- Speaker #0
Super Docteur, c'est le podcast des médecins généralistes. Le podcast qui vous transmet les recommandations de bonne pratique et les résultats des grandes études qui vont changer vos habitudes. Super Docteur, c'est la découverte de méthodes de soins innovantes et des interviews de soins néant inspirants qui boosteront votre motivation. Un contenu court et pratique, chaque semaine, pour tous les médecins. Bonjour à tous et bienvenue dans Superdocteur, le podcast des médecins qui redonne de la noblesse à nos métiers pour soigner mieux, différemment. Aujourd'hui, je reçois un invité engagé en première ligne des débats qui agitent le monde médical et les jeunes générations de soignants. Kylian Lelgoarch, interne en médecine générale et président de l'ISNI, l'intersyndicale nationale des internes. Au cœur de notre échange, la quatrième année d'internat en médecine générale contestée par une large part de la profession, la loi Garraud. et le spectre d'une régulation imposée de l'activité des médecins, les contre-propositions portées par les syndicats d'interne pour répondre aux déserts médicaux sans coercition, et enfin, la santé mentale des futurs médecins qui est encore trop négligée. Un épisode à la fois engagé, lucide, porteur d'espoir pour tous ceux qui se battent pour une médecine plus juste, plus humaine et plus cohérente avec la réalité du terrain. Bonjour Kylian.
- Speaker #1
Bonjour.
- Speaker #0
Je te remercie beaucoup d'avoir... pris du temps pour être avec moi aujourd'hui. Je sais que tu es extrêmement occupé. Tout d'abord, peux-tu me rappeler, s'il te plaît, ce qu'est l'ISNI et quels sont tes projets actuels en tant que président de cette intersyndicale ?
- Speaker #1
Merci beaucoup Mathieu de l'invitation. C'est un grand plaisir d'être présent ici avec toi. L'ISNI, c'est l'intersyndicale nationale des internes. On vous présente tous les internes de toutes les spécialités. Et quelle que soit leur subdivision, que ce soit en France métropolitaine ou même dans les Outre-mer, dans les Antilles et dans l'océan Indien, l'objectif c'est que régulièrement, les représentants locaux des internes, donc à peu près dans chaque CHU de France, viennent en Assemblée Générale. On discute justement de la santé, des problématiques de formation qu'on a dans notre internat, du monde de santé qu'on imagine pour demain, et on essaie de porter des positions. Position au niveau public, vis-à-vis des pouvoirs publics, vis-à-vis des ministères, vis-à-vis des parlementaires, on en reparlera avant la loi Garaud. Position également auprès de nos collèges spécialités pour imaginer la formation de demain, ce que doit être un intern de demain, comment il doit être formé plus tard. Et donc voilà, on se réunit régulièrement pour réfléchir finalement à la fois à notre formation et au système de santé de demain.
- Speaker #0
Très bien. Donc, tu es aussi interne en médecine générale et je crois que tu es tout jeune président, c'est ça ? Tu as pris tes fonctions l'année dernière ?
- Speaker #1
Écoutement, je ne sais pas si jeune je le suis encore, mais ça fait déjà, je pense bien, dix mois que je le suis, donc pour un mandat d'un an. Finalement, je suis presque sur la fin, on va dire. Et je suis interne de médecine générale dans la grande faculté de Montpellier-Nîmes, qui est la plus vieille de France, peut-être même du monde entier. Et donc, interne de médecine générale, une spécialité que... que j'aime beaucoup, qui est très polyvalente et c'est pour ça que je l'ai choisie.
- Speaker #0
Exactement. Alors avant de continuer Kylian, je voulais juste prendre une petite minute pour saluer chaleureusement le travail d'Egora, qui m'a beaucoup aidé pour préparer cet épisode via leur article en ligne. Egora, si vous ne connaissez pas, c'est un site d'info incontournable pour les médecins. Moi je l'utilise régulièrement, on y trouve toutes les actus médicales, des sujets très concrets, très proches de notre quotidien de médecin généraliste, mais il y a aussi plein d'autres ressources accessibles gratuitement pour les pros de santé. C'est sérieux, c'est documenté, toujours pensé pour notre quotidien, donc un grand merci à eux. Je précise que je n'ai pas de rémunération de leur part, je salue simplement leur très bon travail. Donc si vous avez deux minutes, allez jeter un oeil, je suis sûr que vous y trouverez des infos utiles pour votre pratique. Ils m'ont beaucoup aidé à me tenir au courant de l'actu, préparer cet épisode avec toi sur plein de choses, et notamment le vaste sujet de la quatrième année d'internat de médecine générale. Est-ce que tu veux bien m'expliquer s'il te plaît, de quel projet s'agit... S'agit-il, où est-ce que nous en sommes et quel est le point de vue de l'ISNI à ce sujet, s'il te plaît ?
- Speaker #1
Alors, la quatrième année, c'est ce qu'on appelle l'année de consolidation pour les internes de médecine générale, qui existe cette année de consolidation pour les autres spécialités, mais qui n'existait pas encore pour la médecine générale, qui, pendant la réforme de l'internat, tout le monde est passé avec ces trois phases, trois phases qui correspondent à une progression, on va dire, de la maturité du travail de professionnel de santé. de médecins et la médecine générale a été un peu exclue au départ de dispositifs. Et donc, on va dire sous couvert, parce que ce n'est jamais très clair, d'améliorer la qualité de la formation. Moi, je pense véritablement que ce n'est pas vraiment ça qui a motivé, en tout cas les pouvoirs publics, à le faire. Et sous couvert d'amélioration de la qualité de formation. peut-être plutôt de l'accès aux soins, d'améliorer l'accès aux soins. Cette quatrième année a été décidée après le renouvellement du mandat du président Macron et votée en 49-3 pour changer dans un projet de loi de finances de la Sécurité sociale en 2022. Et donc depuis 2022, cette quatrième année doit se mettre en place pour une année en ambulatoire pour les internes de médecine générale, dernière année ambulatoire pour les internes de médecine générale. mais dont on attend toujours un petit peu les contours, dont on attend toujours un petit peu les précisions. Parce que depuis 2022, où ça a été décidé par la loi, finalement, il n'y a pas grand-chose qui s'est passé dans sa mise en place. Et on est aujourd'hui en 2025, en juin 2025, une réforme qui doit se mettre en place en novembre 2026. Donc on est à moins d'un an et demi de sa mise en place. Et on attend toujours beaucoup d'arbitrages ministériels. de précision et même sur le terrain. Il y avait beaucoup de flou en début d'année sur la rémunération justement des docteurs juniors, ce qu'on appelle les docteurs juniors parce que c'est la quatrième année, c'est les docteurs juniors médecine générale. On y voit un peu plus clair aujourd'hui, ce n'est pas totalement satisfaisant mais on a quand même gagné sur beaucoup d'éléments contre le gouvernement, notamment sur la pernance de soins obligatoires, on pourra revenir dessus. Là où reste aujourd'hui le plus grand flou, c'est sur la rémunération des maîtres de stage universitaire parce qu'il n'y aura pas de quatrième année. s'il n'y a pas d'encadrant pour la quatrième année, puisqu'il faut bien des terrains de stage, et pour avoir des terrains de stage, il faut avoir des maîtres de stage universitaires. Et aujourd'hui, c'est l'élément particulièrement bloquant justement dans les discussions, parce que les rémunérations qui sont proposées par le gouvernement ne sont pas à la hauteur du dédommagement que coûte, on va dire, d'avoir un docteur junior dans son cabinet. Et c'est ça qui, aujourd'hui, amène à beaucoup de réflexions et en tout cas à me dire que finalement, même en juin 2025, il reste encore beaucoup de travail pour mettre en place cette quatrième année, au point de se poser la question si, effectivement, elle aura vraiment lieu l'année prochaine.
- Speaker #0
Très bien. En lisant différents articles, j'ai cru comprendre que, initialement, ça devait être absolument une année ambulatoire au cabinet du médecin généraliste pour essayer de sortir les médecins généralistes de l'hôpital. j'ai l'impression qu'il y aurait une anguille sous roche et que ça pourrait éventuellement se faire à l'hôpital en gros pour faire travailler des internes de médecine générale à l'hôpital à moindre coût. Est-ce que c'est vrai ?
- Speaker #1
Alors ce qui est vrai c'est que nos études, on entend souvent, ne sont pas payées par l'État. On rapporte plus que ce que les cas, ce qu'un interne coûte à l'État. C'est à peu près entre 150 000 et 300 000 euros par interne chaque fois. Donc ça c'est la première vérité. C'est sûr que d'avoir et de rajouter une année Alors, en tant que professionnel de santé et encore étudiant, parce que forcément, on a la double casquette, et aujourd'hui, j'ai 28 ans, je me pose toujours cette question-là de savoir est-ce que finalement, ça sert plus à l'État ou plus à ma formation de rajouter une année supplémentaire ? En tout cas, nous, notre position depuis le départ à l'ISNI, ça a été de dire que cette quatrième année n'était pas nécessaire dans la formation de médecin généraliste. On forme, et on a formé pendant des années et des années. des médecins généralistes sans cette 4ème année, sans cette fameuse 4ème année, il n'y avait pas de nécessité de la faire. On avait alerté sur beaucoup d'éléments qui nous paraissaient bloquants, notamment le fait d'avoir des maîtres de stage. On n'aurait pas suffisamment de maîtres de stage universitaires. On a été visuellement plutôt clairvoyants sur les limites de cette réforme. Et donc, on voit qu'on arrive pratiquement quasiment dans le mur. Donc, je dirais que cette année supplémentaire et c'est pour répondre à ta question, est-ce que c'est une année finalement où on sert un peu le système sans être particulièrement rémunéré ? C'est le cas de toute façon, puisqu'on aura une activité, on aurait une activité si elle est mise en place, de docteur comme tout à chacun, mais sans la rémunération d'un docteur qui est installé, qui est bien plus faible. Donc forcément, on se pose cette question et il faut maintenant, j'ai envie de dire, c'est un peu la position de ma structure depuis que ça a été voté en 2022, c'est que Merci. Maintenant qu'elle a été votée, il faut la mettre en place, mais il faut la mettre en place dans les bonnes conditions et arrêter. Parce que là, comme tu as dit, je suis engagé depuis longtemps. J'ai fait pas mal d'associatives par le passé. C'est la quatrième réforme de la formation en santé que je connais et je n'en connais aucune qui ne s'est pas faite dans la précipitation et dans la préparation la plus totale. Donc finalement, celle-ci n'échappe pas à la règle que j'ai connue pour la première année, que j'ai connue pour la réforme de l'internat. pour la réforme du concours de l'internat.
- Speaker #0
C'est clair. Du coup, si le gouvernement maintient ce principe... Quelle garantie minimale faudrait-il pour que les internes y voient un vrai bénéfice pédagogique ? Est-ce qu'il y a des choses essentielles ? Donc tu m'as parlé de la rémunération des maîtres de stage universitaires, ça c'est ok. Est-ce qu'il y a d'autres conditions indispensables ?
- Speaker #1
La condition sine qua non, déjà de base, qu'on a posée, avant même d'ailleurs des questions de rémunération pour les internes, etc., c'est que cette année doit, je dirais, pallier au manque de formation pour s'installer aujourd'hui dans le... dans le monde d'aujourd'hui en médecine. Je pense qu'on a des études de médecine qui sont très fortes, très bonnes pour nous apprendre la médecine, pour nous apprendre à devenir un médecin plus tard, mais absolument pas pour devenir un chef d'entreprise. Et pourtant, c'est ce que énormément d'internes aujourd'hui deviendront plus tard, des chefs d'entreprise, parce qu'ils seront installés en libéral, que ce soit en clinique privée ou en ambulatoire en ville, dans leur cabinet. en maison de santé pluriprofessionnelle, ils sont chez une entreprise, ils ont la responsabilité des salariés, ils ont une comptabilité à faire. Et ça, moi, je suis à un an de la fin de mon internat, je ne sais toujours pas comment créer une entreprise. Je ne sais pas comment gérer une comptabilité. Des fois, j'entends le mot CISA. Je ne sais pas trop à quoi ça correspond réellement. J'ai l'impression que c'est une petite entreprise où il y a plusieurs personnes qui se mettent dedans. Mais voilà, c'est très, très flou. Et malheureusement, ça, aujourd'hui, on ne l'a pas. Donc, voilà, maintenant qu'elle est là, autant qu'elle se servent au moins à nous préparer, à nous installer plus tard et donc à comprendre le monde d'aujourd'hui qui est très administratif. La France, on le dit souvent dans plein de plateaux télé, dans les journaux, qu'elle est très administrative. La médecine n'échappe pas à cette règle-là et donc de comprendre justement comment naviguer dans ce monde administratif de demain. Donc ça, c'est le premier élément. Et puis évidemment, des éléments de rémunération. On avait demandé à avoir une rémunération qui est à l'acte, donc avec une rétrocession d'une partie justement de l'acte. qui a réalisé. Dans les négociations, c'est des éléments qu'on n'a pas réussi à obtenir. On a quand même obtenu une rémunération qui est similaire au docteur junior qu'on connaît déjà aujourd'hui qui sont à l'hôpital, avec une petite variation selon l'activité du docteur junior en ville. Mais bon, ça revient à peu près au même que la rémunération du docteur junior à l'hôpital. Par contre, la grande victoire qu'on a obtenue, c'est le fait que la permanence de soins ne soit pas obligatoire. C'est un grand débat d'ailleurs dans la profession médicale. chez les seniors. Nous, on était particulièrement opposés parce que déjà, la permanence de soins, elle n'est pas présente partout. Si elle est obligatoire, c'est qu'un interne qui est dans un interne stage qui n'en a pas, c'est-à-dire qu'il doit aller ailleurs pour la faire. C'est un non-sens. Donc, on militait énormément pour la voir qu'elle soit non obligatoire et que la rémunération surtout vienne dans la poche de l'interne. Et c'est le cas. C'est une grande victoire parce qu'au départ, quand même, ça, tout le monde ne le sait pas forcément, mais ça devait être une permanence de soins obligatoire et forfaitiser. Donc, voilà. On a quand même gagné beaucoup au champ.
- Speaker #0
Très bien, beau travail. Merci pour toutes ces précisions. Donc pour la quatrième année d'internat de médecine générale qui va intéresser les plus jeunes. Bravo, vous êtes bien arrivé à la fin de cette partie. La suite vous attend dans le prochain épisode. Pour ne rien manquer de Superdocteur, pensez à vous abonner dès maintenant à ce podcast. Et si vous aimez mon travail, le meilleur moyen de me soutenir, c'est d'en parler autour de vous, à vos consoeurs ou vos confrères. Enfin, un petit geste qui fait une grande différence. Laissez-moi une belle note de 5 étoiles sur votre application de podcast préférée. Ça m'encourage énormément et ça aide d'autres médecins à découvrir Superdocteur et partager ensemble des idées pour améliorer nos soins et enrichir nos pratiques. A très vite sur le podcast !