- Speaker #0
Bienvenue dans TCA, etc., le podcast qui décrypte les troubles des conduites alimentaires et tout ce qui gravite autour, parce que ça n'est jamais seulement qu'une histoire de bouffe. Je suis Flavie Mitsono, et j'accompagne les mangeuses compulsives à devenir des mangeuses libres bien dans leur basket. Alimentation, peur du manque, insatisfaction corporelle, peur du jugement, du rejet, empreinte familiale, grossophobie, les sujets abordés dans ce podcast sont très vastes, et pour ce faire, mes invités sont aussi très variés. Retrouvez-moi aussi sur Instagram où j'aborde tous ces sujets au quotidien sur Flavie.mtca. Très belle écoute. Bienvenue Caroline, trop contente de t'accueillir sur le podcast.
- Speaker #1
Merci Flavie, ça fait super plaisir. Je te remercie énormément pour me permettre de partager mon expérience à travers ton podcast.
- Speaker #0
Trop chouette. Écoute. Je sais à quel point ça peut être riche pour les personnes qui écoutent. Donc, je trouve que c'est trop bien. Si ça peut t'apporter à toi, c'est trop bien. Je sais que ça apportera forcément aux personnes qui vont nous écouter. Tu le sais sûrement, ce que j'aime bien proposer pour le début de l'enregistrement, c'est que toi, tu te présentes de la manière dont tu as envie et de la façon dont ça te vient là dans l'instant.
- Speaker #1
Ok, donc ce n'est pas un exercice dans lequel je suis la plus à l'aise, mais je le fais avec plaisir. Moi, c'est Caroline, j'ai 36 ans, bientôt 37, et je suis actuellement dans le Morbihan. Je suis arrivée dans la région en septembre dernier suite à un changement de vie. Je n'étais pas du tout dans cette région initialement. Au niveau du travail... Donc moi, je suis en télétravail, je suis à 100% chez moi, dans un secteur juridique administratif. Après, je suis quelqu'un qui adore tout ce qui est artistique. J'étais très axée sport à l'époque. Aujourd'hui, je n'en fais plus, j'essaie de m'occuper d'une autre manière, en étant plus axée sur des activités un peu plus manuelles et plus calmes, on va dire. Voilà.
- Speaker #0
Ok, ce changement d'activité, c'est en lien avec les troubles alimentaires ?
- Speaker #1
Oui, en partie. En partie, parce que je me suis épuisée à faire du cardio, du sport tous les jours, alors que j'étais complètement épuisée. Et je me suis dit... En fait, j'ai réalisé avec le temps, en me renseignant, en écoutant des podcasts, en... en discutant avec des professionnels qu'il fallait que je lâche la grappe et que pour « guérir » des troubles du comportement alimentaire, il ne fallait pas que je continue à faire du sport et justement, il fallait que je me repose. C'est vrai que le sport, ça a toujours été associé à mon image, au fait de me sentir bien, au fait de maigrir. Et là, aujourd'hui, j'ai envie de reprendre des activités, mais je sens que, comme la course à pied, j'ai peur de retomber dans de l'excès et de courir pour des mauvaises raisons.
- Speaker #0
OK. OK. Quel est ton souvenir le plus marquant, ancien, peu importe ce qui viendra, sur le sujet de... Dans le rapport à ton corps, déjà, pour commencer, peut-être ? et puis dans le rapport à l'alimentation ?
- Speaker #1
Alors, j'en ai... En fait, j'en ai deux qui me viennent. C'est à des époques vraiment différentes et dans des contextes différents. Je ne sais pas si je peux...
- Speaker #0
Ah oui, avec plaisir. Oui, oui.
- Speaker #1
Alors, il y en a un, c'était quand j'étais petite. Je t'avais laissé un commentaire d'ailleurs sur ta page Insta quand tu avais fait un petit sondage sur ça. C'est quand j'étais petite, j'étais primaire. Et je suis allée, donc j'avais rendez-vous chez le médecin généraliste, le médecin de famille. Donc ma maman m'a emmenée, c'était pour un vaccin. Et donc j'étais assise sur la table, je me revois assise sur la table torse nu. Je ne sais plus pourquoi, j'avais pas de haut, je pense que c'était pour m'ausculter. Et ben voilà, j'étais assise, j'étais aux primaires, donc j'avais un peu de... Je n'ai jamais été menue étant petite, donc j'étais... juste j'étais pas grosse, j'étais pas ronde mais j'avais pas j'avais un petit bidon quoi puis assise c'est vrai que vous voyez des petits plis, rien de Enfin, normal, quoi, comme une enfant de 5-6 ans. Et le médecin, il a regardé mon ventre, il l'a montré avec le doigt. Il a dit, il va falloir arrêter le Nutella. Et là, ma maman, elle n'a pas eu trop eu de réaction. Elle n'a rien dit. Et puis moi, je me revois, en fait, sur la table. Je me vois regarder mon ventre, en fait. Et donc là, je me suis dit, il y a un souci. Oui, il faudrait peut-être que j'arrête le Nutella. J'ai associé le Nutella au ventre, au petit ventre. Donc, ça m'a marquée. Et là, aujourd'hui, à 36 ans, je me souviens comme si c'était hier.
- Speaker #0
Oui, il y a un effet un peu traumatisant. Mais effectivement, je me souviens très bien d'avoir lu ça, de ta réponse, et du choc que ça m'a fait. En fait, il n'y a tellement rien qui va. Même, tu vois, dans… Le fait de pointer ton corps, ton corps d'enfant, de petite fille, je veux dire, tu vois, ce serait comme, je ne sais pas, moi, parler d'un bébé qui aurait des trop grosses cuisses. Enfin, tu vois, c'est délirant. Et en plus de ça, d'associer ça à un aliment, de faire de la catégorisation alimentaire, des vies. Il n'y a rien qui va, quoi. Et quand tu dis que ta maman, elle n'a pas réagi, je me dis, est-ce qu'il n'y avait pas un effet un peu sidérant aussi, tu vois ? C'est tellement n'importe quoi.
- Speaker #1
Je pense, oui. J'avoue que je ne me souviens pas trop de... Je sais qu'elle était sur la droite, je revois sa silhouette, mais je ne sais plus, je ne revois pas son visage, mais je pense qu'il y avait une sidération, elle ne s'y attendait peut-être pas. Voilà, en tout cas, elle n'a pas validé les propos du médecin de Femme.
- Speaker #0
Ok,
- Speaker #1
voilà, c'était pour le premier. Et le deuxième, c'était à l'adolescence. J'avais mon insouciance, j'étais au collège, je devais avoir 14 ou 15, presque 14 ans. Et en fait, j'avais eu l'adolescence, les hormones, les règles, le corps qui change, j'avais beaucoup de poitrines, j'avais des formes, j'étais pas ronde, pas grosse. Honnêtement, j'étais bien en fait, et je me sentais bien. En fait, je me sentais super bien dans mon corps. J'étais contente d'avoir des formes, d'avoir de la poitrine. Je commençais à me sentir pire femme, mais j'assumais en fait ces formes et j'étais fière de me dire que j'avais de la poitrine, j'avais des fesses. Voilà, ok, j'avais du ventre. Je me sentais super bien. Et on était donc avec ma maman au supermarché. On charge les courses dans le chariot, on part du magasin et arrivée à la maison, elle me dit « Ah écoute, ça m'a choquée, je t'ai vue, j'ai vu que tu as pris un poids, beaucoup de poids, là ça ne va pas, il faut que tu fasses attention parce que tu ne peux pas continuer à prendre du poids. » Et elle m'a dit « Il faut que tu ailles te peser vraiment, il faut voir où tu en es au niveau du poids. » Donc le lendemain matin, elle m'a forcé à me peser. peser. Et elle m'a dit aussi, elle me disait si tu es trop... En gros, les garçons, je m'appuie un peu, je suis désolée. Les garçons n'aiment pas forcément les filles qui ont trop de poids. J'ai commencé à me mettre une pression comme ça. Franchement, ça a été trop matinant parce que c'est dans le sens où je me sentais super bien. Je m'assumais et en 24 heures... Tout a basculé et mon estime de moi et la vision que j'avais de moi, elle a complètement changé. Et je me suis dit, en fait, je suis grosse, je fais 70 kg, 72 pour 1,68 m. Ça ne va pas, il faut que je fasse 10 kg de loin que ma taille. Et voilà, premier régime, c'est parti.
- Speaker #0
Ok, à partir de ce moment-là... C'est quoi ? C'est ta maman qui a cherché un régime ?
- Speaker #1
Elle m'a fait comprendre qu'il fallait que je fasse attention et que je perde du poids. Clairement, elle m'a dit, il faut que tu perdes du poids.
- Speaker #0
Oui, mais toi, est-ce que tu savais comment faire ? Qui t'a dit quoi ? Comment manger ? Parce que tu étais super jeune.
- Speaker #1
Oui, j'étais super jeune, mais en fait, je me suis dit, je vais manger du pain le matin. Enfin, deux tranches de pain avec de la confiture. Le midi, en fait, c'était légumes, viande, yaourt. À 4h, une pomme. Et le soir, légumes, viande, yaourt. Et terminé. Et c'est vrai que j'avais mes tentes qui étaient quand même très axées poids, régime, il ne fallait pas être trop grosse, il fallait faire attention. Donc je ne me souviens plus trop. Pour moi, ça me semblait logique que c'était des légumes, de la viande et puis un yaourt. Pour moi, c'était logique en faisant comme ça, en enlevant finalement les glucides, les gâteaux. toutes ces choses, tous ces petits plaisirs du quotidien, j'allais forcément perdre du poids. Et donc, j'ai perdu du poids. Je perdais à peu près un kilo par semaine en faisant comme ça.
- Speaker #0
Ah oui, c'est beaucoup.
- Speaker #1
Et j'ai perdu 6-7 kilos en un mois et demi. Et puis, à l'issue, tu es bien comme ça. Mes tantes me disaient, mais Caroline, tu en prends du du. poids, tu es mieux comme ça, tu es jolie, c'est bien.
- Speaker #0
Et tu parles de tes tantes, ta maman, elle ne faisait pas attention à ce qu'elle mangeait ?
- Speaker #1
Oui, elle faisait plus ou moins attention. Elle ne parlait pas de régime, elle n'a jamais fait de régime, mais par contre, elle pouvait très bien, elle mangeait peu. Elle n'avait pas un gros appétit et elle faisait quand même attention. En fait, elle disait qu'elle n'était pas au régime. Et je pense que dans tous les cas, elle faisait attention parce qu'elle avait un poids qu'elle ne voulait pas dépasser. Et dès qu'elle arrivait à ce poids, elle refaisait attention pour être comme elle le souhaite. Voilà.
- Speaker #0
Est-ce que tu te souviens de ton rapport à l'alimentation avant tout ça, quand tu étais petite fille ?
- Speaker #1
Il était normal. Je n'avais pas un rapport malsain à l'alimentation. Je mangeais à ma faim. Je n'ai pas à souvenir que mes parents m'aient forcé à finir mes assiettes. Même si je l'entendais quand même, ce serait bien de finir. Mais voilà, je n'étais pas forcée de finir.
- Speaker #0
OK. Et quand tu étais petite, tu avais, vous aviez accès, je ne sais pas, tu as des frères et sœurs ?
- Speaker #1
J'ai un petit frère, oui.
- Speaker #0
OK. Et vous aviez accès assez librement à tout type d'aliments et aussi à des aliments type gâteau, bonbons, tout ça ?
- Speaker #1
Oui. Oui, oui. Oui, oui, on avait plein de pain des gâteaux, de la brioche Nutella. Voilà, un peu tout ce que les enfants... Les céréales du matin, au petit déjeuner, les petits miels pofs, les...
- Speaker #0
Ok, c'est marrant, j'ai l'impression que c'est des bons souvenirs quand même quand tu parles de ça.
- Speaker #1
Ouais, c'est des bons souvenirs et en même temps, je me dis que c'était pas forcément les meilleurs produits, que ce soit gustativement, je veux dire, comme qualitatif... Enfin, c'est ni qualitatif, ni... ni très bon, il n'y a que du sucre en fait.
- Speaker #0
Ok, ok, bon on y reviendra peut-être sur la vision de l'alimentation et tout ça. Du coup, est-ce que ce moment où, c'est pas rien, tu disais, c'est un peu le moment où tout a basculé quand même en 24 heures, tu vois, où tu dis le rapport à ton corps, ta façon de te regarder a basculé après la réflexion de ta maman, et du coup, j'imagine que c'est là aussi où il y a eu la bascule dans ton rapport à l'alimentation. Parce qu'en fait, tu dis que suite à ça, tu as fait attention un peu comme sur le modèle des femmes autour de toi. Et de là, tu as réussi à perdre du poids. On t'a encouragée, on t'a valorisée sur cette perte de poids. Et donc, tu dirais que là, ça a enclenché un rapport malsain avec la nourriture. C'est de là que tout a commencé.
- Speaker #1
Ma mère, je me pesais quand même régulièrement depuis toute petite. Depuis petite, elle surveillait quand même mon poids. même quand je n'avais pas de rapport malsain à l'alimentation. Et c'est vrai que quand j'ai fait ce premier régime, ça a commencé à basculer, surtout par rapport à l'image que j'avais de moi, parce que j'ai commencé à me dire « mais en fait, si je reprends du poids, ça veut dire que je vais être moins bien. » « Je vais être moins bien. » et je suis mieux, on va me valoriser, on va me complimenter quand je vais perdre du poids. Et suite à ce régime, peu de temps après, j'étais partie en voyage scolaire en Allemagne avec le village. Et voilà, on avait un peu profité. Et puis là, comme ça faisait un mois et demi que j'avais... pas mangé, j'avais pas eu accès à certains aliments, j'ai un peu remangé mais c'est là où j'ai commencé à être un petit peu dans l'excès en mangeant plus que de raison, c'est vrai que j'avais pas faim mais je continuais à manger des des gâteaux, des mars, des voilà des chips puis comme on était tous ensemble entre amis avec les correspondants allemands, ben voilà c'était un peu un peu n'importe quoi au niveau des horaires. Je n'ai pas du tout aux horaires entre guillemets classiques. On mangeait des sandwiches, on mangeait vraiment sur... Le rythme était différent. Et là, j'ai commencé à voir qu'il y avait un souci parce que je m'étais... J'avais pris sur le train du retour des sneakers et j'avais mangé, je crois, les quatre... Dans le train, j'avais mangé les quatre barres chocolatées de sneakers. Et je me suis dit, ah oui, pourquoi j'ai mangé tout ça ? Et du coup, j'ai repris du poids en rentrant. Donc je me suis pesée, bien évidemment. Une des premières choses que j'ai faites, c'est me peser. Et après, j'ai continué à reprendre un peu de poids et à me sentir de moins en moins bien. J'avais du mal à aller voir ma famille quand il y avait des repas de famille, quand on devait se rassembler. Je me suis dit, mais... Si j'y vais, elles vont voir que j'ai pris du poids. Si elles ne me disent pas, elles vont se le dire entre elles. Et c'est arrivé que je préteste de la fatigue ou autre pour ne pas aller à des repas de famille ou à des réunions. Parce que j'avais peur, j'avais cette peur. Vraiment, je n'étais pas bien. Je me suis dit, je n'ai pas envie d'être confrontée à des remarques comme ça. Même si je sais que... Pour mes tantes et ma maman et tout ça, il n'y a rien de méchant. Vraiment, ce n'est pas en mal, mais moi, ça ne m'allait pas du tout.
- Speaker #0
Oui, moi, je trouve ça assez terrible parce qu'en fait, il y a quelque chose qui s'est inscrit en toi autour de ta valeur, en tout cas, la valeur que les autres t'accordent en lien avec la forme de ton corps, de ton poids. Je trouve ça trop triste, en fait, tu vois. Tu étais adolescente. Et la famille, c'est quand même censé être un lieu ressource, même s'il y a des tas de familles qui ne sont vraiment pas du tout ressourçantes. Mais quand même, tu vois, normalement, la famille est censée être un lieu ressource. Et finalement, toi, tu préférais éviter des repas ?
- Speaker #1
Des repas ou...
- Speaker #0
Des réunions, quoi.
- Speaker #1
Voilà, des réunions.
- Speaker #0
Oui, oui. J'ai bien compris que c'était vraiment surtout lié à leur regard et à ce que tu imaginais de leur jugement,
- Speaker #1
finalement. Oui, c'est ça.
- Speaker #0
C'est ça, exactement. Ok. Et est-ce qu'il y a un moment donné... Enfin, comment ça s'est passé finalement pour toi ? Ah non, attends, j'ai une question. Parce que je vais l'oublier, je me la suis notée. Tout à l'heure, tu as parlé du fait que ta maman, elle te pesait depuis que tu es toute petite. Et il m'est venu la question de savoir si elle pesait ton frère de la même manière.
- Speaker #1
Alors, je ne suis pas certaine. Je ne suis pas certaine. Avec mon frère, on a 9 ans d'écart. Quand j'avais 18 ans, je suis partie de la maison. J'étais en études, je suis partie à Tours. Du coup, lui, il avait encore 9 ans. C'est vrai qu'une fois que je suis partie à 18 ans, on n'a plus forcément revécu ensemble sous le même toit suffisamment longtemps. Mais non, c'est sûr que c'était moins. Et lui, il n'a pas du tout, même aujourd'hui, il n'a pas du tout de rapport.
- Speaker #0
de mauvais rapport avec l'alimentation oui et pour cause le dernier que j'ai fait qui est sorti je ne sais plus avant-hier où du coup j'ai des tas de mecs qui débarquent dans mes commentaires qu'est-ce que vous êtes chiante à vous prendre la tête sur la bouffe et tout mais mec personne ne t'a mis au régime à 12 ans et tu vois en fait là c'est quand même intéressant juste même sur le fait de peser cette surveillance du poids de la petite fille versus du petit garçon ... Et une phrase importante que tu as dite tout à l'heure, oui, mais parce que les garçons, ils n'aiment pas, si tu grossis, tu vois, ce truc très axé, plaire aux autres, séduction, validation, en fait, masculine, qui est destructrice, à mon sens, dans la relation qu'on construit à nous-mêmes et à l'alimentation.
- Speaker #1
Ah bah, complètement, parce qu'à un moment donné, un peu plus tard, dans l'adolescence, j'étais au lycée, ou là, non, j'étais, oui, j'étais au lycée, où j'ai... J'avais décidé de manger que de la pomme de terre, j'avais réduit l'alimentation. Et là, c'était l'inverse. « Ah, mais si tu ne manges pas, un jour quand tu auras un petit copain, il ne va pas aimer que tu chipotes. S'ils vous mangeaient ensemble, vous allez au resto, il faut quand même que tu manges. Tu ne peux pas faire comme ça tout le temps. » Et là, je me suis dit, « Mais alors, quand je ne mange pas beaucoup, ça ne va pas. Quand je mange trop, ça ne va pas. Je fais quoi ? »
- Speaker #0
Oui, mais la pure injonction paradoxale, c'est sans issue. Et cette espèce de femme idéalisée qui est pas chiante, qui surveille son poids sans en avoir l'air. Mais tu l'as dit tout à l'heure, en fait, ta maman, en vrai, elle a un peu construit, je pense, ce truc-là. Non, mais elle avait un appétit de moineaux. Le nombre de fois où j'ai entendu ça. Mais tous ces petits moineaux qui sont en fait des ogresses déguisées en moineaux. Tu vois, en fait, ce cliché de « on veut des femmes qui picorent » . mais qui sont pas non plus trop chiantes qu'on peut emmener manger partout mais surtout qui grossissent pas faut que tu manges mais pas trop faut que tu surveilles ce que tu fais ce que tu manges mais faut pas que t'en aies l'air il faut pas que tu sois chiante faut que tu restes mince du coup en tout cas ce que tu disais c'est que Il y a eu différentes phases dans ce que j'entends, notamment dans ton adolescence. Est-ce qu'il y a un moment donné où il y a eu une bascule plus forte ? Est-ce qu'à un moment donné, tu as carrément basculé dans l'anorexie, par exemple ?
- Speaker #1
Je n'ai pas basculé dans l'anorexie tout de suite. Au départ, je prenais du poids. Je n'avais même pas de crise d'hyperphagie. J'ai eu quelques crises de boulimie, par contre. J'en ai eu et j'ai essayé de compenser en me faisant vomir. Je n'y arrivais pas. D'ailleurs, ça me fait penser à quelque chose. Je reviens en arrière.
- Speaker #0
Vas-y.
- Speaker #1
Je suis désolée. Je ne sais pas si ça a un lien, mais ça me revient de temps en temps quand je refais mon parcours sur les troubles du comportement alimentaire. et pourquoi je suis là aujourd'hui à chercher à me guérir. Quand j'étais petite, des fois, quand on est petit, on aime bien quand nos parents nous disent « ce soir, c'est plateau télé, à la cool, on se fait même, si tu veux, te faire un petit déj à la place du repas classique du soir. » Et j'étais trop contente, franchement. J'adorais ça. Je me faisais un bol de céréales avec du lait devant la télé. Mais j'étais au primaire. Et en fait, j'aimais tellement ces céréales avec ce lait que j'en mangeais vraiment beaucoup trop. Je n'écoutais plus ma faim. Et après, j'avais mal au ventre. Et du coup, j'allais vomir. Mais genre, j'étais... Ma mère le savait. Et je me suis dit, j'ai trop mangé, je n'étais pas bien. Et bon, ça en restait là. En fait, ça n'a impacté pas le reste de mes repas pour venir à la normale. Mais je me suis toujours posé la question et là, par contre, je n'ai pas la réponse de pourquoi est-ce que ça, ça aurait impacté la suite après. Est-ce que ça a joué un rôle ou pas du tout, le fait de ne pas s'écouter et puis d'avoir mal aux ventes et d'aller vomir.
- Speaker #0
Moi, la question qui me vient plutôt, c'est pas tant l'impact de ça sur la suite, c'est plutôt est-ce qu'il y avait déjà des impacts qui avaient eu lieu, tu vois ? C'est plutôt ça, moi, qui m'interprète. Parce que ça fait quand même penser à un comportement de je sais que c'est pas bien, je sais que c'est pas complètement autorisé, je sais que ça va disparaître, tu vois ? Le côté je me rends malade, il y a des enfants qui ont ce comportement-là, c'est pas du tout pathologique par ailleurs, mais un gamin, je sais pas... Il y a un enfant qui n'a jamais accès à des kinder, par exemple, et là, tu lui en mets un peu à volonté devant lui, mais il sait que ça va être qu'une fois ou deux dans l'année, il va se rendre malade. Ça, c'est le principe de rareté. Oui, je sais. Je ne sais pas ce qui se jouait pour toi à ce moment-là. Par contre, ce qui m'interpelle un peu, c'est plutôt le côté, tu le dis à ta maman, et tu vois si ça se produit une fois. Pourquoi pas ? Mais un comportement qui se reproduit, tu vois, et il n'y a pas de réaction, il n'y a pas de questions plus que ça, ou de je pense qu'il se passe... ça, ça m'interpelle plus, tu vois, le fait que ce soit banalisé finalement.
- Speaker #1
Elle était totalement ignorante sur le... sur cette... des troubles du comportement alimentaire. C'est vraiment quelque chose... un trouble qu'elle... enfin, elle ne connaît pas ça. Elle le connaît un peu parce que je lui en ai parlé il n'y a pas si longtemps. Mais elle était totalement étrangère à tout ça.
- Speaker #0
Ok, il n'y a aucun trouble alimentaire dans ta famille ?
- Speaker #1
Pas à ma connaissance. Il y a beaucoup d'injonctions sur l'apparence, le poids. Il ne faut pas être grosse. Il faut faire attention. Il ne faut pas trop manger de gâteaux, pas trop ceci, pas trop cela. Manger des légumes. Il y a beaucoup... Ça, ça continue à circuler au sein du cercle familial, plus proche ou moins proche. Par contre, moi, j'en suis complètement détachée, mais pas de... pas au point d'avoir été dans l'anorexie ou la boulimie.
- Speaker #0
Ok. La boulimie, tu penses que tu le saurais ? Parce que l'anorexie peut avoir un côté plus visible, mais la boulimie, ça peut passer tellement inaperçu.
- Speaker #1
Oui. Oui, je ne peux pas en être certaine.
- Speaker #0
Ok.
- Speaker #1
Je ne peux pas en être certaine. En tout cas, dans ma famille proche, c'est sûr que non, parce que moi-même, j'en parle. j'en parle de manière assez libre et pour moi c'est important de le dire aussi, de dire ce qui s'est passé, par quelle phase je suis passée, la boulimie, l'anorexie, c'est important pour moi de le dire. Donc je me dis que si une de mes cousines aurait eu un comportement... Oui, des troubles du comportement alimentaire, un peu de ce type, peut-être que je m'en serais rendue compte, en tout cas, dans les échanges.
- Speaker #0
Mais bon,
- Speaker #1
il ne faut pas en être certaine.
- Speaker #0
Oui, c'est clair. C'est bien placé pour savoir aussi à quel point on peut chercher à le cacher.
- Speaker #1
Oui. Et donc, du coup, ça s'est fait petit à petit, en fait, tout ça. Lors de ma première, quand j'ai commencé à... avoir des petits copains. Lors des débuts de ma première relation sérieuse, je voulais perdre du poids. Je voulais, je pense inconsciemment, je voulais être plus jolie, me sentir mieux. Et donc, je me suis dit, puisque je n'arrive pas trop à maigrir en faisant un régime, j'avais un peu de mal. Je me suis dit, si je mangeais, je me faisais vomir après. Pourquoi pas ? Comme ça, je mange. Mais vu que je ne vais pas garder ce que j'ai mangé, je vais forcément perdre du poids. Donc ça n'a pas été très concluant. Je n'arrivais pas à me faire vomir. J'ai réussi plusieurs fois, mais ce n'était pas ça. Et j'ai vite arrêté. Et j'ai repris ma vie. Je faisais attention. Je faisais toujours attention à ce que je mangeais. Mais voilà, c'est passé. Pendant plusieurs années, il ne s'est rien passé. Je n'ai pas eu de troubles particuliers, pas de boulimie. Je n'étais toujours pas anorexique. C'est revenu, cependant.
- Speaker #0
Excuse-moi, je te coupe, mais comment tu qualifierais ton comportement alimentaire durant ces années-là ? Parce qu'il n'y avait pas de crise. Du coup, si j'ai bien compris, tu n'étais pas non plus dans une anorexie. Mais j'ai du mal à imaginer que tu étais...
- Speaker #1
plongeuse,
- Speaker #0
libre et tu vois.
- Speaker #1
Non, je me pesais toujours, j'avais des phases restrictives, des phases un peu moins restrictives avec de la prise de poids. Quand je prenais du poids, je n'étais pas très bien. On connaît tous le fameux chiffre sur la balance qui va un peu mettre le... le ton, enfin qui va faire en sorte que soit tu es de bonne humeur pour ta journée, soit tu es complètement déprimé. Donc ensuite on s'est séparé et après je me suis retrouvé en colocation. C'était super chouette, mais par contre à ce moment là, donc j'avais... quel âge j'avais ? Je devais avoir 25-26 ans. Et je me suis retrouvée à...
- Speaker #0
Je ne sais pas comment c'est arrivé. Je faisais du sport, je sortais beaucoup, je m'amusais beaucoup. J'avais vraiment un lâcher prise au niveau de la vie. Je ne me posais pas de questions. Je sortais, j'allais travailler, je faisais du sport. Vraiment, j'avais une vie. J'ai fait des voyages, mais il y avait toujours ce petit côté. Et si je perdais du poids, est-ce que je ne serais pas encore plus heureuse ? Est-ce que je ne serais pas mieux ? Est-ce que la vie ne serait pas plus légère ? Et j'ai fait des phases de restrictions qui ont forcément généré des compulsions. Et ces compulsions, elles étaient de plus en plus importantes. C'est-à-dire que là, j'ai vraiment commencé à entrer dans... Je prends tout ce qui passe dans le frigo. Je pouvais passer du sucré au salé, aux crêpes qui étaient dans le congèle, je passe au micro-ondes. Après, je repasse sur de la brioche avec du lait. Et après, je mangeais des grosses quantités en peu de temps, sans vraiment savoir. À ce moment-là, je ne savais pas encore que j'étais... Jusqu'à 25-26 ans, je ne savais pas que j'étais dans de la boulimie et même dans des troubles du comportement alimentaire tout court. Pour moi, c'était... Je n'arrivais pas à gérer, j'avais besoin de manger. Et après, bah... Il fallait que je me fasse vomir. Et là, par contre, j'ai vraiment commencé à me faire vomir et je me faisais vraiment vomir. Voilà. Et je me suis dit, mais ce n'est pas possible. Il faut que je trouve une solution pour arrêter de manger comme ça et de me faire vomir. Ce n'est pas possible. Et donc, j'ai... Je me suis mise à fumer. Voilà, je me suis mise à fumer régulièrement en me disant, si je fume, je vais arrêter mes compulsions. Donc, en fait, je me suis créée un autre problème en essayant d'éviter un problème. Et finalement, ça n'a rien réglé.
- Speaker #1
Oui, en gros, je ne mange pas assez. Donc, j'ai un... comment dire, une alerte physiologique et psychologique normale qui fait me jeter sur la bouffe. Ah non, c'est chiant de me jeter sur la bouffe. Non, je ne vais pas manger plus. Ce que je vais faire, je vais plutôt fumer. Donc, je continue de ne pas manger assez, je fume.
- Speaker #0
Voilà, c'est ça. À ce moment-là, je n'ai pas trouvé autre chose. Je fumais de temps en temps, mais c'était vraiment soirée. Mais voilà, du coup, je me suis dit, bah...
- Speaker #1
Excuse-moi, c'était pour éviter les crises, c'est ça ? C'était pour te passer l'envie de manger ? Oui,
- Speaker #0
exactement.
- Speaker #1
Et ça a fonctionné ?
- Speaker #0
Ça a fonctionné au début. Et évidemment, comme tu t'en doutes, ça n'a pas fonctionné sur le long terme. Mais si ça marchait, je pense que ça se saurait. De toute façon, ce n'est certainement pas à faire. ça n'a pas été une bonne chose pour moi.
- Speaker #1
Et aujourd'hui, tu fumes toujours ou pas ?
- Speaker #0
Oui, j'ai repris la cigarette. J'avais arrêté pendant quatre ans, j'ai repris il y a un an.
- Speaker #1
Ok.
- Speaker #0
J'aimerais beaucoup arrêter, mais j'ai du mal à arrêter. Mais là, du coup, ce n'est pas par peur de faire des crises, c'est parce que j'ai trop... C'est encore trop tôt. Donc, c'est fragile.
- Speaker #1
au niveau psychologique et je ne reste pas prête je pense que c'est important aussi de se dire qu'il faut choisir ses combats et puis il ne faut pas oublier que tout ça ce sont aussi des béquilles que ce soit les troubles alimentaires, la consommation de tabac si tu enlèves toutes les béquilles d'un coup tu risques de t'effondrer Ok, donc t'as tenté ce... En fait, j'en rigole, mais on est bien d'accord que ça n'a rien de drôle. Mais voilà, ça me fait sourire parce que ça fait écho à plein de choses que j'ai connues aussi. Et puis en plus, il y avait plein d'idées. Moi, quand j'étais plus jeune, on a à peu près le même âge, il y avait quand même l'idée que la clope, ça brûlait des calories, tu vois. Il y avait un peu un truc comme ça. Et puis ça avait un côté coupe-fin.
- Speaker #0
Oui, c'est vrai. C'est vrai. Oui.
- Speaker #1
Je pense que beaucoup de femmes sont mises à fumer pour ça.
- Speaker #0
Et puis, attention, si tu arrêtes de fumer, tu vas grossir.
- Speaker #1
Mais oui.
- Speaker #0
Insupportable.
- Speaker #1
Mais oui, tellement. OK. Et du coup... Comment ça s'est passé par la suite pour toi ? Est-ce qu'il y a eu d'autres phases ? Est-ce que c'est ce que tu vis toujours aujourd'hui ?
- Speaker #0
J'ai continué à faire des crises, des vraies crises de boulimie qui étaient espacées, mais j'ai continué comme ça depuis plusieurs années. Ensuite, ça s'est arrêté pendant, on va dire, ça s'est arrêté de 30... De 30... Non, de 28 ans. De l'âge de 28 ans à 30... À 35. À 34-35 ans. On va dire.
- Speaker #1
C'est pour quoi ?
- Speaker #0
Non, je te dis des bêtises de... Attends. En gros, de l'âge de... Je ne sais plus compter. J'avais quel âge en 2020 ? De 28 à 32 ans. Ok. Pendant 4 ans, ça s'est arrêté. J'ai fait beaucoup de sport. Du coup, j'ai compensé en allant à la salle. La muscu a toujours pareil ce rapport au corps, le physique à atteindre, au niveau musculaire. J'étais toujours quand même à la recherche d'avoir le moins de graisse possible. Mon objectif, c'était quand même de réussir à... perdre de la masse grasse, pas forcément du poids mais de la masse grasse, en mangeant beaucoup de protéines, fromage blanc 0%, toujours en utilisant un maximum les féculents. C'est très bien que ce n'est pas la solution aujourd'hui, mais à l'époque je ne m'étais pas suffisamment renseignée, mais j'étais toujours dans cet objectif d'avoir un corps le moins gras possible.
- Speaker #1
Oui, en fait, le problème, ce n'est pas les infos que tu avais prises à l'époque. C'était ton objectif, en fait. Je pense que c'est ça. Parce que le truc, c'est que tu peux traverser 50 années, tu vas voir qu'un coup, on te dira qu'il faut manger sucré. Un coup, on te dira non, non, surtout pas, il faut manger gras. Un coup, parce que c'est vraiment ça. Moi, je me souviens très bien, petite, que ce qui était diabolisé, c'était le gras. Et aujourd'hui, c'est le sucre. Donc, peu importe, ce qui fait que tu te retrouves... balader dans tous les sens avec tout ça, c'est ton objectif. Et ce que j'entends dans ton histoire, c'est que finalement, même les moments où il y avait des pauses de symptômes, les symptômes se faisaient moins bruyants, en réalité, l'obsession, elle, elle était toujours là.
- Speaker #0
Toujours.
- Speaker #1
Et c'est à ça qu'on mesure un trouble alimentaire. Bien sûr que les symptômes sont importants, mais en fait, avoir sa vie pourrie par tout ça, et mettre toute sa valeur... Et son estime de soi uniquement sur son corps, c'est terrible, même si on ne fait pas de crise, même si en apparence, on a un poids normal, tu vois.
- Speaker #0
Complètement.
- Speaker #1
Et c'est ça que j'entends finalement dans ton parcours, c'est qu'il y a eu des phases qu'on pourrait qualifier de semi-guérison, mais qui pour moi n'en sont pas vraiment. Elles sont déguisées, en fait, les symptômes sont à bas bruit, quoi.
- Speaker #0
Oui, entièrement d'accord. Ah oui, oui, je... C'est obsessionnel. Même si c'est en dormance à certains moments, ça reste obsessionnel puisque j'y pense tout le temps. Et même dans des moments où je ne me pesais pas, je ne sais pas, par exemple pendant deux, trois mois, j'avais un stress énorme à l'idée de me peser un matin en me disant, allez, histoire de voir où j'en suis. Un stress pas possible. Une angoisse, en fait, presque. En me disant, comment je vais réagir ? Si je vois tel chiffre, je vais être déprimée, ça va m'angoisser, il va falloir que je perde du poids. Enfin vraiment, ça a toujours été très compliqué. Et du coup, ça a duré quelques temps et après est arrivé le Covid. Pourquoi le Covid ? Parce que j'ai eu le Covid en janvier, en février 2021. Et en fait, en janvier de cette même année, je m'étais dit, allez, je me reprends en main. J'en rigole. Je perds du poids intelligemment, mais il faut que je perde du poids parce que je sais trop. Le jeu sur la balance ne me plaisait toujours pas. Et donc en février 2021, j'ai attrapé le Covid qui était assez virulent. J'ai été presque un mois arrêtée. J'avais beaucoup de symptômes. J'étais très essoufflée, je ne pouvais faire aucun sport, rien du tout. Et j'avais du mal à respirer. J'avais aucun problème au niveau de mes constantes, tout était normal. Néanmoins, c'est comme si mes côtes n'arrivaient pas à se soulever. J'étais hyper faible, mais vraiment c'était très compliqué. Du coup, je ne pouvais plus faire de sport et j'avais plus faim. Donc je me suis dit, c'est normal avec la fièvre et tout, la fatigue, tu es faible, tu n'as pas faim, mais c'est normal. Quand tu es malade, tu... perd un peu l'appétit. Sauf que la faim n'est jamais revenue. La sensation de faim n'est jamais revenue. Et dès que je mangeais un peu, je me sentais comme si j'avais mangé un plat énorme alors que j'avais mangé un verre de soupe. Donc petit à petit, j'ai perdu un peu de poids. Forcément. Je n'étais pas voulue. Là, pour le coup, c'était vraiment... Je n'y arrivais pas, je n'avais pas faim. La cuisson de la viande, l'odeur de la viande me dégoûtait. Alors que je mangeais les blancs de poulet. Voilà, après, tu vois, le souci, le souci. Là, la viande, ce n'était plus possible. J'arrivais plus. C'était du pain grillé, de la purée, un peu de yaourt, un peu de fromage blanc. et des petits fromages frais, des choses qui étaient faciles à manger, avec très peu de mâches finalement, et ça a duré comme ça des mois. Je pouvais manger la même chose tous les jours. De la purée, du pain grillé, un petit peu de poisson, un petit peu de fromage, et en fait j'ai perdu progressivement du poids, sauf que 1 kg... peut-être 1 ou 2 kilos par mois. Certes, ce n'est peut-être pas beaucoup, mais sur un an, deux ans, tu fais le calcul, ça fait une vingtaine de kilos en moins au final. Et donc, je me suis retrouvée déjà, donc en 2021, à la fin de l'année, j'avais perdu une dizaine de kilos. Donc forcément, je partais d'un poids où j'avais un peu de gras, j'étais musclée, donc j'ai perdu du muscle. Donc je n'étais pas encore maigre, tu vois. J'avais un physique, un beau physique de sportive qui fait du yoga. J'avais pris du yoga, j'avais arrêté la muscu, je m'étais mise au yoga suite au Covid. Et donc, du coup, j'avais un physique qui ressemblait plus à une danseuse, qui commençait à ressembler à plus féminine, on va dire. C'est ce qu'on… bien que quand on fait de la muscu, on reste féminine.
- Speaker #1
Oui, oui, mais j'entends un beau corps, plus féminine.
- Speaker #0
Voilà.
- Speaker #1
J'aurais plutôt envie de dire un corps qui correspondait aux normes du moment.
- Speaker #0
Exactement,
- Speaker #1
c'est plutôt ça.
- Speaker #0
À la fin de cette année, avec mon ex-conjoint, on voulait avoir un enfant. Et je prenais la pilule, donc j'ai décidé d'arrêter la pilule. Et mes règles ne revenaient pas. Et elles revenaient tout le temps, d'habitude. Donc j'ai... Je m'inquiétais et je suis allée voir ma gynéco qui m'a fait une batterie d'examen. Et elle m'a dit, là j'ai découvert que j'avais le syndrome des ovaires polycystiques.
- Speaker #1
D'accord.
- Speaker #0
Donc ça, ça a été un coup de massue pour moi. Je ne m'attendais pas du tout. Parce que dans ma famille, toutes mes cousines, mes tantes, toutes les figures féminines, n'ont jamais eu... Dès qu'elles voulaient avoir un enfant, ça a mis plus ou moins de temps. Mais en tout cas... ça s'est fait naturellement et moi du coup gros coup de massue je me suis dit mais qu'est-ce qui se passe en plus je ne prends pas de poids par rapport aux critères aux symptômes du SOPK je ne me retrouvais pas particulièrement dedans donc j'ai accusé le coup mais bon j'ai continué ma vie et donc je suis rentrée dans le protocole avec ma gynéco où ... J'ai commencé à prendre le dufaston pour le déclenchement des règles. Parce que j'avais toujours mes règles avant. Avant de prendre la pilule, je n'avais jamais eu de problématique vis-à-vis de ça. Du coup, j'ai commencé avec dufaston. Je vais la faire très courte. En un an, je suis passée du dufaston aux injections avec Ovicam. Et à l'issue des injections, on m'a dit, de toute façon, si vous voulez avoir un enfant... il faut passer par la fibre. On n'a pas été jusque-là parce qu'avec Ovitrel, j'ai fait une surstimulation au baril. Ce qui fait que je me suis sentie extrêmement mal. J'ai été presque à avoir de l'eau dans l'estomac. J'étais vraiment au plus mal et j'ai cru que je devais aller aux urgences. Et les effets de cette surstimulation ovarienne ont fait que je ne pouvais plus rien manger. Donc encore une fois, problèmes, on va dire, de santé, là, je ne peux plus manger. Je ne pouvais manger que de la compote. Dès que je mangeais 2-3 cuillères de compote, c'est comme si j'avais bu 1 litre d'eau, tu vois. Je pense que c'est un peu comme ça. C'est un peu le ressenti peut-être des personnes qui font une slive où, dès qu'ils vont boire 3 gorgées d'eau, c'est terminé. Le repas est fini. Moi, c'était un peu pareil, finalement. L'eau poussait l'estomac et je me sentais pleine tout le temps. Ça a duré trois semaines, un mois, comme ça. J'ai continué à reperdre du poids. Et forcément, indirectement, le fait de voir le poids descendre sur la balance, ça me faisait un peu plaisir. Je me disais « mince, je suis mal » . Mais d'un côté, j'étais contente de voir que le poids baissait sur la balance en mangeant comme je mangeais. Et donc là, ça a redéclaré. Et en fait, c'est à partir de ce moment-là que les symptômes, les troubles sont partis en flèche. Donc c'était en 2022. Et de 2022 à 2023, j'ai alterné boulimie, anorexie, boulimie. des phases de boulimie, j'en avais toutes les semaines, plusieurs fois par semaine. Parfois, je prenais aussi des laxatifs. Quand je voyais que forcément le microbiote était en PLS, et quand je voyais que c'était compliqué, je prenais des laxatifs. J'étais mal et en même temps, je me sentais bien parce que je me sentais vide. Un côté soulagement. Moi, j'étais... Et donc, après, je me... Enfin, voilà, c'était... J'alternais, je faisais beaucoup de vélo d'appartement. Je faisais une heure, une heure et demie de vélo tous les jours. Je me levais à 5h du matin avant le petit déj pour faire mon...
- Speaker #1
Mais il n'y a jamais un professionnel de santé autour de toi qui t'a parlé de troubles alimentaires ?
- Speaker #0
À ce moment-là, je savais que j'avais des troubles du comportement alimentaire, mais je... Je n'avais été voir personne. Je voyais que mon médecin généraliste quand j'avais besoin pour diverses raisons. Mais c'est vrai que jamais mon médecin généraliste m'a orientée à l'époque, il n'y a pas si longtemps, vers un professionnel. Vraiment, c'était...
- Speaker #1
Ou même, tu vois, poser des questions parce que ce que tu expliques avec la gynéco... Je suis quand même hyper surprise. Tu avais quand même beaucoup maigri. On peut imaginer que tu étais sous ton poids d'équilibre et que tu étais potentiellement en aménorée hypothalamique.
- Speaker #0
Exactement. Mais j'ai eu une prise en charge catastrophique pour te dire que, par exemple, on m'a même dit, et c'est très choquant, mais de toute façon, le problème, ce n'est pas votre conjoint, c'est vous. Vous ne vulez pas. Donc, c'est vous le problème.
- Speaker #1
Allez, c'est bien. C'est un joli petit parcours de femme. Les garçons, ils n'aiment pas les grosses. Oui, mais les garçons, ça va les ennuyer si tu ne manges pas au resto. Oui, mais là, madame, le problème, ce n'est pas monsieur, c'est vous parce que... Non, mais l'enfer.
- Speaker #0
L'enfer, déjà, c'est vrai qu'en plus, quand tu n'as pas tes règles, moi, ça m'a mis un coup en tant que femme. Je me suis dit, mais en fait, je ne fonctionne pas normalement. Je ne suis pas capable d'avoir un enfant normalement. Non, c'est... L'estime de moi, elle était à moins 10 000. Elle était à moins 10 000.
- Speaker #1
Et personne ne t'a orientée. En fait, personne ne t'a demandé comment tu manges, est-ce que tu es à ton poids de forme, est-ce que dernièrement tu as perdu beaucoup de poids ? C'était son job aussi d'aller sur cette piste-là parce qu'en fait, c'est quand même ultra fréquent, la ménorrhée hypothalamique.
- Speaker #0
Jamais. À aucun moment j'ai... J'ai eu trois gynécologues différentes parce que du coup, entre le moment où j'ai été diagnostiquée avec le SOPK et où je suis passée aux injections, j'ai changé de service en fait. Donc j'ai eu trois suivis qui se sont enchaînés avec trois gynécologues différentes. Et à aucun moment on m'a parlé du poids, à aucun moment on m'a parlé du fait que je n'avais pas mes règles et pourquoi je ne les avais pas. Et en fait, quand tu parles de la ménorée hypothalamique, J'en ai pris conscience. Je me suis dit que c'était peut-être ça. Il n'y a pas longtemps, en faisant mes propres recherches.
- Speaker #1
Alors que si tu avais été une femme en surpoids, ne t'inquiète pas qu'on t'aurait parlé de ton poids. Tu n'arriverais pas à avoir d'enfants. Et ça aurait été même ça le problème. On t'aurait juste dit de maigrir pour avoir des enfants. Donc, ça montre juste le niveau de grossophobie de la société et du personnel soignant quand même.
- Speaker #0
C'est clair. C'est clair que là, je n'ai jamais eu aucune remarque. Donc, j'étais en totale errance médicale. Je ne savais pas où aller. Enfin, vraiment, ça a été horrible. Ça a été horrible.
- Speaker #1
Et du coup, on fait un petit bond en avant. Ça, c'était finalement il y a deux ans, quoi ?
- Speaker #0
C'était jusqu'en 2022, fin 2022. Et après, j'ai dit stop. Je ne veux plus de traitement, je ne veux plus entendre parler des traitements hormonaux, tout ça. Je fais une pause, mon organisme, il n'en peut plus. Mais par contre, effectivement, jusqu'en 2023, je suis restée dans mes troubles du comportement alimentaire. Voilà, c'était très, très, très, très fort. Et je suis descendue en... juillet 2023, 42 kg. Là, c'était mon poids. Vraiment, là, j'ai jamais été aussi bas en poids. Et à ce moment-là, en fait, je m'étais séparée avec mon ex. On s'est séparées. Donc, il y a eu une rupture à ce moment-là. Et je me suis dit, Caroline, tu peux pas continuer à avoir un poids qui descend. C'est pas possible. Tu vas pas tenir. Tu te sépares. Il y a beaucoup de formalités, beaucoup de démarches. Il y a un déménagement qui va être à prévoir. Tu n'as pas le droit de continuer à te détruire la santé. Tu ne tiendras pas et tu ne peux pas te permettre d'aller à l'hôpital, d'être hospitalisé. Voilà. Donc, du coup, j'ai essayé de me remettre un petit peu à manger, des petites choses. Parce qu'on se doute bien que... Enfin, comme tu dois te douter... Un gros bol de salade, ça paraît énorme pour quelqu'un qui mange beaucoup, qui est anorexique. Donc j'ai commencé à relanger un petit peu, mais ça a été très difficile. Et vis-à-vis de l'entourage, ça a été très difficile aussi. Quand je suis descendue à ce point-là, ce qu'il faut savoir, c'est que ma famille n'était pas du tout là, puisque j'étais à 900 km de... J'étais en Haute-Savoie. Et là, actuellement, je suis en Bretagne et j'ai de la famille en Bretagne. Enfin, sur toute la côte atlantique, en fait. Donc, ils ne me voyaient pas trop, tu vois. Et quand je suis allée les voir suite à ma séparation, donc en été 2023, là, je voyais les regards qui en disaient long, en fait. Et ça a été difficile parce que je ne voulais pas... Je voulais pas que mes proches ressentent de la pitié ou qu'ils aient de la peine. J'avais pas besoin de ça, en fait. J'avais juste besoin qu'on me dise, à la limite, on te fait confiance, on sait que tu es consciente de ton anorexie, de ton poids. On va pas t'embêter avec ça, on va pas te dire « faut que tu manges plus de ceci, plus de cela » . Parce que ça, le « tu devrais manger tel aliment, mange plus, tu vas grossir » , forcément, c'est des paroles qui ne marchent pas du tout. Bien au contraire, moi, ça m'a bloquée plein de fois sur ces dernières années. Je veux dire, mais t'as juste à manger, en fait. Mais c'est aussi simple que ça. D'ailleurs, il y a un... Une anecdote qui me revient en tête, c'est quand j'étais chez ma maman. Quelques jours en vacances, elle avait organisé un repas chez elle. Elles savaient qu'au niveau alimentation, c'était compliqué pour moi. Il y avait des aliments que je ne voulais pas et que je ne pouvais pas manger parce qu'au niveau de la digestion, tout simplement, c'est compliqué. Il faut pouvoir réhabituer son estomac, remanger certains types d'aliments. Il y avait aussi des plats qui m'angoissaient énormément. Elle m'a dit que j'allais inviter la famille. Je fais une partie flette. Et là, on me met en angoisse. Je me suis sentie angoissée mal, rien qu'à l'odeur du fromage fondu et des lardons. C'est ce genre d'événement où ça a été très compliqué. L'entourage, sans vouloir me faire du mal, ça a été pesant. Il y a eu des moments très compliqués.
- Speaker #1
Et aujourd'hui, comment ça va toi avec ton corps, l'alimentation et comment ça va aussi ? Avec ton entourage, quelles sont tes relations avec ta famille aujourd'hui ?
- Speaker #0
Alors, je ne fais plus de crise. Mon regard au corps est toujours compliqué. En fait, je ne m'aime pas du tout. Je suis consciente que je suis encore en sous-poids. Je mange normalement. J'essaie vraiment d'avoir des repas. équilibré même si des fois j'ai tendance à bouder les protéines voilà à retourner dans certains plats un peu doudou mais voilà je fais en sorte de ne pas perdre de poids j'ai du mal à prendre du poids mais par contre je n'en perds pas je ne fais plus de crise pour l'instant je dis pour l'instant parce que je ne sais pas de quoi l'avenir est fait mais en tout cas voilà je suis contente de ne plus faire de crise Et j'apprends à relanger des protéines, à refaire des repas un peu plus complets. Et ma famille est au courant, j'en parle de manière très libre. À mes tantes, à ma mère, mes cousines, j'en parle beaucoup. Je n'ai pas de tabou avec ça. Je pense que c'est important de le dire, d'exprimer. ce qu'on ressent, ce qu'on a vécu, pour que les autres aussi puissent essayer de au moins comprendre ou essayer. Et j'ai déjà même partagé certains reportages, certains podcasts, parce que des fois, je n'avais pas forcément les mots pour expliquer ce que je pouvais ressentir ou comment je me sentais à tel moment dans ma vie. Et le fait de te dire, écoute ce podcast, tu vas... Tu vas entendre ce que j'ai ressenti à tel ou tel moment de ma vie. C'était un moyen pour moi d'expliquer à mes proches ce que j'avais pu vivre.
- Speaker #1
Ok, et tu les sens à l'écoute de ça et dans l'envie de comprendre.
- Speaker #0
Oui. Ma mère, par exemple, qui ne connaissait strictement rien, elle ne savait pas ce que c'était les TCA, petit à petit, je lui expliquais certaines choses. Et maintenant, elle comprend. elle comprend. Et j'ai pareil de la famille, eux, ils me demandent, ils me disent « Tiens, est-ce que ça, tu peux le manger ? Est-ce que si je fais tel plat, ça te va ? » Il y a des plats que je ne vais pas, si on dit en une raclette, là aujourd'hui, tu vois, je vais manger la pomme de terre, mais si on me demande un plat, une tarte à la tomate, par exemple, ou un poisson avec un… des féculents, des légumes, quelque chose d'un peu plus équilibré, je vais choisir ça. Mais une tartiflette ou une raclette, c'est encore un peu tôt pour moi.
- Speaker #1
Oui,
- Speaker #0
mais j'entends ton discours.
- Speaker #1
Tu viens de dire un truc plus équilibré. Est-ce qu'un plat peut être équilibré à lui tout seul ? Est-ce que l'équilibre alimentaire, il ne passe pas par des dizaines et des dizaines de plats qui, tous réunis, créent un équilibre ? Parce que si tu ne mets que des plats de salade, Poisson-légumes, salade-poisson-légumes, ce n'est pas de l'équilibre alimentaire. Salade-poisson-légumes, raclette, gâteau, fruits, là, on arrive plutôt dans l'équilibre. Mais c'est marrant, ce truc de plat équilibré. Ça ne veut rien dire, en fait. Un plat ne peut pas être à lui seul équilibré.
- Speaker #0
C'est encore du travail.
- Speaker #1
Mais je me demandais justement, est-ce que tu es accompagnée par un ou des professionnels actuellement ?
- Speaker #0
Sur ça, non, pas pour l'instant. Par contre, je sais que c'est un point important. Il va falloir que je m'y penche parce que justement, je pense que j'ai besoin d'aide encore pour être encore plus sereine face à tout ça. Même si honnêtement, je ne me prive de rien. Quand j'ai dit équilibrer, c'est un peu bizarre parce que s'il y a un petit gâteau sec qui traîne un gâteau ou quelque chose que j'aime, un carré de chocolat, je ne vais pas me gêner pour le... prendre et je vais pas culpabiliser tu vois c'est plus la peur d'avoir mal au ventre d'être ce que j'ai je pense au niveau intestinal j'ai un microbiote encore très qui est pas encore bien remis de tout ça même pas du tout et il ya des des aliments que j'ai du mal à manger j'ai pas encore confiance en mon corps donc Mais c'est vrai que je ne suis pas accompagnée. J'y pense quand même pour continuer à aller mieux. Parce que clairement, je suis encore dans la restriction. À certains moments de la semaine,
- Speaker #1
même de la journée. Mais oui, et puis en fait, je sais que ça peut faire peur, mais ça peut être tellement libérateur. Je pense qu'il ne faut pas que tu aies peur aussi de tester et de t'autoriser à dire « Ah non, ce ne sera pas cette personne-là » et d'aller en voir une autre. Mais d'avoir ce regard, cette écoute professionnelle et cet appui, tu vois, qui va pouvoir te donner des petits exercices, des choses hyper concrètes. Et à la fois, tu vois, les tout petits pas. Je sais que je travaille beaucoup avec l'idée de faire des petits pas. Et je sais que je suis... pas la seule que j'ai plein de consœurs qui travaillent aussi comme ça et c'est trop bien parce que tu vois c'est à ça que je pense quand tu parles de je sais pas du plat par exemple la raclette quoi où tu dis ah non et puis j'aurais peur d'avoir mal au ventre bah ouais en même temps les aliments qu'on évite complètement de notre alimentation ne sait plus les digérer tu vois au bout d'un moment et du coup ça peut passer par aller ok ce soir là c'est raclette je fais en sorte d'avoir mon plat à côté par contre Je vais goûter une demi-pomme de terre avec un tout petit peu de fromage fondu dessus. Et bim, j'ai fait ce pas-là. Je suis quand même rassurée parce que voilà. Mais je réhabitue mon corps à digérer. Je vois comment ça se passe. Enfin, tu vois, ça peut passer par toutes petites choses, mais qui sont déjà, qui peuvent être de beaux défis, en fait. Oui,
- Speaker #0
c'est clair. C'est ce que je fais un petit peu au quotidien, tu vois. Une petite tarte au poireau. Enfin, c'est avec... Oui. bon alors parce que du coup dans la tarte au poireau mais que je n'ai pas faite moi-même mais elle me faisait envie c'est un magasin bio elle me faisait envie mais je savais très bien que je n'arriverais pas à la manger je ne pourrais pas la manger en entière et je me suis dit j'en prends un petit bout, je fais mon repas et voilà j'en prends un petit bout à chaque fois comme ça je m'habitue aussi effectivement et ouais c'est vrai que d'avoir aussi un professionnel ta compagne. Et c'est vrai que ça pousse aussi, ça permet d'aller plus vite dans le chemin de la guérison et du fait d'être sereine, d'avoir confiance en soi. Tu parles de libératie, mais je pense que oui, c'est ça. Et j'avais, je rebondis sur ça, j'avais contacté, quand j'étais en Haute-Savoie, des professionnels de la nutrition, mais spécialisés dans les TCA. Oui. et j'avais eu des refus. En fait, ils étaient déjà, ils ne prenaient plus de patients. Et en fait, j'en avais contacté trois ou quatre et c'était porte fermée, en fait. Pas parce qu'ils ne voulaient pas me prendre en charge, mais parce qu'ils ne pouvaient pas, en fait. Et de là, après, j'ai lâché l'affaire. J'ai lâché l'affaire en me disant, je verrai plus tard. Je vais plus tard. On est en mars. Oui.
- Speaker #1
Mais je comprends que ça puisse être un peu coupé dans ton élan. Je comprends complètement. Parce que c'est déjà... En fait, on n'imagine pas, mais ça, peu importe la demande de soins, peu importe le pourquoi, quand on se met en mouvement vers une démarche de soins et qu'on passe le pas d'aller contacter des professionnels déjà en soi, je trouve que c'est énorme. Et du coup, c'est compliqué quand en face, ça ne répond pas forcément.
- Speaker #0
Ouais, c'est ça.
- Speaker #1
Il y a une question qui m'est venue que je ne pose pas d'habitude, mais je ne sais pas pourquoi j'avais envie de te la poser. Est-ce qu'il y a des choses que tu ferais différemment avec le recul, quand tu regardes ton parcours ? Qu'est-ce que tu aurais potentiellement envie de réécrire dans ton histoire ?
- Speaker #0
C'est une excellente question. Pour le parcours, uniquement dans le cadre des troubles du comportement alimentaire ? Non,
- Speaker #1
pas nécessairement. Je pense que de toute façon, tout est tellement lié que...
- Speaker #0
Ouais, ben, je ne sais pas trop. Je pense que ça serait... Je ne sais pas si j'y arriverais. Mais en tout cas, le conseil que je me donnerais... c'est de ne pas laisser les autres, les parents, la famille, les proches, les inconnus, de ne pas laisser les autres m'influencer dans ce que je peux penser de moi et ne pas me sous-estimer. Voilà, vraiment ne pas me laisser influencer par les remarques des autres. pour, voilà, si je me sentais bien, effectivement, à un moment, ne pas laisser les personnes, les paroles. C'est facile à dire.
- Speaker #1
C'est clair, surtout que je vois de quoi tu parles et que là, on parle de la plus grande influence qui est aux parents. Enfin, je veux dire, tu vois, ça vient de ta maman. Donc, bon, son influence, c'est une personne adulte à qui on donne beaucoup de pouvoir quand on est enfant, adolescent. Et puis, en plus de ça... ta maman, donc la zone d'influence elle est énorme, mais en même temps je me dis c'est chouette parce que ce conseil que t'aurais envie de donner à la toi du passé je pense que tu pourrais encore te le donner aujourd'hui, tu vois c'est exactement ça et justement en parlant de la toi du passé j'aime bien aussi poser cette question parce que même si le parcours n'est pas encore terminé pour toi, il y a quand même eu plein de choses, plein de mouvements et t'as certainement appris plein de choses sur le parcours qu'est-ce que t'aurais envie de transmettre à des personnes qui nous écoutent et qui sont peut-être là où tu étais à un autre moment dans quelque chose qui ressemble à ce que la toi du passé a vécu alors
- Speaker #0
moi ce que je je crois que le plus important le plus important pour moi et c'est ce que je veux dire ... C'est de surtout ne pas se sous-estimer, ne pas perdre confiance en soi. Et peu importe le parcours, on n'a pas à se sous-évaluer, se dévaluer. Et de toute façon, il faut garder espoir. Il y a plein de belles choses à venir. Et vraiment, les troubles du comportement alimentaire, il faut... Il faut les combattre et se dire que la vie est plus belle sans... Vraiment, rester douce avec soi-même. Et peu importe ce qui se passe, qu'il y ait des crises, pas de crise, qu'on reste bienveillante avec nous-mêmes. Bienveillante et bienveillant. Il y a plus de femmes que d'hommes qui sont touchés par les TCA. Mais vraiment, qu'on soit douce avec nous et tolérante. Et que si parfois on n'y arrive pas, ce n'est pas grave, il ne faut pas s'incriminer parce que déjà, le fait d'être encore dans ces troubles, c'est déjà difficile. Donc, ce n'est pas la peine d'en rajouter. Ça, c'est vraiment important. Et c'est ce que je me dis. C'est ce que je dis à des personnes à qui je parle aussi, qui sont dans des troubles de comportement. J'ai eu l'occasion de parler avec certaines personnes et vraiment, c'est une des choses que je dis le plus. Sois tolérante avec toi.
- Speaker #1
Je trouve que le principe d'autocompassion, c'est quelque chose dont on ne parle pas assez, qui peut paraître un peu gnangnan, bisounours ou je ne sais quoi. mais qui est vraiment super important et ça permet aussi de prendre conscience du tyran intérieur qu'on a en nous. Alors encore plus quand on souffre de TCA, je veux dire. Et déjà, d'en prendre conscience, ça permet potentiellement de le mettre un peu à distance, d'observer cette façon de se parler et de se dire, mais attends, tu parlerais comme ça à ta meilleure pote ? Tu parlerais comme ça à ton enfant ? Tu parlerais comme ça à ta mère, ta grand-mère ? Et du coup, d'être un peu plus dans, ok. qu'est-ce que je dirais là à ma meilleure amie ? Je viens de faire une crise. Et si c'était ma meilleure pote qui venait de faire une crise, qu'est-ce que je lui dirais ? Je suis complètement d'accord avec toi, c'est super important. Difficile à mettre en place, mais loin d'être impossible. Et en fait, ça peut aussi devenir tranquillement une nouvelle habitude.
- Speaker #0
C'est ça. Et c'est vrai que quand on est touché par les TCA et qu'on découvre en fait ça, on se dit qu'on est la seule personne à avoir ça, la seule personne à avoir ce type de comportement, de faire semblant de manger, de cracher ce qu'on a mangé dans la serviette, de ne pas que ça se voit. Et en fait, maintenant, on est tellement nombreux à avoir les mêmes idées. C'est de se dire qu'on est humaine et qu'on n'est pas seule à avoir connu ça.
- Speaker #1
Il y a beaucoup de monde qui en souffre, mais il y a beaucoup de monde qui en sort aussi.
- Speaker #0
Voilà, c'est ce que je voulais dire. Il y en a beaucoup qui en sortent et c'est possible.
- Speaker #1
Trop chouette. Écoute, un grand merci pour ton témoignage. J'ai envie de dire à cœur ouvert parce que c'est comme ça que je l'ai ressenti. t'as livré beaucoup de choses et c'était vraiment chouette de pouvoir échanger avec toi donc merci, merci, merci pour les auditorices qui nous écouteront merci,
- Speaker #0
c'était un grand plaisir d'avoir échangé avec toi et le temps est passé super vite oui,
- Speaker #1
ça fait toujours ça merci beaucoup en tout cas. Un grand merci à toi qui est encore là à la fin de cet épisode comme je te le dis souvent Ton soutien est super important, c'est même ça qui permet au podcast d'exister encore aujourd'hui. Alors, si mon contenu t'apporte de l'aide, d'une quelconque manière que ce soit, sache que tu peux m'en redonner à ton tour. Pour ça, il y a plusieurs façons de faire. Tu peux tout d'abord partager le podcast, en parler autour de toi, à tes proches, mais aussi à des professionnels. Tu peux laisser 5 étoiles, notamment sur Spotify ou Apple Podcast, ou laisser ton meilleur commentaire. Mais depuis peu, j'ai aussi apporté une nouveauté qui te permet de me soutenir encore plus concrètement avec de l'argent. Effectivement, tu trouveras en description de cet épisode un lien qui te permettra de faire un don à la hauteur de ce que tu trouves que ce podcast t'a apporté. Merci, merci beaucoup. C'est grâce à ton soutien que ce travail va pouvoir continuer. Je te souhaite de prendre soin de toi autant que ce sera possible et je te dis à très bientôt sur un nouvel épisode. Ciao !