- Speaker #0
Bienvenue dans TCA, etc., le podcast qui décrypte les troubles des conduites alimentaires et tout ce qui gravite autour, parce que ça n'est jamais seulement qu'une histoire de bouffe. Je suis Flavie Mitsono, et j'accompagne les mangeuses compulsives à devenir des mangeuses libres bien dans leur basket. Alimentation, peur du manque, insatisfaction corporelle, peur du jugement, du rejet, empreinte familiale, grossophobie, les sujets abordés dans ce podcast sont très vastes, et pour ce faire, mes invités sont aussi très variés. Retrouvez-moi aussi sur Instagram où j'aborde tous ces sujets au quotidien sur flavie.mtca. Très belle écoute. Welcome par ici Frédérique, je suis contente de t'accueillir, d'autant qu'il paraît que tu écoutes beaucoup le podcast TCA etc.
- Speaker #1
Merci beaucoup de me recevoir, c'est une super occasion.
- Speaker #0
Je suis bien contente de t'avoir de l'autre côté du micro cette fois-ci pour que tu nous parles de toi. principalement et de tout ce que tu as pu traverser peut-être aussi de ce que tu traverses encore avec les troubles des conduites alimentaires pour info je le reprécise au début de ce podcast pour que tu le réentendes mais aussi pour que les auditorices puissent l'entendre l'idée c'est que ce soit toujours dans le respect de ce que tu as envie de partager c'est-à-dire que tu as des jokers infinis à n'importe quel moment c'est non je ne veux pas répondre à cette question Et comme ça, moi, ça me rend aussi libre de te poser les questions, d'aller te chercher à certains endroits. Si je sais que toi, tu seras complètement OK avec le fait de me dire non, stop Flavie. OK, aucun problème, surtout n'aie pas peur de poser tes limites. Et pour commencer notre échange toutes les deux, je te propose de commencer par le début, on va dire, de commencer par une présentation et je t'invite à te présenter de la manière qui te semblera la plus adéquate.
- Speaker #1
OK, donc je suis Frédérique. j'ai 40 ans, un enfant d'un chien, très classique, un parcours aussi classique dans la communication et puis suivi de reconversion comme beaucoup de ma génération et dans ce domaine là et donc là je suis en train de lancer une activité de chef à domicile voilà
- Speaker #0
donc ce qui est vrai.
- Speaker #1
qui est assez ironique slash commun pour quelqu'un qui a un trouble alimentaire d'avoir très envie de nourrir les autres. Voilà, c'est aussi mon cas. Mais j'aime vraiment ça. Ce n'est pas du tout pour rentrer bien dans un cliché. Voilà, je vis à Marseille. Je passe beaucoup de temps dehors. Je suis passionnée de course à pied. c'est vraiment mon exutoire ça et la lecture je dévore les livres ça a même été pendant longtemps à peu près ma seule nourriture voilà en gros et depuis 7 ans j'ai des troubles alimentaires divers et variés voilà je passe visiblement de l'un à l'autre et j'essaye de de comprendre tout ça, de comprendre ce qui m'arrive.
- Speaker #0
Depuis 7 ans, donc c'est arrivé autour de tes 33 ans.
- Speaker #1
Oui.
- Speaker #0
OK. On aura l'occasion d'y revenir parce que ça m'intéresse aussi, parce que ce n'est pas si fréquent, finalement. Même si je suis la première à lutter contre l'idée qu'on colle une étiquette de problème d'adolescente sur les troubles alimentaires, il n'empêche qu'il y a quand même beaucoup de troubles alimentaires qui... ont une racine très loin à cet endroit-là, voire même avant ça, dans la pré-puberté, et puis qui se chronifisent. Et voilà, il y a énormément de femmes adultes et de femmes bien plus âgées qu'on imagine qui ont des TCA. OK, donc effectivement, pas commun. Mais avant qu'on en vienne au début de tes troubles alimentaires, j'aimerais bien qu'on remonte encore plus loin. Il y a une question que j'adore poser. En réalité, ce sont deux questions différentes. C'est de savoir quel est ton souvenir, pour commencer, le plus ancien. ou en tout cas le plus marquant, celui qui te vient à l'esprit, autour de l'alimentation, de ton rapport à l'alimentation ?
- Speaker #1
Alors, quand même, même si ça s'est déclaré tard, en effet, ça prend racine bien plus tôt et même avant la puberté. En CM1, donc à 8-9 ans, l'âge de mon fils actuellement, je suis au conservatoire de danse. Oui. dans ce classique et le mercredi ma grand-mère vient me chercher de danse et me fait déjeuner. Et tous les mercredis, tout ce qu'elle me fait, me fait déjà paniquer parce que je trouve ça trop riche. Et j'ai déjà intégré qu'il s'agirait d'être mince, en fait, si je veux faire carrière dans la danse. Et je me souviens de plats... Alors, je suis d'une famille périchonne. on ne fait pas dans la dentelle et je me rappelle de plats type porté aux pommes de terre en dessert une crème pralinée et où à chaque fois c'est la panique parce que je me dis ouais mais attends là je fais comment en fait ça ne va pas du tout je ne peux pas manger des choses pareilles il y avait déjà des tu entendais déjà des bruits de couloirs dans le conservatoire à cet âge là où on te dit la solution, c'est les pommes, en fait.
- Speaker #0
Toujours les pommes, les fameuses pommes.
- Speaker #1
Pommes, j'en mange toujours une ou deux par jour. C'est toujours un truc, c'est la bouée de sauvetage. Et ça, c'est vraiment un souvenir déjà très oppressant, en fait, par rapport à la nourriture. Et je ne m'entendais pas du tout avec ma grand-mère et j'avais décidé qu'elle faisait exprès. de me donner... Je me disais, mais ce n'est pas possible, en fait. Ce n'est pas possible. À chaque fois que j'arrive, c'est Byzance sur la table. Alors que de toute façon, pendant trois quarts d'heure où je vais être chez elle, on va se chamailler, on va se prendre la tête. Je ne vois pas pourquoi elle n'essaierait de me faire plaisir avec un bon repas. C'est vraiment juste qu'elle essaye de me faire grossir. Non, mais...
- Speaker #0
Et aujourd'hui, avec le recul, tu en penses quoi ?
- Speaker #1
Aujourd'hui, avec le recul, je me dis que non. Que c'est juste... Surtout, voilà. Maintenant, en plus, moi-même, je cuisine. Et j'ai plutôt une approche très... très traditionnel, très convivial de la cuisine. Et oui, en effet, je reçois quelqu'un, je ne vais pas lui faire manger une salade de jeune pousse. Enfin, si, à la limite, je vais y mettre des copeaux de boliterno dessus et une super huile. Voilà. Non, tu reçois quelqu'un, tu fais quelque chose d'un peu chaleureux, d'un peu réconfortant. Voilà.
- Speaker #0
Généreux, le mot qui me vient, c'est généreux, quoi.
- Speaker #1
Que ce soit une peau de vache ou pas, tu vois. la moindre des choses, c'est quand même de ne pas juste sortir une tranche de jambon voilà, mais moi sur le coup, ça m'agressait ok,
- Speaker #0
et chez toi, ça mangeait comment ? ça parlait comment de la nourriture du coup ?
- Speaker #1
alors je ne sais pas si je m'en rendais compte à l'époque mais non, ça ne parlait pas bien de la nourriture, c'était ma mère est toujours très mince l'était encore plus à l'époque. Et ma sœur, du plus loin que je me souvienne, s'est toujours fait vomir très régulièrement.
- Speaker #0
Vous avez combien d'écarts avec ta sœur ?
- Speaker #1
13 ans.
- Speaker #0
13 ans d'écart. Donc, quand tu me parles de souvenirs où t'as 8 ans, elle a 21 ans. Donc, en fait, t'as grandi et donc elle s'en cachait pas ou elle s'en cachait, mais toi, t'avais grillé le truc qu'elle se faisait vomir.
- Speaker #1
Alors comme je la suivais partout, j'avais gagné le truc. Et puis après, on est partis vivre à l'étranger. Et je me souviens, c'est pareil, ça fait vraiment partie de mes souvenirs d'enfance, du quotidien. Donc là, je devais avoir 10, 11, 12 ans. Je me souviens de la partie de la maison, on va dire, que je partageais avec ma sœur. Et donc des toilettes. Et je me rappelle qu'à chaque fois, après manger... elle allait se faire vomir et qu'elle ne s'en cachait même pas, la porte était grande ouverte. Et moi, je suis allée à côté d'elle et je m'assurais qu'elle allait bien. Je pense que je devais savoir à peu près ce qu'elle faisait, mais je me disais, elle est malade. Elle a mangé, ça l'a rendue malade. Voilà. Je ne me disais pas, elle fait ça parce qu'elle veut rester mince. Dans tous les cas, ma sœur était très mince. Et voilà. Et je sais qu'après ses grossesses, sa solution pour perdre du poids, c'était ça.
- Speaker #0
Et du coup, tu te dis... tu y crois réellement au fait qu'elle est malade ? Tu la vois vomir tous les jours et tu dis « Ah, vraiment, il y a un déni hyper puissant, en fait. »
- Speaker #1
Parce que dans tous les cas, en plus, le fait d'être mince, c'était intégré dans la famille. Ma mère était mince, voire maigre. Et ma sœur, en fait, maintenant, je le comprends. Elle avait des phases de boulimie volontive. Il y avait des moments où elle était plus... ronde et puis d'autres moments où elle faisait un petit 34 c'était la période aussi son modèle c'était Kate Moss t'es comme ça ou t'es rien en fait C'était vraiment ça et j'ai toujours entendu, vu ma mère, alors déjà absolument pas comprendre ou voir ou vouloir le voir que ma sœur était là-dedans, mais en tout cas j'ai toujours vu ma mère encourager sa minceur, la complimenter d'être mince. C'était quelque chose qui était normal et qui était bien en plus. Et en fait, peu importe la manière.
- Speaker #0
Oui, c'est ça, bon temps. Et donc toi, tu as ce souvenir marquant qui te revient de ta grand-mère qui te fait à manger le mercredi midi, où tu te dis, mon Dieu, mon Dieu, je ne peux pas manger tout ça. Et en dehors de ça, est-ce que tu... Ma question, c'était est-ce que tu mangeais librement ? Mais bon, j'ai un peu ma réponse. Comment tu te souviens de ta façon de manger alors en tant que petite fille ?
- Speaker #1
Alors petite fille, je me rappelle manger. Assez librement, on n'avait pas... Les vrais bons repas, c'était par exemple chez ma grand-mère ou chez ma tante, qui en plus est une excellente cuisinière. Ma mère, elle cuisine très mal. Ça n'aide pas. C'est pour te montrer vraiment le manque d'intérêt pour elle. Je pense que s'il y avait un cachet qui pouvait nous nourrir, un comprimé, je pense qu'elle le prendrait. Ça suffirait. Il n'y a aucun intérêt à manger. Donc, elles, c'était facilement de la purée, du jambon, pas non plus d'énormes moyens. Donc, je me rappelle d'aller faire les courses chez Leader Price. Je crois que ça venait d'arriver en France. C'était vraiment ça. Et oui, c'était des choses très simples, des choses très rapides. Faites quand même attention, pas de fast food ou de choses comme ça. Mais voilà. Pas des plats cuisinés. Ensuite, quand on est parti à l'étranger, on était en Afrique. Là, on a plus pris l'habitude d'aller au resto, etc. Et je ne me rappelle pas de m'être empêchée de prendre quoi que ce soit. Je me rappelle notamment quand on était en Côte d'Ivoire, il y avait un super restaurant libanais. Je me rappelle de dîner dans ce resto. Je ne me suis jamais... sentie bloquée ou voilà ma mère à ce moment là ne faisait pas de réflexion c'est après que c'est venu avec la puberté et prise de poids ok et chez vous il y avait des gâteaux des sucreries des choses comme ça alors oui maintenant j'ai pas le souvenir J'ai pas le souvenir de m qu'avait de gâteau ou de prendre Un paquet de gâteaux, il le dévorait devant la télé, tu vois, genre Club Dorothée le mercredi, pas du tout. Mon mari a plus tendance à me dire que lui, quand il était petit, il se souvient d'arriver et de trouver sur la table une baguette de pain avec le pot de Nutella et il se faisait la baguette de pain et le pot de Nutella. Il n'y a jamais eu de Nutella à la maison, tu vois. C'est pas du tout ça. En revanche, voilà, famille quand même de bons mangeurs. Mon oncle qui connaissait beaucoup de grands chefs, de beaux culs, etc. Je me rappelle vraiment la tournée des grands ducs, le truc un peu à l'ancienne où tu vas faire les bouchons bionnels et machin. Et moi, on m'entraînait là-dedans. Et voilà, s'il y a de la crème, du gras, du beurre, des choses comme ça, le dessert à la fin, bien évidemment, ça faisait partie du repas. Il n'y avait aucun souci avec ça. J'étais dans le cadre de ce qu'il faut être, dans l'esprit en tout cas de ma mère.
- Speaker #0
Oui, et puis tant que tu n'étais pas rentrée aussi dans la communauté des femmes, tu vois, j'entends ça parce que la puberté, effectivement, ça va généralement aussi avec une prise de poids, mais c'est aussi, tu changes de camp, tu sors de l'enfance. Et donc là, on attend autre chose de toi.
- Speaker #1
Exactement.
- Speaker #0
Je me posais la question, pourquoi vous êtes partie à l'étranger ?
- Speaker #1
C'était par rapport au travail de mon père. Moi, je suis partie pendant six ans avec eux. Ensuite, on est rentrés en France et eux sont repartis. Moi, je suis restée en France, eux sont repartis. Et on était en Afrique, on était en Côte d'Ivoire et au Mali. Donc, j'y ai passé la fin, on va dire, de l'enfance. Je suis arrivée à 10 ans et j'ai eu puberté, première règle, etc. quand j'étais là-bas. Et vraiment, ça basculait en un été. On rentrait tous les étés en France. Donc généralement, le truc, même à 7h du matin, tu descendais de l'avion à Roissy. Le premier truc dont tu avais envie, c'était d'un McDo. Parce que ça faisait 9 mois que tu n'avais pas vu un hamburger, un McDo en tout cas. Et la grosse obsession, c'était manger un McDo. Moi, ça par exemple, mes parents disaient « Ouais, non, tu te calmes. » Voilà, non, non, c'est non. Et il y a eu ce fameux été après que j'ai eu mes règles où on est rentré en France et puis je n'ai pas eu la sensation de manger plus que d'habitude. Voilà, enfin, tu vois, tout est normal, sauf que mon corps a changé. Mon corps change, je ne sais pas ce qui s'est passé. Et puis, en fait, j'ai pris du poids. J'ai pris du poids. Alors d'ailleurs, c'est je crois un des seuls étés où il n'y a pas vraiment de photos de moi. Parce que du coup, personne n'a envie de te prendre en photo. Personne n'a envie de voir ça en fait.
- Speaker #0
Ouf ! Ah ouais, ces mots-là, ils viennent de qui ?
- Speaker #1
Ces mots-là, ils viennent de moi, mais c'est le sous-entendu. On me parle de cet état-là. Tu vois ? t'es comme ça, je fais comment pour t'habiller maintenant ? Il va falloir te racheter toutes tes affaires. Il faut faire quelque chose avant de rentrer. Et là, je rentre à Pamako, donc pour ma deuxième année là-bas. Et là, c'est le début, en fait, oui, c'est le début de la Qatar. T'as d'un côté ma mère. qui du coup me décide de me mettre au régime. Donc, je dois avoir 13-14 ans. Elle décide de me mettre au régime.
- Speaker #0
Donc,
- Speaker #1
tout le monde mange la même chose, sauf moi. Je mange quasiment tous les midis du thon en boîte sans sauce et du maïs. Voilà. Elle me fait manger ça. J'arrive au lycée, un mec qui était au lycée me fait une réflexion genre waouh il s'est passé quoi pendant les vacances ? T'as grossi. Donc grosse claque parce qu'en fait moi ça allait très bien jusqu'ici. J'avais passé un été comme les autres, je me mettais en maillot de bain. Il n'y avait pas de souci. J'avais profité de la plage, de la piscine, de tout ce que tu veux. Oui, je m'étais acheté des vêtements une taille plus grande. Mais pour moi, il y avait aussi une notion de grandir.
- Speaker #0
Et c'est le cas. Et c'est le cas parce que là, en plus, on parle de poids. Mais j'ai l'impression que tout ça, ça se basait surtout sur ton corps qui avait changé. Et en fait, ta morphologie était en train de se transformer.
- Speaker #1
Exactement. Et après, ce n'était pas non plus une surprise que je m'épaississe un petit peu. Donc, autant ma mère et ma sœur… mince, autant mon père avait plus, voilà, plutôt plus en chair, sauf si, sauf si, voilà, il faisait beaucoup de sport, mais sinon, voilà, c'était plutôt, et j'avais plutôt tendance à ressembler à mon père et à ce côté-là de la famille, donc voilà, et vraiment, mais des réflexions, ah bah non, c'est pas possible, c'est pas possible, il fallait que tu prennes ça de ton père, ok ? Mais du coup, j'y peux rien en fait. Du coup, je n'y peux rien. Je ne suis pas gavée.
- Speaker #0
D'ailleurs, tu en parles peu de ton père. J'ai même failli, à un moment donné, j'ai cru que vous aviez vécu que toutes les trois, avec ta mère et ta sœur. Et ton père, lui, quel rapport il a à l'alimentation et quel regard il pouvait porter sur tout ça, sur le fait que tu sois mise au régime ?
- Speaker #1
Alors, absolument rien. Je n'ai jamais rien entendu dire. D'un côté, il ne disait rien à ma mère. Enfin, il ne disait pas non. Attends, calme-toi, qu'est-ce que tu fais ? Mais d'un autre côté, il ne faisait pas non plus de réflexion sur mon poids. C'était la Suisse, voilà. Totalement neutre. Après, mon père, oui, c'était des apéros. La vie d'expat, s'il y en a qui nous écoutent, qui connaissent ça, ils vont se reconnaître. Oui, c'est beaucoup de sorties, la bière, la petite bière le soir. Les cacahuètes, beaucoup, des bouteilles remplies d'arachides. Voilà, c'était les cacahuètes tout le temps, Et puis, des super bouffes, des super restos, des trucs qui ne se seraient jamais payés en France. Mais à côté de ça, il était encore assez jeune. Il faisait beaucoup de sport. Il courait. Voilà. Donc, ça allait, mais ce n'était pas un sujet. Après, tu as aussi l'histoire familiale. Il vient d'une famille qui avait très peu de moyens. Lui, il était dans une réussite personnelle qui était… Il avait connu la restriction alimentaire, mais pas de ton fait. C'est vraiment parce que juste, tu as tes parents qui sont paysans, qui sont analphabètes. Ça fait partie de son histoire. Manquer, etc. Donc là, c'était vraiment prendre le contre-pied aussi de tout ça et profiter.
- Speaker #0
Oui, j'entends. L'opulence, c'était quelque chose d'important pour lui. Oui,
- Speaker #1
exactement.
- Speaker #0
Ok, donc tu as 13-14 ans, tu es mise au régime, tu passes je ne sais combien de temps à manger du thon et du maïs là. C'est quoi les différents impacts sur toi de cette période-là ?
- Speaker #1
C'est assez dur, déjà parce que le thon et le maïs, ça n'a jamais aidé qui que ce soit à maigrir. Donc je pense que je n'ai jamais perdu un gramme. Alors je ne me pesais pas, mais voilà, je n'ai jamais vu d'intérêt à ce régime. C'était assez perturbant parce qu'à la maison, j'étais grosse, j'étais en surpoids, je me sentais bien comme ça, il y avait un souci avec mon poids. Et d'un autre côté, à l'école, on me trouvait canon. On me trouvait canon parce que je vivais dans un pays où les normes... pour elles n'étaient pas du tout les mêmes.
- Speaker #0
C'est trop bien que tu viennes. Je voulais te poser la question de savoir si vous vous étiez aussi imprégnée de la culture. C'est énorme.
- Speaker #1
Moi, oui, beaucoup. J'avais beaucoup de mal avec l'état d'esprit expat, même si je l'étais aussi. Je ne peux pas me plus interroger. Mais j'avais vraiment des super copines et copains maliens. On dansait, on faisait des spectacles, des machins. Et moi, je faisais Beyoncé parce que Beyoncé, c'était la plus blanche de tous. Mais c'est surtout que j'avais des belles fesses. Et je me rappelle, c'est à cet âge-là que j'ai appris ce mot très compliqué. Tu es calipige. Voilà. On me disait, tu es calipige. Et je détestais ce mot, en fait. Je me disais, mais en fait, tu es en train de me dire que j'ai un gros derrière. Sauf que ce qui était valorisé là-bas, ce n'est pas possible d'être blanche et d'avoir un corps pareil. C'est incroyable. Tu as trop de chance. Tu as tes copines là-bas, c'est des sacs d'os. Elles ne ressemblent à rien. Et moi, j'étais Beyoncé. Donc, on faisait faire tous les spectacles dedans. C'est tout. Et oui, c'était archi valorisé. Et donc, il y avait des moments dans la journée où j'étais hyper bien, en fait. Oui, j'étais hyper à l'aise. Et puis je rentrais à la maison et là, en fait, c'était le drame. Là, c'était vraiment... Mais qu'est-ce qui s'est passé ? Qu'est-ce que t'es devenue ? Vraiment, un avant-après.
- Speaker #0
Ok, et du coup, tu traverses finalement cette période-là, à ce moment-là, sans développer de troubles alimentaires ?
- Speaker #1
Non, vraiment pas. Vraiment pas. J'ai beaucoup réfléchi quand j'ai commencé à avoir des troubles alimentaires, en me disant que c'est vraiment étrange que ça ne se soit pas déclaré à ce moment-là, ou que je ne sois même pas tombée dans l'hyperphagie, histoire d'être vraiment en opposition totale, en plus à l'adolescence. Du coup, tu as vraiment cette envie de t'opposer à tes parents. Je me suis dit, tiens, c'est bizarre, est-ce qu'il n'y a pas un moment où... Sans le savoir, j'ai pris du poids parce que je mangeais beaucoup. Non, vraiment pas. D'autant plus que moi, en étant en Afrique, j'ai échappé à tout ce truc de... Je faisais le McDo, les distributeurs de cochonneries dans les lycées, les sneakers, les marques. Pas ça, tu vois, globalement. J'avais des mangues dans mon jardin. On allait manger une pizza une fois par semaine. Oui, mais encore. manger des brochettes, des viandes ou des poissons grillés. On avait plutôt une alimentation qui était hyper équilibrée. Je n'avais pas accès à toute la malbouffe ou même à des gâteaux. qu'on aurait pu avoir, je mangeais pas de pépito de ma chambre. C'est des trucs auxquels j'avais pas accès. Et elle me dit, bah non, j'ai jamais... C'est vraiment, j'y peux rien. C'était ma morphologie, c'était l'évolution de mon corps en corps de femme. Et même après, quand je me suis retrouvée à vivre toute seule, donc en France, je mangeais pas mal de choses industrielles, transformées. Je m'achetais des quiches, des trucs comme ça, mais manger aussi de la soupe ou du jambon, ce n'était pas non plus n'importe quoi. Je n'ai pas de souvenir de mettre, entre guillemets, « venger » sur la bouffe ou de manger mes émotions. On entend énormément en ce moment. Je n'ai pas eu le souvenir de périodes comme ça. où la nourriture était devenue un refuge.
- Speaker #0
Ok. Donc, j'imagine qu'après, tu deviens jeune adulte avec quand même une forme de contrôle sur ton alimentation. J'imagine un regard quand même sur ce que tu manges, vu comment tu as été éduquée.
- Speaker #1
Alors, oui, mais d'un autre côté, d'un autre côté, là-dessus, je le tiens peut-être de mon père. J'ai quand même aussi cette... Déjà, je suis très malheureuse de rentrer en France. très très très malheureuse de rentrer en France. En plus, j'ai grandi dans des pays où derrière il y a eu des guerres. C'est aussi très compliqué de te dire que jamais tu retrouveras ton pays comme il était avant, etc. Il y a tout un truc quand même assez violent avec ce retour en France. Mais je me raccroche quand même à cette envie et à cette vision de... de la nourriture et du repas, de quelque chose de très généreux, de très convivial, d'une occasion de se rassembler, de manger ensemble. Autant oui, c'est très triste d'être toute seule dans mon studio à bouffer devant la télé. Là, du coup, tu bouffes. Mais si je suis avec ma sœur et mon beau-frère et qu'ils allaient acheter un super morceau de fromage avec une bonne bouteille de vin, c'est le bonheur.
- Speaker #0
Après,
- Speaker #1
je... Plus tard, je vais travailler notamment dans le milieu du rugby. Il n'y a pas plus cliché convivial, etc. Oui, je devais être la seule dans l'équipe à manger des rillettes. Je n'étais pas du tout dans ce truc-là. Vraiment, je savais qu'il y avait un problème. C'est que pour moi, il y avait un problème dans ma relation avec ma mère qui était lié à la nourriture. Mais moi, je n'avais pas de problème avec ça. Moi, je n'avais pas de problème avec la boucle.
- Speaker #0
Je savais qu'elle,
- Speaker #1
il y avait vraiment... C'est ça, c'est avant, après, de... Là, tu es la fille parfaite comme elle doit être. Tu es mince, tu es filiforme, tu as des longs cheveux, tu fais de la danse classique. Et puis, d'un coup, tu bascules. D'un coup, tu bascules, tu prends deux tailles de pantalon. Je ne peux plus me lirer. Voilà, vraiment. communication totalement coupée, on est en conflit par rapport à ça. Mais moi, je n'avais jamais rien développé vraiment par rapport à l'alimentation. Si je voyais que ça commençait un peu à partir en vrille, je mettais le holà sur deux, trois trucs.
- Speaker #0
C'est quoi partir en vrille ?
- Speaker #1
Genre être serrée dans mon pantalon, sentir que la taille du tube irait bien. Du coup, je n'allais pas me mettre au régime, mais j'allais... je sais pas moi peut-être prendre au lieu de prendre un dessert au resto j'allais pas le prendre ou voilà des petites choses comme ça passer au coca light arrêter le coca enfin voilà ce genre ok ok et justement qu'est-ce
- Speaker #0
qui C'est peut-être compliqué comme question. J'allais dire, qu'est-ce qui a fait que ça a basculé ? Mais c'est un peu frontal comme question déjà. On peut juste revenir à cette époque-là. Du coup, on se fait un bond en avant. Donc, on en parlait tout à l'heure, tu avais autour de 33 ans. Et là, ça bascule. Alors, en premier lieu, vers l'orthorexie, c'est ça ?
- Speaker #1
En fait, la bascule est très simple. Malheureusement, tristement, très facile à expliquer. Donc à 33 ans, j'ai déjà mon fils, je suis mariée et ma sœur tombe malade. Ma sœur tombe malade et en fait, dès le moment où on sait, on a un diagnostic de cancer du poumon. Un truc assez bateau, ça me coupe l'appétit. Ça, c'est assez normal. Chacun a sa...
- Speaker #0
Ces réactions face à des mauvaises nouvelles, des périodes de stress, etc., moi, ça me coupe l'appétit. Je me renseigne sur plein de choses pour essayer de l'aider, de l'accompagner dans sa peut-être future chignot, immunothérapie. Vraiment, tu essayes de trouver des solutions. Tu te dis que forcément, en trois mois, tu vas trouver un vaccin contre le cancer. Et puis, je tombe sur un truc, sur plusieurs études qui disent notamment que le sucre est très mauvais pour les personnes qui ont des cancers, comme ça. conducteur de métastases, etc. Et c'était un moment où ma soeur n'arrêtait pas de manger des bonbons. Elle n'arrêtait pas. Mes parents disaient que c'était parce qu'elle était totalement angoissée par le diagnostic. En fait, on a su après que c'est parce que elle avait des métastases au cerveau et que ça touchait le lobe frontal. En gros, elle avait trois endages mentales et elle se nourrissait de dragilus. Et je commence à focaliser sur le sucre. commence à focaliser sur le sucre, à me dire, bon, déjà, le jour où tu remanges normalement, tu ne manges plus de sucre. Voilà, le sucre, c'est fini.
- Speaker #1
Et puis,
- Speaker #0
malheureusement, ma sœur est décédée très rapidement. Donc, à partir de là, je crois que je me nourrissais. Alors, tu vois, on n'était pas sur de l'avocado toast. Je me nourrissais d'un crottin de chavignole. fromage bien dérichant et d'un verre de vin. C'était mon seul repas de la journée quand on était tous en famille, tout organisé, etc. Voilà, c'était mon seul repas. Après, il a bien fallu que je recommence à me nourrir. Il fallait que je m'occupe de mon fils. Il fallait que j'ai la force de m'en occuper. Mais c'est là où je suis rentrée dans l'hyperphagie. Pardon, excuse-moi. Dans la... Mince.
- Speaker #2
Dans l'anorexie ?
- Speaker #0
Non, non, pas l'anorexie.
- Speaker #2
L'orthorexie ?
- Speaker #0
L'orthorexie, voilà, pardon. Dans l'orthorexie. Où je contrôlais tout ce que je mangeais. Il fallait que ça soit bon pour la santé. Sinon, ça ne rentrait pas dans mon corps. Que ça soit la provenance, le mode de cuisson. Vraiment, ma logique, c'était moi, mon cancer, il ne sera pas de ma faute. Voilà. C'est la cigarette qui l'a tuée. Moi, je ne peux pas regarder mes enfants en disant que je me suis moi-même mise dans cette situation-là. J'en voulais tellement à ma sœur.
- Speaker #2
C'est la question que j'allais te poser. Tu étais en colère contre elle.
- Speaker #0
De la colère, peut-être du deuil. Je ne sais pas encore. De me dire, là, je vois, j'ai des nièces qui sont encore jeunes. Et en fait, je ne sais pas quoi leur dire. Parce que pour moi, leur maman s'est suicidée à la clope, en fait. Donc, ce n'est pas possible. C'est écrit sur les paquets, en fait, tu vois. C'est écrit que tu vas mourir. Donc, pourquoi tu as fait ça ? Donc, moi, si je peux contrôler quelque chose, c'est la nourriture. Et ce qui peut être potentiellement dangereux, je ne le consommerai pas.
- Speaker #2
OK.
- Speaker #0
Et là, j'ai enlevé tout. petit à petit tout un tas de familles d'aliments sur la base de rien du tout sur la base d'articles ou de publications insta je ne sais pas si c'est à cette époque je me base sur rien du tout mais ça ne peut être que bien ça ne peut être qu'une bonne idée d'arrêter tout ce qui est transformé manger que du pain au levain Mais à ce moment-là, je mange encore, je te parlais d'avocat de toast, je mange encore de l'avocat, du pain, je mange encore des pâtes, mais il faut qu'elles soient bio. On n'a pas encore les fameuses histoires d'Igeba, mais je vais y venir aussi. Enfin voilà, tous les trucs, toutes les vagues de conseils comme ça qui m'ont arrivé, je vais tous m'en imprégner et les ajouter à ma diète, déjà de plus en plus lourde et contraignante. notamment au restaurant où ça devient vite un enfer parce que du coup moi l'huile d'olive vous êtes gentille mais non en fait,
- Speaker #2
pas de gras donc la sauce elle est à part ça sert à rien de la mettre à part parce qu'en fait je ne vais pas la manger là tu étais encore dans l'orthorexie je ne mange pas de gras parce que c'est quand même le gras a une importance capitale dans notre santé et dans notre bon fonctionnement donc mais
- Speaker #0
si ...
- Speaker #2
Par exemple,
- Speaker #0
j'ai toujours été petit déjeuner salé. Si le matin, j'avais mangé de l'avocat ou du fromage de chèvre, c'est bon, j'avais eu ma dose de gras en fait. Donc, je ne m'en remets pas à la vie. Je t'hésite de mettre la sauce à part dans ma salade. Si je vois une goutte d'huile d'olive, tu reprends ta salade. Enfin, voilà.
- Speaker #2
Laissez-moi manger ma salade dégueulasse, s'il vous plaît. Attends, laissez-moi tranquille. OK. Comment et comment ça bascule dans l'anorexie, selon toi ?
- Speaker #0
Alors, après ma deuxième grossesse, je tombe enceinte quelques mois après la mort de ma sœur. Et là, je me rends compte quand même qu'il y a... potentiellement un souci en termes d'alimentation. Que là, il ne faut pas déconner, là, on est deux, il y a la vie du bébé qui est en jeu. Et en fait, je me rends compte parce que pendant trois, quatre, cinq mois, personne ne se rend compte que je suis enceinte. Alors que pour ma première grossesse, ça s'est vu au bout de deux semaines. Je m'étais écoutée, on va dire ça comme ça. Là, pas du tout. Là, j'avais même plutôt perdu du poids. J'ai commencé à prendre du poids au sixième mois. Je crois que... Au total, j'ai dû prendre 8 kilos. Alors, je précise que c'était largement encouragé par les médecins.
- Speaker #2
Oui, c'est clair. C'est cata.
- Speaker #0
Donc,
- Speaker #2
on me disait,
- Speaker #0
c'est très, très bien, vous ne prenez pas de poids. Quand même. Et du coup, je décide de me faire suivre par une diététicienne. Génialissime. qui me suit toute ma grossesse. Elle sentait que c'était vraiment pour me rassurer, plus qu'il n'y avait pas de problème. Je mangeais extrêmement bien. Elle me disait, mais vous êtes un... Voilà, c'est Pinterest, vos menus. C'est vraiment... Et après l'accouchement, je perds forcément du poids, donc le poids du bébé, etc. Mais dans ma tête, je ne perds pas assez. Moi, j'étais persuadée que j'allais ressortir de là avec zéro kilo à perdre et il devait me rester deux, trois kilos à perdre. Et je focalise là-dessus. Je focalise là-dessus et je me mets au régime. Mais vraiment.
- Speaker #1
Genre,
- Speaker #0
je me rappelle, il me fallait du fer. Je ne mangeais que de la salade avec du persil. Donc là, voyant ça, ma diététicienne me dit « Alors là, attention. » attention parce que là on est là on va passer du côté de l'anorexie donc attention attention attention attention et puis attention et puis confinement et puis confinement et là comme beaucoup je pense ok si tu as plus le droit de bouger va falloir réduire tes apports caloriques donc j'ai téléchargé une petite application et puis j'ai commencé à noter tout ce que je mangeais avoir sur une ou deux semaines combien j'étais de calories par jour et à partir de là, les réduire à peu près de 500 calories. Et puis en fait, oui certes, je ne faisais plus le trajet jusqu'au travail, mais pendant notre heure d'autorisation de sortie, j'allais courir une heure. Donc ce n'était pas tout à fait pareil que quand on se mettra plus au boulot. Et puis je faisais du sport à la maison. Voilà. Et en fait, à partir de là, j'ai commencé à me rapprocher des 1000, 1200 calories par jour. Fin du confinement, j'avais perdu 3 kilos. On déménage. Pareil, on est vraiment très, très cliché. On quitte la banlieue parisienne et on s'installe à Marseille.
- Speaker #1
Voilà.
- Speaker #0
Et là, je suis rentrée en plein dedans. J'ai toujours mangé, mais très peu. Et je suis descendue à 600 calories par jour.
- Speaker #2
C'est un cliché d'imaginer que les personnes qui souffrent d'anorexie ne mangent pas. Oui, mais moi on me dit souvent ça. Non, mais il y a des personnes qui viennent vers moi et auxquelles je dis écoute, de ce que tu me dis, je ne suis pas en mesure de t'accompagner parce que tu es plus dans un problème de type... hyper restrictifs, voire anorexiques, et qui me disent « Quoi ? Attends, mais tu rigoles ou quoi ? Non, je mange, moi ! » Tu vois, l'idée que « Non, une personne anorexique ne mange pas. »
- Speaker #0
Non, j'ai toujours mangé, ne serait-ce que parce que j'ai des enfants et qu'il faut que je mange devant eux. Après, je n'ai jamais, encore maintenant, je ne mange jamais comme les autres. Je n'ai pas différent pour chaque personne de la famille. Et il y a toujours une version pour moi. qui est généralement la version sans gras, sans féculents.
- Speaker #1
Voilà.
- Speaker #2
Tu reproduis ce que t'as fait vivre ta mère quand t'étais ado ? Ouais. Tu te fais ton plat... Je suis un peu dans un provoque, mais tu fais ton plat dégueulasse juste pour toi. Tu vois, ce qui était totalement injuste quand tu étais ado et en fait...
- Speaker #0
Et en plus, je me perçois que c'est super bon. Ouais,
- Speaker #2
ça je sais. Ça, je sais. C'est un truc de ta vie.
- Speaker #0
Wow. Alors que bon, je cuisine, je sais très bien ce que c'est,
- Speaker #2
quelque chose de très bon.
- Speaker #0
C'est là-dessus que j'essaye de gagner de l'argent, sur le fait que je cuisine très bien. C'est censé être... On ne gagne pas. Non, non. Pour moi, ma version, pour moi, c'est le truc le plus insipide qui soit. Donc, je descends de... Enfin, je passe... On va dire que sans régime, etc., j'étais à... Je ne sais pas, mais on va dire entre 59 et 62 kilos sans rien faire. Donc, ça doit être... Enfin, ça devait être en tout cas mon poids d'équilibre. Là, j'étais plutôt descendue à 56 et en quelques mois, je tombe à 45. Le tout en allant à la salle de sport, le tout en courant, en ayant à l'époque un boulot extrêmement exigeant. Je bossais dans une fromagerie. On recevait des meules de fromage entières qui étaient aussi lourdes que moi. J'ai dû arrêter d'y travailler parce que je n'arrivais même plus à couper un fromage. Je faisais exprès, on fermait entre midi et deux, je faisais exprès de rentrer chez moi. Je m'imposais 45 minutes de marche pour rentrer, pour faire des pas. Les jours de Mistral, sur la canne vierge, je n'arrivais pas à avancer tellement j'étais maigre. Mais pour moi, je n'étais pas maigre, j'étais très bien. J'étais exactement comme je devais être. Et en fait, tout ce moment-là, mon père était encore à l'étranger. Il était en mission à l'étranger. Ma mère me vivait aussi à Marseille. Et elle me voyait. Elle m'a vue perdre les 10 kilos, mais elle ne me disait rien. Au contraire, parfois, elle m'achetait une petite robe qu'elle avait trouvée jolie.
- Speaker #2
Oui, donc sans te le dire, elle te validait là-dedans.
- Speaker #0
Du coup, elle savait très bien ce qu'elle achetait. Elle m'achetait du 34. Elle savait très bien. Après, je suis passée aux 16 ans et aux 14 ans. Et quand j'arrivais à l'école des enfants et qu'il y avait des gamines de leur classe qui avaient la même robe que moi, j'ai dit, non, là, ça ne va pas. Arrêtez de t'habiller chez Monoprix Enfants. C'était un peu... Mais ma mère était très contente de m'offrir un maillot de bain en taille 34. Elle avait bien compris que, en effet, je ne faisais plus mon bon vieux 38. Voilà. Et mon père est rentré de mission. Et là, lui, il s'est pris une grosse claque. Parce que lui, il avait quitté quelqu'un qui avait 10 kilos de plus. Et là, c'est la première fois, il m'a dit « Ma fille, on a un problème. Et qu'est-ce qui se passe ? »
- Speaker #2
C'est incroyable, je trouve, comme de l'extérieur, j'ai l'impression qu'il y a des trucs qui se sont rejoués, en fait, de ton enfance.
- Speaker #0
Tu vois ?
- Speaker #2
Avec ta maman qui te valide. Tu vois ? Et puis le fait d'acheter des vêtements, on achète des... On achète des vêtements à son enfant qui est jeune, tu vois. Symboliquement, là, elle venait t'acheter des vêtements comme elle aurait pu, dû le faire à ce moment-là, et peu importe si tu avais fait un 38, 40, 42. Et ton père, où je te demandais tout à l'heure, qui restait silencieux et qui là se positionne en fait et dit non.
- Speaker #0
Ah oui, et il va même plus loin que ça, parce que mes parents sont assez fermés à tout ce qui est... psychologique, émotionnelle, etc. Ils s'y sont un petit peu intéressés quand il a failli gérer le deuil de mes nièces, notamment la plus petite, qui était suivie par nos psychologues, etc. C'est les seuls moments où ils se sont un petit peu intéressés à ça. Et là, mon père est allé jusqu'à regarder sur Internet les conséquences de l'anorexie. Il avait tout de suite posé ce mot, en fait. Voilà. Il n'y a eu aucun doute. Là où pour ma mère, juste enfin, j'avais trouvé un régime qui fonctionnait. Ou alors, c'était une évolution normale. Elle a été très mince. Elle s'est dit, ça y est, ma fille me ressemble. Elle, elle était devenue très mince après sa deuxième grossesse, donc après ma naissance. Je pense qu'elle s'est dit que ça découlait de la naissance de ma fille. Ça y est, enfin, elle a eu son deuxième enfant, elle aussi, elle devient mince. OK. C'est ça.
- Speaker #2
Oui.
- Speaker #0
scientifique, tu vois, mais bon. Et mon père était allé se renseigner sur Internet, et un jour, il m'avait chopé en me disant, mais tu sais ce que tu risques et machin, et l'ostéoporose, et le bidule, et vraiment un truc très détaillé, très médical, attention, très médical, très froid, très cartésien, très factuel. Encore une fois, on n'est pas dans « Mais, ma chérie, qu'est-ce qui se passe ? » Mais juste, attention, tu es en train de te mettre en danger pour ta santé. Voilà, je commençais à me faire suivre. Une première psychiatre absolument horrible. C'est une sommité à Marseille sur les troubles alimentaires. Elle était horrible. Déjà, dans la salle d'attente, il n'y avait que des ados. Donc, moi, ce n'était pas tout à fait à ma place. elle te parlait de tes parents potentiellement de faire venir tes parents non mais en fait à mon âge je ne vais pas faire venir mes parents ma mère a 70 ans je ne vais pas faire venir ma mère à une consultation chez la psychiatre et puis des trucs toutes les anorexies qui sont démenteuses vous savez ce que c'est la conséquence de votre maladie, vous allez mourir madame voilà Et là, tu lui donnes 90 euros et tu t'en vas. Tu as passé un quart d'heure. Tu as juste entendu que tu allais crever. C'est génial. Donc, j'ai vite arrêté d'aller la voir. Et je me suis tournée vers une généraliste nutritionniste avec qui ça s'est bien passé au début parce qu'elle me laissait être malade. Jusqu'au jour où elle a tapé du poing sur la table. Elle m'a dit, écoutez, madame, ça fait six mois qu'on se voit. Ça fait six mois qu'il n'y a rien qui évolue. Je venais d'avoir le Covid, j'avais perdu les 2 kilos qu'il ne fallait pas perdre, qui me faisaient vraiment rentrer dans la zone bien rouge, avec baisse de la vue, perte de mémoire, les cheveux c'était une cata, il n'y a rien qui va. Mon fils qui me disait « Maman, tu as un bouton de moustique. » « Non, c'est mon épaule, mon chéri, c'est un os de mon épaule. » L'horreur. Et je sentais mon cœur battre au ralenti, vraiment des trucs assez flippants. Et donc là, le médecin me dit, maintenant, c'est hospitalisation. Et là, je refuse l'hospitalisation, parce que non, j'ai autre chose à faire. J'ai des enfants à aller chercher à l'école, en fait. Comment ? Je suis hospitalisée, je ne peux pas. Et je ne peux pas être malade à ce point-là. Je n'assumais pas cette image et cette position, en fait. Je ne peux pas être malade à ce point-là. Pour les autres... Je suis juste une nana qui a deux enfants et qui met des petits shorts et qui a un corps d'enfant à la salle de sport. On m'applaudissait. C'était mais tu es magnifique avec ce corps filiforme, on dirait une danseuse. Je repartais au truc de waouh, on dirait une danseuse. T'imagines, t'as deux enfants, t'as un corps pareil, c'est magnifique. Tous les gens qui ne savaient pas ce qui se jouait, j'entendais que ça. Donc non, j'étais hospitalisée. Voilà, demain, je vais me faire une heure et demie de cardio. Après, je vais chercher les enfants. Après, je vais au boulot. Voilà, non, j'ai des choses à faire. Donc, je refuse l'hospice. Et là, elle me dit, OK, très bien, donc on fait un contrat de poids. Et à telle date, il faut que vous fassiez tant. Je dis, bah oui, mais non. Et là, je découvre que ce n'est pas si facile que ça de prendre du poids parce que j'étais persuadée que j'allais prendre du poids en mangeant plus de salades et plus de skis. Et elle me dit, non, non, non, non, non, non, non, non, on va réintroduire des trucs, là. Donc il va falloir mettre une cuillère d'huile d'olive à tel moment, il va falloir mettre des pâtes. Et là, vous aimez quoi ? Vous aimez les pâtes, l'avocat, le machin, blablabla. Ok, il va falloir mettre ça, ça, ça, ça, ça. Et là, je me dis, si tu ne veux pas aller à l'hosto, il va falloir faire ce qu'elle dit. Pendant plusieurs semaines, je ne prends pas un gramme. Et d'un coup, ça s'accélère. D'un coup, ça s'accélère. Je commence à grossir. Il y a un moment où je me dis, oui, en effet, c'est vrai que tu es mieux à 50 qu'à 45. Ouais, 52, c'est bien, c'est bien, c'est cool. Ouh là, attends, là, tu te rapproches des 55. Attends, ça fait quand même 10 kilos. C'est beaucoup. Et puis, j'étais mal vraiment dans mon corps. Tu vois, vraiment, à être très lourde, quand je courais, j'avais l'impression d'avoir des plaques dans les cuisses qui me faisaient mal. Je lui dis ça, et en fait, j'étais en séance chez un kiné pour faire du drainage lymphatique ou je ne sais pas quoi. Je n'ai pas besoin qu'on me fasse des papouilles, en fait. C'est trop.
- Speaker #2
Mais ça s'est fait en combien de temps, la prise de poids ?
- Speaker #0
Six mois. Dix kilos en six mois.
- Speaker #2
Ah, dix kilos. OK. Parce qu'en fait, c'est ça aussi, ta sensation de lourdeur et tout. Alors, le corps, il est quand même beaucoup plus capable de gérer une prise de poids rapide qu'une perte de poids rapide. Quoi qu'on en dise et qu'on ressent... Les ressentis quand tu souffres d'anorexie, ils sont complètement faussés. Il y a quand même ta tête qui te raconte tout un tas de choses. Mais du coup, les grosses variations de poids qui arrivent, il n'aime pas ça. Ça reste compliqué. Je pense que c'est ça aussi que tu vivais.
- Speaker #0
C'est vraiment... Une espèce de réaction, je suis toute bouffie, j'arrive plus à avancer, je transpire énormément. Vraiment, je ne me sens pas bien. Et j'ai beau lui dire, elle me dit non, non, mais c'est la voie de l'anorexie qui parle. Et de toute façon, si on expliquait aux anorexiques qu'elles allaient regrossir et souvent grossir beaucoup, personne ne voudrait se soigner. Donc voilà, ce que vous êtes en train de vivre, c'est l'effet yo-yo, la restriction que vous êtes imposée, vous êtes en train de la payer.
- Speaker #2
Parce que qu'est-ce qui se jouait sur ton comportement alimentaire ? Parce que tu parles du poids, mais comment tu mangeais ? Est-ce qu'à ce moment-là, il y avait des compulsions qui étaient arrivées ?
- Speaker #0
J'ai eu deux compulsions et je m'en souviens très bien, parce que je me rappelle de la réaction de copine que j'ai appelée en me disant hier soir, c'était l'enfer, j'ai fait une compulsion. « Ok, t'as mangé quoi ? » On leur expliquait ce que j'avais mangé. Elle riait, elle me disait « Non, en fait, t'as juste mangé normalement. » C'est-à-dire que même dans les compulsions, ça allait être « Ouh là là, j'ai pris deux Vasa avec un carré frais 0%. » Oui,
- Speaker #2
oui.
- Speaker #0
Et je les mangeais très vite et en cachette. Donc, c'est une compulsion.
- Speaker #2
Ok. Donc non, tu ne faisais pas de compulsion à ce moment-là ?
- Speaker #0
Non, c'était vraiment juste d'un coup, oui, en effet, manger. Une cuillère de féculents à chaque repas, une cuillère à soupe d'huile d'olive, des trucs comme ça. Je ne sais pas, c'est comme si mon corps avait pété les plombs. Vraiment. Et ça n'arrêtait pas, ça n'arrêtait pas, ça n'arrêtait pas. Je grossissais, je grossissais, je grossissais. Du coup, je me cachais. Je ne voulais plus voir personne. J'avais honte d'aller chercher les enfants à l'école. L'été, en plus, chez nous, l'été, c'est dur. Six mois, pas de plage. Pas de plage. On a la bonne idée de partir dans un coin où on n'allait pas se mettre en maillot de bain en vacances. Mais c'était génial pour moi. C'était un soulagement de me dire tu vas te faire tes vacances d'été dans une grande ville. Et voilà, tu n'iras pas à la plage, mais ça va me faire dix jours de respiration. Au moins, je n'ai pas cette pression de me dire... Tu vas devoir aller à la plage, potentiellement croiser quelqu'un qui, ça fait deux, trois ans, qui te voit. Pour moi, j'idéalisais vachement mon corps anorexique.
- Speaker #2
Oui, les autres te voient. En fait, là, on sent à quel point tu es prisonnière du regard des autres. En fait, quand tu parles de la plage et tout ça, le ressenti que tu as de ton corps, il est complètement projeté sur le regard des autres et le fait que tu as été hyper valorisé. Mais en réalité... Par rapport à ce que tu me disais tout à l'heure sur ton poids d'équilibre, là, à ce moment-là, tu étais sous ton poids d'équilibre encore.
- Speaker #0
Oui, en fait, je devais être...
- Speaker #2
Ce qui explique la prise de poids, ce qui explique... Quand tu dis mon corps a pété les plombs, en fait, il cherchait à refonctionner normalement. Mais c'est vrai que la renutrition, c'est hyper douloureux à plein de niveaux, physiquement, psychologiquement, quand tu parles de transpiration et tout. Tout ça, c'est vraiment très difficile.
- Speaker #0
D'être empêchée de faire du sport, en fait. De ne plus réussir à courir. C'était vraiment... C'était terrible. J'étais essoufflée. Je me suis dit, j'avais une espèce de... Comme si j'avais des plaques. Pour moi, je visualisais des plaques de graisse, en fait, quand je cours. Oui,
- Speaker #2
mais voilà. Tu vois bien. Tu vois bien ce que... En fait, la visualisation... En fait, il y a zéro bienveillance aussi, tu vois, envers toi-même, là. Dans cette prise... Tu subis cette prise de poids, quoi, en fait.
- Speaker #0
Ah, mais non, mais... Enfin, la bienveillance, c'est un mot... En tout cas... vers moi-même que je ne connais pas. Et même ce matin, et j'y ai pensé parce que je savais qu'on allait parler toutes les deux, ce matin, dans mon lit, j'ai ouvert les yeux, je me suis dit « Allez, lève-toi et va voir le carnage. » Et ça, ça veut dire « Va te regarder dans la glace. »
- Speaker #2
Le carnage. « Va voir dans quel état tu es. » aurait dit ta mère.
- Speaker #0
C'est ça. « Va voir le carnage. » Et tous les matins, c'est ça. C'est ça.
- Speaker #2
Alors justement, ça m'intéresse, même si on fait un petit saut dans le temps. Où est-ce que tu en es aujourd'hui ?
- Speaker #0
Alors aujourd'hui, en fait, ce qui s'est passé,
- Speaker #1
c'est que j'ai grossi,
- Speaker #0
j'ai grossi, j'ai grossi. Je suis arrivée à 66 kilos, qui n'avait jamais été mon poids. Donc, je me suis cachée quasiment pendant un an. Il y a des gens que je ne vois toujours pas, d'ailleurs. Et puis, en avril dernier, avril 2024, Je tombe malade, basique, genre grippe ou gastro. Et puis, ça me coupe l'appétit pendant dix jours. Et puis, je me dis, hé ! Si on restait là-dessus, on est bien là. On est bien, bien, bien. Et du coup, je replonge. Sauf que... on va dire ma première phase d'anorexie, je partais de 56 kilos. 56 kilos, tu perds 10 kilos, tu es à 46. Donc en effet, là, ça se voit. Ça se voit, tu es maigre. Là, je partais de 66. Donc 66 jusqu'à 56. Et bien encore une fois, tout le monde a cru que j'avais fait un bon vieux régime. Et c'est reparti pour la valorisation de ma perte de poids et machin. Oh là là, ta bonne mine, ça va mieux, ça se voit. Enfin,
- Speaker #2
de toute façon,
- Speaker #0
il te valorisait aussi à 46 kilos oui voilà bien sûr tu vois c'est que même les gens qui te disent et ça c'est très compliqué même les gens qui te disent oh là là mais ma peau c'est terrible d'être anorexique mais en fait c'est des coquines qui sont certainement très mal dans leur jean en 40 et qui en fait je suis sûre à un moment donné se disent mais pourquoi moi je fais pas du 36 en fait je fais pas du 36 je fais du 14 ans rires je fais du 14 ans, je n'ai pas mangé une pâte depuis 2 ans donc non non ma place n'est pas enviable voilà donc il y a cette perte de poids au printemps 2024 je repère en 3 mois, 3-4 mois je redescends à 57-56 on part en vacances cet été on n'a pas eu hyper beau temps, je m'ennuyais un peu du coup je suis allée courir tous les jours je suis allée faire 10 km tous les jours Voilà.
- Speaker #2
Normal, quoi.
- Speaker #0
Normal, la base. Non, mais pour moi, tu ne sors pas si tu ne vas pas faire 10 kilomètres. Enfin, tu vois, c'est vraiment le truc. Ce n'est pas la peine de mettre tes baskets. Du coup, quand on rentre de vacances, j'avais perdu 2 kilos. Mais en revanche, je me sentais vachement bien. Voilà, 54, 55 kilos. Puis même, je me laissais fluctuer. 54, 56, ça allait. Et je courais beaucoup et je m'inscris à des courses et je fais le Marseille-Cassis et machin, et je fais un trail. Et je m'éclate. Tu vois, vraiment, je me dis, bon, il y a un problème avec la nourriture. Tu le vois bien que tu ne manges pas comme les autres. Mais je faisais gaffe parce que je savais que je courais, que je courais beaucoup. Je faisais 50 kilomètres par semaine. Donc, je faisais attention à ce que je mangeais le matin. Je m'autorisais à manger des choses sucrées. des choses sucrées, attention, genre deux abricots secs avant de partir courir ou des choses comme ça. Mais c'est des choses que je ne me serais pas permise avant. Mais j'étais bien, j'étais bien dans mon corps, je le sentais fort, je faisais des pilates à côté. Et là, bien sûr, je me blesse. Et je me blesse juste après mes 40 ans. Je ne sais pas si c'est lié, mais voilà, j'ai 40 ans fin novembre. Et je me blesse début décembre. Et du coup, je ne peux plus courir. Je ne peux plus courir. Très rapidement, je prends un ou deux kilos. À partir de là, je range la balance. Et il est hors de question que je me repaise. Parce que je me dis, ça y est, ça y est, c'est reparti. Ça y est, c'est reparti. Ça va devenir incontrôlable. Je sens en mes vêtements que ça commence à être serré.
- Speaker #1
Je...
- Speaker #0
Je ne suis pas bien. Et là, j'ai ma première compulsion. J'ai ma première compulsion, mais vraie de vraie. Cette fois-ci, ce n'est pas des vases allégés avec du carré frais 0%. C'est le placard des gâteaux des enfants. Je ne vomis pas. Je n'y pense même pas. Deuxième compulsion. J'essaye de vomir, je n'y arrive pas. Troisième compulsion, je me fais vomir et là c'est bon.
- Speaker #2
C'est le début de la boulimie. Mais du coup, c'est hyper récent, on est d'accord, on parle de décembre 2024.
- Speaker #0
Oui, c'est hyper récent. Et d'un autre côté, je continue à être le reste du temps en restriction totale. Ça fait aussi partie des comportements compensatoires. Du coup, il y a... J'ai tenté le truc de, si je ne suis pas en restriction, du coup, je ne vais pas compenser. Donc, je me suis dit... Enfin, je ne vais pas compenser, je ne vais pas compulser, pardon. Donc, du coup, je me suis dit, bon, ok, réintroduis un peu de pâtes, mange la moitié d'un propre monsieur que tu fais aux enfants, voilà. Et puis, en fait, j'ai quand même compulsé. Donc du coup j'ai arrêté de réessayer d'intégrer des trucs. Maintenant non, le lendemain d'une crise je jeûne. qu'au repas du soir où je ne vais manger qu'une soupe, parce que du coup, je vais avoir la crise. Plus le fait de me dire, pour éviter la crise, je vais manger des pâtes. Non, en fait, ça ne marche pas. Et puis ça, il faut aussi que les gens qui sont peut-être dans ma situation le comprennent. C'est que tu peux toujours te faire vomir. Tu prends quand même du poids.
- Speaker #1
Oui, tu n'évacues jamais tout. Mais les gens qui sont dans ta situation le savent. Le problème... Le problème... C'est marrant, je cherchais à faire une analogie. Je me disais, mais quelle analogie je pourrais faire pour faire un tilt ? Mais je veux dire, tu as un accident de voiture et tu es cloué dans ton lit et tu fais de la kiné. Et puis, le premier jour, en fait, où tu bosses, tu fais énormément de renforcement, de plein de trucs pour pouvoir à un moment donné remarcher. Tu essaies de marcher le premier jour, putain, tu te casses la gueule. À quoi bon ? J'arrête tout le renforcement. Bah, de toute façon, je suis pas capable de marcher, là, donc ça sert à rien, ce que je fais. C'est un peu la même logique de dire, bah, super, j'ai mangé un microque monsieur, une cuillerée de pâtes, j'ai quand même compulsé, j'arrête. Ce sera ta porte de sortie. Mais tu pars de loin. En fait, ça m'a fait sourire quand t'as dit, j'ai essayé de... Voilà, en fait, faut pas oublier que tu pars d'une anorexie. Tu pars de restrictions hyper intenses. qui sont là, que tu te fais subir depuis effectivement 7 ans, mais qui font partie de tes croyances depuis bien avant ça. C'est-à-dire que, tu vois, on parle de trucs qui sont quand même ancrés depuis l'enfance.
- Speaker #0
Non, mais c'est clair. Après, tu vois, le truc, c'est la question de la légitimité. Pour moi, je ne suis pas anorexique, je suis grosse.
- Speaker #1
Déjà, tu n'es pas grosse. Tu vois, tu ne peux pas... En fait, les gens ne te voient pas, mais moi, je ne peux pas te laisser dire ça. De toute façon, les gens ne te voient pas, mais on a parlé de poids depuis tout à l'heure. Je veux dire, même si tu étais minuscule, avec les poids que tu nous as dit, tu n'es pas grosse.
- Speaker #0
Là, du coup, je ne sais pas du tout combien je pèse. Je vois juste aux tailles de pantalon, etc. Et tous les matins, c'est un enfer pour m'habiller. C'est ma punition, mais je le prends vraiment comme ça. Et d'ailleurs, même dans les crises, j'avais toujours imaginé la compulsion comme… Ben voilà. je vais compulser, je vais me faire alors qu'est-ce qui me ferait vraiment envie mon sandwich préféré c'est le pain bagnat donc tiens t'as qu'à t'enfiler 3 pains bagnat tu verras après si tu vas pas y vomir ou des pâtes aux fruits de mer tu vois, voilà mais en fait c'est pas ça du tout le délire on est pas sur un délire de je me fais plaisir tellement au point d'en avoir jusque là et d'aller vomir c'est que je mange des choses qui m'écœurent en fait l'idée c'est justement de me donner envie de vomir donc je mange des choses alors Attendez, je rigole, mais ce n'est pas drôle. C'est que quand même,
- Speaker #1
même quand je compulse,
- Speaker #0
alors j'ai de la pâte à tartiner, mais de la pâte à tartiner sans sucre. C'est de la brioche 35 % moins sucrée. C'est des gâteaux d'une marque qui fait des trucs sans sucre.
- Speaker #1
Mais tu as différents niveaux. En fait, c'est aussi à ça qu'on reconnaît la puissance de l'anorexie. C'est-à-dire qu'il y a des personnes qui font des cons. Là, dernièrement, avec... Dans quel cadre j'ai échangé avec quelqu'un qui me disait ça ? Elle me dit, ouais, je fais des crises, des compulsions, nanana. Et en fait, en creusant, elle me dit que c'est que des fruits. Mais oui, mais oui. Que des fruits, tu vois. Mais pour elle, déjà, on est à un niveau d'interdit, genre une banane, un truc comme ça, tu vois, même les fruits. Donc, en fait, tu vois, même dans ce qui est censé être le lâcher prise absolu, en fait, il y a une forme de contrôle, tu vois, dans ce que tu dis.
- Speaker #0
Et je vais même faire pire, c'est qu'en fait, je vais commencer, même si c'est un moment de pure folie, je n'ai jamais connu un truc comme ça, surtout quand tu es habitué, entre guillemets, dans une maladie d'hyper contrôle, et où là, d'un coup, tu sors de toi-même en fait. Il y a des moments où je ne me rappelle même pas ce que j'ai mangé, je ne me rappelle pas les 20 minutes qui viennent de s'écouler. Mais même comme ça, je suis assez tordue pour aller manger d'abord. les choses les plus saines, entre guillemets, parce que c'est ce qui va rester, je me dis que c'est ce qui va rester le plus longtemps. Donc, je vais commencer par la pâte à tartiner, machin, sans sucre, je ne sais pas quoi. Enfin, il n'y a ni noisette, ni chocolat dedans. Je ne sais pas à partir de quoi c'est fait, mais bref, c'est un enfer. Et je vais finir par les trucs vraiment, vraiment trash, selon moi, tu vois, genre les cracottes au chocolat de ma fille, enfin, les trucs où vraiment, là, tu as 50 grammes de sucre. Voilà, parce que je me dis, ça, ça va ressortir direct. Voilà. ça c'est le truc pour me finir donc le tout trempé dans de l'eau, du lait, du machin et je me dis ça c'est bien bien trash je le garde pour la fin et c'est ce qui va vraiment me finir voilà Mais j'ai quand même ce truc de me dire, ouh là là, ce qui risque de rester un petit peu quand même dans ton estomac, il faut que ça ne soit pas trop, trop, trop gras, sucré, calorique.
- Speaker #1
Mais tu dis que tu es tordue. En fait, ça va parler à plein de gens. Moi, ça parle à celle que j'étais avant. Tu n'es pas tordue, tu es ultra conditionnée. Quand tu dis que c'est ta punition tous les matins d'aller t'habiller, mais attends, punition de quoi ? D'être celle que tu es, en fait. Parce qu'à un moment donné, on a parlé tout à l'heure de ton poids d'équilibre. En fait, a priori, encore aujourd'hui, soit tu y es, soit tu n'y es même pas. En tout cas, tu as parlé de plein de moments de détestation extrême de toi où tu te trouvais vraiment trop grosse alors même que tu étais sous ton poids d'équilibre. Ah oui. Mais tu as été une nana bien dans sa peau à son poids d'équilibre, je te le rappelle. Maltraitée, malmenée par... Une mère elle-même maltraitée, malmenée par je ne sais pas qui, peut-être sa mère par les régimes, par plein de trucs. Mais il n'empêche qu'elle t'a malmenée avec ça. Mais je veux dire, quand tu dis mes fringues tous les matins, c'est ma punition. Mais non, mais ta punition, c'est ta façon de manger au quotidien. C'est ta façon de te parler. C'est ta façon de te regarder. Tu pourrais enfiler un jean, on s'en fout. Même si ton jean est en taille 40, qu'est-ce que ça peut bien faire ? Alors bien sûr que je... Je te dis ça et je sais bien à quel point ça va ruisseler sur toi parce qu'il y a des tas de choses qui n'arrivent pas à fissurer ça et à rentrer. Il n'empêche que c'est important que tu l'entendes. Il n'empêche que c'est important peut-être que d'autres gens qui se reconnaissent l'entendent.
- Speaker #0
Je suis complètement d'accord.
- Speaker #1
Mais j'ai une question qui me venait. C'est quoi aujourd'hui ? Qu'est-ce que tu désires pour toi aujourd'hui ? C'est quoi le plus important pour toi ?
- Speaker #0
Alors, pour moi, sincèrement, c'est ma famille. C'est pour ça que je me dis qu'il y a vraiment des moments où j'ai l'impression d'être en espèce de dissociation totale.
- Speaker #1
C'est qu'à côté de ça,
- Speaker #0
j'ai un mari génial. J'ai des enfants, mais c'est des bijoux. Tous les matins,
- Speaker #1
le petit-déj,
- Speaker #0
quand eux, ils mangent et que moi, je ne mange pas, je prends un thé. Je me dis, franchement, mais c'est... pourquoi tu n'arrives pas juste à te concentrer sur eux en fait ? Pourquoi est-ce que c'est ça ta réussite en fait ? Je ne comprends pas pourquoi je suis dans un espèce de truc, je trouve ça très superficiel en fait de se trouver grosse ou mince, qu'est-ce que c'est que ce délire ? Ce n'est pas moi, ce n'est pas moi du tout et je sais que ce n'est pas ça le problème, que c'est certainement, je ne sais pas, est-ce que c'est rester dans… rester dans l'enfance, rester dans un corps d'enfant, à un moment où j'étais validée par mes parents.
- Speaker #1
Par ta mère, ton père. Quelle relation tu as avec ta mère aujourd'hui ?
- Speaker #0
Avec mes parents, de manière générale, on n'a pas une très bonne relation. On n'a pas une très bonne relation, c'est très superficiel. C'est quelque chose qui est maintenu parce que... Parce que mes enfants les aiment beaucoup, parce que je veux maintenir une image familiale,
- Speaker #1
même pour mes nièces.
- Speaker #0
Et parce que je considère qu'ils ont déjà assez bavé, coupé les ponts, mais je sais très bien que je vais souvent faire une crise après les avoir...
- Speaker #1
Ok, donc eux, ils en ont assez bavé avec le décès de ta sœur, mais toi, non. Donc tu ne vas pas leur rajouter ça. Par contre, toi, c'est une épreuve et tu sais que tu... te tapes une crise quand tu les as vus, mais il faut les voir parce qu'il faut les protéger de quoi ? Tu vois ?
- Speaker #0
Ça, je ne peux pas. Je n'arrive pas encore à mettre de mots là-dessus sur de quoi je les protège alors que maintenant, moi-même étant maman, je sais bien que c'est plutôt aux parents de protéger. Et voilà. Et ce n'est pas le contraire. Mais ouais, c'est... C'est vraiment une forme de punition. C'est très compliqué de faire comprendre ça aux gens parce que ça touche au physique. Et donc forcément, t'imagines que tu fais un régime pour faire la cagole à Porquerolle cet été. Non, bah non en fait. Parce que même quand j'étais à 45 kilos, j'étais pas bien au maillot de bain. Parce que je me rendais bien compte que j'avais même pas un corps d'enfant, j'avais un corps de malade en fait. T'es blanc, t'es cerné, t'es creusé. Enfin, t'es pas dans la santé non plus, quoi. Mais c'est à l'image de ce que je suis à l'intérieur, en fait. C'est plutôt ça.
- Speaker #1
C'est-à-dire ?
- Speaker #0
C'est quelque chose de petit,
- Speaker #1
de recroquevillé,
- Speaker #0
qui ne veut pas se faire remarquer. Et en fait, tu te fais remarquer quand tu fais 45, 44 kilos. d'une manière ou d'une autre, tu te fais remarquer, tu as les gens qui trouvent ça magnifique. Je dis comme à la salle de sport, waouh, c'est sublime. Ton âge est encore comme ça, c'est superbe. Et puis, tu te rends compte du truc quand même pour les femmes. À ton âge, c'est déjà ce truc-là.
- Speaker #1
À ton âge, après deux enfants.
- Speaker #0
C'est horrible.
- Speaker #1
Oui, mais aussi superficiel que ce soit, il est quand même aussi question de ça. Bien sûr que Bien sûr que je te rejoins sur ce côté pathologie à part entière, qui doit être prise en charge comme une pathologie. Mais je crois que c'est important de regarder qu'il est aussi question de ça, beaucoup, et que ça fait chier. Moi, il n'y a pas une seule nana que j'ai accompagnée qui était une nana débile superficielle. Non, ça n'existe pas. Tu vois, il y a une profondeur d'âme. profondeur de plein plein de choses en fait avec souvent des personnes très très intelligente tu vois qui pousse leurs réflexions et tout ça va avec le perfectionnisme tout reste ouais voilà mais mais pour autant voilà alors ok ça prend racine dans un truc hyper superficiel mais en fait mais tu es conditionné depuis ta naissance à ça depuis ta naissance tu es une fille donc tu dois être belle et tu dois être mince et quand en plus tu passes par la case danse tiens oui
- Speaker #0
toute la journée devant un miroir. Mais même, je me rappelle un jour avoir une prof qui venait corriger mon placement et qui me dit... Oui, mais c'est là où elle m'avait parlé des pommes. Elle m'avait dit, attention au goûter, moins de... Je ne sais plus ce qu'elle m'avait dit. Enfin, moins de gâteau, plus de pommes. En me tâtant la cuisse, en fait. Je ne sais pas où on se situe entre la maltraitance et...
- Speaker #1
c'est maltraitant, pour moi il n'y a aucun problème ok on est dans la maltraitance ce qui me dérange c'est que d'un côté il y a tout ça,
- Speaker #0
il y a ma mère, il y a des choses que j'ai pu entendre des réflexions que j'ai pu avoir et d'un autre toutes ces choses positives desquelles j'aurais pu m'imprégner quand on me disait que j'avais des formes de dingue quand j'étais en Afrique que je faisais bien de ciné voilà je me dis mais ça j'aurais aussi pu m'en nourrir de ce genre de choses de commentaires qui étaient très positifs pourquoi est-ce que je suis pas restée là-dessus en fait ? pourquoi est-ce que c'est l'autre côté qui l'emporte ?
- Speaker #1
alors là je pense que déjà il y a quand même l'empreinte maternelle qui est hyper forte quoi qu'on le veuille ou non je pense que ça a été hyper destructeur et puis t'es pas restée en Afrique non plus ça peut être aussi Bête que ça, ton parcours de vie aurait peut-être été complètement différent si tu étais resté en Afrique. Et ce n'est pas le cas, tu es revenu dans un pays où les femmes comme ta mère sont un peu la norme en fait. Tu vois, les mamans, le club des mamans au régime là. Donc voilà, après, il y a tout le pourquoi ça s'est passé comme ça. Maintenant, il y a tout le comment tu vas pouvoir faire en sorte que ça se passe différemment. Et je pense que, en fait, moi j'ai entendu... plein de choses tout au long de notre discussion et encore aujourd'hui, je sens bien que tu restes persuadée qu'il y a des aliments grossissants, par exemple. Parce qu'il y a plein d'expériences, ne serait-ce que la façon dont tu as repris le poids, en fait, on sent bien que je sens qu'il y a eu une perte de confiance aussi dans ton corps et le sentiment qu'il n'y a pas de maîtrise.
- Speaker #0
Exactement. En fait, ça m'a juste montré que j'avais raison. Manger, ça me fait du mal. Voilà, ça m'a juste prouvé ça. Et je l'ai dit au médecin. Je me suis un peu fâchée avec le médecin, que je ne vois plus, on ne partira pas en vacances ensemble. Je pense, voilà, on était quand même loin d'un accompagnement très professionnel. De laisser aller mal à ce point-là, il y a un moment où elle aurait dû mettre aussi, je ne sais pas. Puis même, je ne suis pas contente parce qu'elle m'a fait grossir. Enfin, il faut être aussi très objectif. mais ouais et je lui ai dit vous venez juste de me montrer que j'ai raison que la maladie a raison que la fameuse voie de l'anorexie a raison manger ça me fait du mal non manger ça te fait grossir et grossir ça te fait du mal manger
- Speaker #1
ça te fait grossir parce que tu es sous ton poids d'équilibre et grossir du coup te fait flipper te fait du mal mais manger ne te fait pas du mal tu vois et je veux dire à aucun moment t'es passé à 90 100 kilos 120 kilos 130 kilos
- Speaker #0
Je ne sais pas, je me suis réallée. C'est ça, c'est que j'ai toujours ce truc de « Ok, mais là, qu'est-ce qui se passe ? » La boulimie vomitive me fait incroyablement peur. J'ai déjà des analyses de sang qui sont plutôt mauvaises. Ça aussi, il ne faut pas se leurrer. C'est très dangereux. C'est pas... C'est très dangereux de se faire vomir soi-même. Enfin,
- Speaker #1
c'est...
- Speaker #0
C'est quelque chose de mortel. Enfin, c'est...
- Speaker #1
Oui, oui, oui, t'as raison de le dire, effectivement. Notamment avec la question du potassium et de l'épochalémie, oui.
- Speaker #0
Exactement. Et ça, faut pas l'oublier, parce que t'as un côté un peu... Rock'n'roll, voilà, rock'n'roll, années 90. Oui, Kate Moss, machin, les mannequins, et ça se fait vomir sa feuille de salade. Ouais, enfin, attends, mais c'est... Non, c'est hyper grave comme truc. Et moi, ça me fait peur. Ça me fait peur et il y a des moments où, ouais, j'ai peur de crever. Sauf que deux jours plus tard, tu refais une crise. C'est complètement stupide ou quoi ?
- Speaker #1
Non, t'es pas stupide, t'es prise par des mécanismes auxquels tu ne peux rien. Là, t'es rentrée dans... En fait, je sais que c'est horrible ce que tu vis, mais peut-être que ça va te permettre d'ouvrir enfin la porte de sortie parce que... la boulimie, pour moi, c'est le versant du TCA qui peut peut-être te permettre de guérir plus facilement. Enfin, tu vois, c'est tellement insupportable.
- Speaker #0
Je crois, ouais.
- Speaker #1
C'est tellement flippant. Je veux dire, moi, ça fait écho à plein de choses aussi, de me dire... Moi, j'avais peur, par exemple, de mourir étouffée aussi en me faisant vomir, tu vois. Tu te dis, OK, on va me retrouver, genre, c'est mes gamins qui vont me retrouver là, comme ça.
- Speaker #0
Exactement,
- Speaker #1
ouais. Et donc, en fait, ça prend du temps. Malgré tout, je l'ai quand même fait pendant des années. Et voilà, ça a pris du temps. Mais il n'empêche que, tu vois, ça crée des pulsions de dire, putain, stop, quoi. Stop, il faut que je trouve une solution. Et à un moment donné, ce truc-là peut permettre d'aller au-delà de plein de peurs et de retourner affronter tes peurs. Parce qu'il s'agit de ça. Tu les as déjà affrontées plein de fois. Mais de retourner affronter cette peur de grossir et que ça ne s'arrête jamais. Pourquoi est-ce que tout d'un coup, ça ne s'arrêterait jamais ? Je veux dire, il y a eu toute une phase de ta vie, tu mangeais normalement, sans aucune restriction, ton poids, il était stable, tu vois ? Tu avais un poids d'équilibre et ton poids était stable et ton corps, il sait faire le job. Là, aujourd'hui, tu es dans une relation d'ultra-méfiance en mode si je ne le contiens pas, il va faire n'importe quoi et je vais monter à 150-200 kilos. Non.
- Speaker #0
Pour moi, c'est mon ennemi. C'est vraiment... Il est contre moi. Il joue contre moi. vraiment c'est pour ça je suis là je te parlais de dissociation je sais pas si c'est le bon terme parce que voilà je mais vraiment l'impression d'être d'être deux je sais que j'ai cohabité avec lui il est obligé de cohabiter avec moi qui le fait souffrir j'en ai conscience que je le fais souffrir c'est pas ça le problème mais je ne sais pas je ne sais pas comment faire et le seul moment où on s'entend c'est quand on court et ça voilà on me dit beaucoup attention est-ce que la course c'est pas pour compenser machin non c'est pas ça c'est le seul moment où où il est avec moi où où on va aller plus loin où on va être on va passer un bon moment où j'ai la chance d'être dans une ville magnifique et de courir sur la corniche encore ce matin et courir avec la Méditerranée sublime bleue brillante enfin Voilà, c'est incroyable. Ça me fait connaître des gens merveilleux. Il y a plein de choses extrêmement positives autour du running, autour du dépassement de soi. Le Marseille-Cassis, c'est un souvenir, mais j'en ai des frissons. Et je me dis, mais mince, il est capable de faire des trucs, en fait. Ce n'est pas juste un espèce de mauvais élève qui ne t'obéit pas.
- Speaker #1
Il a fait un paquet de trucs, en fait. Si tu prenais le temps d'y réfléchir, tu serais surprise. C'est un exercice que... qu'on a fait il n'y a pas longtemps dans mon programme d'accompagnement, justement, de refaire l'histoire du corps avec une frise chronologique, mais vraiment que le corps, tu vois. Et ouais, ouais, c'est assez impressionnant. Je pense qu'effectivement, quand j'entends ça, j'ai envie de te dire, OK, peut-être, essaie de trouver des choses qui te permettent de revenir plus souvent dans ton corps. Parce que je crois que tu passes ton temps à le regarder de l'extérieur, en fait, et à te demander à quoi il ressemble. et comment les autres vont penser qu'il est et comment les autres vont le juger. Et plus tu seras dans ton corps, moins tu auras besoin de le regarder de l'extérieur. Et en fait, si je devais te donner des pistes de choses à bosser, je pense que le premier truc que je te dirais, c'est faire attention à comment tu te parles. Franchement, tu mets ton énergie là-dessus, tu te fous la paix sur la bouffe. Oui, tu sais que c'est les restrictions qui mènent les compulsions, machin. Ok, fais-toi un test pendant une semaine, tu t'occupes de rien, tu continues de manger comme tu manges et puis advienne que pourra. Mais déjà, tu t'efforces d'enlever, pour commencer, tu peux enlever une critique sur deux. Tu sais, il y a un truc déjà dont j'ai déjà parlé, je crois que c'est dans un live, il y a quelqu'un qui m'en a parlé il n'y a pas longtemps, qui m'a dit que ça marchait bien. Je disais, on ne se rend pas compte de tout ce qui passe en critique. pensées négatives autour de soi-même. Et des fois, pour les matérialiser, tu peux, dès qu'il y en a une, tu tapes dans tes mains ou tu claques des doigts, tu vois. Et ça permet aussi de, tu vois, stopper un peu le truc, plutôt que d'être dans l'espèce de robot, mais tu vois, genre, commencer ta journée avec des pensées comme ça. Et c'est difficile, du coup, de les enlever, mais ça se fait, ça se fait très bien. Et sans forcément remplacer par « je m'aime, je suis, gna gna gna » . Non, tu vois, on est bien d'accord, la marge est trop haute et voilà. Oui, oui. C'est juste d'être dans de la neutralité, quoi, genre, en fait, OK. Et puis, du coup, tu vois, tu te lèves en disant, allez, tu vas aller voir l'ampleur des dégâts, machin. Ben non, déjà aussi, ne pas aller voir. Enfin, quand je parle de supprimer des autocritiques, c'est aussi supprimer un gros paquet de vérifications.
- Speaker #0
Petit check-in, mais ça, je ne le faisais pas avant. C'est hyper récent.
- Speaker #1
Oui, mais...
- Speaker #0
Dans la journée, je ne me rends même pas compte, c'est mon mari avec qui j'ai la chance de pouvoir en parler, qui me dit « mais tu te lèves, le premier truc que tu fais, c'est aller voir le miroir » . Alors qu'avant, au contraire, je ne passais jamais devant le miroir. Je ne vais pas chez le coiffeur parce que je ne veux pas, il est hors de question que je passe 20 minutes avec ma tronche devant, ce n'est même pas juste mon corps. C'est vraiment un rejet total, je ne me regarde jamais dans les vitrines, tu vois, tu as ton conflet et tout. Jamais, jamais, jamais, jamais. Et là... J'ai ce truc de... Mais c'est vraiment ça. Ce n'est pas regarder. Oh, si, ça va. C'est toujours pour m'auto-prouver que... Ah bah, tu vois, vraiment. T'es grosse, t'es grasse. Oui.
- Speaker #1
Tu pars avec un biais. Tu ne vas pas regarder à quoi tu ressembles. Tu vas chercher tout ce que tu vas pouvoir maudire chez toi.
- Speaker #0
C'est ça. Et ce n'est pas un truc... Parce qu'en plus... Enfin, tu vois, voilà. j'ai un mari, j'ai deux enfants, j'ai 40 filles, ma vie est loin d'être finie, mais je veux dire, j'ai rien à prouver. Je ne suis pas dans une logique même de séduction, je ne sais pas quoi. Donc, ce n'est pas genre, oh là là, non, ce n'est pas ça du tout. C'est vraiment juste, tu vois, même ça, tu n'as pas été capable de bien le faire. Tu avais juste un truc à faire, c'était d'être mince et de le rester,
- Speaker #1
tu vois. Tu entends ce que tu viens de dire ? Tu avais juste un truc à faire.
- Speaker #0
Juste un truc à faire, c'était d'être mince et de le rester. Eh bien, regarde-toi, voilà. C'est vraiment ça. C'est de tout ce qui va te tomber dessus dans la vie et que tu n'arrives pas à maîtriser. Il y a un truc que tu peux maîtriser, c'est ton corps. Mais ce qui est archi fou.
- Speaker #1
Si j'avais une baguette magique là et que je pouvais te proposer deux choses. Dans l'un des cas, tu deviens exactement comme tu as envie d'être physiquement. Aussi mince, aussi musclée, aussi fit que tu le veux. Voilà, le corps... un corps idéalisé, adulé, machin. Par contre, tu continues de galérer avec la bouffe, jamais tu ne mangeras comme tes enfants, jamais ce sera simple d'aller au resto et potentiellement tu fais encore des crises. Ou dans l'autre cas, je te libère d'un coup de baguette magique de toutes tes crises, de tout ça, tu bouffes normalement avec tes enfants, finis de faire des repas différents, tu kiffes, machin, mais tu perdras jamais de poids. Plus jamais de poids. Tu sais, c'est un peu les bras en mousse ou les dents en carton, ou je ne sais pas, le truc pourri. Mais c'est une question que j'aime bien poser qui n'attend pas forcément de réponse là immédiate. Mais tu vois, tout à l'heure, quand je te disais « T'en es où ? C'est quoi le plus important pour toi ? » Cette question, elle vient chercher ça aussi, tu vois. Et il n'y a pas une bonne réponse à avoir. C'est juste pour toi te permettre de faire le point. Parce que quand je t'entends dire « Putain, mais t'avais un truc à faire. » t'as pas été capable de le faire. Tu vois, mais là, tu mets le doigt, tu vois, sur un truc, un blocage hyper fort. Mais qu'on s'entende bien. Quand je te dis ça, je suis pas en train de te dire alors là, tu pourras jamais guérir tant que t'auras pas levé ce blocage-là, réglé tous les problèmes avec ta mère. Ça, je ne crois absolument pas. Je suis persuadée qu'avec des petits pas, des petites actions, tu pourras t'en sortir, même si... tu n'as pas complètement réglé ce truc-là et que ce truc-là, il va se régler en parallèle, en fait, tu vois, sur un chemin parallèle.
- Speaker #0
Oui, ça, je pense aussi que c'est pas... C'est juste... C'est l'expression d'un mal-être lié à ça, mais c'est pas... Voilà, enfin... On peut, en effet, décorréler les deux choses et guérir de l'un sans régler l'autre. Ça, j'y crois aussi. Après, malheureusement, répondre à ta question, aujourd'hui, j'y arriverai.
- Speaker #1
Je choisirais d'être mince.
- Speaker #0
Je choisirais d'être mince s'il n'y avait pas les crises.
- Speaker #1
OK. Merci les crises. Mais tu vois, moi, quand j'entends ça, je me dis putain, mais merci. Merci les compulsions, mais en fait merci ton corps, parce que c'est ton corps et ton psychisme qui bossent ensemble, même si toi tu cherches à les dissocier, c'est quelque chose d'indissociable, et les crises c'est un mécanisme normal, physiologique et psychologique, et en fait les deux fonctionnent ensemble, et c'est un mécanisme normal.
- Speaker #0
Et ça c'est un truc, je n'arrête pas de me dire, et ça vraiment, faut vraiment pas que ceux qui nous écoutent prennent ça pour... j'arrête pas de me dire que l'anorexie c'est tellement plus facile. que la boulie.
- Speaker #1
Mais ce n'est pas vrai. Mais ça, c'est pareil, ça, c'est une super piste pour bosser, tu vois. Moi, quelqu'un qui arrive avec ça, on va commencer... Les personnes, à l'époque où j'accompagnais encore l'anorexie, notre premier rendez-vous, voire même les deux premiers rendez-vous, parce que ça prend du temps, c'était de bosser là-dessus. Alors, alors, c'est quoi les avantages à être malade ? Parce qu'il y en a forcément. Qu'est-ce que tu vas perdre si tu guéris ? C'est quoi les avantages à guérir ? Qu'est-ce que tu vas perdre ? Qu'est-ce que tu vas gagner en guérissant ? perdrait en ne guérissant pas, et d'aller et de creuser toutes les ficelles autour de ça. Parce qu'il y a une romantisation de l'anorexie, encore une fois, aussi à cause de notre société qui valorise l'hypercontrôle, qui valorise la minceur, l'hyperminceur. Mais en fait, c'est faux. Et il y a aussi tout ce que tu ne vois pas, c'est-à-dire qu'il y a tout ce que tu peux projeter de « oui, quand même, ce serait bien une vie libérée » et tout. mais il y a tout ce que tu ne peux même pas imaginer que tu gagnerais.
- Speaker #0
Je ne me rappelle même plus à quoi ça ressemblait en fait.
- Speaker #1
Et puis ce serait encore différent, parce que le goût de la liberté, après avoir été bloqué là-dedans, il a quand même un autre goût que les gens qui ont toujours été libres. Je veux dire, tu mets quelqu'un dix ans en prison, il va savourer le fait de marcher librement dans une rue après, alors que pour nous c'est la normalité. C'est un peu la même chose avec l'alimentation, tu vois.
- Speaker #0
Oui, tu es vraiment dans une prison. tout ce que tu fais, c'est présent tout le temps. Tu ne penses qu'à ça. En plus,
- Speaker #1
moi,
- Speaker #0
avec la peur de projeter ça sur mes enfants. J'ai un garçon et une fille. C'est presque plus mon fils qui a des espèces de réflexes foireux. Genre, j'ai faim, je vais prendre un verre d'eau. Non, non, tu ne vas pas prendre un truc à manger, en fait. Tu ne vas pas prendre un verre d'eau. Et ça, même moi, je ne l'ai jamais dit. C'est très bien. très attention à ce que je dis. Et là, par exemple, j'essaye de faire un truc le week-end, s'ils veulent faire l'apéro, quand je leur dépose un petit bol de chips devant eux, j'en prends une devant eux. Alors après, il n'y en aura qu'une, c'est sûr, et puis c'est la plus petite. Mais j'essaye de leur montrer, regardez, maman mange une chips. Mais entendre mon fils, qui par réflexe me dit, j'ai faim, je vais prendre un verre d'eau, ça va me caler. OK, à 9 ans, on a un problème. C'est qu'il l'a entendu d'ailleurs, ça. moi je n'ai jamais prononcé cette phrase jamais, jamais, jamais, jamais au contraire, ils me voient tout le temps faire la popote leur faire manger les cookies maison les goûter, les trucs et non, je me dis mais ça vient d'où quoi ça vient d'où et même moi j'essaye en parallèle il y a un truc qui m'a énormément aidée c'est notamment l'écoute de podcast et lire lire énormément de ... de bouquins même assez engagés sur les femmes et l'alimentation, sur le corps, Beauté fatale de Mona Chollet notamment. J'ai vraiment essayé de trouver quelque chose de très rationnel, d'intellectualiser beaucoup les choses, justement de me sortir de ce truc qui me choquait, d'être dans un rapport aussi superficiel à mon corps et à mon image, et d'essayer de trouver une explication beaucoup plus intellectuelle. du truc et j'arrive pas, même avec ça même avec tous ces outils là même en écoutant quotidiennement entre autres, j'écoute tout un tas d'autres choses en podcast même en ayant conscience de tout ça en écoutant les parcours des autres, à chaque fois je me dis mais oui mais grave, mais elle a trop raison et c'est génial ce qu'elle a fait, elle s'en est sortie 10 minutes après je vais faire une crise et tu repars oui,
- Speaker #1
mais oui ... Mais ce que tu dis, c'est important, la compréhension intellectuelle. Mais ça, c'est un truc que je dis souvent aussi. C'est une première étape, comprendre, intégrer. Mais derrière, il faut passer à l'action. Et en fait, peut-être que, tu vois, quand tu disais, ouais, OK, j'ai compris. Si je ne me restreins pas, je n'aurai pas de crise. OK, donc je vais essayer d'enlever des restrictions. Et du coup, évidemment que... tu peux pas faire sauter toutes tes restrictions parce que c'est trop d'un coup donc évidemment aussi que tes crises elles disparaissent pas du jour au lendemain et du coup comme il y a aussi cette mentalité de l'urgence reliée au régime et à la perte de poids si ça marche pas tout de suite j'arrête
- Speaker #0
Donc voilà, en fait, tu vois, il y a le fait de... Et puis peut-être aussi, moi, je crois beaucoup au pouvoir des petits pas et que c'est grâce à ça, en fait, qu'on s'en sort. Parce que c'est un saut dans le vide de dire quoi ? Genre demain, il faut que je n'ai aucune restriction, et c'est comme ça que je vais m'en sortir. Mais non, mais no way, c'est trop flippant. Bon, OK, je vais faire des petits pas. Mon petit pas de la semaine, c'est OK, déjà, j'arrête de me parler comme ça le matin au réveil et en parallèle. Je mange un morceau de beurre. Enfin, tu vois, j'en sais rien, je dis n'importe quoi,
- Speaker #1
mais tu peux pas tout prendre comme ça.
- Speaker #0
Et il faut aussi accepter de sortir de l'urgence, accepter que ça prenne du temps. Et en parlant de temps, je n'ai pas de minuteur, mais je pense que notre épisode est méga long. Je te propose qu'on clôture. Est-ce qu'il y a quelque chose que t'aimerais juste dire pour clôturer cet épisode avant qu'on se dise au revoir ?
- Speaker #1
qu'il faut se faire aider il faut bien s'entourer ça veut pas forcément dire psychiatre, dététicienne ça peut être acupuncture, sophrologie ça peut être toi mais il faut se faire aider et c'est pas être faible mais c'est juste que t'es pas capable de prendre des bonnes décisions à un moment que ça soit la maladie qui parle ou la dénutrition ou ... ou la force des pulsions de crise, tu n'es plus toi-même. Tu ne vas pas prendre des bonnes décisions pour toi. Aujourd'hui, je sais que j'aurais certainement dû me faire hospitaliser, que ça aurait certainement dépendu de la l'heure. Peut-être pas, mais je me dis que c'est peut-être à côté de ça que je suis passée. Dans tous les cas, c'est important de trouver la bonne équipe et la bonne formule autour de soi. Il n'y a pas de modèle type. Ça ne veut pas forcément dire psychiatre. Psychiatre, ça fait peur. Psychiatre, médicaments, machin. Si ce n'est pas psychiatre et diète, ça sera autre chose. Ça sera une autre pratique. L'important, c'est d'avoir un moment où tu fais du bien et où tu te sens comprise.
- Speaker #0
Je suis bien contente de t'entendre dire ça sur la fin. Se faire du bien et se sentir comprise. Je pense qu'effectivement, c'est important. Et être accompagnée pour apprendre à se faire plus de bien. Merci beaucoup pour ton témoignage.
- Speaker #2
Un grand merci à toi qui est encore là à la fin de cet épisode. Comme je te le dis souvent, ton soutien est super important. C'est même ça qui permet au podcast d'exister encore aujourd'hui. Alors, si mon contenu t'apporte de l'aide d'une quelconque manière que ce soit, sache que tu peux m'en redonner à ton tour. Pour ça, il y a plusieurs façons de faire. Tu peux tout d'abord partager le podcast, en parler autour de toi. à tes proches mais aussi à des professionnels. Tu peux laisser 5 étoiles notamment sur Spotify ou Apple Podcast ou laisser ton meilleur commentaire. Mais depuis peu, j'ai aussi apporté une nouveauté qui te permet de me soutenir encore plus concrètement avec de l'argent. Effectivement, tu trouveras en description de cet épisode un lien qui te permettra de faire un don à la hauteur de ce que tu trouves que ce podcast t'a apporté. Merci, merci beaucoup. C'est grâce à ton soutien que ce travail va pouvoir continuer. Je te souhaite de prendre soin de toi autant que ce sera possible, et je te dis à très bientôt sur un nouvel épisode. Ciao !