sabeltan, c'est vraiment en train de... de commencer à découvrir la culture norvégienne, en tout cas des petits. Et en fait, cette classe-là était vraiment particulière parce qu'on n'avait pas de « pedleded » . En fait, c'était une personne qui était sur un remplacement long. C'était une personne qui était en fait « barn-o-barn » , donc assistante sociale. La Norvège et la culture des assistantes sociales, j'imagine que vous le réaborderez sûrement plus tard avec d'autres personnes, mais c'est un gros, vaste sujet. Et en fait, elle, c'était vraiment ça, son boulot. Elle avait avant été assistante sociale pendant plusieurs années. Et là, elle faisait ce remplacement. Et en fait, on s'était retrouvés avec tous les cas sociaux qui étaient dans cette classe. Donc, elle, elle passait son temps à suivre des dossiers plutôt que de faire la tâche pédagogique, coordination avec les parents, etc. Enfin, elle faisait la coordination, mais avec les enfants à dossier, en fait. Et donc, du coup, nous, enfin moi, en tout cas, j'ai été énormément sensibilisée à ça aussi. J'ai été beaucoup formée, j'ai eu beaucoup de cours en extra pour vraiment savoir comment me comporter avec les parents. Parce que des fois, il y a des enquêtes sur leurs enfants et sur eux, et ils ne sont pas encore au courant. Mais des fois, légalement, il faut qu'ils soient au courant de quelque chose quand même. Qu'est-ce que tu peux dire ? Qu'est-ce que tu ne peux pas dire ? L'attitude que tu as, comment tu vas devoir noter tout ce que l'enfant dit, ce genre de choses. Ça, ça a été très dur pour moi et très lourd. et de me rendre compte. compte aussi à quel point on est attentif aux enfants, mais pas qu'eux, et à quel point on ferait tout pour le bien-être d'un enfant parce qu'on juge que ça, c'est limite. Moi, ça m'a posé quand même quelques...

  • Chloé

    Que tu trouvais parfois que ça allait trop loin, peut-être ?

  • Lucie

    Oui, je trouvais parfois que ça allait trop loin. Après, moi, en tant qu'étrangère, j'ai toujours entendu des histoires sur les injustices des barnevernes, en fait, en Norvège, sur... Oui, on m'a pris mon bébé de deux mois parce que j'étais sous antidépresseur, ce genre d'histoire. J'avais cette espèce de spectre. Alors oui, on avait des enfants qui étaient dans des situations terribles, clairement, dans ma classe. C'était vraiment très difficile. Il y avait des choses dont moi-même, je n'étais pas au courant. Par exemple, il y avait certains enfants, il n'y a qu'une seule personne qui était autorisée à les accompagner aux toilettes ou à leur changer la couche. Et là, tu fais, c'est dur quand même. Parce que moi, j'aurais, par exemple, adoré être infirmière puéricultrice, par exemple. vraiment travailler avec des enfants malades, mais ma sensibilité m'en empêche. Et en fait, de me retrouver là dans une classe avec que des enfants en difficulté dans leur foyer, parce qu'après, en fait, à chaque fois, du coup, comme elle était super calée, elle traitait super bien avec les parents, elle traitait super bien avec la police, avec les assistantes sociales, avec toute la coordination et le reste. Et ça, je trouvais que c'était un peu mal fait aussi, personnellement. Je l'aurais dit, d'ailleurs. Je l'aurais dit.

  • Alban

    Oui, répartir un peu.

  • Lucie

    c'est trop en fait même pour eux d'avoir que des copains qui font face à des difficultés alors là ils le voient pas vraiment t'as quand même ce truc de moule où tous les enfants sont égaux où tout va être pareil alors oui des fois il y a machin qui partait avec tel adulte parce qu'il devait aller à la police ce genre de choses mais ça non les enfants ils le voient pas ils sont petits Merci. Il faut savoir que du coup, nous, on avait une classe de 18 enfants. Et en fait, il y en avait peut-être une dizaine qui avaient des dossiers de progrès.

  • Alban

    Moi aussi, en tant qu'étrangère, on m'a beaucoup parlé de cette protection de l'enfance qui est très proactive. Et parfois, ça fait peur. Donc, je me dis, oh là là, parfois, je la presse pour qu'elle s'habille et tout. Est-ce que ça, ils vont prendre ça comme remarque ? Ça fait peur. Est-ce que c'est vraiment des cas extrêmes dont tu parles ? en mode violence ? Ou est-ce que parfois, ça peut être aussi ce que je considérais des petits signaux ?

  • Lucie

    On a eu tout et rien. On avait des cas très extrêmes. On avait un enfant qui allait être placé, des choses comme ça. Après, il y avait, non, des soupçons, des suspicions, des on n'est pas sûr, de la négligence.

  • Chloé

    Ah, aussi.

  • Lucie

    Oui. ils font hyper attention à la négligence et moi ça j'en suis consciente, par exemple ma fille elle aime pas s'habiller, donc là c'est le début de l'hiver il fait à peu près zéro elle aurait besoin quand même de mettre une vraie combinaison l'équipement d'hiver et elle veut pas mettre des chaussures qui sont rembourrées parce que ses pieds sont serrés dedans et elle est hyper sensible au contact et tous les matins on se bat pour lui dire non, il faut que tu aies des chaussures qui tiennent chaud, qui isolent du sol, etc. Il faut savoir que dans son école et dans beaucoup d'écoles à Oslo, il y a deux jours par semaine qui sont entièrement à l'extérieur. Ils ne rentrent pas dans l'école,

  • Alban

    même au CP.

  • Chloé

    À partir du CP, parce que nous c'est un jour, tu as le turdag.

  • Lucie

    Oui, en jardin d'enfant, tu as une journée à l'extérieur. Chez les petits, c'est différent. On rentre avant 11h30 parce qu'après, il y a la sieste et tout. Mais ils mangent dehors, oui. À l'école, c'est deux jours par semaine sans aucune exception. S'il fait moins que moins 10, on raccourcit la journée. Mais sinon... On a eu quelques déluges quand même, là, en début de saison, où il pleuvait vraiment extrêmement, etc. Ils passaient six heures par jour dehors dans un bar. Et ça s'appelle l'école à l'extérieur. Ça ne s'appelle plus une sortie. Ça s'appelle on fait l'école. Donc, ils sont censés apprendre des choses, ramasser, apprendre à compter de manière différente, etc. Il y a beaucoup d'enfants qui aiment. Ma fille déteste. Et quand elle a appris qu'à l'école française, c'était quasiment pas de sortie, elle a quand même hésité. Et en fait, sur ce côté négligence, par exemple, nous, on a du mal à lui faire porter des chaussures chaudes. Et on n'a pas peur, mais on a quand même une crainte de se dire...

  • Chloé

    Il pourrait relever ça.

  • Lucie

    C'est relevé, c'est sûr.

  • Chloé

    Ah, c'est relevé, c'est sûr.

  • Lucie

    Oui, oui. Mais tu vois, de se dire, en fait, c'est mal vu. Oui, oui. Donc, on essaye et on est un peu... C'est vrai qu'on est quand même tout le temps dernière minute.

  • Chloé

    Là, je fais une petite pause parce que je connais Lucia en train de se dire, est-ce que j'ai mis la chaussure sous couche ce matin ? Est-ce que j'ai mis les gants ? Est-ce que j'ai doublé les gants ? Est-ce que j'ai mis les chaussures ?

  • Alban

    Non, mais c'est clair, je vais y faire attention.

  • Chloé

    Non, mais c'est vrai que c'est inquiétant un peu ces histoires de, comme tu dis, l'aide sociale, proactive, mais trop.

  • Lucie

    Oui, la protection de l'enfance.

  • Chloé

    Protection de l'enfance, voilà, qui, de manière générale, nous, quand on devait présenter comme ça notre arrivée, en gros, un peu scandale. En France, on va attendre qu'il se passe quelque chose de mal pour placer les enfants. Éventuellement, tu as raison, c'est même en retard ou voir trop. En Norvège, on ne va pas attendre que quelque chose de grave se passe.

  • Lucie

    C'est un peu l'inverse de la médecine, par exemple. En France, on va être un peu plus prévention. Tu veux dire, je ne me sens pas top en ce moment. Prévention. Être sûre qu'il n'y a rien de grave qui se trame, ou quelque chose de ci, de ça, etc. En Norvège, c'est l'inverse. On attend que tu aies tous les symptômes d'un truc pour te dire, ok, en fait, t'es malade, on va s'occuper de toi. À ce niveau-là, c'est l'inverse. En Norvège, on fait énormément de prévention sur les enfants. Je trouve que c'est bien, mais c'est vrai quand même que nous, en tant qu'étrangers, et avec tout ce qu'on entend, ça peut faire un peu peur.

  • Alban

    Parce qu'on n'a pas tous les codes sociaux. La première année de ma fille, vu qu'elle était de décembre, elle n'avait pas de crèche tout au début. Et là, quand je reprenais ses affaires la première année pour ma seconde fille, je disais à Alban, mais on n'avait pas de laine pour elle au moment de l'hiver. Et je me dis, mais maintenant, si un jardin d'enfants avait vu que notre fille venait sans laine tout l'hiver, ils auraient peut-être relevé ça.

  • Lucie

    En fait, nous non plus, on n'a pas de laine. Ils ont du mal. Mais oui,

  • Chloé

    il y a tellement un lobby dans la culture de la laine. Je jure que par ça.

  • Lucie

    je sais mais en fait oui ça tient chaud oui non c'est vrai que c'est son tête bon on va parler de ma fille du coup c'est le meilleur exemple c'est plus souple elle déteste avoir deux couches fines en pleurel tu vois genre deux pantalons tout ça c'est pop et je la comprends moi deux pantalons mais jamais tu me verras avec deux pantalons ou un collant mais moi c'est trop drôle moi je suis comme ça et en fait le truc c'est que moi j'ai travaillé là et il fait 25 degrés Merci. On n'aère pas beaucoup. Les fenêtres sont souvent condamnées ou avec seulement des petites ouvertures parce que la sécurité enfant.

  • Alban

    Dans les classes, tu veux dire ?

  • Lucie

    Oui. Il fait une chaleur pas possible. Et il y a des enfants, ils ont leur sous-couche de laine, leur t-shirt et leur pull toute la journée.

  • Chloé

    Moi, je suis le seul parent qui me déçape à fond quand je vais la déposer. Mais quand tu vas la récupérer, c'est la seule gamine ou une des rares qui n'a quasiment plus rien sur elle. Donc, comme tu dis, problématique d'aller essayer de remettre les couches une par une avant de sortir.

  • Alban

    Généralement, on n'arrive pas à lui remettre toutes les couches.

  • Lucie

    Oui, parce qu'en fait, elle a... pas forcément besoin, tu vois. Et ma fille, elle est... Moi, j'ai pas froid facilement, visiblement, elle non plus. Et en fait, la laine, en tout cas, les sous-couches thermiques, laine comme ça, etc. Alors là, oui, il y a un intérêt. Je veux dire, elle passe 6h, 7h un jour, dehors. Elle a à peine 6 ans, il fait quand même bien froid. Ouais, tu vois, quand tu choisis, par exemple, la combinaison de cosmonautes, là, qu'il faut porter tout l'hiver, tu dis, bon, ouais, on va aller... Peut-être sur une marque un peu mieux isolée ou un truc où on sait que... Et en fait, là, nous, on a le problème. C'est pas un vrai problème. C'est plus peut-être un problème de riche. Mais on se dit, elle va être beaucoup dehors. C'est pas un gros gabarit. Il faut qu'elle puisse bouger, parce qu'elle aime pas être dehors. Parce qu'elle aime pas... En fait, elle est trop coincée dans toutes ses couches.

  • Chloé

    Comme tu dis, c'est des cosmonautes.

  • Lucie

    C'est des artistes de cosmonautes. Donc du coup, on avait ce truc de en fait, il faut un vêtement technique. Il faut un truc de cosmonautique, ça coûte hyper cher. Et en fait, c'est un tissu qui est aussi un peu plus fragile, qui fait des trous plus facilement. Donc des fois, tu ne le gardes pas d'un enfant à l'autre, malheureusement. Donc oui, tu finis la saison avec. Tu ne vas pas en racheter 12, quoi. Mais je vois, nous, on habite dans un quartier assez aisé, avec beaucoup de Norvégiens. Il n'y a pas énormément d'étrangers. Ou alors, il y a des étrangers, mais des Allemands mariés avec des Norvégiens. Des trucs comme ça. et en fait Les enfants sont sureéquipés. C'est quelque chose qu'on voit, et j'imagine que vous, c'est plus ou moins la même chose. Et nous, c'était très commun, par exemple, au jardin d'enfants, que toutes les affaires restent, parce que de toute façon, ils ont le double à la maison. Tu vois, ils vont avoir le week-end.

  • Alban

    Parfois, je ne comprenais pas au Barnaille, pourquoi toutes leurs affaires restaient, mais c'est parce qu'ils sont tout en double.

  • Chloé

    Oui, mais ici, c'est très commun.

  • Lucie

    C'est pas du tout notre approche de vie, la surconsommation et ce genre de choses. Donc on n'a pas 12 dresses pour les enfants. Et du coup, on transporte de la maison aux jardins de soins,

  • Chloé

    aux jardins de soins,

  • Lucie

    à la maison, etc. Beaucoup plus. Et c'est vrai qu'ils en ont deux, voire trois. Ça dépend, il y a des cas extrêmes où tu en as trois parce que des fois, il faut les laver. Et je me dis, en fait, c'est un autre monde. Et donc, du coup, il ne faut pas non plus tomber dans la... paranoïa de te dire ils vont penser que je suis négligente.

  • Chloé

    Complètement.

  • Alban

    Non, mais moi, je suis...

  • Chloé

    Alors, je pense qu'on allait faire deux commentaires complètement différents. J'allais dire moi, maintenant, je suis en paix avec ça et je me pose ma question et là, je suis là, parano.

  • Alban

    Elle a fait sa rentrée dans le jardin d'enfants chez les grands et à la rentrée, s'est posée la question du sac à dos. En fait, j'ai juste regardé les sacs à dos des autres et ils avaient tous le même sac à dos de la même marque. Alors, avec des dessins différents. Quand j'ai demandé à la maîtresse quel sac fallait, elle m'a dit celui-là, il est vraiment très bien parce qu'il s'attache en haut, il s'attache en bas pour partir en rando. Je me suis dit, je sais que je ne suis pas obligée d'acheter ce sac, mais en même temps, je n'ai pas envie que ma fille soit la seule à ne pas avoir ce sac parce que j'aurais l'impression que c'est la seule qui n'a pas le sac qu'il faut, en fait.

  • Lucie

    Ouais, ça c'est un truc, moi je m'en fiche un peu plus. Du moment que ça leur plaît et que c'est pratique. Mais on a eu la même chose là à la rentrée, parce que le sac de première classe...

  • Chloé

    Sac en 10 !

  • Lucie

    Oh là là là là ! Et alors là, pour le coup, il n'y a pas un enfant. Il y a 88 enfants qui sont rentrés dans l'école de ma fille en première classe cette année. Il n'y en a pas un qui n'a pas ce sac.

  • Alban

    On parle du Beckman ?

  • Lucie

    On parle du Beckman.

  • Chloé

    Et en fait... Notre lobby norvégien. Les lobbyons norvégiens, j'imagine. Le lait, le chocolat, le fromage, tout ça.

  • Lucie

    Mais enfin, c'est dingue, tu vois, de dire... Parce qu'il a un coût, ce sac. On est sur un sac extrêmement cher. Et en fait, il est beaucoup trop gros pour elle. Ils sont là, oui, le sac le plus léger du marché. Non, il est lourd. Il est lourd par rapport à elle. Elle ne fait encore que 18 kilos. Son sac, il en fait 4. Je ne sais pas quoi qu'il aille. Le rapport. En fait, elle passe sa journée, pour le coup, dehors. C'est encore différent. Mais le truc étant que moi, je m'en fiche de quel est un sac différent, même si je lui couds un sac ou je ne fais rien, parce que aussi, j'ai grandi de cette manière-là. On a toujours été un peu marginaux, pour le coup, parce que notre niveau de vie ne passait pas exactement dans... le milieu dans lequel j'ai évolué, dans le quartier, etc. Donc ouais, on avait des affaires un peu différentes, on avait pas mal de trucs de récup, je garde mes fringues pendant 10 ans, 15 ans, c'est pas très grave. Et en fait, là, je vois qu'on est sur quelque chose de très différent, et ma fille, elle, ça lui tenait énormément à cœur d'avoir le même sac que les autres. alors que pourtant elle n'a jamais eu ce genre de choses donc oui bien sûr qu'elle a eu son sac et qu'elle a fait sa rentrée avec son sac en étant très fière et moi je pense que pour l'instant Gisèle elle ne se rend pas compte que tout le monde a le même sac enfin quoique peut-être un peu mais moi c'est surtout je me disais ah non ça ne va pas être la seule étrangère qui n'a pas le sac ça se regarde là parce que vous êtes encore alors nous on a quelques étrangers c'est de plus en plus rare plus on s'éloigne mais et... Après, en tout cas, pour la surveillance, la négligence et tout ça, il ne faut pas être inquiet.

  • Alban

    Ils ne vont pas appeler les services sociaux parce qu'elle n'a pas un Beckman à la rentrée.

  • Lucie

    Non. Et moi, j'ai une voisine qui nous a menacé un jour d'appeler les services sociaux. Ouais,

  • Alban

    non, raconte.

  • Lucie

    En fait, on vivait dans un immeuble où, entre chez elle et chez nous, c'était du papier. Vraiment, je pense que c'était qu'un appartement et qu'ils ont séparé. C'est comme quand tu rajoutes une chambre,

  • Alban

    ils ont mis un rideau.

  • Chloé

    Oui, limite.

  • Lucie

    Franchement, c'était assez vieux comme truc et tout. Donc, j'étais enceinte de mon fils et ma fille avait moins de deux ans. Et elle faisait énormément de terreurs nocturnes. Donc, moi, c'est quelque chose que je connaissais. Mon petit frère en avait eu, etc. Pour les gens qui ne connaissent pas les terreurs nocturnes, ça porte trop bien son nom. C'est horrible. C'est un espèce de cauchemar, en fait, terrible. Et tu ne peux pas et tu ne dois pas réveiller l'enfant. Il faut qu'il trouve la solution tout seul à sa situation à ce moment-là. Parce qu'en fait, si tu le réveilles, déjà, c'est un énorme stress pour lui. Et c'est super dur de réveiller un enfant en terreur nocturne. Je ne sais pas si vous avez déjà essayé. C'est impossible. Et en fait, il n'y a rien à faire. Tu ne peux pas te mettre à crier plus fort que ton enfant, secouer ton enfant. Là, on va dans des trucs impensables, mais c'est le milieu de la nuit, c'est toutes les nuits, c'est quatre fois par nuit. La enfant hurle à la mort, c'est compliqué. Et donc, ma fille hurlait extrêmement fort. Mais vraiment, elle hurlait. Des fois, elle n'avait pas de voix le matin. Elle avait vraiment des terrés en nocturne hyper intenses.

  • Chloé

    Ça pouvait durer longtemps ?

  • Lucie

    Ça peut durer assez longtemps, oui. Ça peut durer... Alors, en plus, si elle se réveille, il faut savoir que si si elle est réveillée par un facteur extérieur que ce n'est pas elle qui a solutionné son problème, il se rendorme et il se réveille 20 minutes après dans la même situation. C'est la différence d'un cauchemar. Le cauchemar, tu vas te rendre compte que ça va être dans la réalité. En fait, tu es chez toi, tout va bien, tu peux te rendormir tranquille, etc. Les terrains nocturnes, non. Donc, c'était très difficile. J'ai eu une grossesse vraiment moisie avec mon fils. Donc j'ai été hospitalisée par exemple deux, trois fois. C'était le Covid, je devais être toute seule. Et toute cette espèce d'environnement-là qui était un peu compliqué. Et une nuit, ma voisine, elle a complètement dérapé. Elle nous a dit, je vais appeler les assistantes sociaux, il faut arrêter de battre votre fille, de l'enfermer dans une pièce pendant que vous allez vous isoler avec un casque et jouer à des jeux vidéo dans une autre pièce. Et en fait, elle avait des problèmes. Pour résumer, son mec avait fait ça à sa fille quand elle était petite. Donc en fait, elle a transposé la maltraitance. En fait, elle pensait qu'on enfermait notre fille dans une pièce.

  • Chloé

    C'était ce qu'elle vivait elle ?

  • Lucie

    C'était ce qu'elle avait vécu elle quand sa fille était petite. Donc là, elle avait 10 ans, sa fille déjà. Mais donc du coup, oui, en fait, elle avait dit ça. Et moi, j'étais hospitalisée une nuit. Chris, il ne pouvait pas, donc mon conjoint ne pouvait pas calmer notre fille. C'était un enfer. Déjà, la nuit, elle n'acceptait que moi et encore, c'était difficile. Et en fait, c'était une nuit ultra dure. Moi, j'étais donc hospitalisée. Je lui réponds à une heure et demie du matin à son SMS en lui disant, écoute, je suis hospitalisée. C'est sûrement une terreur nocturne. Je suis désolée, il n'y a rien à faire. Prends ton mal en patient. Et après, elle a dit, il ne faut pas maltraiter les enfants comme ça. Vous, les Français, elle est partie d'un des délires un peu. Oui,

  • Alban

    les clichés. Les français clichés. Ils mettent encore beaucoup de fessées.

  • Lucie

    Voilà.

  • Alban

    Elle est mal tombée en plus, parce que toi, c'est l'opposé, quoi.

  • Lucie

    Et en fait, elle ne savait pas, par exemple. Mais du coup, on l'a un peu calmée. J'ai dit, viens, vas-y, passe à la maison. Viens voir les portes et les verrous. Parce que nous, il faut savoir qu'on avait enlevé toutes les portes. Parce qu'en fait, c'était hyper mal agencé. Donc, on n'avait plus aucune porte à part à la salle de bain. et surtout pas dans les chambres. Et en fait, il y avait... on avait mis des gros rideaux épais à la place.

  • Chloé

    Ah, mais pour jouer aux jeux vidéo toute la nuit.

  • Lucie

    Ah bah ouais. Et son lit, donc ma fille, forcément, elle avait un lit au sol, elle était libre de se déplacer si elle avait besoin, etc. Et donc du coup, on lui avait dit, bah viens, alors dans quel lit elle est enfermée, dans quelle pièce ? Ça avait fait un peu calmer, quoi. Mais elle nous a quand même menacé de nous balancer aux services sociaux. Pour maltraitance.

  • Chloé

    À l'issue de ça, c'est là que vous avez décidé de quand même lui montrer, pour un peu essayer d'apaiser les choses, comment vous avez réagi ?

  • Lucie

    On a déménagé.

  • Chloé

    Et oui, voilà. Non, mais je l'ai dit, il n'y a pas de...

  • Lucie

    Et puis, elle était quand même alcoolique. Merci, les motifs alcooliques. Il y avait quand même d'autres choses derrière. Et aussi, bon. Mais non, non, on a déménagé de toute manière. on allait accueillir un deuxième. et puis c'était un logement quand même assez vituste on était très content de déménager mais ouais on a été menacé et franchement ça fait peur et tu vois de me dire mais attends moi je travaille dans un jardin d'enfants tout le monde me connait je sais que ça n'ira jamais plus loin que ma voisine un peu tarée Ça fait flipper.

  • Alban

    Ça fait flipper, ouais.

  • Lucie

    Ouais, quand même, ouais. Et en fait, c'est aussi un petit moyen de pression sur les enfants, c'est pas très bien, mais tu vois, ce matin, quand ma fille ne voulait pas mettre ses chaussures embourrées, je lui ai dit, mais ma chérie, ils nous écrivent des messages, en fait. Nous, tous les deux semaines, on reçoit un message qui rappelle qu'il faut que tes enfants soient assez couverts, qu'il faut avoir ça, ça, ça, ça en chant. J'ai dit, on ne veut pas de problème, en fait.

  • Alban

    Je voulais revenir sur le fait que ta fille est un peu en avance sur le système norvégien et que d'ailleurs, peut-être qu'une structure plus à la française, entre guillemets, pourrait peut-être mieux lui convenir. Pourquoi vous faites le choix néanmoins de la laisser dans le système norvégien ?

  • Lucie

    Je pense qu'il y a certaines convictions. Je ne suis pas fondamentalement contre l'école française, mais presque, je dois être honnête. Je n'ai pas envie, je n'en ai pas une bonne image.

  • Alban

    Qu'est-ce qui te rebute le plus de l'école française ?

  • Lucie

    La structure, la vision élitiste, en demander trop, les horaires. Ce n'est pas adapté à la vie norvégienne. C'est mon point de vue extérieur parce que je n'y ai jamais travaillé et je connais des gens qui y ont été. Et c'était du coup, maintenant, il y a un petit moment. la réalité je la connais pas pas pour de vrai. Mais de mon point de vue, on a pris une école en France et on l'a posée en Norvège. Et ce n'est pas adapté. Les horaires ne sont pas adaptés, le volume n'est pas adapté, le nombre d'heures de Norvégiens par semaine n'est pas adapté, la culture... Vraiment, il n'y a rien qui est adapté, ne serait-ce qu'un minimum pour que les enfants évoluent dans une culture. commune avec leur environnement. Et ça, pour moi, c'est un problème. Après, on est quand même deux Français, toutes notre famille sont en France, nos enfants parlent le français, c'est vraiment leur langue maternelle. Donc moi, j'ai même pas le besoin que mes enfants parlent le français pour communiquer avec les grands-parents. C'est juste inné et il n'y a aucun souci là-dessus. Donc l'école française, pour nous, c'est pas un choix et c'est pas une option. aussi parce que c'est pas super bien placé par rapport à là où on habite c'est cher de rien ça coûte un coup et en plus il me semble que plus les années passent plus c'est cher et après on a réfléchi, on a quand même on garde en tête la possibilité de l'école internationale parce que en fait du coup oui le niveau est un petit peu plus élevé, c'est un peu plus scolaire, un peu plus académique et en même temps assez à la norvégienne C'est quand même un espèce de...

  • Alban

    Oui, c'est des journées assez courtes.

  • Lucie

    C'est une ville assez sympa. Par contre, c'est hyper loin de là où on habite. Pour le coup, parce que l'école française, autant elle est dans Oslo, l'école internationale, elle est en dehors d'Oslo. Et on habite carrément de l'autre côté. presque en dehors. Ça engagerait un déménagement quand même. C'est ça qui est compliqué aussi. Nous, on sait qu'elle, elle ne sera pas en retard. Donc tant qu'elle continue à avoir les bonnes stimulations, qu'elle continue de s'épanouir et qu'elle ne nous demande pas autre chose, on va la laisser au moins le temps que son frère rentre à l'école. Donc on a encore un an et demi. Et après, quand ce sera le moment que lui rentre à l'école, on verra déjà. On ne sait pas où on sera dans deux ans. On est un peu au jour le jour.

  • Chloé

    Est-ce que vous ne savez pas où vous serez dans Oslo en Norvège ? Ou est-ce que ça vous a...

  • Lucie

    Ah, c'est pas du tout. Non, non, on n'a pas... Là, en ce moment, ça fait dix ans qu'on est là. Nos amis nous manquent, nos familles nous manquent. On a vraiment, nous, une différence de avant et après Covid, d'une certaine manière, dans le sens où on avait l'habitude d'avoir de la visite. Plus du tout. On a des... Enfin, nous, comme nos amis, sommes assez concernés par l'environnement. On a... pas envie de prendre l'avion pour passer un week-end de trois jours avec des copains, malheureusement.

  • Chloé

    C'est un vrai sujet, ça aussi.

  • Lucie

    Il faut respecter ça au maximum. Moi l'avion, j'essaye quand même de prendre un petit peu de recul. Mon conjoint, lui l'avion, il est zéro recul. Au premier degré, ça le rend presque malade qu'on prenne l'avion pour aller fêter Noël, et en plus on passe trois semaines. Donc vraiment, et je le comprends, c'est quelque chose qui pèse dans le quotidien, et ses amis, plus que les mains pour le coup, sont quand même largement du même avis. On a beaucoup moins de visites. Il y a aussi qu'on a tous passé 30 ans. on n'est pas les seuls à avoir des enfants maintenant. Enfin voilà, ça implique une organisation différente. Et du coup, nos familles et nos amis nous manquent assez. On ne s'y retrouve pas beaucoup avec notre cercle en Norvège.

  • Alban

    Vous envisagez peut-être de rentrer en France ?

  • Lucie

    Non, pour le coup, quand même pas. En fait, pour le contexte, il y a mon grand frère qui a habité au Canada pendant des années, qui est retourné s'installer en France il y a quatre semaines. Avec sa famille.

  • Chloé

    Il veut déjà repartir ? Non, je peux les en faire, ça va.

  • Lucie

    Non, non, c'est assez nouveau. Mais du coup, ils sont allés vers Nîmes. Donc, je les ai eus au téléphone. Pour l'anniversaire de ma belle-sœur, il faisait 18 degrés, ils étaient en t-shirt.

  • Alban

    Ça te donnait envie ?

  • Lucie

    Ouais, il faisait encore jour et tout. Quand il était 16h30, même pas, il faisait déjà bien nuit, très froid. Ils étaient tous des esquimaux et tout. Les hivers, là, c'est vrai que ça commence à me peser un peu. Il y a certaines choses qui évoluent, qui sont un peu différentes. Je pense que ne serait-ce que si on changeait de quartier et d'environnement. on aurait une approche assez différente. On aurait peut-être des voisins qui disent bonjour.

  • Chloé

    Oui,

  • Alban

    parce que j'allais dire, pour le coup, nous, tous nos voisins, ils disent bonjour.

  • Chloé

    Et donc, on vit ici en Requehus, qui sont des maisons mitoyennes. Et en fait, autant pour des raisons de budget que d'entretien, que de plein de raisons, on est passé d'appart à maison mitoyenne et ça nous va très bien comme ça pour garder la vie un peu de quartier.

  • Lucie

    Clairement. C'est des choses assez différentes, mais il y a un côté social du Norvégien qui doit organiser une vie sociale. dans tous les boulots, tu as le social comité où du coup, tu vas organiser que le vendredi, après la paye, tout le monde va boire un verre, j'en sais rien, ce genre de choses. Là, hier soir, je suis sortie avec les mamans de la classe de ma fille. Donc voilà, il y a une organisation sociale aussi à ce niveau-là.

  • Chloé

    Spontanée ?

  • Lucie

    Eh ben non, il n'y a rien de spontané ou ponctuel.

  • Chloé

    C'est vrai que le manque de spontanéité, je te rejoins parce que quand on parle de nos expériences passées en Amérique latine, Ben là on est on était en plein dedans. Ah waouh,

  • Lucie

    la chaleur...

  • Chloé

    Et pareil, quand on vient du sud de la France, on va s'y rendre en vacances, et tous les terrasses, la chaleur humaine, les imprévus, ça c'est quelque chose qui nous manque, et c'est pour ça que parfois on se dit, si on avait l'occasion, peut-être repartir deux ans, trois ans dans l'Amérique latine, tout en revenant en Norvège, mais regoutter un peu à ça, peut-être pour ensuite se dire, ah non mais je préfère l'ordre, c'est bon. Ouais,

  • Lucie

    bonne structure. Non, non, mais il y a des choses qui... qui manque un peu, cette légèreté-là, on la trouve Quand il commence à faire des boucles. En fait, c'est vraiment une période très courte.

  • Chloé

    Ça ne dure pas longtemps.

  • Lucie

    Proportionnellement, c'est le même temps. Il fait très jour, il fait très nuit.

  • Alban

    On a l'impression que ça dure moins longtemps.

  • Lucie

    Oui, parce qu'on part en vacances. On est moins là, etc. Mais c'est vrai que ça, c'est... Non, pour le moment, on n'envisage pas de rentrer en France. Mais c'est vrai que, par exemple, sur la scolarisation, ça, c'est difficile. Parce que tu dis, elle est en structure... je me réfère à ma fille. Elle est en structure norvégienne. Par exemple, ils ne veulent pas lui faire sauter une classe. Parce qu'en fait, elle serait avec des enfants qui ont un an... Parce qu'elle est née l'hiver. En Norvège, beaucoup d'enfants, pas tous, mais beaucoup naissent l'été. Donc elle, elle a déjà... quasiment six mois de moins que les autres, même facilement. Elle a ça et en plus, ce serait encore un an de moins, un an et demi de moins que les autres. Tu ne mets pas une enfant de six ans avec des enfants de presque huit ans. Ce n'est pas top. Alors, elle est très mûre et elle a plein de copines en troisième classe. Donc, c'est payé sur ce deux. Elle serait sûrement mieux avec des enfants plus grands. ça se fait pas trop. On fait pas redoubler, on fait pas sauter de classe. C'est pas trop un truc qui se fait. Et en même temps, je me dis, on déménage en France, je sais pas, dans trois ans. Elle va devoir être fatalement dans une classe d'enfants qui ont deux ans de moins. Parce qu'elle sera en retard au problème français. Et ça, c'est trop dur, tu vois, de se dire en tant que parent étranger, oui, toute notre vie est ici, mais toute notre famille et toute notre culture, tout le reste est là-bas. De se dire... Et il est possible, je ne sais pas, ma mère tombe, alors je ne le souhaite pas, mais ma mère tombe malade, je dois m'occuper d'elle, on va passer deux ans en France. C'est non négociable. Et donc, du coup, qu'est-ce qu'on fait avec les enfants ?

  • Alban

    Moi, c'est ce que je dis à Alban, si on doit rentrer en France pour x ou y raison, ou qu'on doit déménager autre part, en fait, dans un autre pays, c'est ça qui me donne envie de la mettre dans un circuit, soit anglais, soit français, pour être sûre que n'importe où on aille, elle m'aidera. puisse continuer sa scolarité sans...

  • Lucie

    Ou avec des enceintes son âge en fait. De me dire qu'elle va être la fille qui arrive de Norvège et qui doit avoir redoublé deux classes parce qu'elle n'a pas le niveau en maths, ça fait trop mal,

  • Alban

    tu vois.

  • Lucie

    Et je me dis, je ne souhaite pas qu'elle à 12 ans elle se retrouve dans une classe de petite 10 ans alors qu'en plus elle s'entend toujours mieux avec les plus grands, etc. Alors je ne sais pas. comment elle va grandir. C'est que des projections. Mais ça, c'est difficile d'avoir ce point d'incertitude et de se dire...

  • Chloé

    C'est super intéressant parce que je trouve que dans un parcours d'expatrié, mais même là, je pense qu'on n'est plus sur le parcours d'immigré. Il va y avoir complètement... Il y a toute une phase où tout semble... Surtout que tu es arrivé très jeune, on est arrivé encore relativement jeune. Tu as les débuts, tout semble facile, tu t'intègres aussi parce que tu as cette communauté très internationale, tu peux toujours l'avoir, et on l'a aujourd'hui, on se sent en termes d'amis, de social, tout se passe bien. Par contre, les enfants, le fait que toi tu sois première génération d'immigrés, qu'est-ce que ça renvoie sur eux, comment ils sont intégrés, leur futur, est-ce que je suis français, est-ce que je suis norvégien, qu'est-ce qu'ils sont eux ? Ce sont des thématiques plus délicates, je trouve, à gérer. C'est là qu'on soulève une autre notion de l'immigration. Est-ce que j'ai encore le choix de repartir ? Est-ce qu'au final, il faut mieux que je continue ma vie ici pour mes enfants ? C'est hyper lourd au final comme thématique, mais très, très intéressant. Et je pense que beaucoup de personnes s'y heurtent au bout de quelques années de vie dans un autre pays.

  • Lucie

    Surtout avec les enfants, en fait. Et justement... Quand tu m'as demandé tout à l'heure si... Mais attends, parce que vous envisagez de retourner vivre en France et tout ça, la question ne se pose même pas parce que les enfants... Oui, mais en même temps, tu dis, si demain ta mère est malade, vous rentrez.

  • Alban

    Ah bah oui, parce qu'en fait, il y a des choses dans la vie qui font que c'est plus important. Il y a des choses qui vont être plus importantes que d'autres. Et ce serait rentrer temporairement. D'accord. Aucun de nous n'adhère à la politique, par exemple, en France. Ce genre de choses, c'est des débats, c'est des idéaux et des choses qui sont assez personnelles. Mais aussi les structures, le système, le reste. De me dire que mes enfants, ils ont la chance de s'épanouir dans le système norvégien. Mais je n'ai pas envie.

  • Lucie

    Donc malgré l'isolement, l'éloignement de la famille, des amis, vous considérez rester en Norvège ?

  • Alban

    Pour l'instant, ce n'est pas un sacrifice en tout cas. Pour le moment, on y trouve largement notre compte. Mon conjoint est extrêmement heureux au travail. Moi, je me sens très libre, assez épanouie aussi. Et on sait qu'avec le boulot qu'il a en France, on serait dans des conditions extrêmement différentes. Les journées sont longues pour les enfants, les journées sont longues pour les parents. Le temps, la qualité que tu as de temps avec ta famille, avec ton bien-être, avec tout ce genre de choses-là. Pour le moment, on retrouve largement notre compte ici, clairement. Mais oui, les interactions sociales, ça commence à être un peu compliqué de mon côté. Comme tu disais, je n'ai pas envie que ma fille soit la seule à avoir un sac à dos différent. Moi, mes enfants, ils ont quatre cousins en France. Je n'ai pas envie que ce soit ceux qui sont nuls parce qu'ils n'ont pas appris ça à l'école. J'essaye de garder ces projections-là pour moi-même.

  • Chloé

    D'accord. Ce sont nos peurs aussi qu'on projette.

  • Alban

    Alors que ma fille n'a pas peur d'être bête. Et elle ne l'est pas. Et moi, je n'ai jamais eu peur d'être bête, en plus. Personnellement, mes parents, ils ont toujours été... quand même assez encourageant. Pourtant, je n'étais pas la plus brillante et le système scolaire français ne me convenait pas beaucoup. Mais je n'ai jamais eu l'impression d'être bête.

  • Lucie

    Non, et puis,

  • Alban

    c'est vraiment...

  • Lucie

    Il faut définir ce que c'est être intelligent, être intelligent dans le système français et être intelligent dans le système norvégien. C'est aussi différent. Et c'est pour ça que, d'un système à l'autre,

  • Alban

    il y a la capacité d'adaptation, à ingérer un nombre d'informations. Là, on est vraiment sur des trucs beaucoup plus profonds. Pour le moment, c'est clairement pas un sacrifice. Et on est très heureux ici. Et on pense aussi beaucoup à l'avenir. Et à se dire que, bah oui, je sais pas, moi, des choses un peu bêtes, mais la montée des eaux, les famines, les sécheresses...

  • Chloé

    Le réchauffement climatique.

  • Alban

    Ouais, ça fait extrêmement peur, en tout cas quand t'as des enfants à élever. Enfin, tu vois, t'as mis des enfants au monde, et tu te dis bah eux, ils ont pas choisi d'être là. Nous, on a choisi qu'ils soient là. Et notre responsabilité, c'est de faire en sorte qu'ils soient les plus heureux. et avertis possibles pour leur avenir. On a aussi envie que nos enfants grandissent dans la réalité du monde qui les attend. Après, je vais passer ma journée de stressée maintenant, mais c'est des énormes questions qui se posent et qu'on ne se pose pas avant un certain âge et avant d'avoir des enfants. c'est un peu difficile mais après il y a d'autres générations, mon petit frère a 10 ans de moins et lui il est une génération dans son groupe et dans d'autres gens, de sa génération c'est pas d'enfant c'est une réalité,

  • Chloé

    l'expatrié peut-être ou l'immigré peut-être très isolé en tant que parent

  • Alban

    Ça dépend des cultures. Il y a des cultures plus communautaires. On a des amis indiens.

  • Chloé

    Ils sont expatriés,

  • Alban

    mais ils sont cousins. Ils sont tous en famille. Ils vont au temple, ils ont leurs fêtes, les cultes. Tu vois, nous, on n'a pas ça, je trouve. Et en plus, mon copain et moi, quand on est arrivé ici, on a fui le milieu français. On ne voulait pas faire tous les trucs de franco-français parce qu'on voulait s'imprégner de la culture, on voulait parler norvégien. en plus il y a dix ans, on n'était pas sur le même profil d'ex On n'était pas sur le même profil d'immigrés, j'ai envie de dire. On était vraiment sur le profil d'expat. Genre, je suis ingénieur en tuyau, je travaille dans le pétrole, et on me propose un très gros salaire, je vais habiter à Frogner, et jamais apprendre le norvégien. Et ça, c'est quelque chose qui ne nous correspondait pas du tout, parce qu'en même temps, on vient d'études de culture scandinave. En plus, on connaît quand même les fondements de la société, on a appris la littérature, la géographie, la culture, tout ce genre de choses-là. et c'est trop dommage d'habiter dans ce monde. dans un endroit et se limiter à vivre les yeux fermés.

  • Lucie

    Et tout ça, est-ce que ça vous a aidé à vous faire des amis norvégiens ? Et un cercle norvégien ?

  • Alban

    Oui et non. Si je parle pour mon conjoint, oui. Et je pense qu'en fait, ça ne relève pas que de ça. Et si je parle pour moi, non. J'ai mes collègues avec qui je m'entends très bien. Ce n'est pas des amis, la famille, tu vois. Ce n'est pas des amis comme j'ai pu avoir en France. Ma meilleure amie ici est française. Et les gens avec qui je me suis sentie le plus proche, ça n'a jamais été des Norvégiens. Jamais. vraiment jamais. J'ai eu une amie norvégienne qui était cool à la fac, mais non, je ne sais pas. En fait, on est trop fondamentalement différents sur d'autres trucs. Ah, si là, j'ai une amie norvégienne, on est très proches, en fait. Dis-moi pour toi si elle ne m'entendra pas, mais elle ne se considère pas norvégienne. Voilà, je veux dire ça. Et la plupart de ses potes, c'est des étrangers. Donc, elle comprend, c'est sa culture, etc. Mais une autre amie ou collègue, On a 15 ans d'écart à l'époque. 15 ans plus vieille que moi, mais elle a habité au Portugal, au Brésil, elle est mariée avec un Portugais, elle a vécu un petit peu en France, elle est assez portée sur l'étranger, et en fait, ouais, on s'entend bien. Pour le coup, j'ai tout essayé. Parce que tu vois, je me disais, je travaille au jardin d'enfants, on a tous un intérêt commun, c'est les enfants, la pédagogie, ce genre de choses. Ça n'a pas pris. Pourtant, vraiment, comme je te disais, tu crées des liens un peu étranges en pyjama, assis par terre. Tu vois ce que je veux dire ? On partage des choses un peu intimes au final et en fait, non. J'ai essayé des clubs de sport différents. J'ai même essayé un sport d'équipe, par exemple. Non. J'ai... jamais trouvé de lien ou de trucs comme ça. J'ai étudié, j'ai étudié même à des parcours norvégiens, où tu t'inscris en tant qu'étudiant norvégien, grosso modo. Toujours pas. Donc je pense qu'il y a quelque chose qui fait que ça prend pas. Et ça vient certainement de moi aussi. Je ne peux pas juste dire le monde entier ne veut pas de moi.

  • Lucie

    Tu disais d'ailleurs que ton mari, ton conjoint...

  • Alban

    Mais lui, ouais, trop. Lui, il attire les Norvégiens. C'est un aimant. Pourtant, moi, physiquement, j'ai plus l'air d'être norvégienne que lui. Et en plus, nous, on a ce truc de... Oh, t'es français ! Les Norvégiens, c'est une petite fascination pour quand même la France. Ouais, ça va. Mais t'es français ! 2.

  • Chloé

    qu'est-ce que tu fais là ?

  • Alban

    C'est dingue, tu viens de Paris, tu vois. Ouais, ouais, ce truc de qu'est-ce que tu fais là et tout. Mais en même temps, je veux dire, on est des étrangers, on est des immigrés première classe, quoi. Tu vois, enfin, je veux dire, je pense qu'il y a quand même, dans leur vision, en tout cas, il y a une espèce de hiérarchie. Et on est tout en haut de la hiérarchie de l'immigré. Mais en tout cas, lui, non, pas du tout. Il s'est toujours méga bien intégré avec des Norvégiens. Même à notre mariage, il avait des potes norvégiens et tout. Pourquoi est-ce ce que je n'ai pas réussi à faire.

  • Chloé

    Qu'est-ce que tu conseillerais à quelqu'un qui arrive en Norvège ? Parce qu'on a abordé plein de thèmes. Est-ce que tu as un conseil à partager ?

  • Alban

    Savoir pourquoi tu es là. Si tu arrives parce que tu es dans l'industrie du pétrole et que tu as un super boulot qui t'est proposé avec des super avantages, un logement, tout ça. tu sais pourquoi t'es là, tu sais pourquoi t'arrives et après pour s'intégrer ben non tu t'intégreras à ton propre cercle en fait, après vraiment en termes d'intégration tu veux dire ben tu vois moi j'ai tout essayé et j'ai pas réussi je veux dire ça fait 10 ans que j'échoue à l'intégration donc maintenant mais t'en es pas malheureuse pour autant non non non ça va parce que aussi j'ai ma famille et puis non je suis pas malheureuse, je suis pas intégrée mais je suis pas désintégrée non plus et puis il y a ce truc de, moi ça me dérange pas de rencontrer des nouvelles personnes. Alors j'ai des amitiés très anciennes et très stables, mais ça me dérange pas de rencontrer des nouvelles personnes, des nouveaux groupes. Donc du coup, je peux papillonner avec des gens sans vraiment avoir des relations vraiment plus profondes. Par mon métier maintenant, un petit peu plus. Je suis respectée dans ce que je fais. Je le fais à peu près bien. Et du coup, tu vois, les relations que je noue avec mes clientes maintenant, c'est une sorte de relation sociale. Alors oui, on reste c'est professionnel. Il y en a quelques-unes qui se transforment en amis, et ça c'est exceptionnel.

  • Chloé

    Qu'est-ce qui est difficile pour toi en Norvège ?

  • Alban

    Rien. Je ne dirais pas que tout est facile, mais difficile, pas grand-chose. Juste le bas, le manque, l'éloignement, le manque. Mais encore une fois, par exemple, si mon mari n'était pas français, je ne sais pas, je pense que ce serait dur.

  • Chloé

    Oui,

  • Alban

    je comprends. Je pense que là, je serais vraiment dans un... Tu vois, j'ai besoin d'avoir des références à Astérix Oblix, Mission Clémopâtre, et quelqu'un rigole en face de moi, tu vois. et si mon mari était norvégien je suis pas sûre que ça l'aurait fait à long terme. Par exemple, si mes enfants parlaient pas français, ou très mal, ou très peu, ça, ce serait dur pour moi. J'ai une amie qui est ici. Elle est arrivée étudiante il y a 14 ans, je crois, un truc comme ça. Elle est mariée avec une norvégienne. Elles ont deux enfants qui sont dans le même jardin d'enfants que les miens. Et c'est vraiment une amie que j'ai depuis le jour où je suis arrivée. On s'est rencontrées très rapidement. Elle, elle n'a pas... presque plus aucun contact avec sa famille en France. Ses enfants, ils me regardent comme un extraterrestre quand je leur parle français. Parce qu'en fait, même elle, au final, tu as un moment où tu te prends au jeu et où c'est plus facile de parler norvégien, parce qu'elle parle norvégien et avec sa compagne aussi. Et elle ne passe pas par l'anglais, elle ne parle que norvégien. Et du coup, avec les enfants, tu as cette facilité aussi de... De toute façon, ils te répondent tout le temps en norvégien.

  • Chloé

    Tu vois ?

  • Alban

    et moi elle je lui pose la question et en fait elle me dit que elle ça va très bien c'est pas du tout un problème pour elle donc je pense que c'est quand même extrêmement personnel et à contrarier est-ce qu'il y a quelque chose que tu adores,

  • Lucie

    que tu as adopté de la Norvège et dont tu pourrais pas te passer juste le cadre alors je déteste la campagne

  • Alban

    Une super parisienne. Montagne, mer, ville, ça fonctionne. Mais campagne, rase, c'est mort. Mais pour autant, j'adore la nature, j'adore l'eau. Et en fait, on est entouré d'eau. Et juste... Pour le coup, c'est une condition. On a déménagé sept fois en neuf ans. Ah oui,

  • Lucie

    quand même !

  • Alban

    Nous, on fait beaucoup de vélo et tu vas te baigner à vélo. Genre, tu prends ton vélo, tu pédales 20 minutes et t'es à la plage. Alors, pas toute l'année, tu vois. Toute l'année, tu peux, mais voilà, je conseille pas. Et en même temps, tu peux prendre un bus et skier.

  • Chloé

    Merci beaucoup Chloé d'être venue nous rencontrer aujourd'hui. C'était génial d'apprendre à connaître une partie de ton parcours qu'on ne connaissait pas encore.

  • Alban

    C'est vrai qu'on se connaît plus professionnellement.

  • Chloé

    Et ce qui est trop bien, c'est qu'on va avoir l'occasion d'en parler une prochaine fois, de revenir sur l'expérience plus doula.

  • Lucie

    Merci d'être venue jusqu'à nous. Et on te recevra pour aborder d'autres thèmes, car tu as plus d'une corde à ton arc. Donc trop hâte de partager tout ça une prochaine fois. Et en attendant, on vous dit à bientôt chez nous.

  • Chloé

    Sous les aurores.

  • Lucie

    Si cet épisode vous a plu, pensez à nous laisser une note et un avis sur votre application d'écoute préférée.

  • Chloé

    Ou un commentaire sur YouTube, ça nous aide énormément à faire grandir le podcast.

  • Lucie

    Merci et à très vite pour le prochain épisode.

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