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TCA etc - Comprendre et lutter contre les troubles alimentaires

Petite fille en insécurité, adulte en restriction : le témoignage d'Éva E.153

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1h20 |01/08/2025
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Description


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D’aussi loin qu’elle s’en souvienne, Éva s’est sentie en lutte contre son corps et contre la nourriture, qui était à la fois sa pire ennemie et ce qui lui apportait le plus de plaisir.

Elle nous parle des différentes phases qu’elle a traversé et du moment où elle est passée d’un corps considéré en surpoids à une anorexie restrictive. 


Et de la façon dont cette pathologie impacte encore son quotidien de plein de façons différentes.

La question de la légitimité est très présente tout au long de notre échange, ce qui n’est pas rare lorsqu’on vit avec un TCA, puisque très en lien avec le fameux perfectionnisme.

Un grand merci à Éva pour ce témoignage fort, à coeur ouvert. 


Au programme : 


Présentation d’Éva 

Ses premiers souvenirs en lien avec le corps et l’alimentation 

Les différentes phases qu’elle a traversé
La sortie d’anorexie : le pacte avec son mari

Sa façon de manger aujourd’hui
Ce que je lui conseille de mettre au travail
Ce qu’Éva se souhaite pour l’année à venir
Ce qu’elle aimerait passer comme message 




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Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans TCA, etc., le podcast qui décrypte les troubles des conduites alimentaires et tout ce qui gravite autour, parce que ça n'est jamais seulement qu'une histoire de bouffe. Je suis Flavie Mitsono, et j'accompagne les mangeuses compulsives à devenir des mangeuses libres bien dans leur basket. Alimentation, peur du manque, insatisfaction corporelle, peur du jugement, du rejet, empreinte familiale, grossophobie, les sujets abordés dans ce podcast sont très vastes, et pour ce faire, mes invités sont aussi très variés. Retrouvez-moi aussi sur Instagram où j'aborde tous ces sujets au quotidien sur Flavie.mtca. Très belle écoute ! Salut Eva, bienvenue dans mon podcast, je suis très contente de t'accueillir.

  • Speaker #1

    Bonjour Flavie, moi aussi je suis très contente d'être là, je suis auditrice d'habitude, ça me fait bizarre mais je suis très contente.

  • Speaker #0

    Tu es donc de l'autre côté aujourd'hui.

  • Speaker #1

    C'est ça.

  • Speaker #0

    pour venir discuter avec moi. Et c'est bien chouette. Merci d'avoir répondu à mon appel à témoignages, puisque je suis toujours... Alors, j'allais dire, je suis toujours en recherche. Il ne faut pas que je le dise trop, parce que j'ai du retard dans mes mails. Et voilà. En tout cas, si je suis toujours en recherche, n'hésitez pas, vous qui m'écoutez, à venir m'écrire sur l'adresse mail dédiée au podcast pour qu'on discute ensemble. Par contre, ne soyez pas trop pressés d'avoir une réponse. Je peux mettre un peu de temps. Bon, tu connais un peu le principe du podcast, comme d'hab, je vais commencer par le commencement, c'est-à-dire te proposer de te présenter de la manière dont tu le souhaites.

  • Speaker #1

    Alors, je m'appelle Eva, j'ai 37 ans et des brouettes et je travaille dans la communication pour une collectivité territoriale, je suis rédactrice et je vis en couple avec mon amoureux depuis 10 ans. Et j'ai un petit garçon de 16 mois qui est le plus chouette du monde, évidemment.

  • Speaker #0

    C'est lui le plus chouette ? Je croyais que c'était mes enfants les plus chouettes du monde. On m'a menti.

  • Speaker #1

    Je sais que tes enfants, mon fils, c'est vraiment chouette.

  • Speaker #0

    Ok, trop bien. Et donc, on est là pour parler de troubles alimentaires, comme d'hab, sur le podcast. Ouais,

  • Speaker #1

    j'ai oublié de te dire ça.

  • Speaker #0

    Non, mais c'est hyper bien. C'est plutôt bon signe que tu ne te présentes pas avec le trouble alimentaire. Déjà, ça dit quelque chose de toi. et de ta relation au trouble alimentaire. Et donc, voilà. Je ne t'invite pas nécessairement à en dire plus maintenant, mais en tout cas,

  • Speaker #1

    c'est bien pour qu'on en parle. Côté trouble alimentaire, j'en souffre ou j'en suis habitée. J'hésite toujours un petit peu sur le terme. Selon moi, depuis l'enfance, par un trouble alimentaire, j'ai tendance aussi à dire... qui sont tous le même, qui a pris différentes formes dans la restriction, dans l'excès, dans beaucoup de choses, mais qui pour moi est la même chose depuis toujours et qui a pour, je ne sais pas si c'est une particularité, mais de jamais avoir atteint des niveaux, on va dire, spectaculaires. Jamais des poids extrêmes ou jamais des comportements extrêmes, mais quand même suffisamment présents pour être difficiles, voire impossibles à enlever et pour prendre beaucoup d'espace de cerveau.

  • Speaker #0

    Oui, ok. J'aime bien ta manière d'amener ça et je pense que tu le sais, je suis assez d'accord avec l'idée que finalement, le trouble alimentaire, c'est… une pathologie, un trouble alimentaire et c'est juste qu'ils s'expriment de manière différente. Oui,

  • Speaker #1

    complètement. Vraiment, c'est la même bestiole ou créature cérébrale, je ne sais pas comment la dire, j'ai utilisé différentes métaphores dans ma vie, mais qui utilisent différentes techniques selon les moments de notre vie, tant qu'on ne s'en est pas débarrassé. Tu vas manger plus, tu vas manger moins, tu vas manger ci, tu vas manger ça, mais c'est la même source, je crois. C'est la même chose.

  • Speaker #0

    Oui. Et avant ça, tu le sais, j'aime bien poser cette question-là pour savoir un peu comment ça se passait dans l'enfance. Donc avant son arrivée, je ne sais pas à quel âge il est arrivé, mais en tout cas, je me demande quels sont tes souvenirs, toi, dans le rapport à ton corps et le rapport à l'alimentation quand tu étais une petite fille ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne sais pas à quel âge il est arrivé parce que je n'ai pas de souvenirs avant. C'est-à-dire que mes premiers souvenirs... en rapport à l'alimentation, en rapport au corps, il est déjà là. Je ne sais pas si je vais peut-être lui donner un prénom à un moment pour faciliter l'échange. Il y a moi, mon premier souvenir, mon souvenir le plus ancien vis-à-vis de l'alimentation, c'est qu'il y a un sentiment de très ambivalent, où j'ai ce souvenir où l'alimentation m'apparaît en tant qu'enfant comme le plus grand plaisir qui soit possible, un truc, ce gâteau au chocolat, c'est la plus belle chose au monde, rien n'égalera jamais ce plaisir-là. un sentiment de danger immense du coup. Parce qu'à la fin de la part de gâteau au chocolat, j'en veux 8 autres, tout de suite. Alors, c'est évidemment pas quelque chose qui est… Je ne suis pas née avec ça, c'est sûr, mais par contre, je ne me souviens pas de comment c'est arrivé. Et mon rapport au corps, il est lié à ce danger. J'ai toujours souvenir qu'il y a un lien entre le… la deuxième part de gâteau au chocolat et le fait que j'avais l'impression de vivre dans une sorte de... d'être un peu la petite fille bougoule. Et je n'ai pas de souvenirs avant ça. Mes premiers souvenirs, je suis en train de... Ce n'était peut-être pas forcément mon activité principale, mais ils impliquent d'avoir des choses en trop, des parties en trop, de la chair en trop, du gras en trop. d'aussi loin que je me souvienne. Donc, je n'ai pas de souvenir d'alimentation intuitive, de « je mange ça et puis c'est bon » , et puis peu importe, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, de légèreté avec la nourriture. Il n'y a pas le souvenir de ça. Et tu te souviens quel âge tu as sur ces parts de gâteau au chocolat, ces souvenirs-là ?

  • Speaker #1

    Avant 6 ans, c'est sûr. À 3-4 ans, peut-être.

  • Speaker #0

    Ah bah oui, donc en fait,

  • Speaker #1

    tu ne peux pas avoir de souvenirs à l'eau,

  • Speaker #0

    en fait.

  • Speaker #1

    Ah non, non, non, c'est ça. Pour moi, c'est extrêmement constitutif de ma personne. Bon, Eva, elle est trop grosse parce qu'elle mange trop, quoi. C'est hyper intrinsèque.

  • Speaker #0

    OK. Et là, c'est un peu la question qui de l'œuf ou de la poule qui me vient.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Est-ce que le rapport au corps est consécutif de ton rapport à l'alimentation qui aurait pris place pour autre chose ? Ou est-ce que ton rapport à l'alimentation, il est consécutif de ce rapport au corps et d'une pression peut-être qui a été mise aussi ? En tout cas, j'entends qu'il y avait des réflexions, parce qu'Eva est trop grosse parce qu'elle mange trop.

  • Speaker #1

    Personne ne me l'a jamais dit à voix haute. Mais effectivement, je fais partie de ce cas de figure très atypique aussi. J'ai grandi entourée de femmes, ma mère et ma grand-mère, deux femmes qu'on entendait bien, méditerranéennes, donc avec un peu de un fort caractère et qui elle-même, comme beaucoup de femmes, était dans le truc de « il ne faut pas te commanger, il faut faire attention, etc. » J'ai grandi avec une mère qui avait des problèmes de poids, qui en a toujours eu, et qui en fait ne m'a jamais dit « ma fille, tu es trop grosse » , mais par contre qui, elle, disait toujours « moi, je suis trop grosse et je mange trop, je devrais faire attention » , ce qui du coup, pour un enfant et un cerveau en construction, boum, il se trouve qu'en plus je ressemble morphologiquement un peu à ma mère. le cerveau n'a pas eu besoin de faire 12 000 circonvolutions pour dire, « Bon, ben toi, t'aimes trop manger. » La troisième, la quatrième part de gâteau au chocolat que je voulais, c'est parce que quelque part, je pense que l'insécurité était là de base. Oui,

  • Speaker #0

    les aliments sur un piédestal, il n'y a rien de mieux que ce gâteau au chocolat.

  • Speaker #1

    Il n'y a rien de mieux. J'ai souvenir de ma grand-mère qui, après j'arrête avec le gâteau au chocolat, mais qui disait « Oh là là, si seulement ça pouvait avoir mauvais goût » . Je me souviens.

  • Speaker #0

    « Si seulement ça pouvait avoir mauvais goût » . Ouais, d'accord. Ok, donc déjà,

  • Speaker #1

    tu as présenté l'ambiance. Ouais,

  • Speaker #0

    non mais tu étais tellement petite, c'est incroyable.

  • Speaker #1

    Oui, parce que, mais parce qu'en fait ça n'a pas été fait volontairement, c'est juste que... Il faut que je précise aussi qu'en plus, j'ai une sœur qui a très peu de différences d'âge avec moi et qui est superbe. Ça joue, je pense. Et il est évident que n'importe quel adulte qui passe, enfin, oh là là, qu'est-ce qu'elle est belle. Moi, j'étais sympa. Et donc, je crois que tout ça se mélange et fait un truc internalisé. dans le fait qu'il y a eu assez vite entre nous, dans le regard des autres, ou en tout cas je le sentais dans le regard des adultes, des deux sœurs, où il y avait la belle et puis il y avait l'autre. Et je pense que ça a joué dans le côté... Toi, Eva, on ne peut pas te laisser seule avec un gâteau. Ce n'est pas une bonne chose.

  • Speaker #0

    Ta soeur, elle n'a pas du tout développé de problème ou un rapport un peu conflictuel avec son corps, l'alimentation ?

  • Speaker #1

    J'ai envie de dire qu'elle se situe dans une moyenne raisonnable des femmes dans notre société aujourd'hui. C'est-à-dire que des femmes qui sont vraiment... libres, tranquilles par rapport à leur alimentation et dans leur corps, il y en a si peu que je ne sais pas si, j'en connais peut-être pas personnellement ou une ou deux, enfin quasiment personne. Le niveau d'après ça, c'est des femmes qui se débrouillent et dont je sens que par contre aujourd'hui, elle n'a pas le cerveau aussi imprégné de ça que moi, je l'ai.

  • Speaker #0

    Ok. Elle est plus grande ou plus petite ?

  • Speaker #1

    Elle a un an de plus que moi. Donc,

  • Speaker #0

    comment t'expliques, comment t'expliques ou tu comprends, peut-être que tu n'expliques pas et que tu ne comprends pas, le fait que ce soit si différent pour vous ?

  • Speaker #1

    Parce que ma sœur est un soldat et qu'elle a des moments que moi, j'ai pris avec moi-même, même pour m'auto-flageller ou même pour me dire « Ah là là, t'aimes pas ? » pour manger, il faudrait moins manger, etc. Ma sœur est tellement dans le... On a eu une histoire familiale un peu compliquée avec un divorce parental très conflictuel, beaucoup de conflits familiaux. Et ma sœur, elle a été en mode soldat, casque bleu, je ne pense qu'aux autres. Donc elle a tellement dissocié par rapport à son corps qu'elle, elle l'a fait comme ça. Elle s'est mise en mode mission, je serre les autres et je crois qu'elle ne s'était pas intéressée.

  • Speaker #0

    Pas intéressée à quoi ? À qui,

  • Speaker #1

    à quoi ? Peut-être que moi, le moment où j'ai commencé à tripoter mes bourrelets, à me dire « je suis trop grosse, je suis trop truc, je suis trop machin » , elle, elle ne l'a juste pas fait, parce que quelque part, elle avait le cerveau ailleurs. Peut-être que morphologiquement aussi, ça se passait différemment, parce qu'on est toutes différentes et qu'il y avait moins de... de conséquences à observer sur son corps de comportement alimentaire. Aujourd'hui, je pense qu'elle n'est pas moins tranquille avec l'alimentation que la plupart des femmes qui disent en gros « oh là là, cet été, attention » . Ce genre de culture des régimes ordinaires un petit peu complètement banalisée.

  • Speaker #0

    Ok. Et que ce soit ta grand-mère, je ne sais pas si elle est toujours en vie, mais au moins ta maman et ta sœur, est-ce qu'elles savent ce que toi, tu as traversé et ce que tu traverses ?

  • Speaker #1

    Alors, elles l'ont su parce que j'ai traversé plusieurs périodes dans ma vie. Donc, j'ai eu une période de ce que l'IMC qualifierait de surpoids jusqu'à mes 25 ans à peu près. Simplement parce que je n'ai pas... Alors du coup, je fais un petit fil chronologique parce que sinon ce n'est pas très lisible. Je n'ai jamais été une enfant ni une adolescente au régime. On m'aurait laissé faire si j'avais entrepris, mais franchement, je n'en avais pas la détermination, même si je pense que j'emploie des termes qui ne me convainquent pas, mais je le dis pour aller vite. j'étais, et tant mieux, incapable de tenir un régime. J'ouvrais un magazine, je le faisais un jour, c'était fini.

  • Speaker #0

    Donc, ça veut dire que tu avais l'envie quand même.

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr. C'est-à-dire que toute ma vie jusqu'à mes 25-27 ans, j'ai dit, oh là là, j'arrive pas à tenir un régime, mais je suis nulle, quoi. Les autres y arrivent, quelle horreur. Moi, je suis vraiment inincapable, etc. Mais un jour, j'y arriverai. Un jour, ce sera le grand déclic. Un jour, ce sera le grand changement. Un jour, je perdrai les... Les 10-15 kilos qui m'empêchent d'accéder au bonheur absolu de peser 15 kilos de moins. Ah oui, oui, non, mais c'est vraiment stupide. Et j'ai grandi jusqu'à mes premières années de vie toute seule où j'étais un peu en mode… Peut-être dans ce qui a été l'alimentation la plus libre de ma vie de quand on commence à vivre seul et à acheter ce qu'on veut. Alors du coup, ça faisait des espèces… de choses qui ressemblaient à des compulsions de temps en temps. Et en même temps, je n'étais pas si malheureuse de ça. Donc, ce n'était pas si mal. C'était peut-être ce que j'ai connu de plus libre comme alimentation. Mais donc, bref, je mangeais trop par rapport à... à mes besoins en me disant mais je devrais faire autrement et puis un jour j'y arriverai, un jour je le ferai. Et puis autour de mes 27-28 ans a démarré très très très progressivement une phase de perte de poids au début, allez j'ai fait telle activité physique, j'ai fait un tout petit peu ça, je me sens bien, t'inquiète pas je fais juste un tout petit peu de sport. Mais pour quelqu'un qui n'a jamais réussi, je fais des guillemets dans les airs, à perdre du poids de sa vie et qui y arrive un tout petit peu, puis un tout petit peu, puis un tout petit peu, ça a représenté une espèce d'euphorie, de tranquillité. En plus, j'avais l'orgueil de le faire sans un protocole précis, un régime hyper, mais vraiment sur la durée, très lentement, c'est-à-dire sur deux ans, quelque chose comme ça, j'ai perdu 20 kilos. Mais lentement, tranquillement, en disant à tout le monde, mais c'est parce que je me sens tellement mieux, j'ai fait un peu de sport, je mange juste un tout petit peu moins, etc. Et cette chose, la peur de reprendre et de repartir dans la zone de la société des gens en surpoids, cette peur-là de repasser dans la catégorie des gens, genre Fede Guimard-Lair, trop gros. m'a fait basculer très mécaniquement dans une phase restrictive, où pour le coup, là, ça s'est vu. Et donc, pour répondre à ta question d'il y a 10 minutes, ma mère et ma sœur l'ont vu. Tout le monde l'a vu. Parce que là, je suis passée... Alors, il y a eu un diagnostic d'anorexie. On fait un peu vite, je trouve, mais je veux dire, techniquement, ça correspondait tout à fait aux symptômes d'une anorexie restrictive. Et cette période-là a duré, c'est toujours compliqué à dater parce que la période par laquelle on en sort est jalonnée de haut, de bas, mais deux ans.

  • Speaker #0

    Donc deux ans de perte de poids progressive, puis s'ajoute à ça deux ans d'anorexie.

  • Speaker #1

    Il y a peut-être une année d'intersection, on va dire trois ans.

  • Speaker #0

    En même temps, vu de l'extérieur, c'est quelque chose qui s'observe beaucoup. Parce que 20 kilos en deux ans, tu peux te dire 10 kilos par an, ce n'est pas tant. En fait, c'est énorme. Et c'est surtout qu'une perte de poids ne se maintient pas comme ça. C'est-à-dire qu'à la limite, perdre les dix premiers kilos. Mais tout de suite, quand tu as dit ça tout à l'heure, je me suis dit… La deuxième dizaine, à mon avis, il y a quand même quelque chose d'un peu plus restrictif qui s'était enclenché.

  • Speaker #1

    Très restrictif qui s'est enclenché. En gros, sur le tournant 2017-2018, je ne sais plus faire la soustraction, je ne sais plus quel âge j'avais, mais j'ai entamé un « oh, je fais un tout petit peu de sport de temps en temps » . Et on va dire qu'un an et demi plus tard, j'en étais à compter mes calories et à faire un truc hyper… hyper pointu avec un carnet où je comptais à l'avance de préparer mes tupperwares pour aller au travail. Et là, on était passé dans quelque chose de très, très, très typique, en fait, dans la restriction. La perte de poids est devenue intentionnelle. Puis, à basculer dans le « c'est même plus ce qui est important, ce qui est important, c'est de ne pas reprendre » , puis c'est devenu la peur du morceau de pain ou de salade. C'est ça. Mais, comme je le disais au début… Même, tout comme je n'ai jamais été en surpoids de façon spectaculaire, ce mot ne convient pas, mais c'est tout ce qui me vient, je n'ai jamais été ni en obésité, ni en surpoids, où les gens disaient quand même, fais attention. Je n'ai pas non plus été, en tout cas à l'époque, mais c'est aussi un des traits de cette maladie-là qui prend des formes différentes. Ça me semble inutile de donner des poids et des chiffres. très très rigueur, mais je suis descendue à un poids dont je me disais, c'est impressionnant, parce que quand on est dans cet état d'esprit-là, on a même le moment du défi de, ah oui, mais j'ai entendu tel témoignage, elle est descendue jusque-là, donc je ne suis pas vraiment malade, je n'ai pas de soucis.

  • Speaker #0

    Mais ça c'est ce que tu disais à l'époque, mais ce que tu dis aujourd'hui avec le recul.

  • Speaker #1

    Il est très fréquent que je n'arrive pas à dire à voix haute que j'ai été, que j'ai traversé une phase d'anorexie restrictive parce que la société est ainsi faite que de même qu'on se surveille les unes les autres la taille de jean, j'ai trop peur qu'on me dise « ah bon, t'es descendu jusqu'à quel poids ? » et qu'on me dise « ah ben ça va, c'est pas… »

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    parce que mon cerveau est complètement… constitué de ça, j'ai l'impression je ne suis, quand je raconte la façon dont je le ressens je ne suis pas d'accord avec moi-même en fait je trouve ça stupide de me dire tu n'as pas été assez maigre pour dire que tu as souffert d'anorexie parce que c'est ça et puis quand tu parles de poids zut

  • Speaker #0

    j'ai perdu le mot spectaculaire ben moi je me dis attends à un moment donné si tu as perdu une vingtaine de kilos Il y a quand même moyen. En fait, parce que si tu m'avais dit je suis montée très, très haut et donc j'ai reperdu 20 kilos, mais donc je n'étais pas non plus dans un sous-poids spectaculaire. Mais comme tu dis, je n'ai pas fait des poids très, très hauts. Si tu ne fais pas un poids très, très haut, mais que tu perds 20 kilos. Et puis, il y a autre chose que j'aimerais... Et puis,

  • Speaker #1

    ça me fait une morphologie méditerranéenne aussi qui fait qu'en fait, le poids de mon squelette, les hanches, la poitrine, des choses qui font que j'ai une morphologie qui fait que je ne peux... pas physiquement aller dans des poids qui sont parfois mentionnés dans les témoignages de l'extrême ou des choses comme ça. Physiquement, c'est-à-dire que très techniquement, je suis allée à mon minimum personnel. Mais oui. Parce que, de toute façon, je ne tenais plus debout, ça n'allait.

  • Speaker #0

    Mais donc, le poids était extrême et spectaculaire. Tu vois ce que je veux dire ? De toute façon,

  • Speaker #1

    il faut bien dire une chose,

  • Speaker #0

    c'est que le corps humain, notre corps, il n'est pas fait pour maigrir. Parce qu'on est le résultat d'années et d'années d'évolution. Nous ne sommes pas faits pour perdre du poids, encore moins beaucoup. Et en fait, si moi, là, qui suis autour de mon poids d'équilibre, je prends 20 kilos, oui, il va y avoir plein d'adaptations pour mon corps. En fait, ce n'est pas souhaitable pour mon corps, ce sera difficile, mais ça va aller. Je ne me dis pas que je vais tomber malade à coup sûr. Par contre, si j'en perds 20, je vais être fatalisée.

  • Speaker #1

    Ah ben, absolument.

  • Speaker #0

    Parce qu'en fait, notre corps est beaucoup...

  • Speaker #1

    plus fait pour s'adapter à des prises qu'à des pertes de poids et donc ça reste spectaculaire ce que j'avais fait et puis de toute façon le côté visible spectaculaire pathologique en fait se mesure de toute façon à mon incapacité à fonctionner au quotidien qui se voyait très clairement ou là bas oui ma famille s'en est rendu compte mon amoureux s'en rendait compte et le disait et attirer à tenter de tirer la sonnette d'alarme des mois et des mois avant ce Merci. point de bascule où j'ai dit bon ok ça va pas ça va pas pouvoir perdurer tout le monde se rendait compte bien sûr à mon travail je ne sais évidemment en améliorer j'avais plus de capacité cérébrale j'avais plus de mémoire plus de fondée en larmes pour un oui pour un non et j'étais pas j'étais pas du tout un être humain fonctionnel quoi c'est sûr

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui a marqué l'autre virage alors ? Parce que tu as parlé de ce virage de bascule dans l'anorexie et le virage de sortie d'anorexie.

  • Speaker #1

    Je crois qu'il y a un moment, parmi les nombreuses et nombreuses conversations que j'avais eues avec mon amoureux, où il me disait ça part trop loin, ça devient pathologique. Ce petit truc que tu avais commencé à faire pour te sentir bien, c'est complètement obsédant et tu ne penses plus qu'à ça. Je vois bien que tu ne penses plus qu'à ça, tu n'es plus là, tu n'es plus avec moi. Parmi ces nombreuses conversations, je lui dis mais non, mais non, mais non, ça va. Je crois qu'il y a un jour, enfin si je sais qu'il y a un jour où on faisait un trajet à vélo dans Paris à plat et où à un moment je n'ai plus pu pédaler du tout, je me suis assise sur le trottoir et je lui ai dit ok, d'accord. Oui, c'est vrai. Parce que c'est la maladie du déni aussi. Et donc, quelle que soit sa forme et son visage, on dit toujours non, non, ça va, ça va, ça va. Et là, je lui ai dit bon, ok. Et là, du coup, c'est fait un pacte avec lui où j'ai jamais réussi à trouver... Alors, j'ai un peu consulté une psychiatre, j'ai un peu consulté une psychologue, mais l'honnêteté me pousse à préciser que j'ai jamais vraiment réussi à... Je ne sais pas si c'est faire confiance à quelqu'un, mais je crois que j'avais un peu trop honte de ce que je faisais, de ce que je vivais. Et donc, j'ai beaucoup trop... miser sur mon amoureux comme soutien, comme pilier beaucoup trop parce que je lui donnais un rôle qui était beaucoup trop lourd pour lui Et c'est à lui que j'ai demandé de me renutrir, de cuisiner pour moi, de portionner les choses. Alors, c'est passé par plein de phases parce qu'il y a des fois où j'y arrivais, et puis des fois où je n'y arrivais pas, par des petits contrats de poids, par des contrats de poids un peu hebdomadaires. Et puis aussi, le contrat n'était pas atteint, des espèces de gages, de calories supplémentaires à gérer. qui était quelque part une reproduction des techniques qu'on a dans certaines hospitalisations, mais que du coup j'ai fait à la maison avec lui. Ça a eu plein de hauts, plein de bas, plein de j'y arrive, plein de j'y arrive pas, et ça a pris encore deux ans de ça va, de quasi-guérison, de rechute. j'ai plus exactement le détail en tête de mois par mois etc mais deux ans de ça va mieux de je repère de ça repart où mon cerveau n'était pas libéré, n'était pas convaincu parce qu'avec le fait de maigrir c'est allumé et ne s'est jamais éteint la peur de regrossir et ça je ne sais toujours pas comment l'éteindre Je ne sais toujours pas comment la tenir un peu à distance, la calmer, même argumenter contre elle. Et donc, j'ai fait des hauts et des bas. Mais au fur et à mesure, la vie passant, ma grosse motivation, c'était d'essayer de retrouver un cycle et la capacité, parce qu'on n'avait pas d'enfant à ce moment-là, d'essayer de retrouver un corps suffisamment en forme. pour avoir des cycles et pour pouvoir tomber enceinte un jour. Ça, ça a été dans ces années-là, ces deux années-là, de sortir vraiment de la phase restrictive, de la phase d'anorexie. Ma motivation principale, le truc qui faisait que j'arrivais à dire « Regarde pas, regarde pas, regarde pas ce que tu fais, regarde pas ce que tu manges, t'inquiète pas. » Ce n'est pas forcément une solution parce que du coup, j'ai déconnecté, mais je n'ai pas été dans une démarche de juste… être un peu dans mon corps, ressentir les... Je dis, bon, c'est pas grave. Il faut juste... Grosso modo, tant que t'as pas retrouvé un cycle, c'est que t'as pas encore assez repris. Regarde pas. Ou regarde et dis-toi que tant pis, mais parce que je voulais retrouver la possibilité d'avoir un enfant.

  • Speaker #0

    En même temps, dans ce que tu dis, il y a un truc important, là, quand tu dis... C'était peut-être pas l'idéal parce que je déconnectais, je regardais pas, j'étais pas connectée à moi. Je pense qu'en guérison d'anorexie, c'est pas possible de tout faire.

  • Speaker #1

    Oui, peu importe.

  • Speaker #0

    Je crois pas, sincèrement. Je crois que c'est ça quand il y a une grosse confusion, quand il y a des détracteurs de l'alimentation intuitive ou des outils de type alimentation intuitive qui disent que non, c'est pas... Quand on a des TCA, il faut pas, alors que c'est genre... la thérapie spécifique TCA, qui disent ouais mais en cas d'anorexie, effectivement en fait tu as pas demandé à une personne qui souffre d'anorexie de lui dire mais non mais juste écoute ton corps, enfin non bien sûr et je pense qu'il y a des phases donc je trouve ça quand même fort quoi de ce que vous avez mis en place. C'est fou et je me dis mais waouh, enfin effectivement faire ça en cours

  • Speaker #1

    couple votre couple a tenu donc oui non mais tu vois mais attention oui oui bien sûr on a une très très chaud et et ça a été très difficile ouais c'est à dire que lui c'était c'était énorme ce que je lui ai mis sur les épaules c'est c'est affreux parce qu'il sentait bien ouais je voyais un petit jeu mais il sentait bien que tout le la partie physique de ma reconstruction, et là je parle vraiment physiquement, de remettre de l'organisme, de remettre des calories dans la machine, je reposais ça entièrement sur lui, et je lui disais, je ne veux pas ça, si moi je n'arrive pas à le faire moi toute seule, à partir de rien, il faut que tu me donnes la béquille, et donc cette passion-là qu'il avait lui. tant pour permettre à la personne qu'il aimait de retrouver la santé que pour éventuellement la possibilité pour lui de construire une famille.

  • Speaker #0

    c'était beaucoup beaucoup et il y a eu des ouais ouais on a eu chaud c'est sûr qu'après ça a pris du temps de restabilisation mais on est encore très marqué par cette période par le souvenir de cette période et par le fait que je suis pas guérie du tout du gros trouble alimentaire mon corps est en sécurité c'est bon je suis plus en danger physique mais par contre je souffre toujours de ce qui est pour moi le même TCA qui s'exprime différemment aujourd'hui et c'est encore très dur pour nous au quotidien. Lui, il en a légitimement un peu marre de vivre avec ça. Et de le dire ? Bien sûr,

  • Speaker #1

    oui. Vous en parlez ouvertement ?

  • Speaker #0

    Oui. Oui, parce que bien sûr, j'ai au quotidien tout un tas de petits tocs alimentaires, de choses qui sont... des restes de ça, je fais des espèces d'obsessions qui sont très très faciles à identifier au quotidien et que lui, il s'en passerait. Oui, il me le dit, on en parle. Le trouble, il est là, il est entre nous, il est à la maison au quotidien, mais en tout cas, par contre, oui, ça, on en parle. Mais oui, pour revenir sur la partie renutrition, sur la phase réfléchis pas et mange, je suis complètement d'accord qu'effectivement, quand on se prépare d'anorexie, je pense qu'il y a un moment, en tout cas, il y a une phase très, très clé de toute façon, le moment de s'écouter, de tout ça. Il faut avoir un cerveau fonctionnel et quand il n'a pas à manger, le cerveau, il n'écoute rien du tout. Donc, bien sûr qu'il y a cette phase-là. C'est vrai que… Alors... Tous les cas sont des cas particuliers, mais dans le mien, comme j'ai très souvent, là je l'ai dit un peu vite, que jusqu'à mes 25-27 ans, j'ai été plutôt en surpoids qu'autre chose. Et ensuite, il y a eu deux, trois ans où j'étais en phase restrictive. En fait, c'est peu à l'échelle de ma vie. Moi, quand je regarde ma vie, quand je me souviens de l'histoire de mon comportement alimentaire, à l'échelle de ma vie, ce n'est pas ces trois années-là. c'est plutôt, je me réfléchis plutôt comme quelqu'un qui est quelqu'un de compulsif vis-à-vis de la nourriture, qui, en l'air, doit faire attention, à qui on ne peut pas faire confiance avec un paquet de gâteaux, etc. Parce que c'est comme ça que j'étais enfant, adolescente et jeune adulte. J'ai toujours eu un... J'en ai pas parlé tout à l'heure, quand on parlait de mon enfance et de ce que ça avait fait de moi comme mangeuse, tout ce qu'on disait par rapport à la construction de la nourriture, c'est mal et une femme, ça doit faire attention. Et qu'effectivement, bon, certes, c'est assez évident, mais je le dis quand même, ça a évidemment causé chez moi une incapacité totale à connaître ma faim, à connaître ma satiété. c'est ce qu'il y a tout à fait logique, mais ce qui a fait de moi une mangeuse, bon évidemment pas intuitive, et un peu comment dire, d'occasion.

  • Speaker #1

    Attends, qu'est-ce que c'est que ça une mangeuse d'occasion ? Je ne m'attendais pas à ça.

  • Speaker #0

    Ouais, c'est pas forcément un terme qui convient bien, mais c'est à dire que comme moi, donc je le disais à la... Au début, je ne sais évidemment pas ce que c'est une portion de gâteau au chocolat, mais je ne sais évidemment pas ce que c'est qu'une portion de gâteau au chocolat, ou à la fin, c'est bien, c'est suffisant, je ne sais pas. Enfant, moi, c'est… Pour moi, la portion, c'est la portion qu'on me mettait dans l'assiette ou qui m'était autorisée. À la fin de mon assiette… Je n'avais pas accès à mon cerveau, à mes sensations corporelles pour dire que c'était suffisant, que ce n'était pas assez. Je n'ai jamais affiné une assiette de ma vie, y compris dans ma période d'anorexie restrictive. Je faisais des assiettes de concombre, mais alors, elles étaient vides à la fin. Je ne sais pas, en milieu d'assiette, me dire que ça va là. Parce que c'est comme si ça a créé une sorte de précieusité. du fait de manger, s'arrêter de manger, c'est une occasion ratée. Alors que là, tu es dans une phase où c'est autorisé, va jusqu'au bout. Et donc, la mangeuse d'occasion, c'est par exemple s'il y a un moment quand aucun adulte ne regarde, il y a un bout de quelque chose qui traîne. L'enfant que j'étais ne se posait même pas la question de si j'en avais… Bon, évidemment, si j'avais faim, ce n'était même pas la question, mais même pas la question de si j'en avais envie. C'est parce que là, j'avais une fenêtre, personne ne me regarde. Il y a un des souvenirs les plus marquants et les plus… ridicule. Vraiment, en plus, j'ai honte de partager ce truc-là, mais en même temps, je pense que c'est tellement représentatif que c'est utile. Et j'espère que ma mère n'écoutera jamais cet épisode, mais ça m'est arrivé. Tu sais, quand t'es enfant, que ta mère a préparé ou ton père, en l'occurrence là, ma mère a préparé le saladier de pâte à crêpes et que tu obtiens le droit de... C'est moi qui fais cuire les crêpes, vas-y, va faire autre chose. Eh bien, de manger soit les crêpes parce que j'étais seule dans la cuisine à faire cuire les crêpes, opportunité, soit de manger quelques-unes des crêpes un peu ratées, ou la louche de pâte à crêpes dans la bouche, crue. Pourquoi ? Parce que j'avais trois secondes devant moi et que quelque part, il y a quelque chose dans mon cerveau qui s'allume de, je ne sais pas, c'est interdit.

  • Speaker #1

    Mais oui. C'est pas le choix.

  • Speaker #0

    C'est une forme de devoir,

  • Speaker #1

    en fait. Ça fait de la peine pour cette petite fille tellement en insécurité. Il y a quelque chose de tellement, tellement, tellement, tellement en insécurité chez cette petite fille qui, vite, ça y est, c'est le moment, il y a une ouverture.

  • Speaker #0

    Voilà, ouverture. Il n'y a plus de faim, il n'y a même plus d'envie. Il y a un peu de plaisir, mais pas tant. Et il y a une projection sur la nourriture de... d'autres insécurités, de tout ça. Mais c'est une chose qui me reste aujourd'hui. Alors, les variations de poids, la période restitutive que j'ai traversée, etc., fait qu'aujourd'hui, après avoir traversé tout ça, je suis un peu partie dans tous les sens au niveau chronologique, je ne sais pas si ça se...

  • Speaker #1

    Non, moi,

  • Speaker #0

    ça va. Mais ça fait qu'aujourd'hui, je suis… Tout ça cumulé, toute cette histoire-là fait qu'aujourd'hui, je suis une mangeuse un peu étrange quand même. Parce que, alors, les phases de restriction-compulsion, je les fais au quotidien. Mais c'est comme si les… Enfin, ce n'est pas des très grandes oscillations, en fait. C'est-à-dire que ce ne sont jamais de très grandes restrictions et ce ne sont jamais de très grandes compulsions. Mais ça marche quand même comme ça. C'est aussi pour ça que je t'ai contactée, parce que je me disais, je pense qu'on est nombreuses à vivre ça. On entend souvent des témoignages de gens qui font de l'hyperphagie, ou de gens qui souffrent de boulimie dans des espèces d'énormes compulsions, d'énormes crises. Pour moi, ça passe plutôt par des plus petites oscillations, c'est-à-dire qu'au sein d'un même repas. il peut y avoir une sorte de restriction-compulsion, restriction-compulsion. Ça peut passer par le fait de peser un bout de pain à côté de la salade que je me suis faite et ensuite, à la fin du repas, du coup, d'être en incapacité d'arrêter de manger. Pas parce que physiquement, j'ai plus faim. J'ai encore faim, parce que ça, ça va. Mais simplement parce que le cerveau, maintenant, à une manière de refuser le mécanisme de restriction et de punir le mécanisme de compulsion après mon cerveau n'arrive pas à faire un choix aujourd'hui je ne suis plus quelqu'un qui dit bon bah c'est comme ça règle extérieure je dois me restreindre pour tel ou tel objectif de poids et je ne suis pas libre d'avoir accès à un paquet de gâteaux librement. Je ne me sens pas libre de ça. Et donc, je fais plein, plein de petites oscillations qui donnent très concrètement ce qui, moi, me semble ressembler à ce qu'on pourrait appeler l'hyperphagie prendiale. Là, on est purement... Enfin, c'est pas un diagnostic que je fais, c'est une estimation à la louche moi-même. Mais dans le sens où... c'est très très difficile d'arrêter un repas c'est un deuil c'est une c1 c'est dire au revoir à quelque chose c'est c'est la même chose que quand j'étais petite fille donc en fait je suis revenu au début de la boucle je suis parfaitement Ce qui est normal. Ce qui n'a pas été traité n'a pas de raison d'avoir disparu. Aujourd'hui, je fais du... Ouais, je pense des petits excès à chaque repas.

  • Speaker #1

    Tu serais d'accord de donner des exemples concrets ?

  • Speaker #0

    Ouais, ouais, ouais. Il y a en fait... Un repas, pour moi, il est à peu près... portionné à l'avance, il est mis dans une assiette, j'y pense avant, au fait que, bon, il n'y a pas de, par exemple, il n'y a pas de plat au milieu de la table où chacun se sert, quand je cuisine, moi je fais des assiettes où je décide ce qu'il y a dans mon assiette, quoi, avant de manger, et ensuite, une fois que j'ai fini ce plat, en fait, il y a cette espèce de réveil de dopamine du « manger c'est chouette » parce que c'est vrai, manger c'est chouette, euh qui fait que je vais prendre le petit truc après. Je vais aller dans la cuisine prendre le petit carré de chocolat avec la dizaine d'amandes à côté. C'est un exemple parmi d'autres. Et au moment de me servir, je me dis toujours, tout va bien. Après, c'est terminé. Et puis, je peux me retrouver à faire 5, 6, 7 allers-retours dans la cuisine pour ramener mon assiette et à reprendre le petit n'importe quoi. qui peut être re du salé après le dessert, re de se resservir de... Ah ben, oh là là, j'ai mangé 10 amandes, c'était super, c'était tellement bien. Je les ai comptées au moment où je me suis servie mes 10 amandes. Tout ça pour retourner dans la cuisine, la main dans le pot directement. Alors là, tu ne comptes plus. Et du coup, il y a ce truc de ce qu'on appelle en général le foutu pour foutu, qui est du... Ah, tu as dépassé, c'est trop.

  • Speaker #1

    Tu as mangé ta onzième amande.

  • Speaker #0

    Ouais, on y aime et puis après de façon incontable parce qu'après ça peut partir un peu. Voilà. Mais en tout cas, dans ce côté du… Le moment où tu vas t'arrêter va être le moment de la prise de conscience, de l'autoflagellation, du c'était beaucoup trop, du t'aurais pas dû, etc. Donc, ce moment-là d'arrêter, sur le coup, mon cerveau souhaite le retarder. Ben oui. Parce que ça va être le moment où je vais me… m'engueuler tu t'engueules tu te promets de te reprendre en main je promets plein de trucs et même la promesse il est même fréquent que la promesse arrive en cours de j'ai pas envie de dire crise parce que parce qu'il y a des parce qu'il y a des personnes qui vivent des vrais épisodes de crise de compulsion où il y a des énormes quantités de nourriture et ça c'est vraiment je pense beaucoup plus douloureux que ce que je vis moi même physiquement et du coup je veux pas employer le même terme par respect pour euh... pour la douleur physique des personnes qui vivent des épisodes où tout le blacaripasse. Moi, c'est un peu trop, mais à chaque repas. Parce que,

  • Speaker #1

    tu disais que pendant, tu te promets aussi pendant. Ouais,

  • Speaker #0

    pendant, je me dis, typiquement, je peux retourner cinq, six fois à la cuisine. Disons qu'à la troisième fois, je me dis, oh là là, ça fait trois fois que tu te resserres d'un petit truc après le repas. Si c'est le soir, demain matin, pas de petit-déjeun.

  • Speaker #1

    Ouais, c'est parti.

  • Speaker #0

    Donc, si tu es pendant que je fais ça, tu peux être sûre que si je me dis ça, par exemple, la troisième fois que je retourne à la cuisine, il y en aura cinq de plus. Puisqu'il y a punition demain matin. Enfin, il y a... Oui,

  • Speaker #1

    mais tu connais le mécanisme.

  • Speaker #0

    Et je le connais. Et je le connais très bien. Et ça me rend tarée de me voir faire.

  • Speaker #1

    Mais du coup, qu'est-ce qui te manque ? Qu'est-ce qui fait que tu continues de tourner en boucle alors ?

  • Speaker #0

    Je crois... Je crois que je n'ai pas réglé et je n'ai pas d'idée pour le régler. Aujourd'hui, au niveau morphologique, je suis repassée dans quelque chose d'intermédiaire entre le poids de ma jeunesse où je n'avais plus tant surpoids et ma période head-down, etc. Je suis dans ce qu'on appelle une morphologie « bon » . qui passe inaperçu. Un peu classique, je n'ai pas envie de dire normal, c'est nul, normal. Je n'arrive pas à enlever de ma tête, et en fait il est possible que ce soit la vérité, c'est de me dire que si j'arrête de m'inquiéter, si je mange sans me dire punition demain, ou... pesée de glucides ce soir, eh bien, je vais... laisser faire la petite fille que j'étais et qui pouvait avaler des louches de pâte à crêpes, voilà, et il n'y a absolument plus rien pour m'arrêter et je vais à minima redevenir ce que j'étais avant d'un point de vue morphologique. Et ça aussi, c'est un vrai deuil à faire, un renoncement. un vrai renoncement à ce que ça implique au niveau de la vie quotidienne parce que c'est vrai aussi qu'il y a tellement d'obstacles quand on n'a plus un corps normé, quand on est un peu au-dessus, quand on est beaucoup au-dessus et je ne sais pas combien, jusqu'où j'irai et que je ne me débarrasse pas de la projection que j'ai. du regard des autres sur moi et que presque j'entends dans ma tête les gens penser la grossie elle s'est laissée aller, enfin bref tout ce qu'on entend dans sa tête quand on passe ou que dans mon cas on repasse parce que ce serait repassé dans une catégorie qu'on pourrait qualifier de surprenant mais là il ya plusieurs sujets

  • Speaker #1

    Il y a le sujet d'effectivement prendre du poids ou non, c'est-à-dire que moi, je ne sais pas où est ton poids d'équilibre et que si tu avais une alimentation complètement libre, peut-être que tu serais au-dessus du poids que tu fais aujourd'hui. Peut-être que pas du tout, parce qu'en fait, tous les efforts que tu fais pour, quand tu dis te punir, donc les efforts que tu fais pour rattraper le tir le lendemain ou quoi, recréent de la, on ne va pas dire de la compulsion, alors on va dire de la suralimentation. qui recréent de la restriction, qui recréent de la suralimentation. Et donc, finalement, ça crée un espèce d'équilibre qui ne serait peut-être pas si loin de tes apports caloriques si tu mangeais sans restriction. Et donc, voilà, il y a le sujet vraiment prise de poids ou non. Mais pour moi, le sujet important, là, c'est que tu projettes, dans le fait de lâcher le contrôle, tu projettes une situation dans laquelle... tu étais déjà dans le contrôle, d'une manière ou d'une autre. Alors, il y avait un contrôle, déjà qui était bien internalisé, je pense, mais qui venait de l'extérieur, mais qui était très internalisé dès petite fille. C'est-à-dire que tu projettes, tu te dis, si là, demain, je ne suis plus dans... Comment tu as dit ça ? Si je ne m'inquiète plus. En plus, c'est intéressant parce que tu as dit, si j'arrête de m'inquiéter sur mon poids et d'avoir tous les comportements qui vont avec, alors je vais revivre. Parce que je vivais petite fille. Mais petite fille, tu t'inquiétais pour ton poids. C'est bien ça le problème. En fait, tu compares ta situation d'aujourd'hui. Tu te dis, si je change ma situation d'aujourd'hui, alors je revivrai celle d'hier. Mais celle d'hier, c'était la même.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Ce n'était pas de la liberté. Il n'y avait rien de... Tu vois ?

  • Speaker #0

    Non,

  • Speaker #1

    non. Ce n'est pas comme si tu me disais, moi, j'étais petite fille. hyper libre comportement alimentaire normal au sens de réguler et tout ça et j'étais dans ce qu'on appelle le surpoids et bomba fait chier j'ai pas envie d'y retourner parce que voilà on est dans une situation privilégiée gens dans la norme bon bref tout ça on le connaît mais non là en fait c'est pas ça c'était pas tu avais déjà un trouble alimentaire en fait oui absolument absolument donc effectivement il ya aussi ce truc de

  • Speaker #0

    La liberté, la vraie liberté, il y a un inconnu total.

  • Speaker #1

    Oui, comme pour la majorité des femmes, parce que même celles qui l'ont vécu un peu dans l'enfance, en fait, c'est comme si c'était un monde à part, l'enfance. Et puis, tu es dans l'enfance, certaines nanas ont vécu ça. Je peux manger ce que je veux, machin, mais je vois ma mère, ma tante, Micheline, tout le monde, la maîtresse à l'école, tout le monde fait attention. Quand je deviendrai une femme, je ferai attention comme tout le monde.

  • Speaker #0

    Oui, et puis c'est tellement internalisé, c'est tellement partout, c'est tellement tout le temps dans ma famille, dans la famille de mon amoureux, le truc de « Oh, quand même, demain, il faut aller courir. » Enfin, « Tiens, quand même, ce soir, je ne mange pas. » Mais au travail, mais partout, en fait. Je me rends compte depuis que j'ai… Parce qu'en fait, mon amoureux me dit, même plus que toi, il a raison, je suis tout à fait d'accord avec vous deux, il me dit « Mais tu as toujours… » Quand j'étais en phase d'anorexie restrictive, ils me disaient « mais enfin aussi, tu étais anorexique ! » C'est juste que là, ça se voit, mais tu te comportais quand même. Enfin, je veux dire, c'est quand même le truc de… Les louches de pâte à crêpes, pardon, je reviens à chaque fois sur les mêmes exemples, mais je veux dire, c'est un truc de compulsion lié à la restriction.

  • Speaker #1

    est lié à l'insécurité.

  • Speaker #0

    Tu l'as toujours eu, ce truc-là. Moi,

  • Speaker #1

    je te dirais, priorité, travailler sur l'insécurité alimentaire et sur tes sensations alimentaires. C'est-à-dire que, même sans rien changer aujourd'hui, à ta manière de te nourrir, tu peux déjà, par des petits exercices du quotidien, t'entraîner à aller ressentir des choses. Pour t'entraîner... à renouer avec ça parce que tu n'es pas cassé. Je suis persuadée que tout fonctionne très bien, c'est juste que tu as été déconnecté de ça dès la petite enfance. Mais tu as cette capacité à ressentir le rassasiement, mais par contre, ça va demander plein de petites expérimentations. Et en fait, ça commence par ressentir le goût vraiment des aliments, te dire sans aucune volonté dans un premier temps de dire, Allez ! Je me pose, je déguste en pleine conscience, comme ça, je vais pouvoir m'arrêter. Non, c'est juste, c'est trop cool de manger un bon aliment. Et c'est quoi son odeur ? C'est quoi sa texture ? Quel goût il a ? Tiens, à la dixième bouchée, est-ce qu'il a le même goût qu'à la première bouchée ? D'être dans du jeu, en plus, mettre un truc un peu léger, c'est du jeu. Il n'y a aucun enjeu. Ce n'est pas, je fais ça pour... Genre, c'est de l'entraînement. En fait, tu as besoin de t'entraîner à revenir à toi dans ton corps. Ça va passer par être de plus en plus fine sur tes sensations de faim aussi. Parce que le rassasiement, il est très dépendant de la sensation de faim. Mais moi, je te dirais bien, mets un peu du jeu, quelque chose de léger pour retrouver quelque chose de plus vécu dans ton comportement alimentaire.

  • Speaker #0

    Ce qui est fou en plus, c'est que j'ai l'impression de... C'est quoi The Child Jekyll and Miss Hyde ? Les sensations, on va dire gustatives ou les goûts des aliments, je cuisine pas mal, j'aime beaucoup cuisiner, je fais attention aux produits que je mange. Alors certes, pour le côté bio, la santé, tout ça, mais c'est pour le goût aussi. J'ai toujours aimé des choses qui étaient bonnes. J'ai jamais, ou pas très souvent, fait des espèces de compulsions sur des trucs un peu nuls ou que je n'aimais pas vraiment au goût. les aliments je les cuisine je les les travail et puis sur les et donc tout ce qui est début de repas pour moi je suis en pleine conscience c'est génial je sens le romarin je sens l'origan c'est super il ya du moelleux il ya du ça il ya du truc et à un moment du repas il ya un switch qui se passe où j'ai l'impression de d'un gouffre je sais pas comment le dire autrement mais qui s'ouvre à l'intérieur de moi C'est comme si j'avais un chrono pour faire rentrer le plus de nourriture dans un temps limité. Il y a un truc de...

  • Speaker #1

    Peut-être que c'est relié justement au changement de goût des aliments. Parce que c'est vraiment le premier... C'est un super outil pour le rassasiement. Les aliments, ils n'ont plus le même goût. Il y a des enfants, moi, ça me fait trop rire. En fait, tu l'as peut-être déjà vécu avec ton enfant ou ça viendra. Tu as le côté « Ah ouais, trop content de manger un truc, il mange, il mange. » Et puis, le visage change au bout d'un moment. Soit il a mangé trop vite et il n'a pas eu le temps de se rendre compte du changement. Et à la fin, il va te dire « Ah non, je n'aime pas ça. »

  • Speaker #0

    Oui, alors qu'il vient de s'en descendre une demi-heure.

  • Speaker #1

    « Je n'aime pas ça. Tu viens de manger toute ton assiette. Tu m'as demandé de te resservir. » Et en fait, bouf !

  • Speaker #0

    Ça veut dire « j'en veux de change. »

  • Speaker #1

    Le goût change. Et là, il est allé un peu trop loin parce qu'il est dans le dégoût. mais en fait le goût de l'aliment change et peut-être que quand le goût de l'aliment commence à changer pour toi, inconsciemment, tu sais que c'est la fin du repas et là, ça active l'insécurité.

  • Speaker #0

    C'est ça. C'est déjà fini, mais c'est trop difficile.

  • Speaker #1

    Et c'est là où il faut bosser sur la sécurité. Et la sécurité, elle passe par plein de choses. Elle passe par le fait de sentir que tu as le droit absolu de manger n'importe quel aliment, aussi souvent que tu veux. et d'avoir ces aliments-là chez toi. Alors là, je te le dis comme ça, forcément que tout faire d'un coup, ça paraît compliqué, mais en gros, la sécurité, elle passe par ça, de manière à après même aller te la verbaliser, cette sécurité. Oui, là, le repas, il se termine, OK. Sauf que si j'ai encore envie de manger cet aliment dans une heure ou dans deux heures, je me donne le droit d'aller en remanger. Oui,

  • Speaker #0

    j'ai le droit d'y retourner.

  • Speaker #1

    Et en fait, c'est un travail sur du long terme, bien sûr, encore une fois, d'aller ramener de la sécurité parce que c'est ça qui s'active. Mais attends, moi aussi, je vais y revenir à l'exemple de la louche de pâte à crêpes, mais c'est la petite fille qui est tellement insécurisée. Les aliments... qui ne sont pas disponibles, qui sont... Ou les regards pleins de reproches. Enfin, tu vois, tout ce truc hyper insécurisant qui fait que, vite, vite, vite, vite, vite, ça va disparaître. Et puis, en fait, comme en plus, toi, tu te dis dans ces moments-là, quand tu sens que ça commence à partir en vrille, tu t'en rajoutes une couche. Tu te le dis et que ça va disparaître au lieu de te dire...

  • Speaker #0

    Parce que je vais le faire disparaître moi-même demain.

  • Speaker #1

    T'en auras autant que tu voudras. T'es en train de te dire, alors là, ma grande, demain, privé de petit-déj. Et voilà. Donc en fait, tu joues le rôle de ta propre maman à l'époque, tu vois, qui vient dire « ah ben non » . Et en fait, ça appuie encore sur l'insécurité qui va appuyer sur l'urgence, qui va appuyer sur la nécessité de se remplir, quoi.

  • Speaker #0

    Oui, oui. Et ce truc-là d'insécurité, je sens que c'est… Enfin là, mon corps est en train de me dire… C'est très subtil et c'est pas hyper visible, mais moi, je le vois. mon corps est en train de m'indiquer que c'est ça la gonfle et c'est bon ça va là c'est à dire que ces trucs de mini restriction mini compulsion mini restriction mini compulsion qui varie un peu mon corps est en train de m'indiquer par des petits signaux juste le fait que non mais ça va je prends un tout petit peu de poids en ce moment tout ça n'est pas grave évidemment c'est C'est juste que... Mon corps me signale que ces petites conneries de peser ton morceau de pain, tout ça pour finir dans le paquet de gâteaux, pour sauter le petit déjeuner le lendemain, pour faire ci, pour te flageller toute la soirée, tout ça. Mon corps me dit, ma grande, ça ne marche plus vraiment là pour contrôler ton poids, que je gardais stable avec mes dents et en raclant avec mes ongles depuis quelques années. je sens que là c'est plus possible, c'est de moins en moins possible. J'ai de moins en moins de prises et vraiment tant mieux. Enfin, sur le fond, je pense que c'est terrible. C'est un sentiment d'échec que je désapprouve mais que je ressens.

  • Speaker #1

    Oui, mais ce n'est pas toi que ça met en échec, c'est ce mécanisme merdique en fait.

  • Speaker #0

    Voilà. mais que j'ai tellement internalisé que je le vis un peu comme une partie de mon identité mais oui mais jamais t'as eu l'occasion de voir que ton corps il savait faire,

  • Speaker #1

    mais t'imagines la puissance du truc quand au lieu de peser ton bout de pain tu vas t'autoriser à manger la demi baguette si t'en as besoin à ce repas là, si t'en as envie et puis peut-être que le soir, même si le soir tu remanges de la pizza ou je sais pas quoi et puis qu'en fait de manière très fine, tu vas te rendre compte que ça s'équilibre, que ton poids s'équilibre, que tu vois, il n'y a pas de variation. Et en fait, la puissance du truc, quand tu vas te rendre compte que tu peux te faire confiance, que tu peux avoir une relation de confiance avec ton corps et ta propre régulation, c'est incroyable.

  • Speaker #0

    Et cette phase-là, alors déjà, je ne sais pas comment éteindre le cerveau de la phase de « vas-y, ce n'est pas grave, continue de… » qui passe, je pense, pour ma part, évidemment… la phase de lâcher le contrôle, je ne sais pas bien comment on fait, mais je ne sais pas si ça se décide un jour ou si ça se fait progressivement, mais ça va passer, comme tu le disais, par une pizza dans l'assiette, j'en sais rien, un soir, deux soirs, trois soirs, et dans un premier temps, et c'est normal, je pense, la petite fille en moi va terminer la pizza parce qu'elle est là et qu'insécurité, etc. avant peut-être éventuellement d'en laisser une part parce que j'ai plus faim, parce que je suis rassasiée, parce que tout ça, parce que j'aurais découvert peut-être ça, cette première phase-là de « waouh ! » Bon, elle est très effrayante.

  • Speaker #1

    Oui, mais en même temps, même maintenant, même quand tu y penses maintenant, est-ce que tu penses que si je te sers de la pizza tous les jours pendant 4-5 jours, tu vas être contente de manger ta pizza et tu vas… Te jeter dessus même au bout du quatrième jour ?

  • Speaker #0

    Contente, non. mais il est probable que pendant 4-5 jours je les termine toutes, oui oui, parce que mon cerveau n'aura pas encore compris que après la pizza il y a punition.

  • Speaker #1

    Peut-être ou peut-être pas, ça dépend parce que si tu fais ça en disant derrière je ne remange plus jamais, effectivement, mais...

  • Speaker #0

    Si il y en a deux qui reviennent le lendemain c'est sûr que ça peut appuyer dans le cerveau un truc de non non ça revient.

  • Speaker #1

    Mais si ton congèle il est blindé de pizza et que tu dis bah ok j'ouvre mon congèle, ok, bon bah là je suis encore dans mon exercice, je suis censée manger une pizza, j'en ai envie ou pas ? Oui j'en ai envie, non j'en ai pas envie. Et en fait d'avoir ton truc plein de pizzas et d'être dans cette autorisation et de te dire ok, si j'en ai envie, j'en mange. Si j'en ai pas envie, je suis pas obligée. Par contre là si j'en ai envie, j'en mange. Et de renouveler le truc, tu pourrais être surprise en fait, sincèrement, de la vitesse à laquelle ça peut aller quand même. Alors, ça ne veut pas dire que tous les problèmes sont réglés et que ça y est, il n'y a plus d'insécurité alimentaire parce qu'elle s'est immiscée avec plein d'aliments. Mais tu n'as pas non plus besoin de refaire tous les aliments du monde. En fait, la sécurité, à un moment donné, elle va s'installer. Mais oui, il y aura peut-être la pizza et puis le pain et puis le chocolat et puis voilà. Mais l'idée aussi, c'est d'associer ça à quelque chose de... Alors, j'allais dire à la dégustation, mais... la dégustation dans le but de te faire un cadeau. En fait, tu n'es plus une petite fille en faute qui doit manger super vite sa pizza. Le but, c'est que là, tu es une adulte qui aime les bons produits, qui adore sentir les différentes saveurs dans son plat. Et que quand tu manges de cette manière-là, même une pizza, tu peux la manger de cette manière-là. Même, tu vois, plus ça va aller, plus tu seras en mesure de le manger de cette manière-là. Mais oui, peut-être que les... Deux, trois premiers soirs, tu vas la manger vite, tu vas la manger entière et que ce sera compliqué.

  • Speaker #0

    Oui, et l'enjeu, c'est qu'à la fin de cette première, de cette deuxième soirée, il n'y ait pas de... C'est mal, tu n'aurais pas dû. Et c'est cet état d'esprit-là que je trouve difficile à atteindre.

  • Speaker #1

    Mais c'est aussi tout l'intérêt pour moi d'être accompagnée sur ce cheminement, tu vois. Parce que les pensées, elles vont arriver. Les pensées, elles vont venir. Elles vont te dire, tu fais de la merde, mais qu'est-ce que tu es en train de faire ? Mais tu vas grossir, mais n'importe quoi. C'est normal. Elles font leur job. Elles font leur job de pensée qui croit t'aider, te protéger.

  • Speaker #0

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #1

    Tu n'es pas contre toi, tu n'es pas en train de jouer contre toi. Tu essaies de te débattre de trucs. Ces pensées-là, elles ont une valeur. protectrice. Parce que même ton TCA a une valeur protectrice. Oui,

  • Speaker #0

    tout à fait.

  • Speaker #1

    Mais elle ne fonctionne pas. Là, aujourd'hui, tu te rends compte que ton mécanisme est assez limite, que ça ne fonctionne pas, que ça a quand même bien abîmé ta santé au global, ton estime de toi, enfin, plein de choses, ta confiance en toi. Donc, voilà. Et c'est ça qui est important, c'est de se rendre compte que ça ne fonctionne pas. Puis, ça tu l'as déjà vachement bien fait, de démêler tout le système, tu vois. Ok, ces pensées restrictives qui débarquent sont celles qui vont faire que je vais me taper des compulsions et que au final, je risque même plutôt plus de grossir. Enfin voilà, puisque la peur derrière, c'est « ah, on va pas se grossir » . Puis en parallèle de tout ça, c'est trop bien aussi de bosser sur « attends, c'est quoi cette peur complètement irrationnelle ? » Parce que oui, il y a la société dans laquelle on vit qui est grossophobe, je suis la première à essayer de le crier sur tous les toits. Il y a vraiment une responsabilité collective derrière le TCA, mais il y a aussi toi dans ton histoire, à quel point c'est ancré en toi qu'il y a une perte de valeur quand tu grossis.

  • Speaker #0

    Oui, j'ai presque même l'impression que… En même temps, je crois que c'est possible parce que j'ai entendu plein de gens réussir à avancer. par des thérapies comportementales et que c'est vraiment l'action, ressentir dans son corps des choses différentes qui fait avancer aussi. Et en même temps, je crois que fondamentalement, tant que je n'ai pas débunké vraiment ce truc de si tu es grosse, tu es moche et si tu es moche, tu ne seras pas aimée. Je le fais vite parce que je vois l'heure qui file et que je me dis résume un peu. J'ai l'impression que ça bloquera toujours l'avancée.

  • Speaker #1

    Moi, je ne crois pas. Je crois que si on devait attendre de ne plus avoir cette peur viscérale de grossir pour guérir d'un TCA, personne n'en guérirait.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    t'es obligé de y aller avec cette peur de grossir. Et en fait, c'est sur le chemin de guérison que t'apprends aussi à la déconstruire et aussi à la regarder un peu différemment. L'autre jour, je faisais un groupe de paroles dans mon programme d'accompagnement, et le thème, c'était gérer le culte de la minceur et la diet culture. Parce que c'est un vrai sujet sur le chemin de guérison. Toi, tu déconstruis des trucs, mais comme tu le disais, tout le monde autour a ses discours.

  • Speaker #0

    Il faut se lalomer.

  • Speaker #1

    Et à un moment donné, il y a une des personnes que j'accompagne qui dit, putain, mais moi, à un moment donné, aujourd'hui, je suis en mesure de me dire que je préfère être libre et grosse que mince et prisonnière toute ma vie de tout ce merdier. Et je sais que ça a résonné pour moi. plusieurs, c'est une phrase qui est forte qui est inentendable pour tout un tas de gens dans les troubles alimentaires et attention je suis pas en train de dire et c'est pas ce qu'elle voulait dire qu'on a deux choix dans la vie contrôler tout ce qu'on mange ou être grosse c'est pas vrai, c'est pas ça mais cette peur là de grossir à un moment donné quand tu découvres la liberté, la vraie liberté tu parlais de charge mentale au début de ouais de ton témoignage, de la place que ça prend dans ta tête, quand tu commences à alléger ça et que tu commences à te sentir libre, de manger ce que tu veux, à être plus présente dans les discussions, à avoir plus d'énergie pour n'importe quel projet, pour avoir l'impression d'exister plus toi, peut-être que tu n'auras toujours pas envie d'être grosse, tu n'auras toujours pas envie de grossir, mais ça n'aura peut-être pas tout à fait la même importance dans ta vie si tu prends deux kilos.

  • Speaker #0

    C'est clair qu'il y a quelque chose dans la façon dont on sait tout ce... construit l'image qu'on a de soi par rapport ou non au regard qu'on a senti des autres. Il y a quelque chose qu'on construit tous différemment et que moi, je sens que j'ai fait ça un peu mollement ou avec des fondations un peu cartonneuses sur l'estime de moi dépend du regard que je lis, de l'image que je crois lire dans le regard des autres. quelqu'un qui... Je préfère être libre et grosse. Je l'applaudis et je l'admire et je lui trouve un courage que je n'ai pas ou pas encore. Et on est tellement plus nombreuses, effectivement, à être... Franchement, je le vis comme une lâcheté.

  • Speaker #1

    Oui, mais en le disant comme ça, tu reprends un versant très individuel. Alors que je suis d'accord avec toi, je pense que la majorité des femmes sont soumises comme ça au regard de l'autre. Mais on est construite comme ça. C'est comme ça qu'on nous fait grandir. C'est comme ça qu'on nous apprend à devenir des femmes. Et du coup, tu parles de lâcheté, je trouve ça dur comme mot parce que la responsabilité, elle est collective, elle est sociétale, en fait. C'est hyper difficile de sortir de ce truc-là. Hyper, hyper, hyper difficile.

  • Speaker #0

    Ouais, et bien, celles qui le font, je... Je les admire vachement et je les trouve tellement courageuses. Je veux être à vos côtés, mais je ne me sens pas assez solide.

  • Speaker #1

    Moi, je crois que ce qui aide, elle le disait, une chose qui l'aide, c'est d'être dans une forme de militantisme. En fait, elle a décidé de plus rien laisser passer quand elle parle avec des gens. Mais d'ailleurs, c'est ce que je lui avais dit, il faut aussi beaucoup de courage, beaucoup d'énergie. Et en fait, elle m'a dit « Ah non, mais moi, aujourd'hui, ça m'en donne de l'énergie de ne pas laisser passer les petits mots, les réflexions, les machins. » Et donc, elle est dans un truc un peu militant. Et en gros, elle avait dit autre chose. Si tu écoutes l'épisode, tu vas rigoler. Comme quoi, je m'en souviens bien. C'était très intéressant ce qu'elle disait. Elle a dit autre chose aussi. C'est qu'elle a parlé de groupe d'appartenance. Et elle a dit qu'elle s'était trouvé un autre groupe d'appartenance, que celui, tu sais, de la femme là, au régime, à vouloir vraiment rentrer dans les cases. Et que du coup, c'est aussi un autre groupe d'appartenance que ces personnes qui décident de sortir de ce cadre-là et de dire, en fait, moi, vos injonctions, vous pouvez vous les mettre où je pense, j'ai envie de vivre libre, quoi. Et que je sois grosse, mince, grande, petite, en fait, tu vois.

  • Speaker #0

    Et puis surtout, on va dire, mon regard, mon... estime de ce que je fais, de ce que je suis, me suffit. Et je me fous un peu de ce que vous pensez, de comment je m'alimente ou de ce à quoi je ressemble.

  • Speaker #1

    Je pense que ça, c'est un peu utopique de se dire que notre regard suffira. Je pense que c'est normal qu'on ait besoin des autres. Par contre,

  • Speaker #0

    on peut se sentir validée par plein d'autres choses,

  • Speaker #1

    au sujet de plein d'autres choses que la forme de ton corps. Tu vois ? Oui, oui. C'est forcément déjà le cas, de toute façon.

  • Speaker #0

    Peut-être. C'est vrai que pour le coup, c'est tellement vieux, c'est tellement constitutif de ma personne, qu'il y a toujours un... ce bruit de fond derrière toute chose que je fais, même des choses qui n'ont rien à voir avec comment je m'alimente ou comment je ne fais pas de sport, mais il y a toujours un truc de « tu n'y arrives pas, tu n'es pas assez bien de toute façon » puisqu'il y a cette espèce de péché originel qui a teinté tout ce que j'ai fait dans ma vie. Je pense qu'il y a vraiment un truc en l'occurrence là, il y a un vrai enjeu de renaissance sur le... c'est peut-être mettre beaucoup de pression au process, mais il y aurait un... j'ai toujours eu un peu peur de faire toute chose parce que il y a cette espèce de sentiment d'échec originel qui me fait me dire quoi que je fasse, y compris professionnel, loisirs, etc., activités, je me sens légitime de rien. J'ai toujours eu ce truc de… comme à l'époque pour les régimes. tu ne vas pas y arriver, ne commence pas. Je suis une grande peureuse de la vie, par exemple. Il y a plein d'activités, j'en sais rien, il y a des tas de gens qui me disent, j'ai essayé le canyoning, j'ai essayé ça, j'ai fait ce machin. Il y a des tas d'activités ou de choses que j'aurais pu avoir le désir de faire dans ma vie, je dirais, non, je n'oserais pas faire ça. Il y a quelque chose qui teinte tout, mais ce qui rend d'autant plus...

  • Speaker #1

    enviables de le résoudre ouais mais peut-être aussi que là il y a la nécessité de regarder tout ce que malgré tout ça t'as déjà fait parce que moi je sais pas grand chose de toi mais je sais que t'as un emploi, je sais que t'es en couple, je sais que t'es maman et donc ça veut dire que tout ça t'es forcément allé faire des trucs qui te faisaient hyper peur t'as tenté des aventures donc quand même la grande aventure de devenir maman et que au quotidien il y a des tas de choses que tu réussis et Je suis à peu près sûre qu'il y a des gens qui te renvoient ces réussites. Après, peut-être que c'est compliqué d'accueillir. Et c'est peut-être même compliqué pour toi de voir tout ce que tu as déjà fait de génial. Oui,

  • Speaker #0

    c'est très compliqué. C'est pas évident d'être dans le moment pour moi. Tout ça est le même sac de nœuds. Mais par rapport à mon enfant, par exemple, je sens que le TCA est venu vraiment se foutre au milieu de mon postpartum de façon très compliquée. Et j'ai mis plus de temps, je le sais, que si je n'avais pas de TCA à connecter avec lui. ça crée beaucoup d'émotions on est passé au point Godwin on parle de mon fils chaque sujet où je te dis moi je suis sûr que tu fais plein de choses géniales,

  • Speaker #1

    tu vas pouvoir me dire à quel point il y a des trucs que tu fais pas assez bien et tu vois là on met le doigt sur un truc c'est à dire que c'est une certitude qu'il y a des tas de choses que tu fais pas bien, c'est à dire à ta façon et que c'est largement suffisant et que les gens autour de toi ont sans doute énormément de très bonnes raisons de t'aimer d'avoir envie de passer du temps avec toi et que ça me semble important d'aller connecter avec ça tout ce que tu es déjà,

  • Speaker #0

    tout ce que tu fais déjà oui oui oui c'est effectivement un trait de personnalité qui est très souvent cousin avec le TCA du bien c'est pas assez si c'est pas si c'est pas fait le mieux possible je sais pas comment le dire de ce qu'on appelle rapidement le perfectionnisme je voulais pas dire perfectionnisme parce que je trouve que les gens qui se disent perfectionnistes ils savent pas ce que c'est vraiment en tout cas peut-être qu'ils arrivent à faire les choses parfaitement ce que j'ai pas le temps de savoir faire

  • Speaker #1

    ok ouais bon en tout cas moi j'aimerais bien savoir ce que tu te souhaites là pour l'année à venir si tu t'imagines en juin 2026 Dans quoi tu te projettes ? Qu'est-ce que tu te souhaites ?

  • Speaker #0

    Je voudrais bien, parce que je n'arrive pas encore à réfléchir en me regardant moi-même. C'est encore trop compliqué. J'ai toujours construit une opinion de moi en disant que pensent les autres. J'aimerais bien maintenant que… que cet enfant merveilleux qui existe puisse. Tant qu'à faire, j'aimerais bien que... Là, il a 16 mois, il va commencer à construire bientôt, finalement, des souvenirs et puis des consciences, des conceptions de qui est son père, qui est sa mère. J'aimerais bien qu'il ne voit pas sa mère juste comme une espèce de boule de stress et qu'il ne voit plus... Des moments de lâcher prise, de détente et de liberté ou de bonheur. Je ne sais pas comment le dire. Plutôt que de... Enfin, il s'en fiche de savoir dans quelle taille de jean je rentre, mon fils. Et il s'en fichera toute sa vie. Et je ne sais pas, je crois que... Je n'arrive pas bien à le formuler. Mais je crois que j'aimerais que... J'aimerais qu'en juin 2026, il ait sous ses yeux une personne un peu plus épanouie. C'est un peu flou et fourre-tout comme terme. Mais quelle que soit la façon d'y arriver, j'aimerais être plus là pour lui.

  • Speaker #1

    Ok.

  • Speaker #0

    Dans un an.

  • Speaker #1

    Mais c'est intéressant de formuler ça comme ça, parce qu'a priori, tu es quand même sortie de l'anorexie grâce à ton projet de le faire venir sur Terre.

  • Speaker #0

    Ouais. donc visiblement ça fonctionne bien pour toi c'est peut-être l'étape d'après d'arriver maintenant que je suis un peu sorti de la bulle de postpartum l'allaitement tous ces trucs compliqués de que j'arrive maintenant à le voir vraiment à le regarder vraiment ce qui dans un premier temps c'était juste mon fils c'est juste une to do list quoi comme beaucoup de gens obsessionnels et ben je me dis que c'est ça devrait être quand même plus intéressant ça et que ça serait une bonne source de... Je ne voulais pas dire distraction, ce n'est pas le terme, mais qu'il y a quand même plus de bonheur à trouver là-dedans que dans un quelconque objectif de moi.

  • Speaker #1

    Et tu le sais, j'aime bien finir par une question auprès de chaque personne, c'est de savoir ce que toi, tu aimerais dire aux personnes qui nous écoutent et qui sont en souffrance. avec leur corps, leur alimentation ?

  • Speaker #0

    Je crois que... J'ai évidemment pas de conseils à donner parce que je m'en donnerais à moi-même. je crois que plus on verbalisera, y compris bien sûr à travers des outils d'information et ton podcast est vraiment un outil qui aide énormément pour écouter beaucoup d'épisodes. mais y compris dans les repas de famille, dans les apéros entre copains, peut-être pas forcément de façon offensive ou militante, mais peut-être qu'en verbalisant un peu qu'on passe toutes par là, qu'en fait même si on n'a pas un TCA qui nous amène à l'hôpital ou dans des situations extrêmes et donc très visibles, on est tellement nombreux. nombreux et nombreuses en fait à vivre ça, qu'en parler même un tout petit peu et même un peu dans le quotidien, je crois que ça peut faire qu'on cède un peu. Moi c'est quand j'ai réussi auprès d'amis, souvent féminines effectivement, mais pas seulement, réussi à verbaliser que toi aussi ça te fait flipper de manger ça, toi aussi t'as des stocks comme ça qu'on a. tous ou presque tous. En fait, c'est ce genre de micro-choses partagées, y compris avec des gens qu'on aime et qu'on connaît dans d'autres contextes, qui peuvent aider à prendre du recul parfois. Donc en fait, parlons-nous. Et osons un peu plus raconter nos petits trucs bizarres, mais qui prennent tellement de place dans la vie.

  • Speaker #1

    Merci pour cette belle conclusion. Et puis pour tout ce que tu as livré durant notre échange.

  • Speaker #0

    Merci à toi, Xavier. Et puis merci pour tout ce que tu fais parce que vraiment, c'est le podcast. Et puis pas seulement, c'est vraiment une ressource qui... qui est extrêmement aidante, vraiment, je pense, pas que pour moi, parce que c'est rare de tomber sur un contenu où le vocabulaire est juste, où l'angle de réflexion par rapport au truc est juste. Et cette chose-là dont on parle sans jamais parler tout le temps, ça fait du bien de l'entendre nommée correctement et décrite correctement. Et déjà ça, ça aide.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. Ça me touche beaucoup. Merci.

Chapters

  • Présentation d’Éva

    01:41

  • Ses premiers souvenirs en lien avec le corps et l’alimentation

    04:40

  • Les différentes phases qu’elle a traversé

    13:10

  • La sortie d’anorexie : le pacte avec son mari

    23:22

  • Sa façon de manger aujourd’hui

    37:15

  • Ce que je lui conseille de mettre au travail

    50:07

  • Ce qu’Éva se souhaite pour l’année à venir

    01:14:31

  • Ce qu’elle aimerait passer comme message

    01:17:20

Description


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D’aussi loin qu’elle s’en souvienne, Éva s’est sentie en lutte contre son corps et contre la nourriture, qui était à la fois sa pire ennemie et ce qui lui apportait le plus de plaisir.

Elle nous parle des différentes phases qu’elle a traversé et du moment où elle est passée d’un corps considéré en surpoids à une anorexie restrictive. 


Et de la façon dont cette pathologie impacte encore son quotidien de plein de façons différentes.

La question de la légitimité est très présente tout au long de notre échange, ce qui n’est pas rare lorsqu’on vit avec un TCA, puisque très en lien avec le fameux perfectionnisme.

Un grand merci à Éva pour ce témoignage fort, à coeur ouvert. 


Au programme : 


Présentation d’Éva 

Ses premiers souvenirs en lien avec le corps et l’alimentation 

Les différentes phases qu’elle a traversé
La sortie d’anorexie : le pacte avec son mari

Sa façon de manger aujourd’hui
Ce que je lui conseille de mettre au travail
Ce qu’Éva se souhaite pour l’année à venir
Ce qu’elle aimerait passer comme message 




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Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans TCA, etc., le podcast qui décrypte les troubles des conduites alimentaires et tout ce qui gravite autour, parce que ça n'est jamais seulement qu'une histoire de bouffe. Je suis Flavie Mitsono, et j'accompagne les mangeuses compulsives à devenir des mangeuses libres bien dans leur basket. Alimentation, peur du manque, insatisfaction corporelle, peur du jugement, du rejet, empreinte familiale, grossophobie, les sujets abordés dans ce podcast sont très vastes, et pour ce faire, mes invités sont aussi très variés. Retrouvez-moi aussi sur Instagram où j'aborde tous ces sujets au quotidien sur Flavie.mtca. Très belle écoute ! Salut Eva, bienvenue dans mon podcast, je suis très contente de t'accueillir.

  • Speaker #1

    Bonjour Flavie, moi aussi je suis très contente d'être là, je suis auditrice d'habitude, ça me fait bizarre mais je suis très contente.

  • Speaker #0

    Tu es donc de l'autre côté aujourd'hui.

  • Speaker #1

    C'est ça.

  • Speaker #0

    pour venir discuter avec moi. Et c'est bien chouette. Merci d'avoir répondu à mon appel à témoignages, puisque je suis toujours... Alors, j'allais dire, je suis toujours en recherche. Il ne faut pas que je le dise trop, parce que j'ai du retard dans mes mails. Et voilà. En tout cas, si je suis toujours en recherche, n'hésitez pas, vous qui m'écoutez, à venir m'écrire sur l'adresse mail dédiée au podcast pour qu'on discute ensemble. Par contre, ne soyez pas trop pressés d'avoir une réponse. Je peux mettre un peu de temps. Bon, tu connais un peu le principe du podcast, comme d'hab, je vais commencer par le commencement, c'est-à-dire te proposer de te présenter de la manière dont tu le souhaites.

  • Speaker #1

    Alors, je m'appelle Eva, j'ai 37 ans et des brouettes et je travaille dans la communication pour une collectivité territoriale, je suis rédactrice et je vis en couple avec mon amoureux depuis 10 ans. Et j'ai un petit garçon de 16 mois qui est le plus chouette du monde, évidemment.

  • Speaker #0

    C'est lui le plus chouette ? Je croyais que c'était mes enfants les plus chouettes du monde. On m'a menti.

  • Speaker #1

    Je sais que tes enfants, mon fils, c'est vraiment chouette.

  • Speaker #0

    Ok, trop bien. Et donc, on est là pour parler de troubles alimentaires, comme d'hab, sur le podcast. Ouais,

  • Speaker #1

    j'ai oublié de te dire ça.

  • Speaker #0

    Non, mais c'est hyper bien. C'est plutôt bon signe que tu ne te présentes pas avec le trouble alimentaire. Déjà, ça dit quelque chose de toi. et de ta relation au trouble alimentaire. Et donc, voilà. Je ne t'invite pas nécessairement à en dire plus maintenant, mais en tout cas,

  • Speaker #1

    c'est bien pour qu'on en parle. Côté trouble alimentaire, j'en souffre ou j'en suis habitée. J'hésite toujours un petit peu sur le terme. Selon moi, depuis l'enfance, par un trouble alimentaire, j'ai tendance aussi à dire... qui sont tous le même, qui a pris différentes formes dans la restriction, dans l'excès, dans beaucoup de choses, mais qui pour moi est la même chose depuis toujours et qui a pour, je ne sais pas si c'est une particularité, mais de jamais avoir atteint des niveaux, on va dire, spectaculaires. Jamais des poids extrêmes ou jamais des comportements extrêmes, mais quand même suffisamment présents pour être difficiles, voire impossibles à enlever et pour prendre beaucoup d'espace de cerveau.

  • Speaker #0

    Oui, ok. J'aime bien ta manière d'amener ça et je pense que tu le sais, je suis assez d'accord avec l'idée que finalement, le trouble alimentaire, c'est… une pathologie, un trouble alimentaire et c'est juste qu'ils s'expriment de manière différente. Oui,

  • Speaker #1

    complètement. Vraiment, c'est la même bestiole ou créature cérébrale, je ne sais pas comment la dire, j'ai utilisé différentes métaphores dans ma vie, mais qui utilisent différentes techniques selon les moments de notre vie, tant qu'on ne s'en est pas débarrassé. Tu vas manger plus, tu vas manger moins, tu vas manger ci, tu vas manger ça, mais c'est la même source, je crois. C'est la même chose.

  • Speaker #0

    Oui. Et avant ça, tu le sais, j'aime bien poser cette question-là pour savoir un peu comment ça se passait dans l'enfance. Donc avant son arrivée, je ne sais pas à quel âge il est arrivé, mais en tout cas, je me demande quels sont tes souvenirs, toi, dans le rapport à ton corps et le rapport à l'alimentation quand tu étais une petite fille ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne sais pas à quel âge il est arrivé parce que je n'ai pas de souvenirs avant. C'est-à-dire que mes premiers souvenirs... en rapport à l'alimentation, en rapport au corps, il est déjà là. Je ne sais pas si je vais peut-être lui donner un prénom à un moment pour faciliter l'échange. Il y a moi, mon premier souvenir, mon souvenir le plus ancien vis-à-vis de l'alimentation, c'est qu'il y a un sentiment de très ambivalent, où j'ai ce souvenir où l'alimentation m'apparaît en tant qu'enfant comme le plus grand plaisir qui soit possible, un truc, ce gâteau au chocolat, c'est la plus belle chose au monde, rien n'égalera jamais ce plaisir-là. un sentiment de danger immense du coup. Parce qu'à la fin de la part de gâteau au chocolat, j'en veux 8 autres, tout de suite. Alors, c'est évidemment pas quelque chose qui est… Je ne suis pas née avec ça, c'est sûr, mais par contre, je ne me souviens pas de comment c'est arrivé. Et mon rapport au corps, il est lié à ce danger. J'ai toujours souvenir qu'il y a un lien entre le… la deuxième part de gâteau au chocolat et le fait que j'avais l'impression de vivre dans une sorte de... d'être un peu la petite fille bougoule. Et je n'ai pas de souvenirs avant ça. Mes premiers souvenirs, je suis en train de... Ce n'était peut-être pas forcément mon activité principale, mais ils impliquent d'avoir des choses en trop, des parties en trop, de la chair en trop, du gras en trop. d'aussi loin que je me souvienne. Donc, je n'ai pas de souvenir d'alimentation intuitive, de « je mange ça et puis c'est bon » , et puis peu importe, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, de légèreté avec la nourriture. Il n'y a pas le souvenir de ça. Et tu te souviens quel âge tu as sur ces parts de gâteau au chocolat, ces souvenirs-là ?

  • Speaker #1

    Avant 6 ans, c'est sûr. À 3-4 ans, peut-être.

  • Speaker #0

    Ah bah oui, donc en fait,

  • Speaker #1

    tu ne peux pas avoir de souvenirs à l'eau,

  • Speaker #0

    en fait.

  • Speaker #1

    Ah non, non, non, c'est ça. Pour moi, c'est extrêmement constitutif de ma personne. Bon, Eva, elle est trop grosse parce qu'elle mange trop, quoi. C'est hyper intrinsèque.

  • Speaker #0

    OK. Et là, c'est un peu la question qui de l'œuf ou de la poule qui me vient.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Est-ce que le rapport au corps est consécutif de ton rapport à l'alimentation qui aurait pris place pour autre chose ? Ou est-ce que ton rapport à l'alimentation, il est consécutif de ce rapport au corps et d'une pression peut-être qui a été mise aussi ? En tout cas, j'entends qu'il y avait des réflexions, parce qu'Eva est trop grosse parce qu'elle mange trop.

  • Speaker #1

    Personne ne me l'a jamais dit à voix haute. Mais effectivement, je fais partie de ce cas de figure très atypique aussi. J'ai grandi entourée de femmes, ma mère et ma grand-mère, deux femmes qu'on entendait bien, méditerranéennes, donc avec un peu de un fort caractère et qui elle-même, comme beaucoup de femmes, était dans le truc de « il ne faut pas te commanger, il faut faire attention, etc. » J'ai grandi avec une mère qui avait des problèmes de poids, qui en a toujours eu, et qui en fait ne m'a jamais dit « ma fille, tu es trop grosse » , mais par contre qui, elle, disait toujours « moi, je suis trop grosse et je mange trop, je devrais faire attention » , ce qui du coup, pour un enfant et un cerveau en construction, boum, il se trouve qu'en plus je ressemble morphologiquement un peu à ma mère. le cerveau n'a pas eu besoin de faire 12 000 circonvolutions pour dire, « Bon, ben toi, t'aimes trop manger. » La troisième, la quatrième part de gâteau au chocolat que je voulais, c'est parce que quelque part, je pense que l'insécurité était là de base. Oui,

  • Speaker #0

    les aliments sur un piédestal, il n'y a rien de mieux que ce gâteau au chocolat.

  • Speaker #1

    Il n'y a rien de mieux. J'ai souvenir de ma grand-mère qui, après j'arrête avec le gâteau au chocolat, mais qui disait « Oh là là, si seulement ça pouvait avoir mauvais goût » . Je me souviens.

  • Speaker #0

    « Si seulement ça pouvait avoir mauvais goût » . Ouais, d'accord. Ok, donc déjà,

  • Speaker #1

    tu as présenté l'ambiance. Ouais,

  • Speaker #0

    non mais tu étais tellement petite, c'est incroyable.

  • Speaker #1

    Oui, parce que, mais parce qu'en fait ça n'a pas été fait volontairement, c'est juste que... Il faut que je précise aussi qu'en plus, j'ai une sœur qui a très peu de différences d'âge avec moi et qui est superbe. Ça joue, je pense. Et il est évident que n'importe quel adulte qui passe, enfin, oh là là, qu'est-ce qu'elle est belle. Moi, j'étais sympa. Et donc, je crois que tout ça se mélange et fait un truc internalisé. dans le fait qu'il y a eu assez vite entre nous, dans le regard des autres, ou en tout cas je le sentais dans le regard des adultes, des deux sœurs, où il y avait la belle et puis il y avait l'autre. Et je pense que ça a joué dans le côté... Toi, Eva, on ne peut pas te laisser seule avec un gâteau. Ce n'est pas une bonne chose.

  • Speaker #0

    Ta soeur, elle n'a pas du tout développé de problème ou un rapport un peu conflictuel avec son corps, l'alimentation ?

  • Speaker #1

    J'ai envie de dire qu'elle se situe dans une moyenne raisonnable des femmes dans notre société aujourd'hui. C'est-à-dire que des femmes qui sont vraiment... libres, tranquilles par rapport à leur alimentation et dans leur corps, il y en a si peu que je ne sais pas si, j'en connais peut-être pas personnellement ou une ou deux, enfin quasiment personne. Le niveau d'après ça, c'est des femmes qui se débrouillent et dont je sens que par contre aujourd'hui, elle n'a pas le cerveau aussi imprégné de ça que moi, je l'ai.

  • Speaker #0

    Ok. Elle est plus grande ou plus petite ?

  • Speaker #1

    Elle a un an de plus que moi. Donc,

  • Speaker #0

    comment t'expliques, comment t'expliques ou tu comprends, peut-être que tu n'expliques pas et que tu ne comprends pas, le fait que ce soit si différent pour vous ?

  • Speaker #1

    Parce que ma sœur est un soldat et qu'elle a des moments que moi, j'ai pris avec moi-même, même pour m'auto-flageller ou même pour me dire « Ah là là, t'aimes pas ? » pour manger, il faudrait moins manger, etc. Ma sœur est tellement dans le... On a eu une histoire familiale un peu compliquée avec un divorce parental très conflictuel, beaucoup de conflits familiaux. Et ma sœur, elle a été en mode soldat, casque bleu, je ne pense qu'aux autres. Donc elle a tellement dissocié par rapport à son corps qu'elle, elle l'a fait comme ça. Elle s'est mise en mode mission, je serre les autres et je crois qu'elle ne s'était pas intéressée.

  • Speaker #0

    Pas intéressée à quoi ? À qui,

  • Speaker #1

    à quoi ? Peut-être que moi, le moment où j'ai commencé à tripoter mes bourrelets, à me dire « je suis trop grosse, je suis trop truc, je suis trop machin » , elle, elle ne l'a juste pas fait, parce que quelque part, elle avait le cerveau ailleurs. Peut-être que morphologiquement aussi, ça se passait différemment, parce qu'on est toutes différentes et qu'il y avait moins de... de conséquences à observer sur son corps de comportement alimentaire. Aujourd'hui, je pense qu'elle n'est pas moins tranquille avec l'alimentation que la plupart des femmes qui disent en gros « oh là là, cet été, attention » . Ce genre de culture des régimes ordinaires un petit peu complètement banalisée.

  • Speaker #0

    Ok. Et que ce soit ta grand-mère, je ne sais pas si elle est toujours en vie, mais au moins ta maman et ta sœur, est-ce qu'elles savent ce que toi, tu as traversé et ce que tu traverses ?

  • Speaker #1

    Alors, elles l'ont su parce que j'ai traversé plusieurs périodes dans ma vie. Donc, j'ai eu une période de ce que l'IMC qualifierait de surpoids jusqu'à mes 25 ans à peu près. Simplement parce que je n'ai pas... Alors du coup, je fais un petit fil chronologique parce que sinon ce n'est pas très lisible. Je n'ai jamais été une enfant ni une adolescente au régime. On m'aurait laissé faire si j'avais entrepris, mais franchement, je n'en avais pas la détermination, même si je pense que j'emploie des termes qui ne me convainquent pas, mais je le dis pour aller vite. j'étais, et tant mieux, incapable de tenir un régime. J'ouvrais un magazine, je le faisais un jour, c'était fini.

  • Speaker #0

    Donc, ça veut dire que tu avais l'envie quand même.

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr. C'est-à-dire que toute ma vie jusqu'à mes 25-27 ans, j'ai dit, oh là là, j'arrive pas à tenir un régime, mais je suis nulle, quoi. Les autres y arrivent, quelle horreur. Moi, je suis vraiment inincapable, etc. Mais un jour, j'y arriverai. Un jour, ce sera le grand déclic. Un jour, ce sera le grand changement. Un jour, je perdrai les... Les 10-15 kilos qui m'empêchent d'accéder au bonheur absolu de peser 15 kilos de moins. Ah oui, oui, non, mais c'est vraiment stupide. Et j'ai grandi jusqu'à mes premières années de vie toute seule où j'étais un peu en mode… Peut-être dans ce qui a été l'alimentation la plus libre de ma vie de quand on commence à vivre seul et à acheter ce qu'on veut. Alors du coup, ça faisait des espèces… de choses qui ressemblaient à des compulsions de temps en temps. Et en même temps, je n'étais pas si malheureuse de ça. Donc, ce n'était pas si mal. C'était peut-être ce que j'ai connu de plus libre comme alimentation. Mais donc, bref, je mangeais trop par rapport à... à mes besoins en me disant mais je devrais faire autrement et puis un jour j'y arriverai, un jour je le ferai. Et puis autour de mes 27-28 ans a démarré très très très progressivement une phase de perte de poids au début, allez j'ai fait telle activité physique, j'ai fait un tout petit peu ça, je me sens bien, t'inquiète pas je fais juste un tout petit peu de sport. Mais pour quelqu'un qui n'a jamais réussi, je fais des guillemets dans les airs, à perdre du poids de sa vie et qui y arrive un tout petit peu, puis un tout petit peu, puis un tout petit peu, ça a représenté une espèce d'euphorie, de tranquillité. En plus, j'avais l'orgueil de le faire sans un protocole précis, un régime hyper, mais vraiment sur la durée, très lentement, c'est-à-dire sur deux ans, quelque chose comme ça, j'ai perdu 20 kilos. Mais lentement, tranquillement, en disant à tout le monde, mais c'est parce que je me sens tellement mieux, j'ai fait un peu de sport, je mange juste un tout petit peu moins, etc. Et cette chose, la peur de reprendre et de repartir dans la zone de la société des gens en surpoids, cette peur-là de repasser dans la catégorie des gens, genre Fede Guimard-Lair, trop gros. m'a fait basculer très mécaniquement dans une phase restrictive, où pour le coup, là, ça s'est vu. Et donc, pour répondre à ta question d'il y a 10 minutes, ma mère et ma sœur l'ont vu. Tout le monde l'a vu. Parce que là, je suis passée... Alors, il y a eu un diagnostic d'anorexie. On fait un peu vite, je trouve, mais je veux dire, techniquement, ça correspondait tout à fait aux symptômes d'une anorexie restrictive. Et cette période-là a duré, c'est toujours compliqué à dater parce que la période par laquelle on en sort est jalonnée de haut, de bas, mais deux ans.

  • Speaker #0

    Donc deux ans de perte de poids progressive, puis s'ajoute à ça deux ans d'anorexie.

  • Speaker #1

    Il y a peut-être une année d'intersection, on va dire trois ans.

  • Speaker #0

    En même temps, vu de l'extérieur, c'est quelque chose qui s'observe beaucoup. Parce que 20 kilos en deux ans, tu peux te dire 10 kilos par an, ce n'est pas tant. En fait, c'est énorme. Et c'est surtout qu'une perte de poids ne se maintient pas comme ça. C'est-à-dire qu'à la limite, perdre les dix premiers kilos. Mais tout de suite, quand tu as dit ça tout à l'heure, je me suis dit… La deuxième dizaine, à mon avis, il y a quand même quelque chose d'un peu plus restrictif qui s'était enclenché.

  • Speaker #1

    Très restrictif qui s'est enclenché. En gros, sur le tournant 2017-2018, je ne sais plus faire la soustraction, je ne sais plus quel âge j'avais, mais j'ai entamé un « oh, je fais un tout petit peu de sport de temps en temps » . Et on va dire qu'un an et demi plus tard, j'en étais à compter mes calories et à faire un truc hyper… hyper pointu avec un carnet où je comptais à l'avance de préparer mes tupperwares pour aller au travail. Et là, on était passé dans quelque chose de très, très, très typique, en fait, dans la restriction. La perte de poids est devenue intentionnelle. Puis, à basculer dans le « c'est même plus ce qui est important, ce qui est important, c'est de ne pas reprendre » , puis c'est devenu la peur du morceau de pain ou de salade. C'est ça. Mais, comme je le disais au début… Même, tout comme je n'ai jamais été en surpoids de façon spectaculaire, ce mot ne convient pas, mais c'est tout ce qui me vient, je n'ai jamais été ni en obésité, ni en surpoids, où les gens disaient quand même, fais attention. Je n'ai pas non plus été, en tout cas à l'époque, mais c'est aussi un des traits de cette maladie-là qui prend des formes différentes. Ça me semble inutile de donner des poids et des chiffres. très très rigueur, mais je suis descendue à un poids dont je me disais, c'est impressionnant, parce que quand on est dans cet état d'esprit-là, on a même le moment du défi de, ah oui, mais j'ai entendu tel témoignage, elle est descendue jusque-là, donc je ne suis pas vraiment malade, je n'ai pas de soucis.

  • Speaker #0

    Mais ça c'est ce que tu disais à l'époque, mais ce que tu dis aujourd'hui avec le recul.

  • Speaker #1

    Il est très fréquent que je n'arrive pas à dire à voix haute que j'ai été, que j'ai traversé une phase d'anorexie restrictive parce que la société est ainsi faite que de même qu'on se surveille les unes les autres la taille de jean, j'ai trop peur qu'on me dise « ah bon, t'es descendu jusqu'à quel poids ? » et qu'on me dise « ah ben ça va, c'est pas… »

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    parce que mon cerveau est complètement… constitué de ça, j'ai l'impression je ne suis, quand je raconte la façon dont je le ressens je ne suis pas d'accord avec moi-même en fait je trouve ça stupide de me dire tu n'as pas été assez maigre pour dire que tu as souffert d'anorexie parce que c'est ça et puis quand tu parles de poids zut

  • Speaker #0

    j'ai perdu le mot spectaculaire ben moi je me dis attends à un moment donné si tu as perdu une vingtaine de kilos Il y a quand même moyen. En fait, parce que si tu m'avais dit je suis montée très, très haut et donc j'ai reperdu 20 kilos, mais donc je n'étais pas non plus dans un sous-poids spectaculaire. Mais comme tu dis, je n'ai pas fait des poids très, très hauts. Si tu ne fais pas un poids très, très haut, mais que tu perds 20 kilos. Et puis, il y a autre chose que j'aimerais... Et puis,

  • Speaker #1

    ça me fait une morphologie méditerranéenne aussi qui fait qu'en fait, le poids de mon squelette, les hanches, la poitrine, des choses qui font que j'ai une morphologie qui fait que je ne peux... pas physiquement aller dans des poids qui sont parfois mentionnés dans les témoignages de l'extrême ou des choses comme ça. Physiquement, c'est-à-dire que très techniquement, je suis allée à mon minimum personnel. Mais oui. Parce que, de toute façon, je ne tenais plus debout, ça n'allait.

  • Speaker #0

    Mais donc, le poids était extrême et spectaculaire. Tu vois ce que je veux dire ? De toute façon,

  • Speaker #1

    il faut bien dire une chose,

  • Speaker #0

    c'est que le corps humain, notre corps, il n'est pas fait pour maigrir. Parce qu'on est le résultat d'années et d'années d'évolution. Nous ne sommes pas faits pour perdre du poids, encore moins beaucoup. Et en fait, si moi, là, qui suis autour de mon poids d'équilibre, je prends 20 kilos, oui, il va y avoir plein d'adaptations pour mon corps. En fait, ce n'est pas souhaitable pour mon corps, ce sera difficile, mais ça va aller. Je ne me dis pas que je vais tomber malade à coup sûr. Par contre, si j'en perds 20, je vais être fatalisée.

  • Speaker #1

    Ah ben, absolument.

  • Speaker #0

    Parce qu'en fait, notre corps est beaucoup...

  • Speaker #1

    plus fait pour s'adapter à des prises qu'à des pertes de poids et donc ça reste spectaculaire ce que j'avais fait et puis de toute façon le côté visible spectaculaire pathologique en fait se mesure de toute façon à mon incapacité à fonctionner au quotidien qui se voyait très clairement ou là bas oui ma famille s'en est rendu compte mon amoureux s'en rendait compte et le disait et attirer à tenter de tirer la sonnette d'alarme des mois et des mois avant ce Merci. point de bascule où j'ai dit bon ok ça va pas ça va pas pouvoir perdurer tout le monde se rendait compte bien sûr à mon travail je ne sais évidemment en améliorer j'avais plus de capacité cérébrale j'avais plus de mémoire plus de fondée en larmes pour un oui pour un non et j'étais pas j'étais pas du tout un être humain fonctionnel quoi c'est sûr

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui a marqué l'autre virage alors ? Parce que tu as parlé de ce virage de bascule dans l'anorexie et le virage de sortie d'anorexie.

  • Speaker #1

    Je crois qu'il y a un moment, parmi les nombreuses et nombreuses conversations que j'avais eues avec mon amoureux, où il me disait ça part trop loin, ça devient pathologique. Ce petit truc que tu avais commencé à faire pour te sentir bien, c'est complètement obsédant et tu ne penses plus qu'à ça. Je vois bien que tu ne penses plus qu'à ça, tu n'es plus là, tu n'es plus avec moi. Parmi ces nombreuses conversations, je lui dis mais non, mais non, mais non, ça va. Je crois qu'il y a un jour, enfin si je sais qu'il y a un jour où on faisait un trajet à vélo dans Paris à plat et où à un moment je n'ai plus pu pédaler du tout, je me suis assise sur le trottoir et je lui ai dit ok, d'accord. Oui, c'est vrai. Parce que c'est la maladie du déni aussi. Et donc, quelle que soit sa forme et son visage, on dit toujours non, non, ça va, ça va, ça va. Et là, je lui ai dit bon, ok. Et là, du coup, c'est fait un pacte avec lui où j'ai jamais réussi à trouver... Alors, j'ai un peu consulté une psychiatre, j'ai un peu consulté une psychologue, mais l'honnêteté me pousse à préciser que j'ai jamais vraiment réussi à... Je ne sais pas si c'est faire confiance à quelqu'un, mais je crois que j'avais un peu trop honte de ce que je faisais, de ce que je vivais. Et donc, j'ai beaucoup trop... miser sur mon amoureux comme soutien, comme pilier beaucoup trop parce que je lui donnais un rôle qui était beaucoup trop lourd pour lui Et c'est à lui que j'ai demandé de me renutrir, de cuisiner pour moi, de portionner les choses. Alors, c'est passé par plein de phases parce qu'il y a des fois où j'y arrivais, et puis des fois où je n'y arrivais pas, par des petits contrats de poids, par des contrats de poids un peu hebdomadaires. Et puis aussi, le contrat n'était pas atteint, des espèces de gages, de calories supplémentaires à gérer. qui était quelque part une reproduction des techniques qu'on a dans certaines hospitalisations, mais que du coup j'ai fait à la maison avec lui. Ça a eu plein de hauts, plein de bas, plein de j'y arrive, plein de j'y arrive pas, et ça a pris encore deux ans de ça va, de quasi-guérison, de rechute. j'ai plus exactement le détail en tête de mois par mois etc mais deux ans de ça va mieux de je repère de ça repart où mon cerveau n'était pas libéré, n'était pas convaincu parce qu'avec le fait de maigrir c'est allumé et ne s'est jamais éteint la peur de regrossir et ça je ne sais toujours pas comment l'éteindre Je ne sais toujours pas comment la tenir un peu à distance, la calmer, même argumenter contre elle. Et donc, j'ai fait des hauts et des bas. Mais au fur et à mesure, la vie passant, ma grosse motivation, c'était d'essayer de retrouver un cycle et la capacité, parce qu'on n'avait pas d'enfant à ce moment-là, d'essayer de retrouver un corps suffisamment en forme. pour avoir des cycles et pour pouvoir tomber enceinte un jour. Ça, ça a été dans ces années-là, ces deux années-là, de sortir vraiment de la phase restrictive, de la phase d'anorexie. Ma motivation principale, le truc qui faisait que j'arrivais à dire « Regarde pas, regarde pas, regarde pas ce que tu fais, regarde pas ce que tu manges, t'inquiète pas. » Ce n'est pas forcément une solution parce que du coup, j'ai déconnecté, mais je n'ai pas été dans une démarche de juste… être un peu dans mon corps, ressentir les... Je dis, bon, c'est pas grave. Il faut juste... Grosso modo, tant que t'as pas retrouvé un cycle, c'est que t'as pas encore assez repris. Regarde pas. Ou regarde et dis-toi que tant pis, mais parce que je voulais retrouver la possibilité d'avoir un enfant.

  • Speaker #0

    En même temps, dans ce que tu dis, il y a un truc important, là, quand tu dis... C'était peut-être pas l'idéal parce que je déconnectais, je regardais pas, j'étais pas connectée à moi. Je pense qu'en guérison d'anorexie, c'est pas possible de tout faire.

  • Speaker #1

    Oui, peu importe.

  • Speaker #0

    Je crois pas, sincèrement. Je crois que c'est ça quand il y a une grosse confusion, quand il y a des détracteurs de l'alimentation intuitive ou des outils de type alimentation intuitive qui disent que non, c'est pas... Quand on a des TCA, il faut pas, alors que c'est genre... la thérapie spécifique TCA, qui disent ouais mais en cas d'anorexie, effectivement en fait tu as pas demandé à une personne qui souffre d'anorexie de lui dire mais non mais juste écoute ton corps, enfin non bien sûr et je pense qu'il y a des phases donc je trouve ça quand même fort quoi de ce que vous avez mis en place. C'est fou et je me dis mais waouh, enfin effectivement faire ça en cours

  • Speaker #1

    couple votre couple a tenu donc oui non mais tu vois mais attention oui oui bien sûr on a une très très chaud et et ça a été très difficile ouais c'est à dire que lui c'était c'était énorme ce que je lui ai mis sur les épaules c'est c'est affreux parce qu'il sentait bien ouais je voyais un petit jeu mais il sentait bien que tout le la partie physique de ma reconstruction, et là je parle vraiment physiquement, de remettre de l'organisme, de remettre des calories dans la machine, je reposais ça entièrement sur lui, et je lui disais, je ne veux pas ça, si moi je n'arrive pas à le faire moi toute seule, à partir de rien, il faut que tu me donnes la béquille, et donc cette passion-là qu'il avait lui. tant pour permettre à la personne qu'il aimait de retrouver la santé que pour éventuellement la possibilité pour lui de construire une famille.

  • Speaker #0

    c'était beaucoup beaucoup et il y a eu des ouais ouais on a eu chaud c'est sûr qu'après ça a pris du temps de restabilisation mais on est encore très marqué par cette période par le souvenir de cette période et par le fait que je suis pas guérie du tout du gros trouble alimentaire mon corps est en sécurité c'est bon je suis plus en danger physique mais par contre je souffre toujours de ce qui est pour moi le même TCA qui s'exprime différemment aujourd'hui et c'est encore très dur pour nous au quotidien. Lui, il en a légitimement un peu marre de vivre avec ça. Et de le dire ? Bien sûr,

  • Speaker #1

    oui. Vous en parlez ouvertement ?

  • Speaker #0

    Oui. Oui, parce que bien sûr, j'ai au quotidien tout un tas de petits tocs alimentaires, de choses qui sont... des restes de ça, je fais des espèces d'obsessions qui sont très très faciles à identifier au quotidien et que lui, il s'en passerait. Oui, il me le dit, on en parle. Le trouble, il est là, il est entre nous, il est à la maison au quotidien, mais en tout cas, par contre, oui, ça, on en parle. Mais oui, pour revenir sur la partie renutrition, sur la phase réfléchis pas et mange, je suis complètement d'accord qu'effectivement, quand on se prépare d'anorexie, je pense qu'il y a un moment, en tout cas, il y a une phase très, très clé de toute façon, le moment de s'écouter, de tout ça. Il faut avoir un cerveau fonctionnel et quand il n'a pas à manger, le cerveau, il n'écoute rien du tout. Donc, bien sûr qu'il y a cette phase-là. C'est vrai que… Alors... Tous les cas sont des cas particuliers, mais dans le mien, comme j'ai très souvent, là je l'ai dit un peu vite, que jusqu'à mes 25-27 ans, j'ai été plutôt en surpoids qu'autre chose. Et ensuite, il y a eu deux, trois ans où j'étais en phase restrictive. En fait, c'est peu à l'échelle de ma vie. Moi, quand je regarde ma vie, quand je me souviens de l'histoire de mon comportement alimentaire, à l'échelle de ma vie, ce n'est pas ces trois années-là. c'est plutôt, je me réfléchis plutôt comme quelqu'un qui est quelqu'un de compulsif vis-à-vis de la nourriture, qui, en l'air, doit faire attention, à qui on ne peut pas faire confiance avec un paquet de gâteaux, etc. Parce que c'est comme ça que j'étais enfant, adolescente et jeune adulte. J'ai toujours eu un... J'en ai pas parlé tout à l'heure, quand on parlait de mon enfance et de ce que ça avait fait de moi comme mangeuse, tout ce qu'on disait par rapport à la construction de la nourriture, c'est mal et une femme, ça doit faire attention. Et qu'effectivement, bon, certes, c'est assez évident, mais je le dis quand même, ça a évidemment causé chez moi une incapacité totale à connaître ma faim, à connaître ma satiété. c'est ce qu'il y a tout à fait logique, mais ce qui a fait de moi une mangeuse, bon évidemment pas intuitive, et un peu comment dire, d'occasion.

  • Speaker #1

    Attends, qu'est-ce que c'est que ça une mangeuse d'occasion ? Je ne m'attendais pas à ça.

  • Speaker #0

    Ouais, c'est pas forcément un terme qui convient bien, mais c'est à dire que comme moi, donc je le disais à la... Au début, je ne sais évidemment pas ce que c'est une portion de gâteau au chocolat, mais je ne sais évidemment pas ce que c'est qu'une portion de gâteau au chocolat, ou à la fin, c'est bien, c'est suffisant, je ne sais pas. Enfant, moi, c'est… Pour moi, la portion, c'est la portion qu'on me mettait dans l'assiette ou qui m'était autorisée. À la fin de mon assiette… Je n'avais pas accès à mon cerveau, à mes sensations corporelles pour dire que c'était suffisant, que ce n'était pas assez. Je n'ai jamais affiné une assiette de ma vie, y compris dans ma période d'anorexie restrictive. Je faisais des assiettes de concombre, mais alors, elles étaient vides à la fin. Je ne sais pas, en milieu d'assiette, me dire que ça va là. Parce que c'est comme si ça a créé une sorte de précieusité. du fait de manger, s'arrêter de manger, c'est une occasion ratée. Alors que là, tu es dans une phase où c'est autorisé, va jusqu'au bout. Et donc, la mangeuse d'occasion, c'est par exemple s'il y a un moment quand aucun adulte ne regarde, il y a un bout de quelque chose qui traîne. L'enfant que j'étais ne se posait même pas la question de si j'en avais… Bon, évidemment, si j'avais faim, ce n'était même pas la question, mais même pas la question de si j'en avais envie. C'est parce que là, j'avais une fenêtre, personne ne me regarde. Il y a un des souvenirs les plus marquants et les plus… ridicule. Vraiment, en plus, j'ai honte de partager ce truc-là, mais en même temps, je pense que c'est tellement représentatif que c'est utile. Et j'espère que ma mère n'écoutera jamais cet épisode, mais ça m'est arrivé. Tu sais, quand t'es enfant, que ta mère a préparé ou ton père, en l'occurrence là, ma mère a préparé le saladier de pâte à crêpes et que tu obtiens le droit de... C'est moi qui fais cuire les crêpes, vas-y, va faire autre chose. Eh bien, de manger soit les crêpes parce que j'étais seule dans la cuisine à faire cuire les crêpes, opportunité, soit de manger quelques-unes des crêpes un peu ratées, ou la louche de pâte à crêpes dans la bouche, crue. Pourquoi ? Parce que j'avais trois secondes devant moi et que quelque part, il y a quelque chose dans mon cerveau qui s'allume de, je ne sais pas, c'est interdit.

  • Speaker #1

    Mais oui. C'est pas le choix.

  • Speaker #0

    C'est une forme de devoir,

  • Speaker #1

    en fait. Ça fait de la peine pour cette petite fille tellement en insécurité. Il y a quelque chose de tellement, tellement, tellement, tellement en insécurité chez cette petite fille qui, vite, ça y est, c'est le moment, il y a une ouverture.

  • Speaker #0

    Voilà, ouverture. Il n'y a plus de faim, il n'y a même plus d'envie. Il y a un peu de plaisir, mais pas tant. Et il y a une projection sur la nourriture de... d'autres insécurités, de tout ça. Mais c'est une chose qui me reste aujourd'hui. Alors, les variations de poids, la période restitutive que j'ai traversée, etc., fait qu'aujourd'hui, après avoir traversé tout ça, je suis un peu partie dans tous les sens au niveau chronologique, je ne sais pas si ça se...

  • Speaker #1

    Non, moi,

  • Speaker #0

    ça va. Mais ça fait qu'aujourd'hui, je suis… Tout ça cumulé, toute cette histoire-là fait qu'aujourd'hui, je suis une mangeuse un peu étrange quand même. Parce que, alors, les phases de restriction-compulsion, je les fais au quotidien. Mais c'est comme si les… Enfin, ce n'est pas des très grandes oscillations, en fait. C'est-à-dire que ce ne sont jamais de très grandes restrictions et ce ne sont jamais de très grandes compulsions. Mais ça marche quand même comme ça. C'est aussi pour ça que je t'ai contactée, parce que je me disais, je pense qu'on est nombreuses à vivre ça. On entend souvent des témoignages de gens qui font de l'hyperphagie, ou de gens qui souffrent de boulimie dans des espèces d'énormes compulsions, d'énormes crises. Pour moi, ça passe plutôt par des plus petites oscillations, c'est-à-dire qu'au sein d'un même repas. il peut y avoir une sorte de restriction-compulsion, restriction-compulsion. Ça peut passer par le fait de peser un bout de pain à côté de la salade que je me suis faite et ensuite, à la fin du repas, du coup, d'être en incapacité d'arrêter de manger. Pas parce que physiquement, j'ai plus faim. J'ai encore faim, parce que ça, ça va. Mais simplement parce que le cerveau, maintenant, à une manière de refuser le mécanisme de restriction et de punir le mécanisme de compulsion après mon cerveau n'arrive pas à faire un choix aujourd'hui je ne suis plus quelqu'un qui dit bon bah c'est comme ça règle extérieure je dois me restreindre pour tel ou tel objectif de poids et je ne suis pas libre d'avoir accès à un paquet de gâteaux librement. Je ne me sens pas libre de ça. Et donc, je fais plein, plein de petites oscillations qui donnent très concrètement ce qui, moi, me semble ressembler à ce qu'on pourrait appeler l'hyperphagie prendiale. Là, on est purement... Enfin, c'est pas un diagnostic que je fais, c'est une estimation à la louche moi-même. Mais dans le sens où... c'est très très difficile d'arrêter un repas c'est un deuil c'est une c1 c'est dire au revoir à quelque chose c'est c'est la même chose que quand j'étais petite fille donc en fait je suis revenu au début de la boucle je suis parfaitement Ce qui est normal. Ce qui n'a pas été traité n'a pas de raison d'avoir disparu. Aujourd'hui, je fais du... Ouais, je pense des petits excès à chaque repas.

  • Speaker #1

    Tu serais d'accord de donner des exemples concrets ?

  • Speaker #0

    Ouais, ouais, ouais. Il y a en fait... Un repas, pour moi, il est à peu près... portionné à l'avance, il est mis dans une assiette, j'y pense avant, au fait que, bon, il n'y a pas de, par exemple, il n'y a pas de plat au milieu de la table où chacun se sert, quand je cuisine, moi je fais des assiettes où je décide ce qu'il y a dans mon assiette, quoi, avant de manger, et ensuite, une fois que j'ai fini ce plat, en fait, il y a cette espèce de réveil de dopamine du « manger c'est chouette » parce que c'est vrai, manger c'est chouette, euh qui fait que je vais prendre le petit truc après. Je vais aller dans la cuisine prendre le petit carré de chocolat avec la dizaine d'amandes à côté. C'est un exemple parmi d'autres. Et au moment de me servir, je me dis toujours, tout va bien. Après, c'est terminé. Et puis, je peux me retrouver à faire 5, 6, 7 allers-retours dans la cuisine pour ramener mon assiette et à reprendre le petit n'importe quoi. qui peut être re du salé après le dessert, re de se resservir de... Ah ben, oh là là, j'ai mangé 10 amandes, c'était super, c'était tellement bien. Je les ai comptées au moment où je me suis servie mes 10 amandes. Tout ça pour retourner dans la cuisine, la main dans le pot directement. Alors là, tu ne comptes plus. Et du coup, il y a ce truc de ce qu'on appelle en général le foutu pour foutu, qui est du... Ah, tu as dépassé, c'est trop.

  • Speaker #1

    Tu as mangé ta onzième amande.

  • Speaker #0

    Ouais, on y aime et puis après de façon incontable parce qu'après ça peut partir un peu. Voilà. Mais en tout cas, dans ce côté du… Le moment où tu vas t'arrêter va être le moment de la prise de conscience, de l'autoflagellation, du c'était beaucoup trop, du t'aurais pas dû, etc. Donc, ce moment-là d'arrêter, sur le coup, mon cerveau souhaite le retarder. Ben oui. Parce que ça va être le moment où je vais me… m'engueuler tu t'engueules tu te promets de te reprendre en main je promets plein de trucs et même la promesse il est même fréquent que la promesse arrive en cours de j'ai pas envie de dire crise parce que parce qu'il y a des parce qu'il y a des personnes qui vivent des vrais épisodes de crise de compulsion où il y a des énormes quantités de nourriture et ça c'est vraiment je pense beaucoup plus douloureux que ce que je vis moi même physiquement et du coup je veux pas employer le même terme par respect pour euh... pour la douleur physique des personnes qui vivent des épisodes où tout le blacaripasse. Moi, c'est un peu trop, mais à chaque repas. Parce que,

  • Speaker #1

    tu disais que pendant, tu te promets aussi pendant. Ouais,

  • Speaker #0

    pendant, je me dis, typiquement, je peux retourner cinq, six fois à la cuisine. Disons qu'à la troisième fois, je me dis, oh là là, ça fait trois fois que tu te resserres d'un petit truc après le repas. Si c'est le soir, demain matin, pas de petit-déjeun.

  • Speaker #1

    Ouais, c'est parti.

  • Speaker #0

    Donc, si tu es pendant que je fais ça, tu peux être sûre que si je me dis ça, par exemple, la troisième fois que je retourne à la cuisine, il y en aura cinq de plus. Puisqu'il y a punition demain matin. Enfin, il y a... Oui,

  • Speaker #1

    mais tu connais le mécanisme.

  • Speaker #0

    Et je le connais. Et je le connais très bien. Et ça me rend tarée de me voir faire.

  • Speaker #1

    Mais du coup, qu'est-ce qui te manque ? Qu'est-ce qui fait que tu continues de tourner en boucle alors ?

  • Speaker #0

    Je crois... Je crois que je n'ai pas réglé et je n'ai pas d'idée pour le régler. Aujourd'hui, au niveau morphologique, je suis repassée dans quelque chose d'intermédiaire entre le poids de ma jeunesse où je n'avais plus tant surpoids et ma période head-down, etc. Je suis dans ce qu'on appelle une morphologie « bon » . qui passe inaperçu. Un peu classique, je n'ai pas envie de dire normal, c'est nul, normal. Je n'arrive pas à enlever de ma tête, et en fait il est possible que ce soit la vérité, c'est de me dire que si j'arrête de m'inquiéter, si je mange sans me dire punition demain, ou... pesée de glucides ce soir, eh bien, je vais... laisser faire la petite fille que j'étais et qui pouvait avaler des louches de pâte à crêpes, voilà, et il n'y a absolument plus rien pour m'arrêter et je vais à minima redevenir ce que j'étais avant d'un point de vue morphologique. Et ça aussi, c'est un vrai deuil à faire, un renoncement. un vrai renoncement à ce que ça implique au niveau de la vie quotidienne parce que c'est vrai aussi qu'il y a tellement d'obstacles quand on n'a plus un corps normé, quand on est un peu au-dessus, quand on est beaucoup au-dessus et je ne sais pas combien, jusqu'où j'irai et que je ne me débarrasse pas de la projection que j'ai. du regard des autres sur moi et que presque j'entends dans ma tête les gens penser la grossie elle s'est laissée aller, enfin bref tout ce qu'on entend dans sa tête quand on passe ou que dans mon cas on repasse parce que ce serait repassé dans une catégorie qu'on pourrait qualifier de surprenant mais là il ya plusieurs sujets

  • Speaker #1

    Il y a le sujet d'effectivement prendre du poids ou non, c'est-à-dire que moi, je ne sais pas où est ton poids d'équilibre et que si tu avais une alimentation complètement libre, peut-être que tu serais au-dessus du poids que tu fais aujourd'hui. Peut-être que pas du tout, parce qu'en fait, tous les efforts que tu fais pour, quand tu dis te punir, donc les efforts que tu fais pour rattraper le tir le lendemain ou quoi, recréent de la, on ne va pas dire de la compulsion, alors on va dire de la suralimentation. qui recréent de la restriction, qui recréent de la suralimentation. Et donc, finalement, ça crée un espèce d'équilibre qui ne serait peut-être pas si loin de tes apports caloriques si tu mangeais sans restriction. Et donc, voilà, il y a le sujet vraiment prise de poids ou non. Mais pour moi, le sujet important, là, c'est que tu projettes, dans le fait de lâcher le contrôle, tu projettes une situation dans laquelle... tu étais déjà dans le contrôle, d'une manière ou d'une autre. Alors, il y avait un contrôle, déjà qui était bien internalisé, je pense, mais qui venait de l'extérieur, mais qui était très internalisé dès petite fille. C'est-à-dire que tu projettes, tu te dis, si là, demain, je ne suis plus dans... Comment tu as dit ça ? Si je ne m'inquiète plus. En plus, c'est intéressant parce que tu as dit, si j'arrête de m'inquiéter sur mon poids et d'avoir tous les comportements qui vont avec, alors je vais revivre. Parce que je vivais petite fille. Mais petite fille, tu t'inquiétais pour ton poids. C'est bien ça le problème. En fait, tu compares ta situation d'aujourd'hui. Tu te dis, si je change ma situation d'aujourd'hui, alors je revivrai celle d'hier. Mais celle d'hier, c'était la même.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Ce n'était pas de la liberté. Il n'y avait rien de... Tu vois ?

  • Speaker #0

    Non,

  • Speaker #1

    non. Ce n'est pas comme si tu me disais, moi, j'étais petite fille. hyper libre comportement alimentaire normal au sens de réguler et tout ça et j'étais dans ce qu'on appelle le surpoids et bomba fait chier j'ai pas envie d'y retourner parce que voilà on est dans une situation privilégiée gens dans la norme bon bref tout ça on le connaît mais non là en fait c'est pas ça c'était pas tu avais déjà un trouble alimentaire en fait oui absolument absolument donc effectivement il ya aussi ce truc de

  • Speaker #0

    La liberté, la vraie liberté, il y a un inconnu total.

  • Speaker #1

    Oui, comme pour la majorité des femmes, parce que même celles qui l'ont vécu un peu dans l'enfance, en fait, c'est comme si c'était un monde à part, l'enfance. Et puis, tu es dans l'enfance, certaines nanas ont vécu ça. Je peux manger ce que je veux, machin, mais je vois ma mère, ma tante, Micheline, tout le monde, la maîtresse à l'école, tout le monde fait attention. Quand je deviendrai une femme, je ferai attention comme tout le monde.

  • Speaker #0

    Oui, et puis c'est tellement internalisé, c'est tellement partout, c'est tellement tout le temps dans ma famille, dans la famille de mon amoureux, le truc de « Oh, quand même, demain, il faut aller courir. » Enfin, « Tiens, quand même, ce soir, je ne mange pas. » Mais au travail, mais partout, en fait. Je me rends compte depuis que j'ai… Parce qu'en fait, mon amoureux me dit, même plus que toi, il a raison, je suis tout à fait d'accord avec vous deux, il me dit « Mais tu as toujours… » Quand j'étais en phase d'anorexie restrictive, ils me disaient « mais enfin aussi, tu étais anorexique ! » C'est juste que là, ça se voit, mais tu te comportais quand même. Enfin, je veux dire, c'est quand même le truc de… Les louches de pâte à crêpes, pardon, je reviens à chaque fois sur les mêmes exemples, mais je veux dire, c'est un truc de compulsion lié à la restriction.

  • Speaker #1

    est lié à l'insécurité.

  • Speaker #0

    Tu l'as toujours eu, ce truc-là. Moi,

  • Speaker #1

    je te dirais, priorité, travailler sur l'insécurité alimentaire et sur tes sensations alimentaires. C'est-à-dire que, même sans rien changer aujourd'hui, à ta manière de te nourrir, tu peux déjà, par des petits exercices du quotidien, t'entraîner à aller ressentir des choses. Pour t'entraîner... à renouer avec ça parce que tu n'es pas cassé. Je suis persuadée que tout fonctionne très bien, c'est juste que tu as été déconnecté de ça dès la petite enfance. Mais tu as cette capacité à ressentir le rassasiement, mais par contre, ça va demander plein de petites expérimentations. Et en fait, ça commence par ressentir le goût vraiment des aliments, te dire sans aucune volonté dans un premier temps de dire, Allez ! Je me pose, je déguste en pleine conscience, comme ça, je vais pouvoir m'arrêter. Non, c'est juste, c'est trop cool de manger un bon aliment. Et c'est quoi son odeur ? C'est quoi sa texture ? Quel goût il a ? Tiens, à la dixième bouchée, est-ce qu'il a le même goût qu'à la première bouchée ? D'être dans du jeu, en plus, mettre un truc un peu léger, c'est du jeu. Il n'y a aucun enjeu. Ce n'est pas, je fais ça pour... Genre, c'est de l'entraînement. En fait, tu as besoin de t'entraîner à revenir à toi dans ton corps. Ça va passer par être de plus en plus fine sur tes sensations de faim aussi. Parce que le rassasiement, il est très dépendant de la sensation de faim. Mais moi, je te dirais bien, mets un peu du jeu, quelque chose de léger pour retrouver quelque chose de plus vécu dans ton comportement alimentaire.

  • Speaker #0

    Ce qui est fou en plus, c'est que j'ai l'impression de... C'est quoi The Child Jekyll and Miss Hyde ? Les sensations, on va dire gustatives ou les goûts des aliments, je cuisine pas mal, j'aime beaucoup cuisiner, je fais attention aux produits que je mange. Alors certes, pour le côté bio, la santé, tout ça, mais c'est pour le goût aussi. J'ai toujours aimé des choses qui étaient bonnes. J'ai jamais, ou pas très souvent, fait des espèces de compulsions sur des trucs un peu nuls ou que je n'aimais pas vraiment au goût. les aliments je les cuisine je les les travail et puis sur les et donc tout ce qui est début de repas pour moi je suis en pleine conscience c'est génial je sens le romarin je sens l'origan c'est super il ya du moelleux il ya du ça il ya du truc et à un moment du repas il ya un switch qui se passe où j'ai l'impression de d'un gouffre je sais pas comment le dire autrement mais qui s'ouvre à l'intérieur de moi C'est comme si j'avais un chrono pour faire rentrer le plus de nourriture dans un temps limité. Il y a un truc de...

  • Speaker #1

    Peut-être que c'est relié justement au changement de goût des aliments. Parce que c'est vraiment le premier... C'est un super outil pour le rassasiement. Les aliments, ils n'ont plus le même goût. Il y a des enfants, moi, ça me fait trop rire. En fait, tu l'as peut-être déjà vécu avec ton enfant ou ça viendra. Tu as le côté « Ah ouais, trop content de manger un truc, il mange, il mange. » Et puis, le visage change au bout d'un moment. Soit il a mangé trop vite et il n'a pas eu le temps de se rendre compte du changement. Et à la fin, il va te dire « Ah non, je n'aime pas ça. »

  • Speaker #0

    Oui, alors qu'il vient de s'en descendre une demi-heure.

  • Speaker #1

    « Je n'aime pas ça. Tu viens de manger toute ton assiette. Tu m'as demandé de te resservir. » Et en fait, bouf !

  • Speaker #0

    Ça veut dire « j'en veux de change. »

  • Speaker #1

    Le goût change. Et là, il est allé un peu trop loin parce qu'il est dans le dégoût. mais en fait le goût de l'aliment change et peut-être que quand le goût de l'aliment commence à changer pour toi, inconsciemment, tu sais que c'est la fin du repas et là, ça active l'insécurité.

  • Speaker #0

    C'est ça. C'est déjà fini, mais c'est trop difficile.

  • Speaker #1

    Et c'est là où il faut bosser sur la sécurité. Et la sécurité, elle passe par plein de choses. Elle passe par le fait de sentir que tu as le droit absolu de manger n'importe quel aliment, aussi souvent que tu veux. et d'avoir ces aliments-là chez toi. Alors là, je te le dis comme ça, forcément que tout faire d'un coup, ça paraît compliqué, mais en gros, la sécurité, elle passe par ça, de manière à après même aller te la verbaliser, cette sécurité. Oui, là, le repas, il se termine, OK. Sauf que si j'ai encore envie de manger cet aliment dans une heure ou dans deux heures, je me donne le droit d'aller en remanger. Oui,

  • Speaker #0

    j'ai le droit d'y retourner.

  • Speaker #1

    Et en fait, c'est un travail sur du long terme, bien sûr, encore une fois, d'aller ramener de la sécurité parce que c'est ça qui s'active. Mais attends, moi aussi, je vais y revenir à l'exemple de la louche de pâte à crêpes, mais c'est la petite fille qui est tellement insécurisée. Les aliments... qui ne sont pas disponibles, qui sont... Ou les regards pleins de reproches. Enfin, tu vois, tout ce truc hyper insécurisant qui fait que, vite, vite, vite, vite, vite, ça va disparaître. Et puis, en fait, comme en plus, toi, tu te dis dans ces moments-là, quand tu sens que ça commence à partir en vrille, tu t'en rajoutes une couche. Tu te le dis et que ça va disparaître au lieu de te dire...

  • Speaker #0

    Parce que je vais le faire disparaître moi-même demain.

  • Speaker #1

    T'en auras autant que tu voudras. T'es en train de te dire, alors là, ma grande, demain, privé de petit-déj. Et voilà. Donc en fait, tu joues le rôle de ta propre maman à l'époque, tu vois, qui vient dire « ah ben non » . Et en fait, ça appuie encore sur l'insécurité qui va appuyer sur l'urgence, qui va appuyer sur la nécessité de se remplir, quoi.

  • Speaker #0

    Oui, oui. Et ce truc-là d'insécurité, je sens que c'est… Enfin là, mon corps est en train de me dire… C'est très subtil et c'est pas hyper visible, mais moi, je le vois. mon corps est en train de m'indiquer que c'est ça la gonfle et c'est bon ça va là c'est à dire que ces trucs de mini restriction mini compulsion mini restriction mini compulsion qui varie un peu mon corps est en train de m'indiquer par des petits signaux juste le fait que non mais ça va je prends un tout petit peu de poids en ce moment tout ça n'est pas grave évidemment c'est C'est juste que... Mon corps me signale que ces petites conneries de peser ton morceau de pain, tout ça pour finir dans le paquet de gâteaux, pour sauter le petit déjeuner le lendemain, pour faire ci, pour te flageller toute la soirée, tout ça. Mon corps me dit, ma grande, ça ne marche plus vraiment là pour contrôler ton poids, que je gardais stable avec mes dents et en raclant avec mes ongles depuis quelques années. je sens que là c'est plus possible, c'est de moins en moins possible. J'ai de moins en moins de prises et vraiment tant mieux. Enfin, sur le fond, je pense que c'est terrible. C'est un sentiment d'échec que je désapprouve mais que je ressens.

  • Speaker #1

    Oui, mais ce n'est pas toi que ça met en échec, c'est ce mécanisme merdique en fait.

  • Speaker #0

    Voilà. mais que j'ai tellement internalisé que je le vis un peu comme une partie de mon identité mais oui mais jamais t'as eu l'occasion de voir que ton corps il savait faire,

  • Speaker #1

    mais t'imagines la puissance du truc quand au lieu de peser ton bout de pain tu vas t'autoriser à manger la demi baguette si t'en as besoin à ce repas là, si t'en as envie et puis peut-être que le soir, même si le soir tu remanges de la pizza ou je sais pas quoi et puis qu'en fait de manière très fine, tu vas te rendre compte que ça s'équilibre, que ton poids s'équilibre, que tu vois, il n'y a pas de variation. Et en fait, la puissance du truc, quand tu vas te rendre compte que tu peux te faire confiance, que tu peux avoir une relation de confiance avec ton corps et ta propre régulation, c'est incroyable.

  • Speaker #0

    Et cette phase-là, alors déjà, je ne sais pas comment éteindre le cerveau de la phase de « vas-y, ce n'est pas grave, continue de… » qui passe, je pense, pour ma part, évidemment… la phase de lâcher le contrôle, je ne sais pas bien comment on fait, mais je ne sais pas si ça se décide un jour ou si ça se fait progressivement, mais ça va passer, comme tu le disais, par une pizza dans l'assiette, j'en sais rien, un soir, deux soirs, trois soirs, et dans un premier temps, et c'est normal, je pense, la petite fille en moi va terminer la pizza parce qu'elle est là et qu'insécurité, etc. avant peut-être éventuellement d'en laisser une part parce que j'ai plus faim, parce que je suis rassasiée, parce que tout ça, parce que j'aurais découvert peut-être ça, cette première phase-là de « waouh ! » Bon, elle est très effrayante.

  • Speaker #1

    Oui, mais en même temps, même maintenant, même quand tu y penses maintenant, est-ce que tu penses que si je te sers de la pizza tous les jours pendant 4-5 jours, tu vas être contente de manger ta pizza et tu vas… Te jeter dessus même au bout du quatrième jour ?

  • Speaker #0

    Contente, non. mais il est probable que pendant 4-5 jours je les termine toutes, oui oui, parce que mon cerveau n'aura pas encore compris que après la pizza il y a punition.

  • Speaker #1

    Peut-être ou peut-être pas, ça dépend parce que si tu fais ça en disant derrière je ne remange plus jamais, effectivement, mais...

  • Speaker #0

    Si il y en a deux qui reviennent le lendemain c'est sûr que ça peut appuyer dans le cerveau un truc de non non ça revient.

  • Speaker #1

    Mais si ton congèle il est blindé de pizza et que tu dis bah ok j'ouvre mon congèle, ok, bon bah là je suis encore dans mon exercice, je suis censée manger une pizza, j'en ai envie ou pas ? Oui j'en ai envie, non j'en ai pas envie. Et en fait d'avoir ton truc plein de pizzas et d'être dans cette autorisation et de te dire ok, si j'en ai envie, j'en mange. Si j'en ai pas envie, je suis pas obligée. Par contre là si j'en ai envie, j'en mange. Et de renouveler le truc, tu pourrais être surprise en fait, sincèrement, de la vitesse à laquelle ça peut aller quand même. Alors, ça ne veut pas dire que tous les problèmes sont réglés et que ça y est, il n'y a plus d'insécurité alimentaire parce qu'elle s'est immiscée avec plein d'aliments. Mais tu n'as pas non plus besoin de refaire tous les aliments du monde. En fait, la sécurité, à un moment donné, elle va s'installer. Mais oui, il y aura peut-être la pizza et puis le pain et puis le chocolat et puis voilà. Mais l'idée aussi, c'est d'associer ça à quelque chose de... Alors, j'allais dire à la dégustation, mais... la dégustation dans le but de te faire un cadeau. En fait, tu n'es plus une petite fille en faute qui doit manger super vite sa pizza. Le but, c'est que là, tu es une adulte qui aime les bons produits, qui adore sentir les différentes saveurs dans son plat. Et que quand tu manges de cette manière-là, même une pizza, tu peux la manger de cette manière-là. Même, tu vois, plus ça va aller, plus tu seras en mesure de le manger de cette manière-là. Mais oui, peut-être que les... Deux, trois premiers soirs, tu vas la manger vite, tu vas la manger entière et que ce sera compliqué.

  • Speaker #0

    Oui, et l'enjeu, c'est qu'à la fin de cette première, de cette deuxième soirée, il n'y ait pas de... C'est mal, tu n'aurais pas dû. Et c'est cet état d'esprit-là que je trouve difficile à atteindre.

  • Speaker #1

    Mais c'est aussi tout l'intérêt pour moi d'être accompagnée sur ce cheminement, tu vois. Parce que les pensées, elles vont arriver. Les pensées, elles vont venir. Elles vont te dire, tu fais de la merde, mais qu'est-ce que tu es en train de faire ? Mais tu vas grossir, mais n'importe quoi. C'est normal. Elles font leur job. Elles font leur job de pensée qui croit t'aider, te protéger.

  • Speaker #0

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #1

    Tu n'es pas contre toi, tu n'es pas en train de jouer contre toi. Tu essaies de te débattre de trucs. Ces pensées-là, elles ont une valeur. protectrice. Parce que même ton TCA a une valeur protectrice. Oui,

  • Speaker #0

    tout à fait.

  • Speaker #1

    Mais elle ne fonctionne pas. Là, aujourd'hui, tu te rends compte que ton mécanisme est assez limite, que ça ne fonctionne pas, que ça a quand même bien abîmé ta santé au global, ton estime de toi, enfin, plein de choses, ta confiance en toi. Donc, voilà. Et c'est ça qui est important, c'est de se rendre compte que ça ne fonctionne pas. Puis, ça tu l'as déjà vachement bien fait, de démêler tout le système, tu vois. Ok, ces pensées restrictives qui débarquent sont celles qui vont faire que je vais me taper des compulsions et que au final, je risque même plutôt plus de grossir. Enfin voilà, puisque la peur derrière, c'est « ah, on va pas se grossir » . Puis en parallèle de tout ça, c'est trop bien aussi de bosser sur « attends, c'est quoi cette peur complètement irrationnelle ? » Parce que oui, il y a la société dans laquelle on vit qui est grossophobe, je suis la première à essayer de le crier sur tous les toits. Il y a vraiment une responsabilité collective derrière le TCA, mais il y a aussi toi dans ton histoire, à quel point c'est ancré en toi qu'il y a une perte de valeur quand tu grossis.

  • Speaker #0

    Oui, j'ai presque même l'impression que… En même temps, je crois que c'est possible parce que j'ai entendu plein de gens réussir à avancer. par des thérapies comportementales et que c'est vraiment l'action, ressentir dans son corps des choses différentes qui fait avancer aussi. Et en même temps, je crois que fondamentalement, tant que je n'ai pas débunké vraiment ce truc de si tu es grosse, tu es moche et si tu es moche, tu ne seras pas aimée. Je le fais vite parce que je vois l'heure qui file et que je me dis résume un peu. J'ai l'impression que ça bloquera toujours l'avancée.

  • Speaker #1

    Moi, je ne crois pas. Je crois que si on devait attendre de ne plus avoir cette peur viscérale de grossir pour guérir d'un TCA, personne n'en guérirait.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    t'es obligé de y aller avec cette peur de grossir. Et en fait, c'est sur le chemin de guérison que t'apprends aussi à la déconstruire et aussi à la regarder un peu différemment. L'autre jour, je faisais un groupe de paroles dans mon programme d'accompagnement, et le thème, c'était gérer le culte de la minceur et la diet culture. Parce que c'est un vrai sujet sur le chemin de guérison. Toi, tu déconstruis des trucs, mais comme tu le disais, tout le monde autour a ses discours.

  • Speaker #0

    Il faut se lalomer.

  • Speaker #1

    Et à un moment donné, il y a une des personnes que j'accompagne qui dit, putain, mais moi, à un moment donné, aujourd'hui, je suis en mesure de me dire que je préfère être libre et grosse que mince et prisonnière toute ma vie de tout ce merdier. Et je sais que ça a résonné pour moi. plusieurs, c'est une phrase qui est forte qui est inentendable pour tout un tas de gens dans les troubles alimentaires et attention je suis pas en train de dire et c'est pas ce qu'elle voulait dire qu'on a deux choix dans la vie contrôler tout ce qu'on mange ou être grosse c'est pas vrai, c'est pas ça mais cette peur là de grossir à un moment donné quand tu découvres la liberté, la vraie liberté tu parlais de charge mentale au début de ouais de ton témoignage, de la place que ça prend dans ta tête, quand tu commences à alléger ça et que tu commences à te sentir libre, de manger ce que tu veux, à être plus présente dans les discussions, à avoir plus d'énergie pour n'importe quel projet, pour avoir l'impression d'exister plus toi, peut-être que tu n'auras toujours pas envie d'être grosse, tu n'auras toujours pas envie de grossir, mais ça n'aura peut-être pas tout à fait la même importance dans ta vie si tu prends deux kilos.

  • Speaker #0

    C'est clair qu'il y a quelque chose dans la façon dont on sait tout ce... construit l'image qu'on a de soi par rapport ou non au regard qu'on a senti des autres. Il y a quelque chose qu'on construit tous différemment et que moi, je sens que j'ai fait ça un peu mollement ou avec des fondations un peu cartonneuses sur l'estime de moi dépend du regard que je lis, de l'image que je crois lire dans le regard des autres. quelqu'un qui... Je préfère être libre et grosse. Je l'applaudis et je l'admire et je lui trouve un courage que je n'ai pas ou pas encore. Et on est tellement plus nombreuses, effectivement, à être... Franchement, je le vis comme une lâcheté.

  • Speaker #1

    Oui, mais en le disant comme ça, tu reprends un versant très individuel. Alors que je suis d'accord avec toi, je pense que la majorité des femmes sont soumises comme ça au regard de l'autre. Mais on est construite comme ça. C'est comme ça qu'on nous fait grandir. C'est comme ça qu'on nous apprend à devenir des femmes. Et du coup, tu parles de lâcheté, je trouve ça dur comme mot parce que la responsabilité, elle est collective, elle est sociétale, en fait. C'est hyper difficile de sortir de ce truc-là. Hyper, hyper, hyper difficile.

  • Speaker #0

    Ouais, et bien, celles qui le font, je... Je les admire vachement et je les trouve tellement courageuses. Je veux être à vos côtés, mais je ne me sens pas assez solide.

  • Speaker #1

    Moi, je crois que ce qui aide, elle le disait, une chose qui l'aide, c'est d'être dans une forme de militantisme. En fait, elle a décidé de plus rien laisser passer quand elle parle avec des gens. Mais d'ailleurs, c'est ce que je lui avais dit, il faut aussi beaucoup de courage, beaucoup d'énergie. Et en fait, elle m'a dit « Ah non, mais moi, aujourd'hui, ça m'en donne de l'énergie de ne pas laisser passer les petits mots, les réflexions, les machins. » Et donc, elle est dans un truc un peu militant. Et en gros, elle avait dit autre chose. Si tu écoutes l'épisode, tu vas rigoler. Comme quoi, je m'en souviens bien. C'était très intéressant ce qu'elle disait. Elle a dit autre chose aussi. C'est qu'elle a parlé de groupe d'appartenance. Et elle a dit qu'elle s'était trouvé un autre groupe d'appartenance, que celui, tu sais, de la femme là, au régime, à vouloir vraiment rentrer dans les cases. Et que du coup, c'est aussi un autre groupe d'appartenance que ces personnes qui décident de sortir de ce cadre-là et de dire, en fait, moi, vos injonctions, vous pouvez vous les mettre où je pense, j'ai envie de vivre libre, quoi. Et que je sois grosse, mince, grande, petite, en fait, tu vois.

  • Speaker #0

    Et puis surtout, on va dire, mon regard, mon... estime de ce que je fais, de ce que je suis, me suffit. Et je me fous un peu de ce que vous pensez, de comment je m'alimente ou de ce à quoi je ressemble.

  • Speaker #1

    Je pense que ça, c'est un peu utopique de se dire que notre regard suffira. Je pense que c'est normal qu'on ait besoin des autres. Par contre,

  • Speaker #0

    on peut se sentir validée par plein d'autres choses,

  • Speaker #1

    au sujet de plein d'autres choses que la forme de ton corps. Tu vois ? Oui, oui. C'est forcément déjà le cas, de toute façon.

  • Speaker #0

    Peut-être. C'est vrai que pour le coup, c'est tellement vieux, c'est tellement constitutif de ma personne, qu'il y a toujours un... ce bruit de fond derrière toute chose que je fais, même des choses qui n'ont rien à voir avec comment je m'alimente ou comment je ne fais pas de sport, mais il y a toujours un truc de « tu n'y arrives pas, tu n'es pas assez bien de toute façon » puisqu'il y a cette espèce de péché originel qui a teinté tout ce que j'ai fait dans ma vie. Je pense qu'il y a vraiment un truc en l'occurrence là, il y a un vrai enjeu de renaissance sur le... c'est peut-être mettre beaucoup de pression au process, mais il y aurait un... j'ai toujours eu un peu peur de faire toute chose parce que il y a cette espèce de sentiment d'échec originel qui me fait me dire quoi que je fasse, y compris professionnel, loisirs, etc., activités, je me sens légitime de rien. J'ai toujours eu ce truc de… comme à l'époque pour les régimes. tu ne vas pas y arriver, ne commence pas. Je suis une grande peureuse de la vie, par exemple. Il y a plein d'activités, j'en sais rien, il y a des tas de gens qui me disent, j'ai essayé le canyoning, j'ai essayé ça, j'ai fait ce machin. Il y a des tas d'activités ou de choses que j'aurais pu avoir le désir de faire dans ma vie, je dirais, non, je n'oserais pas faire ça. Il y a quelque chose qui teinte tout, mais ce qui rend d'autant plus...

  • Speaker #1

    enviables de le résoudre ouais mais peut-être aussi que là il y a la nécessité de regarder tout ce que malgré tout ça t'as déjà fait parce que moi je sais pas grand chose de toi mais je sais que t'as un emploi, je sais que t'es en couple, je sais que t'es maman et donc ça veut dire que tout ça t'es forcément allé faire des trucs qui te faisaient hyper peur t'as tenté des aventures donc quand même la grande aventure de devenir maman et que au quotidien il y a des tas de choses que tu réussis et Je suis à peu près sûre qu'il y a des gens qui te renvoient ces réussites. Après, peut-être que c'est compliqué d'accueillir. Et c'est peut-être même compliqué pour toi de voir tout ce que tu as déjà fait de génial. Oui,

  • Speaker #0

    c'est très compliqué. C'est pas évident d'être dans le moment pour moi. Tout ça est le même sac de nœuds. Mais par rapport à mon enfant, par exemple, je sens que le TCA est venu vraiment se foutre au milieu de mon postpartum de façon très compliquée. Et j'ai mis plus de temps, je le sais, que si je n'avais pas de TCA à connecter avec lui. ça crée beaucoup d'émotions on est passé au point Godwin on parle de mon fils chaque sujet où je te dis moi je suis sûr que tu fais plein de choses géniales,

  • Speaker #1

    tu vas pouvoir me dire à quel point il y a des trucs que tu fais pas assez bien et tu vois là on met le doigt sur un truc c'est à dire que c'est une certitude qu'il y a des tas de choses que tu fais pas bien, c'est à dire à ta façon et que c'est largement suffisant et que les gens autour de toi ont sans doute énormément de très bonnes raisons de t'aimer d'avoir envie de passer du temps avec toi et que ça me semble important d'aller connecter avec ça tout ce que tu es déjà,

  • Speaker #0

    tout ce que tu fais déjà oui oui oui c'est effectivement un trait de personnalité qui est très souvent cousin avec le TCA du bien c'est pas assez si c'est pas si c'est pas fait le mieux possible je sais pas comment le dire de ce qu'on appelle rapidement le perfectionnisme je voulais pas dire perfectionnisme parce que je trouve que les gens qui se disent perfectionnistes ils savent pas ce que c'est vraiment en tout cas peut-être qu'ils arrivent à faire les choses parfaitement ce que j'ai pas le temps de savoir faire

  • Speaker #1

    ok ouais bon en tout cas moi j'aimerais bien savoir ce que tu te souhaites là pour l'année à venir si tu t'imagines en juin 2026 Dans quoi tu te projettes ? Qu'est-ce que tu te souhaites ?

  • Speaker #0

    Je voudrais bien, parce que je n'arrive pas encore à réfléchir en me regardant moi-même. C'est encore trop compliqué. J'ai toujours construit une opinion de moi en disant que pensent les autres. J'aimerais bien maintenant que… que cet enfant merveilleux qui existe puisse. Tant qu'à faire, j'aimerais bien que... Là, il a 16 mois, il va commencer à construire bientôt, finalement, des souvenirs et puis des consciences, des conceptions de qui est son père, qui est sa mère. J'aimerais bien qu'il ne voit pas sa mère juste comme une espèce de boule de stress et qu'il ne voit plus... Des moments de lâcher prise, de détente et de liberté ou de bonheur. Je ne sais pas comment le dire. Plutôt que de... Enfin, il s'en fiche de savoir dans quelle taille de jean je rentre, mon fils. Et il s'en fichera toute sa vie. Et je ne sais pas, je crois que... Je n'arrive pas bien à le formuler. Mais je crois que j'aimerais que... J'aimerais qu'en juin 2026, il ait sous ses yeux une personne un peu plus épanouie. C'est un peu flou et fourre-tout comme terme. Mais quelle que soit la façon d'y arriver, j'aimerais être plus là pour lui.

  • Speaker #1

    Ok.

  • Speaker #0

    Dans un an.

  • Speaker #1

    Mais c'est intéressant de formuler ça comme ça, parce qu'a priori, tu es quand même sortie de l'anorexie grâce à ton projet de le faire venir sur Terre.

  • Speaker #0

    Ouais. donc visiblement ça fonctionne bien pour toi c'est peut-être l'étape d'après d'arriver maintenant que je suis un peu sorti de la bulle de postpartum l'allaitement tous ces trucs compliqués de que j'arrive maintenant à le voir vraiment à le regarder vraiment ce qui dans un premier temps c'était juste mon fils c'est juste une to do list quoi comme beaucoup de gens obsessionnels et ben je me dis que c'est ça devrait être quand même plus intéressant ça et que ça serait une bonne source de... Je ne voulais pas dire distraction, ce n'est pas le terme, mais qu'il y a quand même plus de bonheur à trouver là-dedans que dans un quelconque objectif de moi.

  • Speaker #1

    Et tu le sais, j'aime bien finir par une question auprès de chaque personne, c'est de savoir ce que toi, tu aimerais dire aux personnes qui nous écoutent et qui sont en souffrance. avec leur corps, leur alimentation ?

  • Speaker #0

    Je crois que... J'ai évidemment pas de conseils à donner parce que je m'en donnerais à moi-même. je crois que plus on verbalisera, y compris bien sûr à travers des outils d'information et ton podcast est vraiment un outil qui aide énormément pour écouter beaucoup d'épisodes. mais y compris dans les repas de famille, dans les apéros entre copains, peut-être pas forcément de façon offensive ou militante, mais peut-être qu'en verbalisant un peu qu'on passe toutes par là, qu'en fait même si on n'a pas un TCA qui nous amène à l'hôpital ou dans des situations extrêmes et donc très visibles, on est tellement nombreux. nombreux et nombreuses en fait à vivre ça, qu'en parler même un tout petit peu et même un peu dans le quotidien, je crois que ça peut faire qu'on cède un peu. Moi c'est quand j'ai réussi auprès d'amis, souvent féminines effectivement, mais pas seulement, réussi à verbaliser que toi aussi ça te fait flipper de manger ça, toi aussi t'as des stocks comme ça qu'on a. tous ou presque tous. En fait, c'est ce genre de micro-choses partagées, y compris avec des gens qu'on aime et qu'on connaît dans d'autres contextes, qui peuvent aider à prendre du recul parfois. Donc en fait, parlons-nous. Et osons un peu plus raconter nos petits trucs bizarres, mais qui prennent tellement de place dans la vie.

  • Speaker #1

    Merci pour cette belle conclusion. Et puis pour tout ce que tu as livré durant notre échange.

  • Speaker #0

    Merci à toi, Xavier. Et puis merci pour tout ce que tu fais parce que vraiment, c'est le podcast. Et puis pas seulement, c'est vraiment une ressource qui... qui est extrêmement aidante, vraiment, je pense, pas que pour moi, parce que c'est rare de tomber sur un contenu où le vocabulaire est juste, où l'angle de réflexion par rapport au truc est juste. Et cette chose-là dont on parle sans jamais parler tout le temps, ça fait du bien de l'entendre nommée correctement et décrite correctement. Et déjà ça, ça aide.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. Ça me touche beaucoup. Merci.

Chapters

  • Présentation d’Éva

    01:41

  • Ses premiers souvenirs en lien avec le corps et l’alimentation

    04:40

  • Les différentes phases qu’elle a traversé

    13:10

  • La sortie d’anorexie : le pacte avec son mari

    23:22

  • Sa façon de manger aujourd’hui

    37:15

  • Ce que je lui conseille de mettre au travail

    50:07

  • Ce qu’Éva se souhaite pour l’année à venir

    01:14:31

  • Ce qu’elle aimerait passer comme message

    01:17:20

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D’aussi loin qu’elle s’en souvienne, Éva s’est sentie en lutte contre son corps et contre la nourriture, qui était à la fois sa pire ennemie et ce qui lui apportait le plus de plaisir.

Elle nous parle des différentes phases qu’elle a traversé et du moment où elle est passée d’un corps considéré en surpoids à une anorexie restrictive. 


Et de la façon dont cette pathologie impacte encore son quotidien de plein de façons différentes.

La question de la légitimité est très présente tout au long de notre échange, ce qui n’est pas rare lorsqu’on vit avec un TCA, puisque très en lien avec le fameux perfectionnisme.

Un grand merci à Éva pour ce témoignage fort, à coeur ouvert. 


Au programme : 


Présentation d’Éva 

Ses premiers souvenirs en lien avec le corps et l’alimentation 

Les différentes phases qu’elle a traversé
La sortie d’anorexie : le pacte avec son mari

Sa façon de manger aujourd’hui
Ce que je lui conseille de mettre au travail
Ce qu’Éva se souhaite pour l’année à venir
Ce qu’elle aimerait passer comme message 




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Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans TCA, etc., le podcast qui décrypte les troubles des conduites alimentaires et tout ce qui gravite autour, parce que ça n'est jamais seulement qu'une histoire de bouffe. Je suis Flavie Mitsono, et j'accompagne les mangeuses compulsives à devenir des mangeuses libres bien dans leur basket. Alimentation, peur du manque, insatisfaction corporelle, peur du jugement, du rejet, empreinte familiale, grossophobie, les sujets abordés dans ce podcast sont très vastes, et pour ce faire, mes invités sont aussi très variés. Retrouvez-moi aussi sur Instagram où j'aborde tous ces sujets au quotidien sur Flavie.mtca. Très belle écoute ! Salut Eva, bienvenue dans mon podcast, je suis très contente de t'accueillir.

  • Speaker #1

    Bonjour Flavie, moi aussi je suis très contente d'être là, je suis auditrice d'habitude, ça me fait bizarre mais je suis très contente.

  • Speaker #0

    Tu es donc de l'autre côté aujourd'hui.

  • Speaker #1

    C'est ça.

  • Speaker #0

    pour venir discuter avec moi. Et c'est bien chouette. Merci d'avoir répondu à mon appel à témoignages, puisque je suis toujours... Alors, j'allais dire, je suis toujours en recherche. Il ne faut pas que je le dise trop, parce que j'ai du retard dans mes mails. Et voilà. En tout cas, si je suis toujours en recherche, n'hésitez pas, vous qui m'écoutez, à venir m'écrire sur l'adresse mail dédiée au podcast pour qu'on discute ensemble. Par contre, ne soyez pas trop pressés d'avoir une réponse. Je peux mettre un peu de temps. Bon, tu connais un peu le principe du podcast, comme d'hab, je vais commencer par le commencement, c'est-à-dire te proposer de te présenter de la manière dont tu le souhaites.

  • Speaker #1

    Alors, je m'appelle Eva, j'ai 37 ans et des brouettes et je travaille dans la communication pour une collectivité territoriale, je suis rédactrice et je vis en couple avec mon amoureux depuis 10 ans. Et j'ai un petit garçon de 16 mois qui est le plus chouette du monde, évidemment.

  • Speaker #0

    C'est lui le plus chouette ? Je croyais que c'était mes enfants les plus chouettes du monde. On m'a menti.

  • Speaker #1

    Je sais que tes enfants, mon fils, c'est vraiment chouette.

  • Speaker #0

    Ok, trop bien. Et donc, on est là pour parler de troubles alimentaires, comme d'hab, sur le podcast. Ouais,

  • Speaker #1

    j'ai oublié de te dire ça.

  • Speaker #0

    Non, mais c'est hyper bien. C'est plutôt bon signe que tu ne te présentes pas avec le trouble alimentaire. Déjà, ça dit quelque chose de toi. et de ta relation au trouble alimentaire. Et donc, voilà. Je ne t'invite pas nécessairement à en dire plus maintenant, mais en tout cas,

  • Speaker #1

    c'est bien pour qu'on en parle. Côté trouble alimentaire, j'en souffre ou j'en suis habitée. J'hésite toujours un petit peu sur le terme. Selon moi, depuis l'enfance, par un trouble alimentaire, j'ai tendance aussi à dire... qui sont tous le même, qui a pris différentes formes dans la restriction, dans l'excès, dans beaucoup de choses, mais qui pour moi est la même chose depuis toujours et qui a pour, je ne sais pas si c'est une particularité, mais de jamais avoir atteint des niveaux, on va dire, spectaculaires. Jamais des poids extrêmes ou jamais des comportements extrêmes, mais quand même suffisamment présents pour être difficiles, voire impossibles à enlever et pour prendre beaucoup d'espace de cerveau.

  • Speaker #0

    Oui, ok. J'aime bien ta manière d'amener ça et je pense que tu le sais, je suis assez d'accord avec l'idée que finalement, le trouble alimentaire, c'est… une pathologie, un trouble alimentaire et c'est juste qu'ils s'expriment de manière différente. Oui,

  • Speaker #1

    complètement. Vraiment, c'est la même bestiole ou créature cérébrale, je ne sais pas comment la dire, j'ai utilisé différentes métaphores dans ma vie, mais qui utilisent différentes techniques selon les moments de notre vie, tant qu'on ne s'en est pas débarrassé. Tu vas manger plus, tu vas manger moins, tu vas manger ci, tu vas manger ça, mais c'est la même source, je crois. C'est la même chose.

  • Speaker #0

    Oui. Et avant ça, tu le sais, j'aime bien poser cette question-là pour savoir un peu comment ça se passait dans l'enfance. Donc avant son arrivée, je ne sais pas à quel âge il est arrivé, mais en tout cas, je me demande quels sont tes souvenirs, toi, dans le rapport à ton corps et le rapport à l'alimentation quand tu étais une petite fille ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne sais pas à quel âge il est arrivé parce que je n'ai pas de souvenirs avant. C'est-à-dire que mes premiers souvenirs... en rapport à l'alimentation, en rapport au corps, il est déjà là. Je ne sais pas si je vais peut-être lui donner un prénom à un moment pour faciliter l'échange. Il y a moi, mon premier souvenir, mon souvenir le plus ancien vis-à-vis de l'alimentation, c'est qu'il y a un sentiment de très ambivalent, où j'ai ce souvenir où l'alimentation m'apparaît en tant qu'enfant comme le plus grand plaisir qui soit possible, un truc, ce gâteau au chocolat, c'est la plus belle chose au monde, rien n'égalera jamais ce plaisir-là. un sentiment de danger immense du coup. Parce qu'à la fin de la part de gâteau au chocolat, j'en veux 8 autres, tout de suite. Alors, c'est évidemment pas quelque chose qui est… Je ne suis pas née avec ça, c'est sûr, mais par contre, je ne me souviens pas de comment c'est arrivé. Et mon rapport au corps, il est lié à ce danger. J'ai toujours souvenir qu'il y a un lien entre le… la deuxième part de gâteau au chocolat et le fait que j'avais l'impression de vivre dans une sorte de... d'être un peu la petite fille bougoule. Et je n'ai pas de souvenirs avant ça. Mes premiers souvenirs, je suis en train de... Ce n'était peut-être pas forcément mon activité principale, mais ils impliquent d'avoir des choses en trop, des parties en trop, de la chair en trop, du gras en trop. d'aussi loin que je me souvienne. Donc, je n'ai pas de souvenir d'alimentation intuitive, de « je mange ça et puis c'est bon » , et puis peu importe, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, de légèreté avec la nourriture. Il n'y a pas le souvenir de ça. Et tu te souviens quel âge tu as sur ces parts de gâteau au chocolat, ces souvenirs-là ?

  • Speaker #1

    Avant 6 ans, c'est sûr. À 3-4 ans, peut-être.

  • Speaker #0

    Ah bah oui, donc en fait,

  • Speaker #1

    tu ne peux pas avoir de souvenirs à l'eau,

  • Speaker #0

    en fait.

  • Speaker #1

    Ah non, non, non, c'est ça. Pour moi, c'est extrêmement constitutif de ma personne. Bon, Eva, elle est trop grosse parce qu'elle mange trop, quoi. C'est hyper intrinsèque.

  • Speaker #0

    OK. Et là, c'est un peu la question qui de l'œuf ou de la poule qui me vient.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Est-ce que le rapport au corps est consécutif de ton rapport à l'alimentation qui aurait pris place pour autre chose ? Ou est-ce que ton rapport à l'alimentation, il est consécutif de ce rapport au corps et d'une pression peut-être qui a été mise aussi ? En tout cas, j'entends qu'il y avait des réflexions, parce qu'Eva est trop grosse parce qu'elle mange trop.

  • Speaker #1

    Personne ne me l'a jamais dit à voix haute. Mais effectivement, je fais partie de ce cas de figure très atypique aussi. J'ai grandi entourée de femmes, ma mère et ma grand-mère, deux femmes qu'on entendait bien, méditerranéennes, donc avec un peu de un fort caractère et qui elle-même, comme beaucoup de femmes, était dans le truc de « il ne faut pas te commanger, il faut faire attention, etc. » J'ai grandi avec une mère qui avait des problèmes de poids, qui en a toujours eu, et qui en fait ne m'a jamais dit « ma fille, tu es trop grosse » , mais par contre qui, elle, disait toujours « moi, je suis trop grosse et je mange trop, je devrais faire attention » , ce qui du coup, pour un enfant et un cerveau en construction, boum, il se trouve qu'en plus je ressemble morphologiquement un peu à ma mère. le cerveau n'a pas eu besoin de faire 12 000 circonvolutions pour dire, « Bon, ben toi, t'aimes trop manger. » La troisième, la quatrième part de gâteau au chocolat que je voulais, c'est parce que quelque part, je pense que l'insécurité était là de base. Oui,

  • Speaker #0

    les aliments sur un piédestal, il n'y a rien de mieux que ce gâteau au chocolat.

  • Speaker #1

    Il n'y a rien de mieux. J'ai souvenir de ma grand-mère qui, après j'arrête avec le gâteau au chocolat, mais qui disait « Oh là là, si seulement ça pouvait avoir mauvais goût » . Je me souviens.

  • Speaker #0

    « Si seulement ça pouvait avoir mauvais goût » . Ouais, d'accord. Ok, donc déjà,

  • Speaker #1

    tu as présenté l'ambiance. Ouais,

  • Speaker #0

    non mais tu étais tellement petite, c'est incroyable.

  • Speaker #1

    Oui, parce que, mais parce qu'en fait ça n'a pas été fait volontairement, c'est juste que... Il faut que je précise aussi qu'en plus, j'ai une sœur qui a très peu de différences d'âge avec moi et qui est superbe. Ça joue, je pense. Et il est évident que n'importe quel adulte qui passe, enfin, oh là là, qu'est-ce qu'elle est belle. Moi, j'étais sympa. Et donc, je crois que tout ça se mélange et fait un truc internalisé. dans le fait qu'il y a eu assez vite entre nous, dans le regard des autres, ou en tout cas je le sentais dans le regard des adultes, des deux sœurs, où il y avait la belle et puis il y avait l'autre. Et je pense que ça a joué dans le côté... Toi, Eva, on ne peut pas te laisser seule avec un gâteau. Ce n'est pas une bonne chose.

  • Speaker #0

    Ta soeur, elle n'a pas du tout développé de problème ou un rapport un peu conflictuel avec son corps, l'alimentation ?

  • Speaker #1

    J'ai envie de dire qu'elle se situe dans une moyenne raisonnable des femmes dans notre société aujourd'hui. C'est-à-dire que des femmes qui sont vraiment... libres, tranquilles par rapport à leur alimentation et dans leur corps, il y en a si peu que je ne sais pas si, j'en connais peut-être pas personnellement ou une ou deux, enfin quasiment personne. Le niveau d'après ça, c'est des femmes qui se débrouillent et dont je sens que par contre aujourd'hui, elle n'a pas le cerveau aussi imprégné de ça que moi, je l'ai.

  • Speaker #0

    Ok. Elle est plus grande ou plus petite ?

  • Speaker #1

    Elle a un an de plus que moi. Donc,

  • Speaker #0

    comment t'expliques, comment t'expliques ou tu comprends, peut-être que tu n'expliques pas et que tu ne comprends pas, le fait que ce soit si différent pour vous ?

  • Speaker #1

    Parce que ma sœur est un soldat et qu'elle a des moments que moi, j'ai pris avec moi-même, même pour m'auto-flageller ou même pour me dire « Ah là là, t'aimes pas ? » pour manger, il faudrait moins manger, etc. Ma sœur est tellement dans le... On a eu une histoire familiale un peu compliquée avec un divorce parental très conflictuel, beaucoup de conflits familiaux. Et ma sœur, elle a été en mode soldat, casque bleu, je ne pense qu'aux autres. Donc elle a tellement dissocié par rapport à son corps qu'elle, elle l'a fait comme ça. Elle s'est mise en mode mission, je serre les autres et je crois qu'elle ne s'était pas intéressée.

  • Speaker #0

    Pas intéressée à quoi ? À qui,

  • Speaker #1

    à quoi ? Peut-être que moi, le moment où j'ai commencé à tripoter mes bourrelets, à me dire « je suis trop grosse, je suis trop truc, je suis trop machin » , elle, elle ne l'a juste pas fait, parce que quelque part, elle avait le cerveau ailleurs. Peut-être que morphologiquement aussi, ça se passait différemment, parce qu'on est toutes différentes et qu'il y avait moins de... de conséquences à observer sur son corps de comportement alimentaire. Aujourd'hui, je pense qu'elle n'est pas moins tranquille avec l'alimentation que la plupart des femmes qui disent en gros « oh là là, cet été, attention » . Ce genre de culture des régimes ordinaires un petit peu complètement banalisée.

  • Speaker #0

    Ok. Et que ce soit ta grand-mère, je ne sais pas si elle est toujours en vie, mais au moins ta maman et ta sœur, est-ce qu'elles savent ce que toi, tu as traversé et ce que tu traverses ?

  • Speaker #1

    Alors, elles l'ont su parce que j'ai traversé plusieurs périodes dans ma vie. Donc, j'ai eu une période de ce que l'IMC qualifierait de surpoids jusqu'à mes 25 ans à peu près. Simplement parce que je n'ai pas... Alors du coup, je fais un petit fil chronologique parce que sinon ce n'est pas très lisible. Je n'ai jamais été une enfant ni une adolescente au régime. On m'aurait laissé faire si j'avais entrepris, mais franchement, je n'en avais pas la détermination, même si je pense que j'emploie des termes qui ne me convainquent pas, mais je le dis pour aller vite. j'étais, et tant mieux, incapable de tenir un régime. J'ouvrais un magazine, je le faisais un jour, c'était fini.

  • Speaker #0

    Donc, ça veut dire que tu avais l'envie quand même.

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr. C'est-à-dire que toute ma vie jusqu'à mes 25-27 ans, j'ai dit, oh là là, j'arrive pas à tenir un régime, mais je suis nulle, quoi. Les autres y arrivent, quelle horreur. Moi, je suis vraiment inincapable, etc. Mais un jour, j'y arriverai. Un jour, ce sera le grand déclic. Un jour, ce sera le grand changement. Un jour, je perdrai les... Les 10-15 kilos qui m'empêchent d'accéder au bonheur absolu de peser 15 kilos de moins. Ah oui, oui, non, mais c'est vraiment stupide. Et j'ai grandi jusqu'à mes premières années de vie toute seule où j'étais un peu en mode… Peut-être dans ce qui a été l'alimentation la plus libre de ma vie de quand on commence à vivre seul et à acheter ce qu'on veut. Alors du coup, ça faisait des espèces… de choses qui ressemblaient à des compulsions de temps en temps. Et en même temps, je n'étais pas si malheureuse de ça. Donc, ce n'était pas si mal. C'était peut-être ce que j'ai connu de plus libre comme alimentation. Mais donc, bref, je mangeais trop par rapport à... à mes besoins en me disant mais je devrais faire autrement et puis un jour j'y arriverai, un jour je le ferai. Et puis autour de mes 27-28 ans a démarré très très très progressivement une phase de perte de poids au début, allez j'ai fait telle activité physique, j'ai fait un tout petit peu ça, je me sens bien, t'inquiète pas je fais juste un tout petit peu de sport. Mais pour quelqu'un qui n'a jamais réussi, je fais des guillemets dans les airs, à perdre du poids de sa vie et qui y arrive un tout petit peu, puis un tout petit peu, puis un tout petit peu, ça a représenté une espèce d'euphorie, de tranquillité. En plus, j'avais l'orgueil de le faire sans un protocole précis, un régime hyper, mais vraiment sur la durée, très lentement, c'est-à-dire sur deux ans, quelque chose comme ça, j'ai perdu 20 kilos. Mais lentement, tranquillement, en disant à tout le monde, mais c'est parce que je me sens tellement mieux, j'ai fait un peu de sport, je mange juste un tout petit peu moins, etc. Et cette chose, la peur de reprendre et de repartir dans la zone de la société des gens en surpoids, cette peur-là de repasser dans la catégorie des gens, genre Fede Guimard-Lair, trop gros. m'a fait basculer très mécaniquement dans une phase restrictive, où pour le coup, là, ça s'est vu. Et donc, pour répondre à ta question d'il y a 10 minutes, ma mère et ma sœur l'ont vu. Tout le monde l'a vu. Parce que là, je suis passée... Alors, il y a eu un diagnostic d'anorexie. On fait un peu vite, je trouve, mais je veux dire, techniquement, ça correspondait tout à fait aux symptômes d'une anorexie restrictive. Et cette période-là a duré, c'est toujours compliqué à dater parce que la période par laquelle on en sort est jalonnée de haut, de bas, mais deux ans.

  • Speaker #0

    Donc deux ans de perte de poids progressive, puis s'ajoute à ça deux ans d'anorexie.

  • Speaker #1

    Il y a peut-être une année d'intersection, on va dire trois ans.

  • Speaker #0

    En même temps, vu de l'extérieur, c'est quelque chose qui s'observe beaucoup. Parce que 20 kilos en deux ans, tu peux te dire 10 kilos par an, ce n'est pas tant. En fait, c'est énorme. Et c'est surtout qu'une perte de poids ne se maintient pas comme ça. C'est-à-dire qu'à la limite, perdre les dix premiers kilos. Mais tout de suite, quand tu as dit ça tout à l'heure, je me suis dit… La deuxième dizaine, à mon avis, il y a quand même quelque chose d'un peu plus restrictif qui s'était enclenché.

  • Speaker #1

    Très restrictif qui s'est enclenché. En gros, sur le tournant 2017-2018, je ne sais plus faire la soustraction, je ne sais plus quel âge j'avais, mais j'ai entamé un « oh, je fais un tout petit peu de sport de temps en temps » . Et on va dire qu'un an et demi plus tard, j'en étais à compter mes calories et à faire un truc hyper… hyper pointu avec un carnet où je comptais à l'avance de préparer mes tupperwares pour aller au travail. Et là, on était passé dans quelque chose de très, très, très typique, en fait, dans la restriction. La perte de poids est devenue intentionnelle. Puis, à basculer dans le « c'est même plus ce qui est important, ce qui est important, c'est de ne pas reprendre » , puis c'est devenu la peur du morceau de pain ou de salade. C'est ça. Mais, comme je le disais au début… Même, tout comme je n'ai jamais été en surpoids de façon spectaculaire, ce mot ne convient pas, mais c'est tout ce qui me vient, je n'ai jamais été ni en obésité, ni en surpoids, où les gens disaient quand même, fais attention. Je n'ai pas non plus été, en tout cas à l'époque, mais c'est aussi un des traits de cette maladie-là qui prend des formes différentes. Ça me semble inutile de donner des poids et des chiffres. très très rigueur, mais je suis descendue à un poids dont je me disais, c'est impressionnant, parce que quand on est dans cet état d'esprit-là, on a même le moment du défi de, ah oui, mais j'ai entendu tel témoignage, elle est descendue jusque-là, donc je ne suis pas vraiment malade, je n'ai pas de soucis.

  • Speaker #0

    Mais ça c'est ce que tu disais à l'époque, mais ce que tu dis aujourd'hui avec le recul.

  • Speaker #1

    Il est très fréquent que je n'arrive pas à dire à voix haute que j'ai été, que j'ai traversé une phase d'anorexie restrictive parce que la société est ainsi faite que de même qu'on se surveille les unes les autres la taille de jean, j'ai trop peur qu'on me dise « ah bon, t'es descendu jusqu'à quel poids ? » et qu'on me dise « ah ben ça va, c'est pas… »

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    parce que mon cerveau est complètement… constitué de ça, j'ai l'impression je ne suis, quand je raconte la façon dont je le ressens je ne suis pas d'accord avec moi-même en fait je trouve ça stupide de me dire tu n'as pas été assez maigre pour dire que tu as souffert d'anorexie parce que c'est ça et puis quand tu parles de poids zut

  • Speaker #0

    j'ai perdu le mot spectaculaire ben moi je me dis attends à un moment donné si tu as perdu une vingtaine de kilos Il y a quand même moyen. En fait, parce que si tu m'avais dit je suis montée très, très haut et donc j'ai reperdu 20 kilos, mais donc je n'étais pas non plus dans un sous-poids spectaculaire. Mais comme tu dis, je n'ai pas fait des poids très, très hauts. Si tu ne fais pas un poids très, très haut, mais que tu perds 20 kilos. Et puis, il y a autre chose que j'aimerais... Et puis,

  • Speaker #1

    ça me fait une morphologie méditerranéenne aussi qui fait qu'en fait, le poids de mon squelette, les hanches, la poitrine, des choses qui font que j'ai une morphologie qui fait que je ne peux... pas physiquement aller dans des poids qui sont parfois mentionnés dans les témoignages de l'extrême ou des choses comme ça. Physiquement, c'est-à-dire que très techniquement, je suis allée à mon minimum personnel. Mais oui. Parce que, de toute façon, je ne tenais plus debout, ça n'allait.

  • Speaker #0

    Mais donc, le poids était extrême et spectaculaire. Tu vois ce que je veux dire ? De toute façon,

  • Speaker #1

    il faut bien dire une chose,

  • Speaker #0

    c'est que le corps humain, notre corps, il n'est pas fait pour maigrir. Parce qu'on est le résultat d'années et d'années d'évolution. Nous ne sommes pas faits pour perdre du poids, encore moins beaucoup. Et en fait, si moi, là, qui suis autour de mon poids d'équilibre, je prends 20 kilos, oui, il va y avoir plein d'adaptations pour mon corps. En fait, ce n'est pas souhaitable pour mon corps, ce sera difficile, mais ça va aller. Je ne me dis pas que je vais tomber malade à coup sûr. Par contre, si j'en perds 20, je vais être fatalisée.

  • Speaker #1

    Ah ben, absolument.

  • Speaker #0

    Parce qu'en fait, notre corps est beaucoup...

  • Speaker #1

    plus fait pour s'adapter à des prises qu'à des pertes de poids et donc ça reste spectaculaire ce que j'avais fait et puis de toute façon le côté visible spectaculaire pathologique en fait se mesure de toute façon à mon incapacité à fonctionner au quotidien qui se voyait très clairement ou là bas oui ma famille s'en est rendu compte mon amoureux s'en rendait compte et le disait et attirer à tenter de tirer la sonnette d'alarme des mois et des mois avant ce Merci. point de bascule où j'ai dit bon ok ça va pas ça va pas pouvoir perdurer tout le monde se rendait compte bien sûr à mon travail je ne sais évidemment en améliorer j'avais plus de capacité cérébrale j'avais plus de mémoire plus de fondée en larmes pour un oui pour un non et j'étais pas j'étais pas du tout un être humain fonctionnel quoi c'est sûr

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui a marqué l'autre virage alors ? Parce que tu as parlé de ce virage de bascule dans l'anorexie et le virage de sortie d'anorexie.

  • Speaker #1

    Je crois qu'il y a un moment, parmi les nombreuses et nombreuses conversations que j'avais eues avec mon amoureux, où il me disait ça part trop loin, ça devient pathologique. Ce petit truc que tu avais commencé à faire pour te sentir bien, c'est complètement obsédant et tu ne penses plus qu'à ça. Je vois bien que tu ne penses plus qu'à ça, tu n'es plus là, tu n'es plus avec moi. Parmi ces nombreuses conversations, je lui dis mais non, mais non, mais non, ça va. Je crois qu'il y a un jour, enfin si je sais qu'il y a un jour où on faisait un trajet à vélo dans Paris à plat et où à un moment je n'ai plus pu pédaler du tout, je me suis assise sur le trottoir et je lui ai dit ok, d'accord. Oui, c'est vrai. Parce que c'est la maladie du déni aussi. Et donc, quelle que soit sa forme et son visage, on dit toujours non, non, ça va, ça va, ça va. Et là, je lui ai dit bon, ok. Et là, du coup, c'est fait un pacte avec lui où j'ai jamais réussi à trouver... Alors, j'ai un peu consulté une psychiatre, j'ai un peu consulté une psychologue, mais l'honnêteté me pousse à préciser que j'ai jamais vraiment réussi à... Je ne sais pas si c'est faire confiance à quelqu'un, mais je crois que j'avais un peu trop honte de ce que je faisais, de ce que je vivais. Et donc, j'ai beaucoup trop... miser sur mon amoureux comme soutien, comme pilier beaucoup trop parce que je lui donnais un rôle qui était beaucoup trop lourd pour lui Et c'est à lui que j'ai demandé de me renutrir, de cuisiner pour moi, de portionner les choses. Alors, c'est passé par plein de phases parce qu'il y a des fois où j'y arrivais, et puis des fois où je n'y arrivais pas, par des petits contrats de poids, par des contrats de poids un peu hebdomadaires. Et puis aussi, le contrat n'était pas atteint, des espèces de gages, de calories supplémentaires à gérer. qui était quelque part une reproduction des techniques qu'on a dans certaines hospitalisations, mais que du coup j'ai fait à la maison avec lui. Ça a eu plein de hauts, plein de bas, plein de j'y arrive, plein de j'y arrive pas, et ça a pris encore deux ans de ça va, de quasi-guérison, de rechute. j'ai plus exactement le détail en tête de mois par mois etc mais deux ans de ça va mieux de je repère de ça repart où mon cerveau n'était pas libéré, n'était pas convaincu parce qu'avec le fait de maigrir c'est allumé et ne s'est jamais éteint la peur de regrossir et ça je ne sais toujours pas comment l'éteindre Je ne sais toujours pas comment la tenir un peu à distance, la calmer, même argumenter contre elle. Et donc, j'ai fait des hauts et des bas. Mais au fur et à mesure, la vie passant, ma grosse motivation, c'était d'essayer de retrouver un cycle et la capacité, parce qu'on n'avait pas d'enfant à ce moment-là, d'essayer de retrouver un corps suffisamment en forme. pour avoir des cycles et pour pouvoir tomber enceinte un jour. Ça, ça a été dans ces années-là, ces deux années-là, de sortir vraiment de la phase restrictive, de la phase d'anorexie. Ma motivation principale, le truc qui faisait que j'arrivais à dire « Regarde pas, regarde pas, regarde pas ce que tu fais, regarde pas ce que tu manges, t'inquiète pas. » Ce n'est pas forcément une solution parce que du coup, j'ai déconnecté, mais je n'ai pas été dans une démarche de juste… être un peu dans mon corps, ressentir les... Je dis, bon, c'est pas grave. Il faut juste... Grosso modo, tant que t'as pas retrouvé un cycle, c'est que t'as pas encore assez repris. Regarde pas. Ou regarde et dis-toi que tant pis, mais parce que je voulais retrouver la possibilité d'avoir un enfant.

  • Speaker #0

    En même temps, dans ce que tu dis, il y a un truc important, là, quand tu dis... C'était peut-être pas l'idéal parce que je déconnectais, je regardais pas, j'étais pas connectée à moi. Je pense qu'en guérison d'anorexie, c'est pas possible de tout faire.

  • Speaker #1

    Oui, peu importe.

  • Speaker #0

    Je crois pas, sincèrement. Je crois que c'est ça quand il y a une grosse confusion, quand il y a des détracteurs de l'alimentation intuitive ou des outils de type alimentation intuitive qui disent que non, c'est pas... Quand on a des TCA, il faut pas, alors que c'est genre... la thérapie spécifique TCA, qui disent ouais mais en cas d'anorexie, effectivement en fait tu as pas demandé à une personne qui souffre d'anorexie de lui dire mais non mais juste écoute ton corps, enfin non bien sûr et je pense qu'il y a des phases donc je trouve ça quand même fort quoi de ce que vous avez mis en place. C'est fou et je me dis mais waouh, enfin effectivement faire ça en cours

  • Speaker #1

    couple votre couple a tenu donc oui non mais tu vois mais attention oui oui bien sûr on a une très très chaud et et ça a été très difficile ouais c'est à dire que lui c'était c'était énorme ce que je lui ai mis sur les épaules c'est c'est affreux parce qu'il sentait bien ouais je voyais un petit jeu mais il sentait bien que tout le la partie physique de ma reconstruction, et là je parle vraiment physiquement, de remettre de l'organisme, de remettre des calories dans la machine, je reposais ça entièrement sur lui, et je lui disais, je ne veux pas ça, si moi je n'arrive pas à le faire moi toute seule, à partir de rien, il faut que tu me donnes la béquille, et donc cette passion-là qu'il avait lui. tant pour permettre à la personne qu'il aimait de retrouver la santé que pour éventuellement la possibilité pour lui de construire une famille.

  • Speaker #0

    c'était beaucoup beaucoup et il y a eu des ouais ouais on a eu chaud c'est sûr qu'après ça a pris du temps de restabilisation mais on est encore très marqué par cette période par le souvenir de cette période et par le fait que je suis pas guérie du tout du gros trouble alimentaire mon corps est en sécurité c'est bon je suis plus en danger physique mais par contre je souffre toujours de ce qui est pour moi le même TCA qui s'exprime différemment aujourd'hui et c'est encore très dur pour nous au quotidien. Lui, il en a légitimement un peu marre de vivre avec ça. Et de le dire ? Bien sûr,

  • Speaker #1

    oui. Vous en parlez ouvertement ?

  • Speaker #0

    Oui. Oui, parce que bien sûr, j'ai au quotidien tout un tas de petits tocs alimentaires, de choses qui sont... des restes de ça, je fais des espèces d'obsessions qui sont très très faciles à identifier au quotidien et que lui, il s'en passerait. Oui, il me le dit, on en parle. Le trouble, il est là, il est entre nous, il est à la maison au quotidien, mais en tout cas, par contre, oui, ça, on en parle. Mais oui, pour revenir sur la partie renutrition, sur la phase réfléchis pas et mange, je suis complètement d'accord qu'effectivement, quand on se prépare d'anorexie, je pense qu'il y a un moment, en tout cas, il y a une phase très, très clé de toute façon, le moment de s'écouter, de tout ça. Il faut avoir un cerveau fonctionnel et quand il n'a pas à manger, le cerveau, il n'écoute rien du tout. Donc, bien sûr qu'il y a cette phase-là. C'est vrai que… Alors... Tous les cas sont des cas particuliers, mais dans le mien, comme j'ai très souvent, là je l'ai dit un peu vite, que jusqu'à mes 25-27 ans, j'ai été plutôt en surpoids qu'autre chose. Et ensuite, il y a eu deux, trois ans où j'étais en phase restrictive. En fait, c'est peu à l'échelle de ma vie. Moi, quand je regarde ma vie, quand je me souviens de l'histoire de mon comportement alimentaire, à l'échelle de ma vie, ce n'est pas ces trois années-là. c'est plutôt, je me réfléchis plutôt comme quelqu'un qui est quelqu'un de compulsif vis-à-vis de la nourriture, qui, en l'air, doit faire attention, à qui on ne peut pas faire confiance avec un paquet de gâteaux, etc. Parce que c'est comme ça que j'étais enfant, adolescente et jeune adulte. J'ai toujours eu un... J'en ai pas parlé tout à l'heure, quand on parlait de mon enfance et de ce que ça avait fait de moi comme mangeuse, tout ce qu'on disait par rapport à la construction de la nourriture, c'est mal et une femme, ça doit faire attention. Et qu'effectivement, bon, certes, c'est assez évident, mais je le dis quand même, ça a évidemment causé chez moi une incapacité totale à connaître ma faim, à connaître ma satiété. c'est ce qu'il y a tout à fait logique, mais ce qui a fait de moi une mangeuse, bon évidemment pas intuitive, et un peu comment dire, d'occasion.

  • Speaker #1

    Attends, qu'est-ce que c'est que ça une mangeuse d'occasion ? Je ne m'attendais pas à ça.

  • Speaker #0

    Ouais, c'est pas forcément un terme qui convient bien, mais c'est à dire que comme moi, donc je le disais à la... Au début, je ne sais évidemment pas ce que c'est une portion de gâteau au chocolat, mais je ne sais évidemment pas ce que c'est qu'une portion de gâteau au chocolat, ou à la fin, c'est bien, c'est suffisant, je ne sais pas. Enfant, moi, c'est… Pour moi, la portion, c'est la portion qu'on me mettait dans l'assiette ou qui m'était autorisée. À la fin de mon assiette… Je n'avais pas accès à mon cerveau, à mes sensations corporelles pour dire que c'était suffisant, que ce n'était pas assez. Je n'ai jamais affiné une assiette de ma vie, y compris dans ma période d'anorexie restrictive. Je faisais des assiettes de concombre, mais alors, elles étaient vides à la fin. Je ne sais pas, en milieu d'assiette, me dire que ça va là. Parce que c'est comme si ça a créé une sorte de précieusité. du fait de manger, s'arrêter de manger, c'est une occasion ratée. Alors que là, tu es dans une phase où c'est autorisé, va jusqu'au bout. Et donc, la mangeuse d'occasion, c'est par exemple s'il y a un moment quand aucun adulte ne regarde, il y a un bout de quelque chose qui traîne. L'enfant que j'étais ne se posait même pas la question de si j'en avais… Bon, évidemment, si j'avais faim, ce n'était même pas la question, mais même pas la question de si j'en avais envie. C'est parce que là, j'avais une fenêtre, personne ne me regarde. Il y a un des souvenirs les plus marquants et les plus… ridicule. Vraiment, en plus, j'ai honte de partager ce truc-là, mais en même temps, je pense que c'est tellement représentatif que c'est utile. Et j'espère que ma mère n'écoutera jamais cet épisode, mais ça m'est arrivé. Tu sais, quand t'es enfant, que ta mère a préparé ou ton père, en l'occurrence là, ma mère a préparé le saladier de pâte à crêpes et que tu obtiens le droit de... C'est moi qui fais cuire les crêpes, vas-y, va faire autre chose. Eh bien, de manger soit les crêpes parce que j'étais seule dans la cuisine à faire cuire les crêpes, opportunité, soit de manger quelques-unes des crêpes un peu ratées, ou la louche de pâte à crêpes dans la bouche, crue. Pourquoi ? Parce que j'avais trois secondes devant moi et que quelque part, il y a quelque chose dans mon cerveau qui s'allume de, je ne sais pas, c'est interdit.

  • Speaker #1

    Mais oui. C'est pas le choix.

  • Speaker #0

    C'est une forme de devoir,

  • Speaker #1

    en fait. Ça fait de la peine pour cette petite fille tellement en insécurité. Il y a quelque chose de tellement, tellement, tellement, tellement en insécurité chez cette petite fille qui, vite, ça y est, c'est le moment, il y a une ouverture.

  • Speaker #0

    Voilà, ouverture. Il n'y a plus de faim, il n'y a même plus d'envie. Il y a un peu de plaisir, mais pas tant. Et il y a une projection sur la nourriture de... d'autres insécurités, de tout ça. Mais c'est une chose qui me reste aujourd'hui. Alors, les variations de poids, la période restitutive que j'ai traversée, etc., fait qu'aujourd'hui, après avoir traversé tout ça, je suis un peu partie dans tous les sens au niveau chronologique, je ne sais pas si ça se...

  • Speaker #1

    Non, moi,

  • Speaker #0

    ça va. Mais ça fait qu'aujourd'hui, je suis… Tout ça cumulé, toute cette histoire-là fait qu'aujourd'hui, je suis une mangeuse un peu étrange quand même. Parce que, alors, les phases de restriction-compulsion, je les fais au quotidien. Mais c'est comme si les… Enfin, ce n'est pas des très grandes oscillations, en fait. C'est-à-dire que ce ne sont jamais de très grandes restrictions et ce ne sont jamais de très grandes compulsions. Mais ça marche quand même comme ça. C'est aussi pour ça que je t'ai contactée, parce que je me disais, je pense qu'on est nombreuses à vivre ça. On entend souvent des témoignages de gens qui font de l'hyperphagie, ou de gens qui souffrent de boulimie dans des espèces d'énormes compulsions, d'énormes crises. Pour moi, ça passe plutôt par des plus petites oscillations, c'est-à-dire qu'au sein d'un même repas. il peut y avoir une sorte de restriction-compulsion, restriction-compulsion. Ça peut passer par le fait de peser un bout de pain à côté de la salade que je me suis faite et ensuite, à la fin du repas, du coup, d'être en incapacité d'arrêter de manger. Pas parce que physiquement, j'ai plus faim. J'ai encore faim, parce que ça, ça va. Mais simplement parce que le cerveau, maintenant, à une manière de refuser le mécanisme de restriction et de punir le mécanisme de compulsion après mon cerveau n'arrive pas à faire un choix aujourd'hui je ne suis plus quelqu'un qui dit bon bah c'est comme ça règle extérieure je dois me restreindre pour tel ou tel objectif de poids et je ne suis pas libre d'avoir accès à un paquet de gâteaux librement. Je ne me sens pas libre de ça. Et donc, je fais plein, plein de petites oscillations qui donnent très concrètement ce qui, moi, me semble ressembler à ce qu'on pourrait appeler l'hyperphagie prendiale. Là, on est purement... Enfin, c'est pas un diagnostic que je fais, c'est une estimation à la louche moi-même. Mais dans le sens où... c'est très très difficile d'arrêter un repas c'est un deuil c'est une c1 c'est dire au revoir à quelque chose c'est c'est la même chose que quand j'étais petite fille donc en fait je suis revenu au début de la boucle je suis parfaitement Ce qui est normal. Ce qui n'a pas été traité n'a pas de raison d'avoir disparu. Aujourd'hui, je fais du... Ouais, je pense des petits excès à chaque repas.

  • Speaker #1

    Tu serais d'accord de donner des exemples concrets ?

  • Speaker #0

    Ouais, ouais, ouais. Il y a en fait... Un repas, pour moi, il est à peu près... portionné à l'avance, il est mis dans une assiette, j'y pense avant, au fait que, bon, il n'y a pas de, par exemple, il n'y a pas de plat au milieu de la table où chacun se sert, quand je cuisine, moi je fais des assiettes où je décide ce qu'il y a dans mon assiette, quoi, avant de manger, et ensuite, une fois que j'ai fini ce plat, en fait, il y a cette espèce de réveil de dopamine du « manger c'est chouette » parce que c'est vrai, manger c'est chouette, euh qui fait que je vais prendre le petit truc après. Je vais aller dans la cuisine prendre le petit carré de chocolat avec la dizaine d'amandes à côté. C'est un exemple parmi d'autres. Et au moment de me servir, je me dis toujours, tout va bien. Après, c'est terminé. Et puis, je peux me retrouver à faire 5, 6, 7 allers-retours dans la cuisine pour ramener mon assiette et à reprendre le petit n'importe quoi. qui peut être re du salé après le dessert, re de se resservir de... Ah ben, oh là là, j'ai mangé 10 amandes, c'était super, c'était tellement bien. Je les ai comptées au moment où je me suis servie mes 10 amandes. Tout ça pour retourner dans la cuisine, la main dans le pot directement. Alors là, tu ne comptes plus. Et du coup, il y a ce truc de ce qu'on appelle en général le foutu pour foutu, qui est du... Ah, tu as dépassé, c'est trop.

  • Speaker #1

    Tu as mangé ta onzième amande.

  • Speaker #0

    Ouais, on y aime et puis après de façon incontable parce qu'après ça peut partir un peu. Voilà. Mais en tout cas, dans ce côté du… Le moment où tu vas t'arrêter va être le moment de la prise de conscience, de l'autoflagellation, du c'était beaucoup trop, du t'aurais pas dû, etc. Donc, ce moment-là d'arrêter, sur le coup, mon cerveau souhaite le retarder. Ben oui. Parce que ça va être le moment où je vais me… m'engueuler tu t'engueules tu te promets de te reprendre en main je promets plein de trucs et même la promesse il est même fréquent que la promesse arrive en cours de j'ai pas envie de dire crise parce que parce qu'il y a des parce qu'il y a des personnes qui vivent des vrais épisodes de crise de compulsion où il y a des énormes quantités de nourriture et ça c'est vraiment je pense beaucoup plus douloureux que ce que je vis moi même physiquement et du coup je veux pas employer le même terme par respect pour euh... pour la douleur physique des personnes qui vivent des épisodes où tout le blacaripasse. Moi, c'est un peu trop, mais à chaque repas. Parce que,

  • Speaker #1

    tu disais que pendant, tu te promets aussi pendant. Ouais,

  • Speaker #0

    pendant, je me dis, typiquement, je peux retourner cinq, six fois à la cuisine. Disons qu'à la troisième fois, je me dis, oh là là, ça fait trois fois que tu te resserres d'un petit truc après le repas. Si c'est le soir, demain matin, pas de petit-déjeun.

  • Speaker #1

    Ouais, c'est parti.

  • Speaker #0

    Donc, si tu es pendant que je fais ça, tu peux être sûre que si je me dis ça, par exemple, la troisième fois que je retourne à la cuisine, il y en aura cinq de plus. Puisqu'il y a punition demain matin. Enfin, il y a... Oui,

  • Speaker #1

    mais tu connais le mécanisme.

  • Speaker #0

    Et je le connais. Et je le connais très bien. Et ça me rend tarée de me voir faire.

  • Speaker #1

    Mais du coup, qu'est-ce qui te manque ? Qu'est-ce qui fait que tu continues de tourner en boucle alors ?

  • Speaker #0

    Je crois... Je crois que je n'ai pas réglé et je n'ai pas d'idée pour le régler. Aujourd'hui, au niveau morphologique, je suis repassée dans quelque chose d'intermédiaire entre le poids de ma jeunesse où je n'avais plus tant surpoids et ma période head-down, etc. Je suis dans ce qu'on appelle une morphologie « bon » . qui passe inaperçu. Un peu classique, je n'ai pas envie de dire normal, c'est nul, normal. Je n'arrive pas à enlever de ma tête, et en fait il est possible que ce soit la vérité, c'est de me dire que si j'arrête de m'inquiéter, si je mange sans me dire punition demain, ou... pesée de glucides ce soir, eh bien, je vais... laisser faire la petite fille que j'étais et qui pouvait avaler des louches de pâte à crêpes, voilà, et il n'y a absolument plus rien pour m'arrêter et je vais à minima redevenir ce que j'étais avant d'un point de vue morphologique. Et ça aussi, c'est un vrai deuil à faire, un renoncement. un vrai renoncement à ce que ça implique au niveau de la vie quotidienne parce que c'est vrai aussi qu'il y a tellement d'obstacles quand on n'a plus un corps normé, quand on est un peu au-dessus, quand on est beaucoup au-dessus et je ne sais pas combien, jusqu'où j'irai et que je ne me débarrasse pas de la projection que j'ai. du regard des autres sur moi et que presque j'entends dans ma tête les gens penser la grossie elle s'est laissée aller, enfin bref tout ce qu'on entend dans sa tête quand on passe ou que dans mon cas on repasse parce que ce serait repassé dans une catégorie qu'on pourrait qualifier de surprenant mais là il ya plusieurs sujets

  • Speaker #1

    Il y a le sujet d'effectivement prendre du poids ou non, c'est-à-dire que moi, je ne sais pas où est ton poids d'équilibre et que si tu avais une alimentation complètement libre, peut-être que tu serais au-dessus du poids que tu fais aujourd'hui. Peut-être que pas du tout, parce qu'en fait, tous les efforts que tu fais pour, quand tu dis te punir, donc les efforts que tu fais pour rattraper le tir le lendemain ou quoi, recréent de la, on ne va pas dire de la compulsion, alors on va dire de la suralimentation. qui recréent de la restriction, qui recréent de la suralimentation. Et donc, finalement, ça crée un espèce d'équilibre qui ne serait peut-être pas si loin de tes apports caloriques si tu mangeais sans restriction. Et donc, voilà, il y a le sujet vraiment prise de poids ou non. Mais pour moi, le sujet important, là, c'est que tu projettes, dans le fait de lâcher le contrôle, tu projettes une situation dans laquelle... tu étais déjà dans le contrôle, d'une manière ou d'une autre. Alors, il y avait un contrôle, déjà qui était bien internalisé, je pense, mais qui venait de l'extérieur, mais qui était très internalisé dès petite fille. C'est-à-dire que tu projettes, tu te dis, si là, demain, je ne suis plus dans... Comment tu as dit ça ? Si je ne m'inquiète plus. En plus, c'est intéressant parce que tu as dit, si j'arrête de m'inquiéter sur mon poids et d'avoir tous les comportements qui vont avec, alors je vais revivre. Parce que je vivais petite fille. Mais petite fille, tu t'inquiétais pour ton poids. C'est bien ça le problème. En fait, tu compares ta situation d'aujourd'hui. Tu te dis, si je change ma situation d'aujourd'hui, alors je revivrai celle d'hier. Mais celle d'hier, c'était la même.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Ce n'était pas de la liberté. Il n'y avait rien de... Tu vois ?

  • Speaker #0

    Non,

  • Speaker #1

    non. Ce n'est pas comme si tu me disais, moi, j'étais petite fille. hyper libre comportement alimentaire normal au sens de réguler et tout ça et j'étais dans ce qu'on appelle le surpoids et bomba fait chier j'ai pas envie d'y retourner parce que voilà on est dans une situation privilégiée gens dans la norme bon bref tout ça on le connaît mais non là en fait c'est pas ça c'était pas tu avais déjà un trouble alimentaire en fait oui absolument absolument donc effectivement il ya aussi ce truc de

  • Speaker #0

    La liberté, la vraie liberté, il y a un inconnu total.

  • Speaker #1

    Oui, comme pour la majorité des femmes, parce que même celles qui l'ont vécu un peu dans l'enfance, en fait, c'est comme si c'était un monde à part, l'enfance. Et puis, tu es dans l'enfance, certaines nanas ont vécu ça. Je peux manger ce que je veux, machin, mais je vois ma mère, ma tante, Micheline, tout le monde, la maîtresse à l'école, tout le monde fait attention. Quand je deviendrai une femme, je ferai attention comme tout le monde.

  • Speaker #0

    Oui, et puis c'est tellement internalisé, c'est tellement partout, c'est tellement tout le temps dans ma famille, dans la famille de mon amoureux, le truc de « Oh, quand même, demain, il faut aller courir. » Enfin, « Tiens, quand même, ce soir, je ne mange pas. » Mais au travail, mais partout, en fait. Je me rends compte depuis que j'ai… Parce qu'en fait, mon amoureux me dit, même plus que toi, il a raison, je suis tout à fait d'accord avec vous deux, il me dit « Mais tu as toujours… » Quand j'étais en phase d'anorexie restrictive, ils me disaient « mais enfin aussi, tu étais anorexique ! » C'est juste que là, ça se voit, mais tu te comportais quand même. Enfin, je veux dire, c'est quand même le truc de… Les louches de pâte à crêpes, pardon, je reviens à chaque fois sur les mêmes exemples, mais je veux dire, c'est un truc de compulsion lié à la restriction.

  • Speaker #1

    est lié à l'insécurité.

  • Speaker #0

    Tu l'as toujours eu, ce truc-là. Moi,

  • Speaker #1

    je te dirais, priorité, travailler sur l'insécurité alimentaire et sur tes sensations alimentaires. C'est-à-dire que, même sans rien changer aujourd'hui, à ta manière de te nourrir, tu peux déjà, par des petits exercices du quotidien, t'entraîner à aller ressentir des choses. Pour t'entraîner... à renouer avec ça parce que tu n'es pas cassé. Je suis persuadée que tout fonctionne très bien, c'est juste que tu as été déconnecté de ça dès la petite enfance. Mais tu as cette capacité à ressentir le rassasiement, mais par contre, ça va demander plein de petites expérimentations. Et en fait, ça commence par ressentir le goût vraiment des aliments, te dire sans aucune volonté dans un premier temps de dire, Allez ! Je me pose, je déguste en pleine conscience, comme ça, je vais pouvoir m'arrêter. Non, c'est juste, c'est trop cool de manger un bon aliment. Et c'est quoi son odeur ? C'est quoi sa texture ? Quel goût il a ? Tiens, à la dixième bouchée, est-ce qu'il a le même goût qu'à la première bouchée ? D'être dans du jeu, en plus, mettre un truc un peu léger, c'est du jeu. Il n'y a aucun enjeu. Ce n'est pas, je fais ça pour... Genre, c'est de l'entraînement. En fait, tu as besoin de t'entraîner à revenir à toi dans ton corps. Ça va passer par être de plus en plus fine sur tes sensations de faim aussi. Parce que le rassasiement, il est très dépendant de la sensation de faim. Mais moi, je te dirais bien, mets un peu du jeu, quelque chose de léger pour retrouver quelque chose de plus vécu dans ton comportement alimentaire.

  • Speaker #0

    Ce qui est fou en plus, c'est que j'ai l'impression de... C'est quoi The Child Jekyll and Miss Hyde ? Les sensations, on va dire gustatives ou les goûts des aliments, je cuisine pas mal, j'aime beaucoup cuisiner, je fais attention aux produits que je mange. Alors certes, pour le côté bio, la santé, tout ça, mais c'est pour le goût aussi. J'ai toujours aimé des choses qui étaient bonnes. J'ai jamais, ou pas très souvent, fait des espèces de compulsions sur des trucs un peu nuls ou que je n'aimais pas vraiment au goût. les aliments je les cuisine je les les travail et puis sur les et donc tout ce qui est début de repas pour moi je suis en pleine conscience c'est génial je sens le romarin je sens l'origan c'est super il ya du moelleux il ya du ça il ya du truc et à un moment du repas il ya un switch qui se passe où j'ai l'impression de d'un gouffre je sais pas comment le dire autrement mais qui s'ouvre à l'intérieur de moi C'est comme si j'avais un chrono pour faire rentrer le plus de nourriture dans un temps limité. Il y a un truc de...

  • Speaker #1

    Peut-être que c'est relié justement au changement de goût des aliments. Parce que c'est vraiment le premier... C'est un super outil pour le rassasiement. Les aliments, ils n'ont plus le même goût. Il y a des enfants, moi, ça me fait trop rire. En fait, tu l'as peut-être déjà vécu avec ton enfant ou ça viendra. Tu as le côté « Ah ouais, trop content de manger un truc, il mange, il mange. » Et puis, le visage change au bout d'un moment. Soit il a mangé trop vite et il n'a pas eu le temps de se rendre compte du changement. Et à la fin, il va te dire « Ah non, je n'aime pas ça. »

  • Speaker #0

    Oui, alors qu'il vient de s'en descendre une demi-heure.

  • Speaker #1

    « Je n'aime pas ça. Tu viens de manger toute ton assiette. Tu m'as demandé de te resservir. » Et en fait, bouf !

  • Speaker #0

    Ça veut dire « j'en veux de change. »

  • Speaker #1

    Le goût change. Et là, il est allé un peu trop loin parce qu'il est dans le dégoût. mais en fait le goût de l'aliment change et peut-être que quand le goût de l'aliment commence à changer pour toi, inconsciemment, tu sais que c'est la fin du repas et là, ça active l'insécurité.

  • Speaker #0

    C'est ça. C'est déjà fini, mais c'est trop difficile.

  • Speaker #1

    Et c'est là où il faut bosser sur la sécurité. Et la sécurité, elle passe par plein de choses. Elle passe par le fait de sentir que tu as le droit absolu de manger n'importe quel aliment, aussi souvent que tu veux. et d'avoir ces aliments-là chez toi. Alors là, je te le dis comme ça, forcément que tout faire d'un coup, ça paraît compliqué, mais en gros, la sécurité, elle passe par ça, de manière à après même aller te la verbaliser, cette sécurité. Oui, là, le repas, il se termine, OK. Sauf que si j'ai encore envie de manger cet aliment dans une heure ou dans deux heures, je me donne le droit d'aller en remanger. Oui,

  • Speaker #0

    j'ai le droit d'y retourner.

  • Speaker #1

    Et en fait, c'est un travail sur du long terme, bien sûr, encore une fois, d'aller ramener de la sécurité parce que c'est ça qui s'active. Mais attends, moi aussi, je vais y revenir à l'exemple de la louche de pâte à crêpes, mais c'est la petite fille qui est tellement insécurisée. Les aliments... qui ne sont pas disponibles, qui sont... Ou les regards pleins de reproches. Enfin, tu vois, tout ce truc hyper insécurisant qui fait que, vite, vite, vite, vite, vite, ça va disparaître. Et puis, en fait, comme en plus, toi, tu te dis dans ces moments-là, quand tu sens que ça commence à partir en vrille, tu t'en rajoutes une couche. Tu te le dis et que ça va disparaître au lieu de te dire...

  • Speaker #0

    Parce que je vais le faire disparaître moi-même demain.

  • Speaker #1

    T'en auras autant que tu voudras. T'es en train de te dire, alors là, ma grande, demain, privé de petit-déj. Et voilà. Donc en fait, tu joues le rôle de ta propre maman à l'époque, tu vois, qui vient dire « ah ben non » . Et en fait, ça appuie encore sur l'insécurité qui va appuyer sur l'urgence, qui va appuyer sur la nécessité de se remplir, quoi.

  • Speaker #0

    Oui, oui. Et ce truc-là d'insécurité, je sens que c'est… Enfin là, mon corps est en train de me dire… C'est très subtil et c'est pas hyper visible, mais moi, je le vois. mon corps est en train de m'indiquer que c'est ça la gonfle et c'est bon ça va là c'est à dire que ces trucs de mini restriction mini compulsion mini restriction mini compulsion qui varie un peu mon corps est en train de m'indiquer par des petits signaux juste le fait que non mais ça va je prends un tout petit peu de poids en ce moment tout ça n'est pas grave évidemment c'est C'est juste que... Mon corps me signale que ces petites conneries de peser ton morceau de pain, tout ça pour finir dans le paquet de gâteaux, pour sauter le petit déjeuner le lendemain, pour faire ci, pour te flageller toute la soirée, tout ça. Mon corps me dit, ma grande, ça ne marche plus vraiment là pour contrôler ton poids, que je gardais stable avec mes dents et en raclant avec mes ongles depuis quelques années. je sens que là c'est plus possible, c'est de moins en moins possible. J'ai de moins en moins de prises et vraiment tant mieux. Enfin, sur le fond, je pense que c'est terrible. C'est un sentiment d'échec que je désapprouve mais que je ressens.

  • Speaker #1

    Oui, mais ce n'est pas toi que ça met en échec, c'est ce mécanisme merdique en fait.

  • Speaker #0

    Voilà. mais que j'ai tellement internalisé que je le vis un peu comme une partie de mon identité mais oui mais jamais t'as eu l'occasion de voir que ton corps il savait faire,

  • Speaker #1

    mais t'imagines la puissance du truc quand au lieu de peser ton bout de pain tu vas t'autoriser à manger la demi baguette si t'en as besoin à ce repas là, si t'en as envie et puis peut-être que le soir, même si le soir tu remanges de la pizza ou je sais pas quoi et puis qu'en fait de manière très fine, tu vas te rendre compte que ça s'équilibre, que ton poids s'équilibre, que tu vois, il n'y a pas de variation. Et en fait, la puissance du truc, quand tu vas te rendre compte que tu peux te faire confiance, que tu peux avoir une relation de confiance avec ton corps et ta propre régulation, c'est incroyable.

  • Speaker #0

    Et cette phase-là, alors déjà, je ne sais pas comment éteindre le cerveau de la phase de « vas-y, ce n'est pas grave, continue de… » qui passe, je pense, pour ma part, évidemment… la phase de lâcher le contrôle, je ne sais pas bien comment on fait, mais je ne sais pas si ça se décide un jour ou si ça se fait progressivement, mais ça va passer, comme tu le disais, par une pizza dans l'assiette, j'en sais rien, un soir, deux soirs, trois soirs, et dans un premier temps, et c'est normal, je pense, la petite fille en moi va terminer la pizza parce qu'elle est là et qu'insécurité, etc. avant peut-être éventuellement d'en laisser une part parce que j'ai plus faim, parce que je suis rassasiée, parce que tout ça, parce que j'aurais découvert peut-être ça, cette première phase-là de « waouh ! » Bon, elle est très effrayante.

  • Speaker #1

    Oui, mais en même temps, même maintenant, même quand tu y penses maintenant, est-ce que tu penses que si je te sers de la pizza tous les jours pendant 4-5 jours, tu vas être contente de manger ta pizza et tu vas… Te jeter dessus même au bout du quatrième jour ?

  • Speaker #0

    Contente, non. mais il est probable que pendant 4-5 jours je les termine toutes, oui oui, parce que mon cerveau n'aura pas encore compris que après la pizza il y a punition.

  • Speaker #1

    Peut-être ou peut-être pas, ça dépend parce que si tu fais ça en disant derrière je ne remange plus jamais, effectivement, mais...

  • Speaker #0

    Si il y en a deux qui reviennent le lendemain c'est sûr que ça peut appuyer dans le cerveau un truc de non non ça revient.

  • Speaker #1

    Mais si ton congèle il est blindé de pizza et que tu dis bah ok j'ouvre mon congèle, ok, bon bah là je suis encore dans mon exercice, je suis censée manger une pizza, j'en ai envie ou pas ? Oui j'en ai envie, non j'en ai pas envie. Et en fait d'avoir ton truc plein de pizzas et d'être dans cette autorisation et de te dire ok, si j'en ai envie, j'en mange. Si j'en ai pas envie, je suis pas obligée. Par contre là si j'en ai envie, j'en mange. Et de renouveler le truc, tu pourrais être surprise en fait, sincèrement, de la vitesse à laquelle ça peut aller quand même. Alors, ça ne veut pas dire que tous les problèmes sont réglés et que ça y est, il n'y a plus d'insécurité alimentaire parce qu'elle s'est immiscée avec plein d'aliments. Mais tu n'as pas non plus besoin de refaire tous les aliments du monde. En fait, la sécurité, à un moment donné, elle va s'installer. Mais oui, il y aura peut-être la pizza et puis le pain et puis le chocolat et puis voilà. Mais l'idée aussi, c'est d'associer ça à quelque chose de... Alors, j'allais dire à la dégustation, mais... la dégustation dans le but de te faire un cadeau. En fait, tu n'es plus une petite fille en faute qui doit manger super vite sa pizza. Le but, c'est que là, tu es une adulte qui aime les bons produits, qui adore sentir les différentes saveurs dans son plat. Et que quand tu manges de cette manière-là, même une pizza, tu peux la manger de cette manière-là. Même, tu vois, plus ça va aller, plus tu seras en mesure de le manger de cette manière-là. Mais oui, peut-être que les... Deux, trois premiers soirs, tu vas la manger vite, tu vas la manger entière et que ce sera compliqué.

  • Speaker #0

    Oui, et l'enjeu, c'est qu'à la fin de cette première, de cette deuxième soirée, il n'y ait pas de... C'est mal, tu n'aurais pas dû. Et c'est cet état d'esprit-là que je trouve difficile à atteindre.

  • Speaker #1

    Mais c'est aussi tout l'intérêt pour moi d'être accompagnée sur ce cheminement, tu vois. Parce que les pensées, elles vont arriver. Les pensées, elles vont venir. Elles vont te dire, tu fais de la merde, mais qu'est-ce que tu es en train de faire ? Mais tu vas grossir, mais n'importe quoi. C'est normal. Elles font leur job. Elles font leur job de pensée qui croit t'aider, te protéger.

  • Speaker #0

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #1

    Tu n'es pas contre toi, tu n'es pas en train de jouer contre toi. Tu essaies de te débattre de trucs. Ces pensées-là, elles ont une valeur. protectrice. Parce que même ton TCA a une valeur protectrice. Oui,

  • Speaker #0

    tout à fait.

  • Speaker #1

    Mais elle ne fonctionne pas. Là, aujourd'hui, tu te rends compte que ton mécanisme est assez limite, que ça ne fonctionne pas, que ça a quand même bien abîmé ta santé au global, ton estime de toi, enfin, plein de choses, ta confiance en toi. Donc, voilà. Et c'est ça qui est important, c'est de se rendre compte que ça ne fonctionne pas. Puis, ça tu l'as déjà vachement bien fait, de démêler tout le système, tu vois. Ok, ces pensées restrictives qui débarquent sont celles qui vont faire que je vais me taper des compulsions et que au final, je risque même plutôt plus de grossir. Enfin voilà, puisque la peur derrière, c'est « ah, on va pas se grossir » . Puis en parallèle de tout ça, c'est trop bien aussi de bosser sur « attends, c'est quoi cette peur complètement irrationnelle ? » Parce que oui, il y a la société dans laquelle on vit qui est grossophobe, je suis la première à essayer de le crier sur tous les toits. Il y a vraiment une responsabilité collective derrière le TCA, mais il y a aussi toi dans ton histoire, à quel point c'est ancré en toi qu'il y a une perte de valeur quand tu grossis.

  • Speaker #0

    Oui, j'ai presque même l'impression que… En même temps, je crois que c'est possible parce que j'ai entendu plein de gens réussir à avancer. par des thérapies comportementales et que c'est vraiment l'action, ressentir dans son corps des choses différentes qui fait avancer aussi. Et en même temps, je crois que fondamentalement, tant que je n'ai pas débunké vraiment ce truc de si tu es grosse, tu es moche et si tu es moche, tu ne seras pas aimée. Je le fais vite parce que je vois l'heure qui file et que je me dis résume un peu. J'ai l'impression que ça bloquera toujours l'avancée.

  • Speaker #1

    Moi, je ne crois pas. Je crois que si on devait attendre de ne plus avoir cette peur viscérale de grossir pour guérir d'un TCA, personne n'en guérirait.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    t'es obligé de y aller avec cette peur de grossir. Et en fait, c'est sur le chemin de guérison que t'apprends aussi à la déconstruire et aussi à la regarder un peu différemment. L'autre jour, je faisais un groupe de paroles dans mon programme d'accompagnement, et le thème, c'était gérer le culte de la minceur et la diet culture. Parce que c'est un vrai sujet sur le chemin de guérison. Toi, tu déconstruis des trucs, mais comme tu le disais, tout le monde autour a ses discours.

  • Speaker #0

    Il faut se lalomer.

  • Speaker #1

    Et à un moment donné, il y a une des personnes que j'accompagne qui dit, putain, mais moi, à un moment donné, aujourd'hui, je suis en mesure de me dire que je préfère être libre et grosse que mince et prisonnière toute ma vie de tout ce merdier. Et je sais que ça a résonné pour moi. plusieurs, c'est une phrase qui est forte qui est inentendable pour tout un tas de gens dans les troubles alimentaires et attention je suis pas en train de dire et c'est pas ce qu'elle voulait dire qu'on a deux choix dans la vie contrôler tout ce qu'on mange ou être grosse c'est pas vrai, c'est pas ça mais cette peur là de grossir à un moment donné quand tu découvres la liberté, la vraie liberté tu parlais de charge mentale au début de ouais de ton témoignage, de la place que ça prend dans ta tête, quand tu commences à alléger ça et que tu commences à te sentir libre, de manger ce que tu veux, à être plus présente dans les discussions, à avoir plus d'énergie pour n'importe quel projet, pour avoir l'impression d'exister plus toi, peut-être que tu n'auras toujours pas envie d'être grosse, tu n'auras toujours pas envie de grossir, mais ça n'aura peut-être pas tout à fait la même importance dans ta vie si tu prends deux kilos.

  • Speaker #0

    C'est clair qu'il y a quelque chose dans la façon dont on sait tout ce... construit l'image qu'on a de soi par rapport ou non au regard qu'on a senti des autres. Il y a quelque chose qu'on construit tous différemment et que moi, je sens que j'ai fait ça un peu mollement ou avec des fondations un peu cartonneuses sur l'estime de moi dépend du regard que je lis, de l'image que je crois lire dans le regard des autres. quelqu'un qui... Je préfère être libre et grosse. Je l'applaudis et je l'admire et je lui trouve un courage que je n'ai pas ou pas encore. Et on est tellement plus nombreuses, effectivement, à être... Franchement, je le vis comme une lâcheté.

  • Speaker #1

    Oui, mais en le disant comme ça, tu reprends un versant très individuel. Alors que je suis d'accord avec toi, je pense que la majorité des femmes sont soumises comme ça au regard de l'autre. Mais on est construite comme ça. C'est comme ça qu'on nous fait grandir. C'est comme ça qu'on nous apprend à devenir des femmes. Et du coup, tu parles de lâcheté, je trouve ça dur comme mot parce que la responsabilité, elle est collective, elle est sociétale, en fait. C'est hyper difficile de sortir de ce truc-là. Hyper, hyper, hyper difficile.

  • Speaker #0

    Ouais, et bien, celles qui le font, je... Je les admire vachement et je les trouve tellement courageuses. Je veux être à vos côtés, mais je ne me sens pas assez solide.

  • Speaker #1

    Moi, je crois que ce qui aide, elle le disait, une chose qui l'aide, c'est d'être dans une forme de militantisme. En fait, elle a décidé de plus rien laisser passer quand elle parle avec des gens. Mais d'ailleurs, c'est ce que je lui avais dit, il faut aussi beaucoup de courage, beaucoup d'énergie. Et en fait, elle m'a dit « Ah non, mais moi, aujourd'hui, ça m'en donne de l'énergie de ne pas laisser passer les petits mots, les réflexions, les machins. » Et donc, elle est dans un truc un peu militant. Et en gros, elle avait dit autre chose. Si tu écoutes l'épisode, tu vas rigoler. Comme quoi, je m'en souviens bien. C'était très intéressant ce qu'elle disait. Elle a dit autre chose aussi. C'est qu'elle a parlé de groupe d'appartenance. Et elle a dit qu'elle s'était trouvé un autre groupe d'appartenance, que celui, tu sais, de la femme là, au régime, à vouloir vraiment rentrer dans les cases. Et que du coup, c'est aussi un autre groupe d'appartenance que ces personnes qui décident de sortir de ce cadre-là et de dire, en fait, moi, vos injonctions, vous pouvez vous les mettre où je pense, j'ai envie de vivre libre, quoi. Et que je sois grosse, mince, grande, petite, en fait, tu vois.

  • Speaker #0

    Et puis surtout, on va dire, mon regard, mon... estime de ce que je fais, de ce que je suis, me suffit. Et je me fous un peu de ce que vous pensez, de comment je m'alimente ou de ce à quoi je ressemble.

  • Speaker #1

    Je pense que ça, c'est un peu utopique de se dire que notre regard suffira. Je pense que c'est normal qu'on ait besoin des autres. Par contre,

  • Speaker #0

    on peut se sentir validée par plein d'autres choses,

  • Speaker #1

    au sujet de plein d'autres choses que la forme de ton corps. Tu vois ? Oui, oui. C'est forcément déjà le cas, de toute façon.

  • Speaker #0

    Peut-être. C'est vrai que pour le coup, c'est tellement vieux, c'est tellement constitutif de ma personne, qu'il y a toujours un... ce bruit de fond derrière toute chose que je fais, même des choses qui n'ont rien à voir avec comment je m'alimente ou comment je ne fais pas de sport, mais il y a toujours un truc de « tu n'y arrives pas, tu n'es pas assez bien de toute façon » puisqu'il y a cette espèce de péché originel qui a teinté tout ce que j'ai fait dans ma vie. Je pense qu'il y a vraiment un truc en l'occurrence là, il y a un vrai enjeu de renaissance sur le... c'est peut-être mettre beaucoup de pression au process, mais il y aurait un... j'ai toujours eu un peu peur de faire toute chose parce que il y a cette espèce de sentiment d'échec originel qui me fait me dire quoi que je fasse, y compris professionnel, loisirs, etc., activités, je me sens légitime de rien. J'ai toujours eu ce truc de… comme à l'époque pour les régimes. tu ne vas pas y arriver, ne commence pas. Je suis une grande peureuse de la vie, par exemple. Il y a plein d'activités, j'en sais rien, il y a des tas de gens qui me disent, j'ai essayé le canyoning, j'ai essayé ça, j'ai fait ce machin. Il y a des tas d'activités ou de choses que j'aurais pu avoir le désir de faire dans ma vie, je dirais, non, je n'oserais pas faire ça. Il y a quelque chose qui teinte tout, mais ce qui rend d'autant plus...

  • Speaker #1

    enviables de le résoudre ouais mais peut-être aussi que là il y a la nécessité de regarder tout ce que malgré tout ça t'as déjà fait parce que moi je sais pas grand chose de toi mais je sais que t'as un emploi, je sais que t'es en couple, je sais que t'es maman et donc ça veut dire que tout ça t'es forcément allé faire des trucs qui te faisaient hyper peur t'as tenté des aventures donc quand même la grande aventure de devenir maman et que au quotidien il y a des tas de choses que tu réussis et Je suis à peu près sûre qu'il y a des gens qui te renvoient ces réussites. Après, peut-être que c'est compliqué d'accueillir. Et c'est peut-être même compliqué pour toi de voir tout ce que tu as déjà fait de génial. Oui,

  • Speaker #0

    c'est très compliqué. C'est pas évident d'être dans le moment pour moi. Tout ça est le même sac de nœuds. Mais par rapport à mon enfant, par exemple, je sens que le TCA est venu vraiment se foutre au milieu de mon postpartum de façon très compliquée. Et j'ai mis plus de temps, je le sais, que si je n'avais pas de TCA à connecter avec lui. ça crée beaucoup d'émotions on est passé au point Godwin on parle de mon fils chaque sujet où je te dis moi je suis sûr que tu fais plein de choses géniales,

  • Speaker #1

    tu vas pouvoir me dire à quel point il y a des trucs que tu fais pas assez bien et tu vois là on met le doigt sur un truc c'est à dire que c'est une certitude qu'il y a des tas de choses que tu fais pas bien, c'est à dire à ta façon et que c'est largement suffisant et que les gens autour de toi ont sans doute énormément de très bonnes raisons de t'aimer d'avoir envie de passer du temps avec toi et que ça me semble important d'aller connecter avec ça tout ce que tu es déjà,

  • Speaker #0

    tout ce que tu fais déjà oui oui oui c'est effectivement un trait de personnalité qui est très souvent cousin avec le TCA du bien c'est pas assez si c'est pas si c'est pas fait le mieux possible je sais pas comment le dire de ce qu'on appelle rapidement le perfectionnisme je voulais pas dire perfectionnisme parce que je trouve que les gens qui se disent perfectionnistes ils savent pas ce que c'est vraiment en tout cas peut-être qu'ils arrivent à faire les choses parfaitement ce que j'ai pas le temps de savoir faire

  • Speaker #1

    ok ouais bon en tout cas moi j'aimerais bien savoir ce que tu te souhaites là pour l'année à venir si tu t'imagines en juin 2026 Dans quoi tu te projettes ? Qu'est-ce que tu te souhaites ?

  • Speaker #0

    Je voudrais bien, parce que je n'arrive pas encore à réfléchir en me regardant moi-même. C'est encore trop compliqué. J'ai toujours construit une opinion de moi en disant que pensent les autres. J'aimerais bien maintenant que… que cet enfant merveilleux qui existe puisse. Tant qu'à faire, j'aimerais bien que... Là, il a 16 mois, il va commencer à construire bientôt, finalement, des souvenirs et puis des consciences, des conceptions de qui est son père, qui est sa mère. J'aimerais bien qu'il ne voit pas sa mère juste comme une espèce de boule de stress et qu'il ne voit plus... Des moments de lâcher prise, de détente et de liberté ou de bonheur. Je ne sais pas comment le dire. Plutôt que de... Enfin, il s'en fiche de savoir dans quelle taille de jean je rentre, mon fils. Et il s'en fichera toute sa vie. Et je ne sais pas, je crois que... Je n'arrive pas bien à le formuler. Mais je crois que j'aimerais que... J'aimerais qu'en juin 2026, il ait sous ses yeux une personne un peu plus épanouie. C'est un peu flou et fourre-tout comme terme. Mais quelle que soit la façon d'y arriver, j'aimerais être plus là pour lui.

  • Speaker #1

    Ok.

  • Speaker #0

    Dans un an.

  • Speaker #1

    Mais c'est intéressant de formuler ça comme ça, parce qu'a priori, tu es quand même sortie de l'anorexie grâce à ton projet de le faire venir sur Terre.

  • Speaker #0

    Ouais. donc visiblement ça fonctionne bien pour toi c'est peut-être l'étape d'après d'arriver maintenant que je suis un peu sorti de la bulle de postpartum l'allaitement tous ces trucs compliqués de que j'arrive maintenant à le voir vraiment à le regarder vraiment ce qui dans un premier temps c'était juste mon fils c'est juste une to do list quoi comme beaucoup de gens obsessionnels et ben je me dis que c'est ça devrait être quand même plus intéressant ça et que ça serait une bonne source de... Je ne voulais pas dire distraction, ce n'est pas le terme, mais qu'il y a quand même plus de bonheur à trouver là-dedans que dans un quelconque objectif de moi.

  • Speaker #1

    Et tu le sais, j'aime bien finir par une question auprès de chaque personne, c'est de savoir ce que toi, tu aimerais dire aux personnes qui nous écoutent et qui sont en souffrance. avec leur corps, leur alimentation ?

  • Speaker #0

    Je crois que... J'ai évidemment pas de conseils à donner parce que je m'en donnerais à moi-même. je crois que plus on verbalisera, y compris bien sûr à travers des outils d'information et ton podcast est vraiment un outil qui aide énormément pour écouter beaucoup d'épisodes. mais y compris dans les repas de famille, dans les apéros entre copains, peut-être pas forcément de façon offensive ou militante, mais peut-être qu'en verbalisant un peu qu'on passe toutes par là, qu'en fait même si on n'a pas un TCA qui nous amène à l'hôpital ou dans des situations extrêmes et donc très visibles, on est tellement nombreux. nombreux et nombreuses en fait à vivre ça, qu'en parler même un tout petit peu et même un peu dans le quotidien, je crois que ça peut faire qu'on cède un peu. Moi c'est quand j'ai réussi auprès d'amis, souvent féminines effectivement, mais pas seulement, réussi à verbaliser que toi aussi ça te fait flipper de manger ça, toi aussi t'as des stocks comme ça qu'on a. tous ou presque tous. En fait, c'est ce genre de micro-choses partagées, y compris avec des gens qu'on aime et qu'on connaît dans d'autres contextes, qui peuvent aider à prendre du recul parfois. Donc en fait, parlons-nous. Et osons un peu plus raconter nos petits trucs bizarres, mais qui prennent tellement de place dans la vie.

  • Speaker #1

    Merci pour cette belle conclusion. Et puis pour tout ce que tu as livré durant notre échange.

  • Speaker #0

    Merci à toi, Xavier. Et puis merci pour tout ce que tu fais parce que vraiment, c'est le podcast. Et puis pas seulement, c'est vraiment une ressource qui... qui est extrêmement aidante, vraiment, je pense, pas que pour moi, parce que c'est rare de tomber sur un contenu où le vocabulaire est juste, où l'angle de réflexion par rapport au truc est juste. Et cette chose-là dont on parle sans jamais parler tout le temps, ça fait du bien de l'entendre nommée correctement et décrite correctement. Et déjà ça, ça aide.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. Ça me touche beaucoup. Merci.

Chapters

  • Présentation d’Éva

    01:41

  • Ses premiers souvenirs en lien avec le corps et l’alimentation

    04:40

  • Les différentes phases qu’elle a traversé

    13:10

  • La sortie d’anorexie : le pacte avec son mari

    23:22

  • Sa façon de manger aujourd’hui

    37:15

  • Ce que je lui conseille de mettre au travail

    50:07

  • Ce qu’Éva se souhaite pour l’année à venir

    01:14:31

  • Ce qu’elle aimerait passer comme message

    01:17:20

Description


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D’aussi loin qu’elle s’en souvienne, Éva s’est sentie en lutte contre son corps et contre la nourriture, qui était à la fois sa pire ennemie et ce qui lui apportait le plus de plaisir.

Elle nous parle des différentes phases qu’elle a traversé et du moment où elle est passée d’un corps considéré en surpoids à une anorexie restrictive. 


Et de la façon dont cette pathologie impacte encore son quotidien de plein de façons différentes.

La question de la légitimité est très présente tout au long de notre échange, ce qui n’est pas rare lorsqu’on vit avec un TCA, puisque très en lien avec le fameux perfectionnisme.

Un grand merci à Éva pour ce témoignage fort, à coeur ouvert. 


Au programme : 


Présentation d’Éva 

Ses premiers souvenirs en lien avec le corps et l’alimentation 

Les différentes phases qu’elle a traversé
La sortie d’anorexie : le pacte avec son mari

Sa façon de manger aujourd’hui
Ce que je lui conseille de mettre au travail
Ce qu’Éva se souhaite pour l’année à venir
Ce qu’elle aimerait passer comme message 




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Transcription

  • Speaker #0

    Bienvenue dans TCA, etc., le podcast qui décrypte les troubles des conduites alimentaires et tout ce qui gravite autour, parce que ça n'est jamais seulement qu'une histoire de bouffe. Je suis Flavie Mitsono, et j'accompagne les mangeuses compulsives à devenir des mangeuses libres bien dans leur basket. Alimentation, peur du manque, insatisfaction corporelle, peur du jugement, du rejet, empreinte familiale, grossophobie, les sujets abordés dans ce podcast sont très vastes, et pour ce faire, mes invités sont aussi très variés. Retrouvez-moi aussi sur Instagram où j'aborde tous ces sujets au quotidien sur Flavie.mtca. Très belle écoute ! Salut Eva, bienvenue dans mon podcast, je suis très contente de t'accueillir.

  • Speaker #1

    Bonjour Flavie, moi aussi je suis très contente d'être là, je suis auditrice d'habitude, ça me fait bizarre mais je suis très contente.

  • Speaker #0

    Tu es donc de l'autre côté aujourd'hui.

  • Speaker #1

    C'est ça.

  • Speaker #0

    pour venir discuter avec moi. Et c'est bien chouette. Merci d'avoir répondu à mon appel à témoignages, puisque je suis toujours... Alors, j'allais dire, je suis toujours en recherche. Il ne faut pas que je le dise trop, parce que j'ai du retard dans mes mails. Et voilà. En tout cas, si je suis toujours en recherche, n'hésitez pas, vous qui m'écoutez, à venir m'écrire sur l'adresse mail dédiée au podcast pour qu'on discute ensemble. Par contre, ne soyez pas trop pressés d'avoir une réponse. Je peux mettre un peu de temps. Bon, tu connais un peu le principe du podcast, comme d'hab, je vais commencer par le commencement, c'est-à-dire te proposer de te présenter de la manière dont tu le souhaites.

  • Speaker #1

    Alors, je m'appelle Eva, j'ai 37 ans et des brouettes et je travaille dans la communication pour une collectivité territoriale, je suis rédactrice et je vis en couple avec mon amoureux depuis 10 ans. Et j'ai un petit garçon de 16 mois qui est le plus chouette du monde, évidemment.

  • Speaker #0

    C'est lui le plus chouette ? Je croyais que c'était mes enfants les plus chouettes du monde. On m'a menti.

  • Speaker #1

    Je sais que tes enfants, mon fils, c'est vraiment chouette.

  • Speaker #0

    Ok, trop bien. Et donc, on est là pour parler de troubles alimentaires, comme d'hab, sur le podcast. Ouais,

  • Speaker #1

    j'ai oublié de te dire ça.

  • Speaker #0

    Non, mais c'est hyper bien. C'est plutôt bon signe que tu ne te présentes pas avec le trouble alimentaire. Déjà, ça dit quelque chose de toi. et de ta relation au trouble alimentaire. Et donc, voilà. Je ne t'invite pas nécessairement à en dire plus maintenant, mais en tout cas,

  • Speaker #1

    c'est bien pour qu'on en parle. Côté trouble alimentaire, j'en souffre ou j'en suis habitée. J'hésite toujours un petit peu sur le terme. Selon moi, depuis l'enfance, par un trouble alimentaire, j'ai tendance aussi à dire... qui sont tous le même, qui a pris différentes formes dans la restriction, dans l'excès, dans beaucoup de choses, mais qui pour moi est la même chose depuis toujours et qui a pour, je ne sais pas si c'est une particularité, mais de jamais avoir atteint des niveaux, on va dire, spectaculaires. Jamais des poids extrêmes ou jamais des comportements extrêmes, mais quand même suffisamment présents pour être difficiles, voire impossibles à enlever et pour prendre beaucoup d'espace de cerveau.

  • Speaker #0

    Oui, ok. J'aime bien ta manière d'amener ça et je pense que tu le sais, je suis assez d'accord avec l'idée que finalement, le trouble alimentaire, c'est… une pathologie, un trouble alimentaire et c'est juste qu'ils s'expriment de manière différente. Oui,

  • Speaker #1

    complètement. Vraiment, c'est la même bestiole ou créature cérébrale, je ne sais pas comment la dire, j'ai utilisé différentes métaphores dans ma vie, mais qui utilisent différentes techniques selon les moments de notre vie, tant qu'on ne s'en est pas débarrassé. Tu vas manger plus, tu vas manger moins, tu vas manger ci, tu vas manger ça, mais c'est la même source, je crois. C'est la même chose.

  • Speaker #0

    Oui. Et avant ça, tu le sais, j'aime bien poser cette question-là pour savoir un peu comment ça se passait dans l'enfance. Donc avant son arrivée, je ne sais pas à quel âge il est arrivé, mais en tout cas, je me demande quels sont tes souvenirs, toi, dans le rapport à ton corps et le rapport à l'alimentation quand tu étais une petite fille ?

  • Speaker #1

    Alors, je ne sais pas à quel âge il est arrivé parce que je n'ai pas de souvenirs avant. C'est-à-dire que mes premiers souvenirs... en rapport à l'alimentation, en rapport au corps, il est déjà là. Je ne sais pas si je vais peut-être lui donner un prénom à un moment pour faciliter l'échange. Il y a moi, mon premier souvenir, mon souvenir le plus ancien vis-à-vis de l'alimentation, c'est qu'il y a un sentiment de très ambivalent, où j'ai ce souvenir où l'alimentation m'apparaît en tant qu'enfant comme le plus grand plaisir qui soit possible, un truc, ce gâteau au chocolat, c'est la plus belle chose au monde, rien n'égalera jamais ce plaisir-là. un sentiment de danger immense du coup. Parce qu'à la fin de la part de gâteau au chocolat, j'en veux 8 autres, tout de suite. Alors, c'est évidemment pas quelque chose qui est… Je ne suis pas née avec ça, c'est sûr, mais par contre, je ne me souviens pas de comment c'est arrivé. Et mon rapport au corps, il est lié à ce danger. J'ai toujours souvenir qu'il y a un lien entre le… la deuxième part de gâteau au chocolat et le fait que j'avais l'impression de vivre dans une sorte de... d'être un peu la petite fille bougoule. Et je n'ai pas de souvenirs avant ça. Mes premiers souvenirs, je suis en train de... Ce n'était peut-être pas forcément mon activité principale, mais ils impliquent d'avoir des choses en trop, des parties en trop, de la chair en trop, du gras en trop. d'aussi loin que je me souvienne. Donc, je n'ai pas de souvenir d'alimentation intuitive, de « je mange ça et puis c'est bon » , et puis peu importe, en fait.

  • Speaker #0

    Oui, de légèreté avec la nourriture. Il n'y a pas le souvenir de ça. Et tu te souviens quel âge tu as sur ces parts de gâteau au chocolat, ces souvenirs-là ?

  • Speaker #1

    Avant 6 ans, c'est sûr. À 3-4 ans, peut-être.

  • Speaker #0

    Ah bah oui, donc en fait,

  • Speaker #1

    tu ne peux pas avoir de souvenirs à l'eau,

  • Speaker #0

    en fait.

  • Speaker #1

    Ah non, non, non, c'est ça. Pour moi, c'est extrêmement constitutif de ma personne. Bon, Eva, elle est trop grosse parce qu'elle mange trop, quoi. C'est hyper intrinsèque.

  • Speaker #0

    OK. Et là, c'est un peu la question qui de l'œuf ou de la poule qui me vient.

  • Speaker #1

    Exactement.

  • Speaker #0

    Est-ce que le rapport au corps est consécutif de ton rapport à l'alimentation qui aurait pris place pour autre chose ? Ou est-ce que ton rapport à l'alimentation, il est consécutif de ce rapport au corps et d'une pression peut-être qui a été mise aussi ? En tout cas, j'entends qu'il y avait des réflexions, parce qu'Eva est trop grosse parce qu'elle mange trop.

  • Speaker #1

    Personne ne me l'a jamais dit à voix haute. Mais effectivement, je fais partie de ce cas de figure très atypique aussi. J'ai grandi entourée de femmes, ma mère et ma grand-mère, deux femmes qu'on entendait bien, méditerranéennes, donc avec un peu de un fort caractère et qui elle-même, comme beaucoup de femmes, était dans le truc de « il ne faut pas te commanger, il faut faire attention, etc. » J'ai grandi avec une mère qui avait des problèmes de poids, qui en a toujours eu, et qui en fait ne m'a jamais dit « ma fille, tu es trop grosse » , mais par contre qui, elle, disait toujours « moi, je suis trop grosse et je mange trop, je devrais faire attention » , ce qui du coup, pour un enfant et un cerveau en construction, boum, il se trouve qu'en plus je ressemble morphologiquement un peu à ma mère. le cerveau n'a pas eu besoin de faire 12 000 circonvolutions pour dire, « Bon, ben toi, t'aimes trop manger. » La troisième, la quatrième part de gâteau au chocolat que je voulais, c'est parce que quelque part, je pense que l'insécurité était là de base. Oui,

  • Speaker #0

    les aliments sur un piédestal, il n'y a rien de mieux que ce gâteau au chocolat.

  • Speaker #1

    Il n'y a rien de mieux. J'ai souvenir de ma grand-mère qui, après j'arrête avec le gâteau au chocolat, mais qui disait « Oh là là, si seulement ça pouvait avoir mauvais goût » . Je me souviens.

  • Speaker #0

    « Si seulement ça pouvait avoir mauvais goût » . Ouais, d'accord. Ok, donc déjà,

  • Speaker #1

    tu as présenté l'ambiance. Ouais,

  • Speaker #0

    non mais tu étais tellement petite, c'est incroyable.

  • Speaker #1

    Oui, parce que, mais parce qu'en fait ça n'a pas été fait volontairement, c'est juste que... Il faut que je précise aussi qu'en plus, j'ai une sœur qui a très peu de différences d'âge avec moi et qui est superbe. Ça joue, je pense. Et il est évident que n'importe quel adulte qui passe, enfin, oh là là, qu'est-ce qu'elle est belle. Moi, j'étais sympa. Et donc, je crois que tout ça se mélange et fait un truc internalisé. dans le fait qu'il y a eu assez vite entre nous, dans le regard des autres, ou en tout cas je le sentais dans le regard des adultes, des deux sœurs, où il y avait la belle et puis il y avait l'autre. Et je pense que ça a joué dans le côté... Toi, Eva, on ne peut pas te laisser seule avec un gâteau. Ce n'est pas une bonne chose.

  • Speaker #0

    Ta soeur, elle n'a pas du tout développé de problème ou un rapport un peu conflictuel avec son corps, l'alimentation ?

  • Speaker #1

    J'ai envie de dire qu'elle se situe dans une moyenne raisonnable des femmes dans notre société aujourd'hui. C'est-à-dire que des femmes qui sont vraiment... libres, tranquilles par rapport à leur alimentation et dans leur corps, il y en a si peu que je ne sais pas si, j'en connais peut-être pas personnellement ou une ou deux, enfin quasiment personne. Le niveau d'après ça, c'est des femmes qui se débrouillent et dont je sens que par contre aujourd'hui, elle n'a pas le cerveau aussi imprégné de ça que moi, je l'ai.

  • Speaker #0

    Ok. Elle est plus grande ou plus petite ?

  • Speaker #1

    Elle a un an de plus que moi. Donc,

  • Speaker #0

    comment t'expliques, comment t'expliques ou tu comprends, peut-être que tu n'expliques pas et que tu ne comprends pas, le fait que ce soit si différent pour vous ?

  • Speaker #1

    Parce que ma sœur est un soldat et qu'elle a des moments que moi, j'ai pris avec moi-même, même pour m'auto-flageller ou même pour me dire « Ah là là, t'aimes pas ? » pour manger, il faudrait moins manger, etc. Ma sœur est tellement dans le... On a eu une histoire familiale un peu compliquée avec un divorce parental très conflictuel, beaucoup de conflits familiaux. Et ma sœur, elle a été en mode soldat, casque bleu, je ne pense qu'aux autres. Donc elle a tellement dissocié par rapport à son corps qu'elle, elle l'a fait comme ça. Elle s'est mise en mode mission, je serre les autres et je crois qu'elle ne s'était pas intéressée.

  • Speaker #0

    Pas intéressée à quoi ? À qui,

  • Speaker #1

    à quoi ? Peut-être que moi, le moment où j'ai commencé à tripoter mes bourrelets, à me dire « je suis trop grosse, je suis trop truc, je suis trop machin » , elle, elle ne l'a juste pas fait, parce que quelque part, elle avait le cerveau ailleurs. Peut-être que morphologiquement aussi, ça se passait différemment, parce qu'on est toutes différentes et qu'il y avait moins de... de conséquences à observer sur son corps de comportement alimentaire. Aujourd'hui, je pense qu'elle n'est pas moins tranquille avec l'alimentation que la plupart des femmes qui disent en gros « oh là là, cet été, attention » . Ce genre de culture des régimes ordinaires un petit peu complètement banalisée.

  • Speaker #0

    Ok. Et que ce soit ta grand-mère, je ne sais pas si elle est toujours en vie, mais au moins ta maman et ta sœur, est-ce qu'elles savent ce que toi, tu as traversé et ce que tu traverses ?

  • Speaker #1

    Alors, elles l'ont su parce que j'ai traversé plusieurs périodes dans ma vie. Donc, j'ai eu une période de ce que l'IMC qualifierait de surpoids jusqu'à mes 25 ans à peu près. Simplement parce que je n'ai pas... Alors du coup, je fais un petit fil chronologique parce que sinon ce n'est pas très lisible. Je n'ai jamais été une enfant ni une adolescente au régime. On m'aurait laissé faire si j'avais entrepris, mais franchement, je n'en avais pas la détermination, même si je pense que j'emploie des termes qui ne me convainquent pas, mais je le dis pour aller vite. j'étais, et tant mieux, incapable de tenir un régime. J'ouvrais un magazine, je le faisais un jour, c'était fini.

  • Speaker #0

    Donc, ça veut dire que tu avais l'envie quand même.

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr. C'est-à-dire que toute ma vie jusqu'à mes 25-27 ans, j'ai dit, oh là là, j'arrive pas à tenir un régime, mais je suis nulle, quoi. Les autres y arrivent, quelle horreur. Moi, je suis vraiment inincapable, etc. Mais un jour, j'y arriverai. Un jour, ce sera le grand déclic. Un jour, ce sera le grand changement. Un jour, je perdrai les... Les 10-15 kilos qui m'empêchent d'accéder au bonheur absolu de peser 15 kilos de moins. Ah oui, oui, non, mais c'est vraiment stupide. Et j'ai grandi jusqu'à mes premières années de vie toute seule où j'étais un peu en mode… Peut-être dans ce qui a été l'alimentation la plus libre de ma vie de quand on commence à vivre seul et à acheter ce qu'on veut. Alors du coup, ça faisait des espèces… de choses qui ressemblaient à des compulsions de temps en temps. Et en même temps, je n'étais pas si malheureuse de ça. Donc, ce n'était pas si mal. C'était peut-être ce que j'ai connu de plus libre comme alimentation. Mais donc, bref, je mangeais trop par rapport à... à mes besoins en me disant mais je devrais faire autrement et puis un jour j'y arriverai, un jour je le ferai. Et puis autour de mes 27-28 ans a démarré très très très progressivement une phase de perte de poids au début, allez j'ai fait telle activité physique, j'ai fait un tout petit peu ça, je me sens bien, t'inquiète pas je fais juste un tout petit peu de sport. Mais pour quelqu'un qui n'a jamais réussi, je fais des guillemets dans les airs, à perdre du poids de sa vie et qui y arrive un tout petit peu, puis un tout petit peu, puis un tout petit peu, ça a représenté une espèce d'euphorie, de tranquillité. En plus, j'avais l'orgueil de le faire sans un protocole précis, un régime hyper, mais vraiment sur la durée, très lentement, c'est-à-dire sur deux ans, quelque chose comme ça, j'ai perdu 20 kilos. Mais lentement, tranquillement, en disant à tout le monde, mais c'est parce que je me sens tellement mieux, j'ai fait un peu de sport, je mange juste un tout petit peu moins, etc. Et cette chose, la peur de reprendre et de repartir dans la zone de la société des gens en surpoids, cette peur-là de repasser dans la catégorie des gens, genre Fede Guimard-Lair, trop gros. m'a fait basculer très mécaniquement dans une phase restrictive, où pour le coup, là, ça s'est vu. Et donc, pour répondre à ta question d'il y a 10 minutes, ma mère et ma sœur l'ont vu. Tout le monde l'a vu. Parce que là, je suis passée... Alors, il y a eu un diagnostic d'anorexie. On fait un peu vite, je trouve, mais je veux dire, techniquement, ça correspondait tout à fait aux symptômes d'une anorexie restrictive. Et cette période-là a duré, c'est toujours compliqué à dater parce que la période par laquelle on en sort est jalonnée de haut, de bas, mais deux ans.

  • Speaker #0

    Donc deux ans de perte de poids progressive, puis s'ajoute à ça deux ans d'anorexie.

  • Speaker #1

    Il y a peut-être une année d'intersection, on va dire trois ans.

  • Speaker #0

    En même temps, vu de l'extérieur, c'est quelque chose qui s'observe beaucoup. Parce que 20 kilos en deux ans, tu peux te dire 10 kilos par an, ce n'est pas tant. En fait, c'est énorme. Et c'est surtout qu'une perte de poids ne se maintient pas comme ça. C'est-à-dire qu'à la limite, perdre les dix premiers kilos. Mais tout de suite, quand tu as dit ça tout à l'heure, je me suis dit… La deuxième dizaine, à mon avis, il y a quand même quelque chose d'un peu plus restrictif qui s'était enclenché.

  • Speaker #1

    Très restrictif qui s'est enclenché. En gros, sur le tournant 2017-2018, je ne sais plus faire la soustraction, je ne sais plus quel âge j'avais, mais j'ai entamé un « oh, je fais un tout petit peu de sport de temps en temps » . Et on va dire qu'un an et demi plus tard, j'en étais à compter mes calories et à faire un truc hyper… hyper pointu avec un carnet où je comptais à l'avance de préparer mes tupperwares pour aller au travail. Et là, on était passé dans quelque chose de très, très, très typique, en fait, dans la restriction. La perte de poids est devenue intentionnelle. Puis, à basculer dans le « c'est même plus ce qui est important, ce qui est important, c'est de ne pas reprendre » , puis c'est devenu la peur du morceau de pain ou de salade. C'est ça. Mais, comme je le disais au début… Même, tout comme je n'ai jamais été en surpoids de façon spectaculaire, ce mot ne convient pas, mais c'est tout ce qui me vient, je n'ai jamais été ni en obésité, ni en surpoids, où les gens disaient quand même, fais attention. Je n'ai pas non plus été, en tout cas à l'époque, mais c'est aussi un des traits de cette maladie-là qui prend des formes différentes. Ça me semble inutile de donner des poids et des chiffres. très très rigueur, mais je suis descendue à un poids dont je me disais, c'est impressionnant, parce que quand on est dans cet état d'esprit-là, on a même le moment du défi de, ah oui, mais j'ai entendu tel témoignage, elle est descendue jusque-là, donc je ne suis pas vraiment malade, je n'ai pas de soucis.

  • Speaker #0

    Mais ça c'est ce que tu disais à l'époque, mais ce que tu dis aujourd'hui avec le recul.

  • Speaker #1

    Il est très fréquent que je n'arrive pas à dire à voix haute que j'ai été, que j'ai traversé une phase d'anorexie restrictive parce que la société est ainsi faite que de même qu'on se surveille les unes les autres la taille de jean, j'ai trop peur qu'on me dise « ah bon, t'es descendu jusqu'à quel poids ? » et qu'on me dise « ah ben ça va, c'est pas… »

  • Speaker #0

    Oui,

  • Speaker #1

    parce que mon cerveau est complètement… constitué de ça, j'ai l'impression je ne suis, quand je raconte la façon dont je le ressens je ne suis pas d'accord avec moi-même en fait je trouve ça stupide de me dire tu n'as pas été assez maigre pour dire que tu as souffert d'anorexie parce que c'est ça et puis quand tu parles de poids zut

  • Speaker #0

    j'ai perdu le mot spectaculaire ben moi je me dis attends à un moment donné si tu as perdu une vingtaine de kilos Il y a quand même moyen. En fait, parce que si tu m'avais dit je suis montée très, très haut et donc j'ai reperdu 20 kilos, mais donc je n'étais pas non plus dans un sous-poids spectaculaire. Mais comme tu dis, je n'ai pas fait des poids très, très hauts. Si tu ne fais pas un poids très, très haut, mais que tu perds 20 kilos. Et puis, il y a autre chose que j'aimerais... Et puis,

  • Speaker #1

    ça me fait une morphologie méditerranéenne aussi qui fait qu'en fait, le poids de mon squelette, les hanches, la poitrine, des choses qui font que j'ai une morphologie qui fait que je ne peux... pas physiquement aller dans des poids qui sont parfois mentionnés dans les témoignages de l'extrême ou des choses comme ça. Physiquement, c'est-à-dire que très techniquement, je suis allée à mon minimum personnel. Mais oui. Parce que, de toute façon, je ne tenais plus debout, ça n'allait.

  • Speaker #0

    Mais donc, le poids était extrême et spectaculaire. Tu vois ce que je veux dire ? De toute façon,

  • Speaker #1

    il faut bien dire une chose,

  • Speaker #0

    c'est que le corps humain, notre corps, il n'est pas fait pour maigrir. Parce qu'on est le résultat d'années et d'années d'évolution. Nous ne sommes pas faits pour perdre du poids, encore moins beaucoup. Et en fait, si moi, là, qui suis autour de mon poids d'équilibre, je prends 20 kilos, oui, il va y avoir plein d'adaptations pour mon corps. En fait, ce n'est pas souhaitable pour mon corps, ce sera difficile, mais ça va aller. Je ne me dis pas que je vais tomber malade à coup sûr. Par contre, si j'en perds 20, je vais être fatalisée.

  • Speaker #1

    Ah ben, absolument.

  • Speaker #0

    Parce qu'en fait, notre corps est beaucoup...

  • Speaker #1

    plus fait pour s'adapter à des prises qu'à des pertes de poids et donc ça reste spectaculaire ce que j'avais fait et puis de toute façon le côté visible spectaculaire pathologique en fait se mesure de toute façon à mon incapacité à fonctionner au quotidien qui se voyait très clairement ou là bas oui ma famille s'en est rendu compte mon amoureux s'en rendait compte et le disait et attirer à tenter de tirer la sonnette d'alarme des mois et des mois avant ce Merci. point de bascule où j'ai dit bon ok ça va pas ça va pas pouvoir perdurer tout le monde se rendait compte bien sûr à mon travail je ne sais évidemment en améliorer j'avais plus de capacité cérébrale j'avais plus de mémoire plus de fondée en larmes pour un oui pour un non et j'étais pas j'étais pas du tout un être humain fonctionnel quoi c'est sûr

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui a marqué l'autre virage alors ? Parce que tu as parlé de ce virage de bascule dans l'anorexie et le virage de sortie d'anorexie.

  • Speaker #1

    Je crois qu'il y a un moment, parmi les nombreuses et nombreuses conversations que j'avais eues avec mon amoureux, où il me disait ça part trop loin, ça devient pathologique. Ce petit truc que tu avais commencé à faire pour te sentir bien, c'est complètement obsédant et tu ne penses plus qu'à ça. Je vois bien que tu ne penses plus qu'à ça, tu n'es plus là, tu n'es plus avec moi. Parmi ces nombreuses conversations, je lui dis mais non, mais non, mais non, ça va. Je crois qu'il y a un jour, enfin si je sais qu'il y a un jour où on faisait un trajet à vélo dans Paris à plat et où à un moment je n'ai plus pu pédaler du tout, je me suis assise sur le trottoir et je lui ai dit ok, d'accord. Oui, c'est vrai. Parce que c'est la maladie du déni aussi. Et donc, quelle que soit sa forme et son visage, on dit toujours non, non, ça va, ça va, ça va. Et là, je lui ai dit bon, ok. Et là, du coup, c'est fait un pacte avec lui où j'ai jamais réussi à trouver... Alors, j'ai un peu consulté une psychiatre, j'ai un peu consulté une psychologue, mais l'honnêteté me pousse à préciser que j'ai jamais vraiment réussi à... Je ne sais pas si c'est faire confiance à quelqu'un, mais je crois que j'avais un peu trop honte de ce que je faisais, de ce que je vivais. Et donc, j'ai beaucoup trop... miser sur mon amoureux comme soutien, comme pilier beaucoup trop parce que je lui donnais un rôle qui était beaucoup trop lourd pour lui Et c'est à lui que j'ai demandé de me renutrir, de cuisiner pour moi, de portionner les choses. Alors, c'est passé par plein de phases parce qu'il y a des fois où j'y arrivais, et puis des fois où je n'y arrivais pas, par des petits contrats de poids, par des contrats de poids un peu hebdomadaires. Et puis aussi, le contrat n'était pas atteint, des espèces de gages, de calories supplémentaires à gérer. qui était quelque part une reproduction des techniques qu'on a dans certaines hospitalisations, mais que du coup j'ai fait à la maison avec lui. Ça a eu plein de hauts, plein de bas, plein de j'y arrive, plein de j'y arrive pas, et ça a pris encore deux ans de ça va, de quasi-guérison, de rechute. j'ai plus exactement le détail en tête de mois par mois etc mais deux ans de ça va mieux de je repère de ça repart où mon cerveau n'était pas libéré, n'était pas convaincu parce qu'avec le fait de maigrir c'est allumé et ne s'est jamais éteint la peur de regrossir et ça je ne sais toujours pas comment l'éteindre Je ne sais toujours pas comment la tenir un peu à distance, la calmer, même argumenter contre elle. Et donc, j'ai fait des hauts et des bas. Mais au fur et à mesure, la vie passant, ma grosse motivation, c'était d'essayer de retrouver un cycle et la capacité, parce qu'on n'avait pas d'enfant à ce moment-là, d'essayer de retrouver un corps suffisamment en forme. pour avoir des cycles et pour pouvoir tomber enceinte un jour. Ça, ça a été dans ces années-là, ces deux années-là, de sortir vraiment de la phase restrictive, de la phase d'anorexie. Ma motivation principale, le truc qui faisait que j'arrivais à dire « Regarde pas, regarde pas, regarde pas ce que tu fais, regarde pas ce que tu manges, t'inquiète pas. » Ce n'est pas forcément une solution parce que du coup, j'ai déconnecté, mais je n'ai pas été dans une démarche de juste… être un peu dans mon corps, ressentir les... Je dis, bon, c'est pas grave. Il faut juste... Grosso modo, tant que t'as pas retrouvé un cycle, c'est que t'as pas encore assez repris. Regarde pas. Ou regarde et dis-toi que tant pis, mais parce que je voulais retrouver la possibilité d'avoir un enfant.

  • Speaker #0

    En même temps, dans ce que tu dis, il y a un truc important, là, quand tu dis... C'était peut-être pas l'idéal parce que je déconnectais, je regardais pas, j'étais pas connectée à moi. Je pense qu'en guérison d'anorexie, c'est pas possible de tout faire.

  • Speaker #1

    Oui, peu importe.

  • Speaker #0

    Je crois pas, sincèrement. Je crois que c'est ça quand il y a une grosse confusion, quand il y a des détracteurs de l'alimentation intuitive ou des outils de type alimentation intuitive qui disent que non, c'est pas... Quand on a des TCA, il faut pas, alors que c'est genre... la thérapie spécifique TCA, qui disent ouais mais en cas d'anorexie, effectivement en fait tu as pas demandé à une personne qui souffre d'anorexie de lui dire mais non mais juste écoute ton corps, enfin non bien sûr et je pense qu'il y a des phases donc je trouve ça quand même fort quoi de ce que vous avez mis en place. C'est fou et je me dis mais waouh, enfin effectivement faire ça en cours

  • Speaker #1

    couple votre couple a tenu donc oui non mais tu vois mais attention oui oui bien sûr on a une très très chaud et et ça a été très difficile ouais c'est à dire que lui c'était c'était énorme ce que je lui ai mis sur les épaules c'est c'est affreux parce qu'il sentait bien ouais je voyais un petit jeu mais il sentait bien que tout le la partie physique de ma reconstruction, et là je parle vraiment physiquement, de remettre de l'organisme, de remettre des calories dans la machine, je reposais ça entièrement sur lui, et je lui disais, je ne veux pas ça, si moi je n'arrive pas à le faire moi toute seule, à partir de rien, il faut que tu me donnes la béquille, et donc cette passion-là qu'il avait lui. tant pour permettre à la personne qu'il aimait de retrouver la santé que pour éventuellement la possibilité pour lui de construire une famille.

  • Speaker #0

    c'était beaucoup beaucoup et il y a eu des ouais ouais on a eu chaud c'est sûr qu'après ça a pris du temps de restabilisation mais on est encore très marqué par cette période par le souvenir de cette période et par le fait que je suis pas guérie du tout du gros trouble alimentaire mon corps est en sécurité c'est bon je suis plus en danger physique mais par contre je souffre toujours de ce qui est pour moi le même TCA qui s'exprime différemment aujourd'hui et c'est encore très dur pour nous au quotidien. Lui, il en a légitimement un peu marre de vivre avec ça. Et de le dire ? Bien sûr,

  • Speaker #1

    oui. Vous en parlez ouvertement ?

  • Speaker #0

    Oui. Oui, parce que bien sûr, j'ai au quotidien tout un tas de petits tocs alimentaires, de choses qui sont... des restes de ça, je fais des espèces d'obsessions qui sont très très faciles à identifier au quotidien et que lui, il s'en passerait. Oui, il me le dit, on en parle. Le trouble, il est là, il est entre nous, il est à la maison au quotidien, mais en tout cas, par contre, oui, ça, on en parle. Mais oui, pour revenir sur la partie renutrition, sur la phase réfléchis pas et mange, je suis complètement d'accord qu'effectivement, quand on se prépare d'anorexie, je pense qu'il y a un moment, en tout cas, il y a une phase très, très clé de toute façon, le moment de s'écouter, de tout ça. Il faut avoir un cerveau fonctionnel et quand il n'a pas à manger, le cerveau, il n'écoute rien du tout. Donc, bien sûr qu'il y a cette phase-là. C'est vrai que… Alors... Tous les cas sont des cas particuliers, mais dans le mien, comme j'ai très souvent, là je l'ai dit un peu vite, que jusqu'à mes 25-27 ans, j'ai été plutôt en surpoids qu'autre chose. Et ensuite, il y a eu deux, trois ans où j'étais en phase restrictive. En fait, c'est peu à l'échelle de ma vie. Moi, quand je regarde ma vie, quand je me souviens de l'histoire de mon comportement alimentaire, à l'échelle de ma vie, ce n'est pas ces trois années-là. c'est plutôt, je me réfléchis plutôt comme quelqu'un qui est quelqu'un de compulsif vis-à-vis de la nourriture, qui, en l'air, doit faire attention, à qui on ne peut pas faire confiance avec un paquet de gâteaux, etc. Parce que c'est comme ça que j'étais enfant, adolescente et jeune adulte. J'ai toujours eu un... J'en ai pas parlé tout à l'heure, quand on parlait de mon enfance et de ce que ça avait fait de moi comme mangeuse, tout ce qu'on disait par rapport à la construction de la nourriture, c'est mal et une femme, ça doit faire attention. Et qu'effectivement, bon, certes, c'est assez évident, mais je le dis quand même, ça a évidemment causé chez moi une incapacité totale à connaître ma faim, à connaître ma satiété. c'est ce qu'il y a tout à fait logique, mais ce qui a fait de moi une mangeuse, bon évidemment pas intuitive, et un peu comment dire, d'occasion.

  • Speaker #1

    Attends, qu'est-ce que c'est que ça une mangeuse d'occasion ? Je ne m'attendais pas à ça.

  • Speaker #0

    Ouais, c'est pas forcément un terme qui convient bien, mais c'est à dire que comme moi, donc je le disais à la... Au début, je ne sais évidemment pas ce que c'est une portion de gâteau au chocolat, mais je ne sais évidemment pas ce que c'est qu'une portion de gâteau au chocolat, ou à la fin, c'est bien, c'est suffisant, je ne sais pas. Enfant, moi, c'est… Pour moi, la portion, c'est la portion qu'on me mettait dans l'assiette ou qui m'était autorisée. À la fin de mon assiette… Je n'avais pas accès à mon cerveau, à mes sensations corporelles pour dire que c'était suffisant, que ce n'était pas assez. Je n'ai jamais affiné une assiette de ma vie, y compris dans ma période d'anorexie restrictive. Je faisais des assiettes de concombre, mais alors, elles étaient vides à la fin. Je ne sais pas, en milieu d'assiette, me dire que ça va là. Parce que c'est comme si ça a créé une sorte de précieusité. du fait de manger, s'arrêter de manger, c'est une occasion ratée. Alors que là, tu es dans une phase où c'est autorisé, va jusqu'au bout. Et donc, la mangeuse d'occasion, c'est par exemple s'il y a un moment quand aucun adulte ne regarde, il y a un bout de quelque chose qui traîne. L'enfant que j'étais ne se posait même pas la question de si j'en avais… Bon, évidemment, si j'avais faim, ce n'était même pas la question, mais même pas la question de si j'en avais envie. C'est parce que là, j'avais une fenêtre, personne ne me regarde. Il y a un des souvenirs les plus marquants et les plus… ridicule. Vraiment, en plus, j'ai honte de partager ce truc-là, mais en même temps, je pense que c'est tellement représentatif que c'est utile. Et j'espère que ma mère n'écoutera jamais cet épisode, mais ça m'est arrivé. Tu sais, quand t'es enfant, que ta mère a préparé ou ton père, en l'occurrence là, ma mère a préparé le saladier de pâte à crêpes et que tu obtiens le droit de... C'est moi qui fais cuire les crêpes, vas-y, va faire autre chose. Eh bien, de manger soit les crêpes parce que j'étais seule dans la cuisine à faire cuire les crêpes, opportunité, soit de manger quelques-unes des crêpes un peu ratées, ou la louche de pâte à crêpes dans la bouche, crue. Pourquoi ? Parce que j'avais trois secondes devant moi et que quelque part, il y a quelque chose dans mon cerveau qui s'allume de, je ne sais pas, c'est interdit.

  • Speaker #1

    Mais oui. C'est pas le choix.

  • Speaker #0

    C'est une forme de devoir,

  • Speaker #1

    en fait. Ça fait de la peine pour cette petite fille tellement en insécurité. Il y a quelque chose de tellement, tellement, tellement, tellement en insécurité chez cette petite fille qui, vite, ça y est, c'est le moment, il y a une ouverture.

  • Speaker #0

    Voilà, ouverture. Il n'y a plus de faim, il n'y a même plus d'envie. Il y a un peu de plaisir, mais pas tant. Et il y a une projection sur la nourriture de... d'autres insécurités, de tout ça. Mais c'est une chose qui me reste aujourd'hui. Alors, les variations de poids, la période restitutive que j'ai traversée, etc., fait qu'aujourd'hui, après avoir traversé tout ça, je suis un peu partie dans tous les sens au niveau chronologique, je ne sais pas si ça se...

  • Speaker #1

    Non, moi,

  • Speaker #0

    ça va. Mais ça fait qu'aujourd'hui, je suis… Tout ça cumulé, toute cette histoire-là fait qu'aujourd'hui, je suis une mangeuse un peu étrange quand même. Parce que, alors, les phases de restriction-compulsion, je les fais au quotidien. Mais c'est comme si les… Enfin, ce n'est pas des très grandes oscillations, en fait. C'est-à-dire que ce ne sont jamais de très grandes restrictions et ce ne sont jamais de très grandes compulsions. Mais ça marche quand même comme ça. C'est aussi pour ça que je t'ai contactée, parce que je me disais, je pense qu'on est nombreuses à vivre ça. On entend souvent des témoignages de gens qui font de l'hyperphagie, ou de gens qui souffrent de boulimie dans des espèces d'énormes compulsions, d'énormes crises. Pour moi, ça passe plutôt par des plus petites oscillations, c'est-à-dire qu'au sein d'un même repas. il peut y avoir une sorte de restriction-compulsion, restriction-compulsion. Ça peut passer par le fait de peser un bout de pain à côté de la salade que je me suis faite et ensuite, à la fin du repas, du coup, d'être en incapacité d'arrêter de manger. Pas parce que physiquement, j'ai plus faim. J'ai encore faim, parce que ça, ça va. Mais simplement parce que le cerveau, maintenant, à une manière de refuser le mécanisme de restriction et de punir le mécanisme de compulsion après mon cerveau n'arrive pas à faire un choix aujourd'hui je ne suis plus quelqu'un qui dit bon bah c'est comme ça règle extérieure je dois me restreindre pour tel ou tel objectif de poids et je ne suis pas libre d'avoir accès à un paquet de gâteaux librement. Je ne me sens pas libre de ça. Et donc, je fais plein, plein de petites oscillations qui donnent très concrètement ce qui, moi, me semble ressembler à ce qu'on pourrait appeler l'hyperphagie prendiale. Là, on est purement... Enfin, c'est pas un diagnostic que je fais, c'est une estimation à la louche moi-même. Mais dans le sens où... c'est très très difficile d'arrêter un repas c'est un deuil c'est une c1 c'est dire au revoir à quelque chose c'est c'est la même chose que quand j'étais petite fille donc en fait je suis revenu au début de la boucle je suis parfaitement Ce qui est normal. Ce qui n'a pas été traité n'a pas de raison d'avoir disparu. Aujourd'hui, je fais du... Ouais, je pense des petits excès à chaque repas.

  • Speaker #1

    Tu serais d'accord de donner des exemples concrets ?

  • Speaker #0

    Ouais, ouais, ouais. Il y a en fait... Un repas, pour moi, il est à peu près... portionné à l'avance, il est mis dans une assiette, j'y pense avant, au fait que, bon, il n'y a pas de, par exemple, il n'y a pas de plat au milieu de la table où chacun se sert, quand je cuisine, moi je fais des assiettes où je décide ce qu'il y a dans mon assiette, quoi, avant de manger, et ensuite, une fois que j'ai fini ce plat, en fait, il y a cette espèce de réveil de dopamine du « manger c'est chouette » parce que c'est vrai, manger c'est chouette, euh qui fait que je vais prendre le petit truc après. Je vais aller dans la cuisine prendre le petit carré de chocolat avec la dizaine d'amandes à côté. C'est un exemple parmi d'autres. Et au moment de me servir, je me dis toujours, tout va bien. Après, c'est terminé. Et puis, je peux me retrouver à faire 5, 6, 7 allers-retours dans la cuisine pour ramener mon assiette et à reprendre le petit n'importe quoi. qui peut être re du salé après le dessert, re de se resservir de... Ah ben, oh là là, j'ai mangé 10 amandes, c'était super, c'était tellement bien. Je les ai comptées au moment où je me suis servie mes 10 amandes. Tout ça pour retourner dans la cuisine, la main dans le pot directement. Alors là, tu ne comptes plus. Et du coup, il y a ce truc de ce qu'on appelle en général le foutu pour foutu, qui est du... Ah, tu as dépassé, c'est trop.

  • Speaker #1

    Tu as mangé ta onzième amande.

  • Speaker #0

    Ouais, on y aime et puis après de façon incontable parce qu'après ça peut partir un peu. Voilà. Mais en tout cas, dans ce côté du… Le moment où tu vas t'arrêter va être le moment de la prise de conscience, de l'autoflagellation, du c'était beaucoup trop, du t'aurais pas dû, etc. Donc, ce moment-là d'arrêter, sur le coup, mon cerveau souhaite le retarder. Ben oui. Parce que ça va être le moment où je vais me… m'engueuler tu t'engueules tu te promets de te reprendre en main je promets plein de trucs et même la promesse il est même fréquent que la promesse arrive en cours de j'ai pas envie de dire crise parce que parce qu'il y a des parce qu'il y a des personnes qui vivent des vrais épisodes de crise de compulsion où il y a des énormes quantités de nourriture et ça c'est vraiment je pense beaucoup plus douloureux que ce que je vis moi même physiquement et du coup je veux pas employer le même terme par respect pour euh... pour la douleur physique des personnes qui vivent des épisodes où tout le blacaripasse. Moi, c'est un peu trop, mais à chaque repas. Parce que,

  • Speaker #1

    tu disais que pendant, tu te promets aussi pendant. Ouais,

  • Speaker #0

    pendant, je me dis, typiquement, je peux retourner cinq, six fois à la cuisine. Disons qu'à la troisième fois, je me dis, oh là là, ça fait trois fois que tu te resserres d'un petit truc après le repas. Si c'est le soir, demain matin, pas de petit-déjeun.

  • Speaker #1

    Ouais, c'est parti.

  • Speaker #0

    Donc, si tu es pendant que je fais ça, tu peux être sûre que si je me dis ça, par exemple, la troisième fois que je retourne à la cuisine, il y en aura cinq de plus. Puisqu'il y a punition demain matin. Enfin, il y a... Oui,

  • Speaker #1

    mais tu connais le mécanisme.

  • Speaker #0

    Et je le connais. Et je le connais très bien. Et ça me rend tarée de me voir faire.

  • Speaker #1

    Mais du coup, qu'est-ce qui te manque ? Qu'est-ce qui fait que tu continues de tourner en boucle alors ?

  • Speaker #0

    Je crois... Je crois que je n'ai pas réglé et je n'ai pas d'idée pour le régler. Aujourd'hui, au niveau morphologique, je suis repassée dans quelque chose d'intermédiaire entre le poids de ma jeunesse où je n'avais plus tant surpoids et ma période head-down, etc. Je suis dans ce qu'on appelle une morphologie « bon » . qui passe inaperçu. Un peu classique, je n'ai pas envie de dire normal, c'est nul, normal. Je n'arrive pas à enlever de ma tête, et en fait il est possible que ce soit la vérité, c'est de me dire que si j'arrête de m'inquiéter, si je mange sans me dire punition demain, ou... pesée de glucides ce soir, eh bien, je vais... laisser faire la petite fille que j'étais et qui pouvait avaler des louches de pâte à crêpes, voilà, et il n'y a absolument plus rien pour m'arrêter et je vais à minima redevenir ce que j'étais avant d'un point de vue morphologique. Et ça aussi, c'est un vrai deuil à faire, un renoncement. un vrai renoncement à ce que ça implique au niveau de la vie quotidienne parce que c'est vrai aussi qu'il y a tellement d'obstacles quand on n'a plus un corps normé, quand on est un peu au-dessus, quand on est beaucoup au-dessus et je ne sais pas combien, jusqu'où j'irai et que je ne me débarrasse pas de la projection que j'ai. du regard des autres sur moi et que presque j'entends dans ma tête les gens penser la grossie elle s'est laissée aller, enfin bref tout ce qu'on entend dans sa tête quand on passe ou que dans mon cas on repasse parce que ce serait repassé dans une catégorie qu'on pourrait qualifier de surprenant mais là il ya plusieurs sujets

  • Speaker #1

    Il y a le sujet d'effectivement prendre du poids ou non, c'est-à-dire que moi, je ne sais pas où est ton poids d'équilibre et que si tu avais une alimentation complètement libre, peut-être que tu serais au-dessus du poids que tu fais aujourd'hui. Peut-être que pas du tout, parce qu'en fait, tous les efforts que tu fais pour, quand tu dis te punir, donc les efforts que tu fais pour rattraper le tir le lendemain ou quoi, recréent de la, on ne va pas dire de la compulsion, alors on va dire de la suralimentation. qui recréent de la restriction, qui recréent de la suralimentation. Et donc, finalement, ça crée un espèce d'équilibre qui ne serait peut-être pas si loin de tes apports caloriques si tu mangeais sans restriction. Et donc, voilà, il y a le sujet vraiment prise de poids ou non. Mais pour moi, le sujet important, là, c'est que tu projettes, dans le fait de lâcher le contrôle, tu projettes une situation dans laquelle... tu étais déjà dans le contrôle, d'une manière ou d'une autre. Alors, il y avait un contrôle, déjà qui était bien internalisé, je pense, mais qui venait de l'extérieur, mais qui était très internalisé dès petite fille. C'est-à-dire que tu projettes, tu te dis, si là, demain, je ne suis plus dans... Comment tu as dit ça ? Si je ne m'inquiète plus. En plus, c'est intéressant parce que tu as dit, si j'arrête de m'inquiéter sur mon poids et d'avoir tous les comportements qui vont avec, alors je vais revivre. Parce que je vivais petite fille. Mais petite fille, tu t'inquiétais pour ton poids. C'est bien ça le problème. En fait, tu compares ta situation d'aujourd'hui. Tu te dis, si je change ma situation d'aujourd'hui, alors je revivrai celle d'hier. Mais celle d'hier, c'était la même.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    Ce n'était pas de la liberté. Il n'y avait rien de... Tu vois ?

  • Speaker #0

    Non,

  • Speaker #1

    non. Ce n'est pas comme si tu me disais, moi, j'étais petite fille. hyper libre comportement alimentaire normal au sens de réguler et tout ça et j'étais dans ce qu'on appelle le surpoids et bomba fait chier j'ai pas envie d'y retourner parce que voilà on est dans une situation privilégiée gens dans la norme bon bref tout ça on le connaît mais non là en fait c'est pas ça c'était pas tu avais déjà un trouble alimentaire en fait oui absolument absolument donc effectivement il ya aussi ce truc de

  • Speaker #0

    La liberté, la vraie liberté, il y a un inconnu total.

  • Speaker #1

    Oui, comme pour la majorité des femmes, parce que même celles qui l'ont vécu un peu dans l'enfance, en fait, c'est comme si c'était un monde à part, l'enfance. Et puis, tu es dans l'enfance, certaines nanas ont vécu ça. Je peux manger ce que je veux, machin, mais je vois ma mère, ma tante, Micheline, tout le monde, la maîtresse à l'école, tout le monde fait attention. Quand je deviendrai une femme, je ferai attention comme tout le monde.

  • Speaker #0

    Oui, et puis c'est tellement internalisé, c'est tellement partout, c'est tellement tout le temps dans ma famille, dans la famille de mon amoureux, le truc de « Oh, quand même, demain, il faut aller courir. » Enfin, « Tiens, quand même, ce soir, je ne mange pas. » Mais au travail, mais partout, en fait. Je me rends compte depuis que j'ai… Parce qu'en fait, mon amoureux me dit, même plus que toi, il a raison, je suis tout à fait d'accord avec vous deux, il me dit « Mais tu as toujours… » Quand j'étais en phase d'anorexie restrictive, ils me disaient « mais enfin aussi, tu étais anorexique ! » C'est juste que là, ça se voit, mais tu te comportais quand même. Enfin, je veux dire, c'est quand même le truc de… Les louches de pâte à crêpes, pardon, je reviens à chaque fois sur les mêmes exemples, mais je veux dire, c'est un truc de compulsion lié à la restriction.

  • Speaker #1

    est lié à l'insécurité.

  • Speaker #0

    Tu l'as toujours eu, ce truc-là. Moi,

  • Speaker #1

    je te dirais, priorité, travailler sur l'insécurité alimentaire et sur tes sensations alimentaires. C'est-à-dire que, même sans rien changer aujourd'hui, à ta manière de te nourrir, tu peux déjà, par des petits exercices du quotidien, t'entraîner à aller ressentir des choses. Pour t'entraîner... à renouer avec ça parce que tu n'es pas cassé. Je suis persuadée que tout fonctionne très bien, c'est juste que tu as été déconnecté de ça dès la petite enfance. Mais tu as cette capacité à ressentir le rassasiement, mais par contre, ça va demander plein de petites expérimentations. Et en fait, ça commence par ressentir le goût vraiment des aliments, te dire sans aucune volonté dans un premier temps de dire, Allez ! Je me pose, je déguste en pleine conscience, comme ça, je vais pouvoir m'arrêter. Non, c'est juste, c'est trop cool de manger un bon aliment. Et c'est quoi son odeur ? C'est quoi sa texture ? Quel goût il a ? Tiens, à la dixième bouchée, est-ce qu'il a le même goût qu'à la première bouchée ? D'être dans du jeu, en plus, mettre un truc un peu léger, c'est du jeu. Il n'y a aucun enjeu. Ce n'est pas, je fais ça pour... Genre, c'est de l'entraînement. En fait, tu as besoin de t'entraîner à revenir à toi dans ton corps. Ça va passer par être de plus en plus fine sur tes sensations de faim aussi. Parce que le rassasiement, il est très dépendant de la sensation de faim. Mais moi, je te dirais bien, mets un peu du jeu, quelque chose de léger pour retrouver quelque chose de plus vécu dans ton comportement alimentaire.

  • Speaker #0

    Ce qui est fou en plus, c'est que j'ai l'impression de... C'est quoi The Child Jekyll and Miss Hyde ? Les sensations, on va dire gustatives ou les goûts des aliments, je cuisine pas mal, j'aime beaucoup cuisiner, je fais attention aux produits que je mange. Alors certes, pour le côté bio, la santé, tout ça, mais c'est pour le goût aussi. J'ai toujours aimé des choses qui étaient bonnes. J'ai jamais, ou pas très souvent, fait des espèces de compulsions sur des trucs un peu nuls ou que je n'aimais pas vraiment au goût. les aliments je les cuisine je les les travail et puis sur les et donc tout ce qui est début de repas pour moi je suis en pleine conscience c'est génial je sens le romarin je sens l'origan c'est super il ya du moelleux il ya du ça il ya du truc et à un moment du repas il ya un switch qui se passe où j'ai l'impression de d'un gouffre je sais pas comment le dire autrement mais qui s'ouvre à l'intérieur de moi C'est comme si j'avais un chrono pour faire rentrer le plus de nourriture dans un temps limité. Il y a un truc de...

  • Speaker #1

    Peut-être que c'est relié justement au changement de goût des aliments. Parce que c'est vraiment le premier... C'est un super outil pour le rassasiement. Les aliments, ils n'ont plus le même goût. Il y a des enfants, moi, ça me fait trop rire. En fait, tu l'as peut-être déjà vécu avec ton enfant ou ça viendra. Tu as le côté « Ah ouais, trop content de manger un truc, il mange, il mange. » Et puis, le visage change au bout d'un moment. Soit il a mangé trop vite et il n'a pas eu le temps de se rendre compte du changement. Et à la fin, il va te dire « Ah non, je n'aime pas ça. »

  • Speaker #0

    Oui, alors qu'il vient de s'en descendre une demi-heure.

  • Speaker #1

    « Je n'aime pas ça. Tu viens de manger toute ton assiette. Tu m'as demandé de te resservir. » Et en fait, bouf !

  • Speaker #0

    Ça veut dire « j'en veux de change. »

  • Speaker #1

    Le goût change. Et là, il est allé un peu trop loin parce qu'il est dans le dégoût. mais en fait le goût de l'aliment change et peut-être que quand le goût de l'aliment commence à changer pour toi, inconsciemment, tu sais que c'est la fin du repas et là, ça active l'insécurité.

  • Speaker #0

    C'est ça. C'est déjà fini, mais c'est trop difficile.

  • Speaker #1

    Et c'est là où il faut bosser sur la sécurité. Et la sécurité, elle passe par plein de choses. Elle passe par le fait de sentir que tu as le droit absolu de manger n'importe quel aliment, aussi souvent que tu veux. et d'avoir ces aliments-là chez toi. Alors là, je te le dis comme ça, forcément que tout faire d'un coup, ça paraît compliqué, mais en gros, la sécurité, elle passe par ça, de manière à après même aller te la verbaliser, cette sécurité. Oui, là, le repas, il se termine, OK. Sauf que si j'ai encore envie de manger cet aliment dans une heure ou dans deux heures, je me donne le droit d'aller en remanger. Oui,

  • Speaker #0

    j'ai le droit d'y retourner.

  • Speaker #1

    Et en fait, c'est un travail sur du long terme, bien sûr, encore une fois, d'aller ramener de la sécurité parce que c'est ça qui s'active. Mais attends, moi aussi, je vais y revenir à l'exemple de la louche de pâte à crêpes, mais c'est la petite fille qui est tellement insécurisée. Les aliments... qui ne sont pas disponibles, qui sont... Ou les regards pleins de reproches. Enfin, tu vois, tout ce truc hyper insécurisant qui fait que, vite, vite, vite, vite, vite, ça va disparaître. Et puis, en fait, comme en plus, toi, tu te dis dans ces moments-là, quand tu sens que ça commence à partir en vrille, tu t'en rajoutes une couche. Tu te le dis et que ça va disparaître au lieu de te dire...

  • Speaker #0

    Parce que je vais le faire disparaître moi-même demain.

  • Speaker #1

    T'en auras autant que tu voudras. T'es en train de te dire, alors là, ma grande, demain, privé de petit-déj. Et voilà. Donc en fait, tu joues le rôle de ta propre maman à l'époque, tu vois, qui vient dire « ah ben non » . Et en fait, ça appuie encore sur l'insécurité qui va appuyer sur l'urgence, qui va appuyer sur la nécessité de se remplir, quoi.

  • Speaker #0

    Oui, oui. Et ce truc-là d'insécurité, je sens que c'est… Enfin là, mon corps est en train de me dire… C'est très subtil et c'est pas hyper visible, mais moi, je le vois. mon corps est en train de m'indiquer que c'est ça la gonfle et c'est bon ça va là c'est à dire que ces trucs de mini restriction mini compulsion mini restriction mini compulsion qui varie un peu mon corps est en train de m'indiquer par des petits signaux juste le fait que non mais ça va je prends un tout petit peu de poids en ce moment tout ça n'est pas grave évidemment c'est C'est juste que... Mon corps me signale que ces petites conneries de peser ton morceau de pain, tout ça pour finir dans le paquet de gâteaux, pour sauter le petit déjeuner le lendemain, pour faire ci, pour te flageller toute la soirée, tout ça. Mon corps me dit, ma grande, ça ne marche plus vraiment là pour contrôler ton poids, que je gardais stable avec mes dents et en raclant avec mes ongles depuis quelques années. je sens que là c'est plus possible, c'est de moins en moins possible. J'ai de moins en moins de prises et vraiment tant mieux. Enfin, sur le fond, je pense que c'est terrible. C'est un sentiment d'échec que je désapprouve mais que je ressens.

  • Speaker #1

    Oui, mais ce n'est pas toi que ça met en échec, c'est ce mécanisme merdique en fait.

  • Speaker #0

    Voilà. mais que j'ai tellement internalisé que je le vis un peu comme une partie de mon identité mais oui mais jamais t'as eu l'occasion de voir que ton corps il savait faire,

  • Speaker #1

    mais t'imagines la puissance du truc quand au lieu de peser ton bout de pain tu vas t'autoriser à manger la demi baguette si t'en as besoin à ce repas là, si t'en as envie et puis peut-être que le soir, même si le soir tu remanges de la pizza ou je sais pas quoi et puis qu'en fait de manière très fine, tu vas te rendre compte que ça s'équilibre, que ton poids s'équilibre, que tu vois, il n'y a pas de variation. Et en fait, la puissance du truc, quand tu vas te rendre compte que tu peux te faire confiance, que tu peux avoir une relation de confiance avec ton corps et ta propre régulation, c'est incroyable.

  • Speaker #0

    Et cette phase-là, alors déjà, je ne sais pas comment éteindre le cerveau de la phase de « vas-y, ce n'est pas grave, continue de… » qui passe, je pense, pour ma part, évidemment… la phase de lâcher le contrôle, je ne sais pas bien comment on fait, mais je ne sais pas si ça se décide un jour ou si ça se fait progressivement, mais ça va passer, comme tu le disais, par une pizza dans l'assiette, j'en sais rien, un soir, deux soirs, trois soirs, et dans un premier temps, et c'est normal, je pense, la petite fille en moi va terminer la pizza parce qu'elle est là et qu'insécurité, etc. avant peut-être éventuellement d'en laisser une part parce que j'ai plus faim, parce que je suis rassasiée, parce que tout ça, parce que j'aurais découvert peut-être ça, cette première phase-là de « waouh ! » Bon, elle est très effrayante.

  • Speaker #1

    Oui, mais en même temps, même maintenant, même quand tu y penses maintenant, est-ce que tu penses que si je te sers de la pizza tous les jours pendant 4-5 jours, tu vas être contente de manger ta pizza et tu vas… Te jeter dessus même au bout du quatrième jour ?

  • Speaker #0

    Contente, non. mais il est probable que pendant 4-5 jours je les termine toutes, oui oui, parce que mon cerveau n'aura pas encore compris que après la pizza il y a punition.

  • Speaker #1

    Peut-être ou peut-être pas, ça dépend parce que si tu fais ça en disant derrière je ne remange plus jamais, effectivement, mais...

  • Speaker #0

    Si il y en a deux qui reviennent le lendemain c'est sûr que ça peut appuyer dans le cerveau un truc de non non ça revient.

  • Speaker #1

    Mais si ton congèle il est blindé de pizza et que tu dis bah ok j'ouvre mon congèle, ok, bon bah là je suis encore dans mon exercice, je suis censée manger une pizza, j'en ai envie ou pas ? Oui j'en ai envie, non j'en ai pas envie. Et en fait d'avoir ton truc plein de pizzas et d'être dans cette autorisation et de te dire ok, si j'en ai envie, j'en mange. Si j'en ai pas envie, je suis pas obligée. Par contre là si j'en ai envie, j'en mange. Et de renouveler le truc, tu pourrais être surprise en fait, sincèrement, de la vitesse à laquelle ça peut aller quand même. Alors, ça ne veut pas dire que tous les problèmes sont réglés et que ça y est, il n'y a plus d'insécurité alimentaire parce qu'elle s'est immiscée avec plein d'aliments. Mais tu n'as pas non plus besoin de refaire tous les aliments du monde. En fait, la sécurité, à un moment donné, elle va s'installer. Mais oui, il y aura peut-être la pizza et puis le pain et puis le chocolat et puis voilà. Mais l'idée aussi, c'est d'associer ça à quelque chose de... Alors, j'allais dire à la dégustation, mais... la dégustation dans le but de te faire un cadeau. En fait, tu n'es plus une petite fille en faute qui doit manger super vite sa pizza. Le but, c'est que là, tu es une adulte qui aime les bons produits, qui adore sentir les différentes saveurs dans son plat. Et que quand tu manges de cette manière-là, même une pizza, tu peux la manger de cette manière-là. Même, tu vois, plus ça va aller, plus tu seras en mesure de le manger de cette manière-là. Mais oui, peut-être que les... Deux, trois premiers soirs, tu vas la manger vite, tu vas la manger entière et que ce sera compliqué.

  • Speaker #0

    Oui, et l'enjeu, c'est qu'à la fin de cette première, de cette deuxième soirée, il n'y ait pas de... C'est mal, tu n'aurais pas dû. Et c'est cet état d'esprit-là que je trouve difficile à atteindre.

  • Speaker #1

    Mais c'est aussi tout l'intérêt pour moi d'être accompagnée sur ce cheminement, tu vois. Parce que les pensées, elles vont arriver. Les pensées, elles vont venir. Elles vont te dire, tu fais de la merde, mais qu'est-ce que tu es en train de faire ? Mais tu vas grossir, mais n'importe quoi. C'est normal. Elles font leur job. Elles font leur job de pensée qui croit t'aider, te protéger.

  • Speaker #0

    Oui, tout à fait.

  • Speaker #1

    Tu n'es pas contre toi, tu n'es pas en train de jouer contre toi. Tu essaies de te débattre de trucs. Ces pensées-là, elles ont une valeur. protectrice. Parce que même ton TCA a une valeur protectrice. Oui,

  • Speaker #0

    tout à fait.

  • Speaker #1

    Mais elle ne fonctionne pas. Là, aujourd'hui, tu te rends compte que ton mécanisme est assez limite, que ça ne fonctionne pas, que ça a quand même bien abîmé ta santé au global, ton estime de toi, enfin, plein de choses, ta confiance en toi. Donc, voilà. Et c'est ça qui est important, c'est de se rendre compte que ça ne fonctionne pas. Puis, ça tu l'as déjà vachement bien fait, de démêler tout le système, tu vois. Ok, ces pensées restrictives qui débarquent sont celles qui vont faire que je vais me taper des compulsions et que au final, je risque même plutôt plus de grossir. Enfin voilà, puisque la peur derrière, c'est « ah, on va pas se grossir » . Puis en parallèle de tout ça, c'est trop bien aussi de bosser sur « attends, c'est quoi cette peur complètement irrationnelle ? » Parce que oui, il y a la société dans laquelle on vit qui est grossophobe, je suis la première à essayer de le crier sur tous les toits. Il y a vraiment une responsabilité collective derrière le TCA, mais il y a aussi toi dans ton histoire, à quel point c'est ancré en toi qu'il y a une perte de valeur quand tu grossis.

  • Speaker #0

    Oui, j'ai presque même l'impression que… En même temps, je crois que c'est possible parce que j'ai entendu plein de gens réussir à avancer. par des thérapies comportementales et que c'est vraiment l'action, ressentir dans son corps des choses différentes qui fait avancer aussi. Et en même temps, je crois que fondamentalement, tant que je n'ai pas débunké vraiment ce truc de si tu es grosse, tu es moche et si tu es moche, tu ne seras pas aimée. Je le fais vite parce que je vois l'heure qui file et que je me dis résume un peu. J'ai l'impression que ça bloquera toujours l'avancée.

  • Speaker #1

    Moi, je ne crois pas. Je crois que si on devait attendre de ne plus avoir cette peur viscérale de grossir pour guérir d'un TCA, personne n'en guérirait.

  • Speaker #0

    Oui.

  • Speaker #1

    t'es obligé de y aller avec cette peur de grossir. Et en fait, c'est sur le chemin de guérison que t'apprends aussi à la déconstruire et aussi à la regarder un peu différemment. L'autre jour, je faisais un groupe de paroles dans mon programme d'accompagnement, et le thème, c'était gérer le culte de la minceur et la diet culture. Parce que c'est un vrai sujet sur le chemin de guérison. Toi, tu déconstruis des trucs, mais comme tu le disais, tout le monde autour a ses discours.

  • Speaker #0

    Il faut se lalomer.

  • Speaker #1

    Et à un moment donné, il y a une des personnes que j'accompagne qui dit, putain, mais moi, à un moment donné, aujourd'hui, je suis en mesure de me dire que je préfère être libre et grosse que mince et prisonnière toute ma vie de tout ce merdier. Et je sais que ça a résonné pour moi. plusieurs, c'est une phrase qui est forte qui est inentendable pour tout un tas de gens dans les troubles alimentaires et attention je suis pas en train de dire et c'est pas ce qu'elle voulait dire qu'on a deux choix dans la vie contrôler tout ce qu'on mange ou être grosse c'est pas vrai, c'est pas ça mais cette peur là de grossir à un moment donné quand tu découvres la liberté, la vraie liberté tu parlais de charge mentale au début de ouais de ton témoignage, de la place que ça prend dans ta tête, quand tu commences à alléger ça et que tu commences à te sentir libre, de manger ce que tu veux, à être plus présente dans les discussions, à avoir plus d'énergie pour n'importe quel projet, pour avoir l'impression d'exister plus toi, peut-être que tu n'auras toujours pas envie d'être grosse, tu n'auras toujours pas envie de grossir, mais ça n'aura peut-être pas tout à fait la même importance dans ta vie si tu prends deux kilos.

  • Speaker #0

    C'est clair qu'il y a quelque chose dans la façon dont on sait tout ce... construit l'image qu'on a de soi par rapport ou non au regard qu'on a senti des autres. Il y a quelque chose qu'on construit tous différemment et que moi, je sens que j'ai fait ça un peu mollement ou avec des fondations un peu cartonneuses sur l'estime de moi dépend du regard que je lis, de l'image que je crois lire dans le regard des autres. quelqu'un qui... Je préfère être libre et grosse. Je l'applaudis et je l'admire et je lui trouve un courage que je n'ai pas ou pas encore. Et on est tellement plus nombreuses, effectivement, à être... Franchement, je le vis comme une lâcheté.

  • Speaker #1

    Oui, mais en le disant comme ça, tu reprends un versant très individuel. Alors que je suis d'accord avec toi, je pense que la majorité des femmes sont soumises comme ça au regard de l'autre. Mais on est construite comme ça. C'est comme ça qu'on nous fait grandir. C'est comme ça qu'on nous apprend à devenir des femmes. Et du coup, tu parles de lâcheté, je trouve ça dur comme mot parce que la responsabilité, elle est collective, elle est sociétale, en fait. C'est hyper difficile de sortir de ce truc-là. Hyper, hyper, hyper difficile.

  • Speaker #0

    Ouais, et bien, celles qui le font, je... Je les admire vachement et je les trouve tellement courageuses. Je veux être à vos côtés, mais je ne me sens pas assez solide.

  • Speaker #1

    Moi, je crois que ce qui aide, elle le disait, une chose qui l'aide, c'est d'être dans une forme de militantisme. En fait, elle a décidé de plus rien laisser passer quand elle parle avec des gens. Mais d'ailleurs, c'est ce que je lui avais dit, il faut aussi beaucoup de courage, beaucoup d'énergie. Et en fait, elle m'a dit « Ah non, mais moi, aujourd'hui, ça m'en donne de l'énergie de ne pas laisser passer les petits mots, les réflexions, les machins. » Et donc, elle est dans un truc un peu militant. Et en gros, elle avait dit autre chose. Si tu écoutes l'épisode, tu vas rigoler. Comme quoi, je m'en souviens bien. C'était très intéressant ce qu'elle disait. Elle a dit autre chose aussi. C'est qu'elle a parlé de groupe d'appartenance. Et elle a dit qu'elle s'était trouvé un autre groupe d'appartenance, que celui, tu sais, de la femme là, au régime, à vouloir vraiment rentrer dans les cases. Et que du coup, c'est aussi un autre groupe d'appartenance que ces personnes qui décident de sortir de ce cadre-là et de dire, en fait, moi, vos injonctions, vous pouvez vous les mettre où je pense, j'ai envie de vivre libre, quoi. Et que je sois grosse, mince, grande, petite, en fait, tu vois.

  • Speaker #0

    Et puis surtout, on va dire, mon regard, mon... estime de ce que je fais, de ce que je suis, me suffit. Et je me fous un peu de ce que vous pensez, de comment je m'alimente ou de ce à quoi je ressemble.

  • Speaker #1

    Je pense que ça, c'est un peu utopique de se dire que notre regard suffira. Je pense que c'est normal qu'on ait besoin des autres. Par contre,

  • Speaker #0

    on peut se sentir validée par plein d'autres choses,

  • Speaker #1

    au sujet de plein d'autres choses que la forme de ton corps. Tu vois ? Oui, oui. C'est forcément déjà le cas, de toute façon.

  • Speaker #0

    Peut-être. C'est vrai que pour le coup, c'est tellement vieux, c'est tellement constitutif de ma personne, qu'il y a toujours un... ce bruit de fond derrière toute chose que je fais, même des choses qui n'ont rien à voir avec comment je m'alimente ou comment je ne fais pas de sport, mais il y a toujours un truc de « tu n'y arrives pas, tu n'es pas assez bien de toute façon » puisqu'il y a cette espèce de péché originel qui a teinté tout ce que j'ai fait dans ma vie. Je pense qu'il y a vraiment un truc en l'occurrence là, il y a un vrai enjeu de renaissance sur le... c'est peut-être mettre beaucoup de pression au process, mais il y aurait un... j'ai toujours eu un peu peur de faire toute chose parce que il y a cette espèce de sentiment d'échec originel qui me fait me dire quoi que je fasse, y compris professionnel, loisirs, etc., activités, je me sens légitime de rien. J'ai toujours eu ce truc de… comme à l'époque pour les régimes. tu ne vas pas y arriver, ne commence pas. Je suis une grande peureuse de la vie, par exemple. Il y a plein d'activités, j'en sais rien, il y a des tas de gens qui me disent, j'ai essayé le canyoning, j'ai essayé ça, j'ai fait ce machin. Il y a des tas d'activités ou de choses que j'aurais pu avoir le désir de faire dans ma vie, je dirais, non, je n'oserais pas faire ça. Il y a quelque chose qui teinte tout, mais ce qui rend d'autant plus...

  • Speaker #1

    enviables de le résoudre ouais mais peut-être aussi que là il y a la nécessité de regarder tout ce que malgré tout ça t'as déjà fait parce que moi je sais pas grand chose de toi mais je sais que t'as un emploi, je sais que t'es en couple, je sais que t'es maman et donc ça veut dire que tout ça t'es forcément allé faire des trucs qui te faisaient hyper peur t'as tenté des aventures donc quand même la grande aventure de devenir maman et que au quotidien il y a des tas de choses que tu réussis et Je suis à peu près sûre qu'il y a des gens qui te renvoient ces réussites. Après, peut-être que c'est compliqué d'accueillir. Et c'est peut-être même compliqué pour toi de voir tout ce que tu as déjà fait de génial. Oui,

  • Speaker #0

    c'est très compliqué. C'est pas évident d'être dans le moment pour moi. Tout ça est le même sac de nœuds. Mais par rapport à mon enfant, par exemple, je sens que le TCA est venu vraiment se foutre au milieu de mon postpartum de façon très compliquée. Et j'ai mis plus de temps, je le sais, que si je n'avais pas de TCA à connecter avec lui. ça crée beaucoup d'émotions on est passé au point Godwin on parle de mon fils chaque sujet où je te dis moi je suis sûr que tu fais plein de choses géniales,

  • Speaker #1

    tu vas pouvoir me dire à quel point il y a des trucs que tu fais pas assez bien et tu vois là on met le doigt sur un truc c'est à dire que c'est une certitude qu'il y a des tas de choses que tu fais pas bien, c'est à dire à ta façon et que c'est largement suffisant et que les gens autour de toi ont sans doute énormément de très bonnes raisons de t'aimer d'avoir envie de passer du temps avec toi et que ça me semble important d'aller connecter avec ça tout ce que tu es déjà,

  • Speaker #0

    tout ce que tu fais déjà oui oui oui c'est effectivement un trait de personnalité qui est très souvent cousin avec le TCA du bien c'est pas assez si c'est pas si c'est pas fait le mieux possible je sais pas comment le dire de ce qu'on appelle rapidement le perfectionnisme je voulais pas dire perfectionnisme parce que je trouve que les gens qui se disent perfectionnistes ils savent pas ce que c'est vraiment en tout cas peut-être qu'ils arrivent à faire les choses parfaitement ce que j'ai pas le temps de savoir faire

  • Speaker #1

    ok ouais bon en tout cas moi j'aimerais bien savoir ce que tu te souhaites là pour l'année à venir si tu t'imagines en juin 2026 Dans quoi tu te projettes ? Qu'est-ce que tu te souhaites ?

  • Speaker #0

    Je voudrais bien, parce que je n'arrive pas encore à réfléchir en me regardant moi-même. C'est encore trop compliqué. J'ai toujours construit une opinion de moi en disant que pensent les autres. J'aimerais bien maintenant que… que cet enfant merveilleux qui existe puisse. Tant qu'à faire, j'aimerais bien que... Là, il a 16 mois, il va commencer à construire bientôt, finalement, des souvenirs et puis des consciences, des conceptions de qui est son père, qui est sa mère. J'aimerais bien qu'il ne voit pas sa mère juste comme une espèce de boule de stress et qu'il ne voit plus... Des moments de lâcher prise, de détente et de liberté ou de bonheur. Je ne sais pas comment le dire. Plutôt que de... Enfin, il s'en fiche de savoir dans quelle taille de jean je rentre, mon fils. Et il s'en fichera toute sa vie. Et je ne sais pas, je crois que... Je n'arrive pas bien à le formuler. Mais je crois que j'aimerais que... J'aimerais qu'en juin 2026, il ait sous ses yeux une personne un peu plus épanouie. C'est un peu flou et fourre-tout comme terme. Mais quelle que soit la façon d'y arriver, j'aimerais être plus là pour lui.

  • Speaker #1

    Ok.

  • Speaker #0

    Dans un an.

  • Speaker #1

    Mais c'est intéressant de formuler ça comme ça, parce qu'a priori, tu es quand même sortie de l'anorexie grâce à ton projet de le faire venir sur Terre.

  • Speaker #0

    Ouais. donc visiblement ça fonctionne bien pour toi c'est peut-être l'étape d'après d'arriver maintenant que je suis un peu sorti de la bulle de postpartum l'allaitement tous ces trucs compliqués de que j'arrive maintenant à le voir vraiment à le regarder vraiment ce qui dans un premier temps c'était juste mon fils c'est juste une to do list quoi comme beaucoup de gens obsessionnels et ben je me dis que c'est ça devrait être quand même plus intéressant ça et que ça serait une bonne source de... Je ne voulais pas dire distraction, ce n'est pas le terme, mais qu'il y a quand même plus de bonheur à trouver là-dedans que dans un quelconque objectif de moi.

  • Speaker #1

    Et tu le sais, j'aime bien finir par une question auprès de chaque personne, c'est de savoir ce que toi, tu aimerais dire aux personnes qui nous écoutent et qui sont en souffrance. avec leur corps, leur alimentation ?

  • Speaker #0

    Je crois que... J'ai évidemment pas de conseils à donner parce que je m'en donnerais à moi-même. je crois que plus on verbalisera, y compris bien sûr à travers des outils d'information et ton podcast est vraiment un outil qui aide énormément pour écouter beaucoup d'épisodes. mais y compris dans les repas de famille, dans les apéros entre copains, peut-être pas forcément de façon offensive ou militante, mais peut-être qu'en verbalisant un peu qu'on passe toutes par là, qu'en fait même si on n'a pas un TCA qui nous amène à l'hôpital ou dans des situations extrêmes et donc très visibles, on est tellement nombreux. nombreux et nombreuses en fait à vivre ça, qu'en parler même un tout petit peu et même un peu dans le quotidien, je crois que ça peut faire qu'on cède un peu. Moi c'est quand j'ai réussi auprès d'amis, souvent féminines effectivement, mais pas seulement, réussi à verbaliser que toi aussi ça te fait flipper de manger ça, toi aussi t'as des stocks comme ça qu'on a. tous ou presque tous. En fait, c'est ce genre de micro-choses partagées, y compris avec des gens qu'on aime et qu'on connaît dans d'autres contextes, qui peuvent aider à prendre du recul parfois. Donc en fait, parlons-nous. Et osons un peu plus raconter nos petits trucs bizarres, mais qui prennent tellement de place dans la vie.

  • Speaker #1

    Merci pour cette belle conclusion. Et puis pour tout ce que tu as livré durant notre échange.

  • Speaker #0

    Merci à toi, Xavier. Et puis merci pour tout ce que tu fais parce que vraiment, c'est le podcast. Et puis pas seulement, c'est vraiment une ressource qui... qui est extrêmement aidante, vraiment, je pense, pas que pour moi, parce que c'est rare de tomber sur un contenu où le vocabulaire est juste, où l'angle de réflexion par rapport au truc est juste. Et cette chose-là dont on parle sans jamais parler tout le temps, ça fait du bien de l'entendre nommée correctement et décrite correctement. Et déjà ça, ça aide.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup. Ça me touche beaucoup. Merci.

Chapters

  • Présentation d’Éva

    01:41

  • Ses premiers souvenirs en lien avec le corps et l’alimentation

    04:40

  • Les différentes phases qu’elle a traversé

    13:10

  • La sortie d’anorexie : le pacte avec son mari

    23:22

  • Sa façon de manger aujourd’hui

    37:15

  • Ce que je lui conseille de mettre au travail

    50:07

  • Ce qu’Éva se souhaite pour l’année à venir

    01:14:31

  • Ce qu’elle aimerait passer comme message

    01:17:20

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