- Eddy
Les déchets, en fait, c'est quand même la population qui les jette dans les rues. Donc moi, c'était ça, mon envie, c'était que le public voie leurs déchets, comment c'est devenu. Et voilà, donc les enfants, on les sort comme canettes, et puis c'est resté comme ça. Et puis c'est en ce moment-là que je me suis senti à l'aise avec mon travail artistique, et donc là, j'ai commencé à... d'imaginer aussi d'autres personnages avec d'autres déchets. Il n'y a pas qu'en canette, il y a d'autres costumes aussi. Il y a la méduse, c'est aussi un costume avec plein de plastique.
- Ramata
Bienvenue dans ce nouvel épisode du podcast Africa Fashion Tour. Je vous emmène avec moi à la rencontre de créateurs basés sur le continent africain. Je vous invite à voyager à Abidjan, Dakar ou Bamako pour découvrir les parcours de... professionnels talentueux, responsables et ambitieux. Au fil des interviews, je me rends compte que chaque entrepreneur veut contribuer au rayonnement de la créativité africaine sur le continent et au-delà. Ce podcast est un moyen de sortir des clichés du boubou et du wax pour représenter un éventail de tissus, de savoir-faire et de créativité trop souvent sous-représentés. Je suis Ramatha Diallo, je suis professeure de marketing dans des écoles de mode parisiennes et je suis également... consultantes spécialisées dans l'accompagnement de porteurs de projets qui veulent lancer leur marque de mode. En 2017, j'ai hésité à ma première Fashion Week en Afrique et depuis, je voyage régulièrement sur le continent pour aller à la rencontre de ceux et celles qui font la mode en Afrique. Le podcast est le moyen que j'ai trouvé pour partager au plus grand nombre une autre vision de la mode africaine. Aujourd'hui, je suis en compagnie d'Eddy Ekete. Eddy est un artiste contemporain qui évolue entre Paris et le Congo, qu'il sache. Il est connu notamment pour son travail de récupération des déchets. Il a créé L'Homme canette, une œuvre artistique spectacle qui invite à la réflexion sur l'accumulation des déchets dans la société de consommation. Je l'ai invité aujourd'hui pour qu'il puisse nous parler de son travail artistique et de son parcours. Bonjour Eddy, comment vas-tu ?
- Eddy
Oui, bonjour, bon matin. Oui, ça va bien, merci.
- Ramata
Alors, l'idée aujourd'hui de cette interview, c'est que tu puisses nous parler de ton travail, de ton parcours artistique et de comment tu as démarré en fait. Donc, pour commencer, je te demande de te présenter.
- Eddy
Alors, moi, je suis Edine Kete, mon message. Au Congo, nous avons le nom et le poste nom, c'est le prénom. Donc, Edine, c'est le prénom, Kete, c'est le nom et mon message, c'est le poste nom. Donc je suis né au Congo, Kinshasa, en 1978 et j'ai évolué là-bas, j'ai fait toutes mes études primaires là-bas et puis les études secondaires c'était parce que j'avais choisi de faire le Beaux-Arts. Et donc au Congo, avant de faire le Beaux-Arts école supérieure, il faut faire l'humanité. ça s'appelle l'humanité artistique donc je fais l'humanité artistique, je finis, après je continue l'académie de beaux-arts au supérieur et en 2002 donc je finis mes études supérieures mais comme je faisais études de sport donc j'étais pas trop vraiment... Dans l'art, pendant ces temps-là, j'étais plutôt dans le sport. Donc j'ai fait beaucoup de basket. Et puis, à un moment, il y a un ami qui est venu m'appeler pour dire Il y a un workshop à l'Institut français, viens Et puis je suis allé participer à ce workshop. Et c'était là où en fait le déclic est arrivé, parce que je travaillais avec un certain artiste, Simons Farel, qui est un artiste... anglais mais qui vient à Paris et un autre artiste français qui s'appelle Fabien Verchères qui est plus peinture et Simons Farrell était plus dans les installations. Donc vous voyez c'est vraiment des mots que je ne connaissais pas parce qu'au Congo on a une école d'art qui produit beaucoup d'artistes mais on est toujours classique, c'est toujours l'académisme et tout ça. Mais cette réflexion contemporaine s'est venue à partir de ce workshop qui s'appelait... Ce n'était même pas un workshop, c'était un projet qui s'appelait Rond Point. Et donc, il y avait Cécile Bourne qui était la commissaire, il y avait Fabien Verchère, il y avait Siemens, Farel, et donc ils ont travaillé avec plein d'artistes. Mais on était plus des étudiants.
- Ramata
J'ai envie de te demander maintenant, quel a été l'impact de ce premier workshop dans ton processus créatif ?
- Eddy
En fait, l'anglais, quand il est venu, on se promenait, et à chaque fois, comme c'était un workshop, nous on était encore un peu jeunes, et donc à chaque fois, quand on passait, à cette époque, il n'y avait pas encore assez de déchets, mais le peu de déchets qu'il y avait, lui me parlait beaucoup de ça, il me disait, tu regardes Et puis quand ils sont repartis, c'était un projet de un mois, quand ils sont repartis, et puis moi je continue mon basket, mais il y avait toujours ces images-là, ces paroles-là qui sont restées dans ma tête. Et puis un jour, nous avons eu des clics, des amis, on était plusieurs. On s'est dit, on a fait le Beaux-Arts, mais depuis qu'on a fini les études, on arrive. pas à réussir, donc il y a assez de sorties d'ici. Pourquoi pas faire autre chose ? Et les autres choses-là, on ne savait pas c'est quoi autre chose. Donc, pour nous, on s'est dit, il y en a un dans le groupe, il s'appelait Iviar Izamba, mais eux, ils étaient un peu plus, donc, on va dire des grands frères, parce qu'ils avaient fini genre 3 ou 4 ans avant nous. Et lui, il a dit, si on prenait des cartes-tasses, Comme ça, il a dit des carcasses. Et puis moi j'ai dit oui, pourquoi pas ? Et les autres ont dit oui. Et puis on va faire quoi avec ces carcasses ? Du coup on s'est dit, il faut qu'on aille demander le directeur de Beaux-Arts à l'époque, qui s'appelait Daniel Chongo. On est parti lui demander, mais sans avoir l'espoir qu'il allait accepter. On est parti lui demander, on a dit, monsieur le directeur, on a une idée. c'est de ramasser, de récupérer le carcasse qui se trouve dans la ville, mais on ne sait pas quoi faire avec, on ne sait pas où le mettre en fait. Et lui, il nous a dit, oh, mais moi je viens de Nantes, je viens d'un truc comme ça, parce qu'en fait, comme il est directeur d'une école académique, donc les installations qu'il a vues à Nantes, lui, il a pensé, je vis des trucs comme ça, des voitures, des carcasses à Nantes. Faites-le, on va voir. Et donc c'est comme s'ils nous avaient dopés. Et là, on a commencé à ramasser, récupérer des carcasses qui traînaient dans les rues, des vieilles voitures. Et donc sans savoir, en fait, on a fait un travail de casse, un travail de nettoyage, un travail de... Mais nous, on ne savait pas encore ça. Et on l'a récupéré, on était plusieurs, et les autres amis de Beaux-Arts qui nous ont vus, ils ont... Donc c'était comme une espèce de... des folies. Et puis, au fur et à mesure qu'on ramasse, les bruits commencent à partir dans le quartier tout au long de l'entour de Beaux-Arts. Ah, mais il y a des étudiants de Beaux-Arts qui ramassent des carcasses là ! Et tous les habitants qui avaient leurs carcasses des vieilles voitures commençaient à nous les ramener. Et à un moment, on se retrouvait avec, genre, si je peux exagérer, on avait 150 carcasses dans les Beaux-Arts. Et là, ça a fait un grand bruit. Tous les profs, on va dire les corps professoraux, les étudiants, tout le monde commençait à dire Ah non, mais ça c'est quoi ? C'est n'importe quoi ! C'est de la saleté parce que le carcasse, c'est vraiment, c'est des vieilles carcasses qu'on a ramassées. Et donc, comme nous on avait l'aval du directeur, donc on s'est dit Nous on s'en fout, tout ce que vous allez dire, c'est comme le directeur a dit oui, donc... Donc on a continué et ça fait tellement trop de bruit. Le directeur de l'institut français de l'époque, qui s'appelait Jean-Michel Champon, a entendu. Il a dit, ben c'est quoi ça ? Et donc il est venu nous voir. Il est venu nous voir et il a vu tout ce qu'on avait récupéré. Il a dit, ben en fait ces jeunes-là, il faut qu'on fasse un truc pour les aider. Et nous, on faisait tout ça gratuit, sans argent, rien du tout. On n'avait pas d'argent. Et lui, il a dit, je pense que vous... vous avez quelque chose à dire, il faut qu'on vous aide. Et donc à cette époque, c'était vers les années 2000, 2002, 2001, je pense, 2001, 2002, et donc à cette époque, à l'Institut français, il y avait un scénographe qui est venu travailler avec un artiste danseur du Congo, Faustin Ndiakula, et donc le directeur l'a proposé de travailler aussi avec nous, parce que lui, comme c'était un prof de scénographie, donc... Alors lui il est venu nous voir, donc il nous a posé plein de questions. Et dans toutes les questions qu'il nous posait, en fait nous on les répondait. direct ce qu'on avait envie de faire. Et lui, il nous a dit, Les gars, vous savez ce que j'avais fait ? Ça s'appelle une scénario urbain. Et tous ces mots-là, on ne connaissait même pas. Scénario urbain, c'est quoi ? Donc, du coup, il nous a donné un peu un cours rapide entre la performance et tout ça. Donc, on a pris un cours accéléré, si tu veux, de termes, de mots qui sont dans l'art contemporain. Parce que nous on est des classiques, on était formés comme des classiques, donc on avait nos termes à nous qui étaient plus académiques. Et les termes genre performance, workshop, happening, tous ces termes on ne connaissait pas, donc lui nous a donné un peu un cours accéléré, avec des workshops qui s'est suivi après notre événement, parce qu'en fait cet événement, c'est l'événement qui s'appelait Kinshasa Wenzhe.
- Ramata
Est-ce que tu peux nous parler maintenant plus en détail de ce premier événement ?
- Eddy
Il y a Kinshasa, des petits marchés, parce que le Congo, nous avons un article qui s'appelle article 15. Ce n'est pas dans la Constitution, mais nous, on a... On a créé cet article qui s'appelle Article 15. Ça veut dire, nous la population, chacun doit se démerder. Donc chaque personne doit trouver une idée de survie, pour vivre. Alors, nous, on a appelé ça Kinshasa Wenzhe Wenzhe, parce que tous ces Wenzhe Wenzhe là, c'est les articles 15 du Congo. Donc c'est pas l'État, c'est vraiment la population qui décide de créer tous ces marchés. Et ça crée un désordre urbain. Et donc voilà, à partir de ça, on a eu pas mal de workshops avec ce professeur parce qu'on est resté en contact avec lui, comme il était prof aux arts déco de Strasbourg. Et donc il a fait de sorte qu'on fasse un échange entre l'école des beaux-arts de Kinshasa et la haute école du Rhin. de Strasbourg à l'époque qui s'appelait l'école supérieure des arts décoratifs de Strasbourg. Et donc on a commencé un peu à travailler des workshops avec certains profs qui venaient. Et puis moi je me suis inscrit, je me suis inscrit donc je suis venu en France pour faire l'équivalence. Donc j'ai fait l'équivalence, on m'a pris dans cette école et là j'ai commencé à étudier là-bas.
- Ramata
Quel a été le contraste que tu as découvert entre le Congo et la France à ton arrivée pour étudier ?
- Eddy
Et donc vous voyez, le désordre, en quittant le désordre des petits marchés de Kinshasa, arrivé à Strasbourg, une ville très très propre, donc je ne comprenais pas encore comment est-ce que je pouvais travailler, parce que mon travail était vraiment lié. autour des déchets. Mais dans cette ville-là, il n'y a pas de déchets. Je trouve où ? Donc il fallait trouver une autre méthode. Donc c'était aller vraiment dans les déchets, aller chercher. Et là, quand je suis allé chercher, j'ai trouvé d'autres questionnements, d'autres problèmes que nous n'avons pas. Donc là, j'ai commencé à travailler pour trouver un langage, on va dire un langage... pour la France, parce que c'était pas le Congo, donc fallait que j'essaye de trouver un élément en Europe qui va faire de moi un artiste, parce que je me voyais vraiment mal à Strasbourg dire que je suis artiste sans quelque chose d'effort. Je voulais pas vraiment des tableaux, parce que les tableaux c'est vraiment des choses que je veux exprimer avec la peinture que eux, ils... Ils connaissent. Bon, je suis sculpteur, je peux faire du métal, je peux souder. Mais il y avait un truc qui manquait. En fait, un jour, j'ai passé à Strasbourg, dans la ville, et puis j'ai vu, sous un arbre, rempli de canettes. Mais vraiment, quand j'ai dit rempli, ça m'a vraiment questionné. Moi, ça m'a questionné parce que je suis resté dans cette ville dix ans. J'ai jamais vu autant de déchets dans la ville comme ça, au bord de l'eau du Rhin. Et là, ça m'a... Tout de suite je parlais et je vis direct l'image de Kine qui est revenue en voyant ce tas de déchets, des canettes. Et puis j'ai pris le vélo parce qu'à Strasbourg on roule beaucoup à vélo, donc j'ai pris mon vélo, je suis allé rapide dans mon atelier qui n'était pas très loin. Et je crie un gros sac et avec des gants, je commençais à ramasser. Je me suis dit je dois faire un truc avec ces canettes. Et je ramassais, je ramassais et je me ramassais. Et ça c'était dans les années 2000, 2009, 2010. Parce que je venais tout justement de finir mes études aux arts déco, à l'Estrasbourg, donc en 2008, donc j'étais vraiment en pleine recherche, questionnement, expérimentation, tout ça. Et puis en ce moment-là, je vois ces canettes, je prie ça. Je ramène dans mon atelier. Je commençais à les nettoyer parce que je me suis dit, il y aurait la pisse, tout ça, donc... Et puis, effectivement, c'était vraiment du déchet, il y avait de... des papiers mouchoirs, dans plein de canettes, il y avait des mégots, des cigarettes, voilà. Bref, j'ai nettoyé, et puis je me suis dit, qu'est-ce que je peux faire avec ? En nettoyant les canettes, je vis le signe, le sigle de recyclage, les trois flèches qui font le tour là. Du coup, je me suis dit, ah ouais, ça, il faut que je fasse quelque chose, mais qui soit... aussi recyclable comme le cercle là. Donc une flèche qui rejoint l'autre flèche et l'autre flèche qui rejoint l'autre flèche. Donc je dois raisonner de cette façon là. Et puis là, je me suis dit, il faut que je fasse de la percussion. Parce que à part faire un peu le travail des peintures, de la sculpture, je fais aussi de la percussion. Donc du coup je me suis dit, ah ouais je vais essayer de faire une espèce de marrakech géant avec mon corps. En fait quand je danse, la danse de mon corps reproduit le son, et le son me fait danser, et cette danse là, en fait c'est vraiment du recyclage, donc quand je m'arrête, cette danse s'arrête, ces sons s'arrêtent, ces mouvements s'arrêtent. Quand je commence, Tout tourne. Mes mouvements produisent des sons et mes mouvements de danse qui reproduisent encore des sons. Et cette danse-là reproduit un rythme et ce rythme me donne envie de danser. Et cette envie de danser reproduit un son. Donc c'est vraiment le flèche, les trois flèches. La musique récyclée et qui reproduit le grand son du grand marathage. Et quand j'ai fait ça, la toute première fois, c'était à Strasbourg. Du coup, je me suis dit, bon, je vais essayer de sortir, voir qu'est-ce que ça va faire. Tout en sachant que dans une ville où il y a beaucoup de réglementations, parce que Strasbourg, c'est pas pareil, Strasbourg, c'est très taré. Donc je me suis dit, j'ai pas d'autorisation, ça produit du bruit. Donc je portais ça, mais j'avais peur, mais en même temps, je me suis dit, il faut que j'essaye. Donc je portais et puis je commençais à sortir dans la rue. Et le bruit que ça reproduit, et moi comme je suis masqué, comme on ne sait pas qui est dedans, on ne sait pas qui est dedans, c'était déjà pour moi une libération. Et le bruit que ça reproduisait, je continuais à marcher et je voyais maintenant les gens me suivre. Quand je m'arrête... J'entends la ville comme si dans la ville il n'y a pas de voiture. En fait, j'ai dominé même le bruit des voitures qui roulent dans la ville. Et puis ça m'a poussé, ça m'a poussé. Puis je suis allé jusqu'à la grande place, place Clébert, à Strasbourg. La place Clébert. Et là, c'était un samedi. Un samedi comme les familles, les gens font un peu de tourisme. Et là, je fais le tour. Tout le monde commençait à venir. Donc, je ne savais pas. Et là, je commençais un peu à me prendre avec cette foule. Parce qu'en fait, ce costume-là, qui s'appelle maintenant homme canette, parce que ça, c'est les enfants qui ont appelé ça homme canette. La toute première fois quand je suis sorti, c'est les enfants qui disaient homme canette, maman, homme canette. Mais moi, j'ai appelé ça machacha man. Le machacha men, c'est déjà le machacha, c'est le bruit de marrakech, mais c'est aussi machacha, c'est aussi une plante au Congo. Je ne sais pas, bon voilà, c'est comme le myrtille, le myrtille je crois, ici en France c'est comme le myrtille. C'est une feuille, au fait si ça te touche, ça gratte tout le corps. Et nous on appelle ça machacha parce qu'en fait quand tu te grattes... C'est un peu le bruit que tu peux reproduire aussi quand t'es habillé avec ce genre de costume. Donc j'appelais ça le machachamen. Mais après, c'est les enfants. Donc comme c'est aussi une œuvre que moi j'ai voulu montrer au niveau population, parce que les déchets, en fait, c'est quand même la population qui le jette dans les rues. Donc moi, c'était ça, mon envie, c'était que le public le voie. Leur déchet, comment c'est devenu ? Et voilà, donc les enfants, on fait ça en canette, et puis c'est resté comme ça. Et puis c'est en ce moment-là que je me suis senti à l'aise avec mon travail artistique, et donc là, je commençais à imaginer aussi d'autres personnages avec d'autres déchets. Il n'y a pas qu'en canette, il y a d'autres costumes aussi, il y a la méduse, c'est aussi un costume avec... plein de sacs plastiques parce que les sacs plastiques c'est interdit. Donc j'avais entendu à la radio une fois, voilà, interdiction des sacs plastiques. Donc ils ont donné un délai à tous les commerçants d'aller les liquider. Et moi je suis allé chez un grossiste, j'ai acheté plein de sacs en plastique de plusieurs couleurs. Parce que dans mon travail aussi artistique, je travaille beaucoup avec la couleur que produit la société. Et je me mets en confrontation avec la couleur des artistes, dont l'acrylique, l'huile, le pastel, toutes ces couleurs. Et donc voilà, je suis arrivé à ce personnage-là. Et du coup, ça m'a aussi propulsé. Parce que là, je fais... pas mal de villes en Europe, mais je n'ai pas encore tout fini, parce que c'était l'idée aussi de faire une brigade des antennettes où on se promène dans toutes les capitales, d'abord européennes, sensibilisées autour de l'environnement, l'écologie, les réchauffements, tous ces déchets que la société de surconsommation produit, et à la fin que ça finit. Aujourd'hui... Je me suis rendu compte qu'en fait, tous ces déchets finissent en Afrique. C'est pour cela, avec toujours cette imagination, on a créé un lieu actuellement au Congo et un festival qui va faire 10 ans autour de ça.
- Ramata
Donc moi je mettrais en fait des vidéos et des photos en fait pour ceux qui connaissent pas et qui visualisent pas forcément cette oeuvre spectacle en fait et cet homme canette. Parce que là quand tu le décris moi comme je vois exactement de quoi il s'agit mais je ferais je mettrais en fait un lien dans les notes de l'épisode. Donc toi t'es vraiment connu pour proposer de la performance artistique et aussi pour nous inviter à réfléchir sur cette question des déchets. avec ce lien entre l'Afrique et différentes capitales européennes. Aujourd'hui, c'est surtout dans différentes villes d'Europe que tu es intervenu pour présenter l'homme canette ou la méduse dont tu parlais, parce qu'à chaque fois, tu vas utiliser des déchets qu'on retrouve beaucoup. Tu es intervenu dans quelle ville aujourd'hui ?
- Eddy
Là, je fais Stuttgart, je suis... Paris, Strasbourg, Oslo, Bruxelles, Rotterdam, Amsterdam pas encore. J'ai fait Madrid, j'ai fait Rome, j'ai fait Milan, j'ai fait pas mal de villes en France, beaucoup de villes de France, Strasbourg, Lille, Auxerre. Toulouse, je fais Clermont-Ferrand, je fais vraiment pas mal de villes en France. Mais je propose aussi des workshops parce que des fois je vais aussi, par exemple pour Clermont-Ferrand, j'ai fait un workshop au Beaux-Arts et avec les étudiants on a refait ma démarche mais c'était rigolo parce qu'en fait eux aussi, comme c'est pas vraiment des Africains, ils ont fait aussi le déchet mais avec une autre image. qui reflète aussi l'Europe. Tu vois, eux, ils ont fait vraiment des costumes à l'Europe. Tout ça. Mais c'est vraiment autour des déchets. Mais moi, le canette, au fait, quand je le fais, je le fais. sans avoir le lien ancestral. Mais au fait, il y a un lien ancestral, parce qu'au Congo, je ne sais pas si tu connais Ramada, la statue à clous qui s'appelle Fethi. En fait, c'est une statue qui est remplie de clous. Tout le corps est rempli de clous. Mais en fait, cette statue... Quand les colons sont arrivés au Congo, ils l'ont trouvé partout dans l'Afrique centrale, en Angola, au Congo-Brazzaville, au Gabon, au Cameroun, parce qu'en fait ça représentait la police chez les bantous de l'Afrique centrale. C'était une espèce de statue en bois qui était remplie de clous. Mais dans d'autres régions, comme vers l'Angola, c'était la forme de crocodile, rempli de clous aussi. Et vers le Gabon, c'est une espèce de dame, mais remplie aussi de clous. Mais au fait, ces clous-là, c'est des problèmes dans la société. C'est que quand on a un problème, genre il y a un voleur ou un macombriolet, des problèmes qu'on n'arrive pas à trouver des solutions, on va chez le maître, le féticheur qui garde cette statue. On explique son problème et puis qu'est-ce qu'il fait ? Il te donne un clou et il te dit tu dois lécher ce clou avant de l'implanter dans la statue. Donc en fait le fait de lécher, c'est toute ta parole, toute ta vérité, tout ce que tu viens de dire, rester dans le clou et quand il tape, ça active tous tes problèmes. En fait le coupable, là où il est, tout de suite il sent tout ce qu'on a fait. Voilà. Et donc quand les colons sont arrivés, ils ont trouvé, c'est très très beau, c'est joli, ils ont pris ça, ils ont ramené. Et donc en fait ils ont ramené tout un problème d'une culture, ils ont ramené les problèmes de voyous, ils ont ramené les problèmes des fétiches, ils ont ramené les problèmes de ceci, cela. Et en fait moi le lien avec cette statue, en fait c'est déjà la forme, c'est la même forme. Et en fait moi dans chaque canette j'ai de la salive de chaque personne. Dans la ville, je sais pas si tu comprends, tu vois, parce que dans chaque canette, dans chaque canette il y a de la salive. Donc soit si je peux aller plus loin, je peux prendre les ADN dans chaque canette, je prélève les ADN dans un laboratoire, après je nettoie mes canettes. J'ai fait mon costume et je peux parler aussi de ces adènes que j'ai trouvés avant de les nettoyer. Donc tu vois, c'est vraiment le même lien avec cette statue. Et quand ça produit le bruit, ce bruit-là, ça te porte, tu ne sais même plus, tu deviens un enfant dedans. Ce qui t'arrête, c'est juste quand tu te sens étouffé. Et c'est là où il y a... Il y a une connexion spirituelle avec ce costume ancestral qui s'appelle un kisi, ou comment on l'appelle un kisi, qui veut dire fétiche. Parce qu'en fait, le canel, si tu le portes, vu que tu reproduis le bruit avec tes mouvements, ben t'es tellement heureux, ben ça te porte. Vu que tu fais, toi-même tu vois, parce que comme on est masqué, Tu vois comment les gens s'étonnent, tu vois comment les gens sont merveilleux, tu vois comment les gens ont peur. Toutes les émotions du public, tu le vois. Qu'est-ce que ça fait ? Ça te porte et tu t'en fais trop. Plus que toi, tu ne contrôles plus ton corps. Qu'est-ce qui t'arrive ? Tout de suite, tu te sens étouffé. Et là, il y a la peur qui arrive. Et une fois que tu as la peur, tu risques de mourir dedans. Et donc qu'est-ce qu'il faut faire ? En fait, il faut juste se maîtriser, il ne faut plus bouger. Tu restes statue. Donc ça te redemande maintenant la position des bases. C'est être statique, statue. Donc tu vois, et quand tu es statue, là tu sens le vent commence à rentrer un tout petit peu. Et là, en ce moment-là... Les gens qui sont à l'extérieur voient ton ventre, comment tu respires pour retrouver l'air. C'est vraiment très fort parce que... La première fois quand tu portes ça, ça te porte. Et si tu ne sais pas te contrôler, tu t'étouffes. Tu sens ce que je suis en train de dire. Et à chaque fois, les gens qui veulent porter le costume, je leur dis ça. Je dis, tu fais attention, maîtrise-toi. Si tu ne sais pas te maîtriser, tu vas sentir ça, ça, ça. En Afrique, les gens pensent que je suis un sorcier. En fait, parce qu'en fait, Tout ce que je leur dis, ça leur fait apprécier. Ah, lui, il doit être mystique. Mais en fait, ce n'est pas mystique. C'est juste les trois flèches. Le côté recyclable avec le mouvement du corps et le côté action entre le public, l'interaction. Voilà, le côté interaction. qui rend un peu fou. Et ça, si tu ne sais pas vraiment te maîtriser, c'est dangereux. Voilà un peu.
- Ramata
Et donc, toi, dans les différentes villes dans lesquelles tu interviens pour faire cette représentation-là, c'est elle qui te sollicite, c'est toi qui leur présente le projet. Comment ça se passe ? Comment est-ce que moi, demain, je peux dire j'aimerais bien que tu interviennes dans cette ville pour présenter l'homme canette ? Et mon autre question qui vient après, c'est... Est-ce que toi, tu formes les gens, du coup, parce que là, tu viens d'expliquer toute une mystique au travers du fait de porter le costume un peu d'homme canette. Toi, tu formes, du coup, les gens qui vont porter avec toi ces costumes. Et est-ce que, du coup, c'est une espèce d'école aussi ? On n'est pas passé par toi. Moi, demain, je ne peux pas dire, bon, je vais devenir femme canette, en fait. Il faut forcément que j'ai pu, en fait, le faire avec toi.
- Eddy
Non, non, en fait, c'est une bonne question, Pascal. Moi quand je fais ça, et après les gens m'invitent. C'est beaucoup d'associations qui sont impliquées autour des déchets, des chlorologies, tout ça vraiment qui m'invitent. Et aussi, les invitations sont aussi des fritures culturelles qui aiment bien aussi ce côté artistique qui m'invite. Mais, par exemple, aujourd'hui aussi le Mali, en Afrique je fais le Mali, je fais le Tchad, je fais le... En Ouganda, en Afrique, je fais le Rwanda, en Afrique je tourne aussi. Mais je forme. Par exemple, je forme beaucoup avec les danseurs. Parce que moi, mon idée, c'est que je donne ce costume avec des gens qui jouent avec leur corps. Par exemple, les acrobates. C'est expérimental, et c'est pas encore fini. On est vraiment dans l'expérimentation, jusqu'au moment où, je sais pas, peut-être cinéma aussi. J'aimerais bien. d'expérimenter ça parce que autour de ça, imagine toi j'ai plein de personnages maintenant. J'ai au moins, j'ai au moins, je formais, je formais au Congo, au Mali, au Congo Brazzaville, je forme en Ouganda, en Ouganda j'ai une, la meilleure équipe c'est en Ouganda. Parce que eux ils sont à fond, parce que là ils sont vraiment à fond, ils ont gagné même un prix. Moi j'ai jamais gagné un prix. Et donc voilà, donc c'est... C'est vraiment, je forme, après je bois juste pour les canettes, je dis ça juste pour les canettes. Mais les autres costumes, ils n'ont pas la même folie que le canette. Parce que les canettes, c'est le bruit. C'est ce bruit-là qui t'emporte et qui emporte aussi le public. Mais les autres costumes aussi, le personnage est différent. Je suis vraiment en train d'imaginer, pourquoi pas aussi un film ou des fictions, des sensibilisations, parce que je vois aussi en futur que tous ces déchets-là ne vont plus exister. Donc c'est aussi moi, ma manière de montrer notre époque et aussi de préserver notre époque. Par exemple, si on proposait tous nos personnages dans des musées, Ce serait pas mal parce que le musée c'est des lieux de mémoire où on va garder ferme en mémoire en disant voilà notre époque. Peut-être des 650 ans, des 100 ans, voilà notre époque. Voilà on consommait des déchets, voici un an. Notre société pensait beaucoup sur les couleurs parce que dans mon travail il y a beaucoup de couleurs aussi que de la société. Les couleurs que je vois, même au niveau des habits. Même des électroménagers, par exemple, les carcasses, les aspirateurs, tous ces trucs-là, c'est ce que moi j'utilise comme élément de mes travaux. Donc je suis vraiment dans cette réflexion là. Non seulement c'est le défi mais c'est aussi la réflexion des couleurs. Pourquoi la société produit des couleurs si fortes, si très très beau pour moi, artiste, parce que c'est vraiment des couleurs qui me fascinent. Mais en fait avec des études j'ai vu que c'est vraiment des couleurs pour nous faire consommer. C'est des couleurs de psychologues, avec des publicitaires. Et l'État, le gouvernement qui accorde un machin, tac, donc qui nous bombarde de couleurs, la société occidentale, mais ça nous suit parce que l'Occident, c'est aussi l'Afrique, on va dire, ben en fait ces couleurs-là, elles nous poussent à consommer parce qu'en fait c'est des couleurs qui sont mises dans la société et qui travaillent avec les neurones. C'est des couleurs, quand les yeux le voient, tout de suite il y a une formation avec les neurones. Et puis le neurone te donne envie. Selon un des psychologues, il disait qu'il y a un neurone d'envie qui donne juste envie de deux secondes. Ce neurone, son rôle, c'est juste de nous donner envie. Deux secondes, après, c'est fini. Donc tu te décides, tu as des terces de secondes pour décider, pour acheter. Et ce neurone-là, travaille, fonctionne avec les yeux. Donc une fois les yeux voient un truc, et chez les enfants ça marche à tout prix. Quand un enfant voit ça, il dit Papa, je veux ça ! Et donc en fait la société occidentale travaille avec ces couleurs, justement pour enfin consommer. Et quand moi j'ai entendu ça, j'ai dit je dois exploiter ça Donc c'est un travail expérimental pour moi, parce qu'en fait c'est un travail que je suis en train de composer avec tout ce que j'entends. autour de ma société occidentale là où je vis. Et puis, je vais aussi en Afrique et je vois que c'est la même chose. Et donc, du coup, j'essaye de vraiment travailler là-dessus, voir comment est-ce que je peux, moi, communiquer avec le public dans mon travail avec ces codes-là que, eux, ils ont. Tout le monde va tout reconnaître parce que tout le monde consomme, tout le monde achète, tout le monde se reconnaît. Donc, quand tu t'approches devant mes toiles, Tu commences à avoir des informations, mais ça c'est des chips, non ? Mais comment je le fais ? En fait, ça peut être des joues. Je fais une tête d'une personne, mais le rond des joues, je peux mettre des chips, par exemple. Mais en fait, comment je vais agencer avec les autres couleurs ? Tu ne vas pas trop te rendre compte, mais l'idée, c'est que comme ces couleurs qui sont faites par les machines, ce n'est pas fait par les hommes, donc... Donc si tu es un admirateur des tableaux, ça t'attire. Tu viens en face et là tu te rends compte que c'est du collage, mais c'est du chips. Donc c'est un peu ça, c'est vraiment un travail de recherche, mais j'essaie aussi de chercher ce que les psychologues ont dit dans la consommation, dans mon travail. Voilà un peu.
- Ramata
C'est intéressant qu'il y a vraiment une recherche à la fois créatique, artistique pour nous faire réfléchir, mais que derrière aussi, il y a une volonté de déconstruire la société de consommation qui, d'un côté, est productrice de déchets. Et en même temps, quels sont les mécanismes qui sont mis en œuvre par les publicitaires pour pouvoir nous inviter à consommer ? Et ce qui est à la fois… Je ne sais pas si c'est triste, mais en tout cas, ce qui est intéressant, c'est qu'on a beau avoir accès à ces informations, savoir que le rouge, c'est une couleur de l'excitation. On a pu avoir accès à ces informations. On sait qu'on est dans une société de consommation. Mais il n'empêche qu'on va aller dans les boutiques, on va sortir notre carte bleue et on va produire du déchet. Même quand on est dans des démarches où on se dit qu'on va chercher à réduire notre consommation, on reste quand même des... des créateurs de déchets. En tout cas, on est dans une société qui en produit énormément. Toi, je sais que tu es en voyage permanent entre l'Europe et le Congo. Quelles sont tes prochaines initiatives par rapport au Congo ? Quand est-ce que tu retournes sur place et qu'est-ce qui est prévu en fait ?
- Eddy
Alors, au Congo, pour l'instant, là, au Congo, on... Je pars en janvier pour préparer le tout premier carnaval. Vraiment, quand je dis le tout premier, ça sera vraiment... On est en train de travailler pour que ça devienne une carnaval qui va faire parler d'elle. Parce qu'en fait, c'est une dame qui m'a fait appel, donc c'est elle qui organise ça. C'est une dame qui s'appelle Yvette, mais je ne connais pas. Mais apparemment, c'est une riche, elle a un lieu, donc elle a le moyen d'organiser ça. Donc elle est venue me voir et a dit bon voilà on a vu votre travail, je pense pour le Congo, pour ce qu'on veut faire, donc on peut jamais faire sans vous. Donc elle m'a expliqué le projet, c'est vraiment l'idée d'un carnaval mais à l'image des rios ou bien un carnaval comme ici en Europe ou en Guadeloupe. Donc du coup on a regardé aussi les images des autres carnavals, tout ça, donc au mois après. J'ai proposé mes idées, j'ai dit bon, au fait, c'est le Congo, on a aussi notre culture, on a des choses, on peut montrer aussi des choses à nous, mais en mode carnaval. Donc elle était très émue à entendre ça, parce que c'est aussi une vraie patriote. Elle parle beaucoup aussi de Mahongo, Mahongo c'est, on va dire c'est de la mythologie congolaise, Mahongo c'est la première personne du monde, on va dire c'est Mahongo c'est le... l'homme et la femme qui sont collés au niveau de l'ombril. Et en fait, il y a une chute de rivière qui s'appelle Zongo et Maungo. Dieu les avait interdits d'aller voir cette chute, c'était juste derrière un arbre. Et donc, ils sont partis voir. Et voilà, il y a un coup de tonnerre de foudre qui est arrivé à partir de la rivière. Et ça les a séparés. Ça, c'est vraiment l'idée de ce carnaval. Et quand ça les a séparés, alors ils ont eu très honte. Ils se sont vus, en fait, ils étaient nus. Et ils étaient collés par l'ombril. Alors, ils se sont dit, ah Dieu, nous avons interdit d'aller derrière l'arbre pour ne pas voir le chute. Tout ça, donc pour ne pas... Oh, que Dieu continue à nous punir, on va se toucher l'ombril, donc il se touche l'ombril, comme il était avant, et il commence à chanter, pour demander pardon à Dieu, pour que Dieu le refasse comme il était avant. Et en fait, c'est là la naissance du rythme qu'on appelle aujourd'hui la rumba, qui est partie dans les autres pays qui s'appellent la rumba. Et cette rumba ça vient vraiment du Congo à partir de ces trucs, l'ombril. Et donc la rumba c'est la danse qui se danse avec des ombrils collés pour justement honorer, demander pardon à Dieu. Et donc cette dame avec cette mythologie, on est tombé sur ce carnaval. Et donc le carnaval va être avec ces deux personnages maou. Donc elle nous a demandé de faire. Le premier char c'est Mahungu, le deuxième char c'est la rumba et le troisième char, parce qu'on aura trois grands chars pour l'instant, la troisième char ça sera peut-être un autre thème que nous on peut choisir du Congo. Mais les deux thèmes qui parlent déjà de la rumba et de Mahungu, donc la naissance de ce rythme que nous avons aujourd'hui qui s'appelle la rumba. Et donc ça, ça va se faire en juillet prochain. On va voir comment ça va se faire. Mais l'idée, c'est que ça devienne le carnaval chaque année du Congo. Et ça, c'est en août. Non, en juillet, pardon. Et puis moi, tout de suite, je vais enchaîner avec mon festival. Parce que j'ai un festival, ça va être la... On va dire que ça va être la 11e édition. Mais on a annulé des éditions parce qu'il y avait le Covid. Et il y avait aussi une édition qu'on a annulée des élections, parce qu'il y a toujours des désordres. Et donc là, ça va être la neuvième édition de mon festival qui s'appelle KIN ACT. C'est un festival international des artistes performeurs. Donc en fait, nous, on invite les artistes internationaux et nationaux à venir intervenir dans les rues. Parce que, pourquoi ? Parce qu'à Kinshasa, nous avons une école, comme je disais avant, nous avons une école d'art qui produit chaque année des artistes, mais il n'y a pas de salle d'expo, il n'y a pas de galeriste, il n'y a pas un centre d'art. Il n'y a rien. Alors dans tout ce rien-là, moi je me suis dit, on a quand même l'espace urbain. Donc pourquoi pas venir vers le public, dans le marché, dans les églises, pour montrer nos travails aux artistes, à la population, aux passants. Mais tout ça avec le regard toujours de la poubelle. Donc ça veut dire... On ramasse les déchets, on les transforme, on les trie, on les transforme, et après on ressort à l'extérieur pour montrer au public. On fait plein d'interventions dans la rue, on intervient dans des marchés, on intervient dans des églises, justement pour les églises, parce qu'au Congo aussi, il y a beaucoup d'églises qui endorment la population. La population est endormie avec les églises. Alors nous, on va, imagine-toi, on va dans les églises en déchet. Mais eux, ils commencent à dire, on est en déchet, c'est donc pour eux, on est des diables. Mais ils oublient que c'est vraiment les déchets qu'eux-mêmes, ils ont dans leur maison. C'est absurde, en fait, c'est vraiment des gens qui vivent dans un autre monde. Et on fait beaucoup d'interventions comme ça. Voilà, pour aussi sensibiliser avec l'art, sensibiliser l'environnement, les enfants, vraiment tout le monde. Et ça, ça se fait chaque année au mois d'août. On fait ça. Mais j'ai un autre projet qui m'a tient au cœur. C'est qu'on a acheté un terrain, toujours à Kinshasa, un terrain. Mais l'idée, c'est de faire le premier musée. des poubelles, mais on veut au début pour provoquer parce que l'art est aussi dans la provocation. Parce que nous ce qu'on fait c'est aussi la provocation, par exemple, des fois les performances que je fais, les passants qui passent dans la rue, ils me voient arriver en canette, mais moi je le vois, je le vois, mais lui il fait semblant comme s'il ne m'a pas vu. Mais en fait je suis tellement énorme avec tous les bruits, lui il parle, après moi je vais quoi ? Je l'attrape ! Et c'est des gens en fait qui ont tellement peur, mais il faut semblant. Et donc tout ça, on a envie de faire, j'ai un projet dans ce terrain, c'est de faire le musée du 7e continent. Et donc le musée du 7e continent, c'est le musée tout sera construit en déchets. Il n'y aura rien qui sera là. Réunis, mais... On va réfléchir avec les architectes, comment on peut travailler avec les déchets et que les matériaux restent durables. Parce que le plastique, il y a moyen avec le plastique, avec par exemple les boîtes de conserve, si tu as des millions de boîtes de conserve, il y a moyen de faire une structure solide. Donc c'est un peu ça, je suis en train de voir comment est-ce que je peux. Déjà je le tairai, mais ça c'est un projet, donc il faut que maintenant j'essaie de l'écrire bien, et peut-être de demander des subventions, parce que ça, ça sera le tout premier musée réfléchi dans ce sens-là. Donc tout serait que déchet. Et en Afrique en plus, ça serait le tout premier, si j'arrive à le faire. Voilà. Parce que dans les idées comme ça, il y a tout le monde qui a des idées. Donc moi, pour le Congo, j'aimerais vraiment construire ce musée-là. du septième continent où tout est en déchets. Voilà. Je ne sais pas si tu as d'autres questions, mais je voulais faire un petit... Après, toi-même, je ne sais pas comment tu vas le mettre. C'est que ce travail aussi, ça m'a fait réfléchir à des choses. C'est que je travaille les déchets, mais quand je vais en Afrique, je trouve d'autres déchets. En fait, c'est une autre réflexion. C'est que ici, on a les déchets. que vous connaissez tous, mais en Afrique aussi, on a nos déchets qu'on essaie d'oublier. C'est des déchets aussi qui traînent avant l'industrialisation à outrance qu'on a aujourd'hui, avant, on avait nos déchets à nous, qui sont les feuilles de banane, les noix de coco, le truc de... Tu sais, les feuilles, là, pour le... Chez nous, on appelle ça le chou-coing, c'est le manioc au Cameroun, là. Si on emballe le manioc, On bouillit le manioc avec toutes ces feuilles, les feuilles de mangue, les peaux des avocats, tous ces déchets-là, ça c'est nos déchets à nous. Mais ces déchets-là... Nos grands-pères, nos grand-mères faisaient creuser des trous et les mettaient déjà dans la terre. Ici, on appelle ça compost. Mais moi, je me rappelle, chez moi, tout petit, j'avais 4-3 ans, on avait déjà un trou où on jetait que des pots de bananes, que de nananas, tout ce qui était bio. Et après, quand c'était plein, ils couvraient ça. Et après quelques mois, je voyais la mamie en train de tourner la terre. et après être planté là. Donc tu vois, en fait, on a aussi des connaissances en Afrique qu'on essaie d'oublier parce que l'Europe fait beaucoup de publicités pour sa culture. Et c'est un peu une petite toitrice... une petite image que j'ai eue comme ça, tout de suite. Et donc nous, ce qu'on fait, c'est qu'on récupère aussi tous ces déchets-là. Et on fait aussi des costumes avec les biodégradables, justement pour maintenant dire aussi dans notre travail là-bas, pas ici, parce qu'ici je ne fais qu'avec tout ce qui est polluant. Mais là-bas, on fait avec le polluant et le non-polluant, vraiment pour montrer que voilà, ça c'est nos déchets, et ça c'est vos déchets. Différencier ça. Et vos déchets, comment ça se retrouve ici ? Avec... L'industrialisation avec les grands bateaux qui jettent des déchets, je ne sais pas, des tonnes dans les océans et qui débarquent dans nos rivières, tout ça. Et aussi la commercialisation des supermarchés et tout ça. Donc voilà, l'Afrique se fait envahir aussi par ces déchets-là. Mais avant on n'avait pas plus ces déchets. Donc c'est un peu ça.
- Ramata
Très bien, écoute, là ce que j'aurais envie de te poser comme question, c'est comment dire, s'il y a des personnes qui se sentent une âme d'artiste, mais qui ne savent pas comment commencer, par où commencer, parce que toi, ce dont on se rend compte, c'est que très tôt, tu as pu être guidée par des mentors qui t'ont tout de suite... aider à donner de la substance à ton travail. Ce n'est pas juste je fais une œuvre d'art il y a vraiment… On comprend que derrière, il y a un message que tu veux faire passer et que c'est un message qui est très engagé. Et ça, parfois, il y a des artistes, ils vont dire j'ai eu une impulsion créative, j'ai dessiné ça mais derrière, on va nous parler… Dans l'écriture, en tout cas, souvent, c'est plutôt la vie personnelle de l'artiste qui va mettre en avant. Quelle lettre que j'ai écrite parce que j'étais amoureuse de telle personne ? Et du coup, toi, quels sont tes conseils à un jeune artiste qui voudrait se lancer ?
- Eddy
Bon, en fait, il y a plusieurs choses. Il y a d'abord la première, la toute première, c'est d'abord l'envie. Et l'envie, là, c'est que tu ne vas pas lâcher. Que l'énergie ou, je ne sais pas, l'envie soit... Il faut que l'envie soit vraiment au présent, déjà. Et après, il faut faire beaucoup de recherches avec ce que tu as envie de faire. Donc, il faut regarder les autres artistes, aller voir des expos. Je pense pour un jeune artiste, même moi, moi, j'ai forme. En fait, là, c'est pas actuellement parce qu'on va parler de l'art contemporain. L'art contemporain, c'est facile et en même temps, c'est difficile. Parce que c'est beaucoup de concepts, c'est trop intellectuel. C'est pas juste faire, quoi. Parce que c'est ça aussi, c'est qu'il y a plein d'artistes qui pensent que je suis juste bon. Oui, t'es juste bon, c'est vrai. Dans les yeux, c'est bon. Mais actuellement, les gens veulent savoir qu'est-ce que l'artiste a dans la tête. Et c'est ça aussi qui est un peu difficile pour certains artistes. Moi j'ai du travail ça, mais je n'ai pas 5 ans. En fait, je fais l'école d'art à Kinshasa depuis tout petit. Donc quand je suis arrivé en France, tous les profs français me disaient Tu vois tout ce que tu fais, tu sais déjà le faire. Ici, nous avons envie que tu nous dises, que tu parles. Alors le matin, je te jure, j'ai fait 5 ans. juste pour ce que je suis en train de faire avec toi là. Donc tu vois, c'est aussi beaucoup de choses, être artiste, vraiment. Parce que tu peux être reconnu, tu peux avoir un bon travail, mais si tu n'arrives pas à parler aux gens, si tu n'arrives pas à leur dire Qu'est-ce que tu as dans ta tête ? C'est quoi ta culture ? Qu'est-ce que tu connais ? Tu viens d'où ? Il y a plein plein de choses que les gens veulent savoir des artistes. C'est un peu ça. Donc moi je suis en train de travailler, je ne suis pas encore arrivé, parce que moi aussi des fois je vois d'autres artistes. Toi, tu as suivi, même des jeunes congolais, tu vois, qui sont plus jeunes que moi, papa, ils avancent. Mais, étant que quelqu'un qui, tu vois, on va dire, je vais commencer le milieu artistique, même tout petit, en 93. Donc, tu vois, dès 93 jusqu'à aujourd'hui, j'ai quand même un bon bagage. Mais, on voit, il y a aussi la chance, parce qu'il y a d'autres artistes qui n'ont pas de discours. je travaille juste comme ça, paf, ça marche. Il y a d'autres, ils ont du bon travail, ils n'ont pas un bon discours, ça marche. Il y a d'autres. Donc c'est vraiment à chacun sa chance, à chacun comment il faut faire. C'est pour cela que moi, j'ai beaucoup voulu attaquer la rue, parce que dans la rue, il y a tout le monde. Et comme il y a tout le monde, il y a aussi des galeristes, il y a aussi peut-être un ministre qui passait, ou un général, ou un colonel, ou un... Un amoureux de l'art, tu vois la rue a tout le monde, le marché a presque tout le monde aussi. Les églises, il y a certaines personnes. Donc c'est comme ça, moi je vois maintenant comment est-ce que je peux travailler pour aussi atteindre les gens. Et comment atteindre les gens ? Il faut porter quelque chose que... En fait pour moi c'est juste des petits... On va dire des gâchettes, quoi. Paf ! Mais derrière il y a tout un tas d'autres choses à voir. Et c'est ça. Donc je sors dans la rue, je fais ça parce que les gens vont se questionner, c'est qui et pourquoi, il y en a quand ils vont voir, après ils vont voir. Ah en fait, il fait aussi des dessins, il fait aussi de la peinture, de la sculpture aussi, il fait un peu de la musique, donc en fait c'est un peu ça. Donc c'est un artiste aussi, il faut savoir se vendre, il faut savoir aussi, il y a vraiment beaucoup de choses que moi j'essaye de... comblé par moi-même, mais voilà. Mais si je deviens un grand artiste, je crois que je vais payer les gens pour faire ça. Tu vois, la com, payer les gens. Tout de suite, moi je reste juste pour travailler, et puis quand c'est fini, il y a le photographe qui vient, il prend la photo, celle qui vient... Mais ça, ça devient maintenant l'artiste qui est entouré, qui crée le marché, dans le marché de l'art, ça c'est une autre chose. Mais au début, il faut vraiment s'y donner à fond, corps et âme, 100%. C'est pour cela qu'on n'a pas trop de femmes autour de nous, les enfants, c'est compliqué parce qu'il faut bouger, il faut chercher où est-ce que ça va tenir.
- Ramata
Donc la vie d'artiste, c'est une vie de solitaire ?
- Eddy
Beaucoup, ouais. En même temps solitaire, en même temps solidaire avec plein plein de gens, mais à un moment t'es seul parce qu'il faut être seul pour créer. pour voir que la nuit, beaucoup seul, dans des coins un peu où ta famille n'est pas là pour ne pas être dérangé. Et puis la famille, quand tu vas les voir, c'est juste pour fêter. Ah, je viens vous voir, mais après tout de suite, tu as envie de partir.
- Ramata
En tout cas, c'est intéressant que tu dépeignes la réalité de ce qu'est le métier d'artiste, parce que parfois, quand on regarde sur les réseaux sociaux et qu'on voit des jeunes qui ont l'air d'avoir percé rapidement, on se dit Oh, c'est bon ! en faisant de la photo ou de la peinture. Voilà certains artistes que j'ai pu voir à la foire d'art contemporain qui a eu lieu à Paris. C'est vrai qu'on peut avoir l'impression que c'est facile, en fait, parce qu'on nous dit... D'un côté, on nous dit aussi, oui, mais si tu postes régulièrement sur les réseaux sociaux, on va te repérer et peut-être que tu vas percer grâce à ça. Donc, d'un côté, on a ce discours-là. Et de l'autre, on a des personnes qui sont comme toi, qui disent, non, mais c'est des années de travail, c'est des années de... d'expérience, d'expertise, et c'est des opportunités du réseau aussi.
- Eddy
C'est vraiment beaucoup de travail, beaucoup de temps dans les ateliers. Tu te dis, est-ce que ça c'est bon ou c'est pas bon ? Beaucoup de faces, tu refais, tu... C'est vraiment... Moi, je pense que... Bon, après moi, ce que je n'aime pas dans ces milieux, c'est qu'il y a quand même beaucoup de profiteurs, même beaucoup. Comme tu dis, ces jeunes-là, ils ne savent pas qu'on profite d'eux. On va leur dire, ah, t'es bon, t'es sexy, viens, on va t'exposer à Paris. Mais au bout du compte, ce n'est pas lui qui gagne, c'est l'autre qui gagne. Et c'est un peu, voilà, c'est ce que je trouve un peu... Moi, je suis un peu anti ce monde-là. C'est pour cela que j'ai essayé un peu de contourner. Mais des fois, on a envie d'aller, tu vois. Des fois, on a envie d'être séduit par ces gens. Oui,
- Ramata
donc, ce qu'on comprend, c'est que toi, t'es un peu méchant vis-à-vis du milieu, des agents, des galeries qui vont... Dans le business model et la rémunération, c'est de prendre une commission sur le travail des artistes, ou en tout cas de prendre une part sur les ventes qui sont effectuées.
- Eddy
Voilà, donc du coup, le milieu de galerie, c'est vraiment un milieu... J'ose pas trop. Imagine, d'un risque, c'est une dame que moi je respecte beaucoup, parce qu'elle, on dirait qu'elle a compris. Dans mon esprit, j'ai peur d'eux. Donc à chaque fois... qu'elle me suppose, elle m'achète direct 2 ou 3 oeuvres avec un bon prix et puis elle me dit bah il dit au coup tu j'ai t'achète la moitié donc la moitié en chèque la moitié en espèces parce que je pense qu'elle veut aussi protéger les impôts tout ça les trucs donc tu vois à partir de ça déjà tu sens que déjà il y a un petit marché à ce temps là parce que elle va dire quoi ? ben j'ai acheté 10 tableaux à la moitié de ce qu'elle m'a donné en chèque, tu vois ? Or que là, en espèce, j'ai eu d'autres sous, donc il y a aussi une espèce de magouille. Pour cela, je préfère être dans la rue, interroger les gens, plutôt dans ce travail, surtout les enfants, parce que je fais aussi beaucoup d'ateliers avec des enfants pédagogiques. Je fais beaucoup d'ateliers dans les écoles, dans les maternelles. Dans les EHPAD aussi, j'ai fait des EHPAD, des ateliers, des terres, tout ça avec des yeux. Donc moi je suis vraiment, je me penche beaucoup, je me vois comme un artiste de la société. Je peux être où j'étais au Pakistan, j'étais vraiment avec les Pakistanais, moi c'est vraiment le contact humain qui m'intéresse dans l'art, et donc du coup je ramène ça aussi, parce que le savoir-faire artistique, tout le monde aime. Si tu sais faire quelque chose dans n'importe quelle culture, si tu sais faire quelque chose artistique, les gens, les amis, les enfants, ils vont t'aimer. Ils vont vouloir que tu leur montres comment tu fais ça. Donc voilà quoi.
- Ramata
En fait, le point de départ, c'est aussi quand toi, tu es très engagé et tu n'es pas dans une démarche où tu te dis que tu vas devenir le numéro un financièrement ou le numéro un dans la notoriété. Tu ne cherches pas un succès rapide en fait. Alors que parfois, on peut retrouver ça dans le milieu de la musique, dans la mode ou dans toutes les industries culturelles et créatives, des personnes qui ne travaillent pas suffisamment leurs compétences et leur art et qui veulent par contre rapidement accéder à la lumière. Et ça, c'est vrai que ça crée des frustrations et des déceptions parce qu'elles ne se rendent pas compte de la réalité du travail qu'il y a derrière. Ouais,
- Eddy
c'est ça. Parce que tu imagines, dans chaque travail... que tu veux faire sans avoir fait des recherches et aboutir vraiment à un truc fort, ben, on va dire, tu connais tel, quand tu vas voir tel maître. Donc, ça veut dire, on ne va pas réinventer la roue. Donc, oui, dans le travail artistique, je te jure, Amata, tout ce qu'on fait, ça existe déjà. Tout. Mais... Comment est-ce que tu peux dévier ça et dire autre chose et machin, trouver d'autres lignes, angles, je sais pas, couleurs, tout ça, parce que les formes, c'est ça tout ça, le monde de l'art, c'est formes, couleurs, angles, et après à la fin, je sais pas, c'est les discours qu'on va nous demander. Mais, il faut vraiment pousser tes richesses loin. Si t'as envie de faire, par exemple, une voiture, exemple, une voiture... en boite de conserve, essaye de chercher. Tu cherches, tu cherches, tu verras, tu verras. En 1800, Messe-et-Elle avait voulu faire un truc comme ça. Et il n'a pas abouti. Par exemple, moi, pour les hommes canettes, j'ai oublié de dire ça, c'est que, à part tout ce qu'on a évoqué là, c'est aussi une sculpture. Parce que je suis sculpteur. Moi je n'ai pas voulu des sculptures figées comme ça, qui ne bougent pas. Parce que j'ai aussi fait des recherches dans la sculpture. On a commencé à l'époque égyptienne, on descend chez les Grecs, on vient chez les Romains, on descend tac tac tac. Mais tous c'est la même chose, ça ne bouge pas. Alors quand on arrive dans l'époque moderne là, on voit les sculpteurs qui commencent à questionner ça, comme le Jean Tchengeli. Tu vois, Jean Tingeli, je ne sais pas si tu connais ce sculpteur suisse. Il a tout amusé là-bas, je suis allé. En fait, avec lui, moi je suis en commun. Donc en fait, je suis vraiment son petit lui, mais autrement. Mais lui, il n'a pas fait des formes humaines. Parce que moi, c'est des formes humaines. Parce que quand je vois une sculpture, étant qu'Africain, c'est quand même une forme humaine. Ça doit représenter l'humain. ou l'animal, ou une forme que nous les humains on va dire, ah ça c'est ça. Et donc lui, il est parti dans le côté circulaire, tout ça, les machines. Mais après, parce que c'est aussi l'Europe, c'est son époque. Mais quand tu rentres dans son musée, c'est un musée vivant. C'est un musée, quand tu rentres, ça fait du bruit. C'est des machines qui tournent, tu montes en haut. Jamais ça s'est arrêté. Et donc lui aussi, il s'est questionné autour de la sculpture. Pourquoi la sculpture ça bouge pas ? Pourquoi c'est fugit ? Et donc moi, en cas net, il y a ces questionnements aussi, ces travails-là. C'est qu'à un moment je porte, je rentre dedans, je deviens sculpture vivant. Donc je peux faire des mouvements parce que c'est moi-même l'être humain qui est dedans. Je bouge, mais je peux aussi décider de ne plus bouger. Je deviens sculpture. Et quand je bouge, j'ai déjà ce que tu dis en mouvement, mais je peux aussi l'enlever. Je peux enlever, je le laisse installer dans une chaise. Moi, mon costume de canette, il peut s'asseoir dans une chaise avec sa tête. Au fait, si tu passes, tu crois que c'est moi, quoi. Mais en fait, il n'y a personne dedans. Mais après, tu peux aussi le mettre dans un mannequin. Le lendemain, les gens, ils passent, ils le voient, il est sur un mannequin debout. Tu vois ? Tu peux aussi le prendre, tu le mets comme un... branché comme un pantin avec une file qui vient d'en haut et il balance comme un... Tu vois, tu peux le faire coucher, tu peux le faire croiser les jambes. Donc c'est ça. En fait, c'est vraiment une sculpture auquel on peut prendre soin. C'est l'utiliser et pas le laisser dans un coin de la maison qui bouge pas. Et c'était ça aussi. Bon, tu vois, c'est un travail. Il y a tout ça. Si on peut parler des jours et des jours, c'est qu'un travail artistique, il y a toujours l'évolution. Il y a toujours une évolution derrière. Parce que là, maintenant, on peut se dire, bon, on prend des sculptures. Tout le monde est intact, t'as des sculptures, je peux installer 5 personnes, 5 mannequins de magasins en canette. Et puis une, un bonhomme vivant, je fais comme les mannequins, je bouge pas. Et puis à un moment, je bouge, tac, ça change tout. Donc on fait un concours de sculpture, moi je peux gagner par exemple. Parce que je veux avoir ces discours-là, je dis, ben écoute, là-bas c'est des sculptures, moi je bouge, mais je peux aussi pas bouger, donc garder une sculpture vivante.
- Ramata
Très bien. Donc on sent que c'est un travail, toi, en fait, vraiment quelque chose de... ta propre interprétation de cette notion de sculpture, ce qui est en mouvement, en fait, qui n'est pas quelque chose de figé, comme on peut les imaginer jusqu'ici.
- Eddy
Parce qu'en fait, la sculpture, en fait, quand on parle de la sculpture, c'est le côté figé, en vrai.
- Ramata
Complètement.
- Eddy
Et donc moi, en fait, j'essaie d'être les deux.
- Ramata
Clairement, et après on sent cette idée de... C'est un mouvement permanent, comme tu l'expliquais. En fait, l'Amokanet, tu peux être à l'intérieur, tu n'es pas à l'intérieur. Et à chaque fois, on peut... Et en fait, chaque fois qu'il y a une représentation d'un Amokanet, c'est une expérience totalement différente d'une ville à l'autre. Que ce soit au Congo, que ce soit à Rome, que ce soit à Paris, à chaque fois, en fait, c'est une nouvelle représentation et c'est une nouvelle performance.
- Eddy
Oui, ça me suit. On faisait toi tu es dedans, moi je suis dedans. Les mouvements que toi tu vas reproduire, ça ne sera pas la même que moi je reproduis. Parce que ça sera maintenant tes mouvements à toi, toi ton corps te dit de faire. Donc à chacun ce mouvement, à chacun ce bruit. C'est vraiment un truc magique.
- Ramata
Et bien ce sera le mot de la fin.
- Eddy
Le mot de la fin, je m'aimerais bien trouver des mini canettes, des bébés canettes qu'on donne là. Les tout mini là, les tout petits pour faire pour des enfants. Comme ça. Pour avoir aussi le bruit des enfants qui sera moins bruyant, mais aussi un peu rigolo.
- Ramata
Donc à la recherche des bébés canettes, mais ça t'en as moins quand même dans les déchetteries et tout ça, globalement t'en as moins ?
- Eddy
Il y en a moins, oui, il y en a moins parce que des fois ils font juste des promos, mais du coup il faut être là. Des fois quand tu passes comme ça, l'improviste, tu vois, il donne ça dans le rue, ça, les tout mini canettes là, ils en boivent. J'adore. Donc voilà, merci.
- Ramata
Merci à toi. Ça faisait longtemps qu'on essaie de programmer cette interview. Ce sera l'une des premières interviews de 2025. Moi, j'ajouterai dans les notes de l'épisode toutes les infos par rapport aux carnavals et par rapport au festival et également vidéos et photos de l'homme qu'elle est pour qu'on puisse vraiment bien se visualiser tout ce que tu fais. Et puis, je mettrai le lien vers ton compte Instagram pour qu'on puisse te suivre. Je te remercie. pour ton temps et je te dis à très vite en Afrique ou ailleurs. Merci d'avoir écouté l'épisode jusqu'au bout. Je vous invite à pratiquer quelques petits gestes à impact fort pour m'aider à gagner de la visibilité sur ce podcast. Vous pouvez partager l'épisode à trois de vos amis. Vous pouvez laisser un commentaire sur Apple Podcast ou Spotify. Je vous invite également à cliquer sur les cinq étoiles pour donner de la force. Je vous dis à très vite en Afrique ou ailleurs.