- SG
Bonjour, bienvenue sur Éco de territoire, le podcast inspirant de la Convention des entreprises pour le climat, qui donne la parole aux acteurs engagés et passionnés qui construisent l'économie régénérative de demain. Je suis Stéphane Gonzalez, alumni de la promotion 2023, et je vous emmène sur les territoires du bassin lyonnais et des Alpes à la rencontre de dirigeantes et de dirigeants qui contribuent à dessiner les contours d'un avenir durable. Et aujourd'hui, nous avons la chance de nous déplacer à Brignais, dans le sud-ouest lyonnais, chez une entrepreneure lyonnaise. qui a fait de son ancrage local une force pour développer son aventure industrielle en France et un peu plus loin sur la planète. Alors à travers sa holding Staten, elle accompagne le développement de ses deux filiales de 85 collaborateurs que sont Aerotextile Concept et Energence. Cette dirigeante, c'est Stéphanie Milton, avec qui nous allons échanger sur son engagement vers l'économie dite régénérative. Mais pas seulement, puisque nous avons la chance d'être aussi avec Mélanie Cluzaud, qui est la responsable du développement et de la RSE, et qui était aussi la Planet Champion. de la CEC. Stéphanie, bonjour.
- SM
Bonjour Stéphane.
- SG
Mélanie. Bonjour. Bonjour. Ce que je vous propose, c'est qu'on se tutoie.
- SM
Oui.Pas de souci.
- SG
Bon, en même temps, on ne va pas se cacher que Stéphanie, on se connaît depuis plus de 20 ans. On n'est plus des jeunes entrepreneurs, mais on l'a été. On s'est beaucoup croisés sur les chemins de l'Ouest lyonnais. Et en 2023, j'ai découvert avec plaisir que tu te lançais dans l'aventure de la CEC. Et comme on partage un peu cette devise pensée globale, agir local. Je suis heureux qu'aujourd'hui tu puisses nous apporter ton témoignage qui à mon avis sera fortement teinté de collaboration territoriale. Alors ce que je te propose déjà c'est de nous présenter Staten Aéro Textile Énergence.
- SM
Alors c'est pas simple d'ailleurs, ça a été une vraie complexité pour notre feuille de route. Donc le groupe Staten est composé de deux entreprises industrielles, Aéro Textile Concept qui fabrique des diffuseurs d'air en textile et Énergence, donc fabricant de machines spéciales et intégrateur de solutions en automatisme, en robotique. Et avec ces deux entreprises, il y a Staten qui est la holding et qui concentre des moyens partagés. On est 100, tu as dit 80, mais ça y est on est 100. Et nos solutions sont proposées à des industriels et à des installateurs en génie climatique et gestion de déchets également.
- SG
D'accord. Et alors, j'ai dit un peu plus loin sur la planète. C'est vrai ?
- SM
Alors oui, surtout pour la partie gaine textile, où en effet, on livre nos produits jusqu'à Hong Kong, par exemple, et donc un peu partout sur la planète.
- SG
D'accord. Alors pour ceux qui ne te connaissent pas, je vais aller un peu plus loin, parce qu'on va parler quand même de ton aventure de dirigeante, et elle s'inscrit quand même dans une belle lignée familiale, puisque ton père, Paul Minssieux, a fondé le groupe Clauger. qui est quand même, on peut le dire, une pépite industrielle. Aujourd'hui, c'est ton frère Frédéric qui la pilote. On n'en a jamais discuté entre nous de ça, en fait, mais ça m'intéresse du coup. Comment tu décides, toi, de te lancer dans l'aventure industrielle ? Tu n'as pas eu le choix ?
- SM
Alors, ce n'est pas du tout une question de choix, bien évidemment. Il y a eu des étapes. Et avant tout, c'est le projet industriel qui m'intéressait. Moi, j'ai fait des études dans une école de commerce traditionnelle, mais au Canada, à Montréal. avec une spécialité gestion de prod. Et donc, je suis rentrée dans la partie production, finalement, du groupe, qui était donc ATC et Énergence. Et puis, voilà, petit à petit, on prend goût et puis on a envie d'impacter un peu plus, de mener son projet. Et voilà. Et donc, en 2015, j'ai même pris mon indépendance et Staten est apparu. Et aujourd'hui, on est 100 et on fait à peu près 11 millions de chiffre d'affaires.
- SG
Le mot est lâché. Donc, forte personnalité, forcément. Alors, là, on a parlé de l'entreprenariat. Maintenant, je pense qu'on va parler d'un sujet plutôt régénératif, le fameux régénératif. Et la première question, je vous la posais toutes les deux, finalement. Le mot régénératif, vous l'avez entendu quand pour la première fois ? Pour vous, c'était quoi ?
- SM
Alors, ce n'était pas régénératif, c'était la perma-entreprise. Ça a commencé comme ça, avec Norcis. donc la famille Brezat donc c'était des notions nouvelles où en fait l'idée c'était de pouvoir moi c'était toutes les notions de créer de la valeur mais autre que financière et donc il y avait une forme de réponse à ça et voilà donc ça remonte à peu près un an et demi, deux ans non deux ans maintenant et j'ai débarqué dans le bureau et j'en ai parlé à Mélanie qui tout de suite a rebondi également.
- MC
Moi la partie régénérative, je me souviens de la première fois où je l'ai comprise, c'était la première session de la CEC pour le coup. Et j'ai vraiment mis ça en lien avec créer un modèle qui soit compatible avec les limites planétaires, qu'elles soient environnementales ou sociales.
- SG
D'accord. Et alors, qui c'est qui pousse au déclic et au CEC ? Qui pousse le truc ?
- SM
Là encore, une question de rencontre. Donc, on se posait beaucoup la question avec Mélanie de comment monter le volet environnemental de la politique RSE, en se disant qu'on ne savait pas par où partir, comment partir. Et un ami m'a parlé de la CEC et c'était à la toute fin. On est passé sur le fil et on a trouvé l'opportunité géniale de se dire, on ne sait pas trop ce qui va se passer, mais en tout cas, on ne pourra plus reculer. Et on n'aura que le choix d'avancer. Donc, on a sauté comme ça, sans trop savoir.
- MC
Et puis, c'était l'assurance de se dire, en fait, dans un an, c'est sûr, on aura bougé. On aura progressé, on se sera posé plein de questions. Et du coup, on aura bougé. Et c'était vraiment ça, le déclic de se dire, en fait, on prend l'engagement qu'on va bouger.
- SG
D'accord. Et vos convictions environnementales, elles étaient déjà fortes à l'époque ?
- MC
Moi... Plutôt oui. Pas parfait, loin de là. Mais par contre, je commençais à me poser pas mal de questions, entre autres, vu le domaine dans lequel je travaillais, la partie industrie, où je me dis que les gaines textiles, par exemple, c'est accroché à de la clim. La clim, ça me paraissait plus être une partie du problème que de la solution de la crise environnementale. Et de me dire, comment est-ce qu'on va pouvoir faire une industrie où c'est compatible avec tout ça ? Et j'arrivais à me poser pas mal de questions. Donc, c'est arrivé au bon moment, je pense.
- SG
Ok. Et je me tourne vers Stéphanie. Les trois premiers jours, comment tu les vis ?
- SM
Alors, un nuage, en fait, un brouillard même. Je pense qu'on en prend tellement plein la tête que tout le monde ne le vit pas de la même façon. Moi, il y a eu comme une forme de protection et de se dire, OK, d'accord, je sais, c'est une évidence qu'il faut bouger, mais je n'ai rien retenu de pourquoi, en fait. Mais je suis sortie de là avec la conviction que maintenant, ce n'est plus possible de faire comme si de rien ne se passait.
- SG
C'est ce que vous avez mis dans votre feuille de route. Vous avez mis brouillard, en effet. Alors maintenant que la CEC est passée, que vous avez un peu vécu, que vous avez maturé, est-ce que vous avez déjà pu mettre des choses en place ? Et finalement, c'est quoi les grandes lignes de votre feuille de route ?
- SM
Je laisse la main à moi.
- SG
Facile, ça.
- MC
Ce qui est bien tombé, c'est qu'on a fait la CEC en même temps que la détermination de notre raison d'être. Et donc, on s'est retrouvés avec deux beaux projets qui se sont un peu télescopés et qui se sont bien retrouvés. Nos leviers sont assez cohérents entre les deux, ce qui était plutôt chouette. On a un levier autour du développement des compétences de nos collaborateurs. Donc là, c'est vraiment de se dire qu'on veut les mettre au cœur des process de décision et qu'ils puissent impacter et être impactés par la vie du groupe. Donc ça, on avance. On avance avec la création de collectifs, de pouvoir réussir à prendre l'habitude de leur laisser les rênes des décisions. On avance aussi sur une partie plus prise de conscience de ce qu'ils viennent faire chez nous. et pourquoi ils le font. On a avancé très concrètement avec des choses comme le bilan social individuel, qui est un récap de la rémunération qu'ils ont eue sur l'année, à la fois en termes financiers, à la fois en termes, on va dire davantage, au global. Et ça, du coup, c'était un premier pas qu'on s'était promis de passer avec l'écriture de notre feuille de route. Donc ça, c'est la partie plutôt collaborateur. On a une partie autour d'une réflexion sur nos produits. Qu'est-ce qu'on vend ? Comment on le vend ? À qui on le vend ? Ça reste une grosse question. Par contre, on avance sur la partie éco-conception, on a pas mal avancé sur la partie bilan carbone. Ça, ça a été deux grosses étapes qui étaient intéressantes à passer. Et le dernier axe, il est autour de l'impact sur notre territoire. Donc là, on a une première phase plutôt de connaissance. Qui sont nos voisins ? Comment est-ce qu'ils travaillent ? Comment est-ce qu'on travaille ? Comment est-ce qu'on pourrait travailler ensemble ? Et ça, concrètement, ça s'est mis en place avec le développement d'un collectif RSE. avec les entreprises de notre zone d'activité.
- SM
Donc ça, c'est vraiment les projets court terme. Après, plus long terme, il y a tout ce qui concerne la transformation du business model. Et pour nous, ce qui était important au début, c'était d'intégrer des compétences nouvelles. Et là, on a intégré une DRH, on a intégré également une directrice marketing et innovation, parce qu'on sait que cette transformation nécessite obligatoirement des données marché, obligatoirement une gestion du changement. Et donc, l'idée, c'était d'abord, finalement, on ne sait pas encore exactement quel chemin on va prendre pour arriver à nos objectifs. Mais en tout cas, il faut des ressources en interne pour pouvoir justement décider et propulser l'entreprise.
- SG
Sur votre feuille de route, ce qui m'a fait écho, c'est les indicateurs. Vous avez mis quand même des indicateurs. Vous avez même dit que vous alliez progresser depuis la dernière fois où vous aviez fait votre bilan carbone. Vous avez mis que vous avez fait le bilan carbone en 2022.
- SM
Ça a été d'ailleurs les premières actions. On est rentré à la CEC, on a bien compris que ce n'était pas normal de ne pas avoir son bilan carbone, ni d'avoir fait une fresque du climat. Donc ça a été les deux premières étapes. Et là aujourd'hui, il y a un comité RSE qui doit se mettre en place, qui doit permettre évidemment de calculer. Et d'ailleurs, il y a l'idée de pouvoir intégrer les compétences, se faire former finalement pour pouvoir nous-mêmes être autonomes. Et puis derrière, d'avoir la politique d'optimisation. beaucoup plus lisibles. Aujourd'hui, on est encore dans des petites actions.
- MC
L'idée, c'est vraiment qu'ils puissent porter la stratégie climat. Parce que du coup, aujourd'hui, c'est des choses qu'on identifie pas mal avec les Codires, mais qu'on puisse avoir des collaborateurs qui portent la stratégie climat et que du coup, ce soit plus simple dans la mise en place des actions. C'est vraiment un des effets qu'on recherche.
- SG
Il y a toujours avec ce souci de pouvoir calculer. En fait, c'est ce qui m'a surpris.
- SM
Surtout pas de greenwashing. On a vraiment un combat, c'est d'arriver à mesurer ce qu'on fait et de savoir qu'on va dans la bonne direction. Voilà, donc c'est l'idée.
- SG
Et du coup, c'est quoi l'objectif ? 5 ans, 10 ans alors ?
- SM
L'idée,
- MC
c'est moins 30% en 2030. C'est pouvoir s'aligner avec les accords de Paris. C'est vrai que quand on l'a déterminé, on l'a un peu déterminé comme ça, parce qu'on s'est dit en fait, il nous faut un chiffre, on ne se rend pas encore compte de quelles actions, voire quel impact. Mais en fait, finalement, ça devient, je vais peut-être un peu loin en disant que ça devient notre étoile polaire, mais c'est un objectif et du coup, ça nous permet un petit peu de timer dans les années à venir ce que ça veut dire pour nous d'atteindre nos objectifs de stratégie climat.
- SG
Ok, alors peut-être qu'on peut parler de comment on embarque les gens dans l'aventure, parce qu'évidemment, quand on est à la CEC, enfin au sein de la CEC, finalement, on est un peu dans un autre monde. Et quand on sort de ce monde-là, ce n'est pas toujours évident. Vous avez fait comment, vous, pour embarquer les gens, pour leur expliquer ?
- SM
Alors, il y a déjà deux types de collaborateurs. Il y a déjà les codires. Donc je vais parler d'Ecodire, Mélanie tu parleras des collaborateurs. L'Ecodire c'est pas évident justement parce qu'en fait ils sont dans des feuilles de route court terme ou moyen terme on va dire, donc avec des enjeux économiques importants. Et puis nous on revient des sessions avec plein d'informations dans la tête, avec des experts qui nous ont éclairé sur plein de choses et on ne sait évidemment pas retransmettre tout ça. Donc on a décidé de faire deux weeks déjà avec les Codires pour commencer à tisser un socle un peu commun. Et ils vont participer également à la mini-CEC qui est mise en place au mois d'octobre pour justement partager au moins le même constat et la même volonté d'avancer. On entame là un parcours avec des accompagnants sur la partie stratégique qui permettra derrière de décider des feuilles de route plus précisément. Et pour moi, c'est une étape qui sera collaborative avec les Codia.
- SG
Il y a une grosse partie sensibilisation. Ensuite, il y a les collaborateurs, évidemment.
- MC
Sur la partie collaborateurs, on a vraiment tous les ventailles qui sont bien représentées. C'est vrai qu'avec 100 personnes, on a des avis différents. On va avoir des gens qui sont ravis qu'on prenne enfin le sujet, qui voudraient que ça aille beaucoup plus vite, qui trouvent qu'on n'en fait pas assez. Là, on va plus être sur du... On va falloir les faire freiner, en fait. Leur dire, on y va, promis, on y va, on vous... Ce n'est pas de la fumée, on y va vraiment. Par contre, on ne peut pas y aller d'un point de vue brutal. On va y aller étape par étape. Par contre, on sait qu'on va pouvoir compter sur eux. Ils sont contents qu'on y aille et c'est important. On a ceux qui pensent que c'est important, mais si vraiment ça ne pouvait pas trop les impacter, ce serait bien. On a ceux qui y vont pour nous faire plaisir plus qu'autre chose, on le sent. Et puis, on a ceux qui sont vraiment plutôt contre. Si on pouvait les laisser tranquilles avec ce sujet-là, eux, ça ne les impacte pas, ce n'est pas leur sujet. Mais en fait, on se rend compte qu'il y a les mêmes étapes pour tout le monde. Il y a une première étape d'explication, il y a une étape de sensibilisation, il y a beaucoup de moments où il faut répéter. Et qu'en fait, on a l'impression qu'on ne les touche pas. Et qu'en fait, finalement, six mois après, il nous ressort un truc qu'on leur a dit. Donc on se dit, si, en fait, on avance. Et on se rend compte que même si c'est très long, ça infuse. Ça devient, on ne peut pas dire des réflexes, mais on commence à se poser la question. Et on sent que l'embarquement, en fait, il est lent, il est très lent. Mais je pense que... C'est une bonne chose qu'il soit lent parce que du coup, il sera efficace sur du long terme.
- SG
Du coup, question aussi à la dirigeante. Est-ce qu'il n'y a pas aussi une inquiétude des collaborateurs de se dire mais c'est encore une lubie de la dirigeante ? Où est-ce qu'elle va ? Est-ce qu'on peut faire de la rentabilité en faisant du bien commun ? C'est aussi logique, non, qu'il y ait des questions qui se posent ?
- SM
Bien sûr, bien sûr, bien sûr. En effet, surtout qu'il y a une partie investissement qui ne paye pas toujours court terme. Mais bon, ça, c'est l'enjeu de toute entreprise. Il faut avoir un mélange, en fait, de croire en ses instincts quand même et croire en ses convictions et d'arriver à transformer finalement tout ce qui est contrainte en opportunité. Parce que je crois beaucoup finalement à ce nouveau. Cette nouvelle donne finalement doit nous permettre de faire mieux et de mieux et même de mieux vivre finalement derrière. Donc, vraiment travailler sur les opportunités. Et toujours à travailler aussi sur des choses qui peuvent payer tout de suite et des choses qui payent à plus long terme.
- SG
Fameuse petite victoire. Et j'aimerais quand même t'entendre un peu sur le côté. territoriales. Moi, ça m'intéresse parce que sur votre feuille de route... Alors ça,
- SM
ça m'avait marqué. On a eu une journée qui était plutôt ancrée sur tout ce qui était réseau et tout ce qui était finalement le fait que sur un territoire, on devait développer une capacité finalement à fonctionner de façon plus autonome, on va dire. Donc, toutes ces interactions-là. Alors oui, en effet, c'était faire dans ce qu'on a depuis un moment, parce qu'on a toujours été dans les associations d'entreprises, qui à l'époque étaient plutôt asbines. et là on découvre finalement que c'était quand même le début de tout ça donc oui la collaboration et je pense et pour l'entreprise et pour les collaborateurs, le fait de pouvoir échanger, discuter pareil, maintenant la porosité entre qui on est ce qu'on donne au boulot c'est quand même très très fin donc finalement même les compétences, les habiletés qu'on a sur un champ personnel, il faut pouvoir les mettre à contribution sur un... Dans l'entreprise, il y a toute la notion de création d'innovation par les échanges. On a souvent discuté du fait de pouvoir ouvrir mon atelier et de mettre à disposition mes machines pour du prototypage. Et je crois beaucoup à la... Si on crée de la valeur, si on crée des liens, si on crée des partenariats, tout le monde sera gagnant, en fait. Si on construit des murs, si on travaille sur les peurs, tout le monde sera perdant. En l'occurrence, et d'ailleurs pour projet de pouvoir déménager de notre site actuel, mais pas déménager tout seul, en fait déménager avec d'autres personnes pour pouvoir tester d'ailleurs et des modes de gouvernance différentes autour d'un tiers-lieu et d'avoir un lieu finalement qui permette à l'ensemble des personnes qui vivent sur un territoire de pouvoir se rencontrer, d'échanger, discuter, créer d'autres choses.
- SG
C'est vrai que venant de la bouche d'une dirigeante, ce que tu viens de dire, ce n'est pas toujours évident à entendre. Ça fait du bien, mais ce n'est pas non plus évident forcément à comprendre.
- SM
Les mentalités bougent. Là, je trouve que récemment, ça va de plus en plus vite. Ce n'est jamais assez vite, mais ce sont des notions qui sont de plus en plus échangées quand même.
- SG
Petite question, puis après je passerai pour une petite question pour Mélanie. Est-ce que toi, ça a changé la CEC ? Ça a changé ton leadership de comprendre tout ça ou d'approfondir ? Parce que tu étais déjà quand même un peu là-dedans. Est-ce que ça change ton leadership, ta façon de piloter ?
- SM
La CEC en tant que telle, si ça a permis de faire grandir le groupe et la gouvernance du groupe. Aujourd'hui, j'ai un codire où on est 11 personnes en tout. Donc ça a permis de faire évoluer finalement les prises de décision. Oui, le collaboratif. Et puis, quand je dis ça, c'est que ce soit au niveau des codires, mais au niveau également de l'ensemble des collaborateurs. Les prises de décision sont de plus en plus à tous les niveaux. Et il n'y a pas une personne qui décide pour l'ensemble de l'entreprise. Donc, ça fait partie des cycles et de maturité des entreprises. Donc, voilà, on va dire qu'on a passé une étape.
- SG
Justement, ça m'intéresse d'avoir l'avis de Mélanie, parce que souvent, on a du mal à... Je dirais à parler à son dirigeant, c'est des sujets quand même, ils sont compliqués, on pourrait dire entre guillemets assez touchy quand même. Alors comment tu gères ça toi ? Bon elle est à côté de toi, mais c'est pas grave, elle n'écoute pas.
- MC
C'est une bonne question.
- SG
C'est la question piège.
- MC
Non, l'échange il se fait facilement, en plus du coup par la CEC on est passé par les mêmes étapes, alors pas forcément les mêmes ressentis, mais au moins on a partagé la présence aux mêmes événements. On a travaillé ensemble sur la feuille de route. Moi, ça m'a beaucoup fait grandir aussi, de me dire, mais en fait, c'est un groupe, c'est une centaine de collaborateurs. Comment on les emmène et comment on avance ? Après, pour moi, dans l'échange, c'est plutôt limpide. Ça se fait très bien. Et je me rends compte que ce n'est pas forcément le cas. On en parlait plus tôt. Il y a des responsables RSE qui ont du mal à convaincre leurs dirigeantes. Moi, ce n'est pas trop le cas.
- SG
C'est peut-être l'inverse, non ?
- MC
Oui, on se retrouve carrément sur ces sujets-là. Donc, je me rends compte que c'est plus simple comme ça et que c'est une force énorme pour pouvoir avancer sur cette démarche. Et que sans ça, ce serait très, très compliqué.
- SG
D'accord. Tu as parlé d'un ressenti qui n'était pas le même, j'ai entendu. Vous n'êtes pas le même âge, sans trahir vos âges. Du coup, est-ce que ça, c'est un point fort ? Est-ce que c'est un point d'achoppement ? L'âge ? Souvent, on dit l'âge, c'est un problème.
- MC
Lâche sur la tête.
- SM
Non,
- MC
je pense que c'est plutôt un avantage pour le coup de ne pas avoir le même point de vue de base. Sinon, ce serait moins riche.
- SG
OK. Et alors, c'est une question bête. On est dans l'industrie et c'est deux femmes qui me parlent. Est-ce que ça, ça peut aussi avoir un impact positif ? Ou est-ce que ça, ça joue ? Peut-être des femmes dans l'histoire ?
- SM
C'est peut-être moi qui verrai parce que je suis là. Non, c'est dingue. C'est dingue. Déjà, je me dis peut-être que dans 10 ans, on ne posera plus la question. C'est très bien. Après, je ne sais pas si ça change quelque chose. Ça permet... Les points d'entrée sont peut-être un peu différents. Il y a moins... Il y a peut-être un peu plus de collectifs, de façons de fonctionner. Mais bon, là, voilà, que ce soit une question sexe, question âge, c'est toujours pareil. On peut trouver des caractéristiques à n'importe quel âge, homme, femme, pareil.
- SG
Il fallait bien que je pose ma question de vieux has-been. Je te dis, c'était obligatoire. Alors là, on a presque terminé le podcast. S'il y avait des conseils ou à apporter à un dirigeant qui a envie de se lancer dans une démarche. d'économie régénérative. Comment pourriez-vous conseiller un dirigeant qui a envie de se lancer mais qui ne sait pas comment faire ?
- SM
S'inscrire à la CEC déjà, qui a été pour ma part plutôt une démarche stratégique plus qu'une démarche RSE. C'est vraiment de se poser la question où est-ce qu'on veut être et construire ce cap et quels sont les leviers qui vont nous permettre de bouger. Donc, moi, c'est vraiment ça. Et puis, il y a l'inscription aussi dans un réseau, évidemment, et de rencontre, l'inspiration. Il y a plein, plein de choses qui vont se passer. On est incapable de les prédire, c'est normal. Mais par contre, on a cette capacité de remise en cause, d'imaginer des choses. C'est nécessaire aujourd'hui. On ne travaillera plus de la même façon dans dix ans, c'est sûr.
- SG
Oui, du coup, pour le dirigeant, tu l'as dit, c'est travailler aussi sur sa vision. Et c'est vrai que...
- SM
Évidemment, en sachant que... Travailler sur sa vision et travailler avec d'autres personnes sur sa vision.
- SG
C'est ça pour penser autrement, mais pas différemment. Exactement. Méranie ?
- MC
Pour moi, le gros avantage, ça a été les gens qu'on a rencontrés. À la fois les personnes qui étaient sur scène, entre guillemets, et qui nous donnaient de l'information. Et à la fois les gens qui faisaient partie de notre camp de base, les professionnels, les... Les facilitateurs qui, du coup, nous ont vraiment orientés, qui nous ont challengés, qui nous ont poussés. C'est un puits sans fond de bonnes idées. Et des fois, de remise en question en disant, là, tu n'as pas été suffisamment ambitieux. Je trouve que ce n'est pas dingue, ta feuille de route. Donc, vraiment, c'est les rencontres et le réseau que ça crée derrière.
- SG
D'accord. Et c'est aussi ce qui transpire un peu dans votre feuille de route. Finalement, vous avez envie de porter la bonne parole aussi, j'ai l'impression.
- MC
Je ne sais pas si c'est porter la bonne parole. En tout cas, de faire des échanges et de pouvoir se nourrir de cet échange-là.
- SG
Mais presque, peut-être à l'initiative aussi. C'est ce que je lis sur votre feuille de route quand vous parlez d'écosystèmes, du territoire, du lieu où on pourrait passer les infos. Peut-être que j'ai faux, j'ai peut-être tort.
- SM
En fait, c'est peut-être presque plus permettre, créer l'occasion de le faire. C'est-à-dire qu'on s'en fiche de... Enfin, on n'a pas de bonne méthode. On fait comme tout le monde. On fait comme on peut, comme on le sent. Mais c'est de finalement pouvoir créer ces échanges parce que c'est comme ça qu'on grandit et qu'on arrive à faire bouger les choses. Parce que par contre, ça reste un dossier quand même où il va falloir qu'on soit beaucoup à bouger. Donc, on ne va pas faire ça dans notre coin. Ça, c'est clair.
- SG
Il faut toujours les pionniers pour bouger et aller à l'effet de levier. Alors, pour terminer... Question, je ne sais pas qui répond. Si vous aviez trois mots pour caractériser la démarche vers l'économie régénérative ?
- SM
Opportunité pour moi.
- MC
Un début de solution pour l'industrie.
- SG
D'accord.
- SM
Et puis moi, j'ai toujours mis en doute mon sujet de création de valeur, mais autre que monétaire. Donc valeur, mais on ne parle pas que des euros. Ça ne marche pas.
- SG
OK, ça fait plus que trois mots, mais ce n'est pas grave, ça marche quand même. Et Stéphanie, question si tu as une baguette magique ? Si tu pouvais changer la règle du jeu économique, tu changerais quoi ?
- SM
La réglementation qui nous contraint énormément sur nos choix, sur nos approvisionnements, de notre côté. Donc vraiment la complexité. Et puis la complexité également. Ah oui, il y a quelques années, je voulais faire du troc. Et puis tout de suite, on m'a dit mais non, mais n'importe quoi, on n'a absolument pas le droit. En France, on n'a pas le droit. C'est pas possible de troquer parce que c'est de l'évasion fiscale. Et donc, en effet, je comprends tout à fait les mécanismes, mais je trouve dommage, en fait, qu'il y a plein de choses qu'on pourrait tester et qui pourraient permettre justement de fluidifier beaucoup plus les relations et que ce n'est pas toujours possible. Donc voilà, un peu moins de cadre.
- SG
Une dirigeante qui parle de troc, mais on va trop finir ce podcast.
- SM
Mais il faut tout essayer, il y a plein de choses à faire.
- SG
Et question que finalement, je vous adresse à toutes les deux pour terminer. Qu'est-ce qui vous rend confiante dans l'avenir ?
- SM
Je crois profondément dans l'humanité. On a une capacité de rebond énorme et plein d'inventivité. Donc, je suis confiante.
- MC
Et moi, c'est vrai que ça bouge. On voit qu'en fait, c'est tout le temps en mouvement. Et ça, c'est...
- SG
Stéphanie, Mélanie, je vous remercie pour cette conversation franche et enthousiaste. Et comme d'habitude, je terminerai par une citation de Charles-Augustin Sainte-Beuve, qui était un critique littéraire et écrivain français du XIXe siècle. Si vous n'essayez jamais, vous ne réussirez jamais. Mais si vous essayez... vous risquez de vous étonner vous-même. Allez, encore merci et à bientôt.