- Speaker #0
Bonjour et bienvenue à tous dans le podcast de Virage, je m'appelle Valentin Dechaux et comme toutes les semaines je suis en présence de Marina Blanchard. Marina va nous parler aujourd'hui de Louis, prénom d'emprunt. Louis a 19 ans, il a commencé l'université en septembre et va donc désormais affronter son premier vrai blocus. Le problème de Louis, c'est qu'il passe énormément de temps devant les écrans et qu'il a beaucoup de mal à s'y mettre.
- Speaker #1
Bonjour, vous écoutez le podcast de Virage, on vous donne des pistes. pour aller de l'avant, parfois à contre-courant. Je suis Marina Blanchard, psychologue, formatrice et fondatrice de Viral. Mon école s'inscrit dans la lignée de sel de Palo Alto, c'est la lune de la thérapie brève systémique.
- Speaker #0
Marina, Louis est venu te voir en étant stressée, parce que les examens approchent, et il a beaucoup de mal à s'y mettre à cause des écrans.
- Speaker #1
Tout à fait. Louis étudie l'économie et il... Il a une année un peu sabbatique, en fait. Il sort d'une année où il a voyagé après la fin de ses secondaires. Et donc, il se retrouve là à se dire qu'il faut qu'il s'y mette, mais à plonger aussi vite dans les écrans, que ce soit les réseaux sociaux, parfois des jeux aussi, des PS, je crois. Je ne suis pas une spécialiste. Et puis, voilà, des séries, etc. Et donc, effectivement, il se retrouve dans cette situation. Et je commence... pas à lui demander s'il a eu des difficultés avant, si c'est quelque chose qui s'est produit en secondaire, parce que ça me paraît toujours important d'aller voir quelles expériences passées aussi il a par rapport à ses blocus, même si, avec Palo Alto, on ne centre pas le questionnement sur le passé, c'est quand même toujours intéressant de savoir s'il a eu de la réussite avant, s'il a eu beaucoup d'échecs, dans quelle situation au niveau scolaire, sa relation...
- Speaker #0
Ça permet de nous cerner quelle est la nature du problème éventuellement.
- Speaker #1
Oui, c'est ça, exactement. Et donc il me dit qu'il a toujours réussi quand même assez facilement, sans trop devoir travailler, travailler un peu dernière minute. Et donc je lui dis, en fait, peut-être qu'on n'est pas encore à ces dernières minutes pour toi là maintenant. Il me dit, peut-être, mais en même temps, il y a un dicton ici à Louvain-la-Neuve, on est dans une ville universitaire, où ils disent à la semaine 10, donc la dixième semaine du trimestre, à la semaine 10, tu passes ou tu bisses. Enfin, tu bosses ou tu bisses, pardon. À la semaine 10, tu bosses ou tu bisses. Et donc, ça veut dire qu'il faut s'y mettre. Et donc, voilà, ça donne un limite. Et donc, pour Louis, elle est passée. Et donc, c'est un peu stressant de se dire, ben voilà, les autres ont l'air de tous commencer à travailler, à s'y mettre, etc. Et moi, je me retrouve à ne pas avancer parce que je perds ma journée. Donc, le matin, en fait, il se lève. Donc, je lui demande de me détailler un peu sa journée. Il se lève le matin vers 9-10 heures. Il se dit, je devrais m'y mettre. Donc, on n'est pas encore dans la période où ils ont congé pour étudier. mais il a quand même des heures de creux parce qu'il n'a pas cours tout le temps et donc il sait bien que pendant ces heures de creux il serait censé soit aller en bibliothèque mais il se dit je vais regarder un peu mes mails, mes messengers, mes messages et puis il est entraîné de réel,
- Speaker #0
de réel on sait comment ça marche même avec sa main on est capté par quelque chose on reste dessus dans le cas de Louis ce qui est intéressant c'est qu'il veut travailler Il veut réussir.
- Speaker #1
Il voudrait, oui.
- Speaker #0
Il voudrait, mais c'est plus fort que lui.
- Speaker #1
C'est ça, c'est ça, c'est plus fort que lui. Et du coup, voilà, j'essaye d'abord de le freiner quelque part, parce que je me rends compte qu'il a quand même toujours réussi sans s'y mettre à l'avance, et que donc, je lui dis un peu, mais pourquoi tu t'y mettrais tout d'un coup à l'avance ? Et j'essaye que lui me motive vraiment pourquoi il s'y mettrait, parce que je trouve que c'est intéressant. pour lui en fait d'avoir un moteur interne à s'y mettre et que ce soit pas les autres qui lui disent ou parce que les autres s'y mettent ou parce que ses parents ont dit oh là là c'est l'université c'est pas la même chose qu'avant il faut que tu travailles et donc je trouve que c'est important que lui me dise bah voilà bah oui je trouve que je devrais m'y mettre pour être plus cool après j'ai pas envie d'être dans le stress etc.
- Speaker #0
Mais c'est comme tout le monde le responsabilise déjà sans doute autour de lui et d'un peu lui renvoyer la balle.
- Speaker #1
C'est ça et moi je veux pas être celle qui lui dit bah oui oui tu dois t'y mettre parce qu'en fait tout le monde le lui dit Merci. Donc je trouve que ça ne sert à rien, enfin si ça avait servi à quelque chose, il s'y serait mis, donc voilà. Et donc lui, ce qu'il fait quelque part, c'est qu'il se dit, et pour moi c'est là sa tentative de régulation, c'est un peu subtil, c'est, il se dit je dois m'y mettre, mais il ne s'y met pas, et donc je vais lui proposer ceci, en fait d'abord je vais lui demander, pour toi Louis, qu'est-ce qui serait ok le matin à toute réveille ? Tu trouves que tu devrais t'y mettre direct ? Ou bien est-ce que tu t'accordes un temps d'ordinateur, de série, de jeu, de ce que tu veux ? Et il me dit... Il me dit... que le matin, je regarde mes messages, ça me paraît logique et tout ça, mais je ne devrais pas dépasser une demi-heure. Or, exactement comme tu disais tout à l'heure, c'est un quart d'heure, une demi-heure, et puis finalement, il est passé la matinée, tout d'un coup, il est 11h30, il se dit, ça vaut plus la peine que je m'y mette avant qu'on mange. Il ne s'y met pas. Et la journée est vite passée. Exactement. Et donc, je lui demande un peu ce qui serait OK pour lui, et il me dit, en fait, une demi-heure, ce serait OK, que je me détende un peu avant de commencer à m'y mettre, mais après, je devrais commencer. Je dis ok, donc ça veut dire que tu devrais... commencer à quelle heure, il me dit 10h. Il me dit si à 10h je commence, maintenant on n'est pas encore quand même juste à laver l'examen, ça me permettrait déjà de rentrer dans la matière et tout ça, parce que pour l'instant il ne fait rien. Et donc, je dis bon, ok, ben on va faire, je vais te proposer une expérience, parce que tu as toujours réussi en travaillant tard, donc je ne sais pas si aujourd'hui, c'est peut-être parce que la larme ne sonne pas encore assez fort dans ta tête, ok, elle sonne pour les autres, mais pour toi manifestement pas, donc... je vais te proposer comme expérience, on va se revoir dans 15 jours, et en attendant, pendant ces 15 jours, soit à 10h tu t'y mets, et c'est ton choix, soit tu t'y mets pas, parce que peut-être justement, la motivation elle va en avoir assez grande, tu me l'as défendu tout à l'heure, puisqu'il m'a donné quelques arguments, tu t'y mets, voilà, manifestement quand même le matin, tu t'y mets quand même pas, et donc, je vais te demander de te poser, de voir à 10h, tu t'y es mis, si tu fais au moins jusqu'au midi, Alors après, tu fais ce que tu veux l'après-midi. Tu vas sur Internet, tu regardes tes séries, tu fais exactement ce que tu veux. Si tu fais rien, si tu vois qu'entre 10h et midi, parce que vraiment ces deux heures-là sont importantes, si tu fais rien, c'est ces deux heures-là qui vont être notre jalon, pour savoir si ça crie assez fort à l'intérieur de toi pour être motivé. Si tu fais rien entre 10h et midi, c'est pas grave, mais alors tu ne fais rien pendant trois jours. Donc ça veut dire qu'on va commencer demain. demain tu t'y mets à 10h puisque tu me dis que c'est une heure ok, tu fais deux heures, et soit que tu les as faits, et tu fais ce que tu veux l'après-midi, et le lendemain tu recommences, soit que tu ne les as pas faits, et c'est que ça ne crie pas assez, et donc interdiction de toucher à aucun cours pendant trois jours, et tu vas comme ça répondre quelque part à cette partie plaisir qui est à l'intérieur de toi, parce que souvent c'est l'image que je prends aussi, c'est qu'en fait il y a une partie sérieuse, et consciencieuse, qui lui dit tu dois travailler, et l'autre partie... qui lui dit, allez, profite encore, ça va, et tu vas t'en sortir. Et donc, il faut trouver une espèce d'équilibre.
- Speaker #0
On exploite les deux. Oui,
- Speaker #1
voilà, on exploite les deux, exactement.
- Speaker #0
Parce que le plaisir est plus grand, pour que le plaisir reste un vrai plaisir. C'est ça. Qu'il puisse en profiter, et qu'il arrête de venir s'entrechoquer avec la partie sérieuse. On est souvent noir ou blanc, et là, on peut évoluer dans une situation grise.
- Speaker #1
Oui, exactement.
- Speaker #0
Est-ce que tu travailles spécifiquement sur la question des écrans ?
- Speaker #1
Alors... Non, pas spécifiquement, je ne vais pas rentrer dans les détails. Ça pourrait être le cas si j'ai déjà eu des jeunes qui viennent juste avec des séries, les séries « Je n'arrive pas à m'arrêter » . Alors on va vraiment travailler sur comment ça se passe, comment on peut travailler sur gérer ces épisodes qui donnent envie chacun au suivant encore davantage. Mais là, lui, c'était plus le sentiment qu'il se distrait, quel que soit l'écran. Oui, c'est plus ça. procrastination, on peut dire ça. Oui, ici, c'est plus la procrastination qui me pose problème pour lui, qui l'empêche de s'y mettre. Il y a vraiment ce côté des deux parties, les deux parties qui le veulent du bien, et ça, c'est la procrastination typiquement, quoi. C'est, je devrais m'y mettre et en même temps, j'ai envie de profiter, et pourquoi m'y mettre si vite ? Enfin, est-ce que vraiment je dois m'y mettre si tôt ? Enfin, voilà. Et donc, en donnant cette tâche, donc justement de, soit il s'y met, soit, au contraire, il profite à fond, il sature quelque part, et je lui dis, ça va vraiment faire plaisir à ton plaisir, et alors je lui demande aussi, pendant les trois jours où il ne travaille pas, je lui demande de juste noter quel serait l'avantage de s'y mettre. Parce que je lui dis, peut-être que si tu n'y mets pas, c'est que ça ne vaut pas tellement la peine encore. C'est qu'il n'y a pas, ou quels seraient les risques de ne pas s'y mettre en face, les deux sont rejoints.
- Speaker #0
Question surprenante. Oui. Et tu dis en face, tu dis, mais... déstabilisante.
- Speaker #1
Oui, c'est évidemment novateur souvent pour eux, ils n'ont jamais entendu ce type de questions, puisque tout le monde leur dit qu'ils doivent s'y mettre, et on ne se pose pas la question d'avantage, ça paraît évident, et donc c'est vraiment de nouveau pour aller chercher une motivation interne, et voir si elle y est, parce que si elle n'y est pas, alors c'est d'autres questions qui peuvent se poser aussi.
- Speaker #0
Ça illustre très bien le mécanisme qui consiste à tout le temps aller chercher stimuler la personne pour que la solution vienne de lui-même, la solution en tout cas que la nouvelle apprend.
- Speaker #1
on veut vraiment que la personne soit responsable de ce qu'elle choisit et c'est pour ça qu'ici voilà elle choisit il choisit là en l'occurrence c'est un jeune homme il choisit de déduire ou pas et c'est intéressant parce qu'en fait quand il revient à la fois d'après la première fois il n'a pas travaillé pendant trois jours et puis après il a commencé à s'y mettre et puis de nouveau il a eu sur les quinze jours je crois deux fois pendant trois jours il n'a pas travaillé mais au moins il s'y est un peu mis donc il a une satisfaction et en même temps il sent que c'est vrai qu'il a assez bien confiance en fait à sa dernière minute quoi, son espèce de truc qui a toujours marché alors évidemment je pourrais retrouver un autre Louis après les examens, ça je vous le dirai après, mais qui dira j'ai tout raté, je me suis mis trop tard, etc. Et du coup, peut-être qu'à la session suivante, il n'a pas besoin d'être, parce qu'il s'y met assez tôt, parce que là, il a la peur qui est là, la motivation interne de s'y mettre, elle est là, ou pas. Et ça, voilà, l'avenir nous le dira, je dirais.
- Speaker #0
Merci Marie-Lane,
- Speaker #1
à la semaine prochaine. Avec plaisir, au revoir. Si vous suivez ce podcast, n'hésitez pas à le partager à d'autres personnes auxquelles vous pensez qu'il peut faire du bien. Merci à vous.