Speaker #0Bienvenue dans TCA, etc., le podcast qui décrypte les troubles des conduites alimentaires et tout ce qui gravite autour, parce que ça n'est jamais seulement qu'une histoire de bouffe. Je suis Flavie Milsono, et j'accompagne les mangeuses compulsives à devenir des mangeuses libres bien dans leur basket. Alimentation, peur du manque, insatisfaction corporelle, peur du jugement, du rejet, empreinte familiale, grossophobie, les sujets abordés dans ce podcast sont très vastes, et pour ce faire, mes invités sont aussi très variés. Retrouvez-moi aussi sur Instagram où j'aborde tous ces sujets au quotidien sur flavie.mtca. Très belle écoute. Comment et pourquoi on passe d'un trouble des conduites alimentaires à un autre et comment l'éviter ? C'est le sujet que je vous propose d'aborder aujourd'hui dans ce nouvel épisode de podcast de TCA etc. Bienvenue par ici. Et sachez que si j'ai décidé d'aborder ce sujet, c'est parce que l'une d'entre vous me l'a demandé. Donc déjà en préambule, merci pour vos échanges sur Insta notamment, c'est principalement là-bas en fait que vous venez me parler du podcast. Et merci pour vos propositions, n'hésitez pas à continuer à m'en faire parce que ça nourrit mes idées de nouveaux épisodes et puis ça me permet de rester en phase aussi vraiment avec ce dont vous avez besoin. Donc... Vraiment, n'hésitez pas à continuer de me proposer des sujets. Et donc voilà, une personne est venue vers moi pour me demander si j'avais déjà abordé cette question-là, qui était celle que... qui était le fait qu'on observe quand même qu'on passe pas mal d'un TCA à un autre. Alors, en préambule, je... alors, en avant-propos... Peut-être que c'est important de préciser le fait qu'ici je parle des trois principaux troubles des conduites alimentaires que sont l'anorexie, la boulimie et l'hyperphagie. Et non pas des troubles alimentaires non spécifiés que peuvent être pica, mâcher, recracher ou même orthorexie, ni même tous les troubles alimentaires subcliniques, enfin encore que. Franchement, vous pouvez les inclure dans les trois principaux. Qu'est-ce qu'on appelle les troubles alimentaires subcliniques ? En fait, ce sont les TCA qu'on ne peut pas diagnostiquer en cochant toutes les cases que nous propose le DSM-5. Par exemple, les critères d'IMC donnés par le DSM-5 pour l'anorexie. Ou par exemple, les critères autour de la boulimie, que sont le nombre de crises sur une semaine, avec minimum ce nombre de crises sur un minimum de mois. Bah oui, il y a des personnes qui ne rentrent pas exactement dans ces critères-là, pour autant qui souffrent de leur comportement alimentaire et de leur relation au corps. Donc on appelle ça les TCA subcliniques, ou bien même aussi plus facilement l'alimentation troublée. Voilà ce que je voulais vous dire. Donc là, on va vraiment s'intéresser aux trois principaux troubles alimentaires. Et aussi, en avant-propos, autre chose qui me semble important à rappeler, c'est que, à mon sens, mais je ne suis pas la seule à le dire, le TCA est une pathologie qu'on pourrait nommer comme étant polymorphe. C'est-à-dire qu'elle s'exprime et évolue d'une manière différente selon les phases. Mais finalement, ça reste la même pathologie. Vraiment, à mon sens, qu'on parle d'anorexie, de boulimie, d'hyperphagie, en fait, on parle d'un trouble des conduites alimentaires qui va s'exprimer différemment selon les moments de vie. Malheureusement, on sait que les TCA ont tendance à se chroniciser, à vraiment s'installer dans le temps, et notamment par le biais de cette évolution d'une pathologie à une autre. En fait, ça maintient une forme de déni, je pense. Je vais expliquer un peu plus après pourquoi je dis ça, mais cette évolution d'une pathologie à une autre peut laisser penser qu'à certains moments on est guéri, ou presque, alors qu'en fait c'est juste une autre forme de la pathologie qui s'exprime, notamment quand on parle de restriction-compulsion. Bon, je vais tout de suite rentrer dans le vif du sujet, ce sera vachement plus clair. Alors. J'ai eu envie de vous parler des scénarios qu'on observe régulièrement. Il y a trois grands scénarios d'évolution d'un TCA vers un autre dont j'avais envie de vous parler. Et le but c'est de comprendre comment, pourquoi ça se fait. Et dans un deuxième temps, évidemment, je vais vous proposer des pistes autour de comment l'éviter. Finalement, comment faire pour ne plus se promener comme ça d'un TCA à un autre. Je pense que ce qu'on voit le plus, c'est la bascule entre l'anorexie et la boulimie. Pourquoi est-ce que c'est ce qu'on voit le plus ? Eh bien parce que beaucoup des TCA commencent avec une phase d'anorexie. L'anorexie, c'est la pathologie qui apparaît quand même le plus souvent autour de la puberté, donc relativement jeune. Il y a plein de personnes qui commencent par... Un TCA plutôt compulsif, attention je ne suis pas en train de dire que c'est tout le temps comme ça, pas du tout, c'est juste que c'est des scénarios qu'on observe plus ou moins, donc c'est pour ça que je vais les nommer. Donc voilà, un scénario un peu classique entre guillemets malheureusement, c'est l'apparition de l'anorexie autour de la puberté, donc voilà, globalement autour de l'adolescence, et qui évolue en boulimie, voire parfois en hyperphagie, j'en parlerai dans le deuxième cas. Pourquoi est-ce que... Dans ce cas-là, l'anorexie évolue vers la boulimie. En fait, il y a une forme de survie du corps qui s'exprime, et c'est plutôt bien, c'est plutôt une bonne chose. À un moment donné, après des semaines, des mois, voire des années d'anorexie restrictive, le corps se tourne en mode survie vers l'alimentation. Peut-être que vous avez déjà entendu parler de ce qu'on appelle la faim extrême. On le nomme comme ça. C'est pas, comment dire... c'est pas une façon hyper scientifique de le nommer mais je vois souvent ça passer sur les réseaux et effectivement je trouve que c'est quand même assez parlant cette notion de faim extrême en fait la faim extrême elle surgit à un moment que je ne peux pas vous chiffrer parce que c'est différent d'une personne à une autre mais tout d'un coup il y a un retour du désir pour la nourriture un retour du ressenti vraiment de la faim qu'on ne peut plus ignorer En fait, quand je dis un retour du désir, disons que voilà, peut-être qu'on a l'impression de ne plus avoir faim, de ne plus désirer la nourriture. Je pense surtout qu'on trouve des moyens pour ne pas trop le ressentir et donc ne pas craquer. Je ne pense pas que tout ça disparaisse pour de vrai. C'est juste qu'il y a des forces psychiques, on va dire, qui prennent le dessus. Donc là, tout d'un coup, ça s'impose d'une manière urgente, virulente. Et du coup, il faut aller vers la nourriture. Ça peut se faire de différentes manières. C'est pas nécessairement compulsif. Mais quand même, ça le laisse souvent parce que... Parce qu'en fait, c'est le seul moyen d'y accéder. C'est comme s'il y avait un contournement de cette espèce de contrôle et qui fait que, paf, il y a un truc qui lâche. C'est impossible d'y résister. Il faut se tourner vers la nourriture et on mange, Évidemment s'en suit une culpabilité immense et donc là dans le cadre que je vous explique c'est un passage vers la boulimie donc du coup il y a de la compensation. Pourquoi il y a de la compensation ? Parce que la voix de l'anorexie elle est toujours là en train de dire mais en fait tu devrais pas manger ça, t'es pas assez mince ou t'es trop grosse etc. Et donc du coup... C'est l'enfer d'avoir craqué et d'avoir mangé tout ça, donc vite vite il faut compenser par des vomissements, par du jeûne, par du sport, la prise de laxatifs, etc. C'est quelque chose qui fait très peur parce qu'il y a un sentiment d'être complètement insatiable. Les personnes qui en témoignent, qui disent essayer d'y répondre, ont cette impression que ça ne se terminera jamais. C'est-à-dire qu'il faut bien imaginer qu'on sort d'une phase... d'intenses restrictions où on s'est privé de, globalement, tout ce qui était soi-disant trop calorique, donc tout ce qui était gras, sucré, enfin voilà. Donc il y a eu tout un tas d'aliments qui ont été interdits, des prises alimentaires qui ont été extrêmement réduites, l'apport énergétique qui a été extrêmement réduit. Et puis tout d'un coup, ce besoin, cette envie refont surface plus, Et puis même si on accepte, on essaie d'y répondre, par rapport à ce qu'on mangeait il y a quelques mois, on a déjà l'impression de manger énormément. Bon, dans les faits, il y a des personnes qui essaient d'y répondre, en fait c'est insuffisant. Ce qui explique aussi ce côté insatiable, mais pour la personne qui est en recovery, ou j'allais dire en guérison d'anorexie, c'est déjà beaucoup de manger ça. Et donc mon dieu, mais quand est-ce que ça va s'arrêter ? Mais tous ces efforts que j'ai fait pour perdre du poids, mais mon Dieu, je vais grossir sans m'arrêter. Le sentiment qu'on ne sera jamais satisfait, que l'envie ne passera jamais et que donc, en fait, on grossira sans s'arrêter jusqu'à être à un poids vraiment très, très élevé. Ça fait extrêmement peur. Pourquoi on bascule de cette manière là ? J'y ai répondu un peu, c'est à dire qu'il y a quelque chose d'insoutenable pour le corps d'être maintenu dans une telle restriction. Je pense aussi qu'on a comme un quota restrictif qu'on peut supporter. Sans parler d'anorexie sévère qui répondrait à tous les critères, comme je l'ai dit avant du DSM-5, toutes les personnes qui enchaînent moult régimes qui sont dans une restriction comme ça, avec le mental toujours tourné vers ce qu'on doit manger, ce qu'on doit pas manger, comment on doit faire, etc. En fait, moi je pense vraiment qu'on a une sorte de seuil de tolérance à la restriction. Et qu'à un moment donné, il est dépassé et que c'est plus possible. Et il y a des personnes qui observent ça aussi, qui font un régime, deux régimes, trois régimes, et puis à un moment donné, c'est plus possible. À chaque fois qu'elles commencent un régime, direct, ça part en compulsion. Comme s'il n'y avait plus la possibilité de se restreindre. Moi, je pense que, je le nomme comme ça, je pense qu'il y a une forme de seuil. On n'est pas tous égaux, on n'est pas tous et toutes à égalité face à ça. Mais il y a un moment donné où ce n'est plus possible pour le corps, pour la psyché. En fait, ça demande énormément de se restreindre sur des besoins, je le rappelle, qui sont juste vitaux. Si on s'imagine se restreindre sur nos besoins de respirer, d'uriner, de dormir... On peut imaginer à quel point ce serait difficile. Mais en fait, là, c'est la même chose. Donc voilà, pourquoi on bascule ? Parce qu'à un moment donné, le corps reprend ses droits. Mais pourquoi on bascule dans un autre TCA ? Parce qu'en fait, c'est ça, on pourrait juste se dire le corps reprend ses droits, on se remet à manger et basta. En fait, le poids revient à son poids d'équilibre, on reprend du poids jusqu'au poids d'équilibre et basta, on passe à autre chose. Mais si ça bascule dans une autre pathologie, ou en tout cas... Un versant différent de la pathologie, donc de l'anorexie vers la boulimie, c'est parce qu'il y a une non-acceptation de ce qui est en train de se passer. C'est parce que la voix du TCA est en train de dire Ouais, non mais attends, qu'est-ce que tu fais ? N'importe quoi, tu vas trop grossir, nanana. Parce qu'en fait, on veut rester dans un contrôle de ce qu'on mange, parce qu'on veut rester dans un contrôle de son corps. C'est ça qui fait qu'on bascule, finalement, qu'au lieu de sortir simplement de l'anorexie, on bascule dans la boulimie, parce qu'on n'accepte pas. Le besoin qui s'exprime est parce qu'on a super peur que ça ne s'arrête jamais et donc on se sent dans l'obligation de maîtriser le truc. Sauf qu'en maîtrisant le truc, donc en se restreignant le lendemain d'une crise, en faisant du sport à outrance, en ayant des purges, etc. Et bien en fait, on ne fait qu'entretenir le mécanisme et donc la future crise, etc. Un autre scénario qui arrive fréquemment, c'est le basculement de l'anorexie. Encore, ou en tout cas, appeler ça d'une... On n'est pas obligé d'appeler ça anorexie, mais on peut parler d'une grande phase de restriction alimentaire vers de l'hyperphagie. Bon, c'est globalement la même chose, sauf que les compensations sont impossibles. Je dis bien, les compensations sont impossibles et non pas la personne choisie de ne pas compenser. Parce qu'en fait, globalement, on choisit toujours de compenser. C'est juste que là, c'est pas possible. Pourquoi ? Dans la majorité des cas par épuisement physique et psychique. Mais qu'on soit bien clair là-dessus, dans le cadre de l'hyperphagie, la personne elle s'en fout pas. La personne elle est horrifiée aussi par le fait de tout d'un coup se tourner vers toute cette alimentation, de manger tout ça, les peurs sont les mêmes, le mal-être est le même, l'envie de se restreindre est la même. Et d'ailleurs la personne continue de se dire non mais je vais me reprendre en main. Demain, je vais faire attention. C'est pas possible. Je fais n'importe quoi. Et du coup, ça alimente de futures crises ou de futurs moments de suralimentation. Et ça alimente aussi le mal-être global parce que du coup, fatalement, s'il y a des grosses prises alimentaires et qu'il y a zéro compensation, le poids, il augmente plus vite que dans le cas de la boulimie. Donc le mal-être, il est aussi... conséquent à cette prise de poids. Et du coup, plus il y a de mal-être, plus il y a le besoin de se tourner vers la nourriture. Et puis, il y a aussi le mécanisme du foutu pour foutu qui prend place. Voilà, au point où j'en suis, de toute façon, c'est n'importe quoi, je suis incapable, etc. Et donc, voilà, l'hyperphagie s'installe de cette manière-là. Le pourquoi ça prend place, c'est... Exactement la même chose que ce que j'ai dit par rapport à la boulimie. Il y a une non-acceptation de ce qui est en train de se passer. Il y a le fait d'être persuadé de devoir contrôler ça, même si on n'y arrive pas, on se dit mais c'est pas possible, je devrais contrôler ça. Ça ne va jamais s'arrêter, c'est l'horreur, etc. Donc on n'est pas du tout, dans les deux cas, on n'est pas du tout connecté à ce qui se passe pour le corps. C'est le mental qui s'affole et qui essaie sans arrêt de reprendre la main sur le truc. Et dans le cas de l'hyperphagie, sans y arriver, Et donc ce qui engendre désespoir, etc. Donc en fait, c'est exactement la même chose que pour la boulimie, en rajoutant aussi ce côté vraiment de désespoir, de voir le poids augmenter et d'être dans un cercle vicieux, d'avoir encore plus besoin de manger, de se tourner vers la nourriture. Au-delà de la faim extrême, du coup, il y a aussi le côté très émotionnel qui va faire qu'on a envie de se tourner vers la nourriture, qu'on a envie, qu'on a besoin de se tourner vers la nourriture. Et puis le foutu pour foutu quoi, de toute façon au point où j'en suis il y a aussi des pensées comme ça qui viennent alimenter les futures crises. Et donc voilà, le cercle vicieux prend place exactement comme dans l'exemple de la boulimie. Un dernier exemple qui existe mais qu'on connaît moins, c'est celui du passage de l'hyperphagie vers l'anorexie. Un exemple un peu typique que moi j'ai pu observer, ou j'ai pu entendre des témoignages, mais malheureusement j'ai pu l'observer aussi sur les réseaux. C'est des personnes qui vont vivre une chirurgie bariatrique et qui, au fil de cette chirurgie bariatrique, de tout ce qu'elle implique en termes d'adaptation alimentaire, je vais dire ça comme ça, et donc de perte de poids, basculent doucement vers une anorexie. En fait, là, il y a un truc qui s'explique assez simplement. C'est assez visible, je trouve. C'est que la perte de poids, c'est vraiment grisant. Mais il y a autre chose, c'est les valorisations qu'on a en lien avec cette perte de poids, qui sont, ouais, quelque chose dont on a du mal à se passer, on a envie de continuer, d'aller plus loin. Il faut bien se dire que la perte de poids, ça a quelque chose de presque addictif dans les sensations que ça amène. Mais aussi cette sensation de reprise de contrôle, ah ça y est quoi, ça y est, j'ai repris la main sur mon corps. Du coup, j'ai l'impression de reprendre la main sur ma vie. Ça y est, les gens me valorisent. Enfin, je deviens la personne que j'ai toujours rêvé d'être. Allez, encore, encore, encore. Et en fait, la personne est prise dans un engrenage, et sans s'en rendre compte, on est bien d'accord, il y a énormément de déni d'associer à l'anorexie, mais on le renforce, le déni, dans notre société. Avec cette façon de valoriser tout ça, on ne permet pas à la personne de se rendre compte que, attention, Il y a peut-être quelque chose qui bascule là, dans quelque chose de pathologique. Ben non ! Comment est-ce qu'une personne pourrait se rendre compte de ça, alors que tout le monde lui dit Waouh, t'es super ! Oh là là, qu'est-ce que t'as l'air en forme, t'es tellement mieux comme ça ! Etc. Donc, on, je dis on au sens de la société, on appuie sur ce déni, on le crée aussi. Donc voilà, il y a énormément de dénis, et la personne ne se voit pas basculer. Et ben voilà, quand elle s'en rend compte... souvent elle est déjà bien loin dans le truc, ou alors souvent on se rend compte qu'on a ouvert d'anorexie quand on commence à basculer ou à re-basculer dans les compulsions alimentaires. Voilà pour les trois cas de figure dont j'avais envie de parler mais vous comprenez bien qu'en fait on passe de l'un à l'autre, on peut repasser de l'autre à l'un, ça va dans tous les sens et malheureusement encore une fois On observe qu'il y a une grande chronicisation, je ne sais pas trop si ça se dit, dans les TCA. Et pour vous dire, moi par exemple, les femmes que j'accompagne, elles ont l'âge moyen, je pense qu'il est autour de 35 ans. Et j'ai des femmes qui ont 40, 50, 60 ans et qui donc souffrent de troubles alimentaires depuis 20, 30, 40 ans. Donc voilà, et souvent en lien avec ça, avec... L'impossibilité de voir qu'on se balade juste de l'un à l'autre. Alors, on va passer dans la deuxième partie de cet épisode de podcast, qui est très importante à mon sens, qui est de chercher le comment. Comment est-ce qu'on peut éviter ça, en tant que personne qui est concernée par les TCA, mais aussi en tant que proche dans notre positionnement, et surtout en tant que professionnelle ? En fait, on a... une grande responsabilité, nous les professionnels de l'accompagnement et les professionnels des centres hospitaliers ont une très grande responsabilité puisque ce sont les personnes qui accueillent accompagnent principalement l'anorexie, l'anorexie sévère. Et je pense qu'il y aurait de la prévention à faire sur ce qui risque de se passer, et qu'il serait temps d'arrêter de considérer que, voilà, quand la personne a repris du poids, c'est le principal, on a fait notre job, et basta, parce que nombre de personnes sortent d'hospite avec une boulimie qui a presque été prescrite, en fait, par le système de soins, puisqu'en fait, l'important, c'est de grossir. Donc, allez, mange, C'est important d'accompagner ce qui va se jouer psychologiquement, ce qui va se jouer physiologiquement dans ce retour de la faim et de la faim extrême. Et si c'était mieux accompagné, on pourrait éviter plein de basculements d'un TCA à un autre. Mais la responsabilité, elle est la même dans n'importe lequel des basculements, c'est-à-dire qu'une personne qui a été opérée, qui a eu une chirurgie bariatrique, C'est important qu'elle soit ultra bien accompagnée aussi sur ce qui va se passer après et sur ce que peut déclencher cette perte de poids. Arrêtons de penser que c'est que du positif, c'est quand la personne va perdre du poids. Il y a plein de choses qui peuvent se passer et donc j'ai donné un exemple avec le basculement dans une autre forme de TCA parce que aussi beaucoup de personnes qui vivent des chirurgies bariatriques ne sont pas accompagnées pour le trouble alimentaire. On considère même pas qu'il y a un TCA. En fait l'hyperphagie... C'est le TCA le plus répandu, mais c'est le plus méconnu et le moins diagnostiqué. Et donc on accueille des personnes qu'on considère comme obèses, en situation d'obésité, on leur propose une chirurgie, pourquoi pas, je ne suis absolument pas contre, je ne suis pas une militante anti-chirurgie, je pense simplement que ça pourrait être fait d'une autre manière et qu'il est temps d'ouvrir les yeux sur l'hyperphagie, d'ouvrir les yeux sur le fait que L'immense majorité des personnes qu'on considère obèses souffrent de ce trouble alimentaire. Et que donc il y a une prise en charge autour du trouble alimentaire à avoir, parce que sinon, il va juste s'exprimer différemment ou il va glisser sur autre chose. On a aussi des glissements de TCA qui vont vers de l'alcoolisme ou d'autres types de comportements. Bon, ceci étant dit, allons-y. Je vais vous parler du, à mon sens, comment on pourrait éviter ça. Eh bien, le premier truc important, c'est justement de comprendre qu'il s'agit d'un glissement de pathologie et que c'est juste le TCA qui s'exprime différemment. Ce qui est important là-dedans, c'est que je constate que trop de personnes, vraiment beaucoup beaucoup de personnes, pensent que les phases où elles sont dans l'hyper contrôle, c'est pas un TCA. Par exemple, des personnes qui vont souffrir de boulimie ou d'hyperphagie, il va y avoir des phases où il y a une reprise de contrôle qui est plus forte. Tout d'un coup, c'est possible. C'est pour plein de raisons, peut-être aussi en lien avec la façon dont on vit sa vie. Enfin, voilà, je veux dire, on vit tous des tas de phases différentes dans notre vie. Et donc, à ce moment-là, il y a une forme d'hypercontrôle qui se remet en place et il y a beaucoup moins l'expression du côté compulsif. Et donc ces personnes-là basculent dans un TCA qui serait plus proche de l'anorexie, mais sans pour autant qu'on soit dans une vraie anorexie, au sens où il y a quand même des prises alimentaires, au sens où il n'y a pas forcément une extrême maigreur, mais il n'empêche qu'il y a ce contrôle, cet hyper contrôle du corps et de l'alimentation. Et en fait, plein de personnes pensent que dans ces phases-là, ça allait. Et souvent viennent consulter en disant Non mais voilà, là j'ai rebasculé dans le TCA, je fais des compulsions. Mais il y a encore quelques temps que ça, de ça j'ai perdu 10 kilos, tout allait bien, c'était trop bien. Mais non, mais en fait il faut comprendre que ces phases d'hyper contrôle sont le TCA aussi. C'est juste qu'ils s'expriment davantage dans le contrôle. Comme c'est hyper valorisé et que vous avez l'impression de reprendre la main, et qu'en plus, dans certains cas, vous perdez du poids, ah bah oui, non mais vous considérez pas ça comme une phase pathologique. Mais il faut bien comprendre que c'est cette phase-là qui recrée à chaque fois la phase compulsive. Et puis, il y a peut-être un moment où vous allez repasser dans le contrôle, mais ça recréera de la compulsion. Donc, la phase compulsive, elle n'arrive pas parce que vous manquez de volonté. Elle arrive parce que vous avez été dans cette hyper-contrôle. Mais au-delà de ça, au-delà de cette question de ça crée la compulsion, regardez un peu mieux ces phases de contrôle. Regardez vraiment à quoi ressemble votre vie. Vous êtes obsédé par la bouffe. Vous êtes obsédé par votre poids. Votre valeur ne repose. que sur ça, le fait d'être en train de mincir, le fait d'être suffisamment mince ou non, de savoir à quoi ressemble votre corps. C'est pas vivable d'être toujours dans ce contrôle-là. Est-ce que dans ces phases-là, c'est facile d'aller au resto avec des potes ? Est-ce que dans ces phases-là, c'est facile d'avoir des repas de famille ? Est-ce que dans ces phases-là, quand vous êtes en train de manger une raclette ou que sais-je, un truc que vous considérez comme trop ? Est-ce que vous profitez du moment ou est-ce que vous êtes déjà en train de penser au sport que vous allez faire demain ? Est-ce que c'est possible pour vous de manger le même repas que votre famille, que vos enfants ? Ou est-ce que vous êtes toujours en train de manger un truc différent ? Changez vos lunettes pour regarder ces phases-là. Parce que c'est trop facile de les voir comme des phases où tout va bien. En réalité, vous êtes tellement contente de perdre du poids que vous ne voyez même pas à quel point. Franchement, c'est l'enfer de vivre dans ces phases-là. Deuxième point à bien comprendre, c'est que la voie de la restriction, alors vous pouvez l'appeler la voie de l'anorexie, c'est comme vous voulez, moi je préfère appeler ça la voie de la restriction parce que la voie de l'anorexie ça met déjà une étiquette, c'est comme une case et trop de gens ne vont pas se reconnaître. Alors je veux dire, si je parle de la voie de l'anorexie à une personne qui souffre d'hyperphagie, elle va me dire non mais n'importe quoi. Déjà c'est hyper compliqué pour une personne qui souffre d'hyperphagie de comprendre qu'en fait... Il y a la voie de la restriction qui s'exprime beaucoup trop fort. Donc moi je préfère parler de la voie de la restriction. Il faut comprendre que la voie de la restriction, c'est ça le point commun des trois TCA principaux. Et c'est ça qui fait qu'on se promène de l'un à l'autre sans réussir à s'en sortir. C'est cette foutue voie de la restriction. Tout comme la volonté de contrôler le poids et le corps. C'est vraiment le point commun. des trois TCA. De toute façon, la voie de la restriction, elle est là parce que vous voulez contrôler votre poids. Donc finalement, la première racine, elle est autour de ça. Et en fait, c'est cet élément-là qui fout le bordel et qui fait qu'on se balade d'un TCA à un autre et qu'on n'arrive pas à guérir. Donc en fait, c'est là-dessus qu'il faut pouvoir aller agir. Bon, justement, pour passer sur des choses un peu concrètes, pour éviter de passer sa vie à aller d'un TCA à un autre, anorexie, boulimie, hyperphagie, anorexie, hyperphagie, boulimie, en premier lieu, il va falloir déconstruire l'idée que le contrôle, que cet hypercontrôle, il est normal et souhaitable. Que c'est normal, qu'on est censé contrôler tout ce qu'on mange, sinon on est en mauvaise santé, sinon on est trop gros, sinon blablabla. En fait, il faut arrêter de penser que c'est des phases souhaitables. Je fais le lien avec ce que j'ai dit tout à l'heure. Regardez ces phases de contrôle et d'hyper contrôle avec des lunettes différentes, regardez à quel point votre vie elle est pas si chouette que ça, de manière à arrêter d'espérer de retourner dans ces phases là. Parce que moi c'est ça que j'observe. En fait les personnes restent bloquées dans le trouble alimentaire pendant 20-30 ans parce qu'elles veulent juste pouvoir reprendre ce foutu contrôle, revenir à des phases où elles sont au régime, elles font attention et ça fonctionne et elles perdent du poids et elles ont l'impression d'avoir trouvé la solution. Et ça dure le temps que ça dure, des fois une semaine, des fois un mois, des fois six mois, avant de réexploser en compulsion. Ces phases-là créent les compulsions, mais en plus ne sont pas vivables. Je vous assure que la vie sans ce contrôle, cet hyper contrôle sur tout ce que vous mangez et sur ce à quoi vous ressemblez, elle est ultra différente. Et c'est une vie, mais tellement de liberté, quoi. Voilà, c'est genre vous ouvrez les portes de votre prison. Le deuxième point important, c'est que, donc je parlais du fait de déconstruire l'idée que ce contrôle, il est normal, il est souhaitable, et bien c'est comprendre qu'à la place de ce contrôle mental absolu, vous allez pouvoir laisser la place au contrôle, je vais l'appeler comme ça volontairement, au contrôle naturel du corps. Parce que le corps, il est capable en fait de gérer et de faire en sorte de nous maintenir à notre poids d'équilibre. Et que le corps, il est capable de guider les prises alimentaires. Ça ne veut pas dire que vous ne ferez plus jamais de choix conscients. De, ok, qu'est-ce que je choisis de manger parce que ce sera digeste, ou parce qu'en ce moment je sens bien que j'ai besoin de faire le plein de vitamines, ou parce qu'en ce moment je fais plus de sport et je me sens fatiguée, donc peut-être qu'il faut que je fasse gaffe à mon apport en protéines. Oui, bien sûr que les choix conscients, ils seront toujours possibles. Ça n'a rien à voir avec de l'hyper contrôle. Le contrôle de tout ça, laissez-le à votre corps. Il sait gérer. N'ayez pas peur d'enlever cet hyper contrôle avec l'impression que vous allez être dans le grand vide, dans le grand chaos. Non. En fait, derrière, il y a un contrôle qui va se faire naturellement. Troisième point important, déconstruire le corps idéalisé. Je l'ai dit tout à l'heure, en fait... Le rapport à votre corps, il est central. C'est la volonté de contrôler votre corps et ce à quoi vous ressemblez qui fait que vous êtes dans le contrôle de ce que vous mangez. Donc déconstruisez ce foutu corps idéalisé. Normalisez les corps normaux. Bon sang de bonsoir. Les corps normaux, les corps du quotidien. Je le dis souvent, mais allez vous asseoir dans une gare, regardez les gens. L'été, allez à la plage, regardez les gens. Vous allez voir ce que c'est la diversité corporelle et les corps normaux. Questionner ces foutues normes imposées aussi. Allez les questionner. Et pourquoi elles ont été mises en place ? À quoi ça sert d'exiger autant de choses du corps de la femme ? Et c'est pas nouveau. Il y a peu de temps, j'ai fait une conférence sur le sujet. En gros, j'ai fait une conférence sur le fait que, à mon sens, les TCA peuvent être considérées comme des discriminations ou des résultantes de discriminations faites aux femmes. Et je peux vous dire qu'en faisant des recherches, j'ai trouvé des... traces d'injonctions corporelles très proches de celles qu'on a aujourd'hui, qui datent du XVIe siècle. Donc en fait, on tourne en boucle avec cette histoire-là, mais pourquoi ? Allez creuser pourquoi ? À qui et à quoi ça sert ? Et puis, toujours dans cette idée de déconstruire le corps idéalisé, revenez dans votre corps vécu, dans les sensations corporelles. Revenez dans votre corps. Régulièrement, revenez-y, posez-vous la question, c'est comment là dans mon corps ? Qu'est-ce que je ressens ? C'est quoi mes sensations dans les mains, dans les pieds, dans les cuisses ? Est-ce que je ressens quelque chose en termes d'émotion ? Est-ce que je ressens quelque chose en termes de besoin ? Est-ce que j'ai faim, envie de faire pipi ? Est-ce que j'ai besoin de repos ? Posez-vous ces questions régulièrement pour revenir dans le corps vécu et ainsi être moins dans le corps perçu ou tel que vous imaginez qu'on peut le percevoir, en tout cas dans l'image du corps. Être moins dans... L'image qu'on projette de son corps est plus dans le corps vécu, ça ce sera très aidant. Le dernier point, c'est le fait de développer tout le reste chez vous. Qui je suis ? Qu'est-ce que j'ai envie de faire ? C'est quoi ma personnalité ? C'est quoi mes passions ? C'est quoi mes valeurs ? Qu'est-ce qui est important pour moi ? Qu'est-ce que j'ai envie de développer ? C'est quoi mes rêves ? Qu'est-ce que j'ai envie de réaliser ? Qu'est-ce que j'ai envie de faire avant de quitter ce monde ? Ça peut paraître hyper compliqué quand on est dedans. dans le TCA et c'est normal. En fait, on a l'impression d'ailleurs que s'il n'y a plus le TCA, il va y avoir un vide parce qu'on a l'impression d'être vide. On a l'impression de jamais avoir développé ça. C'est normal. C'est le TCA, le foutu tractopelle qui creuse ce vide à l'intérieur. Mais quand on ne pense plus à la bouffe H24, et ça, ça peut venir assez vite quand on déconstruit toutes ces choses autour de l'alimentation, de ce que je disais sur le contrôle absolu de l'alimentation, la charge mentale s'allège quand même assez vite. Et du coup, ça laisse de la place à tout ça. Vous allez voir que c'est génial. Et du coup, vous allez pouvoir développer tout ça, vous poser ces questions-là et développer tout ça. Parce qu'en fait, qui que vous soyez là, vous n'êtes pas sur Terre juste pour être jolie et encore moins juste pour être mince. Et que l'objectif d'une vie, ce n'est pas de rentrer dans une taille 36. Et que quand on quittera ce monde, Les gens ne se souviendront pas de nous parce qu'on était minces, bien coiffés, bien maquillés. Non. Les gens vont se souvenir de nous pour tout ce qu'on a partagé avec eux, tout ce qu'on a transmis, vécu comme émotions, et tout ce que notre personnalité a pu apporter à ce monde et aux autres. N'ayez pas peur de lâcher tout ce contrôle du corps et de l'alimentation, ça va vraiment vous permettre de cultiver ça. Et je pense que c'est vraiment ce qui vous permettra de... d'avoir moins de regrets. Voilà, j'arrive au terme de cet épisode. J'espère qu'il aura pu vous éclairer, si jamais c'était une question que vous vous posiez, de se dire, mais c'est vrai ça, pourquoi est-ce qu'on passe d'un trouble alimentaire à un autre ? J'espère aussi et surtout que ça vous a éclairé sur le comment on peut éviter de passer d'un TCA à un autre. Sur ce, je vais vous souhaiter une très belle soirée, après-midi, journée, peu importe. Je vous rappelle que votre soutien est précieux pour moi. Qu'est-ce que j'entends par soutien ? Eh bien, les petits mots d'amour que je reçois sur Instagram, là où vous venez me dire que vraiment mon podcast fait la différence et vous apporte des choses et des choses concrètes. Ces petits mots où vous venez me dire que grâce à mon podcast, eh bien, vous avez mis en place des choses et vous allez mieux. Et puis, les étoiles que vous laissez sur votre plateforme d'écoute et les commentaires que vous laissez sur votre plateforme d'écoute, c'est ainsi. vraiment hyper important parce que c'est ce qui donne de la visibilité à mon travail et c'est ce qui du coup me permet de pouvoir continuer ce que je fais Donc voilà, n'hésitez pas à le faire. Je sais qu'on prend peu le temps de le faire, mais ça prend quelques secondes. Donc n'hésitez pas à aller le faire parce que ces quelques secondes peuvent vraiment changer les choses pour moi. Et dites-vous aussi que ça peut changer les choses pour d'autres parce qu'en rendant le podcast visible, vous le rendez accessible à d'autres personnes qui pourront peut-être avoir les outils ou entendre les mots qu'elles avaient besoin d'entendre au travers de ce podcast. Bref, je vous laisse là-dessus. Prenez grand soin de vous. Merci d'être là. Merci de m'écouter.