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Réinventer sa pratique sportive au fil des années avec Annick Pfetzinger | Sport féminin, Sport sénior, Santé des femmes, Traileuse, Trail cover
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La Sportive Outdoor - Interviews de sportives | Femmes inspirantes, Sport féminin, Sport au féminin, Témoignages sport, Trail, Vélo, Rando

Réinventer sa pratique sportive au fil des années avec Annick Pfetzinger | Sport féminin, Sport sénior, Santé des femmes, Traileuse, Trail

Réinventer sa pratique sportive au fil des années avec Annick Pfetzinger | Sport féminin, Sport sénior, Santé des femmes, Traileuse, Trail

40min |11/11/2025
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40min |11/11/2025
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Description

Comment continuer à se dépasser à 64 ans, tout en faisant bouger les lignes pour les femmes dans le sport ?


Aujourd’hui, je reçois Annick Pfetzinger, professeure à la retraite, ultra-traileuse de longue date, triathlète récente… et toute fraîche championne du monde Xterra Trail dans sa catégorie. Une voix libre, drôle, engagée pour l’égalité femmes-hommes dans le sport, avec un vécu qui respire la montagne et la joie d’être dehors.


Au programme de l’épisode:

  • Comment le sport a accompagné toutes les étapes de sa vie, de l’enfance à la retraite ?

  • Pourquoi elle a choisi l’ultra-trail et ce qu’elle y a trouvé de si fort ?

  • Qu’est-ce qui l’a poussée à s’engager pour l’égalité dans les compétitions ?

  • Comment elle a surmonté un cancer du sein et retrouvé confiance en son corps ?

  • En quoi son rapport au sport a changé avec l’âge ?

  • Quels conseils elle donne aux femmes qui hésitent à se lancer ?


Un échange plein de recul, de malice et d’énergie avec une femme qui prouve que le plaisir, l’audace et la curiosité n’ont pas d’âge.


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La Sportive Outdoor est un média dédié aux sports outdoor au féminin. Le magazine a pour but de mettre en avant les femmes sportives de tous niveaux, de leur fournir des conseils adaptés et de les aider à mieux se connaître pour apprendre à oser! Les maître-mots? Plaisir, bien-être et audace!


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🎵 Musique du générique:

Titre: Running (ft Elske)

Auteur: Jens East

Source: https://soundcloud.com/jenseast

Licence: https://creativecommons.org/licenses/by/3.0/deed.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    La Sportive Outdoor, le podcast des sports outdoors aux féminins pour s'inspirer, apprendre et oser. Bonjour à toutes, dans cet épisode je reçois Annick Pfetzinger, pratiquante de nombreux sports outdoors et engagée dans l'égalité hommes-femmes dans le sport. Annick vient aussi de remporter le titre de championne du monde de trail XTERRA dans sa catégorie. Je suis vraiment ravie de la recevoir aujourd'hui pour qu'elle nous parle de son parcours, de sa pratique sportive et vous allez voir, Annick est très dynamique. Bienvenue, est-ce que tu veux bien te présenter ?

  • Speaker #1

    Oui, alors je vais me présenter, je m'appelle Annick, Annick Petzinger, un nom raccouché dehors, bien alsacien. J'ai 64 ans et je suis une jeune retraitée barodeuse. J'ai effectivement vécu plein d'aventures, j'étais spécialisée dans l'ultra-trail pendant une bonne douzaine d'années. Et maintenant, ma foi, je voyage, je fais du sport. Je rajoute. Je suis une ancienne prof, contrairement à ce qu'on pourrait penser, je ne suis pas une prof de sport. J'étais une prof de français histoire-géo en lycée pro à Saverne.

  • Speaker #0

    D'accord. Et est-ce que le sport a-t-il eu une grande place dans ta vie ou est-ce que c'est venu au fur et à mesure ?

  • Speaker #1

    Alors le sport, je dirais durant mon enfance, ça a été primordial, pendant mon adolescence aussi. Après, j'ai eu une petite parenthèse quand j'ai eu mes enfants. J'ai fait une petite pause et quand je me suis séparée... En gros, c'est comme un cheval à qui on a ouvert la porte de l'écurie. Wouhou ! Je suis partie et j'ai fait plein de trucs. Je me suis fait plaisir.

  • Speaker #0

    Trop bien. Et aujourd'hui, là, maintenant, tu pratiques quoi le plus ? On va dire que tu fais vraiment beaucoup de choses.

  • Speaker #1

    Alors, actuellement, en hiver, je fais du ski alpi, du ski de randonnée. J'ai fait quelques crosses occasionnellement. Je fais du vélo. Alors, j'ai dû modérer ma pratique. de l'ultra-trail parce que les articulations s'en susent un petit peu. Mais je m'en bats toujours dans les forêts. Je fais quelques petits trails, disons. Et là, je me suis mise au triathlon aussi cette année, histoire de changer un petit peu. Voilà, j'espère que je n'ai rien oublié.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui t'avait amenée vers la course, puis le trail ?

  • Speaker #1

    Alors, ce qui m'a amenée, c'est une longue histoire, je dirais. Je suis la plus jeune d'une famille de trois sœurs. Et j'avais des grandes sœurs, une qui avait 8 ans de plus que moi, et mon père était un fan d'alpinisme. Donc toute gamine, très très tôt, je faisais des super longues randonnées. Dernièrement, avec mon GPS, je me suis aperçue qu'à 7 ans, je faisais dans les 1 008 de déniblé avec lui. Donc je me suis dit, waouh, la petite s'indique, c'est pas mal quoi. Et donc durant toute mon enfance et mon adolescence, j'ai fait énormément d'alpi. Et lorsque je me suis remis à la course à pied, j'ai découvert le trail en 2009. J'ai dit « ouais, mais c'est ça que je connais, quoi » . J'étais dans un environnement que je connaissais, j'étais dans la nature, j'avais des sensations d'enfance, d'adolescence, et là, ça s'est déclenché.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce que t'aimes dans le sport de nature, tu vois, en général ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense, j'ai toujours un lien à l'enfance. Quand j'étais petite, je crois que j'ai développé ce qu'on appelle l'intelligence des sens. C'est-à-dire quand je suis la nuit, en montagne, et que je vois la lune, que je sens la pierre, je ne sais pas, je me sens super bien. Et c'est la raison pour laquelle, pour moi, le sport, c'est surtout dehors. Je veux dire, on court au printemps, la forêt n'a pas la même couleur qu'en hiver, il y a des odeurs, il y a des bruits. Et tout ça, ça m'apporte beaucoup de bien-être.

  • Speaker #0

    C'est vrai que c'est chouette aussi, je trouve, de voir l'évolution en fonction des saisons. Tu n'as pas du tout les mêmes ressentis, alors qu'en intérieur, c'est toujours un peu pareil.

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #0

    Et tu disais, tu as fait quand même beaucoup d'ultra. Qu'est-ce que tu recherchais dans ces efforts qui sont très longs ?

  • Speaker #1

    Pour moi, un ultra, c'est comme partir pour un long voyage. Je dirais, ce n'est même pas chercher quelque chose. Dans les fois où je me sentais vraiment dans mon élément. Je crois que gamine, j'ai vraiment développé une sacrée endurance. Et donc, moi je suis un petit diesel, une fois que le moteur est parti. C'est un peu comme les petits lapins, la pub Duracell, on tourne la clé, ça part. Et disons, les ultras, ça amène des paysages super, des rencontres. Je sais que sur l'UT4M, l'Ultra Trail des Quatre Massifs à Grenoble, une nuit, petite nuit étoilée, il y avait un monsieur derrière moi, on a discuté pendant deux heures. Et en fait, je n'ai jamais vu la tête de ce monsieur. Je me souviens juste de sa voix. Et il y a des rencontres comme ça, improbables. En ultra aussi, je parlais de la perception. En ultra, mais surtout la nuit, on sent des choses, on entend des choses. On voit des images absolument sublimes. Ce qui me revient, c'est dans le Grand Raid des Pyrénées, je dévalais une pente, il y avait la ligne des montagnes noires et la lune était rousse, pleine lune rousse. Et à un moment, je sentais un souffle dans mon dos, c'était un cheval qui me suivait. C'est des moments « waouh ! » Et maintenant, disons, quand j'ai des petits coups de déprime, je me reprojette ça, je dis « ah ouais, c'était top ! » C'est incroyable. Enfin, des belles images, l'aventure. Et bon, quand c'est fini, je dis souvent, c'est un peu comme un accouchement, mais on n'a pas de bébé. Il y a tout qui tombe. C'est fini, masse, alors il reste juste les belles images.

  • Speaker #0

    Et il y a une petite nostalgie, du coup, une fois que c'est fini ?

  • Speaker #1

    Pour ma part, oui, souvent. J'ai envie que ça continue. Mais après, quand on rentre, on se pose et on redéroule le film. Et on se dit, mais c'est extra, ces aventures. C'est super. On est aussi souvent confrontés aux éléments. Je sais que dans les années 2010-2011, j'avais fait la 3C et l'UTMB. On a eu des conditions dantesques. Je me souviens, sur la 3C, en fait, j'étais en plein ourage. Et il y avait des éclairs de partout. Et après, quand j'ai fini la course, je me suis dit, mais comment j'ai fait ? pour affronter tout ça et pour arriver là bien sereine à l'arrivée. Et ça aussi, c'est des superbes images. Ça suppose qu'on va au-delà de soi.

  • Speaker #0

    Et toi, tu as été très tôt engagée pour la place des femmes dans la course à pied. Est-ce que tu peux nous raconter les débuts de ton engagement et ce que tu as fait ?

  • Speaker #1

    Ah oui, tout à fait. Comme je l'ai expliqué, dans les années 2009-2010, je me suis mise au trail et à l'ultra. Et donc un ultra, pour les néophytes, c'est plus de 100 km la plupart du temps dans les 160 km, avec beaucoup de dénivelé, donc en montagne, en pleine nature. La plupart du temps, les 160, ça fait dans les 10 000 m de dénivelé, 10 000, 12 000 m de dénivelé. Et en hiver, moi je faisais souvent du cross, parce que ça permet un peu de travailler le cardio, et bon c'est sympa, on est dans la boue et tout, on rigole bien.

  • Speaker #0

    Le cross, tu peux peut-être expliquer ce que c'est, parce que pour celles qui ne font pas d'athlétisme, c'est vrai que ce n'est pas forcément très connu non plus.

  • Speaker #1

    Alors le cross, ce sont des épreuves courtes. Je reviendrai sur les distances, parce que ça, ça me tient vraiment à cœur. Le cross, ce sont des distances courtes, la plupart du temps, en hiver, dans des terrains accidentés. C'est entre 4 et 12 kilomètres.

  • Speaker #0

    Et ça ne paraît pas comme ça, parce que le nombre de kilomètres, ce n'est pas énorme, mais en vrai, c'est hyper dur. Parce que justement, les terrains sont accidentés, boueux.

  • Speaker #1

    Tout à fait.

  • Speaker #0

    En fait,

  • Speaker #1

    je dirais que c'est des micro-trails au niveau des appuis, mais en même temps, ça fait vraiment travailler le cardio. Parce que comme les 10 km sont courtes, il faut envoyer la patate. Donc en hiver, je trouvais ça pas mal. Et alors ma grande surprise, c'était dans les années 2010, je me suis inscrite à un site de cross qui s'appelait le Trophée Michaud. Donc on fait plusieurs cross durant l'hiver, et puis à la fin il y a une sélection. Je me suis aperçue que les dames n'avaient pas le droit de courir plus de 4 ou 5 kilomètres, alors que les messieurs faisaient 8 à 10 kilomètres. Donc je trouvais ça assez improbable, surtout qu'en été, moi je m'étais tapée sur les autres kilomètres, j'ai dit mais c'est pas logique. Et donc j'ai interpellé les organisateurs, qui étaient fort sympathiques à l'époque, qui m'ont dit non mais c'est dans le règlement des crosses nationaux et internationaux. Je dis mais pourquoi ? Les femmes, elles risquent de se faire bousculer, c'est trop dur. L'argument était totalement illogique. Donc j'ai dit j'aimerais bien m'inscrire. Ah ben non, c'est pas possible, c'est dans le règlement. Alors bon... Fort heureusement, les organisateurs du Trou Féminichan, c'est des gens avec qui on peut discuter, et qui étaient ouverts. Ils ont dit, si vraiment tu y tiens, tu peux t'inscrire sur le cross long, mais tu ne seras pas classé, ce n'est pas possible, ce n'est pas dans le règlement. Et donc, à partir de 2012, dans les années 2016, je faisais le cross féminin, donc les 4 km. Et après, j'enchaînais sur le masculin, je n'étais pas classé. Au début, on m'a pris un peu pour une cinglée, puis après j'étais un peu la mascotte de ces messieurs, tiens, la folle là, qui va courir. Et bon, j'arrivais pas dans les premières, quoi. Mais j'arrivais pas dans les derniers non plus. Et donc j'ai réinterpellé les organisateurs, en disant, mais ouvrez-le aux femmes, c'est pas possible. On m'a dit, ouais, mais il y aura peu de femmes qui vont vouloir s'inscrire. Mais bon, j'ai persévéré, j'ai accroché, j'ai aussi... J'ai pris ma plus belle plume et j'ai interpellé la fédération d'athlètes. Je n'ai jamais eu de réponse. Mais in fine, en 2016, les organisateurs du Trophée Michaud ont autorisé, ont ouvert pour la première fois le cross dit masculin, appelé aussi cross des as. Ça peut permettre de sourire. Les femmes, ce n'est pas des as, mais les hommes, oui. Et donc, ça a été ouvert aux femmes. Et miracle, il y a eu plein de filles qui se sont inscrites. Et maintenant, c'est vraiment rentrer dans les mœurs. Parce que je sais que j'ai recouru le Michaud il y a deux ou trois ans. Il y avait la jeune fille qui l'emportait, qui dit « Quoi ? Il y a cinq ans, c'était pas ouvert aux dames, mais c'est quoi cette histoire ? » Donc comme quoi, on a des choses qui nous paraissent tout à fait normales. Si on ne le pointe pas, on n'avance pas. Et bon, je finis quand même, parce que c'est important, en 2017, la réglementation nationale et internationale a changé. Ce qui signifie non pas qu'une petite technique dans le nord de l'Alsace a couru les deux crosses et que du coup, ça a modifié les choses. Mais je pense qu'il y a d'autres femmes comme moi qui ont dû faire la même chose et l'union faisant la force. Voilà. Maintenant, on peut courir quasi les mêmes distances. Voilà.

  • Speaker #0

    C'est tellement important d'avoir des personnes qui, effectivement, peut-être font une petite action, mais une petite action chacune, ça fait une grosse action.

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait. Et ça interpelle les gens. Ça interpelle les gens parce que nombre de collègues masculins étaient tout à fait estomaqués d'apprendre que les femmes couraient des distances moindres parce qu'on n'avait jamais pointé la chose. C'est tout. Du moment où on fait s'interroger les gens, ça peut évoluer.

  • Speaker #0

    Et maintenant, les distances, il y a encore des différences ou c'est pareil hommes et femmes ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne voudrais pas... comment dire, je ne suis pas une spécialiste des règlements internationaux. Mais la dernière fois que j'ai téléchargé les règlements, il semblerait qu'au niveau international, les distances sont les mêmes. Et au niveau national, il y a encore des petites différences. Mais ça gagnerait vraiment à vérifier. Je ne voudrais pas raconter de bêtises. Néanmoins, ça a évolué. On a le droit de courir plus que 5 kilomètres. Youpi, voilà.

  • Speaker #0

    Ouf !

  • Speaker #1

    Ouais, ouf !

  • Speaker #0

    Et est-ce que, tu vois, quand tu participais à des compétitions, donc là, il y a l'exemple du cross, mais sur d'autres sports, comme le trail, par exemple, est-ce que tu as déjà eu des remarques, des réactions où tu ressentais que ça gênait un peu que tu sois là en tant que femme ?

  • Speaker #1

    Moi, j'ai quelques anecdotes. Maintenant, globalement, il faut quand même dire, je pense que le trail a vraiment ouvert les choses aux femmes. Je pense que c'est quand même un milieu qui est très ouvert. Mais il m'est arrivé deux petites anecdotes que je me plais à raconter, mais qui sont quand même assez... sont pas mal. C'était à Niederbronn. Il y a bien une bonne dizaine d'années, j'avais de moins de rythme que maintenant. Et à l'époque, j'ai doublé un petit jeune homme dans une descente. Et à l'arrivée, il est venu me voir et il me dit, « Pour une femme,

  • Speaker #0

    vous courez bien. »

  • Speaker #1

    Déjà, le « pour une femme » , ça m'a un peu hérissé. Et après, on m'a dit... Et en plus vieille, alors là, ça a été la cerise sur le gâteau. J'ai eu une autre anecdote que je me plais aussi à raconter, parce que ça pointe quand même pas mal de représentations. C'était toujours à Niederbronn. J'avais fait le cent et quelques de Niederbronn. Et sur la fin, j'avais un petit regain de, comment dire, j'étais en forme. Ça arrive, c'est la grâce de certains traits. Je double un monsieur et il me fait... « Ah, bonjour, vous avez quel âge ? » Alors, au début, je me dis, c'est quoi cette histoire ? Pourquoi il me demande mon âge ? Alors, bon, sur le coup, je t'ai interloqué, je continue. On double un deuxième, il me demande « Vous avez quel âge ? » Je lui dis « Non, mais j'ai 21 ans dans ma tête. » Et après, je double un troisième qui dit « Je peux vous poser une petite question, madame ? » Je lui dis « Oui, j'ai quel âge ? » « J'ai 21 ans dans ma tête, merci monsieur. » Et par la suite, ça m'a vraiment interpellée. Je lui ai dit « Est-ce que moi, je demanderais à un monsieur ? » Quel âge avez-vous ? À moins qu'il ne soit octogénaire, je ne sais pas. Et je pense que c'est lié à la représentation. Une femme double, ciel. Mais en plus, avec un certain âge, ce n'est pas possible. Je pense que là, il y a encore des trucs à modifier. Oui,

  • Speaker #0

    effectivement. C'est tellement bizarre de demander ça. Ça ne me viendrait pas l'idée non plus. Comme si j'essayais de se rassurer.

  • Speaker #1

    Du coup, dans ma tête, souvent on est un peu en auto-hypnose quand on court. Je me dis, mais pourquoi il me demande ça ? Mais pourquoi on me demande ça ? Parce que moi, je demanderais l'âge aux gens. J'ai eu vraiment un gros moment de solitude et d'incompréhension.

  • Speaker #0

    Tu as vu l'évolution de l'intégration des femmes dans les sports outdoor en général. Quels changements ont été les plus marquants pour toi ? Déjà, bien sûr, il y a le changement pour le cross. Mais est-ce que tu as vu d'autres changements comme ça qui t'ont semblé importants ?

  • Speaker #1

    Moi, je viens de loin parce que je me suis souvenu qu'en cours d'éducation physique, quand j'étais ado, quand j'avais 14-18 ans, les cours d'éducation physique étaient séparés. C'est-à-dire que les filles étaient avec un prof et les garçons étaient avec un prof. Ce n'était pas mélangé. Donc là, ça a quand même évolué. Maintenant, comme je l'ai dit, je pense qu'il y a quand même beaucoup de sports qui sont ouverts aux femmes. Je pense, par exemple, le foot. féminin, enfin, qui commence à prendre de l'ampleur. Mais, je dirais, il y a encore des choses qui résistent. Alors bon, d'un point de vue perso, moi j'ai des petites filles, et dans le sud de la France, elles avaient fait une activité avec leurs parents. Alors autant, il paraît, il y avait des jeux collaboratifs, les parents étaient tout enthousiastes parce que c'était des équipes de jeux garçons-filles. Et donc, c'était plus axé sur la collaboration que sur la compétition. Et pour clore cette belle journée, il y a une petite course qui était organisée pour les 6-10 ans. Et bien sûr, à ce moment-là, la distance pour les garçons était plus longue que pour celle des filles. Donc, comme mon fils connaissait mon combat, enfin mon combat, mes idées, il a interpellé les organisateurs. Et donc, on lui a fait remarquer que pour les filles, il faisait un peu chaud. ne pas les faire courir plus que les garçons, les pauvres cocottes. Et lui, il s'est posé la caisseau et s'est dit, il y a peut-être des garçons aussi qui avaient trop chaud et qui auraient voulu faire des distances moindres. Pourquoi ne pas équilibrer ? Non, familialement, j'ai encore une autre anecdote, aussi au niveau du collègue. Actuellement, les jeunes filles au collège, lorsqu'elles font le cross, ont des distances moindres. Et donc, ma petite nièce avait... interpellé son prof de sport, d'ailleurs peut-être un peu véhément, d'autant que quand il leur faisait faire des pompes, les filles devaient les faire à genoux et les garçons devaient les faire entièrement. Et donc, elle a interpellé son prof de sport en lui disant que ce n'était pas normal, qu'elle était capable de le faire. Bon, elle était punie parce que je pense qu'elle y allait un petit peu fort. Mais, quelque part, ça nécessite une réflexion. Maintenant, il y a aussi, dans tout ce qui est actualité, Cet été, il y avait le Tour de France. Je me suis dit, tiens, pourquoi est-ce que le Tour de France féminin est plus court que le Tour de France masculin ? J'ai un petit peu enquêté auprès des proches et on m'a dit, ouais, mais c'est moins vendeur. Je lui ai dit, ouais, mais pourquoi est-ce que c'est moins vendeur ? Parce qu'on a quand même des belles championnes, je veux dire, Pauline Ferrand, elle est chouette quoi ! Et là, ça pose question. Et dernièrement, j'ai également eu un coup au cœur quand on parlait des tests de féminité. au niveau des boxeuses. Est-ce qu'on fait des tests de masculinité pour les gens ? Est-ce que, quand on est un peu performant, est-ce qu'on doit analyser tous les ressorts de la performance ? Par exemple, Kylian Jornet, paraît-il, a des capacités hors pair. Est-ce que, pour autant, on l'interdit de compétition ? Ou Martin Fourcade, par exemple ? Et là aussi, ça me pose question.

  • Speaker #0

    Je suis d'accord, il y a pas mal de questions encore déjà à se poser. Je trouve ça chouette aussi d'interpeller, là par exemple dans le cas de tes petits-enfants dont tu parlais, juste déjà de pouvoir dire « Eh oh, c'est peut-être pas normal. » Et en plus, sur un enfant, je trouve ça fou l'impact que ça va avoir parce que si directement dans la société, on dit aux petites-filles « Toi, tu pourras toujours faire que moi. » que les petits garçons, forcément, elles vont vraiment le penser et l'intégrer. Ça a des conséquences énormes sur l'ensemble d'une vie. Je me dis que c'est génial de voir les évolutions dont tu parles et on voit que ça bouge. J'en suis consciente, mais c'est intéressant aussi de voir qu'il y a encore pas mal de travail et qu'aussi, à titre individuel, on peut faire des choses juste déjà en interpellant, sans même faire preuve d'agressivité ou quoi, mais juste en disant « Eh oh ! » Pourquoi ? Et peut-être qu'effectivement, des gens qui ne se posent même pas la question vont juste déjà s'interroger et que c'est un premier pas pour faire changer les choses.

  • Speaker #1

    Je suis tout à fait d'accord. Moi, je me dis interpeller et montrer l'exemple, montrer qu'on peut. Et à ce moment-là, ça fait se questionner les gens. Oui,

  • Speaker #0

    tout à fait.

  • Speaker #1

    Petit à petit, ça peut évoluer.

  • Speaker #0

    Est-ce que toi, tu as des conseils à donner à des femmes qui osent... justement peut-être pas trop se lancer dans le trail ou des sports d'endurance en général parce qu'elles se sentent peut-être pas vraiment à leur place ?

  • Speaker #1

    Absolument et moi je me dis finalement biologiquement on a quand même une sacrée chance parce qu'on est fait pour accoucher. Or il paraît qu'un accouchement c'est un marathon donc quelque part physiologiquement on peut. Maintenant c'est vrai que si on veut se lancer dans le trail et qu'on fait juste un peu de running, il ne s'agit pas de commencer par faire un 160, bien sûr que non. Mais ce qui est fou au niveau du corps je pense c'est... L'entraînement ne permet que d'évoluer. C'est-à-dire, on peut au début se fixer des petites distances sans objectif de performance juste, y arriver. Et je pense qu'en s'entraînant très vite, on se rend compte que ça marche, j'avance, tout va bien. Oser, il faut absolument oser et y aller. Et éventuellement, y aller peut-être avec des copines, ça peut aussi être une émulation. Ou se fixer un objectif. Tiens, je vais avoir 35, 40 ans, maintenant je vais faire un petit trail, 9 kilomètres. Puis après, peut-être monter. Et au bout d'un moment, on prend du plaisir.

  • Speaker #0

    Ce qui est bien le plus important. Et toi justement, tu as 64 ans. Comment est-ce que tu vis ta pratique sportive aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Alors bon... Euh... il est évident que le corps ne rajeunit pas. La dernière fois que j'ai allé voir mon médecin, il a comparé mes articulations à des vieux pneus usés. Mais ça n'empêche pas de rouler. J'ai un tout petit peu modéré, c'est-à-dire que je ne fais plus d'ultra, mais ça ne m'empêche pas de faire du ski alpi à tir l'arigot. Je vais souvent gambader en forêt. Je fais encore des épreuves de trail, mais plus... plus des oscillons, disons. Je me suis aussi mis des objectifs parce que comme j'ai des articulations qui commencent à fatiguer un peu, cette année, je m'étais dit, bon, du coup, je vais faire un triathlon. Et en fait, c'était super fun. Je m'étais mis la barre très haut parce qu'en fait, il y a un an, je nageais comme un caillou, du genre grand-mère fait sa natation avec la tête qui sort et le petit bonnet de bain, quoi.

  • Speaker #0

    C'est moi quand je nage.

  • Speaker #1

    Oui, voilà. Et donc... Ça m'a pari vraiment un défi de fou. J'ai pris des cours, je me suis inscrite à un club de natation. Maintenant, je ne dis pas que je nage comme un poisson, mais ça va un tout petit peu mieux. Et du coup, j'ai fait plus de vélo. J'ai fait aussi de la course à pied. Et ça a été vraiment une expérience géniale. Donc, je pense qu'à tout âge, on peut se lancer des défis, des objectifs, se faire plaisir. Bien entendu, moi, je continue à courir, mais bon. Comme dit un petit peu moins qu'avant.

  • Speaker #0

    Je trouve que c'est trop chouette de voir que tu adaptes en fonction de ton corps, tu respectes ton corps, mais en fait, ça ne t'empêche pas de faire des trucs trop chouettes. Tu te prends sur le triathlon, c'est génial.

  • Speaker #1

    Et ce qu'il y a aussi, je pense, c'est que j'ai une grande chance, c'est que pendant une bonne quinzaine d'années, je ne me suis jamais blessée. Donc, je suppose, je me lance des fleurs, que je m'entraînais correctement et que je récupérais correctement. Parce que ça joue aussi. Et maintenant que je sens quand même que je commence à fatiguer, je pense que l'adaptation, c'est une bonne idée. Au début, on peut être très réfractaire en se disant « mais moi, le vélo, ça ne m'intéresse pas, ce ne sont pas les mêmes sensations » . On découvre d'autres choses, on rencontre d'autres gens aussi et c'est une bonne alternative. J'ai fait aussi pas mal d'équitations dans mon adolescence. Je me suis dit « au pire, je vais retourner sur un cheval » . Je me suis dit que c'est la clavicule, la cheval, donc il faut quand même faire attention.

  • Speaker #0

    C'est sûr que ce n'est pas le sport le moins risqué, mais ça varie en tout cas. Et est-ce que tu as, parce qu'on parle souvent aussi du côté un peu négatif du fait de prendre de l'âge, où effectivement, on a peut-être les articulations qui glissent un peu, etc. Mais est-ce que tu as aussi des choses positives ? Parce que j'ai aussi tendance à me dire que quand on a plus d'expérience, plus de vécu, plus de maturité, Il y a plein de choses qui se passent quand même vachement mieux et qu'on vit mieux.

  • Speaker #1

    Je pense que le maître mot à mon âge, c'est l'expérience. J'ai eu la grande chance, c'était vraiment l'apothéose de ma carrière de trailleuse. À 62 ans, j'ai fait l'Aiger Ultra Trail, c'est un 250 km, 15 000 m de dénivelé. Ce n'était pas balisé, c'était en autonomie avec un GPS et ça devait se faire en équipe. Et donc, je l'ai fait en équipe avec une copine. Je pense que là, l'expérience a beaucoup joué, notamment dans l'organisation, dans la gestion de l'effort. Je me souviens, à un moment, j'ai dit, maintenant, on s'assoit, on dort. Parce qu'en Ukraine, parfois, on s'arrête dans un pré, on dort des minutes et hop, on repart. Je me disais, mais j'y arriverai pas. Je lui dis, si, maintenant, tu te couches, on dort. Bon, elle était sympa, Marianne, parce qu'elle ne se rebellait pas. Elle faisait comme je disais. Et on a eu raison, parce qu'après, paf, c'était reparti. Et je pense que c'est une petite anecdote pour dire que plus on a d'expérience, généralement, on fait de bêtises. On a peut-être plus tendance aussi à faire attention à la récup, à s'écouter. finalement, ça peut aider d'autres personnes de faire partager notre expérience à cet âge. Oui,

  • Speaker #0

    complètement. C'est vraiment un bon message, je trouve, à faire passer. Et toi, tu as eu une période aussi passante puisque tu as eu un cancer du sang à un moment dans ta vie. Comment est-ce que tu as réussi à te reconstruire et à reconstruire toute ta vie et ta pratique sportive après ça ?

  • Speaker #1

    Ça a été un moment très dur. Au départ, quand on me l'a annoncé, je ne le croyais pas. Parce que je venais de finir un ultra Stellandora, ultra trail, où vraiment j'avais la pêche. Enfin, j'ai fini bien, avec des super beaux souvenirs. Et bon, quelques mois après, on me dit, bon, il y a une présence de champ de cancer. J'ai cru que c'était une vanne. Je me suis dit, non, ils sont trompés à la radio, ce n'est pas possible. Et de fait, si, il y avait bien un cancer. Et le problème, c'est que ça s'est... passé au début du Covid. Donc, je me suis retrouvée seule, je vis seule. Seule, avec cette épée de Damoclès. Donc, en gros, j'ai eu trois opérations. Alors, au début, les premières opérations, ça allait. Bien entendu, après une opération, on n'a pas le droit de courir, donc j'allais marcher en forêt. Et la troisième opération, par contre, ça a été la Bérésina, parce que Euh... Quatre jours avant l'opération, j'ai dit moi je fonce en Suisse, je vais me faire un festival de sensations en montagne. J'ai fait dans les 150 kilomètres et 6000 mètres de dénivelé, 40 kilomètres par jour, j'avais la frite. Donc c'était d'autant plus difficile à admettre. Je me suis bourrée d'images, d'odeurs et hop, je suis allée sur la table d'opération. Et quand je suis sortie de l'hôpital au bout d'une petite semaine, Je n'étais même pas capable d'aller à la boulangerie à 800 mètres, je ne tenais pas debout. Et ça, ça a été très très dur, parce que j'ai vraiment l'impression qu'on m'a mise à terre. Et là, je dirais, les copines de course à pied, elles m'ont vraiment aidée. Du type, tiens, je te ferai une petite visite, on va à la boulangerie toutes les deux. À l'époque, la boulangerie pour moi, c'était l'Everest, je me disais, c'est pas possible, je n'arrive plus à aller à la boulangerie. Et donc, merci Anne. On est allé à la boulangerie toutes les deux, j'ai dit je peux le faire. Là aussi je pense que le sport m'a beaucoup aidé, c'est bon. Aujourd'hui on fait 800 mètres, demain on va en faire 850. Et tout doucement, tout doucement, j'ai remonté. Maintenant, il faut le dire, là socialement, c'est bien des premières fois où je me suis autant entourée. C'est-à-dire mes copines de course à pied, elles m'ont vraiment aidée. Au départ, on faisait juste des randonnées à plat, sans déniveler. Et peu à peu, j'ai repris. Il y a aussi ma belle-fille qui, quelques mois après l'opération, m'a dit « Allez, on met les baskets et on va au stade. » Et moi, je me disais « J'y arriverai pas. » Et elle m'a encouragée. « Ah ouais, je refais un tour ? Ah bah ouais, ça va. » Puis on est repartis comme ça. La troisième chose aussi, c'est que pendant que j'étais vraiment pas bien, j'ai fait... Beaucoup de marches à pied. Après une opération, on demande de mettre des bas de contention. C'est une horreur. Et moi, je me suis fait opérer en juillet. Donc, je transpirais dans mes bas de contention. C'était une horreur. Alors, j'avais trouvé un truc au bout de quelques semaines. J'allais à pied à une petite fontaine. Ça s'appelle la Fontaine Mélanie, près de Saverne. C'est plat. J'allais donc en forêt, sous les arbres. Et arrivé à la fontaine, j'ôtais mes bas et je prenais un bon bain d'eau froide. Et après, je revenais. Ça allait mieux, je m'étais un peu aérée et au niveau des jambes, ça allait mieux aussi. Et bon, peu à peu, c'est revenu et je me suis fait opérer en 2020.

  • Speaker #0

    Et en 2021, je vais me mettre un objectif et j'ai fait la Suisse Alpes, c'est un ultra de 160 kilomètres. Et là, ça fait partie aussi d'un épisode très marrant, c'est que je n'ai pas performé au niveau du temps, mais cette course était très mal organisée et de fait, il n'y avait très peu de rabiteaux. Et moi, je l'avais senti, j'avais bourré mon sac de barres de céréales. À tous les ravitaux, ils offraient que des M&M's. Maintenant, je ne peux plus voir les M&M's. C'est tout ce qu'il y avait. Donc moi, j'ai mangé mes petites barres. Et à l'arrivée, on m'apprend que je suis deuxième au scratch. Je dis, ouais, non, là, il y a un petit souci. Parce que le temps que j'ai fait, ce n'est vraiment pas le temps d'une championne. Et j'ai appris par la suite, toutes les nanas avaient abandonné parce qu'elles n'avaient rien à manger. Donc moi, je les ai eues à l'usure, mais ça a été une jolie victoire.

  • Speaker #1

    Mais c'est incroyable. Un an après, c'est rien. après et puis ce genre de distance. Tu as vraiment réussi à te remettre très bien. Oui.

  • Speaker #0

    Mais comme dit, je pense que c'est aussi beaucoup dans la tête. Je me sens... J'ai complètement perdu confiance en moi et en mon corps après mon opération parce que plus rien ne fonctionnait. Le corps, il ne répondait pas. Et en fait, le corps, c'est quelque chose de super. Je crois que c'est ce qu'on... Ce qu'on découvre aussi en ultra, parfois à 5h du matin, dans la nuit, on est au bout de 100 km, on n'en peut plus, on met une petite cape de pluie dans le fossé, on roupille 5 minutes et hop, après ça repart. Et je pense que ça, ça m'a aidée aussi. Je me suis dit, le corps, il peut repartir. Il faut un peu dresser le cerveau et y aller. Et effectivement, les copines m'ont beaucoup aidée parce qu'en ultra, moi souvent, je m'entraînais seule. très peu de femmes qui font de l'ultra. C'est aussi notable. Il y a 8-10% de femmes qui font de l'ultra. Et je pense que après mon opération, je n'ai jamais pris autant de plaisir à me laisser entraîner. Du type, allez, maintenant, on va fractionner. Enfin, je précise pour ceux qui connaissent. Ce ne sont pas des fans de l'athlète. Fractionner, c'est faire des séries de courte distance, mais le plus vite possible pour muscler le cœur. Et bon, ce n'est pas évident de fractionner. Là, les copines, elles m'ont dit, allez, on y va, on fait 10 petites longueurs. Et je les ai suivies. Et ça permet de reprendre aussi et de reprendre confiance en soi.

  • Speaker #1

    C'est aussi une grande force d'être bien entourée.

  • Speaker #0

    Tout à fait. Et là,

  • Speaker #1

    tu viens de remporter le championnat du monde de trail XTERRA. Donc déjà, félicitations. Et est-ce que tu peux nous expliquer déjà le concept XTERRA et nous raconter ta course ?

  • Speaker #0

    J'ai raconté le concept XTERRA, mais tout de suite, je préviens, on était trois à courir les championnats du monde XTERRA. Donc, être première sur trois, ce n'est pas la même chose qu'être première sur 300, disons. Mais on va quand même expliquer la chose.

  • Speaker #1

    C'est quand même déjà chouette.

  • Speaker #0

    Oui, c'est chouette, c'est sympa. Mais bon, pour moi, je dirais que c'est plus symbolique qu'autre chose. Le championnat du monde XTERRA, c'était l'anniversaire de mon opération du cancer du sein 5 ans avant. Et donc pour moi, c'est vraiment très symbolique parce que je me suis dit, ouais, il y a 5 ans, j'étais sur un lit d'hôpital. À l'époque, pour rigoler, j'avais une perfusion, j'avais une perf du jour, un pas. Les infirmiers, l'infirmière était tellement débordée qu'ils n'ont pas rigolé. Il n'y a que ma voisine de lit qui rigolait, mais bon. Là, je me suis retrouvée championne du monde, comme dit ce proie, mais c'était tout à fait symbolique. Alors le concept, c'est des courses à travers le monde, sur tous les continents. Il y a des courses sélectives, et ceux qui se sont sélectionnés sur ces courses peuvent participer au championnat du monde. Et ma participation à XTERRA relève vraiment de l'anecdote. Parce que l'année dernière, j'avais peu couru, j'avais mal au genou et je me suis inscrite à une course. Je ne savais pas qu'elle me sélectionnait au championnat du monde. Et là, pareil, comme dans ma catégorie, on est vachement nombreux, je crois qu'on était deux. Donc, je me suis sélectionnée, j'étais première sur deux. Et j'ai appris que je pouvais participer à ce championnat. Alors bon, 21 kilomètres, ce n'est pas ma distance, c'est trop court. Moi, c'est plus des longues distances. Mais je me suis dit, bon, ça peut être amusant. d'aller au Pays de Galles, de participer à ces championnats. Mais tout à fait honnêtement, j'y suis allée plus en me marrant que boostée par une envie de gagner. Maintenant, il ne faut pas détériorer non plus. Je veux dire, il y avait dans les 33 nations qui étaient représentées. Sur l'ensemble de XTERRA, les athlètes seniors, il y en a vraiment des bons. Donc pour eux, je pense, être champion du monde XTERRA, ça a peut-être plus de signification que pour moi. Je dirais que c'est un petit titre. Et ce qui est fou aussi, c'est que j'ai pris le départ des plus grands ultras. J'ai pris le départ de l'UTMB, la Diagonale des Fous et le CERA. Là aussi, il y a je ne sais combien de nationalités qui sont représentées. Tout à fait. Honnêtement, l'enjeu est beaucoup plus important sur un ultra. Donc, par exemple, quand j'ai fini le 250 de l'Aiger, je n'étais vraiment pas dans les premières, mais je pense que l'effort était tellement plus important que ce petit 21 kilomètres, qu'il vaut mieux le prendre comme une anecdote. Néanmoins, c'est vrai que depuis que je suis, entre guillemets, championne du monde, des gens me félicitent et tout, je me dis, oui, bon, ce n'est pas l'épreuve la plus difficile que j'ai faite dans ma vie. Ma foi. Ça permet de relater son expérience. Et ça s'est passé au Pays de Galles. C'était une épreuve de 21 kilomètres et 1002 de dénivelé dans le parc de Snowdenia. C'est magnifique, le parc de Snowdenia. Et c'était tout à fait atypique, parce qu'ambiance très galloise. Et je suis ravie d'être allée là-bas, parce que du coup, j'ai découvert le Pays de Galles. J'y suis allée en train. parce que je déplore que certaines compétitions internationales nécessitent qu'on prenne l'avion et qu'on laisse une empreinte carbone. Et donc là aussi, ça faisait partie de mon petit défi. Je me suis dit, je vais aller au Pays de Galles et je ne prendrai pas l'avion. Non. Donc je me suis renseignée sur les billets de train. Bon, perso, je commence à découvrir toutes les applis Interrail et compagnie. qu'on peut télécharger. Merci à mes enfants de m'avoir quelque peu orientée dans ces choix. Et donc, j'ai pris le train jusqu'à Paris. Après Paris, je suis allée à Londres. À Londres, j'ai changé de gare. Je suis, j'ai pris le train sur Bangor, qui est au Pays de Galles. À Bangor, il a fallu prendre un bus. Il a fallu changer de bus. Comme bien entendu, je ne maîtrise pas vraiment la langue de Shakespeare. Non, mais... n'étaient pas très bons. Au Pays de Galles, ils ont un sacré accent. Donc, quand je me suis assurée que le bus était le bon, le gars, il me dit non. Et finalement, en modifiant mon accent, on m'a dit que oui, c'était bien le bon bus. Et j'ai atterri au Pays de Galles. Et là, j'ai découvert les joies du camping gallois. C'est aussi très amusant. Parce qu'en fait, le terrain de camping, c'était des parcs à moutons. Et donc, le brave paysan changeait ses moutons au fur et à mesure que les gens arrivaient. Je crois que j'étais une des seules à participer au championnat, à avoir bivouaqué. C'était charmant, avec les petits bêlements des agneaux. Et donc j'ai fait des championnats, et après je suis rentrée au camping. Et comme le camping était en hauteur, je m'étais tapée les vis de son maître de dénivelé, et après je suis remontée, mais c'était vraiment très chouette.

  • Speaker #1

    C'est chouette, ça fait une aventure globale en fait. Tu n'as pas juste la partie vraiment course, tu as l'avant, l'après, la découverte du pays. C'est ça qui est chouette aussi.

  • Speaker #0

    Mais enfin, dans les courses, dans les ultras, si je peux inciter des gens à faire des ultras, c'est ça aussi. Je sais quand j'ai fait la Diagonale des Fous à La Réunion, mais j'ai découvert une île, c'était merveilleux. Bon là, à l'époque, j'ai pris l'avion. On va mettre un bonnet là. Mais c'était un petit peu plus compliqué à organiser.

  • Speaker #1

    C'est clair. Et quels sont tes prochains projets ou aventures ? Parce que j'imagine que tu en as.

  • Speaker #0

    Alors, les projets, j'en ai plus à la tête. Ce n'est pas ça qui manque. Maintenant, qui vont se concrétiser ? Là, dans une dizaine de jours, je pars faire la traversée des Vosges avec une copine. Bien entendu, en bivouac et en autonomie, pas de gîte en gîte. Donc, ça va être chouette. parce que finalement, nos beaux-jeunes natales, c'est super beau, surtout en automne. J'espère juste que le temps sera de la partie, sinon ça va être la cape de pluie. Et après, j'envisage en hiver d'aller en Laponie. J'aimerais bien voir les aurores boréales. Donc, je suis en train d'organiser ça. Bon, ma compagnonne qui va m'accompagner en Laponie, un peu rétive à tout ce qui est train, mais on va quand même... faire des projections pour pouvoir y aller. Et après, ma foi, après, j'ai tellement de trucs à faire.

  • Speaker #1

    Tu vas réussir à la convaincre, je suis sûre.

  • Speaker #0

    On va essayer, on va essayer.

  • Speaker #1

    C'est trop bien, plein d'idées.

  • Speaker #0

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #1

    Et est-ce que, j'ai une petite question traditionnelle pour la fin de l'épisode, quel message est-ce que tu aimerais faire passer aux auditrices du podcast ?

  • Speaker #0

    Alors là, oser se faire plaisir. Il y a souvent une phrase de Simone de Beauvoir qui me revient, qui dit « On ne n'est pas femme, on le devient. » Eh bien, on peut aussi devenir une sportive. Il suffit d'oser et puis de jeter à terre toutes tes représentations, de se dire qu'on en est capable. biologiquement, en effet.

  • Speaker #1

    Trop chouette. Merci pour ce message final. Et puis, merci d'avoir partagé tout ça. Je trouve ça trop bien de voir la variété, en fait, de choses que tu fais et le plaisir que tu y prends aussi. Donc, grand merci, Annick. Et puis, bonnes nouvelles aventures à toi.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté cet épisode. Si cela vous a plu, n'hésitez pas à vous abonner au podcast et à mettre une bonne note sur les plateformes. Cela nous aide. À bientôt.

Description

Comment continuer à se dépasser à 64 ans, tout en faisant bouger les lignes pour les femmes dans le sport ?


Aujourd’hui, je reçois Annick Pfetzinger, professeure à la retraite, ultra-traileuse de longue date, triathlète récente… et toute fraîche championne du monde Xterra Trail dans sa catégorie. Une voix libre, drôle, engagée pour l’égalité femmes-hommes dans le sport, avec un vécu qui respire la montagne et la joie d’être dehors.


Au programme de l’épisode:

  • Comment le sport a accompagné toutes les étapes de sa vie, de l’enfance à la retraite ?

  • Pourquoi elle a choisi l’ultra-trail et ce qu’elle y a trouvé de si fort ?

  • Qu’est-ce qui l’a poussée à s’engager pour l’égalité dans les compétitions ?

  • Comment elle a surmonté un cancer du sein et retrouvé confiance en son corps ?

  • En quoi son rapport au sport a changé avec l’âge ?

  • Quels conseils elle donne aux femmes qui hésitent à se lancer ?


Un échange plein de recul, de malice et d’énergie avec une femme qui prouve que le plaisir, l’audace et la curiosité n’ont pas d’âge.


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🎵 Musique du générique:

Titre: Running (ft Elske)

Auteur: Jens East

Source: https://soundcloud.com/jenseast

Licence: https://creativecommons.org/licenses/by/3.0/deed.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    La Sportive Outdoor, le podcast des sports outdoors aux féminins pour s'inspirer, apprendre et oser. Bonjour à toutes, dans cet épisode je reçois Annick Pfetzinger, pratiquante de nombreux sports outdoors et engagée dans l'égalité hommes-femmes dans le sport. Annick vient aussi de remporter le titre de championne du monde de trail XTERRA dans sa catégorie. Je suis vraiment ravie de la recevoir aujourd'hui pour qu'elle nous parle de son parcours, de sa pratique sportive et vous allez voir, Annick est très dynamique. Bienvenue, est-ce que tu veux bien te présenter ?

  • Speaker #1

    Oui, alors je vais me présenter, je m'appelle Annick, Annick Petzinger, un nom raccouché dehors, bien alsacien. J'ai 64 ans et je suis une jeune retraitée barodeuse. J'ai effectivement vécu plein d'aventures, j'étais spécialisée dans l'ultra-trail pendant une bonne douzaine d'années. Et maintenant, ma foi, je voyage, je fais du sport. Je rajoute. Je suis une ancienne prof, contrairement à ce qu'on pourrait penser, je ne suis pas une prof de sport. J'étais une prof de français histoire-géo en lycée pro à Saverne.

  • Speaker #0

    D'accord. Et est-ce que le sport a-t-il eu une grande place dans ta vie ou est-ce que c'est venu au fur et à mesure ?

  • Speaker #1

    Alors le sport, je dirais durant mon enfance, ça a été primordial, pendant mon adolescence aussi. Après, j'ai eu une petite parenthèse quand j'ai eu mes enfants. J'ai fait une petite pause et quand je me suis séparée... En gros, c'est comme un cheval à qui on a ouvert la porte de l'écurie. Wouhou ! Je suis partie et j'ai fait plein de trucs. Je me suis fait plaisir.

  • Speaker #0

    Trop bien. Et aujourd'hui, là, maintenant, tu pratiques quoi le plus ? On va dire que tu fais vraiment beaucoup de choses.

  • Speaker #1

    Alors, actuellement, en hiver, je fais du ski alpi, du ski de randonnée. J'ai fait quelques crosses occasionnellement. Je fais du vélo. Alors, j'ai dû modérer ma pratique. de l'ultra-trail parce que les articulations s'en susent un petit peu. Mais je m'en bats toujours dans les forêts. Je fais quelques petits trails, disons. Et là, je me suis mise au triathlon aussi cette année, histoire de changer un petit peu. Voilà, j'espère que je n'ai rien oublié.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui t'avait amenée vers la course, puis le trail ?

  • Speaker #1

    Alors, ce qui m'a amenée, c'est une longue histoire, je dirais. Je suis la plus jeune d'une famille de trois sœurs. Et j'avais des grandes sœurs, une qui avait 8 ans de plus que moi, et mon père était un fan d'alpinisme. Donc toute gamine, très très tôt, je faisais des super longues randonnées. Dernièrement, avec mon GPS, je me suis aperçue qu'à 7 ans, je faisais dans les 1 008 de déniblé avec lui. Donc je me suis dit, waouh, la petite s'indique, c'est pas mal quoi. Et donc durant toute mon enfance et mon adolescence, j'ai fait énormément d'alpi. Et lorsque je me suis remis à la course à pied, j'ai découvert le trail en 2009. J'ai dit « ouais, mais c'est ça que je connais, quoi » . J'étais dans un environnement que je connaissais, j'étais dans la nature, j'avais des sensations d'enfance, d'adolescence, et là, ça s'est déclenché.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce que t'aimes dans le sport de nature, tu vois, en général ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense, j'ai toujours un lien à l'enfance. Quand j'étais petite, je crois que j'ai développé ce qu'on appelle l'intelligence des sens. C'est-à-dire quand je suis la nuit, en montagne, et que je vois la lune, que je sens la pierre, je ne sais pas, je me sens super bien. Et c'est la raison pour laquelle, pour moi, le sport, c'est surtout dehors. Je veux dire, on court au printemps, la forêt n'a pas la même couleur qu'en hiver, il y a des odeurs, il y a des bruits. Et tout ça, ça m'apporte beaucoup de bien-être.

  • Speaker #0

    C'est vrai que c'est chouette aussi, je trouve, de voir l'évolution en fonction des saisons. Tu n'as pas du tout les mêmes ressentis, alors qu'en intérieur, c'est toujours un peu pareil.

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #0

    Et tu disais, tu as fait quand même beaucoup d'ultra. Qu'est-ce que tu recherchais dans ces efforts qui sont très longs ?

  • Speaker #1

    Pour moi, un ultra, c'est comme partir pour un long voyage. Je dirais, ce n'est même pas chercher quelque chose. Dans les fois où je me sentais vraiment dans mon élément. Je crois que gamine, j'ai vraiment développé une sacrée endurance. Et donc, moi je suis un petit diesel, une fois que le moteur est parti. C'est un peu comme les petits lapins, la pub Duracell, on tourne la clé, ça part. Et disons, les ultras, ça amène des paysages super, des rencontres. Je sais que sur l'UT4M, l'Ultra Trail des Quatre Massifs à Grenoble, une nuit, petite nuit étoilée, il y avait un monsieur derrière moi, on a discuté pendant deux heures. Et en fait, je n'ai jamais vu la tête de ce monsieur. Je me souviens juste de sa voix. Et il y a des rencontres comme ça, improbables. En ultra aussi, je parlais de la perception. En ultra, mais surtout la nuit, on sent des choses, on entend des choses. On voit des images absolument sublimes. Ce qui me revient, c'est dans le Grand Raid des Pyrénées, je dévalais une pente, il y avait la ligne des montagnes noires et la lune était rousse, pleine lune rousse. Et à un moment, je sentais un souffle dans mon dos, c'était un cheval qui me suivait. C'est des moments « waouh ! » Et maintenant, disons, quand j'ai des petits coups de déprime, je me reprojette ça, je dis « ah ouais, c'était top ! » C'est incroyable. Enfin, des belles images, l'aventure. Et bon, quand c'est fini, je dis souvent, c'est un peu comme un accouchement, mais on n'a pas de bébé. Il y a tout qui tombe. C'est fini, masse, alors il reste juste les belles images.

  • Speaker #0

    Et il y a une petite nostalgie, du coup, une fois que c'est fini ?

  • Speaker #1

    Pour ma part, oui, souvent. J'ai envie que ça continue. Mais après, quand on rentre, on se pose et on redéroule le film. Et on se dit, mais c'est extra, ces aventures. C'est super. On est aussi souvent confrontés aux éléments. Je sais que dans les années 2010-2011, j'avais fait la 3C et l'UTMB. On a eu des conditions dantesques. Je me souviens, sur la 3C, en fait, j'étais en plein ourage. Et il y avait des éclairs de partout. Et après, quand j'ai fini la course, je me suis dit, mais comment j'ai fait ? pour affronter tout ça et pour arriver là bien sereine à l'arrivée. Et ça aussi, c'est des superbes images. Ça suppose qu'on va au-delà de soi.

  • Speaker #0

    Et toi, tu as été très tôt engagée pour la place des femmes dans la course à pied. Est-ce que tu peux nous raconter les débuts de ton engagement et ce que tu as fait ?

  • Speaker #1

    Ah oui, tout à fait. Comme je l'ai expliqué, dans les années 2009-2010, je me suis mise au trail et à l'ultra. Et donc un ultra, pour les néophytes, c'est plus de 100 km la plupart du temps dans les 160 km, avec beaucoup de dénivelé, donc en montagne, en pleine nature. La plupart du temps, les 160, ça fait dans les 10 000 m de dénivelé, 10 000, 12 000 m de dénivelé. Et en hiver, moi je faisais souvent du cross, parce que ça permet un peu de travailler le cardio, et bon c'est sympa, on est dans la boue et tout, on rigole bien.

  • Speaker #0

    Le cross, tu peux peut-être expliquer ce que c'est, parce que pour celles qui ne font pas d'athlétisme, c'est vrai que ce n'est pas forcément très connu non plus.

  • Speaker #1

    Alors le cross, ce sont des épreuves courtes. Je reviendrai sur les distances, parce que ça, ça me tient vraiment à cœur. Le cross, ce sont des distances courtes, la plupart du temps, en hiver, dans des terrains accidentés. C'est entre 4 et 12 kilomètres.

  • Speaker #0

    Et ça ne paraît pas comme ça, parce que le nombre de kilomètres, ce n'est pas énorme, mais en vrai, c'est hyper dur. Parce que justement, les terrains sont accidentés, boueux.

  • Speaker #1

    Tout à fait.

  • Speaker #0

    En fait,

  • Speaker #1

    je dirais que c'est des micro-trails au niveau des appuis, mais en même temps, ça fait vraiment travailler le cardio. Parce que comme les 10 km sont courtes, il faut envoyer la patate. Donc en hiver, je trouvais ça pas mal. Et alors ma grande surprise, c'était dans les années 2010, je me suis inscrite à un site de cross qui s'appelait le Trophée Michaud. Donc on fait plusieurs cross durant l'hiver, et puis à la fin il y a une sélection. Je me suis aperçue que les dames n'avaient pas le droit de courir plus de 4 ou 5 kilomètres, alors que les messieurs faisaient 8 à 10 kilomètres. Donc je trouvais ça assez improbable, surtout qu'en été, moi je m'étais tapée sur les autres kilomètres, j'ai dit mais c'est pas logique. Et donc j'ai interpellé les organisateurs, qui étaient fort sympathiques à l'époque, qui m'ont dit non mais c'est dans le règlement des crosses nationaux et internationaux. Je dis mais pourquoi ? Les femmes, elles risquent de se faire bousculer, c'est trop dur. L'argument était totalement illogique. Donc j'ai dit j'aimerais bien m'inscrire. Ah ben non, c'est pas possible, c'est dans le règlement. Alors bon... Fort heureusement, les organisateurs du Trou Féminichan, c'est des gens avec qui on peut discuter, et qui étaient ouverts. Ils ont dit, si vraiment tu y tiens, tu peux t'inscrire sur le cross long, mais tu ne seras pas classé, ce n'est pas possible, ce n'est pas dans le règlement. Et donc, à partir de 2012, dans les années 2016, je faisais le cross féminin, donc les 4 km. Et après, j'enchaînais sur le masculin, je n'étais pas classé. Au début, on m'a pris un peu pour une cinglée, puis après j'étais un peu la mascotte de ces messieurs, tiens, la folle là, qui va courir. Et bon, j'arrivais pas dans les premières, quoi. Mais j'arrivais pas dans les derniers non plus. Et donc j'ai réinterpellé les organisateurs, en disant, mais ouvrez-le aux femmes, c'est pas possible. On m'a dit, ouais, mais il y aura peu de femmes qui vont vouloir s'inscrire. Mais bon, j'ai persévéré, j'ai accroché, j'ai aussi... J'ai pris ma plus belle plume et j'ai interpellé la fédération d'athlètes. Je n'ai jamais eu de réponse. Mais in fine, en 2016, les organisateurs du Trophée Michaud ont autorisé, ont ouvert pour la première fois le cross dit masculin, appelé aussi cross des as. Ça peut permettre de sourire. Les femmes, ce n'est pas des as, mais les hommes, oui. Et donc, ça a été ouvert aux femmes. Et miracle, il y a eu plein de filles qui se sont inscrites. Et maintenant, c'est vraiment rentrer dans les mœurs. Parce que je sais que j'ai recouru le Michaud il y a deux ou trois ans. Il y avait la jeune fille qui l'emportait, qui dit « Quoi ? Il y a cinq ans, c'était pas ouvert aux dames, mais c'est quoi cette histoire ? » Donc comme quoi, on a des choses qui nous paraissent tout à fait normales. Si on ne le pointe pas, on n'avance pas. Et bon, je finis quand même, parce que c'est important, en 2017, la réglementation nationale et internationale a changé. Ce qui signifie non pas qu'une petite technique dans le nord de l'Alsace a couru les deux crosses et que du coup, ça a modifié les choses. Mais je pense qu'il y a d'autres femmes comme moi qui ont dû faire la même chose et l'union faisant la force. Voilà. Maintenant, on peut courir quasi les mêmes distances. Voilà.

  • Speaker #0

    C'est tellement important d'avoir des personnes qui, effectivement, peut-être font une petite action, mais une petite action chacune, ça fait une grosse action.

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait. Et ça interpelle les gens. Ça interpelle les gens parce que nombre de collègues masculins étaient tout à fait estomaqués d'apprendre que les femmes couraient des distances moindres parce qu'on n'avait jamais pointé la chose. C'est tout. Du moment où on fait s'interroger les gens, ça peut évoluer.

  • Speaker #0

    Et maintenant, les distances, il y a encore des différences ou c'est pareil hommes et femmes ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne voudrais pas... comment dire, je ne suis pas une spécialiste des règlements internationaux. Mais la dernière fois que j'ai téléchargé les règlements, il semblerait qu'au niveau international, les distances sont les mêmes. Et au niveau national, il y a encore des petites différences. Mais ça gagnerait vraiment à vérifier. Je ne voudrais pas raconter de bêtises. Néanmoins, ça a évolué. On a le droit de courir plus que 5 kilomètres. Youpi, voilà.

  • Speaker #0

    Ouf !

  • Speaker #1

    Ouais, ouf !

  • Speaker #0

    Et est-ce que, tu vois, quand tu participais à des compétitions, donc là, il y a l'exemple du cross, mais sur d'autres sports, comme le trail, par exemple, est-ce que tu as déjà eu des remarques, des réactions où tu ressentais que ça gênait un peu que tu sois là en tant que femme ?

  • Speaker #1

    Moi, j'ai quelques anecdotes. Maintenant, globalement, il faut quand même dire, je pense que le trail a vraiment ouvert les choses aux femmes. Je pense que c'est quand même un milieu qui est très ouvert. Mais il m'est arrivé deux petites anecdotes que je me plais à raconter, mais qui sont quand même assez... sont pas mal. C'était à Niederbronn. Il y a bien une bonne dizaine d'années, j'avais de moins de rythme que maintenant. Et à l'époque, j'ai doublé un petit jeune homme dans une descente. Et à l'arrivée, il est venu me voir et il me dit, « Pour une femme,

  • Speaker #0

    vous courez bien. »

  • Speaker #1

    Déjà, le « pour une femme » , ça m'a un peu hérissé. Et après, on m'a dit... Et en plus vieille, alors là, ça a été la cerise sur le gâteau. J'ai eu une autre anecdote que je me plais aussi à raconter, parce que ça pointe quand même pas mal de représentations. C'était toujours à Niederbronn. J'avais fait le cent et quelques de Niederbronn. Et sur la fin, j'avais un petit regain de, comment dire, j'étais en forme. Ça arrive, c'est la grâce de certains traits. Je double un monsieur et il me fait... « Ah, bonjour, vous avez quel âge ? » Alors, au début, je me dis, c'est quoi cette histoire ? Pourquoi il me demande mon âge ? Alors, bon, sur le coup, je t'ai interloqué, je continue. On double un deuxième, il me demande « Vous avez quel âge ? » Je lui dis « Non, mais j'ai 21 ans dans ma tête. » Et après, je double un troisième qui dit « Je peux vous poser une petite question, madame ? » Je lui dis « Oui, j'ai quel âge ? » « J'ai 21 ans dans ma tête, merci monsieur. » Et par la suite, ça m'a vraiment interpellée. Je lui ai dit « Est-ce que moi, je demanderais à un monsieur ? » Quel âge avez-vous ? À moins qu'il ne soit octogénaire, je ne sais pas. Et je pense que c'est lié à la représentation. Une femme double, ciel. Mais en plus, avec un certain âge, ce n'est pas possible. Je pense que là, il y a encore des trucs à modifier. Oui,

  • Speaker #0

    effectivement. C'est tellement bizarre de demander ça. Ça ne me viendrait pas l'idée non plus. Comme si j'essayais de se rassurer.

  • Speaker #1

    Du coup, dans ma tête, souvent on est un peu en auto-hypnose quand on court. Je me dis, mais pourquoi il me demande ça ? Mais pourquoi on me demande ça ? Parce que moi, je demanderais l'âge aux gens. J'ai eu vraiment un gros moment de solitude et d'incompréhension.

  • Speaker #0

    Tu as vu l'évolution de l'intégration des femmes dans les sports outdoor en général. Quels changements ont été les plus marquants pour toi ? Déjà, bien sûr, il y a le changement pour le cross. Mais est-ce que tu as vu d'autres changements comme ça qui t'ont semblé importants ?

  • Speaker #1

    Moi, je viens de loin parce que je me suis souvenu qu'en cours d'éducation physique, quand j'étais ado, quand j'avais 14-18 ans, les cours d'éducation physique étaient séparés. C'est-à-dire que les filles étaient avec un prof et les garçons étaient avec un prof. Ce n'était pas mélangé. Donc là, ça a quand même évolué. Maintenant, comme je l'ai dit, je pense qu'il y a quand même beaucoup de sports qui sont ouverts aux femmes. Je pense, par exemple, le foot. féminin, enfin, qui commence à prendre de l'ampleur. Mais, je dirais, il y a encore des choses qui résistent. Alors bon, d'un point de vue perso, moi j'ai des petites filles, et dans le sud de la France, elles avaient fait une activité avec leurs parents. Alors autant, il paraît, il y avait des jeux collaboratifs, les parents étaient tout enthousiastes parce que c'était des équipes de jeux garçons-filles. Et donc, c'était plus axé sur la collaboration que sur la compétition. Et pour clore cette belle journée, il y a une petite course qui était organisée pour les 6-10 ans. Et bien sûr, à ce moment-là, la distance pour les garçons était plus longue que pour celle des filles. Donc, comme mon fils connaissait mon combat, enfin mon combat, mes idées, il a interpellé les organisateurs. Et donc, on lui a fait remarquer que pour les filles, il faisait un peu chaud. ne pas les faire courir plus que les garçons, les pauvres cocottes. Et lui, il s'est posé la caisseau et s'est dit, il y a peut-être des garçons aussi qui avaient trop chaud et qui auraient voulu faire des distances moindres. Pourquoi ne pas équilibrer ? Non, familialement, j'ai encore une autre anecdote, aussi au niveau du collègue. Actuellement, les jeunes filles au collège, lorsqu'elles font le cross, ont des distances moindres. Et donc, ma petite nièce avait... interpellé son prof de sport, d'ailleurs peut-être un peu véhément, d'autant que quand il leur faisait faire des pompes, les filles devaient les faire à genoux et les garçons devaient les faire entièrement. Et donc, elle a interpellé son prof de sport en lui disant que ce n'était pas normal, qu'elle était capable de le faire. Bon, elle était punie parce que je pense qu'elle y allait un petit peu fort. Mais, quelque part, ça nécessite une réflexion. Maintenant, il y a aussi, dans tout ce qui est actualité, Cet été, il y avait le Tour de France. Je me suis dit, tiens, pourquoi est-ce que le Tour de France féminin est plus court que le Tour de France masculin ? J'ai un petit peu enquêté auprès des proches et on m'a dit, ouais, mais c'est moins vendeur. Je lui ai dit, ouais, mais pourquoi est-ce que c'est moins vendeur ? Parce qu'on a quand même des belles championnes, je veux dire, Pauline Ferrand, elle est chouette quoi ! Et là, ça pose question. Et dernièrement, j'ai également eu un coup au cœur quand on parlait des tests de féminité. au niveau des boxeuses. Est-ce qu'on fait des tests de masculinité pour les gens ? Est-ce que, quand on est un peu performant, est-ce qu'on doit analyser tous les ressorts de la performance ? Par exemple, Kylian Jornet, paraît-il, a des capacités hors pair. Est-ce que, pour autant, on l'interdit de compétition ? Ou Martin Fourcade, par exemple ? Et là aussi, ça me pose question.

  • Speaker #0

    Je suis d'accord, il y a pas mal de questions encore déjà à se poser. Je trouve ça chouette aussi d'interpeller, là par exemple dans le cas de tes petits-enfants dont tu parlais, juste déjà de pouvoir dire « Eh oh, c'est peut-être pas normal. » Et en plus, sur un enfant, je trouve ça fou l'impact que ça va avoir parce que si directement dans la société, on dit aux petites-filles « Toi, tu pourras toujours faire que moi. » que les petits garçons, forcément, elles vont vraiment le penser et l'intégrer. Ça a des conséquences énormes sur l'ensemble d'une vie. Je me dis que c'est génial de voir les évolutions dont tu parles et on voit que ça bouge. J'en suis consciente, mais c'est intéressant aussi de voir qu'il y a encore pas mal de travail et qu'aussi, à titre individuel, on peut faire des choses juste déjà en interpellant, sans même faire preuve d'agressivité ou quoi, mais juste en disant « Eh oh ! » Pourquoi ? Et peut-être qu'effectivement, des gens qui ne se posent même pas la question vont juste déjà s'interroger et que c'est un premier pas pour faire changer les choses.

  • Speaker #1

    Je suis tout à fait d'accord. Moi, je me dis interpeller et montrer l'exemple, montrer qu'on peut. Et à ce moment-là, ça fait se questionner les gens. Oui,

  • Speaker #0

    tout à fait.

  • Speaker #1

    Petit à petit, ça peut évoluer.

  • Speaker #0

    Est-ce que toi, tu as des conseils à donner à des femmes qui osent... justement peut-être pas trop se lancer dans le trail ou des sports d'endurance en général parce qu'elles se sentent peut-être pas vraiment à leur place ?

  • Speaker #1

    Absolument et moi je me dis finalement biologiquement on a quand même une sacrée chance parce qu'on est fait pour accoucher. Or il paraît qu'un accouchement c'est un marathon donc quelque part physiologiquement on peut. Maintenant c'est vrai que si on veut se lancer dans le trail et qu'on fait juste un peu de running, il ne s'agit pas de commencer par faire un 160, bien sûr que non. Mais ce qui est fou au niveau du corps je pense c'est... L'entraînement ne permet que d'évoluer. C'est-à-dire, on peut au début se fixer des petites distances sans objectif de performance juste, y arriver. Et je pense qu'en s'entraînant très vite, on se rend compte que ça marche, j'avance, tout va bien. Oser, il faut absolument oser et y aller. Et éventuellement, y aller peut-être avec des copines, ça peut aussi être une émulation. Ou se fixer un objectif. Tiens, je vais avoir 35, 40 ans, maintenant je vais faire un petit trail, 9 kilomètres. Puis après, peut-être monter. Et au bout d'un moment, on prend du plaisir.

  • Speaker #0

    Ce qui est bien le plus important. Et toi justement, tu as 64 ans. Comment est-ce que tu vis ta pratique sportive aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Alors bon... Euh... il est évident que le corps ne rajeunit pas. La dernière fois que j'ai allé voir mon médecin, il a comparé mes articulations à des vieux pneus usés. Mais ça n'empêche pas de rouler. J'ai un tout petit peu modéré, c'est-à-dire que je ne fais plus d'ultra, mais ça ne m'empêche pas de faire du ski alpi à tir l'arigot. Je vais souvent gambader en forêt. Je fais encore des épreuves de trail, mais plus... plus des oscillons, disons. Je me suis aussi mis des objectifs parce que comme j'ai des articulations qui commencent à fatiguer un peu, cette année, je m'étais dit, bon, du coup, je vais faire un triathlon. Et en fait, c'était super fun. Je m'étais mis la barre très haut parce qu'en fait, il y a un an, je nageais comme un caillou, du genre grand-mère fait sa natation avec la tête qui sort et le petit bonnet de bain, quoi.

  • Speaker #0

    C'est moi quand je nage.

  • Speaker #1

    Oui, voilà. Et donc... Ça m'a pari vraiment un défi de fou. J'ai pris des cours, je me suis inscrite à un club de natation. Maintenant, je ne dis pas que je nage comme un poisson, mais ça va un tout petit peu mieux. Et du coup, j'ai fait plus de vélo. J'ai fait aussi de la course à pied. Et ça a été vraiment une expérience géniale. Donc, je pense qu'à tout âge, on peut se lancer des défis, des objectifs, se faire plaisir. Bien entendu, moi, je continue à courir, mais bon. Comme dit un petit peu moins qu'avant.

  • Speaker #0

    Je trouve que c'est trop chouette de voir que tu adaptes en fonction de ton corps, tu respectes ton corps, mais en fait, ça ne t'empêche pas de faire des trucs trop chouettes. Tu te prends sur le triathlon, c'est génial.

  • Speaker #1

    Et ce qu'il y a aussi, je pense, c'est que j'ai une grande chance, c'est que pendant une bonne quinzaine d'années, je ne me suis jamais blessée. Donc, je suppose, je me lance des fleurs, que je m'entraînais correctement et que je récupérais correctement. Parce que ça joue aussi. Et maintenant que je sens quand même que je commence à fatiguer, je pense que l'adaptation, c'est une bonne idée. Au début, on peut être très réfractaire en se disant « mais moi, le vélo, ça ne m'intéresse pas, ce ne sont pas les mêmes sensations » . On découvre d'autres choses, on rencontre d'autres gens aussi et c'est une bonne alternative. J'ai fait aussi pas mal d'équitations dans mon adolescence. Je me suis dit « au pire, je vais retourner sur un cheval » . Je me suis dit que c'est la clavicule, la cheval, donc il faut quand même faire attention.

  • Speaker #0

    C'est sûr que ce n'est pas le sport le moins risqué, mais ça varie en tout cas. Et est-ce que tu as, parce qu'on parle souvent aussi du côté un peu négatif du fait de prendre de l'âge, où effectivement, on a peut-être les articulations qui glissent un peu, etc. Mais est-ce que tu as aussi des choses positives ? Parce que j'ai aussi tendance à me dire que quand on a plus d'expérience, plus de vécu, plus de maturité, Il y a plein de choses qui se passent quand même vachement mieux et qu'on vit mieux.

  • Speaker #1

    Je pense que le maître mot à mon âge, c'est l'expérience. J'ai eu la grande chance, c'était vraiment l'apothéose de ma carrière de trailleuse. À 62 ans, j'ai fait l'Aiger Ultra Trail, c'est un 250 km, 15 000 m de dénivelé. Ce n'était pas balisé, c'était en autonomie avec un GPS et ça devait se faire en équipe. Et donc, je l'ai fait en équipe avec une copine. Je pense que là, l'expérience a beaucoup joué, notamment dans l'organisation, dans la gestion de l'effort. Je me souviens, à un moment, j'ai dit, maintenant, on s'assoit, on dort. Parce qu'en Ukraine, parfois, on s'arrête dans un pré, on dort des minutes et hop, on repart. Je me disais, mais j'y arriverai pas. Je lui dis, si, maintenant, tu te couches, on dort. Bon, elle était sympa, Marianne, parce qu'elle ne se rebellait pas. Elle faisait comme je disais. Et on a eu raison, parce qu'après, paf, c'était reparti. Et je pense que c'est une petite anecdote pour dire que plus on a d'expérience, généralement, on fait de bêtises. On a peut-être plus tendance aussi à faire attention à la récup, à s'écouter. finalement, ça peut aider d'autres personnes de faire partager notre expérience à cet âge. Oui,

  • Speaker #0

    complètement. C'est vraiment un bon message, je trouve, à faire passer. Et toi, tu as eu une période aussi passante puisque tu as eu un cancer du sang à un moment dans ta vie. Comment est-ce que tu as réussi à te reconstruire et à reconstruire toute ta vie et ta pratique sportive après ça ?

  • Speaker #1

    Ça a été un moment très dur. Au départ, quand on me l'a annoncé, je ne le croyais pas. Parce que je venais de finir un ultra Stellandora, ultra trail, où vraiment j'avais la pêche. Enfin, j'ai fini bien, avec des super beaux souvenirs. Et bon, quelques mois après, on me dit, bon, il y a une présence de champ de cancer. J'ai cru que c'était une vanne. Je me suis dit, non, ils sont trompés à la radio, ce n'est pas possible. Et de fait, si, il y avait bien un cancer. Et le problème, c'est que ça s'est... passé au début du Covid. Donc, je me suis retrouvée seule, je vis seule. Seule, avec cette épée de Damoclès. Donc, en gros, j'ai eu trois opérations. Alors, au début, les premières opérations, ça allait. Bien entendu, après une opération, on n'a pas le droit de courir, donc j'allais marcher en forêt. Et la troisième opération, par contre, ça a été la Bérésina, parce que Euh... Quatre jours avant l'opération, j'ai dit moi je fonce en Suisse, je vais me faire un festival de sensations en montagne. J'ai fait dans les 150 kilomètres et 6000 mètres de dénivelé, 40 kilomètres par jour, j'avais la frite. Donc c'était d'autant plus difficile à admettre. Je me suis bourrée d'images, d'odeurs et hop, je suis allée sur la table d'opération. Et quand je suis sortie de l'hôpital au bout d'une petite semaine, Je n'étais même pas capable d'aller à la boulangerie à 800 mètres, je ne tenais pas debout. Et ça, ça a été très très dur, parce que j'ai vraiment l'impression qu'on m'a mise à terre. Et là, je dirais, les copines de course à pied, elles m'ont vraiment aidée. Du type, tiens, je te ferai une petite visite, on va à la boulangerie toutes les deux. À l'époque, la boulangerie pour moi, c'était l'Everest, je me disais, c'est pas possible, je n'arrive plus à aller à la boulangerie. Et donc, merci Anne. On est allé à la boulangerie toutes les deux, j'ai dit je peux le faire. Là aussi je pense que le sport m'a beaucoup aidé, c'est bon. Aujourd'hui on fait 800 mètres, demain on va en faire 850. Et tout doucement, tout doucement, j'ai remonté. Maintenant, il faut le dire, là socialement, c'est bien des premières fois où je me suis autant entourée. C'est-à-dire mes copines de course à pied, elles m'ont vraiment aidée. Au départ, on faisait juste des randonnées à plat, sans déniveler. Et peu à peu, j'ai repris. Il y a aussi ma belle-fille qui, quelques mois après l'opération, m'a dit « Allez, on met les baskets et on va au stade. » Et moi, je me disais « J'y arriverai pas. » Et elle m'a encouragée. « Ah ouais, je refais un tour ? Ah bah ouais, ça va. » Puis on est repartis comme ça. La troisième chose aussi, c'est que pendant que j'étais vraiment pas bien, j'ai fait... Beaucoup de marches à pied. Après une opération, on demande de mettre des bas de contention. C'est une horreur. Et moi, je me suis fait opérer en juillet. Donc, je transpirais dans mes bas de contention. C'était une horreur. Alors, j'avais trouvé un truc au bout de quelques semaines. J'allais à pied à une petite fontaine. Ça s'appelle la Fontaine Mélanie, près de Saverne. C'est plat. J'allais donc en forêt, sous les arbres. Et arrivé à la fontaine, j'ôtais mes bas et je prenais un bon bain d'eau froide. Et après, je revenais. Ça allait mieux, je m'étais un peu aérée et au niveau des jambes, ça allait mieux aussi. Et bon, peu à peu, c'est revenu et je me suis fait opérer en 2020.

  • Speaker #0

    Et en 2021, je vais me mettre un objectif et j'ai fait la Suisse Alpes, c'est un ultra de 160 kilomètres. Et là, ça fait partie aussi d'un épisode très marrant, c'est que je n'ai pas performé au niveau du temps, mais cette course était très mal organisée et de fait, il n'y avait très peu de rabiteaux. Et moi, je l'avais senti, j'avais bourré mon sac de barres de céréales. À tous les ravitaux, ils offraient que des M&M's. Maintenant, je ne peux plus voir les M&M's. C'est tout ce qu'il y avait. Donc moi, j'ai mangé mes petites barres. Et à l'arrivée, on m'apprend que je suis deuxième au scratch. Je dis, ouais, non, là, il y a un petit souci. Parce que le temps que j'ai fait, ce n'est vraiment pas le temps d'une championne. Et j'ai appris par la suite, toutes les nanas avaient abandonné parce qu'elles n'avaient rien à manger. Donc moi, je les ai eues à l'usure, mais ça a été une jolie victoire.

  • Speaker #1

    Mais c'est incroyable. Un an après, c'est rien. après et puis ce genre de distance. Tu as vraiment réussi à te remettre très bien. Oui.

  • Speaker #0

    Mais comme dit, je pense que c'est aussi beaucoup dans la tête. Je me sens... J'ai complètement perdu confiance en moi et en mon corps après mon opération parce que plus rien ne fonctionnait. Le corps, il ne répondait pas. Et en fait, le corps, c'est quelque chose de super. Je crois que c'est ce qu'on... Ce qu'on découvre aussi en ultra, parfois à 5h du matin, dans la nuit, on est au bout de 100 km, on n'en peut plus, on met une petite cape de pluie dans le fossé, on roupille 5 minutes et hop, après ça repart. Et je pense que ça, ça m'a aidée aussi. Je me suis dit, le corps, il peut repartir. Il faut un peu dresser le cerveau et y aller. Et effectivement, les copines m'ont beaucoup aidée parce qu'en ultra, moi souvent, je m'entraînais seule. très peu de femmes qui font de l'ultra. C'est aussi notable. Il y a 8-10% de femmes qui font de l'ultra. Et je pense que après mon opération, je n'ai jamais pris autant de plaisir à me laisser entraîner. Du type, allez, maintenant, on va fractionner. Enfin, je précise pour ceux qui connaissent. Ce ne sont pas des fans de l'athlète. Fractionner, c'est faire des séries de courte distance, mais le plus vite possible pour muscler le cœur. Et bon, ce n'est pas évident de fractionner. Là, les copines, elles m'ont dit, allez, on y va, on fait 10 petites longueurs. Et je les ai suivies. Et ça permet de reprendre aussi et de reprendre confiance en soi.

  • Speaker #1

    C'est aussi une grande force d'être bien entourée.

  • Speaker #0

    Tout à fait. Et là,

  • Speaker #1

    tu viens de remporter le championnat du monde de trail XTERRA. Donc déjà, félicitations. Et est-ce que tu peux nous expliquer déjà le concept XTERRA et nous raconter ta course ?

  • Speaker #0

    J'ai raconté le concept XTERRA, mais tout de suite, je préviens, on était trois à courir les championnats du monde XTERRA. Donc, être première sur trois, ce n'est pas la même chose qu'être première sur 300, disons. Mais on va quand même expliquer la chose.

  • Speaker #1

    C'est quand même déjà chouette.

  • Speaker #0

    Oui, c'est chouette, c'est sympa. Mais bon, pour moi, je dirais que c'est plus symbolique qu'autre chose. Le championnat du monde XTERRA, c'était l'anniversaire de mon opération du cancer du sein 5 ans avant. Et donc pour moi, c'est vraiment très symbolique parce que je me suis dit, ouais, il y a 5 ans, j'étais sur un lit d'hôpital. À l'époque, pour rigoler, j'avais une perfusion, j'avais une perf du jour, un pas. Les infirmiers, l'infirmière était tellement débordée qu'ils n'ont pas rigolé. Il n'y a que ma voisine de lit qui rigolait, mais bon. Là, je me suis retrouvée championne du monde, comme dit ce proie, mais c'était tout à fait symbolique. Alors le concept, c'est des courses à travers le monde, sur tous les continents. Il y a des courses sélectives, et ceux qui se sont sélectionnés sur ces courses peuvent participer au championnat du monde. Et ma participation à XTERRA relève vraiment de l'anecdote. Parce que l'année dernière, j'avais peu couru, j'avais mal au genou et je me suis inscrite à une course. Je ne savais pas qu'elle me sélectionnait au championnat du monde. Et là, pareil, comme dans ma catégorie, on est vachement nombreux, je crois qu'on était deux. Donc, je me suis sélectionnée, j'étais première sur deux. Et j'ai appris que je pouvais participer à ce championnat. Alors bon, 21 kilomètres, ce n'est pas ma distance, c'est trop court. Moi, c'est plus des longues distances. Mais je me suis dit, bon, ça peut être amusant. d'aller au Pays de Galles, de participer à ces championnats. Mais tout à fait honnêtement, j'y suis allée plus en me marrant que boostée par une envie de gagner. Maintenant, il ne faut pas détériorer non plus. Je veux dire, il y avait dans les 33 nations qui étaient représentées. Sur l'ensemble de XTERRA, les athlètes seniors, il y en a vraiment des bons. Donc pour eux, je pense, être champion du monde XTERRA, ça a peut-être plus de signification que pour moi. Je dirais que c'est un petit titre. Et ce qui est fou aussi, c'est que j'ai pris le départ des plus grands ultras. J'ai pris le départ de l'UTMB, la Diagonale des Fous et le CERA. Là aussi, il y a je ne sais combien de nationalités qui sont représentées. Tout à fait. Honnêtement, l'enjeu est beaucoup plus important sur un ultra. Donc, par exemple, quand j'ai fini le 250 de l'Aiger, je n'étais vraiment pas dans les premières, mais je pense que l'effort était tellement plus important que ce petit 21 kilomètres, qu'il vaut mieux le prendre comme une anecdote. Néanmoins, c'est vrai que depuis que je suis, entre guillemets, championne du monde, des gens me félicitent et tout, je me dis, oui, bon, ce n'est pas l'épreuve la plus difficile que j'ai faite dans ma vie. Ma foi. Ça permet de relater son expérience. Et ça s'est passé au Pays de Galles. C'était une épreuve de 21 kilomètres et 1002 de dénivelé dans le parc de Snowdenia. C'est magnifique, le parc de Snowdenia. Et c'était tout à fait atypique, parce qu'ambiance très galloise. Et je suis ravie d'être allée là-bas, parce que du coup, j'ai découvert le Pays de Galles. J'y suis allée en train. parce que je déplore que certaines compétitions internationales nécessitent qu'on prenne l'avion et qu'on laisse une empreinte carbone. Et donc là aussi, ça faisait partie de mon petit défi. Je me suis dit, je vais aller au Pays de Galles et je ne prendrai pas l'avion. Non. Donc je me suis renseignée sur les billets de train. Bon, perso, je commence à découvrir toutes les applis Interrail et compagnie. qu'on peut télécharger. Merci à mes enfants de m'avoir quelque peu orientée dans ces choix. Et donc, j'ai pris le train jusqu'à Paris. Après Paris, je suis allée à Londres. À Londres, j'ai changé de gare. Je suis, j'ai pris le train sur Bangor, qui est au Pays de Galles. À Bangor, il a fallu prendre un bus. Il a fallu changer de bus. Comme bien entendu, je ne maîtrise pas vraiment la langue de Shakespeare. Non, mais... n'étaient pas très bons. Au Pays de Galles, ils ont un sacré accent. Donc, quand je me suis assurée que le bus était le bon, le gars, il me dit non. Et finalement, en modifiant mon accent, on m'a dit que oui, c'était bien le bon bus. Et j'ai atterri au Pays de Galles. Et là, j'ai découvert les joies du camping gallois. C'est aussi très amusant. Parce qu'en fait, le terrain de camping, c'était des parcs à moutons. Et donc, le brave paysan changeait ses moutons au fur et à mesure que les gens arrivaient. Je crois que j'étais une des seules à participer au championnat, à avoir bivouaqué. C'était charmant, avec les petits bêlements des agneaux. Et donc j'ai fait des championnats, et après je suis rentrée au camping. Et comme le camping était en hauteur, je m'étais tapée les vis de son maître de dénivelé, et après je suis remontée, mais c'était vraiment très chouette.

  • Speaker #1

    C'est chouette, ça fait une aventure globale en fait. Tu n'as pas juste la partie vraiment course, tu as l'avant, l'après, la découverte du pays. C'est ça qui est chouette aussi.

  • Speaker #0

    Mais enfin, dans les courses, dans les ultras, si je peux inciter des gens à faire des ultras, c'est ça aussi. Je sais quand j'ai fait la Diagonale des Fous à La Réunion, mais j'ai découvert une île, c'était merveilleux. Bon là, à l'époque, j'ai pris l'avion. On va mettre un bonnet là. Mais c'était un petit peu plus compliqué à organiser.

  • Speaker #1

    C'est clair. Et quels sont tes prochains projets ou aventures ? Parce que j'imagine que tu en as.

  • Speaker #0

    Alors, les projets, j'en ai plus à la tête. Ce n'est pas ça qui manque. Maintenant, qui vont se concrétiser ? Là, dans une dizaine de jours, je pars faire la traversée des Vosges avec une copine. Bien entendu, en bivouac et en autonomie, pas de gîte en gîte. Donc, ça va être chouette. parce que finalement, nos beaux-jeunes natales, c'est super beau, surtout en automne. J'espère juste que le temps sera de la partie, sinon ça va être la cape de pluie. Et après, j'envisage en hiver d'aller en Laponie. J'aimerais bien voir les aurores boréales. Donc, je suis en train d'organiser ça. Bon, ma compagnonne qui va m'accompagner en Laponie, un peu rétive à tout ce qui est train, mais on va quand même... faire des projections pour pouvoir y aller. Et après, ma foi, après, j'ai tellement de trucs à faire.

  • Speaker #1

    Tu vas réussir à la convaincre, je suis sûre.

  • Speaker #0

    On va essayer, on va essayer.

  • Speaker #1

    C'est trop bien, plein d'idées.

  • Speaker #0

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #1

    Et est-ce que, j'ai une petite question traditionnelle pour la fin de l'épisode, quel message est-ce que tu aimerais faire passer aux auditrices du podcast ?

  • Speaker #0

    Alors là, oser se faire plaisir. Il y a souvent une phrase de Simone de Beauvoir qui me revient, qui dit « On ne n'est pas femme, on le devient. » Eh bien, on peut aussi devenir une sportive. Il suffit d'oser et puis de jeter à terre toutes tes représentations, de se dire qu'on en est capable. biologiquement, en effet.

  • Speaker #1

    Trop chouette. Merci pour ce message final. Et puis, merci d'avoir partagé tout ça. Je trouve ça trop bien de voir la variété, en fait, de choses que tu fais et le plaisir que tu y prends aussi. Donc, grand merci, Annick. Et puis, bonnes nouvelles aventures à toi.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté cet épisode. Si cela vous a plu, n'hésitez pas à vous abonner au podcast et à mettre une bonne note sur les plateformes. Cela nous aide. À bientôt.

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Description

Comment continuer à se dépasser à 64 ans, tout en faisant bouger les lignes pour les femmes dans le sport ?


Aujourd’hui, je reçois Annick Pfetzinger, professeure à la retraite, ultra-traileuse de longue date, triathlète récente… et toute fraîche championne du monde Xterra Trail dans sa catégorie. Une voix libre, drôle, engagée pour l’égalité femmes-hommes dans le sport, avec un vécu qui respire la montagne et la joie d’être dehors.


Au programme de l’épisode:

  • Comment le sport a accompagné toutes les étapes de sa vie, de l’enfance à la retraite ?

  • Pourquoi elle a choisi l’ultra-trail et ce qu’elle y a trouvé de si fort ?

  • Qu’est-ce qui l’a poussée à s’engager pour l’égalité dans les compétitions ?

  • Comment elle a surmonté un cancer du sein et retrouvé confiance en son corps ?

  • En quoi son rapport au sport a changé avec l’âge ?

  • Quels conseils elle donne aux femmes qui hésitent à se lancer ?


Un échange plein de recul, de malice et d’énergie avec une femme qui prouve que le plaisir, l’audace et la curiosité n’ont pas d’âge.


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🎵 Musique du générique:

Titre: Running (ft Elske)

Auteur: Jens East

Source: https://soundcloud.com/jenseast

Licence: https://creativecommons.org/licenses/by/3.0/deed.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    La Sportive Outdoor, le podcast des sports outdoors aux féminins pour s'inspirer, apprendre et oser. Bonjour à toutes, dans cet épisode je reçois Annick Pfetzinger, pratiquante de nombreux sports outdoors et engagée dans l'égalité hommes-femmes dans le sport. Annick vient aussi de remporter le titre de championne du monde de trail XTERRA dans sa catégorie. Je suis vraiment ravie de la recevoir aujourd'hui pour qu'elle nous parle de son parcours, de sa pratique sportive et vous allez voir, Annick est très dynamique. Bienvenue, est-ce que tu veux bien te présenter ?

  • Speaker #1

    Oui, alors je vais me présenter, je m'appelle Annick, Annick Petzinger, un nom raccouché dehors, bien alsacien. J'ai 64 ans et je suis une jeune retraitée barodeuse. J'ai effectivement vécu plein d'aventures, j'étais spécialisée dans l'ultra-trail pendant une bonne douzaine d'années. Et maintenant, ma foi, je voyage, je fais du sport. Je rajoute. Je suis une ancienne prof, contrairement à ce qu'on pourrait penser, je ne suis pas une prof de sport. J'étais une prof de français histoire-géo en lycée pro à Saverne.

  • Speaker #0

    D'accord. Et est-ce que le sport a-t-il eu une grande place dans ta vie ou est-ce que c'est venu au fur et à mesure ?

  • Speaker #1

    Alors le sport, je dirais durant mon enfance, ça a été primordial, pendant mon adolescence aussi. Après, j'ai eu une petite parenthèse quand j'ai eu mes enfants. J'ai fait une petite pause et quand je me suis séparée... En gros, c'est comme un cheval à qui on a ouvert la porte de l'écurie. Wouhou ! Je suis partie et j'ai fait plein de trucs. Je me suis fait plaisir.

  • Speaker #0

    Trop bien. Et aujourd'hui, là, maintenant, tu pratiques quoi le plus ? On va dire que tu fais vraiment beaucoup de choses.

  • Speaker #1

    Alors, actuellement, en hiver, je fais du ski alpi, du ski de randonnée. J'ai fait quelques crosses occasionnellement. Je fais du vélo. Alors, j'ai dû modérer ma pratique. de l'ultra-trail parce que les articulations s'en susent un petit peu. Mais je m'en bats toujours dans les forêts. Je fais quelques petits trails, disons. Et là, je me suis mise au triathlon aussi cette année, histoire de changer un petit peu. Voilà, j'espère que je n'ai rien oublié.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui t'avait amenée vers la course, puis le trail ?

  • Speaker #1

    Alors, ce qui m'a amenée, c'est une longue histoire, je dirais. Je suis la plus jeune d'une famille de trois sœurs. Et j'avais des grandes sœurs, une qui avait 8 ans de plus que moi, et mon père était un fan d'alpinisme. Donc toute gamine, très très tôt, je faisais des super longues randonnées. Dernièrement, avec mon GPS, je me suis aperçue qu'à 7 ans, je faisais dans les 1 008 de déniblé avec lui. Donc je me suis dit, waouh, la petite s'indique, c'est pas mal quoi. Et donc durant toute mon enfance et mon adolescence, j'ai fait énormément d'alpi. Et lorsque je me suis remis à la course à pied, j'ai découvert le trail en 2009. J'ai dit « ouais, mais c'est ça que je connais, quoi » . J'étais dans un environnement que je connaissais, j'étais dans la nature, j'avais des sensations d'enfance, d'adolescence, et là, ça s'est déclenché.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce que t'aimes dans le sport de nature, tu vois, en général ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense, j'ai toujours un lien à l'enfance. Quand j'étais petite, je crois que j'ai développé ce qu'on appelle l'intelligence des sens. C'est-à-dire quand je suis la nuit, en montagne, et que je vois la lune, que je sens la pierre, je ne sais pas, je me sens super bien. Et c'est la raison pour laquelle, pour moi, le sport, c'est surtout dehors. Je veux dire, on court au printemps, la forêt n'a pas la même couleur qu'en hiver, il y a des odeurs, il y a des bruits. Et tout ça, ça m'apporte beaucoup de bien-être.

  • Speaker #0

    C'est vrai que c'est chouette aussi, je trouve, de voir l'évolution en fonction des saisons. Tu n'as pas du tout les mêmes ressentis, alors qu'en intérieur, c'est toujours un peu pareil.

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #0

    Et tu disais, tu as fait quand même beaucoup d'ultra. Qu'est-ce que tu recherchais dans ces efforts qui sont très longs ?

  • Speaker #1

    Pour moi, un ultra, c'est comme partir pour un long voyage. Je dirais, ce n'est même pas chercher quelque chose. Dans les fois où je me sentais vraiment dans mon élément. Je crois que gamine, j'ai vraiment développé une sacrée endurance. Et donc, moi je suis un petit diesel, une fois que le moteur est parti. C'est un peu comme les petits lapins, la pub Duracell, on tourne la clé, ça part. Et disons, les ultras, ça amène des paysages super, des rencontres. Je sais que sur l'UT4M, l'Ultra Trail des Quatre Massifs à Grenoble, une nuit, petite nuit étoilée, il y avait un monsieur derrière moi, on a discuté pendant deux heures. Et en fait, je n'ai jamais vu la tête de ce monsieur. Je me souviens juste de sa voix. Et il y a des rencontres comme ça, improbables. En ultra aussi, je parlais de la perception. En ultra, mais surtout la nuit, on sent des choses, on entend des choses. On voit des images absolument sublimes. Ce qui me revient, c'est dans le Grand Raid des Pyrénées, je dévalais une pente, il y avait la ligne des montagnes noires et la lune était rousse, pleine lune rousse. Et à un moment, je sentais un souffle dans mon dos, c'était un cheval qui me suivait. C'est des moments « waouh ! » Et maintenant, disons, quand j'ai des petits coups de déprime, je me reprojette ça, je dis « ah ouais, c'était top ! » C'est incroyable. Enfin, des belles images, l'aventure. Et bon, quand c'est fini, je dis souvent, c'est un peu comme un accouchement, mais on n'a pas de bébé. Il y a tout qui tombe. C'est fini, masse, alors il reste juste les belles images.

  • Speaker #0

    Et il y a une petite nostalgie, du coup, une fois que c'est fini ?

  • Speaker #1

    Pour ma part, oui, souvent. J'ai envie que ça continue. Mais après, quand on rentre, on se pose et on redéroule le film. Et on se dit, mais c'est extra, ces aventures. C'est super. On est aussi souvent confrontés aux éléments. Je sais que dans les années 2010-2011, j'avais fait la 3C et l'UTMB. On a eu des conditions dantesques. Je me souviens, sur la 3C, en fait, j'étais en plein ourage. Et il y avait des éclairs de partout. Et après, quand j'ai fini la course, je me suis dit, mais comment j'ai fait ? pour affronter tout ça et pour arriver là bien sereine à l'arrivée. Et ça aussi, c'est des superbes images. Ça suppose qu'on va au-delà de soi.

  • Speaker #0

    Et toi, tu as été très tôt engagée pour la place des femmes dans la course à pied. Est-ce que tu peux nous raconter les débuts de ton engagement et ce que tu as fait ?

  • Speaker #1

    Ah oui, tout à fait. Comme je l'ai expliqué, dans les années 2009-2010, je me suis mise au trail et à l'ultra. Et donc un ultra, pour les néophytes, c'est plus de 100 km la plupart du temps dans les 160 km, avec beaucoup de dénivelé, donc en montagne, en pleine nature. La plupart du temps, les 160, ça fait dans les 10 000 m de dénivelé, 10 000, 12 000 m de dénivelé. Et en hiver, moi je faisais souvent du cross, parce que ça permet un peu de travailler le cardio, et bon c'est sympa, on est dans la boue et tout, on rigole bien.

  • Speaker #0

    Le cross, tu peux peut-être expliquer ce que c'est, parce que pour celles qui ne font pas d'athlétisme, c'est vrai que ce n'est pas forcément très connu non plus.

  • Speaker #1

    Alors le cross, ce sont des épreuves courtes. Je reviendrai sur les distances, parce que ça, ça me tient vraiment à cœur. Le cross, ce sont des distances courtes, la plupart du temps, en hiver, dans des terrains accidentés. C'est entre 4 et 12 kilomètres.

  • Speaker #0

    Et ça ne paraît pas comme ça, parce que le nombre de kilomètres, ce n'est pas énorme, mais en vrai, c'est hyper dur. Parce que justement, les terrains sont accidentés, boueux.

  • Speaker #1

    Tout à fait.

  • Speaker #0

    En fait,

  • Speaker #1

    je dirais que c'est des micro-trails au niveau des appuis, mais en même temps, ça fait vraiment travailler le cardio. Parce que comme les 10 km sont courtes, il faut envoyer la patate. Donc en hiver, je trouvais ça pas mal. Et alors ma grande surprise, c'était dans les années 2010, je me suis inscrite à un site de cross qui s'appelait le Trophée Michaud. Donc on fait plusieurs cross durant l'hiver, et puis à la fin il y a une sélection. Je me suis aperçue que les dames n'avaient pas le droit de courir plus de 4 ou 5 kilomètres, alors que les messieurs faisaient 8 à 10 kilomètres. Donc je trouvais ça assez improbable, surtout qu'en été, moi je m'étais tapée sur les autres kilomètres, j'ai dit mais c'est pas logique. Et donc j'ai interpellé les organisateurs, qui étaient fort sympathiques à l'époque, qui m'ont dit non mais c'est dans le règlement des crosses nationaux et internationaux. Je dis mais pourquoi ? Les femmes, elles risquent de se faire bousculer, c'est trop dur. L'argument était totalement illogique. Donc j'ai dit j'aimerais bien m'inscrire. Ah ben non, c'est pas possible, c'est dans le règlement. Alors bon... Fort heureusement, les organisateurs du Trou Féminichan, c'est des gens avec qui on peut discuter, et qui étaient ouverts. Ils ont dit, si vraiment tu y tiens, tu peux t'inscrire sur le cross long, mais tu ne seras pas classé, ce n'est pas possible, ce n'est pas dans le règlement. Et donc, à partir de 2012, dans les années 2016, je faisais le cross féminin, donc les 4 km. Et après, j'enchaînais sur le masculin, je n'étais pas classé. Au début, on m'a pris un peu pour une cinglée, puis après j'étais un peu la mascotte de ces messieurs, tiens, la folle là, qui va courir. Et bon, j'arrivais pas dans les premières, quoi. Mais j'arrivais pas dans les derniers non plus. Et donc j'ai réinterpellé les organisateurs, en disant, mais ouvrez-le aux femmes, c'est pas possible. On m'a dit, ouais, mais il y aura peu de femmes qui vont vouloir s'inscrire. Mais bon, j'ai persévéré, j'ai accroché, j'ai aussi... J'ai pris ma plus belle plume et j'ai interpellé la fédération d'athlètes. Je n'ai jamais eu de réponse. Mais in fine, en 2016, les organisateurs du Trophée Michaud ont autorisé, ont ouvert pour la première fois le cross dit masculin, appelé aussi cross des as. Ça peut permettre de sourire. Les femmes, ce n'est pas des as, mais les hommes, oui. Et donc, ça a été ouvert aux femmes. Et miracle, il y a eu plein de filles qui se sont inscrites. Et maintenant, c'est vraiment rentrer dans les mœurs. Parce que je sais que j'ai recouru le Michaud il y a deux ou trois ans. Il y avait la jeune fille qui l'emportait, qui dit « Quoi ? Il y a cinq ans, c'était pas ouvert aux dames, mais c'est quoi cette histoire ? » Donc comme quoi, on a des choses qui nous paraissent tout à fait normales. Si on ne le pointe pas, on n'avance pas. Et bon, je finis quand même, parce que c'est important, en 2017, la réglementation nationale et internationale a changé. Ce qui signifie non pas qu'une petite technique dans le nord de l'Alsace a couru les deux crosses et que du coup, ça a modifié les choses. Mais je pense qu'il y a d'autres femmes comme moi qui ont dû faire la même chose et l'union faisant la force. Voilà. Maintenant, on peut courir quasi les mêmes distances. Voilà.

  • Speaker #0

    C'est tellement important d'avoir des personnes qui, effectivement, peut-être font une petite action, mais une petite action chacune, ça fait une grosse action.

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait. Et ça interpelle les gens. Ça interpelle les gens parce que nombre de collègues masculins étaient tout à fait estomaqués d'apprendre que les femmes couraient des distances moindres parce qu'on n'avait jamais pointé la chose. C'est tout. Du moment où on fait s'interroger les gens, ça peut évoluer.

  • Speaker #0

    Et maintenant, les distances, il y a encore des différences ou c'est pareil hommes et femmes ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne voudrais pas... comment dire, je ne suis pas une spécialiste des règlements internationaux. Mais la dernière fois que j'ai téléchargé les règlements, il semblerait qu'au niveau international, les distances sont les mêmes. Et au niveau national, il y a encore des petites différences. Mais ça gagnerait vraiment à vérifier. Je ne voudrais pas raconter de bêtises. Néanmoins, ça a évolué. On a le droit de courir plus que 5 kilomètres. Youpi, voilà.

  • Speaker #0

    Ouf !

  • Speaker #1

    Ouais, ouf !

  • Speaker #0

    Et est-ce que, tu vois, quand tu participais à des compétitions, donc là, il y a l'exemple du cross, mais sur d'autres sports, comme le trail, par exemple, est-ce que tu as déjà eu des remarques, des réactions où tu ressentais que ça gênait un peu que tu sois là en tant que femme ?

  • Speaker #1

    Moi, j'ai quelques anecdotes. Maintenant, globalement, il faut quand même dire, je pense que le trail a vraiment ouvert les choses aux femmes. Je pense que c'est quand même un milieu qui est très ouvert. Mais il m'est arrivé deux petites anecdotes que je me plais à raconter, mais qui sont quand même assez... sont pas mal. C'était à Niederbronn. Il y a bien une bonne dizaine d'années, j'avais de moins de rythme que maintenant. Et à l'époque, j'ai doublé un petit jeune homme dans une descente. Et à l'arrivée, il est venu me voir et il me dit, « Pour une femme,

  • Speaker #0

    vous courez bien. »

  • Speaker #1

    Déjà, le « pour une femme » , ça m'a un peu hérissé. Et après, on m'a dit... Et en plus vieille, alors là, ça a été la cerise sur le gâteau. J'ai eu une autre anecdote que je me plais aussi à raconter, parce que ça pointe quand même pas mal de représentations. C'était toujours à Niederbronn. J'avais fait le cent et quelques de Niederbronn. Et sur la fin, j'avais un petit regain de, comment dire, j'étais en forme. Ça arrive, c'est la grâce de certains traits. Je double un monsieur et il me fait... « Ah, bonjour, vous avez quel âge ? » Alors, au début, je me dis, c'est quoi cette histoire ? Pourquoi il me demande mon âge ? Alors, bon, sur le coup, je t'ai interloqué, je continue. On double un deuxième, il me demande « Vous avez quel âge ? » Je lui dis « Non, mais j'ai 21 ans dans ma tête. » Et après, je double un troisième qui dit « Je peux vous poser une petite question, madame ? » Je lui dis « Oui, j'ai quel âge ? » « J'ai 21 ans dans ma tête, merci monsieur. » Et par la suite, ça m'a vraiment interpellée. Je lui ai dit « Est-ce que moi, je demanderais à un monsieur ? » Quel âge avez-vous ? À moins qu'il ne soit octogénaire, je ne sais pas. Et je pense que c'est lié à la représentation. Une femme double, ciel. Mais en plus, avec un certain âge, ce n'est pas possible. Je pense que là, il y a encore des trucs à modifier. Oui,

  • Speaker #0

    effectivement. C'est tellement bizarre de demander ça. Ça ne me viendrait pas l'idée non plus. Comme si j'essayais de se rassurer.

  • Speaker #1

    Du coup, dans ma tête, souvent on est un peu en auto-hypnose quand on court. Je me dis, mais pourquoi il me demande ça ? Mais pourquoi on me demande ça ? Parce que moi, je demanderais l'âge aux gens. J'ai eu vraiment un gros moment de solitude et d'incompréhension.

  • Speaker #0

    Tu as vu l'évolution de l'intégration des femmes dans les sports outdoor en général. Quels changements ont été les plus marquants pour toi ? Déjà, bien sûr, il y a le changement pour le cross. Mais est-ce que tu as vu d'autres changements comme ça qui t'ont semblé importants ?

  • Speaker #1

    Moi, je viens de loin parce que je me suis souvenu qu'en cours d'éducation physique, quand j'étais ado, quand j'avais 14-18 ans, les cours d'éducation physique étaient séparés. C'est-à-dire que les filles étaient avec un prof et les garçons étaient avec un prof. Ce n'était pas mélangé. Donc là, ça a quand même évolué. Maintenant, comme je l'ai dit, je pense qu'il y a quand même beaucoup de sports qui sont ouverts aux femmes. Je pense, par exemple, le foot. féminin, enfin, qui commence à prendre de l'ampleur. Mais, je dirais, il y a encore des choses qui résistent. Alors bon, d'un point de vue perso, moi j'ai des petites filles, et dans le sud de la France, elles avaient fait une activité avec leurs parents. Alors autant, il paraît, il y avait des jeux collaboratifs, les parents étaient tout enthousiastes parce que c'était des équipes de jeux garçons-filles. Et donc, c'était plus axé sur la collaboration que sur la compétition. Et pour clore cette belle journée, il y a une petite course qui était organisée pour les 6-10 ans. Et bien sûr, à ce moment-là, la distance pour les garçons était plus longue que pour celle des filles. Donc, comme mon fils connaissait mon combat, enfin mon combat, mes idées, il a interpellé les organisateurs. Et donc, on lui a fait remarquer que pour les filles, il faisait un peu chaud. ne pas les faire courir plus que les garçons, les pauvres cocottes. Et lui, il s'est posé la caisseau et s'est dit, il y a peut-être des garçons aussi qui avaient trop chaud et qui auraient voulu faire des distances moindres. Pourquoi ne pas équilibrer ? Non, familialement, j'ai encore une autre anecdote, aussi au niveau du collègue. Actuellement, les jeunes filles au collège, lorsqu'elles font le cross, ont des distances moindres. Et donc, ma petite nièce avait... interpellé son prof de sport, d'ailleurs peut-être un peu véhément, d'autant que quand il leur faisait faire des pompes, les filles devaient les faire à genoux et les garçons devaient les faire entièrement. Et donc, elle a interpellé son prof de sport en lui disant que ce n'était pas normal, qu'elle était capable de le faire. Bon, elle était punie parce que je pense qu'elle y allait un petit peu fort. Mais, quelque part, ça nécessite une réflexion. Maintenant, il y a aussi, dans tout ce qui est actualité, Cet été, il y avait le Tour de France. Je me suis dit, tiens, pourquoi est-ce que le Tour de France féminin est plus court que le Tour de France masculin ? J'ai un petit peu enquêté auprès des proches et on m'a dit, ouais, mais c'est moins vendeur. Je lui ai dit, ouais, mais pourquoi est-ce que c'est moins vendeur ? Parce qu'on a quand même des belles championnes, je veux dire, Pauline Ferrand, elle est chouette quoi ! Et là, ça pose question. Et dernièrement, j'ai également eu un coup au cœur quand on parlait des tests de féminité. au niveau des boxeuses. Est-ce qu'on fait des tests de masculinité pour les gens ? Est-ce que, quand on est un peu performant, est-ce qu'on doit analyser tous les ressorts de la performance ? Par exemple, Kylian Jornet, paraît-il, a des capacités hors pair. Est-ce que, pour autant, on l'interdit de compétition ? Ou Martin Fourcade, par exemple ? Et là aussi, ça me pose question.

  • Speaker #0

    Je suis d'accord, il y a pas mal de questions encore déjà à se poser. Je trouve ça chouette aussi d'interpeller, là par exemple dans le cas de tes petits-enfants dont tu parlais, juste déjà de pouvoir dire « Eh oh, c'est peut-être pas normal. » Et en plus, sur un enfant, je trouve ça fou l'impact que ça va avoir parce que si directement dans la société, on dit aux petites-filles « Toi, tu pourras toujours faire que moi. » que les petits garçons, forcément, elles vont vraiment le penser et l'intégrer. Ça a des conséquences énormes sur l'ensemble d'une vie. Je me dis que c'est génial de voir les évolutions dont tu parles et on voit que ça bouge. J'en suis consciente, mais c'est intéressant aussi de voir qu'il y a encore pas mal de travail et qu'aussi, à titre individuel, on peut faire des choses juste déjà en interpellant, sans même faire preuve d'agressivité ou quoi, mais juste en disant « Eh oh ! » Pourquoi ? Et peut-être qu'effectivement, des gens qui ne se posent même pas la question vont juste déjà s'interroger et que c'est un premier pas pour faire changer les choses.

  • Speaker #1

    Je suis tout à fait d'accord. Moi, je me dis interpeller et montrer l'exemple, montrer qu'on peut. Et à ce moment-là, ça fait se questionner les gens. Oui,

  • Speaker #0

    tout à fait.

  • Speaker #1

    Petit à petit, ça peut évoluer.

  • Speaker #0

    Est-ce que toi, tu as des conseils à donner à des femmes qui osent... justement peut-être pas trop se lancer dans le trail ou des sports d'endurance en général parce qu'elles se sentent peut-être pas vraiment à leur place ?

  • Speaker #1

    Absolument et moi je me dis finalement biologiquement on a quand même une sacrée chance parce qu'on est fait pour accoucher. Or il paraît qu'un accouchement c'est un marathon donc quelque part physiologiquement on peut. Maintenant c'est vrai que si on veut se lancer dans le trail et qu'on fait juste un peu de running, il ne s'agit pas de commencer par faire un 160, bien sûr que non. Mais ce qui est fou au niveau du corps je pense c'est... L'entraînement ne permet que d'évoluer. C'est-à-dire, on peut au début se fixer des petites distances sans objectif de performance juste, y arriver. Et je pense qu'en s'entraînant très vite, on se rend compte que ça marche, j'avance, tout va bien. Oser, il faut absolument oser et y aller. Et éventuellement, y aller peut-être avec des copines, ça peut aussi être une émulation. Ou se fixer un objectif. Tiens, je vais avoir 35, 40 ans, maintenant je vais faire un petit trail, 9 kilomètres. Puis après, peut-être monter. Et au bout d'un moment, on prend du plaisir.

  • Speaker #0

    Ce qui est bien le plus important. Et toi justement, tu as 64 ans. Comment est-ce que tu vis ta pratique sportive aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Alors bon... Euh... il est évident que le corps ne rajeunit pas. La dernière fois que j'ai allé voir mon médecin, il a comparé mes articulations à des vieux pneus usés. Mais ça n'empêche pas de rouler. J'ai un tout petit peu modéré, c'est-à-dire que je ne fais plus d'ultra, mais ça ne m'empêche pas de faire du ski alpi à tir l'arigot. Je vais souvent gambader en forêt. Je fais encore des épreuves de trail, mais plus... plus des oscillons, disons. Je me suis aussi mis des objectifs parce que comme j'ai des articulations qui commencent à fatiguer un peu, cette année, je m'étais dit, bon, du coup, je vais faire un triathlon. Et en fait, c'était super fun. Je m'étais mis la barre très haut parce qu'en fait, il y a un an, je nageais comme un caillou, du genre grand-mère fait sa natation avec la tête qui sort et le petit bonnet de bain, quoi.

  • Speaker #0

    C'est moi quand je nage.

  • Speaker #1

    Oui, voilà. Et donc... Ça m'a pari vraiment un défi de fou. J'ai pris des cours, je me suis inscrite à un club de natation. Maintenant, je ne dis pas que je nage comme un poisson, mais ça va un tout petit peu mieux. Et du coup, j'ai fait plus de vélo. J'ai fait aussi de la course à pied. Et ça a été vraiment une expérience géniale. Donc, je pense qu'à tout âge, on peut se lancer des défis, des objectifs, se faire plaisir. Bien entendu, moi, je continue à courir, mais bon. Comme dit un petit peu moins qu'avant.

  • Speaker #0

    Je trouve que c'est trop chouette de voir que tu adaptes en fonction de ton corps, tu respectes ton corps, mais en fait, ça ne t'empêche pas de faire des trucs trop chouettes. Tu te prends sur le triathlon, c'est génial.

  • Speaker #1

    Et ce qu'il y a aussi, je pense, c'est que j'ai une grande chance, c'est que pendant une bonne quinzaine d'années, je ne me suis jamais blessée. Donc, je suppose, je me lance des fleurs, que je m'entraînais correctement et que je récupérais correctement. Parce que ça joue aussi. Et maintenant que je sens quand même que je commence à fatiguer, je pense que l'adaptation, c'est une bonne idée. Au début, on peut être très réfractaire en se disant « mais moi, le vélo, ça ne m'intéresse pas, ce ne sont pas les mêmes sensations » . On découvre d'autres choses, on rencontre d'autres gens aussi et c'est une bonne alternative. J'ai fait aussi pas mal d'équitations dans mon adolescence. Je me suis dit « au pire, je vais retourner sur un cheval » . Je me suis dit que c'est la clavicule, la cheval, donc il faut quand même faire attention.

  • Speaker #0

    C'est sûr que ce n'est pas le sport le moins risqué, mais ça varie en tout cas. Et est-ce que tu as, parce qu'on parle souvent aussi du côté un peu négatif du fait de prendre de l'âge, où effectivement, on a peut-être les articulations qui glissent un peu, etc. Mais est-ce que tu as aussi des choses positives ? Parce que j'ai aussi tendance à me dire que quand on a plus d'expérience, plus de vécu, plus de maturité, Il y a plein de choses qui se passent quand même vachement mieux et qu'on vit mieux.

  • Speaker #1

    Je pense que le maître mot à mon âge, c'est l'expérience. J'ai eu la grande chance, c'était vraiment l'apothéose de ma carrière de trailleuse. À 62 ans, j'ai fait l'Aiger Ultra Trail, c'est un 250 km, 15 000 m de dénivelé. Ce n'était pas balisé, c'était en autonomie avec un GPS et ça devait se faire en équipe. Et donc, je l'ai fait en équipe avec une copine. Je pense que là, l'expérience a beaucoup joué, notamment dans l'organisation, dans la gestion de l'effort. Je me souviens, à un moment, j'ai dit, maintenant, on s'assoit, on dort. Parce qu'en Ukraine, parfois, on s'arrête dans un pré, on dort des minutes et hop, on repart. Je me disais, mais j'y arriverai pas. Je lui dis, si, maintenant, tu te couches, on dort. Bon, elle était sympa, Marianne, parce qu'elle ne se rebellait pas. Elle faisait comme je disais. Et on a eu raison, parce qu'après, paf, c'était reparti. Et je pense que c'est une petite anecdote pour dire que plus on a d'expérience, généralement, on fait de bêtises. On a peut-être plus tendance aussi à faire attention à la récup, à s'écouter. finalement, ça peut aider d'autres personnes de faire partager notre expérience à cet âge. Oui,

  • Speaker #0

    complètement. C'est vraiment un bon message, je trouve, à faire passer. Et toi, tu as eu une période aussi passante puisque tu as eu un cancer du sang à un moment dans ta vie. Comment est-ce que tu as réussi à te reconstruire et à reconstruire toute ta vie et ta pratique sportive après ça ?

  • Speaker #1

    Ça a été un moment très dur. Au départ, quand on me l'a annoncé, je ne le croyais pas. Parce que je venais de finir un ultra Stellandora, ultra trail, où vraiment j'avais la pêche. Enfin, j'ai fini bien, avec des super beaux souvenirs. Et bon, quelques mois après, on me dit, bon, il y a une présence de champ de cancer. J'ai cru que c'était une vanne. Je me suis dit, non, ils sont trompés à la radio, ce n'est pas possible. Et de fait, si, il y avait bien un cancer. Et le problème, c'est que ça s'est... passé au début du Covid. Donc, je me suis retrouvée seule, je vis seule. Seule, avec cette épée de Damoclès. Donc, en gros, j'ai eu trois opérations. Alors, au début, les premières opérations, ça allait. Bien entendu, après une opération, on n'a pas le droit de courir, donc j'allais marcher en forêt. Et la troisième opération, par contre, ça a été la Bérésina, parce que Euh... Quatre jours avant l'opération, j'ai dit moi je fonce en Suisse, je vais me faire un festival de sensations en montagne. J'ai fait dans les 150 kilomètres et 6000 mètres de dénivelé, 40 kilomètres par jour, j'avais la frite. Donc c'était d'autant plus difficile à admettre. Je me suis bourrée d'images, d'odeurs et hop, je suis allée sur la table d'opération. Et quand je suis sortie de l'hôpital au bout d'une petite semaine, Je n'étais même pas capable d'aller à la boulangerie à 800 mètres, je ne tenais pas debout. Et ça, ça a été très très dur, parce que j'ai vraiment l'impression qu'on m'a mise à terre. Et là, je dirais, les copines de course à pied, elles m'ont vraiment aidée. Du type, tiens, je te ferai une petite visite, on va à la boulangerie toutes les deux. À l'époque, la boulangerie pour moi, c'était l'Everest, je me disais, c'est pas possible, je n'arrive plus à aller à la boulangerie. Et donc, merci Anne. On est allé à la boulangerie toutes les deux, j'ai dit je peux le faire. Là aussi je pense que le sport m'a beaucoup aidé, c'est bon. Aujourd'hui on fait 800 mètres, demain on va en faire 850. Et tout doucement, tout doucement, j'ai remonté. Maintenant, il faut le dire, là socialement, c'est bien des premières fois où je me suis autant entourée. C'est-à-dire mes copines de course à pied, elles m'ont vraiment aidée. Au départ, on faisait juste des randonnées à plat, sans déniveler. Et peu à peu, j'ai repris. Il y a aussi ma belle-fille qui, quelques mois après l'opération, m'a dit « Allez, on met les baskets et on va au stade. » Et moi, je me disais « J'y arriverai pas. » Et elle m'a encouragée. « Ah ouais, je refais un tour ? Ah bah ouais, ça va. » Puis on est repartis comme ça. La troisième chose aussi, c'est que pendant que j'étais vraiment pas bien, j'ai fait... Beaucoup de marches à pied. Après une opération, on demande de mettre des bas de contention. C'est une horreur. Et moi, je me suis fait opérer en juillet. Donc, je transpirais dans mes bas de contention. C'était une horreur. Alors, j'avais trouvé un truc au bout de quelques semaines. J'allais à pied à une petite fontaine. Ça s'appelle la Fontaine Mélanie, près de Saverne. C'est plat. J'allais donc en forêt, sous les arbres. Et arrivé à la fontaine, j'ôtais mes bas et je prenais un bon bain d'eau froide. Et après, je revenais. Ça allait mieux, je m'étais un peu aérée et au niveau des jambes, ça allait mieux aussi. Et bon, peu à peu, c'est revenu et je me suis fait opérer en 2020.

  • Speaker #0

    Et en 2021, je vais me mettre un objectif et j'ai fait la Suisse Alpes, c'est un ultra de 160 kilomètres. Et là, ça fait partie aussi d'un épisode très marrant, c'est que je n'ai pas performé au niveau du temps, mais cette course était très mal organisée et de fait, il n'y avait très peu de rabiteaux. Et moi, je l'avais senti, j'avais bourré mon sac de barres de céréales. À tous les ravitaux, ils offraient que des M&M's. Maintenant, je ne peux plus voir les M&M's. C'est tout ce qu'il y avait. Donc moi, j'ai mangé mes petites barres. Et à l'arrivée, on m'apprend que je suis deuxième au scratch. Je dis, ouais, non, là, il y a un petit souci. Parce que le temps que j'ai fait, ce n'est vraiment pas le temps d'une championne. Et j'ai appris par la suite, toutes les nanas avaient abandonné parce qu'elles n'avaient rien à manger. Donc moi, je les ai eues à l'usure, mais ça a été une jolie victoire.

  • Speaker #1

    Mais c'est incroyable. Un an après, c'est rien. après et puis ce genre de distance. Tu as vraiment réussi à te remettre très bien. Oui.

  • Speaker #0

    Mais comme dit, je pense que c'est aussi beaucoup dans la tête. Je me sens... J'ai complètement perdu confiance en moi et en mon corps après mon opération parce que plus rien ne fonctionnait. Le corps, il ne répondait pas. Et en fait, le corps, c'est quelque chose de super. Je crois que c'est ce qu'on... Ce qu'on découvre aussi en ultra, parfois à 5h du matin, dans la nuit, on est au bout de 100 km, on n'en peut plus, on met une petite cape de pluie dans le fossé, on roupille 5 minutes et hop, après ça repart. Et je pense que ça, ça m'a aidée aussi. Je me suis dit, le corps, il peut repartir. Il faut un peu dresser le cerveau et y aller. Et effectivement, les copines m'ont beaucoup aidée parce qu'en ultra, moi souvent, je m'entraînais seule. très peu de femmes qui font de l'ultra. C'est aussi notable. Il y a 8-10% de femmes qui font de l'ultra. Et je pense que après mon opération, je n'ai jamais pris autant de plaisir à me laisser entraîner. Du type, allez, maintenant, on va fractionner. Enfin, je précise pour ceux qui connaissent. Ce ne sont pas des fans de l'athlète. Fractionner, c'est faire des séries de courte distance, mais le plus vite possible pour muscler le cœur. Et bon, ce n'est pas évident de fractionner. Là, les copines, elles m'ont dit, allez, on y va, on fait 10 petites longueurs. Et je les ai suivies. Et ça permet de reprendre aussi et de reprendre confiance en soi.

  • Speaker #1

    C'est aussi une grande force d'être bien entourée.

  • Speaker #0

    Tout à fait. Et là,

  • Speaker #1

    tu viens de remporter le championnat du monde de trail XTERRA. Donc déjà, félicitations. Et est-ce que tu peux nous expliquer déjà le concept XTERRA et nous raconter ta course ?

  • Speaker #0

    J'ai raconté le concept XTERRA, mais tout de suite, je préviens, on était trois à courir les championnats du monde XTERRA. Donc, être première sur trois, ce n'est pas la même chose qu'être première sur 300, disons. Mais on va quand même expliquer la chose.

  • Speaker #1

    C'est quand même déjà chouette.

  • Speaker #0

    Oui, c'est chouette, c'est sympa. Mais bon, pour moi, je dirais que c'est plus symbolique qu'autre chose. Le championnat du monde XTERRA, c'était l'anniversaire de mon opération du cancer du sein 5 ans avant. Et donc pour moi, c'est vraiment très symbolique parce que je me suis dit, ouais, il y a 5 ans, j'étais sur un lit d'hôpital. À l'époque, pour rigoler, j'avais une perfusion, j'avais une perf du jour, un pas. Les infirmiers, l'infirmière était tellement débordée qu'ils n'ont pas rigolé. Il n'y a que ma voisine de lit qui rigolait, mais bon. Là, je me suis retrouvée championne du monde, comme dit ce proie, mais c'était tout à fait symbolique. Alors le concept, c'est des courses à travers le monde, sur tous les continents. Il y a des courses sélectives, et ceux qui se sont sélectionnés sur ces courses peuvent participer au championnat du monde. Et ma participation à XTERRA relève vraiment de l'anecdote. Parce que l'année dernière, j'avais peu couru, j'avais mal au genou et je me suis inscrite à une course. Je ne savais pas qu'elle me sélectionnait au championnat du monde. Et là, pareil, comme dans ma catégorie, on est vachement nombreux, je crois qu'on était deux. Donc, je me suis sélectionnée, j'étais première sur deux. Et j'ai appris que je pouvais participer à ce championnat. Alors bon, 21 kilomètres, ce n'est pas ma distance, c'est trop court. Moi, c'est plus des longues distances. Mais je me suis dit, bon, ça peut être amusant. d'aller au Pays de Galles, de participer à ces championnats. Mais tout à fait honnêtement, j'y suis allée plus en me marrant que boostée par une envie de gagner. Maintenant, il ne faut pas détériorer non plus. Je veux dire, il y avait dans les 33 nations qui étaient représentées. Sur l'ensemble de XTERRA, les athlètes seniors, il y en a vraiment des bons. Donc pour eux, je pense, être champion du monde XTERRA, ça a peut-être plus de signification que pour moi. Je dirais que c'est un petit titre. Et ce qui est fou aussi, c'est que j'ai pris le départ des plus grands ultras. J'ai pris le départ de l'UTMB, la Diagonale des Fous et le CERA. Là aussi, il y a je ne sais combien de nationalités qui sont représentées. Tout à fait. Honnêtement, l'enjeu est beaucoup plus important sur un ultra. Donc, par exemple, quand j'ai fini le 250 de l'Aiger, je n'étais vraiment pas dans les premières, mais je pense que l'effort était tellement plus important que ce petit 21 kilomètres, qu'il vaut mieux le prendre comme une anecdote. Néanmoins, c'est vrai que depuis que je suis, entre guillemets, championne du monde, des gens me félicitent et tout, je me dis, oui, bon, ce n'est pas l'épreuve la plus difficile que j'ai faite dans ma vie. Ma foi. Ça permet de relater son expérience. Et ça s'est passé au Pays de Galles. C'était une épreuve de 21 kilomètres et 1002 de dénivelé dans le parc de Snowdenia. C'est magnifique, le parc de Snowdenia. Et c'était tout à fait atypique, parce qu'ambiance très galloise. Et je suis ravie d'être allée là-bas, parce que du coup, j'ai découvert le Pays de Galles. J'y suis allée en train. parce que je déplore que certaines compétitions internationales nécessitent qu'on prenne l'avion et qu'on laisse une empreinte carbone. Et donc là aussi, ça faisait partie de mon petit défi. Je me suis dit, je vais aller au Pays de Galles et je ne prendrai pas l'avion. Non. Donc je me suis renseignée sur les billets de train. Bon, perso, je commence à découvrir toutes les applis Interrail et compagnie. qu'on peut télécharger. Merci à mes enfants de m'avoir quelque peu orientée dans ces choix. Et donc, j'ai pris le train jusqu'à Paris. Après Paris, je suis allée à Londres. À Londres, j'ai changé de gare. Je suis, j'ai pris le train sur Bangor, qui est au Pays de Galles. À Bangor, il a fallu prendre un bus. Il a fallu changer de bus. Comme bien entendu, je ne maîtrise pas vraiment la langue de Shakespeare. Non, mais... n'étaient pas très bons. Au Pays de Galles, ils ont un sacré accent. Donc, quand je me suis assurée que le bus était le bon, le gars, il me dit non. Et finalement, en modifiant mon accent, on m'a dit que oui, c'était bien le bon bus. Et j'ai atterri au Pays de Galles. Et là, j'ai découvert les joies du camping gallois. C'est aussi très amusant. Parce qu'en fait, le terrain de camping, c'était des parcs à moutons. Et donc, le brave paysan changeait ses moutons au fur et à mesure que les gens arrivaient. Je crois que j'étais une des seules à participer au championnat, à avoir bivouaqué. C'était charmant, avec les petits bêlements des agneaux. Et donc j'ai fait des championnats, et après je suis rentrée au camping. Et comme le camping était en hauteur, je m'étais tapée les vis de son maître de dénivelé, et après je suis remontée, mais c'était vraiment très chouette.

  • Speaker #1

    C'est chouette, ça fait une aventure globale en fait. Tu n'as pas juste la partie vraiment course, tu as l'avant, l'après, la découverte du pays. C'est ça qui est chouette aussi.

  • Speaker #0

    Mais enfin, dans les courses, dans les ultras, si je peux inciter des gens à faire des ultras, c'est ça aussi. Je sais quand j'ai fait la Diagonale des Fous à La Réunion, mais j'ai découvert une île, c'était merveilleux. Bon là, à l'époque, j'ai pris l'avion. On va mettre un bonnet là. Mais c'était un petit peu plus compliqué à organiser.

  • Speaker #1

    C'est clair. Et quels sont tes prochains projets ou aventures ? Parce que j'imagine que tu en as.

  • Speaker #0

    Alors, les projets, j'en ai plus à la tête. Ce n'est pas ça qui manque. Maintenant, qui vont se concrétiser ? Là, dans une dizaine de jours, je pars faire la traversée des Vosges avec une copine. Bien entendu, en bivouac et en autonomie, pas de gîte en gîte. Donc, ça va être chouette. parce que finalement, nos beaux-jeunes natales, c'est super beau, surtout en automne. J'espère juste que le temps sera de la partie, sinon ça va être la cape de pluie. Et après, j'envisage en hiver d'aller en Laponie. J'aimerais bien voir les aurores boréales. Donc, je suis en train d'organiser ça. Bon, ma compagnonne qui va m'accompagner en Laponie, un peu rétive à tout ce qui est train, mais on va quand même... faire des projections pour pouvoir y aller. Et après, ma foi, après, j'ai tellement de trucs à faire.

  • Speaker #1

    Tu vas réussir à la convaincre, je suis sûre.

  • Speaker #0

    On va essayer, on va essayer.

  • Speaker #1

    C'est trop bien, plein d'idées.

  • Speaker #0

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #1

    Et est-ce que, j'ai une petite question traditionnelle pour la fin de l'épisode, quel message est-ce que tu aimerais faire passer aux auditrices du podcast ?

  • Speaker #0

    Alors là, oser se faire plaisir. Il y a souvent une phrase de Simone de Beauvoir qui me revient, qui dit « On ne n'est pas femme, on le devient. » Eh bien, on peut aussi devenir une sportive. Il suffit d'oser et puis de jeter à terre toutes tes représentations, de se dire qu'on en est capable. biologiquement, en effet.

  • Speaker #1

    Trop chouette. Merci pour ce message final. Et puis, merci d'avoir partagé tout ça. Je trouve ça trop bien de voir la variété, en fait, de choses que tu fais et le plaisir que tu y prends aussi. Donc, grand merci, Annick. Et puis, bonnes nouvelles aventures à toi.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté cet épisode. Si cela vous a plu, n'hésitez pas à vous abonner au podcast et à mettre une bonne note sur les plateformes. Cela nous aide. À bientôt.

Description

Comment continuer à se dépasser à 64 ans, tout en faisant bouger les lignes pour les femmes dans le sport ?


Aujourd’hui, je reçois Annick Pfetzinger, professeure à la retraite, ultra-traileuse de longue date, triathlète récente… et toute fraîche championne du monde Xterra Trail dans sa catégorie. Une voix libre, drôle, engagée pour l’égalité femmes-hommes dans le sport, avec un vécu qui respire la montagne et la joie d’être dehors.


Au programme de l’épisode:

  • Comment le sport a accompagné toutes les étapes de sa vie, de l’enfance à la retraite ?

  • Pourquoi elle a choisi l’ultra-trail et ce qu’elle y a trouvé de si fort ?

  • Qu’est-ce qui l’a poussée à s’engager pour l’égalité dans les compétitions ?

  • Comment elle a surmonté un cancer du sein et retrouvé confiance en son corps ?

  • En quoi son rapport au sport a changé avec l’âge ?

  • Quels conseils elle donne aux femmes qui hésitent à se lancer ?


Un échange plein de recul, de malice et d’énergie avec une femme qui prouve que le plaisir, l’audace et la curiosité n’ont pas d’âge.


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Titre: Running (ft Elske)

Auteur: Jens East

Source: https://soundcloud.com/jenseast

Licence: https://creativecommons.org/licenses/by/3.0/deed.fr


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    La Sportive Outdoor, le podcast des sports outdoors aux féminins pour s'inspirer, apprendre et oser. Bonjour à toutes, dans cet épisode je reçois Annick Pfetzinger, pratiquante de nombreux sports outdoors et engagée dans l'égalité hommes-femmes dans le sport. Annick vient aussi de remporter le titre de championne du monde de trail XTERRA dans sa catégorie. Je suis vraiment ravie de la recevoir aujourd'hui pour qu'elle nous parle de son parcours, de sa pratique sportive et vous allez voir, Annick est très dynamique. Bienvenue, est-ce que tu veux bien te présenter ?

  • Speaker #1

    Oui, alors je vais me présenter, je m'appelle Annick, Annick Petzinger, un nom raccouché dehors, bien alsacien. J'ai 64 ans et je suis une jeune retraitée barodeuse. J'ai effectivement vécu plein d'aventures, j'étais spécialisée dans l'ultra-trail pendant une bonne douzaine d'années. Et maintenant, ma foi, je voyage, je fais du sport. Je rajoute. Je suis une ancienne prof, contrairement à ce qu'on pourrait penser, je ne suis pas une prof de sport. J'étais une prof de français histoire-géo en lycée pro à Saverne.

  • Speaker #0

    D'accord. Et est-ce que le sport a-t-il eu une grande place dans ta vie ou est-ce que c'est venu au fur et à mesure ?

  • Speaker #1

    Alors le sport, je dirais durant mon enfance, ça a été primordial, pendant mon adolescence aussi. Après, j'ai eu une petite parenthèse quand j'ai eu mes enfants. J'ai fait une petite pause et quand je me suis séparée... En gros, c'est comme un cheval à qui on a ouvert la porte de l'écurie. Wouhou ! Je suis partie et j'ai fait plein de trucs. Je me suis fait plaisir.

  • Speaker #0

    Trop bien. Et aujourd'hui, là, maintenant, tu pratiques quoi le plus ? On va dire que tu fais vraiment beaucoup de choses.

  • Speaker #1

    Alors, actuellement, en hiver, je fais du ski alpi, du ski de randonnée. J'ai fait quelques crosses occasionnellement. Je fais du vélo. Alors, j'ai dû modérer ma pratique. de l'ultra-trail parce que les articulations s'en susent un petit peu. Mais je m'en bats toujours dans les forêts. Je fais quelques petits trails, disons. Et là, je me suis mise au triathlon aussi cette année, histoire de changer un petit peu. Voilà, j'espère que je n'ai rien oublié.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce qui t'avait amenée vers la course, puis le trail ?

  • Speaker #1

    Alors, ce qui m'a amenée, c'est une longue histoire, je dirais. Je suis la plus jeune d'une famille de trois sœurs. Et j'avais des grandes sœurs, une qui avait 8 ans de plus que moi, et mon père était un fan d'alpinisme. Donc toute gamine, très très tôt, je faisais des super longues randonnées. Dernièrement, avec mon GPS, je me suis aperçue qu'à 7 ans, je faisais dans les 1 008 de déniblé avec lui. Donc je me suis dit, waouh, la petite s'indique, c'est pas mal quoi. Et donc durant toute mon enfance et mon adolescence, j'ai fait énormément d'alpi. Et lorsque je me suis remis à la course à pied, j'ai découvert le trail en 2009. J'ai dit « ouais, mais c'est ça que je connais, quoi » . J'étais dans un environnement que je connaissais, j'étais dans la nature, j'avais des sensations d'enfance, d'adolescence, et là, ça s'est déclenché.

  • Speaker #0

    Et qu'est-ce que t'aimes dans le sport de nature, tu vois, en général ?

  • Speaker #1

    Alors, je pense, j'ai toujours un lien à l'enfance. Quand j'étais petite, je crois que j'ai développé ce qu'on appelle l'intelligence des sens. C'est-à-dire quand je suis la nuit, en montagne, et que je vois la lune, que je sens la pierre, je ne sais pas, je me sens super bien. Et c'est la raison pour laquelle, pour moi, le sport, c'est surtout dehors. Je veux dire, on court au printemps, la forêt n'a pas la même couleur qu'en hiver, il y a des odeurs, il y a des bruits. Et tout ça, ça m'apporte beaucoup de bien-être.

  • Speaker #0

    C'est vrai que c'est chouette aussi, je trouve, de voir l'évolution en fonction des saisons. Tu n'as pas du tout les mêmes ressentis, alors qu'en intérieur, c'est toujours un peu pareil.

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #0

    Et tu disais, tu as fait quand même beaucoup d'ultra. Qu'est-ce que tu recherchais dans ces efforts qui sont très longs ?

  • Speaker #1

    Pour moi, un ultra, c'est comme partir pour un long voyage. Je dirais, ce n'est même pas chercher quelque chose. Dans les fois où je me sentais vraiment dans mon élément. Je crois que gamine, j'ai vraiment développé une sacrée endurance. Et donc, moi je suis un petit diesel, une fois que le moteur est parti. C'est un peu comme les petits lapins, la pub Duracell, on tourne la clé, ça part. Et disons, les ultras, ça amène des paysages super, des rencontres. Je sais que sur l'UT4M, l'Ultra Trail des Quatre Massifs à Grenoble, une nuit, petite nuit étoilée, il y avait un monsieur derrière moi, on a discuté pendant deux heures. Et en fait, je n'ai jamais vu la tête de ce monsieur. Je me souviens juste de sa voix. Et il y a des rencontres comme ça, improbables. En ultra aussi, je parlais de la perception. En ultra, mais surtout la nuit, on sent des choses, on entend des choses. On voit des images absolument sublimes. Ce qui me revient, c'est dans le Grand Raid des Pyrénées, je dévalais une pente, il y avait la ligne des montagnes noires et la lune était rousse, pleine lune rousse. Et à un moment, je sentais un souffle dans mon dos, c'était un cheval qui me suivait. C'est des moments « waouh ! » Et maintenant, disons, quand j'ai des petits coups de déprime, je me reprojette ça, je dis « ah ouais, c'était top ! » C'est incroyable. Enfin, des belles images, l'aventure. Et bon, quand c'est fini, je dis souvent, c'est un peu comme un accouchement, mais on n'a pas de bébé. Il y a tout qui tombe. C'est fini, masse, alors il reste juste les belles images.

  • Speaker #0

    Et il y a une petite nostalgie, du coup, une fois que c'est fini ?

  • Speaker #1

    Pour ma part, oui, souvent. J'ai envie que ça continue. Mais après, quand on rentre, on se pose et on redéroule le film. Et on se dit, mais c'est extra, ces aventures. C'est super. On est aussi souvent confrontés aux éléments. Je sais que dans les années 2010-2011, j'avais fait la 3C et l'UTMB. On a eu des conditions dantesques. Je me souviens, sur la 3C, en fait, j'étais en plein ourage. Et il y avait des éclairs de partout. Et après, quand j'ai fini la course, je me suis dit, mais comment j'ai fait ? pour affronter tout ça et pour arriver là bien sereine à l'arrivée. Et ça aussi, c'est des superbes images. Ça suppose qu'on va au-delà de soi.

  • Speaker #0

    Et toi, tu as été très tôt engagée pour la place des femmes dans la course à pied. Est-ce que tu peux nous raconter les débuts de ton engagement et ce que tu as fait ?

  • Speaker #1

    Ah oui, tout à fait. Comme je l'ai expliqué, dans les années 2009-2010, je me suis mise au trail et à l'ultra. Et donc un ultra, pour les néophytes, c'est plus de 100 km la plupart du temps dans les 160 km, avec beaucoup de dénivelé, donc en montagne, en pleine nature. La plupart du temps, les 160, ça fait dans les 10 000 m de dénivelé, 10 000, 12 000 m de dénivelé. Et en hiver, moi je faisais souvent du cross, parce que ça permet un peu de travailler le cardio, et bon c'est sympa, on est dans la boue et tout, on rigole bien.

  • Speaker #0

    Le cross, tu peux peut-être expliquer ce que c'est, parce que pour celles qui ne font pas d'athlétisme, c'est vrai que ce n'est pas forcément très connu non plus.

  • Speaker #1

    Alors le cross, ce sont des épreuves courtes. Je reviendrai sur les distances, parce que ça, ça me tient vraiment à cœur. Le cross, ce sont des distances courtes, la plupart du temps, en hiver, dans des terrains accidentés. C'est entre 4 et 12 kilomètres.

  • Speaker #0

    Et ça ne paraît pas comme ça, parce que le nombre de kilomètres, ce n'est pas énorme, mais en vrai, c'est hyper dur. Parce que justement, les terrains sont accidentés, boueux.

  • Speaker #1

    Tout à fait.

  • Speaker #0

    En fait,

  • Speaker #1

    je dirais que c'est des micro-trails au niveau des appuis, mais en même temps, ça fait vraiment travailler le cardio. Parce que comme les 10 km sont courtes, il faut envoyer la patate. Donc en hiver, je trouvais ça pas mal. Et alors ma grande surprise, c'était dans les années 2010, je me suis inscrite à un site de cross qui s'appelait le Trophée Michaud. Donc on fait plusieurs cross durant l'hiver, et puis à la fin il y a une sélection. Je me suis aperçue que les dames n'avaient pas le droit de courir plus de 4 ou 5 kilomètres, alors que les messieurs faisaient 8 à 10 kilomètres. Donc je trouvais ça assez improbable, surtout qu'en été, moi je m'étais tapée sur les autres kilomètres, j'ai dit mais c'est pas logique. Et donc j'ai interpellé les organisateurs, qui étaient fort sympathiques à l'époque, qui m'ont dit non mais c'est dans le règlement des crosses nationaux et internationaux. Je dis mais pourquoi ? Les femmes, elles risquent de se faire bousculer, c'est trop dur. L'argument était totalement illogique. Donc j'ai dit j'aimerais bien m'inscrire. Ah ben non, c'est pas possible, c'est dans le règlement. Alors bon... Fort heureusement, les organisateurs du Trou Féminichan, c'est des gens avec qui on peut discuter, et qui étaient ouverts. Ils ont dit, si vraiment tu y tiens, tu peux t'inscrire sur le cross long, mais tu ne seras pas classé, ce n'est pas possible, ce n'est pas dans le règlement. Et donc, à partir de 2012, dans les années 2016, je faisais le cross féminin, donc les 4 km. Et après, j'enchaînais sur le masculin, je n'étais pas classé. Au début, on m'a pris un peu pour une cinglée, puis après j'étais un peu la mascotte de ces messieurs, tiens, la folle là, qui va courir. Et bon, j'arrivais pas dans les premières, quoi. Mais j'arrivais pas dans les derniers non plus. Et donc j'ai réinterpellé les organisateurs, en disant, mais ouvrez-le aux femmes, c'est pas possible. On m'a dit, ouais, mais il y aura peu de femmes qui vont vouloir s'inscrire. Mais bon, j'ai persévéré, j'ai accroché, j'ai aussi... J'ai pris ma plus belle plume et j'ai interpellé la fédération d'athlètes. Je n'ai jamais eu de réponse. Mais in fine, en 2016, les organisateurs du Trophée Michaud ont autorisé, ont ouvert pour la première fois le cross dit masculin, appelé aussi cross des as. Ça peut permettre de sourire. Les femmes, ce n'est pas des as, mais les hommes, oui. Et donc, ça a été ouvert aux femmes. Et miracle, il y a eu plein de filles qui se sont inscrites. Et maintenant, c'est vraiment rentrer dans les mœurs. Parce que je sais que j'ai recouru le Michaud il y a deux ou trois ans. Il y avait la jeune fille qui l'emportait, qui dit « Quoi ? Il y a cinq ans, c'était pas ouvert aux dames, mais c'est quoi cette histoire ? » Donc comme quoi, on a des choses qui nous paraissent tout à fait normales. Si on ne le pointe pas, on n'avance pas. Et bon, je finis quand même, parce que c'est important, en 2017, la réglementation nationale et internationale a changé. Ce qui signifie non pas qu'une petite technique dans le nord de l'Alsace a couru les deux crosses et que du coup, ça a modifié les choses. Mais je pense qu'il y a d'autres femmes comme moi qui ont dû faire la même chose et l'union faisant la force. Voilà. Maintenant, on peut courir quasi les mêmes distances. Voilà.

  • Speaker #0

    C'est tellement important d'avoir des personnes qui, effectivement, peut-être font une petite action, mais une petite action chacune, ça fait une grosse action.

  • Speaker #1

    Oui, tout à fait. Et ça interpelle les gens. Ça interpelle les gens parce que nombre de collègues masculins étaient tout à fait estomaqués d'apprendre que les femmes couraient des distances moindres parce qu'on n'avait jamais pointé la chose. C'est tout. Du moment où on fait s'interroger les gens, ça peut évoluer.

  • Speaker #0

    Et maintenant, les distances, il y a encore des différences ou c'est pareil hommes et femmes ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne voudrais pas... comment dire, je ne suis pas une spécialiste des règlements internationaux. Mais la dernière fois que j'ai téléchargé les règlements, il semblerait qu'au niveau international, les distances sont les mêmes. Et au niveau national, il y a encore des petites différences. Mais ça gagnerait vraiment à vérifier. Je ne voudrais pas raconter de bêtises. Néanmoins, ça a évolué. On a le droit de courir plus que 5 kilomètres. Youpi, voilà.

  • Speaker #0

    Ouf !

  • Speaker #1

    Ouais, ouf !

  • Speaker #0

    Et est-ce que, tu vois, quand tu participais à des compétitions, donc là, il y a l'exemple du cross, mais sur d'autres sports, comme le trail, par exemple, est-ce que tu as déjà eu des remarques, des réactions où tu ressentais que ça gênait un peu que tu sois là en tant que femme ?

  • Speaker #1

    Moi, j'ai quelques anecdotes. Maintenant, globalement, il faut quand même dire, je pense que le trail a vraiment ouvert les choses aux femmes. Je pense que c'est quand même un milieu qui est très ouvert. Mais il m'est arrivé deux petites anecdotes que je me plais à raconter, mais qui sont quand même assez... sont pas mal. C'était à Niederbronn. Il y a bien une bonne dizaine d'années, j'avais de moins de rythme que maintenant. Et à l'époque, j'ai doublé un petit jeune homme dans une descente. Et à l'arrivée, il est venu me voir et il me dit, « Pour une femme,

  • Speaker #0

    vous courez bien. »

  • Speaker #1

    Déjà, le « pour une femme » , ça m'a un peu hérissé. Et après, on m'a dit... Et en plus vieille, alors là, ça a été la cerise sur le gâteau. J'ai eu une autre anecdote que je me plais aussi à raconter, parce que ça pointe quand même pas mal de représentations. C'était toujours à Niederbronn. J'avais fait le cent et quelques de Niederbronn. Et sur la fin, j'avais un petit regain de, comment dire, j'étais en forme. Ça arrive, c'est la grâce de certains traits. Je double un monsieur et il me fait... « Ah, bonjour, vous avez quel âge ? » Alors, au début, je me dis, c'est quoi cette histoire ? Pourquoi il me demande mon âge ? Alors, bon, sur le coup, je t'ai interloqué, je continue. On double un deuxième, il me demande « Vous avez quel âge ? » Je lui dis « Non, mais j'ai 21 ans dans ma tête. » Et après, je double un troisième qui dit « Je peux vous poser une petite question, madame ? » Je lui dis « Oui, j'ai quel âge ? » « J'ai 21 ans dans ma tête, merci monsieur. » Et par la suite, ça m'a vraiment interpellée. Je lui ai dit « Est-ce que moi, je demanderais à un monsieur ? » Quel âge avez-vous ? À moins qu'il ne soit octogénaire, je ne sais pas. Et je pense que c'est lié à la représentation. Une femme double, ciel. Mais en plus, avec un certain âge, ce n'est pas possible. Je pense que là, il y a encore des trucs à modifier. Oui,

  • Speaker #0

    effectivement. C'est tellement bizarre de demander ça. Ça ne me viendrait pas l'idée non plus. Comme si j'essayais de se rassurer.

  • Speaker #1

    Du coup, dans ma tête, souvent on est un peu en auto-hypnose quand on court. Je me dis, mais pourquoi il me demande ça ? Mais pourquoi on me demande ça ? Parce que moi, je demanderais l'âge aux gens. J'ai eu vraiment un gros moment de solitude et d'incompréhension.

  • Speaker #0

    Tu as vu l'évolution de l'intégration des femmes dans les sports outdoor en général. Quels changements ont été les plus marquants pour toi ? Déjà, bien sûr, il y a le changement pour le cross. Mais est-ce que tu as vu d'autres changements comme ça qui t'ont semblé importants ?

  • Speaker #1

    Moi, je viens de loin parce que je me suis souvenu qu'en cours d'éducation physique, quand j'étais ado, quand j'avais 14-18 ans, les cours d'éducation physique étaient séparés. C'est-à-dire que les filles étaient avec un prof et les garçons étaient avec un prof. Ce n'était pas mélangé. Donc là, ça a quand même évolué. Maintenant, comme je l'ai dit, je pense qu'il y a quand même beaucoup de sports qui sont ouverts aux femmes. Je pense, par exemple, le foot. féminin, enfin, qui commence à prendre de l'ampleur. Mais, je dirais, il y a encore des choses qui résistent. Alors bon, d'un point de vue perso, moi j'ai des petites filles, et dans le sud de la France, elles avaient fait une activité avec leurs parents. Alors autant, il paraît, il y avait des jeux collaboratifs, les parents étaient tout enthousiastes parce que c'était des équipes de jeux garçons-filles. Et donc, c'était plus axé sur la collaboration que sur la compétition. Et pour clore cette belle journée, il y a une petite course qui était organisée pour les 6-10 ans. Et bien sûr, à ce moment-là, la distance pour les garçons était plus longue que pour celle des filles. Donc, comme mon fils connaissait mon combat, enfin mon combat, mes idées, il a interpellé les organisateurs. Et donc, on lui a fait remarquer que pour les filles, il faisait un peu chaud. ne pas les faire courir plus que les garçons, les pauvres cocottes. Et lui, il s'est posé la caisseau et s'est dit, il y a peut-être des garçons aussi qui avaient trop chaud et qui auraient voulu faire des distances moindres. Pourquoi ne pas équilibrer ? Non, familialement, j'ai encore une autre anecdote, aussi au niveau du collègue. Actuellement, les jeunes filles au collège, lorsqu'elles font le cross, ont des distances moindres. Et donc, ma petite nièce avait... interpellé son prof de sport, d'ailleurs peut-être un peu véhément, d'autant que quand il leur faisait faire des pompes, les filles devaient les faire à genoux et les garçons devaient les faire entièrement. Et donc, elle a interpellé son prof de sport en lui disant que ce n'était pas normal, qu'elle était capable de le faire. Bon, elle était punie parce que je pense qu'elle y allait un petit peu fort. Mais, quelque part, ça nécessite une réflexion. Maintenant, il y a aussi, dans tout ce qui est actualité, Cet été, il y avait le Tour de France. Je me suis dit, tiens, pourquoi est-ce que le Tour de France féminin est plus court que le Tour de France masculin ? J'ai un petit peu enquêté auprès des proches et on m'a dit, ouais, mais c'est moins vendeur. Je lui ai dit, ouais, mais pourquoi est-ce que c'est moins vendeur ? Parce qu'on a quand même des belles championnes, je veux dire, Pauline Ferrand, elle est chouette quoi ! Et là, ça pose question. Et dernièrement, j'ai également eu un coup au cœur quand on parlait des tests de féminité. au niveau des boxeuses. Est-ce qu'on fait des tests de masculinité pour les gens ? Est-ce que, quand on est un peu performant, est-ce qu'on doit analyser tous les ressorts de la performance ? Par exemple, Kylian Jornet, paraît-il, a des capacités hors pair. Est-ce que, pour autant, on l'interdit de compétition ? Ou Martin Fourcade, par exemple ? Et là aussi, ça me pose question.

  • Speaker #0

    Je suis d'accord, il y a pas mal de questions encore déjà à se poser. Je trouve ça chouette aussi d'interpeller, là par exemple dans le cas de tes petits-enfants dont tu parlais, juste déjà de pouvoir dire « Eh oh, c'est peut-être pas normal. » Et en plus, sur un enfant, je trouve ça fou l'impact que ça va avoir parce que si directement dans la société, on dit aux petites-filles « Toi, tu pourras toujours faire que moi. » que les petits garçons, forcément, elles vont vraiment le penser et l'intégrer. Ça a des conséquences énormes sur l'ensemble d'une vie. Je me dis que c'est génial de voir les évolutions dont tu parles et on voit que ça bouge. J'en suis consciente, mais c'est intéressant aussi de voir qu'il y a encore pas mal de travail et qu'aussi, à titre individuel, on peut faire des choses juste déjà en interpellant, sans même faire preuve d'agressivité ou quoi, mais juste en disant « Eh oh ! » Pourquoi ? Et peut-être qu'effectivement, des gens qui ne se posent même pas la question vont juste déjà s'interroger et que c'est un premier pas pour faire changer les choses.

  • Speaker #1

    Je suis tout à fait d'accord. Moi, je me dis interpeller et montrer l'exemple, montrer qu'on peut. Et à ce moment-là, ça fait se questionner les gens. Oui,

  • Speaker #0

    tout à fait.

  • Speaker #1

    Petit à petit, ça peut évoluer.

  • Speaker #0

    Est-ce que toi, tu as des conseils à donner à des femmes qui osent... justement peut-être pas trop se lancer dans le trail ou des sports d'endurance en général parce qu'elles se sentent peut-être pas vraiment à leur place ?

  • Speaker #1

    Absolument et moi je me dis finalement biologiquement on a quand même une sacrée chance parce qu'on est fait pour accoucher. Or il paraît qu'un accouchement c'est un marathon donc quelque part physiologiquement on peut. Maintenant c'est vrai que si on veut se lancer dans le trail et qu'on fait juste un peu de running, il ne s'agit pas de commencer par faire un 160, bien sûr que non. Mais ce qui est fou au niveau du corps je pense c'est... L'entraînement ne permet que d'évoluer. C'est-à-dire, on peut au début se fixer des petites distances sans objectif de performance juste, y arriver. Et je pense qu'en s'entraînant très vite, on se rend compte que ça marche, j'avance, tout va bien. Oser, il faut absolument oser et y aller. Et éventuellement, y aller peut-être avec des copines, ça peut aussi être une émulation. Ou se fixer un objectif. Tiens, je vais avoir 35, 40 ans, maintenant je vais faire un petit trail, 9 kilomètres. Puis après, peut-être monter. Et au bout d'un moment, on prend du plaisir.

  • Speaker #0

    Ce qui est bien le plus important. Et toi justement, tu as 64 ans. Comment est-ce que tu vis ta pratique sportive aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Alors bon... Euh... il est évident que le corps ne rajeunit pas. La dernière fois que j'ai allé voir mon médecin, il a comparé mes articulations à des vieux pneus usés. Mais ça n'empêche pas de rouler. J'ai un tout petit peu modéré, c'est-à-dire que je ne fais plus d'ultra, mais ça ne m'empêche pas de faire du ski alpi à tir l'arigot. Je vais souvent gambader en forêt. Je fais encore des épreuves de trail, mais plus... plus des oscillons, disons. Je me suis aussi mis des objectifs parce que comme j'ai des articulations qui commencent à fatiguer un peu, cette année, je m'étais dit, bon, du coup, je vais faire un triathlon. Et en fait, c'était super fun. Je m'étais mis la barre très haut parce qu'en fait, il y a un an, je nageais comme un caillou, du genre grand-mère fait sa natation avec la tête qui sort et le petit bonnet de bain, quoi.

  • Speaker #0

    C'est moi quand je nage.

  • Speaker #1

    Oui, voilà. Et donc... Ça m'a pari vraiment un défi de fou. J'ai pris des cours, je me suis inscrite à un club de natation. Maintenant, je ne dis pas que je nage comme un poisson, mais ça va un tout petit peu mieux. Et du coup, j'ai fait plus de vélo. J'ai fait aussi de la course à pied. Et ça a été vraiment une expérience géniale. Donc, je pense qu'à tout âge, on peut se lancer des défis, des objectifs, se faire plaisir. Bien entendu, moi, je continue à courir, mais bon. Comme dit un petit peu moins qu'avant.

  • Speaker #0

    Je trouve que c'est trop chouette de voir que tu adaptes en fonction de ton corps, tu respectes ton corps, mais en fait, ça ne t'empêche pas de faire des trucs trop chouettes. Tu te prends sur le triathlon, c'est génial.

  • Speaker #1

    Et ce qu'il y a aussi, je pense, c'est que j'ai une grande chance, c'est que pendant une bonne quinzaine d'années, je ne me suis jamais blessée. Donc, je suppose, je me lance des fleurs, que je m'entraînais correctement et que je récupérais correctement. Parce que ça joue aussi. Et maintenant que je sens quand même que je commence à fatiguer, je pense que l'adaptation, c'est une bonne idée. Au début, on peut être très réfractaire en se disant « mais moi, le vélo, ça ne m'intéresse pas, ce ne sont pas les mêmes sensations » . On découvre d'autres choses, on rencontre d'autres gens aussi et c'est une bonne alternative. J'ai fait aussi pas mal d'équitations dans mon adolescence. Je me suis dit « au pire, je vais retourner sur un cheval » . Je me suis dit que c'est la clavicule, la cheval, donc il faut quand même faire attention.

  • Speaker #0

    C'est sûr que ce n'est pas le sport le moins risqué, mais ça varie en tout cas. Et est-ce que tu as, parce qu'on parle souvent aussi du côté un peu négatif du fait de prendre de l'âge, où effectivement, on a peut-être les articulations qui glissent un peu, etc. Mais est-ce que tu as aussi des choses positives ? Parce que j'ai aussi tendance à me dire que quand on a plus d'expérience, plus de vécu, plus de maturité, Il y a plein de choses qui se passent quand même vachement mieux et qu'on vit mieux.

  • Speaker #1

    Je pense que le maître mot à mon âge, c'est l'expérience. J'ai eu la grande chance, c'était vraiment l'apothéose de ma carrière de trailleuse. À 62 ans, j'ai fait l'Aiger Ultra Trail, c'est un 250 km, 15 000 m de dénivelé. Ce n'était pas balisé, c'était en autonomie avec un GPS et ça devait se faire en équipe. Et donc, je l'ai fait en équipe avec une copine. Je pense que là, l'expérience a beaucoup joué, notamment dans l'organisation, dans la gestion de l'effort. Je me souviens, à un moment, j'ai dit, maintenant, on s'assoit, on dort. Parce qu'en Ukraine, parfois, on s'arrête dans un pré, on dort des minutes et hop, on repart. Je me disais, mais j'y arriverai pas. Je lui dis, si, maintenant, tu te couches, on dort. Bon, elle était sympa, Marianne, parce qu'elle ne se rebellait pas. Elle faisait comme je disais. Et on a eu raison, parce qu'après, paf, c'était reparti. Et je pense que c'est une petite anecdote pour dire que plus on a d'expérience, généralement, on fait de bêtises. On a peut-être plus tendance aussi à faire attention à la récup, à s'écouter. finalement, ça peut aider d'autres personnes de faire partager notre expérience à cet âge. Oui,

  • Speaker #0

    complètement. C'est vraiment un bon message, je trouve, à faire passer. Et toi, tu as eu une période aussi passante puisque tu as eu un cancer du sang à un moment dans ta vie. Comment est-ce que tu as réussi à te reconstruire et à reconstruire toute ta vie et ta pratique sportive après ça ?

  • Speaker #1

    Ça a été un moment très dur. Au départ, quand on me l'a annoncé, je ne le croyais pas. Parce que je venais de finir un ultra Stellandora, ultra trail, où vraiment j'avais la pêche. Enfin, j'ai fini bien, avec des super beaux souvenirs. Et bon, quelques mois après, on me dit, bon, il y a une présence de champ de cancer. J'ai cru que c'était une vanne. Je me suis dit, non, ils sont trompés à la radio, ce n'est pas possible. Et de fait, si, il y avait bien un cancer. Et le problème, c'est que ça s'est... passé au début du Covid. Donc, je me suis retrouvée seule, je vis seule. Seule, avec cette épée de Damoclès. Donc, en gros, j'ai eu trois opérations. Alors, au début, les premières opérations, ça allait. Bien entendu, après une opération, on n'a pas le droit de courir, donc j'allais marcher en forêt. Et la troisième opération, par contre, ça a été la Bérésina, parce que Euh... Quatre jours avant l'opération, j'ai dit moi je fonce en Suisse, je vais me faire un festival de sensations en montagne. J'ai fait dans les 150 kilomètres et 6000 mètres de dénivelé, 40 kilomètres par jour, j'avais la frite. Donc c'était d'autant plus difficile à admettre. Je me suis bourrée d'images, d'odeurs et hop, je suis allée sur la table d'opération. Et quand je suis sortie de l'hôpital au bout d'une petite semaine, Je n'étais même pas capable d'aller à la boulangerie à 800 mètres, je ne tenais pas debout. Et ça, ça a été très très dur, parce que j'ai vraiment l'impression qu'on m'a mise à terre. Et là, je dirais, les copines de course à pied, elles m'ont vraiment aidée. Du type, tiens, je te ferai une petite visite, on va à la boulangerie toutes les deux. À l'époque, la boulangerie pour moi, c'était l'Everest, je me disais, c'est pas possible, je n'arrive plus à aller à la boulangerie. Et donc, merci Anne. On est allé à la boulangerie toutes les deux, j'ai dit je peux le faire. Là aussi je pense que le sport m'a beaucoup aidé, c'est bon. Aujourd'hui on fait 800 mètres, demain on va en faire 850. Et tout doucement, tout doucement, j'ai remonté. Maintenant, il faut le dire, là socialement, c'est bien des premières fois où je me suis autant entourée. C'est-à-dire mes copines de course à pied, elles m'ont vraiment aidée. Au départ, on faisait juste des randonnées à plat, sans déniveler. Et peu à peu, j'ai repris. Il y a aussi ma belle-fille qui, quelques mois après l'opération, m'a dit « Allez, on met les baskets et on va au stade. » Et moi, je me disais « J'y arriverai pas. » Et elle m'a encouragée. « Ah ouais, je refais un tour ? Ah bah ouais, ça va. » Puis on est repartis comme ça. La troisième chose aussi, c'est que pendant que j'étais vraiment pas bien, j'ai fait... Beaucoup de marches à pied. Après une opération, on demande de mettre des bas de contention. C'est une horreur. Et moi, je me suis fait opérer en juillet. Donc, je transpirais dans mes bas de contention. C'était une horreur. Alors, j'avais trouvé un truc au bout de quelques semaines. J'allais à pied à une petite fontaine. Ça s'appelle la Fontaine Mélanie, près de Saverne. C'est plat. J'allais donc en forêt, sous les arbres. Et arrivé à la fontaine, j'ôtais mes bas et je prenais un bon bain d'eau froide. Et après, je revenais. Ça allait mieux, je m'étais un peu aérée et au niveau des jambes, ça allait mieux aussi. Et bon, peu à peu, c'est revenu et je me suis fait opérer en 2020.

  • Speaker #0

    Et en 2021, je vais me mettre un objectif et j'ai fait la Suisse Alpes, c'est un ultra de 160 kilomètres. Et là, ça fait partie aussi d'un épisode très marrant, c'est que je n'ai pas performé au niveau du temps, mais cette course était très mal organisée et de fait, il n'y avait très peu de rabiteaux. Et moi, je l'avais senti, j'avais bourré mon sac de barres de céréales. À tous les ravitaux, ils offraient que des M&M's. Maintenant, je ne peux plus voir les M&M's. C'est tout ce qu'il y avait. Donc moi, j'ai mangé mes petites barres. Et à l'arrivée, on m'apprend que je suis deuxième au scratch. Je dis, ouais, non, là, il y a un petit souci. Parce que le temps que j'ai fait, ce n'est vraiment pas le temps d'une championne. Et j'ai appris par la suite, toutes les nanas avaient abandonné parce qu'elles n'avaient rien à manger. Donc moi, je les ai eues à l'usure, mais ça a été une jolie victoire.

  • Speaker #1

    Mais c'est incroyable. Un an après, c'est rien. après et puis ce genre de distance. Tu as vraiment réussi à te remettre très bien. Oui.

  • Speaker #0

    Mais comme dit, je pense que c'est aussi beaucoup dans la tête. Je me sens... J'ai complètement perdu confiance en moi et en mon corps après mon opération parce que plus rien ne fonctionnait. Le corps, il ne répondait pas. Et en fait, le corps, c'est quelque chose de super. Je crois que c'est ce qu'on... Ce qu'on découvre aussi en ultra, parfois à 5h du matin, dans la nuit, on est au bout de 100 km, on n'en peut plus, on met une petite cape de pluie dans le fossé, on roupille 5 minutes et hop, après ça repart. Et je pense que ça, ça m'a aidée aussi. Je me suis dit, le corps, il peut repartir. Il faut un peu dresser le cerveau et y aller. Et effectivement, les copines m'ont beaucoup aidée parce qu'en ultra, moi souvent, je m'entraînais seule. très peu de femmes qui font de l'ultra. C'est aussi notable. Il y a 8-10% de femmes qui font de l'ultra. Et je pense que après mon opération, je n'ai jamais pris autant de plaisir à me laisser entraîner. Du type, allez, maintenant, on va fractionner. Enfin, je précise pour ceux qui connaissent. Ce ne sont pas des fans de l'athlète. Fractionner, c'est faire des séries de courte distance, mais le plus vite possible pour muscler le cœur. Et bon, ce n'est pas évident de fractionner. Là, les copines, elles m'ont dit, allez, on y va, on fait 10 petites longueurs. Et je les ai suivies. Et ça permet de reprendre aussi et de reprendre confiance en soi.

  • Speaker #1

    C'est aussi une grande force d'être bien entourée.

  • Speaker #0

    Tout à fait. Et là,

  • Speaker #1

    tu viens de remporter le championnat du monde de trail XTERRA. Donc déjà, félicitations. Et est-ce que tu peux nous expliquer déjà le concept XTERRA et nous raconter ta course ?

  • Speaker #0

    J'ai raconté le concept XTERRA, mais tout de suite, je préviens, on était trois à courir les championnats du monde XTERRA. Donc, être première sur trois, ce n'est pas la même chose qu'être première sur 300, disons. Mais on va quand même expliquer la chose.

  • Speaker #1

    C'est quand même déjà chouette.

  • Speaker #0

    Oui, c'est chouette, c'est sympa. Mais bon, pour moi, je dirais que c'est plus symbolique qu'autre chose. Le championnat du monde XTERRA, c'était l'anniversaire de mon opération du cancer du sein 5 ans avant. Et donc pour moi, c'est vraiment très symbolique parce que je me suis dit, ouais, il y a 5 ans, j'étais sur un lit d'hôpital. À l'époque, pour rigoler, j'avais une perfusion, j'avais une perf du jour, un pas. Les infirmiers, l'infirmière était tellement débordée qu'ils n'ont pas rigolé. Il n'y a que ma voisine de lit qui rigolait, mais bon. Là, je me suis retrouvée championne du monde, comme dit ce proie, mais c'était tout à fait symbolique. Alors le concept, c'est des courses à travers le monde, sur tous les continents. Il y a des courses sélectives, et ceux qui se sont sélectionnés sur ces courses peuvent participer au championnat du monde. Et ma participation à XTERRA relève vraiment de l'anecdote. Parce que l'année dernière, j'avais peu couru, j'avais mal au genou et je me suis inscrite à une course. Je ne savais pas qu'elle me sélectionnait au championnat du monde. Et là, pareil, comme dans ma catégorie, on est vachement nombreux, je crois qu'on était deux. Donc, je me suis sélectionnée, j'étais première sur deux. Et j'ai appris que je pouvais participer à ce championnat. Alors bon, 21 kilomètres, ce n'est pas ma distance, c'est trop court. Moi, c'est plus des longues distances. Mais je me suis dit, bon, ça peut être amusant. d'aller au Pays de Galles, de participer à ces championnats. Mais tout à fait honnêtement, j'y suis allée plus en me marrant que boostée par une envie de gagner. Maintenant, il ne faut pas détériorer non plus. Je veux dire, il y avait dans les 33 nations qui étaient représentées. Sur l'ensemble de XTERRA, les athlètes seniors, il y en a vraiment des bons. Donc pour eux, je pense, être champion du monde XTERRA, ça a peut-être plus de signification que pour moi. Je dirais que c'est un petit titre. Et ce qui est fou aussi, c'est que j'ai pris le départ des plus grands ultras. J'ai pris le départ de l'UTMB, la Diagonale des Fous et le CERA. Là aussi, il y a je ne sais combien de nationalités qui sont représentées. Tout à fait. Honnêtement, l'enjeu est beaucoup plus important sur un ultra. Donc, par exemple, quand j'ai fini le 250 de l'Aiger, je n'étais vraiment pas dans les premières, mais je pense que l'effort était tellement plus important que ce petit 21 kilomètres, qu'il vaut mieux le prendre comme une anecdote. Néanmoins, c'est vrai que depuis que je suis, entre guillemets, championne du monde, des gens me félicitent et tout, je me dis, oui, bon, ce n'est pas l'épreuve la plus difficile que j'ai faite dans ma vie. Ma foi. Ça permet de relater son expérience. Et ça s'est passé au Pays de Galles. C'était une épreuve de 21 kilomètres et 1002 de dénivelé dans le parc de Snowdenia. C'est magnifique, le parc de Snowdenia. Et c'était tout à fait atypique, parce qu'ambiance très galloise. Et je suis ravie d'être allée là-bas, parce que du coup, j'ai découvert le Pays de Galles. J'y suis allée en train. parce que je déplore que certaines compétitions internationales nécessitent qu'on prenne l'avion et qu'on laisse une empreinte carbone. Et donc là aussi, ça faisait partie de mon petit défi. Je me suis dit, je vais aller au Pays de Galles et je ne prendrai pas l'avion. Non. Donc je me suis renseignée sur les billets de train. Bon, perso, je commence à découvrir toutes les applis Interrail et compagnie. qu'on peut télécharger. Merci à mes enfants de m'avoir quelque peu orientée dans ces choix. Et donc, j'ai pris le train jusqu'à Paris. Après Paris, je suis allée à Londres. À Londres, j'ai changé de gare. Je suis, j'ai pris le train sur Bangor, qui est au Pays de Galles. À Bangor, il a fallu prendre un bus. Il a fallu changer de bus. Comme bien entendu, je ne maîtrise pas vraiment la langue de Shakespeare. Non, mais... n'étaient pas très bons. Au Pays de Galles, ils ont un sacré accent. Donc, quand je me suis assurée que le bus était le bon, le gars, il me dit non. Et finalement, en modifiant mon accent, on m'a dit que oui, c'était bien le bon bus. Et j'ai atterri au Pays de Galles. Et là, j'ai découvert les joies du camping gallois. C'est aussi très amusant. Parce qu'en fait, le terrain de camping, c'était des parcs à moutons. Et donc, le brave paysan changeait ses moutons au fur et à mesure que les gens arrivaient. Je crois que j'étais une des seules à participer au championnat, à avoir bivouaqué. C'était charmant, avec les petits bêlements des agneaux. Et donc j'ai fait des championnats, et après je suis rentrée au camping. Et comme le camping était en hauteur, je m'étais tapée les vis de son maître de dénivelé, et après je suis remontée, mais c'était vraiment très chouette.

  • Speaker #1

    C'est chouette, ça fait une aventure globale en fait. Tu n'as pas juste la partie vraiment course, tu as l'avant, l'après, la découverte du pays. C'est ça qui est chouette aussi.

  • Speaker #0

    Mais enfin, dans les courses, dans les ultras, si je peux inciter des gens à faire des ultras, c'est ça aussi. Je sais quand j'ai fait la Diagonale des Fous à La Réunion, mais j'ai découvert une île, c'était merveilleux. Bon là, à l'époque, j'ai pris l'avion. On va mettre un bonnet là. Mais c'était un petit peu plus compliqué à organiser.

  • Speaker #1

    C'est clair. Et quels sont tes prochains projets ou aventures ? Parce que j'imagine que tu en as.

  • Speaker #0

    Alors, les projets, j'en ai plus à la tête. Ce n'est pas ça qui manque. Maintenant, qui vont se concrétiser ? Là, dans une dizaine de jours, je pars faire la traversée des Vosges avec une copine. Bien entendu, en bivouac et en autonomie, pas de gîte en gîte. Donc, ça va être chouette. parce que finalement, nos beaux-jeunes natales, c'est super beau, surtout en automne. J'espère juste que le temps sera de la partie, sinon ça va être la cape de pluie. Et après, j'envisage en hiver d'aller en Laponie. J'aimerais bien voir les aurores boréales. Donc, je suis en train d'organiser ça. Bon, ma compagnonne qui va m'accompagner en Laponie, un peu rétive à tout ce qui est train, mais on va quand même... faire des projections pour pouvoir y aller. Et après, ma foi, après, j'ai tellement de trucs à faire.

  • Speaker #1

    Tu vas réussir à la convaincre, je suis sûre.

  • Speaker #0

    On va essayer, on va essayer.

  • Speaker #1

    C'est trop bien, plein d'idées.

  • Speaker #0

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #1

    Et est-ce que, j'ai une petite question traditionnelle pour la fin de l'épisode, quel message est-ce que tu aimerais faire passer aux auditrices du podcast ?

  • Speaker #0

    Alors là, oser se faire plaisir. Il y a souvent une phrase de Simone de Beauvoir qui me revient, qui dit « On ne n'est pas femme, on le devient. » Eh bien, on peut aussi devenir une sportive. Il suffit d'oser et puis de jeter à terre toutes tes représentations, de se dire qu'on en est capable. biologiquement, en effet.

  • Speaker #1

    Trop chouette. Merci pour ce message final. Et puis, merci d'avoir partagé tout ça. Je trouve ça trop bien de voir la variété, en fait, de choses que tu fais et le plaisir que tu y prends aussi. Donc, grand merci, Annick. Et puis, bonnes nouvelles aventures à toi.

  • Speaker #0

    Merci.

  • Speaker #1

    Merci d'avoir écouté cet épisode. Si cela vous a plu, n'hésitez pas à vous abonner au podcast et à mettre une bonne note sur les plateformes. Cela nous aide. À bientôt.

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