- Speaker #0
Et je tiens à ce que ma parole soit apolitique en fait. Pour moi, l'économie sociale et solidaire aujourd'hui, c'est le terreau qui invente l'économie de demain. Et ça m'a donné déjà ce virus d'un petit peu de l'entrepreneuriat social parce que c'est ça Emma Hussin, c'est vraiment un réseau d'entrepreneurs sociaux hyper innovants qui font des miracles avec des bouts de ficelle. Les grandes innovations, les grands changements, ça n'arrive pas du jour au lendemain. Mais il faut y croire,
- Speaker #1
ça c'est sûr. patient et convaincu.
- Speaker #2
Et si on décryptait ensemble la recette du courage ? Bienvenue dans The Patronne.
- Speaker #1
Aujourd'hui, je reçois Maud Sarda. Maud est une femme forte et engagée qui n'a pas peur de se battre pour les causes qui lui sont chères. Militante, tu es la cofondatrice de Label Emmaüs, qui est la première marketplace française de réemploi solidaire. Tu réinventes le e-commerce depuis près de 10 ans pour en faire un outil d'inclusion. de justice sociale et de transition écologique. Tu es très active sur LinkedIn. Je suis très heureuse de t'avoir aujourd'hui pour cet épisode de The Patron. Bienvenue, Maud.
- Speaker #0
Merci, Elvire. Je suis très heureuse d'être là aussi.
- Speaker #1
Je suis très, très contente de t'avoir parce que je suis super curieuse. On se connaît depuis pas mal de temps et je t'ai vu évoluer dans ta prise de parole. Peut-être pour le reste de notre communauté, est-ce que tu peux, en quelques mots, nous expliquer ton parcours professionnel ?
- Speaker #0
On a fait la même école, toi et moi. On a fait une école de commerce à Nice, l'EDEC. Et avant ça, j'ai grandi en Guadeloupe. Je fais un petit peu des allers-retours dans mon enfance entre le sud de la France et la Guadeloupe, mais je suis née à Pointe-à-Pitre. J'ai fait mon collège en Guadeloupe, mon lycée en Guadeloupe. Je suis arrivée pour mes études en métropole à 18 ans. J'ai commencé par une prépa à Montpellier. Et puis donc l'EDEC à Nice. Après ces études, j'ai dû faire un choix un petit peu raisonné en termes de travail, de première expérience professionnelle parce que j'avais fait un prêt pour payer l'école.
- Speaker #3
Elle était très très chère cette école.
- Speaker #2
Elle l'est encore plus maintenant, mais c'était déjà beaucoup.
- Speaker #0
Et donc j'ai mis cinq ans à rembourser mon prêt étudiant et je l'ai fait en travaillant chez Accenture. Donc, cabinet de conseil américain qui a bien grossi encore depuis. Alors, ce n'est pas fait tout ce choix par hasard quand même d'Accenture. Ce n'était pas juste un choix financier. C'est aussi parce que c'est un cabinet qui a du mécénat de compétences développé, très développé depuis longtemps, avec une fondation très active qui d'ailleurs aujourd'hui est beaucoup aux côtés de la Belle Emmaüs. Et donc, j'avais ma petite idée en tête. je me disais Et quand j'aurais fini de rembourser mon prêt, j'essaierai de partir avec la Fondation Accenture en mission de mécénat de compétences pour renouer un peu des contacts avec le milieu militant de l'engagement. Parce que j'avais déjà été pas mal bénévole avant pendant mes études, pour essayer de trouver une passerelle et partir dans ce monde professionnel de l'engagement où j'ai toujours voulu être. Et c'est ce qui s'est passé. J'ai réussi à me libérer des missions de consulting classiques pour partir avec la fondation pendant une petite année. Et puis, j'ai rencontré Emmaüs sur mon chemin. Ça a été un vrai coup de foudre. Et ça fait 17 ans maintenant que je suis dans le mouvement Emmaüs. Et plus spécifiquement depuis 10 ans, j'ai créé la belle Emmaüs, la coopérative la belle Emmaüs.
- Speaker #1
Donc, ce que j'entends, c'est que quand tu as choisi de devenir consultante... très très grand cabinet, en réalité, t'avais quand même fait un choix qui était basé sur tes valeurs. Tu avais identifié que ce cabinet pourrait correspondre pour notamment ces différents engagements.
- Speaker #0
J'en ai même parlé pendant mon entretien d'embauche, dis-toi. Donc, j'ai eu quand même du bol de tomber sur un manager dans mon entretien d'embauche sensible aux mêmes causes que moi. Parce que ça aurait pu me griller tout de même. Quand il m'a demandé vraiment mes motivations à rejoindre Accenture, j'ai dit ce que tout le monde disait, évidemment, grand cabinet, tout ça, tout ça. mais j'ai dit voilà que je Je pensais que c'était vraiment un élément extrêmement différenciant d'avoir cette fondation. Et c'est vrai qu'à l'époque, franchement, c'était une des seules entreprises à avoir des programmes de mécénat de compétences à ce niveau-là. Et je pense que ça l'est encore. Ils ont 5 000 jours hommes à peu près de consulting offerts au monde associatif. Donc, c'est vraiment très important. Et ça a marché. Je suis tombée sur quelqu'un qui a trouvé que c'était un argument de poids.
- Speaker #1
Super. Et du coup, est-ce que tu peux peut-être expliquer ce que c'est vraiment le mécénat de compétences ? C'est-à-dire que, donne deux, trois exemples de ce que tu as pu faire.
- Speaker #0
Oui, alors pour le coup, moi, j'ai fait une mission long terme. J'étais à l'Agence Nouvelle des Solidarités Actives. C'est une sorte, un petit peu de cabinet de conseil pour les collectivités locales. Et à l'époque, j'ai aidé des départements dans la mise en œuvre du RSA ou de politique sociale d'insertion professionnelle. Mais vraiment, il peut avoir tout type de mission. Ça peut être des missions courtes comme plusieurs mois. Et donc, il y a plusieurs entreprises qui l'ont mis en place. Le mécénat de compétences, c'est vraiment des durées quand même un peu longues. Normalement, plusieurs semaines, plusieurs mois où on est payé par son entreprise, mais on est mis à disposition gratuitement dans le secteur associatif. Et l'entreprise a une déduction fiscale, un reçu fiscal, comme s'il donnait de l'argent. Finalement, c'est un petit peu la même chose. Ils donnent des compétences. Il y a aussi ce qu'on appelle le bénévolat de compétences pour tous ceux qui aimeraient donner un petit peu de leur temps. Il y a des plateformes comme Comit, par exemple. Nous, la Belle Emmaüs, les missions de bénévolat, on les met sur cette plateforme-là, nos besoins. Et voilà, ça peut être juste une journée par an sur des missions très spécifiques, notamment pour être formateur dans les écoles qu'on a créées.
- Speaker #1
Donc Comit, c'est O-M-I-T ?
- Speaker #0
Non, K-O-M. de Zoté. Avant, ça s'appelait Vendredi. La plateforme Vendredi.
- Speaker #1
Commit, on mettra le lien. Et donc, mécénat de compétences, rencontre avec Emmaüs, début d'aventure avec Emmaüs et d'un seul coup, tu décides de disrupter le monde associatif. Comment ça se passe l'idée de Labelle Emmaüs ?
- Speaker #0
Oui, alors c'est pas venu tout de suite. C'est vrai que déjà, passer d'accenture à Emmaüs, c'est... Ça n'a pas été une mince affaire tout de même. Donc, c'était tellement différent comme univers professionnel. J'ai déjà passé 4-5 ans à la tête de réseau Emmaüs France, qui fédère en fait les 300 structures juridiques Emmaüs. Elles sont toutes autonomes juridiquement, les structures Emmaüs. C'est assez particulier comme organisation. Et donc, moi, j'étais en fait référente au niveau national pour une centaine de structures, qui sont des structures d'insertion, des entreprises d'insertion, des chantiers d'insertion. Donc pendant 4-5 ans, j'ai sillonné la France. Après avoir beaucoup voyagé dans le monde pour Accenture,
- Speaker #1
j'ai visité le Loiret, des contrées vraiment insoupçonnées de la France.
- Speaker #0
Et voilà, j'accompagnais ces structures dans leur quotidien, leurs difficultés comme leurs projets. J'ai rencontré des gens formidables, les héros du quotidien. Et ça m'a donné... Déjà, ce virus, en fait, un petit peu de l'entrepreneuriat social, parce que c'est ça Emmaüs, c'est vraiment un réseau d'entrepreneurs sociaux hyper innovants qui font des miracles avec des bouts de ficelle. J'ai pris conscience à ce moment-là ce qu'était l'entrepreneuriat, vraiment, grâce à Emmaüs. Je n'ai jamais eu envie d'entreprendre avant. Jamais je ne me serais crue capable de faire ça, franchement. Quand je faisais des études en école de commerce, pourtant est censé quand même insuffler cette envie-là.
- Speaker #1
Plus aujourd'hui qu'à notre époque quand même. Les spécialisations entreprendre étaient peu nombreuses.
- Speaker #0
C'est vrai qu'on en parlait peu, effectivement. Mais en tout cas, moi, c'est vraiment Emmaüs qui m'a donné ce virus-là d'entreprendre.
- Speaker #1
C'est surprenant, excuse-moi, mais je n'aurais pas imaginé qu'une implication dans des associations... Vous voulez dire entrepreneuriat ?
- Speaker #0
Eh oui, moi, ça a été la grande révélation quand j'ai découvert le monde des maus et plus largement celui de l'insertion professionnelle. On a vraiment une vision faussée de cet univers-là. On le voit comme un monde sous perfusion des subventions, avec de l'occupationnel, des boulots, voilà. Donc c'est bien, c'est gentillet, heureusement que c'est là. Ce n'est pas vraiment du business. Ce n'est quand même pas avec ça qu'on va relever la France, industrialiser, s'attaquer à des grandes innovations. Au contraire, c'est tout l'inverse que j'ai rencontré. C'est quoi l'entrepreneuriat ? C'est vraiment une prise de risque. C'est la capacité à inventer des modèles économiques qui n'existent pas encore. C'est savoir innover, mais aussi socialement, écologiquement. Pour moi, l'économie sociale et solidaire, aujourd'hui, c'est le terreau qui invente l'économie de demain. C'est le seul endroit où on est en train de développer une économie qui peut concilier un business model avec des limites planétaires et de l'inclusion sociale. C'est pour moi le seul endroit où vraiment on a cette innovation-là. Voilà, donc moi, c'est ça qui m'a donné envie d'entreprendre.
- Speaker #1
Et du coup... L'idée de créer une plateforme de e-commerce. Tu voulais concurrencer Amazon. Là,
- Speaker #0
c'est vrai que de là à arriver au e-commerce, il y a un petit pas. Bon, alors ça, c'est cette aventure un peu folle quand même, on peut le dire. Parce qu'il y a dix ans, avant que je lance vraiment concrètement Label Emmaüs, comment j'en arrive à ce constat ? En fait, en accompagnant les structures Emmaüs, je m'aperçois qu'il y a un maillage quand même sur les territoires qui est incroyable. Aujourd'hui, Emmaüs, c'est 550 points de vente partout en France. Et encore, je ne parle que d'Emmaüs. Si je rajoute toutes les ressourceries, si je rajoute tous les points de la Croix-Rouge, du Secours catholique, c'est des milliers de points de dépôt et de vente partout en France. Et face à ça, il n'y avait rien en ligne. Mais il y a 10 ans, Amazon avait déjà 15 ans. Le Boncoin avait déjà presque 10 ans. Donc, en fait, on était quand même en retard déjà à cette époque-là, quelque part. Donc, moi, c'est un petit peu ce... Ce sentiment d'urgence à faire quelque chose en ligne pour Emmaüs qui m'a poussé à proposer un projet Emmaüs France. Mais alors une fois qu'on a dit ça, pour toute personne qui est allée dans un bric-à-brac Emmaüs, et encore dix ans plus tard, c'est la même chose, il n'y a pas de code barre sur les produits. Donc faire du e-commerce en code barre, c'est un peu compliqué pour gérer des stocks, pour faire du SAV, voilà. En fait, le e-commerce, on ne peut pas y aller comme ça. On ne peut pas y aller sans respecter le délai de rétractation de 15 jours, sans avoir un SAV qui... Déjà, c'est légal. Et puis, Amazon a fixé les standards du service client. En fait, on ne peut pas arriver juste en disant « Allez, c'est solidaire, soyez sympa. » Non. Voilà. Donc, la solidarité, c'est la cerise sur le gâteau. Il faut vraiment avoir un service optimal déjà pour commencer. Donc, avec des personnes qui ne maîtrisent pas forcément le français, l'informatique, sans code barre, la plupart du temps, franchement, sans système informatique, il n'y a quasiment rien. Quand il y a un tableau Excel, c'est un petit peu le bout du monde. En tout cas, il y a dix ans, c'était ça. Donc, c'était un peu fou, franchement. Je pense que même en interne, chez Emmaüs, la majorité pensait qu'on n'y arriverait jamais. Que les compagnons n'en étaient pas capables. Et on a fait les choses les unes après les autres. Les grandes innovations, les grands changements, ça n'arrive pas du jour au lendemain. Mais il faut y croire.
- Speaker #1
Ça, c'est sûr. Il faut être patient et convaincu.
- Speaker #0
Oui. Un peu acharné. Un peu illuminé quand même par son projet. Je pense comme... Toute personne qui entreprend, il faut d'abord y croire soi-même contre vent et baril.
- Speaker #1
Donc, tu lances Labelle Emmaüs et après, tu lances une école. C'est ça, juste trois ans après ?
- Speaker #0
Oui, c'est ça, deux ans même en fait. Finalement, c'est arrivé assez vite l'école. Labelle Emmaüs a vu le jour fin 2016, le site. C'est allé extrêmement vite, mais après, quand on s'est lancé, on était tout petit. Fin 2016, on ouvre un site où il y a 3000 produits à vendre. Donc c'était quand même... Mais si on avait attendu que tout Emmaüs s'y mette, on ne se serait jamais lancé. Donc on a commencé avec ceux qui voulaient bien mettre en ligne quelques produits. Et je vais te dire, sur les 3000 produits, il n'y en avait que 1000. qui était expédiable à domicile. Parce que ceux qui avaient bien voulu participer au projet m'avaient dit « Ok, on va faire des photos de produits, on va les mettre en ligne. » Mais il est hors de question qu'on fasse des colis. Les gens,
- Speaker #1
ils se déplacent dans les magasins pour venir chercher les produits.
- Speaker #0
« Ok, vas-y, mets juste les produits en ligne, on verra plus tard. »
- Speaker #1
Tu as fait du click and collect avant l'heure.
- Speaker #0
Voilà. Petit à petit, ils ont compris que faire du e-commerce, c'était faire des colis et tout le monde s'y est mis. Aujourd'hui, il y a 2 500 000 produits sur le site.
- Speaker #1
2 500 000 ?
- Speaker #0
Oui, effectivement, ça n'a rien à voir en termes de volume. Et il y a de tout. Au début, on s'est lancé, il y avait de Moulin à café, de Dame Jeanne, etc. Aujourd'hui, il y a des livres, il y a de la mode, il y a de l'high-tech reconditionné. On peut acheter son smartphone, son ordinateur reconditionné sous garantie. Mais oui ! donc c'est voilà Petit à petit, ça a pris de l'ampleur. Mais il y a des choses qui étaient là dès le début, comme réussite, on va dire, et qui nous ont inspirés pour créer l'école. Dès le début, on a senti que ça avait un effet assez dingue sur les gens qui participaient à l'activité. Il y avait un épanouissement, en fait, des personnes sur cette activité à vraiment gérer eux-mêmes leurs propres... petites boutiques en ligne, choisir les produits, prendre le temps de chercher la cotation sur internet, faire des photos de produits de qualité. Et la montée en compétences se faisait tout naturellement par l'amour de ce qu'ils faisaient au quotidien. C'était très enthousiasmant ce qui se passait sur le terrain. Et donc ça, ça nous a donné envie de tirer le fil de la compétence, de la formation. Parce que sur un CV, un compagnon chez Emmaüs a un goût l'aime qui dit « j'ai fait de la vente en ligne sur Label Emmaüs, bon, ça ne va pas suffire » . En revanche, ce compagnon, s'il peut aller dans un programme de formation de six mois intensif avec un diplôme reconnu par l'État à la clé, qui a une équivalence Bac plus 3, donc c'est ça qu'on remet aujourd'hui, c'est un diplôme de chef de projet e-commerce. Là, on commence à rentrer un peu dans la cour des grands. Et quand ce diplôme permet de rentrer en master en marketing digital, c'est ce qu'on fait là depuis septembre, on propose notre propre master en marketing digital. On peut quand même aller jusqu'à un bac plus 5 sur des métiers d'avenir, dans n'importe quelle entreprise. C'est ce défi qu'on a voulu relever en créant une première école dans le 93. Et puis, on en a ouvert une deuxième à Marseille l'année dernière et tout récemment à Roubaix. Et maintenant, on est lancé, on veut créer une école par an. C'est notre projet. On cherche des partenaires publics, privés qui ont envie comme nous de mailler le territoire de ces écoles-là. Des écoles qui, juste en quelques chiffres, comme quoi personne n'est inemployable. C'est faux. il faut vraiment voir les choses autrement. Il y a des potentiels, du talent chez des personnes qui n'ont peut-être jamais travaillé, sont peut-être bénéficiaires du RSA, sont dans des quartiers prioritaires. Nous, 80% des apprenants, ils viennent des quartiers prioritaires. Ils sont bénéficiaires du RSA. Ils n'ont pas fait d'études. Ils ont tout juste le bac pour la plupart. En six mois, ils décrochent un bac plus trois. Et ensuite, ils rentrent dans un master sur des métiers digitaux. possible. C'est qu'une question d'apprentissage, d'accompagnement, d'état d'esprit, de changer les regards aussi, la plupart du temps d'ailleurs, c'est surtout ça. Et de donner confiance aux gens. Les compétences, franchement, tout le monde peut acquérir des compétences quelles qu'elles soient, que ce soit technique, digitale, peu importe. En revanche, la confiance en soi, ça, ça ne viendra pas tout seul. Et donc nous, on met autant d'énergie. à faire venir des professionnels pour former les personnes, techniquement parlant, que faire venir des coachs, faire de la prise de parole, l'estime de soi, etc. On travaille tout autant cette partie-là, qui est évidemment la plus importante.
- Speaker #1
C'est fou quand je t'entends, j'ai plusieurs pensées, et j'en ai une notamment qui est, en fait, rien ne t'arrête. D'abord, tu crées un site e-commerce. qui est quand même un business. On a un peu l'idée que tout le monde peut créer un site Internet. Et en réalité, oui, tu peux faire un petit peu de Etsy à droite à gauche. Tu peux même créer ta plateforme assez facilement. Mais derrière, gérer vraiment des stocks, une plateforme logistique, c'est d'une très grande complexité. Il y a beaucoup de barrières à l'entrée. Tu attaques cet éléphant, tu t'en sors et tu attaques un deuxième sujet qui est l'éducation. Parce que là, ce que tu as créé, ce que vous avez créé, ce n'est pas seulement une formation. Tout le monde pourrait créer une formation, mais là, tu as créé une vraie école avec des diplômes qui sont reconnus par l'État. C'est d'un point de vue administratif. toutes les étapes que vous avez dû valider. Pour moi, c'est une montagne. Qu'est-ce qui te donne le culot de te dire, bah, oui, on peut le faire ?
- Speaker #0
Je pense que c'est vraiment la rencontre avec Emmaüs, parce que d'avoir découvert qu'il existait un endroit dans ce monde, il y en a plein d'autres, mais en tout cas, j'en ai découvert un, où c'était possible de créer de la valeur. économique, financière, sur les territoires, avec des produits que les gens ne veulent plus, avec des personnes que la société considère comme inemployables. Eh bien, je me suis dit, oui, c'est possible, en fait. C'est possible, sans forcément parler de caritatif, sans forcément... Il faut absolument sortir des cases qu'on nous impose. Et en fait, la performance écologique, la performance sociale... peut aussi s'associer à des modèles économiques qui sont sobres. C'est possible, ça existe. Donc cette découverte m'a donné une certitude, oui, effectivement que tout est possible. Et après, c'est savoir aussi bien s'entourer. Donc j'ai des personnes dans mon équipe. qui sont experts en calliopie et toutes ces choses administratives extrêmement complexes dans la formation professionnelle. Moi-même, je serais bien incapable de le faire. En e-commerce, j'ai su aussi aller chercher des personnes qui sont expertes dans ces domaines-là, des entreprises aussi partenaires. Beaucoup d'entreprises font du mécénat de compétences pour nous, viennent nous apporter leur soutien de cette façon-là. Il faut aussi être dans la coopération. ne pas penser que c'est soi-même, seul, dans son modèle, qu'on a toutes les réponses. Je crois beaucoup à des modèles hybrides, à la rencontre du monde économique classique avec celui de l'associatif traditionnel et avec le soutien de la puissance publique, évidemment. Donc, je pense que peut-être ce mélange d'Emmaüs et puis de la coopération.
- Speaker #1
C'est comme si tu avais vraiment explosé. Les barrières mentales et qu'aujourd'hui, tu te dis, tout est possible. Oui,
- Speaker #0
c'est un peu ça. À vrai dire, je suis assez convaincue que ce sont les barrières mentales qui sont les plus difficiles. Ce n'est pas les dossiers, ce n'est pas les modèles économiques, ce n'est pas les compétences techniques. C'est vraiment les barrières mentales. Et c'est pour ça aussi que je suis beaucoup dans la prise de parole, puisque c'est ça que j'attaque dans la prise de parole, les barrières mentales. j'essaie de faire tomber certaines barrières ou de modifier les regards sur le recrutement, sur l'autre, sur l'avenir, sur les nouveaux imaginaires, sur d'autres rôles modèles, etc. Donc c'est ça que j'attaque dans mes prises de parole.
- Speaker #1
Alors justement, ta prise de parole, parlons-en, parce que tu as une prise de parole qui est très courageuse, engagée, militante, rien que ce matin. T'as interpellé directement notre premier ministre actuel. Nous sommes le 15 octobre. Donc celui du 15 octobre.
- Speaker #0
Peut-être que pendant qu'on parle... On ne sait pas.
- Speaker #1
On ne sait pas. On verra. On verra les infos. Donc tu as ce culot réellement d'interpeller, de critiquer, de t'insurger. Tu te dis militante. Tu n'as pas toujours été. cette grande voix presque clivante pour certains. Est-ce que tu peux nous partager comment ça s'est passé pour toi la prise de parole ? Qu'est-ce qui t'a donné le courage de prendre la parole, le courage, l'envie, le besoin ? Raconte-nous un peu cette découverte de ta voix.
- Speaker #0
Oui, alors c'est finalement quand même assez récent donc... Je pense que c'est très affirmé depuis deux, trois ans, pas plus. Et sinon, avant, ça a été un long processus de prise de confiance, évidemment en soi, mais aussi de réaliser l'état, je pense, dans lequel notre société est, et l'urgence tout de même d'agir. Je pense que je n'étais pas spécialement quelqu'un qui avait très confiance en elle. En tout cas, quand j'étais jeune, je te disais tout à l'heure que même à l'EDEC, je me souviens que je pouvais être assez complexée. Je ne me trouvais pas au niveau du milieu, par rapport au milieu d'où je viens. Je trouvais que c'était jamais assez futé, ce que je pouvais dire. J'étais pas assez bien, je sais pas. Pas assez tout court.
- Speaker #1
Souvent, c'est ce qu'on se dit. Tu peux arrêter la phrase là, je suis pas assez.
- Speaker #0
Tout simplement. Mais pourtant, je me sentais déjà assez différente. Et cette différence-là... J'y croyais comme quelque chose de positif. Cette différence-là, elle pouvait générer du complexe et en même temps, ça ne m'a pas fait dévier d'où je voulais aller. Donc à l'EDEC, j'étais investie dans l'association humanitaire, j'en ai été coprésidente. Pour bien paraître, je n'allais pas non plus être dans une autre association. Pour moi, c'était la seule qui avait du sens, donc j'étais dans celle-ci. Et puis ensuite, quand tout le monde quand même était beaucoup dans des choix de carrière, oui, je suis allée chez Accenture. Alors sur le papier, c'était quand même plutôt une des voies un peu royales. Bon, à la dernière mensualité de mon pré-étudiant, je suis partie. Et j'ai quitté définitivement ce chemin tout tracé en faisant des sacrifices financiers quand même pas anodins. Et donc, je pense que petit à petit, j'ai pris confiance aussi dans cette différence. Et puis après, une fois chez Emmaüs, ça a été encore différent. Je me suis sentie encore parfois... Pas vraiment à ma place, où là aussi, il y a eu des regards que j'ai ressentis, en tout cas jugeants, parce que je venais d'une école de commerce, parce que je venais d'Accenture, parce que... Tous ces clichés-là. Et en fait, je crois que j'ai vécu autant de clichés d'un côté que de l'autre. Et je suis restée ferme dans ma volonté de cheminer sur une ligne de crête, finalement. et petit à petit je me suis à la fois de débarrasser des jugements sur moi, mais aussi de jugements sur les autres, en me disant, c'est pas parce que les gens sont bourgeois qu'ils sont forcément méchants. C'est pas parce que les gens sont dans l'associatif qu'ils ont toujours raison. Et en fait, en se libérant aussi un petit peu comme ça de ces postures, vraiment, on peut innover, en fait, on peut créer. On peut prendre une parole qui peut peut-être toucher un peu plus largement les personnes. Moi, mon propos, c'est de prendre une parole qui va parler d'intérêt général. Pour moi, ça, ça ne fait pas partie d'une classe sociale spécifique. Ça ne fait pas partie d'un bord politique spécifique. Et je tiens à ce que ma parole soit. apolitique en fait. J'interpelle le Premier ministre X comme ça pourrait être le Premier ministre Y, peu importe à vrai dire quel soit son bord politique, si à un moment donné on a une puissance publique qui à mon sens ne va pas vers l'intérêt général pour lequel je me bats avec beaucoup de personnes tous les jours, je le dis. Et donc c'est clivant mes prises de parole mais en même temps je réfléchis Merci. toujours beaucoup à comment ça peut venir toucher au cœur et à l'esprit aussi, parce qu'il y a de l'émotion, mais il y a aussi des chiffres, il y a aussi des choses très construites en termes d'observatoire. Ça peut toucher au cœur et à l'esprit de n'importe quelle personne, en fait. Et si possible, des personnes qui sont aussi en position de pouvoir, de pouvoir politique, de pouvoir financier, de pouvoir économique. pour faire bouger la façon de voir les choses, le regard. Et ces personnes ont les moyens, vraiment les moyens de faire que notre société crée une nouvelle histoire, une nouvelle aventure économique, sociale et écologique. C'est ça que je recherche en tout cas. Je ne cherche pas à dénoncer tel ou tel bord politique, financier, économique. Je cherche à réveiller ceux qui ont les pouvoirs d'agir.
- Speaker #1
En fait, quand tu parles là, tu es tellement alignée. C'est l'énergie que tu as est superposée et on sent que ça vient vraiment de tes tripes quand tu parles. Et ce qui me touche, c'est que c'est comme si cette mission te dépassait. J'ai l'impression, à t'entendre, que tu es tellement convaincue par cette mission que tu as et que tu veux tellement changer les choses, ou en tout cas faire en sorte qu'on arrête d'aller dans une direction que tu considères... négative et néfaste pour le bien commun, que tu es prête à tout donner, quitte à un peu te sacrifier ? Est-ce que tu te sacrifies au nom de ta cause ?
- Speaker #0
Je ne vois pas comment je pourrais faire autre chose, en fait. donc j'y arriverai pas même si non non je n'ai pas du tout l'impression de me sacrifier j'ai l'impression d'avoir énormément de chance franchement effectivement je me sens très alignée et ça je pense que c'est la plus belle des richesses effectivement mais c'est pas pour autant qu'il n'y a pas d'épuisement Ce n'est pas pour autant que l'équilibre perso, pro est respecté. Donc, ça se paye. Bien sûr, le coût peut en être élevé. Mais si je pouvais faire autrement, parfois, je le ferais. Je prendrais des vacances un petit peu. Mais je ne sais pas, je ne peux pas faire autrement. C'est plus fort que toi. Oui, c'est plus fort que moi. et après je... Je m'épanouis là-dedans aussi, à vrai dire. J'adore ça, le lobbying d'intérêt général, le militantisme, le plaidoyer. J'ai aussi l'impression qu'au quotidien, on fait des choses avec la Bélémahus, avec tous les partenaires qu'on peut avoir. Je suis aussi coprésidente des Licornes, avec Dehaut, qui est une alliance de coopérative qui montre qu'il n'y a pas que... que les licornes de la tech qui peuvent innover, et puis le monde de l'ESS au global. Et donc voilà, on est beaucoup, on est nombreux. Ça, ça donne une très très grande force. Et les enjeux sont tellement dingues. Enfin, encore il y a un jour, je lisais une étude scientifique sur les coraux. Là, on a atteint un point de bascule où les coraux sont en train de tous mourir, en fait. Ça sert à quoi de se lever le matin pour aller travailler dans une entreprise, je ne sais pas, basique, qui ne fait absolument rien pour prendre en considération ces limites planétaires-là ? En fait, c'est quoi le sens ? On est là pour quoi ? Et quand on a des compétences, quand on a de l'argent, quand on a fait de grandes études, quand on est dans des situations de pouvoir, mais on n'a pas le choix en fait. Pour moi, ça, c'est une responsabilité qui est encore supérieure. Et j'en appelle vraiment à ce que toute personne qui aujourd'hui a suffisamment d'argent et de pouvoir pour faire un petit pas de côté et s'engager vraiment à le faire.
- Speaker #1
Mais c'est dur. Très honnêtement, ce que tu décris là, moi, quand je t'entends, ça réveille chez moi un mécanisme que je connais très, très bien. Quand je suis dans une situation de stress, c'est l'autruche. C'est-à-dire que quand tu vois, quand je vois des images des plages de Bali remplies de plastique, quand je vois effectivement la barrière de corail en Australie qui ressemble presque plus à rien, quand je... Quand je vois des conflits armés dans un certain nombre de zones, les enfants... Mais bien sûr que j'aimerais agir à titre individuel, mais je me sens tellement impuissante que je me dis, je vais me lever, je vais aller faire mon travail et puis je vais avoir des problèmes complètement égoïstes, mais que je peux gérer. Tu vois ce côté un peu...
- Speaker #0
Mais je le comprends tout à fait. Moi, je ressens ça tous les jours.
- Speaker #1
Tu réagis différemment que moi.
- Speaker #0
Mais je ne sais pas. Parce que moi aussi, je me sens absolument poussière. Et c'est tous les jours que je me dis à quoi ça sert exactement finalement. Franchement, est-ce que je ne devrais pas plutôt me ménager, trouver un boulot qui me paye mieux, etc. Moi, je n'arrive pas à faire autrement parce que ça me rend heureuse ce que je fais. Et j'ai la chance de l'avoir trouvé, d'avoir trouvé un endroit où je m'épanouis à tout point de vue. Et d'ailleurs, d'un point de vue aussi challenge intellectuel, parce que c'est un modèle économique à trouver. Et moi, j'adore ça aussi. Finalement, je n'ai pas fait ces études pour rien. Mais peut-être que c'est aussi juste par des petites actions. Alors, ce n'est pas le truc du petit pas, mais c'est... Ce qui me nourrit, en tout cas, c'est d'être au quotidien aussi dans une entreprise avec des postes en insertion, avec des personnes qui vont venir travailler dans la Belle Emmaüs et pour qui ça va vraiment. faire quelque chose dans leur parcours, de passer par ces postes de travail. Donc en fait, ça peut être pas grand chose. C'est donner un peu de son temps comme bénévole ou par exemple pousser son entreprise à faire plus de diversité, d'inclusion dans les recrutements. Ne serait-ce que prendre quelqu'un en alternance. Tu vois, par exemple, on essaie de placer des alternants, nous, de notre école en marketing digital. Mais tout le monde a besoin de marketing digital. On n'arrive même pas à trouver des entreprises pour prendre des alternants. En fait, ne serait-ce que se battre un peu sur le recrutement, faire un peu de bénévolat de compétences, un peu de mécénat de compétences. Je veux dire, ce n'est pas ça qui va coûter énormément à une entreprise, faire un peu plus d'achats responsables. Et si tout le monde fait ça, oui, on fera vraiment bouger les lignes. Donc, c'est vraiment à la portée de chacun en tant que salarié. en tant qu'épargnant aussi, où est-ce que je mets mon argent ? Tu vois, par exemple, nous, on a 2500 sociétaires dans notre capitale et n'importe qui peut prendre une part du capital de la Belle Emmaüs. C'est 20 euros, c'est en ligne, ça se fait en quelques clics. Et ça, voilà, des coopératives comme ça, il y en a plein.
- Speaker #1
Donc, il y a plein de choses à faire. À son échelle, il y a plein de choses à faire. Bien sûr.
- Speaker #0
Et ça donne beaucoup de bonheur.
- Speaker #1
Excellent, excellent. Et quel conseil tu pourrais donner à une femme qui n'osent pas prendre la parole, qui ont peur des cons, parce qu'il y en a beaucoup dans la communauté The Patron qui se censurent un peu parce qu'on nous demande beaucoup d'être dans des postures, des postures managériales, dans un cadre qui ne va pas trop déranger. Toi, c'est quoi ton conseil pour elles ?
- Speaker #0
C'est sûr que je fais évidemment le constat que c'est compliqué en termes de... On n'est pas assez nombreuses, c'est clair, mais y compris dans les milieux militants. Ils n'ont pas toujours à donner de leçons sur la façon de traiter les femmes à des milieux économiques qu'ils critiquent souvent par ailleurs. Quel conseil je pourrais donner ? Déjà, de ne pas faire de complexe par rapport à des femmes qu'on peut voir prendre la parole, en se disant « elle, ça a l'air tellement naturel » . Je peux témoigner de ce syndrome de l'imposteur que j'ai beaucoup eu. voire qui est encore là assez souvent, y compris à des moments assez basiques. Mais en fait, la prise de parole, c'est que du sport, entre guillemets. Plus on en fait, plus on y arrive. Il faut vraiment démystifier le truc. Moi, au début, j'avais vraiment tout qui était noué à l'intérieur. C'était terrible. et petit à petit ça se dénoue, c'est naturel on sait faire vraiment le voir comme une discipline malheureusement, il faut se forcer peut-être les premières fois et en tout cas se dire que c'est vraiment à la portée de tout le monde et que des personnes qu'on voit comme ça, qu'on admire elles sont sûrement aussi très stressées et ça a sûrement été difficile aussi pour elles dans les premiers temps en tout cas moi c'était mon cas Hmm.
- Speaker #1
Donc la facilité que l'on constate aujourd'hui ne cache pas du tout tout un parcours d'apprentissage, une courbe d'apprentissage difficile.
- Speaker #0
Tout à fait. Et en tout cas, il faut le faire pour soi-même et pour toutes les femmes en général. et puis alors là à l'époque dans laquelle on est le danger plane sérieusement quand même sur le fait de voir les droits des femmes se rétrécir.
- Speaker #1
Tu le penses pour la France ?
- Speaker #0
En tout cas, ce qui est sûr, c'est que ce qu'on a pu voir aux Etats-Unis se passer, avec vraiment les géants de la tech et des propos extrêmement masculinistes, mais c'est la même chose sur la diversité, sur l'inclusion, qui sont devenus des mots interdits. des mots interdits Oui, bien sûr que c'est dangereux parce qu'ils ont la main mise sur le cerveau de milliards de personnes. C'est dangereux pour toute femme dans le monde. Et de nouveau, il ne faut pas se dire qu'est-ce qu'on est nous pour changer quoi que ce soit. Chaque femme, si elle en a la possibilité, doit prendre la parole.
- Speaker #1
Et puis, on l'a vu dans l'histoire d'autres pays, même en dehors des Etats-Unis, des femmes qui étaient libres qui aujourd'hui ne le sont plus du tout. Donc, gardons ça bien en tête et exprimons-nous, osons prendre la parole. On arrive au terme de cet épisode, un petit rituel de fin si on a le temps. Première question, si je t'offre un énorme panneau publicitaire dans Paris, tu peux écrire ce que tu veux, c'est ton message au monde. Qu'est-ce que tu aimais ?
- Speaker #0
Mon message au monde ? Agissez ! Je ne sais pas. Indignez-vous. Comme disait Stéphane Essel.
- Speaker #1
Je tiens à juste noter que tu es vraiment habitée par ton engagement. Quand on s'est retrouvées juste avant pour prendre un café, la première chose que tu m'as dit, c'est... Je suis en colère et c'était sincère et c'était pas agressif contre moi mais tu avais vraiment l'actualité qui t'anime, qui te pèse, qui t'agite. Donc en tout cas tu es très connecté à la fois à tes émotions et en même temps à tes valeurs et aussi au fait, ce que tu m'avais dit aussi, c'est que tu fais beaucoup de recherches, tu aimes les stats. Et donc ce ne sont pas des paroles en l'air. Quand tu t'indignes, en tout cas, ce n'est pas juste par esprit de provocation. C'est ce que je remarque.
- Speaker #0
Non, non, non. Il y a vraiment des choses, en fait. Là, par exemple, si je prends l'actualité sur le budget, il y a des chiffres qui ne peuvent pas faire autre chose normalement que de l'indignation, provoquer autre chose que de l'indignation, si je ne dois en donner qu'un seul. Il y a la Cour des comptes qui a remis un rapport dernièrement qui chiffre que l'ESS, donc l'économie sociale et solidaire, représente 14% de l'emploi privé en France et reçoit 7% des aides publiques aux entreprises. Dans l'esprit un peu collectif, on a l'impression que l'économie sociale et solidaire est sous perfusion des subventions. alors que dans la réalité Il y a un profond déséquilibre en termes d'aide avec les grandes entreprises. Moi, ces situations-là, quand il y a un chiffre comme ça, qui est très clair, c'est la cour des comptes, je pense que c'est quand même assez sérieux, et que ça vient percuter une espèce d'idée reçue, et puis derrière, il y a des vies qui sont en jeu. Là, le budget qui est présenté, il y a 20 000 postes d'insertion qui vont être supprimés en France. Ça représente 50 000 parcours d'insertion de personnes dans l'année qui passent par ces postes d'insertion. On va faire des économies de quelques millions alors qu'on est déjà dans une situation d'injustice profonde, alors que c'est une économie qui se bat pour l'intérêt général, ce qui est la mission de la puissance publique. Comment on fait pour ne pas s'indigner ?
- Speaker #1
Allez, dernière question et après on doit rendre le studio. Quel est le projet que tu n'as pas encore osé lancer mais que tu aimerais bien ? Si tu avais peur de rien, qu'est-ce que tu ferais demain ?
- Speaker #0
Alors, il y a quelque chose que j'aimerais beaucoup faire, mais qui est assez logique tout de même avec Label Emmaüs. J'aimerais beaucoup permettre aux particuliers de vendre des produits sur Label Emmaüs comme ils le font peut-être sur Vinted, Leboncoin, etc. Et donc leur proposer de venir vendre sur Label Emmaüs. plutôt que sur ces plateformes, de garder une partie pour eux, mais de verser une partie pour la solidarité. Je pense vraiment que ça pourrait fonctionner. Mais c'est un sujet qui est assez délicat à amener au sein des associations qui ont peur d'un mécanisme comme ça, qui serait un peu une concurrence aux dons traditionnels, physiques, qu'elles reçoivent. Et voilà, ça, c'est typiquement le genre de choses où il faut réussir à convaincre, en disant que la... La concurrence, ce ne serait pas parce que les gens vendraient sur la belle Emmaüs. La concurrence, elle est déjà là, elle est déjà bien installée. Et ce sont ces énormes plateformes de vente entre particuliers. Et puis, plus globalement, sur un autre sujet vraiment totalement différent, si je devais créer une autre entreprise, ce serait vraiment quelque chose de très industriel dans la transformation, dans la réparation, dans le reconditionnement. En fait, je créerai un label Emmaüs du reconditionné. Donc pas en ligne, je veux dire, mais vraiment un acteur industriel que j'associerai à des écoles de la réparation et du reconditionnement. Ça, ça m'intéresserait beaucoup d'attaquer le sujet industriel et de la formation associée.
- Speaker #1
Vous l'aurez compris, Maud n'a pas terminé de révolutionner le monde solidaire et éco. C'est vraiment incroyable, toutes ces initiatives. Et je suis sûre que les deux projets que tu viens de lancer vont avoir bientôt lieu. Merci infiniment, Maud, pour ton temps. Et à très bientôt sur The Patron.
- Speaker #0
Merci à toi d'être restée jusqu'au bout. J'espère que cet épisode t'aura plu, intrigué, inspiré. Et n'hésite pas à le partager.
- Speaker #1
Ainsi que de laisser une évaluation, un commentaire, ça aidera énormément le podcast à être plus diffusé. Merci et à très bientôt sur The Patron Podcast.