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La vie est belle, essaie-la !

Lorène Vivier – Le pouvoir de la bulle – Partie 1

Lorène Vivier – Le pouvoir de la bulle – Partie 1

28min |04/10/2024
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Description

Lorène, jeune femme de 37 ans, avait un travail, des joies et des galères. Sa vie était faite de projets, ceux d’une jeune fille de son âge, rencontrer quelqu’un de bien, avoir des enfants… L’annonce du diagnostic a tout chamboulé dans son existence.  Il lui aura fallu un peu de temps pour récupérer de cette annonce. Après la tristesse du début et la colère, est venu le temps de l’acceptation et de l’adaptation.



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Nous remercions chaleureusement toutes les personnes qui ont participé à cette première saison : personnes malades, aidants, proches, professionnels de santé.


Un immense merci également à la Fondation d'entreprise IRCEM pour son précieux soutien, ainsi qu'à l’Agence CosaVostra pour la réalisation du visuel du podcast.


Ce podcast de l'ARLSA a été réalisé par Natacha Sels, la post-production est de Bertrand Chaumeton.

 

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Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    La vie est belle, essaie-la ! (SLA) , le podcast de l'ARSLA, qui met en lumière des personnes confrontées à la SLA et des professionnels engagés.

  • Speaker #1

    Je voulais vraiment transformer cette nouvelle complètement horrible, on va dire, en pépite finalement, et en faire un truc de génial en fait.

  • Speaker #0

    Lorène Vivier, le pouvoir de la bulle, partie 1, le 9 novembre 2022. À l'âge de 35 ans, Lorène Vivier a été diagnostiquée porteuse d'une SLA. Aujourd'hui, elle met toute son énergie à donner une couverture médiatique à la maladie afin de colelcter des fonds pour la recherche. Aidée en cela par celui qu'elle appelle son ange gardien, Pascal Bataille. Nous nous sommes donnés rendez-vous à son domicile situé dans la ville d'Annecy. J'y découvre une véritable équilibriste qui s'évertue à tenir la maladie à bonne distance pour vivre pleinement. Comme ces bijoux précieux, elle brille de multiples facettes, entre légèreté et infinie sagesse. Nous parlerons aussi bien de sa nouvelle vie sous les projecteurs que de son quotidien transformé par la maladie, de sa SLA un peu différente, de l'amour, de la pleine conscience et de l'étonnant pouvoir de la bulle dont vous découvrirez les effets dans les deux épisodes. Je vous propose d'écouter son témoignage. J'ai envie de le dire tout de suite, le titre qu'on a choisi pour le podcast, il vient de toi. Est-ce que tu peux le redire ?

  • Speaker #1

    La vie est belle, essaie-la ! SLA, je l'ai choisi, c'est parti de trois lettres, qui étaient S-L-A pour la sclérose latérale amyotrophique. Et je l'ai transformé en une phrase beaucoup plus jolie, c'est-à-dire la vie est belle, essaie-la.

  • Speaker #0

    Alors comment tu l'essayes la vie en ce moment ?

  • Speaker #1

    Eh bien, je l'essaye pleinement, c'est-à-dire qu'elle m'offre plein d'opportunités en ce moment. Depuis mon diagnostic, je vis des moments exceptionnels et hors du commun, on peut le dire, par rapport en tout cas à la vie que j'avais avant, qui était pourtant bien. J'aimais beaucoup ma vie avant aussi, mais là, elle me fait complètement sortir de ma zone de confort.

  • Speaker #0

    J'ai envie de savoir, qu'est-ce que c'était ta vie d'avant ?

  • Speaker #1

    Ma vie d'avant, c'était Lorène avec son travail, sa petite vie, ses projets, ses galères, ses joies.

  • Speaker #0

    Quels étaient tes projets, puisque tu parles de projets ?

  • Speaker #1

    Les projets qu'une jeune femme de 30 ans pouvait avoir, c'est-à-dire rencontrer quelqu'un de bien, créer une famille. Des projets qu'on peut avoir à mon âge en tout cas, et qui ont été complètement chamboulés à l'annonce du diagnostic. mais j'aime beaucoup ma vie aujourd'hui et elle a beaucoup de sens, beaucoup plus qu'avant même

  • Speaker #0

    Quand tu as eu le diagnostic, comment tu as réagi d'abord et puis comment tu es arrivée à vivre une vie avec du sens et dont tu parles là en disant qu'elle te plaît beaucoup ?

  • Speaker #1

    Quand j'ai eu mon diagnostic, je pense qu'il m'a fallu entre dix jours et un mois environ pour atterrir, pour savoir vraiment ce qui s'était passé Sur le moment, je ne connaissais pas la maladie, en fait. Le neurologue m'a expliqué un petit peu ce que c'était, ce qu'il en était, ce que ça faisait dans le corps, etc. Mais je n'ai pas su la gravité de la maladie tout de suite. Il ne m'a pas dit. Il m'a dit que c'était neurodégénératif, que ça ne se guérissait pas aujourd'hui. Je garde l'espoir qu'il y ait un traitement un jour. Mais en tout cas, il m'a demandé de vivre normalement. Il m'a dit, est-ce que vous voulez que je vous l'écrive en rouge ? J'ai dit oui, je veux bien écriver le mot en rouge. Donc il me l'a écrit sur la feuille où il m'avait expliqué, il m'avait fait un schéma du cerveau, de la moelle épinière, des muscles, etc. pour m'expliquer le fonctionnement de cette dégénérescence des motoneurones. Et voilà, après je suis sortie de l'hôpital ce jour-là avec mes parents. J'ai passé une petite semaine chez eux. Je suis ensuite... J'ai rentré chez moi, j'ai repris le travail au bout de dix jours. J'ai repris le travail machinalement.

  • Speaker #0

    Tu es retournée travailler, un peu comme si de rien n'était. Comment ça s'est passé dans ta tête ?

  • Speaker #1

    Je n'ai pas réalisé tout de suite, non. C'est de par mes amis qui se sont renseignés forcément. Ils m'ont dit qu'est-ce qu'il t'a dit le neurologue ? Comment ça s'est passé ? Tu es trois jours à l'hôpital. Et je leur ai dit, ben voilà, ils m'ont annoncé une sclérose latérale amyotrophique, donc forcément les gens ils tapent tout de suite sur Internet. Et c'est flippant, quand on regarde sur Google, c'est pas très glorieux en tout cas. Et c'est eux qui étaient plus choqués que moi finalement, parce que moi je m'étais pas renseignée plus que ça.

  • Speaker #0

    Toi tu l'avais pas fait, de taper sur Internet ?

  • Speaker #1

    Non, je n'avais pas forcément eu envie et pas envie de dramatiser.

  • Speaker #0

    Donc en fait, tu avais retenu une seule chose de ton médecin, c'est continuer à vivre normalement.

  • Speaker #1

    Oui, exactement, continuer à vivre. Et puis pour moi, rien n'était grave à ne pas avoir de force dans la main, finalement. Comment ça pouvait engendrer une maladie aussi terrible ? Et c'est plus tard que j'ai pris conscience un petit peu. Donc, j'ai travaillé encore six mois plus tard. Je travaillais dans une parfumerie à l'époque. Je travaillais chez Clarins dans une parfumerie. J'ai toujours été passionnée par ce que je faisais depuis tout le temps. Mais se battre pour rapporter un chiffre d'affaires ne m'intéressait plus. Je voulais vraiment transformer cette nouvelle complètement horrible, on va dire. En pépite, finalement. Mais ça a pris quelque temps, ça a pris quelques mois, je dirais. Je me suis dit, mince, quel est mon avenir aujourd'hui ? Comment ça va se passer ? Je ne suis pas quelqu'un qui me laisse aller. Et puis un jour, je me suis réveillée et je me suis dit, attends, on va en faire un truc de génial, en fait. Je me suis dit, cette maladie, on n'en entend pas parler. Elle est trop dans le silence, elle est trop dans l'ombre. J'ai envie de la mettre en lumière. Donc j'ai ouvert mon téléphone. J'ai regardé dans mon répertoire téléphonique. Je n'en ai pas 36 personnes qui sont médiatisées. J'en avais qu'une, Pascal Bataille, mon ancien employeur, avec qui j'ai gardé contact. Et j'ai décidé d'aller passer une semaine au Cap-Ferret toute seule, me reposer, d'aller sur Arcachon. Et je savais très bien qu'il était dans le coin. Je l'ai appelé, je lui ai dit, Pascal, je suis dans le coin, j'ai promis de vous appeler le jour où je reviendrai au Cap-Ferret. c'est-à-dire huit ans après, parce que j'avais travaillé avec lui en 2015. Et je lui ai demandé s'il était sur place. Et il m'a dit, écoutez, on peut se rejoindre. Je suis à Bordeaux tel jour, telle heure. Et je lui ai expliqué ma vie. Puis je lui ai raconté aussi mon diagnostic. Et je lui ai demandé s'il pouvait m'aider à la médiatiser.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu peux me parler de la relation qui s'est créée entre vous ?

  • Speaker #1

    C'est comme un grand frère. Je ne saurais pas expliquer, mais... C'est vraiment un ange gardien qui veille sur moi, qui m'explique comment ça se passe. Parce que moi, je ne suis pas du métier. Lui, il travaille beaucoup à la télévision, à la radio. Il a l'habitude de tout ce qui est les journalistes. Qu'est-ce qu'il faut dire ? Qu'est-ce qu'il ne faut pas dire ? Il y a des choses pour me protéger aussi. Je ne le remercierai jamais assez. Je vis des moments que je n'aurais jamais vécu avant. J'ai assisté l'année dernière au tournage de la série Ici tout commence Peut-être que tu connais sur TF1. C'est une série qui est quotidienne sur TF1 à 18h30 et une série que je regarde depuis le confinement. Le confinement a eu raison de moi là-dessus, moi qui n'étais pas très série. Je me suis prise au jeu, j'aime beaucoup, et j'ai pu être sur le plateau de tournage, avoir les acteurs à côté de moi, etc., parler de tout ça. Et moi, mon but, c'était de proposer un scénario d'un personnage qui a la SLA. Voilà, parce que le Ici, tout commence c'est une série sur le... La cuisine, en fait, c'est des jeunes gens qui apprennent à être chef cuisinier. Et moi, comme j'ai du mal à cuisiner toute seule, à couper, à éplucher, à émincer, etc., je me suis dit pourquoi pas qu'il y ait un jeune, parce que je tiens vraiment que ce soit une personne jeune qui ait les mêmes symptômes que moi. Donc je lui ai suggéré ça et on verra bien. Mais voilà, j'ai trouvé ça super. Je n'y serais jamais allée, je pense. Autrement, il y a plein de choses comme ça que je n'aurais jamais fait. C'est un passe-droit, on va dire, pour une vie incroyable, quelque part. C'est fou à dire. C'est fou à dire qu'une maladie comme ça peut vous emmener dans une sphère hyper magique.

  • Speaker #0

    Oui, c'est un peu une vie de paillettes et de stars.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Ce n'était pas du tout mon environnement jusqu'à présent. Je suis trop contente. C'est super, oui. Je suis ravie, puis les gens m'aident à chaque fois. Je rencontre, en Laponie, j'ai rencontré Marine L'Orphelin, l'ancienne Miss France. J'ai rencontré Claude D'Artois, un ancien de Koh Lanta. C'est Claude d'ailleurs qui a eu l'envie de faire un Fort Boyard.

  • Speaker #0

    Alors c'est une vie, comment tu pourrais dire, excitante, passionnante ?

  • Speaker #1

    Ah oui, passionnante, ça c'est sûr, passionnante, impressionnante. Je me dis que ce n'est quand même pas la vie de tout le monde. et je me sens hyper privilégiée.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, au niveau des symptômes, est-ce qu'il y a des choses qui ont vraiment évolué ? Parce qu'en fait, ça fait un an et demi à peu près.

  • Speaker #1

    Oui, ça fait un an et demi. Oui, j'ai une perte de force progressive dans la main, dans le bras, une atrophie des muscles également dans la main, dans l'épaule, dans l'homoplate. Et ça devient un peu fatigant au quotidien parce qu'il faut des muscles pour porter un bras. Et quand il n'y en a plus, le bras pèse très lourd. Mais bon, on vit avec.

  • Speaker #0

    Comment tu t'adaptes ? Comment tu t'adaptes à ces modifications, ces changements, cette évolution ?

  • Speaker #1

    Je m'adapte avec des petites techniques au quotidien. Je demande de l'aide maintenant, parce que je suis quelqu'un qui est très indépendante et très autonome, et je demandais rarement de l'aide. Maintenant, je n'ai plus le choix. Ne serait-ce qu'un truc tout bête, ouvrir un... J'ai des amis qui me font des conserves, ou mes parents qui me font des conserves de tomates, de légumes, des choses comme ça. Quand c'est fermé à chaud, c'est impossible d'ouvrir. C'est très dur en tout cas. Donc je vais toquer chez ma voisine et elle m'ouvre mes peaux. Voilà, c'est des moments comme ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu as des droits à des aides particulières ?

  • Speaker #1

    Alors oui, j'ai su la semaine passée d'ailleurs que j'avais droit. La MDPH m'accorde le droit d'avoir une personne qui viendra. Ça n'a pas encore commencé, mais elle va venir prochainement, deux heures par jour. pour de l'aide culinaire, par exemple. Et cette personne, pourquoi pas, m'aidera à porter mes courses, par exemple, et m'aidera à éplucher mes légumes, les couper, me les mettre dans des boîtes au frais ou au congélateur et que moi, ensuite, j'ai plus qu'à les faire cuire ou les réduire en purée, en soupe, en gratin, je ne sais pas. Mais ça va me soulager. Et puis, je pense que c'est bien parce qu'effectivement, j'ai mes parents, j'ai ma sœur, mes copines qui me proposent de l'aide. Mais alors c'est très sympa, effectivement, des fois on fait des apéros, atelier légumes avec mes copines, mais à un moment donné, c'est pas leur rôle, quoi. J'ai, voilà, j'ai une amie qui vient régulièrement me changer mes draps, parce que c'est pas évident quand on a qu'une main, changer une housse de couette. Déjà, quand on a ses deux mains, c'est pénible. Mais là, c'est juste, enfin, je mets trois heures à le faire et au bout d'un moment, je m'énerve et voilà. Donc du coup, elle vient m'aider. C'est très gentil de sa part, évidemment, mais ce n'est pas son rôle. J'ai envie de lui garder son rôle de copine, ce n'est pas une aidante.

  • Speaker #0

    Mais par contre, tu disais que tu n'avais pas droit à des aides ménagères qui pourraient t'aider justement dans ce genre de choses.

  • Speaker #1

    Eh bien non, apparemment, ce n'est pas au programme. Donc on m'a fait remplir un dossier pour la CAF afin d'obtenir une petite prime. Et avec cette petite prime, je pourrais payer une personne qui viendrait faire mon ménage. C'est ce que je vais faire. De toute façon, je n'ai plus le choix.

  • Speaker #0

    Je vois que sur ton pull, il y a marqué amour Est-ce que tu es une midinette, une fleur bleue, une grande amoureuse ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense que je rêve de rencontrer quelqu'un qui puisse partager ma vie maintenant. Parce que... Je crois que c'est ce qui me manque le plus, là. Oui.

  • Speaker #0

    Donc, tu as toujours le projet de fonder une famille, en fait ?

  • Speaker #1

    On va dire que ça, c'était mon projet avant mon diagnostic. Là, les choses ont beaucoup changé. Et ça ne fait plus partie de mes projets aujourd'hui, en tout cas. Non, je ne pense pas. Parce que la maladie me demande beaucoup d'énergie, beaucoup d'énergie mentale et physique. Et je crois que j'aime bien ma vie comme elle est là. Parce qu'il faut de l'énergie pour avoir un enfant, pour l'élever, etc. Je regarde un peu mon entourage et je ne sais pas si je m'en sentirais capable aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Et alors, l'amour, ça pourrait être ? Comment, aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Alors là, grande question. Moi qui suis très idéaliste, pour une fois, j'essaye de ne rien attendre et de ne rien espérer. Je suis toujours une grande rêveuse. De toute façon, ça, ça fait partie de moi. C'est comme respirer, ça fait partie de moi. Je ne peux pas m'en empêcher. Mais j'essaye de ne plus vraiment attendre. On verra bien quand ça se présentera, si ça se présente. Parce que c'est aussi un gros sujet. C'est vrai. En tout cas, j'espère que ce sera quelqu'un qui sache déjà ma maladie. Je ne voudrais pas avoir à expliquer à quelqu'un mon diagnostic, etc. Peut-être que j'ai, au fond de moi, peur du rejet, peut-être. Ce n'est pas évident. Moi, je ne sais pas comment je réagirais si je rencontrais quelqu'un qui m'explique son diagnostic. Je ne sais pas comment je réagirais. Mais en tout cas, il faudra qu'il ait de bonnes épaules. Et je laisse faire les choses parce que je me dis que la vie est bien faite et si ça doit se faire, la vie me mettra sur le chemin de quelqu'un.

  • Speaker #0

    Alors justement, j'ai l'impression que tu as une forme, mais peut-être que je me trompe, de SLA un petit peu différente, ou en tout cas lente. Est-ce que tu peux m'en dire plus ?

  • Speaker #1

    Alors oui, j'ai la chance dans mon malheur d'avoir une SLA lente, de par le taux de neurofilaments que les personnes ont détecté lors de ma ponction lombaire. Et j'ai aussi un gène unique au monde. C'est-à-dire que j'ai un gène que l'on ne connaît pas en France et que l'on ne connaît pas sur cette planète.

  • Speaker #0

    Alors, un gène juste pour toi ?

  • Speaker #1

    J'ai un gène juste pour moi, oui, exactement, que les chercheurs ne connaissent pas. Ils m'ont demandé de faire des examens supplémentaires récemment pour qu'ils puissent travailler sur ce gène-là, qui serait responsable de la SLA. C'est un gène que j'ai eu à ma naissance. Mes deux parents ne sont pas concernés. Je suis née avec ce gène-là et je l'ai déclaré à 35 ans. Donc, c'est aussi une forme lente, apparemment. Là, je vais rencontrer un chercheur prochainement.

  • Speaker #0

    Qui t'en dira plus sur ce gène ?

  • Speaker #1

    Oui, qui va m'en dire plus. En tout cas, on va essayer de creuser là-dessus.

  • Speaker #0

    Est-ce que ce gène-là, on connaît son évolution ? Ou peut-être pas ?

  • Speaker #1

    Non, il est inconnu pour le moment. Aucune idée. Non, je ne sais pas. Mais en tout cas, quand...

  • Speaker #0

    Comment ça s'appelle ?

  • Speaker #1

    Je n'ai pas le nom là, je ne me souviens plus.

  • Speaker #0

    Est-ce que ça te permet peut-être d'avoir un espoir plus grand devant l'inconnu que ça te procure ? Ça permet de tout imaginer ?

  • Speaker #1

    Oui, je me souviens que quand mon neurologue me l'avait annoncé, que j'avais ce gène-là, j'étais dans une pièce à l'hôpital de Lyon. Moi, je crois au signe de la vie, de toute façon. Il y a un rayon de lumière, un rayon de soleil qui est venu inonder la pièce à ce moment-là, au moment où il me l'a dit. Il me dit écoutez, voilà, vous avez ce gène-là, mais je crois que je préfère avoir ce gène-là plutôt qu'un gène qu'on connaît et dont l'issue est beaucoup plus sombre, on va dire. Là, il me reste une petite part d'espoir. Je suis sûre, moi je suis sûre qu'on va trouver quelque chose. Je reste positive et j'ai actionné mon cerveau de façon, je l'ai vraiment formaté de façon positive. Parce qu'on est ce qu'on pense, de toute façon, donc j'ai cet espoir-là en tout cas.

  • Speaker #0

    Donc l'idée, c'est que tu engendres quelque chose de positif avec ta pensée, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça, oui.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que tu as appris avec cette maladie sur toi ?

  • Speaker #1

    Eh bien, là, pas plus tard que janvier dernier, j'étais en Laponie pour un raid des fidèles. Et j'ai appris à me dépasser physiquement. Je ne pensais pas y arriver parce que le défi était de... Il y avait trois épreuves sur trois matinées. Il y avait 15 kilomètres de trail par un froid à moins 20, moins 25 degrés. Il y avait du ski de fond. J'en ai fait que très peu dans ma vie et je déteste le ski, vraiment, je déteste. Et il y avait une épreuve de fat bike, donc c'est le vélo à gros pneus. On avait un vélo pour deux, Pascal, Bataille et moi-même. Et oui, c'est vrai que la vie nous permet de nous dépasser. Et là, je l'ai vraiment ressenti à ce moment-là. Je ne pensais pas y arriver toute seule. J'y suis arrivée grâce à mon équipe. Là, la SLA me prend vraiment à me sortir de... Je ne dis pas que j'étais dans une zone de confort avant, parce que j'ai toujours aimé sortir de ma zone de confort. Mais là, elle me repousse dans mes retranchements, complètement.

  • Speaker #0

    Alors, quand tu dis retranchements, tu veux dire quoi ?

  • Speaker #1

    Eh bien, par exemple, ce qu'on fait là, toi et moi, en podcast. Je ne pensais pas en être capable. Un jour, en tout cas, je n'aurais jamais pensé parler de moi comme ça. d'exposer ma vie, je suis quelqu'un d'assez réservée, je n'étais pas vraiment sur les réseaux sociaux. Et là, j'ai une page Instagram où j'ai quasiment aujourd'hui 4500 abonnés. C'est incroyable le nombre de personnes qui s'abonnent à ma page. Et je me mets à nu finalement, comme si je me découvrais à des milliers de gens que je ne connais pas, à qui j'explique ma vie. Ce n'était pas évident.

  • Speaker #0

    Et là, aujourd'hui, comment ça fait ?

  • Speaker #1

    Eh bien, aujourd'hui, ça me fait toujours pareil. Je ne m'y habitue pas, mais je suis contente, en fait. Je suis contente qu'on puisse parler de cette maladie. Je suis contente que les gens s'y intéressent. Et c'est ce que je voulais dès le départ, c'était en parler.

  • Speaker #0

    Tu as fait combien de télé en un an à peu près ?

  • Speaker #1

    Je n'ai pas compté. J'ai fait un tout petit peu de radio, radio locale sur Annecy. Il y a eu le magazine de la santé. Il y a eu TV7 Gironde. Là, ce sera TV8 Montblanc cette semaine. Vous êtes formidable également sur France 3 Occitanie.

  • Speaker #0

    Paris Match.

  • Speaker #1

    Oui, il y a eu Paris Match. Paris Match, incroyable. parce que j'étais avec toute mon équipe ce jour-là on était à Paris pour partir en Laponie et ils m'ont accompagnée dans le studio de Paris Match et ils étaient devant moi et c'est un super souvenir et c'est une vidéo qui a aujourd'hui plus de 530 000 vues c'est incroyable de se dire qu'un demi-million de personnes a écouté mon témoignage c'est intimidant mais c'est extra, vraiment je suis ravie

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui te ravit le plus ?

  • Speaker #1

    De faire connaître de la maladie déjà dans un premier temps. Parce qu'on ne peut pas ramener de l'argent, la recherche ne peut pas avancer si les gens ne s'y intéressent pas. Donc déjà, premièrement, faire connaître la maladie. Deuxièmement, forcément, ramener des fonds. Ces fonds, moi je les reverse à la RSLA, à l'Association pour la Recherche de la SLA. Ils vont pour des projets de recherche.

  • Speaker #0

    Alors je me demandais, parce que je t'ai vue évidemment, parce que j'aime bien te suivre. Mais à chaque fois, on te répète la même chose, des choses pas très agréables sur la maladie.

  • Speaker #1

    Oui, c'est sûr que ça mérite une protection parce que je suis quelqu'un d'hypersensible et tout m'atteint finalement. Comme m'a dit mon neurologue, il m'a dit, mademoiselle Vivier, je connais la SLA, je ne connais pas la vôtre. Donc ça, ça m'a fait du bien d'entendre ça. Et je me dis que chacun sa SLA finalement et que je me protège en me disant que mon évolution, elle est lente. que je vais y arriver, que je vais m'en sortir. J'essaye de me protéger comme ça. Ce n'est pas évident pour moi de voir des personnes en fauteuil roulant. Ce n'est pas du tout évident, vraiment. Ce n'est pas facile parce que votre cerveau, il vous dit malgré tout que c'est une maladie que tu as et que c'est peut-être ton issue. Et ça, c'est vraiment quelque chose qui est très dur parfois, par moments. C'est un peu difficile aussi de le dire et de l'avouer, mais je suis honnête.

  • Speaker #0

    Tu dis que c'est difficile, du coup, tu as envie de faire quoi, de t'éloigner ?

  • Speaker #1

    Non, mais par contre, je me mets dans ma petite bulle avant de faire quoi que ce soit. Je me mets dans une petite bulle de protection et ensuite, je vais vers ces gens-là. Parce que j'ai envie de leur apporter mon soutien, parce que mon combat, c'est aussi pour eux que je le mène. Mais ce n'est pas simple, non.

  • Speaker #0

    Parfois, quand je te vois... À la télévision ou même là, quand je te vois en vrai, tu as l'air d'un ange, comme si tu prenais un peu de distance. Est-ce que c'est ça ta bulle ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense que c'est mon moyen de protection. C'est ma soupape de sécurité, je pense. Et si je vais bien aujourd'hui, c'est parce que je médite, on va dire ça, et je me crée cette petite bulle de protection. Je prends soin de moi.

  • Speaker #0

    Quand tu as des coups de mousse qui, j'imagine, arrivent des fois, justement, comment tu fais pour les traverser ? Comment tu fais pour les dépasser ?

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr que ça arrive. Même si je suis bien entourée, de toute façon, c'est comme tout le monde. De toute façon, il y a des moments où ce n'est pas forcément toujours la fête. Souvent, j'écris mes pensées sur un bout de papier, mes pensées négatives, forcément, et je les brûle. C'est un... C'est un petit rituel que j'ai trouvé. Je me cuisine quelque chose à manger que j'aime bien. Un peu de chocolat noir, ça fait du bien. Parfois même je pleure parce que ça fait du bien aussi. Je vais marcher, je vais prendre l'air. Et je me concentre sur mes projets. Parce que ça c'est vraiment thérapeutique chez moi. Les projets c'est un médicament. Oui je peux être vraiment très en bas par contre. Mais ça ne dure pas.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui peut te mettre en bas, par exemple ?

  • Speaker #1

    La colère, je pense. La colère peut me mettre dans un mood un petit peu noir quand je n'arrive pas à faire des choses parce que je n'ai qu'une main. Il y a des moments comme ça qui me disent T'as la SLA, n'oublie pas, elle est là. Il y a des moments où c'est compliqué pour boutonner un jean. C'est tout bête, mais c'est énervant. Et c'est ça, plus ça, plus ça, plus je fais tomber une assiette, je fais tomber quelque chose parce que je l'ai mal tenue. Ouais, voilà, il y a des moments comme ça, de toute façon.

  • Speaker #0

    Le jour où tu as eu le diagnostic, est-ce que tu as eu des sentiments comme ça, de colère, d'injustice ?

  • Speaker #1

    Non, je n'ai pas eu la colère tout de suite. Non. J'ai eu la tristesse, mais pas la colère que j'ai eue après. C'est agaçant, en fait. C'est agaçant. Moi qui ai l'habitude de tout faire toute seule et d'aller vite et d'aller comme je veux, etc. Tout est beaucoup plus lent. Quand je donne un horaire à des amis pour un repas ou pour un rendez-vous, il faut que je prévoie maintenant du temps. Ce n'est plus le temps que j'avais avant. Là, il faut doubler.

  • Speaker #0

    Est-ce que, paradoxalement, la lenteur t'apporte des choses ?

  • Speaker #1

    Eh bien oui, elle me dit ralenti. Ça ne sert à rien de speeder comme ça. Elle remet un petit peu l'aiguille au milieu du village, on va dire. Oui, oui, elle me dit ralenti. Prends le temps de vivre.

  • Speaker #0

    Alors c'est quoi le temps de vivre ? Qu'est-ce qu'on fait quand on prend le temps de vivre ?

  • Speaker #1

    C'est admirer le ciel quand on va se balader. Je vais beaucoup me balader au bord du lac d'Annecy. Admirer la beauté du lac avec les petits clapotis de l'eau. Peut-être qu'avant je ne le voyais pas. Je le voyais mais sans le voir peut-être. Prendre le temps de marcher. Prendre le temps d'être en pleine conscience en fait. Marcher, ce n'est pas marcher. C'est dérouler un pied après l'autre. Écouter le bruit du gravier. Quand on marche sur du gravier par exemple. Écouter le bruit de l'air quand on marche dans un champ. Écouter le vent. qui souffle sur les feuilles d'un arbre. C'est toutes des choses comme ça qui sont beaucoup plus importantes maintenant.

  • Speaker #0

    On part de l'esthétique et puis tout à coup, on est dans l'être. Néanmoins, est-ce que le handicap est quelque chose d'acceptable aujourd'hui par rapport à l'image qu'on aimerait avoir ?

  • Speaker #1

    C'est toujours un peu... bizarre. Par exemple, j'ai reçu il y a 15 jours ma carte pour le stationnement handicapé. Alors, je suis très contente parce que je me dis que dans cette maladie, vu la gravité de la chose, si on peut avoir une petite récompense et donc de ne pas chercher trois heures une place sur un parking, franchement, c'est hyper appréciable. Après, quand je l'ai reçu, quand vous avez la... Votre visage en photo sur cette carte, c'est pas simple. Ça m'a fait bizarre, ça m'a choquée même presque. Il a fallu un peu de temps, je la regarde pas de toute façon. Je l'ai mis sur mon pare-brise, je la regarde pas. Mais oui, non, c'est pas... Il y a pas bien le choix, de toute façon, c'est comme ça. Je l'appelle pas le handicap, en tout cas, j'aime pas ce mot.

  • Speaker #0

    Comment tu l'appelles ?

  • Speaker #1

    Je l'appelle une autre façon de vivre. Mon message à faire passer, peut-être que depuis que j'ai la SLA, et peut-être inconsciemment d'exprimer à mon entourage, ou alors à ceux qui ne me connaissent pas, que réveillez-vous, en fait, réveillez-vous. Parce que, ok, moi, ma vie, je ne sais pas trop ce qu'elle va être de par ma maladie, mais quelqu'un comme toi qui va bien, qui est en bonne santé, qui te dit que demain, tu seras encore là, on n'en sait rien. Il faut vivre les choses maintenant, tout de suite, il ne faut pas attendre. Il ne faut pas attendre le bon moment, il ne faut pas attendre... Non, maintenant.

  • Speaker #0

    Dans le prochain épisode, vous retrouverez Lorène Vivier, Le pouvoir de la bulle, partie 2. Restez à l'écoute de notre podcast, La vie est belle, SLA, et abonnez-vous sur votre plateforme préférée.

Description

Lorène, jeune femme de 37 ans, avait un travail, des joies et des galères. Sa vie était faite de projets, ceux d’une jeune fille de son âge, rencontrer quelqu’un de bien, avoir des enfants… L’annonce du diagnostic a tout chamboulé dans son existence.  Il lui aura fallu un peu de temps pour récupérer de cette annonce. Après la tristesse du début et la colère, est venu le temps de l’acceptation et de l’adaptation.



Ne manquez aucun nouvel épisode de La vie est belle, essaie-la ! en vous abonnant dès maintenant sur votre plateforme de podcasts préférée et retrouvez un nouvel épisode un samedi sur deux.


Nous remercions chaleureusement toutes les personnes qui ont participé à cette première saison : personnes malades, aidants, proches, professionnels de santé.


Un immense merci également à la Fondation d'entreprise IRCEM pour son précieux soutien, ainsi qu'à l’Agence CosaVostra pour la réalisation du visuel du podcast.


Ce podcast de l'ARLSA a été réalisé par Natacha Sels, la post-production est de Bertrand Chaumeton.

 

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Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    La vie est belle, essaie-la ! (SLA) , le podcast de l'ARSLA, qui met en lumière des personnes confrontées à la SLA et des professionnels engagés.

  • Speaker #1

    Je voulais vraiment transformer cette nouvelle complètement horrible, on va dire, en pépite finalement, et en faire un truc de génial en fait.

  • Speaker #0

    Lorène Vivier, le pouvoir de la bulle, partie 1, le 9 novembre 2022. À l'âge de 35 ans, Lorène Vivier a été diagnostiquée porteuse d'une SLA. Aujourd'hui, elle met toute son énergie à donner une couverture médiatique à la maladie afin de colelcter des fonds pour la recherche. Aidée en cela par celui qu'elle appelle son ange gardien, Pascal Bataille. Nous nous sommes donnés rendez-vous à son domicile situé dans la ville d'Annecy. J'y découvre une véritable équilibriste qui s'évertue à tenir la maladie à bonne distance pour vivre pleinement. Comme ces bijoux précieux, elle brille de multiples facettes, entre légèreté et infinie sagesse. Nous parlerons aussi bien de sa nouvelle vie sous les projecteurs que de son quotidien transformé par la maladie, de sa SLA un peu différente, de l'amour, de la pleine conscience et de l'étonnant pouvoir de la bulle dont vous découvrirez les effets dans les deux épisodes. Je vous propose d'écouter son témoignage. J'ai envie de le dire tout de suite, le titre qu'on a choisi pour le podcast, il vient de toi. Est-ce que tu peux le redire ?

  • Speaker #1

    La vie est belle, essaie-la ! SLA, je l'ai choisi, c'est parti de trois lettres, qui étaient S-L-A pour la sclérose latérale amyotrophique. Et je l'ai transformé en une phrase beaucoup plus jolie, c'est-à-dire la vie est belle, essaie-la.

  • Speaker #0

    Alors comment tu l'essayes la vie en ce moment ?

  • Speaker #1

    Eh bien, je l'essaye pleinement, c'est-à-dire qu'elle m'offre plein d'opportunités en ce moment. Depuis mon diagnostic, je vis des moments exceptionnels et hors du commun, on peut le dire, par rapport en tout cas à la vie que j'avais avant, qui était pourtant bien. J'aimais beaucoup ma vie avant aussi, mais là, elle me fait complètement sortir de ma zone de confort.

  • Speaker #0

    J'ai envie de savoir, qu'est-ce que c'était ta vie d'avant ?

  • Speaker #1

    Ma vie d'avant, c'était Lorène avec son travail, sa petite vie, ses projets, ses galères, ses joies.

  • Speaker #0

    Quels étaient tes projets, puisque tu parles de projets ?

  • Speaker #1

    Les projets qu'une jeune femme de 30 ans pouvait avoir, c'est-à-dire rencontrer quelqu'un de bien, créer une famille. Des projets qu'on peut avoir à mon âge en tout cas, et qui ont été complètement chamboulés à l'annonce du diagnostic. mais j'aime beaucoup ma vie aujourd'hui et elle a beaucoup de sens, beaucoup plus qu'avant même

  • Speaker #0

    Quand tu as eu le diagnostic, comment tu as réagi d'abord et puis comment tu es arrivée à vivre une vie avec du sens et dont tu parles là en disant qu'elle te plaît beaucoup ?

  • Speaker #1

    Quand j'ai eu mon diagnostic, je pense qu'il m'a fallu entre dix jours et un mois environ pour atterrir, pour savoir vraiment ce qui s'était passé Sur le moment, je ne connaissais pas la maladie, en fait. Le neurologue m'a expliqué un petit peu ce que c'était, ce qu'il en était, ce que ça faisait dans le corps, etc. Mais je n'ai pas su la gravité de la maladie tout de suite. Il ne m'a pas dit. Il m'a dit que c'était neurodégénératif, que ça ne se guérissait pas aujourd'hui. Je garde l'espoir qu'il y ait un traitement un jour. Mais en tout cas, il m'a demandé de vivre normalement. Il m'a dit, est-ce que vous voulez que je vous l'écrive en rouge ? J'ai dit oui, je veux bien écriver le mot en rouge. Donc il me l'a écrit sur la feuille où il m'avait expliqué, il m'avait fait un schéma du cerveau, de la moelle épinière, des muscles, etc. pour m'expliquer le fonctionnement de cette dégénérescence des motoneurones. Et voilà, après je suis sortie de l'hôpital ce jour-là avec mes parents. J'ai passé une petite semaine chez eux. Je suis ensuite... J'ai rentré chez moi, j'ai repris le travail au bout de dix jours. J'ai repris le travail machinalement.

  • Speaker #0

    Tu es retournée travailler, un peu comme si de rien n'était. Comment ça s'est passé dans ta tête ?

  • Speaker #1

    Je n'ai pas réalisé tout de suite, non. C'est de par mes amis qui se sont renseignés forcément. Ils m'ont dit qu'est-ce qu'il t'a dit le neurologue ? Comment ça s'est passé ? Tu es trois jours à l'hôpital. Et je leur ai dit, ben voilà, ils m'ont annoncé une sclérose latérale amyotrophique, donc forcément les gens ils tapent tout de suite sur Internet. Et c'est flippant, quand on regarde sur Google, c'est pas très glorieux en tout cas. Et c'est eux qui étaient plus choqués que moi finalement, parce que moi je m'étais pas renseignée plus que ça.

  • Speaker #0

    Toi tu l'avais pas fait, de taper sur Internet ?

  • Speaker #1

    Non, je n'avais pas forcément eu envie et pas envie de dramatiser.

  • Speaker #0

    Donc en fait, tu avais retenu une seule chose de ton médecin, c'est continuer à vivre normalement.

  • Speaker #1

    Oui, exactement, continuer à vivre. Et puis pour moi, rien n'était grave à ne pas avoir de force dans la main, finalement. Comment ça pouvait engendrer une maladie aussi terrible ? Et c'est plus tard que j'ai pris conscience un petit peu. Donc, j'ai travaillé encore six mois plus tard. Je travaillais dans une parfumerie à l'époque. Je travaillais chez Clarins dans une parfumerie. J'ai toujours été passionnée par ce que je faisais depuis tout le temps. Mais se battre pour rapporter un chiffre d'affaires ne m'intéressait plus. Je voulais vraiment transformer cette nouvelle complètement horrible, on va dire. En pépite, finalement. Mais ça a pris quelque temps, ça a pris quelques mois, je dirais. Je me suis dit, mince, quel est mon avenir aujourd'hui ? Comment ça va se passer ? Je ne suis pas quelqu'un qui me laisse aller. Et puis un jour, je me suis réveillée et je me suis dit, attends, on va en faire un truc de génial, en fait. Je me suis dit, cette maladie, on n'en entend pas parler. Elle est trop dans le silence, elle est trop dans l'ombre. J'ai envie de la mettre en lumière. Donc j'ai ouvert mon téléphone. J'ai regardé dans mon répertoire téléphonique. Je n'en ai pas 36 personnes qui sont médiatisées. J'en avais qu'une, Pascal Bataille, mon ancien employeur, avec qui j'ai gardé contact. Et j'ai décidé d'aller passer une semaine au Cap-Ferret toute seule, me reposer, d'aller sur Arcachon. Et je savais très bien qu'il était dans le coin. Je l'ai appelé, je lui ai dit, Pascal, je suis dans le coin, j'ai promis de vous appeler le jour où je reviendrai au Cap-Ferret. c'est-à-dire huit ans après, parce que j'avais travaillé avec lui en 2015. Et je lui ai demandé s'il était sur place. Et il m'a dit, écoutez, on peut se rejoindre. Je suis à Bordeaux tel jour, telle heure. Et je lui ai expliqué ma vie. Puis je lui ai raconté aussi mon diagnostic. Et je lui ai demandé s'il pouvait m'aider à la médiatiser.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu peux me parler de la relation qui s'est créée entre vous ?

  • Speaker #1

    C'est comme un grand frère. Je ne saurais pas expliquer, mais... C'est vraiment un ange gardien qui veille sur moi, qui m'explique comment ça se passe. Parce que moi, je ne suis pas du métier. Lui, il travaille beaucoup à la télévision, à la radio. Il a l'habitude de tout ce qui est les journalistes. Qu'est-ce qu'il faut dire ? Qu'est-ce qu'il ne faut pas dire ? Il y a des choses pour me protéger aussi. Je ne le remercierai jamais assez. Je vis des moments que je n'aurais jamais vécu avant. J'ai assisté l'année dernière au tournage de la série Ici tout commence Peut-être que tu connais sur TF1. C'est une série qui est quotidienne sur TF1 à 18h30 et une série que je regarde depuis le confinement. Le confinement a eu raison de moi là-dessus, moi qui n'étais pas très série. Je me suis prise au jeu, j'aime beaucoup, et j'ai pu être sur le plateau de tournage, avoir les acteurs à côté de moi, etc., parler de tout ça. Et moi, mon but, c'était de proposer un scénario d'un personnage qui a la SLA. Voilà, parce que le Ici, tout commence c'est une série sur le... La cuisine, en fait, c'est des jeunes gens qui apprennent à être chef cuisinier. Et moi, comme j'ai du mal à cuisiner toute seule, à couper, à éplucher, à émincer, etc., je me suis dit pourquoi pas qu'il y ait un jeune, parce que je tiens vraiment que ce soit une personne jeune qui ait les mêmes symptômes que moi. Donc je lui ai suggéré ça et on verra bien. Mais voilà, j'ai trouvé ça super. Je n'y serais jamais allée, je pense. Autrement, il y a plein de choses comme ça que je n'aurais jamais fait. C'est un passe-droit, on va dire, pour une vie incroyable, quelque part. C'est fou à dire. C'est fou à dire qu'une maladie comme ça peut vous emmener dans une sphère hyper magique.

  • Speaker #0

    Oui, c'est un peu une vie de paillettes et de stars.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Ce n'était pas du tout mon environnement jusqu'à présent. Je suis trop contente. C'est super, oui. Je suis ravie, puis les gens m'aident à chaque fois. Je rencontre, en Laponie, j'ai rencontré Marine L'Orphelin, l'ancienne Miss France. J'ai rencontré Claude D'Artois, un ancien de Koh Lanta. C'est Claude d'ailleurs qui a eu l'envie de faire un Fort Boyard.

  • Speaker #0

    Alors c'est une vie, comment tu pourrais dire, excitante, passionnante ?

  • Speaker #1

    Ah oui, passionnante, ça c'est sûr, passionnante, impressionnante. Je me dis que ce n'est quand même pas la vie de tout le monde. et je me sens hyper privilégiée.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, au niveau des symptômes, est-ce qu'il y a des choses qui ont vraiment évolué ? Parce qu'en fait, ça fait un an et demi à peu près.

  • Speaker #1

    Oui, ça fait un an et demi. Oui, j'ai une perte de force progressive dans la main, dans le bras, une atrophie des muscles également dans la main, dans l'épaule, dans l'homoplate. Et ça devient un peu fatigant au quotidien parce qu'il faut des muscles pour porter un bras. Et quand il n'y en a plus, le bras pèse très lourd. Mais bon, on vit avec.

  • Speaker #0

    Comment tu t'adaptes ? Comment tu t'adaptes à ces modifications, ces changements, cette évolution ?

  • Speaker #1

    Je m'adapte avec des petites techniques au quotidien. Je demande de l'aide maintenant, parce que je suis quelqu'un qui est très indépendante et très autonome, et je demandais rarement de l'aide. Maintenant, je n'ai plus le choix. Ne serait-ce qu'un truc tout bête, ouvrir un... J'ai des amis qui me font des conserves, ou mes parents qui me font des conserves de tomates, de légumes, des choses comme ça. Quand c'est fermé à chaud, c'est impossible d'ouvrir. C'est très dur en tout cas. Donc je vais toquer chez ma voisine et elle m'ouvre mes peaux. Voilà, c'est des moments comme ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu as des droits à des aides particulières ?

  • Speaker #1

    Alors oui, j'ai su la semaine passée d'ailleurs que j'avais droit. La MDPH m'accorde le droit d'avoir une personne qui viendra. Ça n'a pas encore commencé, mais elle va venir prochainement, deux heures par jour. pour de l'aide culinaire, par exemple. Et cette personne, pourquoi pas, m'aidera à porter mes courses, par exemple, et m'aidera à éplucher mes légumes, les couper, me les mettre dans des boîtes au frais ou au congélateur et que moi, ensuite, j'ai plus qu'à les faire cuire ou les réduire en purée, en soupe, en gratin, je ne sais pas. Mais ça va me soulager. Et puis, je pense que c'est bien parce qu'effectivement, j'ai mes parents, j'ai ma sœur, mes copines qui me proposent de l'aide. Mais alors c'est très sympa, effectivement, des fois on fait des apéros, atelier légumes avec mes copines, mais à un moment donné, c'est pas leur rôle, quoi. J'ai, voilà, j'ai une amie qui vient régulièrement me changer mes draps, parce que c'est pas évident quand on a qu'une main, changer une housse de couette. Déjà, quand on a ses deux mains, c'est pénible. Mais là, c'est juste, enfin, je mets trois heures à le faire et au bout d'un moment, je m'énerve et voilà. Donc du coup, elle vient m'aider. C'est très gentil de sa part, évidemment, mais ce n'est pas son rôle. J'ai envie de lui garder son rôle de copine, ce n'est pas une aidante.

  • Speaker #0

    Mais par contre, tu disais que tu n'avais pas droit à des aides ménagères qui pourraient t'aider justement dans ce genre de choses.

  • Speaker #1

    Eh bien non, apparemment, ce n'est pas au programme. Donc on m'a fait remplir un dossier pour la CAF afin d'obtenir une petite prime. Et avec cette petite prime, je pourrais payer une personne qui viendrait faire mon ménage. C'est ce que je vais faire. De toute façon, je n'ai plus le choix.

  • Speaker #0

    Je vois que sur ton pull, il y a marqué amour Est-ce que tu es une midinette, une fleur bleue, une grande amoureuse ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense que je rêve de rencontrer quelqu'un qui puisse partager ma vie maintenant. Parce que... Je crois que c'est ce qui me manque le plus, là. Oui.

  • Speaker #0

    Donc, tu as toujours le projet de fonder une famille, en fait ?

  • Speaker #1

    On va dire que ça, c'était mon projet avant mon diagnostic. Là, les choses ont beaucoup changé. Et ça ne fait plus partie de mes projets aujourd'hui, en tout cas. Non, je ne pense pas. Parce que la maladie me demande beaucoup d'énergie, beaucoup d'énergie mentale et physique. Et je crois que j'aime bien ma vie comme elle est là. Parce qu'il faut de l'énergie pour avoir un enfant, pour l'élever, etc. Je regarde un peu mon entourage et je ne sais pas si je m'en sentirais capable aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Et alors, l'amour, ça pourrait être ? Comment, aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Alors là, grande question. Moi qui suis très idéaliste, pour une fois, j'essaye de ne rien attendre et de ne rien espérer. Je suis toujours une grande rêveuse. De toute façon, ça, ça fait partie de moi. C'est comme respirer, ça fait partie de moi. Je ne peux pas m'en empêcher. Mais j'essaye de ne plus vraiment attendre. On verra bien quand ça se présentera, si ça se présente. Parce que c'est aussi un gros sujet. C'est vrai. En tout cas, j'espère que ce sera quelqu'un qui sache déjà ma maladie. Je ne voudrais pas avoir à expliquer à quelqu'un mon diagnostic, etc. Peut-être que j'ai, au fond de moi, peur du rejet, peut-être. Ce n'est pas évident. Moi, je ne sais pas comment je réagirais si je rencontrais quelqu'un qui m'explique son diagnostic. Je ne sais pas comment je réagirais. Mais en tout cas, il faudra qu'il ait de bonnes épaules. Et je laisse faire les choses parce que je me dis que la vie est bien faite et si ça doit se faire, la vie me mettra sur le chemin de quelqu'un.

  • Speaker #0

    Alors justement, j'ai l'impression que tu as une forme, mais peut-être que je me trompe, de SLA un petit peu différente, ou en tout cas lente. Est-ce que tu peux m'en dire plus ?

  • Speaker #1

    Alors oui, j'ai la chance dans mon malheur d'avoir une SLA lente, de par le taux de neurofilaments que les personnes ont détecté lors de ma ponction lombaire. Et j'ai aussi un gène unique au monde. C'est-à-dire que j'ai un gène que l'on ne connaît pas en France et que l'on ne connaît pas sur cette planète.

  • Speaker #0

    Alors, un gène juste pour toi ?

  • Speaker #1

    J'ai un gène juste pour moi, oui, exactement, que les chercheurs ne connaissent pas. Ils m'ont demandé de faire des examens supplémentaires récemment pour qu'ils puissent travailler sur ce gène-là, qui serait responsable de la SLA. C'est un gène que j'ai eu à ma naissance. Mes deux parents ne sont pas concernés. Je suis née avec ce gène-là et je l'ai déclaré à 35 ans. Donc, c'est aussi une forme lente, apparemment. Là, je vais rencontrer un chercheur prochainement.

  • Speaker #0

    Qui t'en dira plus sur ce gène ?

  • Speaker #1

    Oui, qui va m'en dire plus. En tout cas, on va essayer de creuser là-dessus.

  • Speaker #0

    Est-ce que ce gène-là, on connaît son évolution ? Ou peut-être pas ?

  • Speaker #1

    Non, il est inconnu pour le moment. Aucune idée. Non, je ne sais pas. Mais en tout cas, quand...

  • Speaker #0

    Comment ça s'appelle ?

  • Speaker #1

    Je n'ai pas le nom là, je ne me souviens plus.

  • Speaker #0

    Est-ce que ça te permet peut-être d'avoir un espoir plus grand devant l'inconnu que ça te procure ? Ça permet de tout imaginer ?

  • Speaker #1

    Oui, je me souviens que quand mon neurologue me l'avait annoncé, que j'avais ce gène-là, j'étais dans une pièce à l'hôpital de Lyon. Moi, je crois au signe de la vie, de toute façon. Il y a un rayon de lumière, un rayon de soleil qui est venu inonder la pièce à ce moment-là, au moment où il me l'a dit. Il me dit écoutez, voilà, vous avez ce gène-là, mais je crois que je préfère avoir ce gène-là plutôt qu'un gène qu'on connaît et dont l'issue est beaucoup plus sombre, on va dire. Là, il me reste une petite part d'espoir. Je suis sûre, moi je suis sûre qu'on va trouver quelque chose. Je reste positive et j'ai actionné mon cerveau de façon, je l'ai vraiment formaté de façon positive. Parce qu'on est ce qu'on pense, de toute façon, donc j'ai cet espoir-là en tout cas.

  • Speaker #0

    Donc l'idée, c'est que tu engendres quelque chose de positif avec ta pensée, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça, oui.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que tu as appris avec cette maladie sur toi ?

  • Speaker #1

    Eh bien, là, pas plus tard que janvier dernier, j'étais en Laponie pour un raid des fidèles. Et j'ai appris à me dépasser physiquement. Je ne pensais pas y arriver parce que le défi était de... Il y avait trois épreuves sur trois matinées. Il y avait 15 kilomètres de trail par un froid à moins 20, moins 25 degrés. Il y avait du ski de fond. J'en ai fait que très peu dans ma vie et je déteste le ski, vraiment, je déteste. Et il y avait une épreuve de fat bike, donc c'est le vélo à gros pneus. On avait un vélo pour deux, Pascal, Bataille et moi-même. Et oui, c'est vrai que la vie nous permet de nous dépasser. Et là, je l'ai vraiment ressenti à ce moment-là. Je ne pensais pas y arriver toute seule. J'y suis arrivée grâce à mon équipe. Là, la SLA me prend vraiment à me sortir de... Je ne dis pas que j'étais dans une zone de confort avant, parce que j'ai toujours aimé sortir de ma zone de confort. Mais là, elle me repousse dans mes retranchements, complètement.

  • Speaker #0

    Alors, quand tu dis retranchements, tu veux dire quoi ?

  • Speaker #1

    Eh bien, par exemple, ce qu'on fait là, toi et moi, en podcast. Je ne pensais pas en être capable. Un jour, en tout cas, je n'aurais jamais pensé parler de moi comme ça. d'exposer ma vie, je suis quelqu'un d'assez réservée, je n'étais pas vraiment sur les réseaux sociaux. Et là, j'ai une page Instagram où j'ai quasiment aujourd'hui 4500 abonnés. C'est incroyable le nombre de personnes qui s'abonnent à ma page. Et je me mets à nu finalement, comme si je me découvrais à des milliers de gens que je ne connais pas, à qui j'explique ma vie. Ce n'était pas évident.

  • Speaker #0

    Et là, aujourd'hui, comment ça fait ?

  • Speaker #1

    Eh bien, aujourd'hui, ça me fait toujours pareil. Je ne m'y habitue pas, mais je suis contente, en fait. Je suis contente qu'on puisse parler de cette maladie. Je suis contente que les gens s'y intéressent. Et c'est ce que je voulais dès le départ, c'était en parler.

  • Speaker #0

    Tu as fait combien de télé en un an à peu près ?

  • Speaker #1

    Je n'ai pas compté. J'ai fait un tout petit peu de radio, radio locale sur Annecy. Il y a eu le magazine de la santé. Il y a eu TV7 Gironde. Là, ce sera TV8 Montblanc cette semaine. Vous êtes formidable également sur France 3 Occitanie.

  • Speaker #0

    Paris Match.

  • Speaker #1

    Oui, il y a eu Paris Match. Paris Match, incroyable. parce que j'étais avec toute mon équipe ce jour-là on était à Paris pour partir en Laponie et ils m'ont accompagnée dans le studio de Paris Match et ils étaient devant moi et c'est un super souvenir et c'est une vidéo qui a aujourd'hui plus de 530 000 vues c'est incroyable de se dire qu'un demi-million de personnes a écouté mon témoignage c'est intimidant mais c'est extra, vraiment je suis ravie

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui te ravit le plus ?

  • Speaker #1

    De faire connaître de la maladie déjà dans un premier temps. Parce qu'on ne peut pas ramener de l'argent, la recherche ne peut pas avancer si les gens ne s'y intéressent pas. Donc déjà, premièrement, faire connaître la maladie. Deuxièmement, forcément, ramener des fonds. Ces fonds, moi je les reverse à la RSLA, à l'Association pour la Recherche de la SLA. Ils vont pour des projets de recherche.

  • Speaker #0

    Alors je me demandais, parce que je t'ai vue évidemment, parce que j'aime bien te suivre. Mais à chaque fois, on te répète la même chose, des choses pas très agréables sur la maladie.

  • Speaker #1

    Oui, c'est sûr que ça mérite une protection parce que je suis quelqu'un d'hypersensible et tout m'atteint finalement. Comme m'a dit mon neurologue, il m'a dit, mademoiselle Vivier, je connais la SLA, je ne connais pas la vôtre. Donc ça, ça m'a fait du bien d'entendre ça. Et je me dis que chacun sa SLA finalement et que je me protège en me disant que mon évolution, elle est lente. que je vais y arriver, que je vais m'en sortir. J'essaye de me protéger comme ça. Ce n'est pas évident pour moi de voir des personnes en fauteuil roulant. Ce n'est pas du tout évident, vraiment. Ce n'est pas facile parce que votre cerveau, il vous dit malgré tout que c'est une maladie que tu as et que c'est peut-être ton issue. Et ça, c'est vraiment quelque chose qui est très dur parfois, par moments. C'est un peu difficile aussi de le dire et de l'avouer, mais je suis honnête.

  • Speaker #0

    Tu dis que c'est difficile, du coup, tu as envie de faire quoi, de t'éloigner ?

  • Speaker #1

    Non, mais par contre, je me mets dans ma petite bulle avant de faire quoi que ce soit. Je me mets dans une petite bulle de protection et ensuite, je vais vers ces gens-là. Parce que j'ai envie de leur apporter mon soutien, parce que mon combat, c'est aussi pour eux que je le mène. Mais ce n'est pas simple, non.

  • Speaker #0

    Parfois, quand je te vois... À la télévision ou même là, quand je te vois en vrai, tu as l'air d'un ange, comme si tu prenais un peu de distance. Est-ce que c'est ça ta bulle ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense que c'est mon moyen de protection. C'est ma soupape de sécurité, je pense. Et si je vais bien aujourd'hui, c'est parce que je médite, on va dire ça, et je me crée cette petite bulle de protection. Je prends soin de moi.

  • Speaker #0

    Quand tu as des coups de mousse qui, j'imagine, arrivent des fois, justement, comment tu fais pour les traverser ? Comment tu fais pour les dépasser ?

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr que ça arrive. Même si je suis bien entourée, de toute façon, c'est comme tout le monde. De toute façon, il y a des moments où ce n'est pas forcément toujours la fête. Souvent, j'écris mes pensées sur un bout de papier, mes pensées négatives, forcément, et je les brûle. C'est un... C'est un petit rituel que j'ai trouvé. Je me cuisine quelque chose à manger que j'aime bien. Un peu de chocolat noir, ça fait du bien. Parfois même je pleure parce que ça fait du bien aussi. Je vais marcher, je vais prendre l'air. Et je me concentre sur mes projets. Parce que ça c'est vraiment thérapeutique chez moi. Les projets c'est un médicament. Oui je peux être vraiment très en bas par contre. Mais ça ne dure pas.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui peut te mettre en bas, par exemple ?

  • Speaker #1

    La colère, je pense. La colère peut me mettre dans un mood un petit peu noir quand je n'arrive pas à faire des choses parce que je n'ai qu'une main. Il y a des moments comme ça qui me disent T'as la SLA, n'oublie pas, elle est là. Il y a des moments où c'est compliqué pour boutonner un jean. C'est tout bête, mais c'est énervant. Et c'est ça, plus ça, plus ça, plus je fais tomber une assiette, je fais tomber quelque chose parce que je l'ai mal tenue. Ouais, voilà, il y a des moments comme ça, de toute façon.

  • Speaker #0

    Le jour où tu as eu le diagnostic, est-ce que tu as eu des sentiments comme ça, de colère, d'injustice ?

  • Speaker #1

    Non, je n'ai pas eu la colère tout de suite. Non. J'ai eu la tristesse, mais pas la colère que j'ai eue après. C'est agaçant, en fait. C'est agaçant. Moi qui ai l'habitude de tout faire toute seule et d'aller vite et d'aller comme je veux, etc. Tout est beaucoup plus lent. Quand je donne un horaire à des amis pour un repas ou pour un rendez-vous, il faut que je prévoie maintenant du temps. Ce n'est plus le temps que j'avais avant. Là, il faut doubler.

  • Speaker #0

    Est-ce que, paradoxalement, la lenteur t'apporte des choses ?

  • Speaker #1

    Eh bien oui, elle me dit ralenti. Ça ne sert à rien de speeder comme ça. Elle remet un petit peu l'aiguille au milieu du village, on va dire. Oui, oui, elle me dit ralenti. Prends le temps de vivre.

  • Speaker #0

    Alors c'est quoi le temps de vivre ? Qu'est-ce qu'on fait quand on prend le temps de vivre ?

  • Speaker #1

    C'est admirer le ciel quand on va se balader. Je vais beaucoup me balader au bord du lac d'Annecy. Admirer la beauté du lac avec les petits clapotis de l'eau. Peut-être qu'avant je ne le voyais pas. Je le voyais mais sans le voir peut-être. Prendre le temps de marcher. Prendre le temps d'être en pleine conscience en fait. Marcher, ce n'est pas marcher. C'est dérouler un pied après l'autre. Écouter le bruit du gravier. Quand on marche sur du gravier par exemple. Écouter le bruit de l'air quand on marche dans un champ. Écouter le vent. qui souffle sur les feuilles d'un arbre. C'est toutes des choses comme ça qui sont beaucoup plus importantes maintenant.

  • Speaker #0

    On part de l'esthétique et puis tout à coup, on est dans l'être. Néanmoins, est-ce que le handicap est quelque chose d'acceptable aujourd'hui par rapport à l'image qu'on aimerait avoir ?

  • Speaker #1

    C'est toujours un peu... bizarre. Par exemple, j'ai reçu il y a 15 jours ma carte pour le stationnement handicapé. Alors, je suis très contente parce que je me dis que dans cette maladie, vu la gravité de la chose, si on peut avoir une petite récompense et donc de ne pas chercher trois heures une place sur un parking, franchement, c'est hyper appréciable. Après, quand je l'ai reçu, quand vous avez la... Votre visage en photo sur cette carte, c'est pas simple. Ça m'a fait bizarre, ça m'a choquée même presque. Il a fallu un peu de temps, je la regarde pas de toute façon. Je l'ai mis sur mon pare-brise, je la regarde pas. Mais oui, non, c'est pas... Il y a pas bien le choix, de toute façon, c'est comme ça. Je l'appelle pas le handicap, en tout cas, j'aime pas ce mot.

  • Speaker #0

    Comment tu l'appelles ?

  • Speaker #1

    Je l'appelle une autre façon de vivre. Mon message à faire passer, peut-être que depuis que j'ai la SLA, et peut-être inconsciemment d'exprimer à mon entourage, ou alors à ceux qui ne me connaissent pas, que réveillez-vous, en fait, réveillez-vous. Parce que, ok, moi, ma vie, je ne sais pas trop ce qu'elle va être de par ma maladie, mais quelqu'un comme toi qui va bien, qui est en bonne santé, qui te dit que demain, tu seras encore là, on n'en sait rien. Il faut vivre les choses maintenant, tout de suite, il ne faut pas attendre. Il ne faut pas attendre le bon moment, il ne faut pas attendre... Non, maintenant.

  • Speaker #0

    Dans le prochain épisode, vous retrouverez Lorène Vivier, Le pouvoir de la bulle, partie 2. Restez à l'écoute de notre podcast, La vie est belle, SLA, et abonnez-vous sur votre plateforme préférée.

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Description

Lorène, jeune femme de 37 ans, avait un travail, des joies et des galères. Sa vie était faite de projets, ceux d’une jeune fille de son âge, rencontrer quelqu’un de bien, avoir des enfants… L’annonce du diagnostic a tout chamboulé dans son existence.  Il lui aura fallu un peu de temps pour récupérer de cette annonce. Après la tristesse du début et la colère, est venu le temps de l’acceptation et de l’adaptation.



Ne manquez aucun nouvel épisode de La vie est belle, essaie-la ! en vous abonnant dès maintenant sur votre plateforme de podcasts préférée et retrouvez un nouvel épisode un samedi sur deux.


Nous remercions chaleureusement toutes les personnes qui ont participé à cette première saison : personnes malades, aidants, proches, professionnels de santé.


Un immense merci également à la Fondation d'entreprise IRCEM pour son précieux soutien, ainsi qu'à l’Agence CosaVostra pour la réalisation du visuel du podcast.


Ce podcast de l'ARLSA a été réalisé par Natacha Sels, la post-production est de Bertrand Chaumeton.

 

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Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    La vie est belle, essaie-la ! (SLA) , le podcast de l'ARSLA, qui met en lumière des personnes confrontées à la SLA et des professionnels engagés.

  • Speaker #1

    Je voulais vraiment transformer cette nouvelle complètement horrible, on va dire, en pépite finalement, et en faire un truc de génial en fait.

  • Speaker #0

    Lorène Vivier, le pouvoir de la bulle, partie 1, le 9 novembre 2022. À l'âge de 35 ans, Lorène Vivier a été diagnostiquée porteuse d'une SLA. Aujourd'hui, elle met toute son énergie à donner une couverture médiatique à la maladie afin de colelcter des fonds pour la recherche. Aidée en cela par celui qu'elle appelle son ange gardien, Pascal Bataille. Nous nous sommes donnés rendez-vous à son domicile situé dans la ville d'Annecy. J'y découvre une véritable équilibriste qui s'évertue à tenir la maladie à bonne distance pour vivre pleinement. Comme ces bijoux précieux, elle brille de multiples facettes, entre légèreté et infinie sagesse. Nous parlerons aussi bien de sa nouvelle vie sous les projecteurs que de son quotidien transformé par la maladie, de sa SLA un peu différente, de l'amour, de la pleine conscience et de l'étonnant pouvoir de la bulle dont vous découvrirez les effets dans les deux épisodes. Je vous propose d'écouter son témoignage. J'ai envie de le dire tout de suite, le titre qu'on a choisi pour le podcast, il vient de toi. Est-ce que tu peux le redire ?

  • Speaker #1

    La vie est belle, essaie-la ! SLA, je l'ai choisi, c'est parti de trois lettres, qui étaient S-L-A pour la sclérose latérale amyotrophique. Et je l'ai transformé en une phrase beaucoup plus jolie, c'est-à-dire la vie est belle, essaie-la.

  • Speaker #0

    Alors comment tu l'essayes la vie en ce moment ?

  • Speaker #1

    Eh bien, je l'essaye pleinement, c'est-à-dire qu'elle m'offre plein d'opportunités en ce moment. Depuis mon diagnostic, je vis des moments exceptionnels et hors du commun, on peut le dire, par rapport en tout cas à la vie que j'avais avant, qui était pourtant bien. J'aimais beaucoup ma vie avant aussi, mais là, elle me fait complètement sortir de ma zone de confort.

  • Speaker #0

    J'ai envie de savoir, qu'est-ce que c'était ta vie d'avant ?

  • Speaker #1

    Ma vie d'avant, c'était Lorène avec son travail, sa petite vie, ses projets, ses galères, ses joies.

  • Speaker #0

    Quels étaient tes projets, puisque tu parles de projets ?

  • Speaker #1

    Les projets qu'une jeune femme de 30 ans pouvait avoir, c'est-à-dire rencontrer quelqu'un de bien, créer une famille. Des projets qu'on peut avoir à mon âge en tout cas, et qui ont été complètement chamboulés à l'annonce du diagnostic. mais j'aime beaucoup ma vie aujourd'hui et elle a beaucoup de sens, beaucoup plus qu'avant même

  • Speaker #0

    Quand tu as eu le diagnostic, comment tu as réagi d'abord et puis comment tu es arrivée à vivre une vie avec du sens et dont tu parles là en disant qu'elle te plaît beaucoup ?

  • Speaker #1

    Quand j'ai eu mon diagnostic, je pense qu'il m'a fallu entre dix jours et un mois environ pour atterrir, pour savoir vraiment ce qui s'était passé Sur le moment, je ne connaissais pas la maladie, en fait. Le neurologue m'a expliqué un petit peu ce que c'était, ce qu'il en était, ce que ça faisait dans le corps, etc. Mais je n'ai pas su la gravité de la maladie tout de suite. Il ne m'a pas dit. Il m'a dit que c'était neurodégénératif, que ça ne se guérissait pas aujourd'hui. Je garde l'espoir qu'il y ait un traitement un jour. Mais en tout cas, il m'a demandé de vivre normalement. Il m'a dit, est-ce que vous voulez que je vous l'écrive en rouge ? J'ai dit oui, je veux bien écriver le mot en rouge. Donc il me l'a écrit sur la feuille où il m'avait expliqué, il m'avait fait un schéma du cerveau, de la moelle épinière, des muscles, etc. pour m'expliquer le fonctionnement de cette dégénérescence des motoneurones. Et voilà, après je suis sortie de l'hôpital ce jour-là avec mes parents. J'ai passé une petite semaine chez eux. Je suis ensuite... J'ai rentré chez moi, j'ai repris le travail au bout de dix jours. J'ai repris le travail machinalement.

  • Speaker #0

    Tu es retournée travailler, un peu comme si de rien n'était. Comment ça s'est passé dans ta tête ?

  • Speaker #1

    Je n'ai pas réalisé tout de suite, non. C'est de par mes amis qui se sont renseignés forcément. Ils m'ont dit qu'est-ce qu'il t'a dit le neurologue ? Comment ça s'est passé ? Tu es trois jours à l'hôpital. Et je leur ai dit, ben voilà, ils m'ont annoncé une sclérose latérale amyotrophique, donc forcément les gens ils tapent tout de suite sur Internet. Et c'est flippant, quand on regarde sur Google, c'est pas très glorieux en tout cas. Et c'est eux qui étaient plus choqués que moi finalement, parce que moi je m'étais pas renseignée plus que ça.

  • Speaker #0

    Toi tu l'avais pas fait, de taper sur Internet ?

  • Speaker #1

    Non, je n'avais pas forcément eu envie et pas envie de dramatiser.

  • Speaker #0

    Donc en fait, tu avais retenu une seule chose de ton médecin, c'est continuer à vivre normalement.

  • Speaker #1

    Oui, exactement, continuer à vivre. Et puis pour moi, rien n'était grave à ne pas avoir de force dans la main, finalement. Comment ça pouvait engendrer une maladie aussi terrible ? Et c'est plus tard que j'ai pris conscience un petit peu. Donc, j'ai travaillé encore six mois plus tard. Je travaillais dans une parfumerie à l'époque. Je travaillais chez Clarins dans une parfumerie. J'ai toujours été passionnée par ce que je faisais depuis tout le temps. Mais se battre pour rapporter un chiffre d'affaires ne m'intéressait plus. Je voulais vraiment transformer cette nouvelle complètement horrible, on va dire. En pépite, finalement. Mais ça a pris quelque temps, ça a pris quelques mois, je dirais. Je me suis dit, mince, quel est mon avenir aujourd'hui ? Comment ça va se passer ? Je ne suis pas quelqu'un qui me laisse aller. Et puis un jour, je me suis réveillée et je me suis dit, attends, on va en faire un truc de génial, en fait. Je me suis dit, cette maladie, on n'en entend pas parler. Elle est trop dans le silence, elle est trop dans l'ombre. J'ai envie de la mettre en lumière. Donc j'ai ouvert mon téléphone. J'ai regardé dans mon répertoire téléphonique. Je n'en ai pas 36 personnes qui sont médiatisées. J'en avais qu'une, Pascal Bataille, mon ancien employeur, avec qui j'ai gardé contact. Et j'ai décidé d'aller passer une semaine au Cap-Ferret toute seule, me reposer, d'aller sur Arcachon. Et je savais très bien qu'il était dans le coin. Je l'ai appelé, je lui ai dit, Pascal, je suis dans le coin, j'ai promis de vous appeler le jour où je reviendrai au Cap-Ferret. c'est-à-dire huit ans après, parce que j'avais travaillé avec lui en 2015. Et je lui ai demandé s'il était sur place. Et il m'a dit, écoutez, on peut se rejoindre. Je suis à Bordeaux tel jour, telle heure. Et je lui ai expliqué ma vie. Puis je lui ai raconté aussi mon diagnostic. Et je lui ai demandé s'il pouvait m'aider à la médiatiser.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu peux me parler de la relation qui s'est créée entre vous ?

  • Speaker #1

    C'est comme un grand frère. Je ne saurais pas expliquer, mais... C'est vraiment un ange gardien qui veille sur moi, qui m'explique comment ça se passe. Parce que moi, je ne suis pas du métier. Lui, il travaille beaucoup à la télévision, à la radio. Il a l'habitude de tout ce qui est les journalistes. Qu'est-ce qu'il faut dire ? Qu'est-ce qu'il ne faut pas dire ? Il y a des choses pour me protéger aussi. Je ne le remercierai jamais assez. Je vis des moments que je n'aurais jamais vécu avant. J'ai assisté l'année dernière au tournage de la série Ici tout commence Peut-être que tu connais sur TF1. C'est une série qui est quotidienne sur TF1 à 18h30 et une série que je regarde depuis le confinement. Le confinement a eu raison de moi là-dessus, moi qui n'étais pas très série. Je me suis prise au jeu, j'aime beaucoup, et j'ai pu être sur le plateau de tournage, avoir les acteurs à côté de moi, etc., parler de tout ça. Et moi, mon but, c'était de proposer un scénario d'un personnage qui a la SLA. Voilà, parce que le Ici, tout commence c'est une série sur le... La cuisine, en fait, c'est des jeunes gens qui apprennent à être chef cuisinier. Et moi, comme j'ai du mal à cuisiner toute seule, à couper, à éplucher, à émincer, etc., je me suis dit pourquoi pas qu'il y ait un jeune, parce que je tiens vraiment que ce soit une personne jeune qui ait les mêmes symptômes que moi. Donc je lui ai suggéré ça et on verra bien. Mais voilà, j'ai trouvé ça super. Je n'y serais jamais allée, je pense. Autrement, il y a plein de choses comme ça que je n'aurais jamais fait. C'est un passe-droit, on va dire, pour une vie incroyable, quelque part. C'est fou à dire. C'est fou à dire qu'une maladie comme ça peut vous emmener dans une sphère hyper magique.

  • Speaker #0

    Oui, c'est un peu une vie de paillettes et de stars.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Ce n'était pas du tout mon environnement jusqu'à présent. Je suis trop contente. C'est super, oui. Je suis ravie, puis les gens m'aident à chaque fois. Je rencontre, en Laponie, j'ai rencontré Marine L'Orphelin, l'ancienne Miss France. J'ai rencontré Claude D'Artois, un ancien de Koh Lanta. C'est Claude d'ailleurs qui a eu l'envie de faire un Fort Boyard.

  • Speaker #0

    Alors c'est une vie, comment tu pourrais dire, excitante, passionnante ?

  • Speaker #1

    Ah oui, passionnante, ça c'est sûr, passionnante, impressionnante. Je me dis que ce n'est quand même pas la vie de tout le monde. et je me sens hyper privilégiée.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, au niveau des symptômes, est-ce qu'il y a des choses qui ont vraiment évolué ? Parce qu'en fait, ça fait un an et demi à peu près.

  • Speaker #1

    Oui, ça fait un an et demi. Oui, j'ai une perte de force progressive dans la main, dans le bras, une atrophie des muscles également dans la main, dans l'épaule, dans l'homoplate. Et ça devient un peu fatigant au quotidien parce qu'il faut des muscles pour porter un bras. Et quand il n'y en a plus, le bras pèse très lourd. Mais bon, on vit avec.

  • Speaker #0

    Comment tu t'adaptes ? Comment tu t'adaptes à ces modifications, ces changements, cette évolution ?

  • Speaker #1

    Je m'adapte avec des petites techniques au quotidien. Je demande de l'aide maintenant, parce que je suis quelqu'un qui est très indépendante et très autonome, et je demandais rarement de l'aide. Maintenant, je n'ai plus le choix. Ne serait-ce qu'un truc tout bête, ouvrir un... J'ai des amis qui me font des conserves, ou mes parents qui me font des conserves de tomates, de légumes, des choses comme ça. Quand c'est fermé à chaud, c'est impossible d'ouvrir. C'est très dur en tout cas. Donc je vais toquer chez ma voisine et elle m'ouvre mes peaux. Voilà, c'est des moments comme ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu as des droits à des aides particulières ?

  • Speaker #1

    Alors oui, j'ai su la semaine passée d'ailleurs que j'avais droit. La MDPH m'accorde le droit d'avoir une personne qui viendra. Ça n'a pas encore commencé, mais elle va venir prochainement, deux heures par jour. pour de l'aide culinaire, par exemple. Et cette personne, pourquoi pas, m'aidera à porter mes courses, par exemple, et m'aidera à éplucher mes légumes, les couper, me les mettre dans des boîtes au frais ou au congélateur et que moi, ensuite, j'ai plus qu'à les faire cuire ou les réduire en purée, en soupe, en gratin, je ne sais pas. Mais ça va me soulager. Et puis, je pense que c'est bien parce qu'effectivement, j'ai mes parents, j'ai ma sœur, mes copines qui me proposent de l'aide. Mais alors c'est très sympa, effectivement, des fois on fait des apéros, atelier légumes avec mes copines, mais à un moment donné, c'est pas leur rôle, quoi. J'ai, voilà, j'ai une amie qui vient régulièrement me changer mes draps, parce que c'est pas évident quand on a qu'une main, changer une housse de couette. Déjà, quand on a ses deux mains, c'est pénible. Mais là, c'est juste, enfin, je mets trois heures à le faire et au bout d'un moment, je m'énerve et voilà. Donc du coup, elle vient m'aider. C'est très gentil de sa part, évidemment, mais ce n'est pas son rôle. J'ai envie de lui garder son rôle de copine, ce n'est pas une aidante.

  • Speaker #0

    Mais par contre, tu disais que tu n'avais pas droit à des aides ménagères qui pourraient t'aider justement dans ce genre de choses.

  • Speaker #1

    Eh bien non, apparemment, ce n'est pas au programme. Donc on m'a fait remplir un dossier pour la CAF afin d'obtenir une petite prime. Et avec cette petite prime, je pourrais payer une personne qui viendrait faire mon ménage. C'est ce que je vais faire. De toute façon, je n'ai plus le choix.

  • Speaker #0

    Je vois que sur ton pull, il y a marqué amour Est-ce que tu es une midinette, une fleur bleue, une grande amoureuse ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense que je rêve de rencontrer quelqu'un qui puisse partager ma vie maintenant. Parce que... Je crois que c'est ce qui me manque le plus, là. Oui.

  • Speaker #0

    Donc, tu as toujours le projet de fonder une famille, en fait ?

  • Speaker #1

    On va dire que ça, c'était mon projet avant mon diagnostic. Là, les choses ont beaucoup changé. Et ça ne fait plus partie de mes projets aujourd'hui, en tout cas. Non, je ne pense pas. Parce que la maladie me demande beaucoup d'énergie, beaucoup d'énergie mentale et physique. Et je crois que j'aime bien ma vie comme elle est là. Parce qu'il faut de l'énergie pour avoir un enfant, pour l'élever, etc. Je regarde un peu mon entourage et je ne sais pas si je m'en sentirais capable aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Et alors, l'amour, ça pourrait être ? Comment, aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Alors là, grande question. Moi qui suis très idéaliste, pour une fois, j'essaye de ne rien attendre et de ne rien espérer. Je suis toujours une grande rêveuse. De toute façon, ça, ça fait partie de moi. C'est comme respirer, ça fait partie de moi. Je ne peux pas m'en empêcher. Mais j'essaye de ne plus vraiment attendre. On verra bien quand ça se présentera, si ça se présente. Parce que c'est aussi un gros sujet. C'est vrai. En tout cas, j'espère que ce sera quelqu'un qui sache déjà ma maladie. Je ne voudrais pas avoir à expliquer à quelqu'un mon diagnostic, etc. Peut-être que j'ai, au fond de moi, peur du rejet, peut-être. Ce n'est pas évident. Moi, je ne sais pas comment je réagirais si je rencontrais quelqu'un qui m'explique son diagnostic. Je ne sais pas comment je réagirais. Mais en tout cas, il faudra qu'il ait de bonnes épaules. Et je laisse faire les choses parce que je me dis que la vie est bien faite et si ça doit se faire, la vie me mettra sur le chemin de quelqu'un.

  • Speaker #0

    Alors justement, j'ai l'impression que tu as une forme, mais peut-être que je me trompe, de SLA un petit peu différente, ou en tout cas lente. Est-ce que tu peux m'en dire plus ?

  • Speaker #1

    Alors oui, j'ai la chance dans mon malheur d'avoir une SLA lente, de par le taux de neurofilaments que les personnes ont détecté lors de ma ponction lombaire. Et j'ai aussi un gène unique au monde. C'est-à-dire que j'ai un gène que l'on ne connaît pas en France et que l'on ne connaît pas sur cette planète.

  • Speaker #0

    Alors, un gène juste pour toi ?

  • Speaker #1

    J'ai un gène juste pour moi, oui, exactement, que les chercheurs ne connaissent pas. Ils m'ont demandé de faire des examens supplémentaires récemment pour qu'ils puissent travailler sur ce gène-là, qui serait responsable de la SLA. C'est un gène que j'ai eu à ma naissance. Mes deux parents ne sont pas concernés. Je suis née avec ce gène-là et je l'ai déclaré à 35 ans. Donc, c'est aussi une forme lente, apparemment. Là, je vais rencontrer un chercheur prochainement.

  • Speaker #0

    Qui t'en dira plus sur ce gène ?

  • Speaker #1

    Oui, qui va m'en dire plus. En tout cas, on va essayer de creuser là-dessus.

  • Speaker #0

    Est-ce que ce gène-là, on connaît son évolution ? Ou peut-être pas ?

  • Speaker #1

    Non, il est inconnu pour le moment. Aucune idée. Non, je ne sais pas. Mais en tout cas, quand...

  • Speaker #0

    Comment ça s'appelle ?

  • Speaker #1

    Je n'ai pas le nom là, je ne me souviens plus.

  • Speaker #0

    Est-ce que ça te permet peut-être d'avoir un espoir plus grand devant l'inconnu que ça te procure ? Ça permet de tout imaginer ?

  • Speaker #1

    Oui, je me souviens que quand mon neurologue me l'avait annoncé, que j'avais ce gène-là, j'étais dans une pièce à l'hôpital de Lyon. Moi, je crois au signe de la vie, de toute façon. Il y a un rayon de lumière, un rayon de soleil qui est venu inonder la pièce à ce moment-là, au moment où il me l'a dit. Il me dit écoutez, voilà, vous avez ce gène-là, mais je crois que je préfère avoir ce gène-là plutôt qu'un gène qu'on connaît et dont l'issue est beaucoup plus sombre, on va dire. Là, il me reste une petite part d'espoir. Je suis sûre, moi je suis sûre qu'on va trouver quelque chose. Je reste positive et j'ai actionné mon cerveau de façon, je l'ai vraiment formaté de façon positive. Parce qu'on est ce qu'on pense, de toute façon, donc j'ai cet espoir-là en tout cas.

  • Speaker #0

    Donc l'idée, c'est que tu engendres quelque chose de positif avec ta pensée, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça, oui.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que tu as appris avec cette maladie sur toi ?

  • Speaker #1

    Eh bien, là, pas plus tard que janvier dernier, j'étais en Laponie pour un raid des fidèles. Et j'ai appris à me dépasser physiquement. Je ne pensais pas y arriver parce que le défi était de... Il y avait trois épreuves sur trois matinées. Il y avait 15 kilomètres de trail par un froid à moins 20, moins 25 degrés. Il y avait du ski de fond. J'en ai fait que très peu dans ma vie et je déteste le ski, vraiment, je déteste. Et il y avait une épreuve de fat bike, donc c'est le vélo à gros pneus. On avait un vélo pour deux, Pascal, Bataille et moi-même. Et oui, c'est vrai que la vie nous permet de nous dépasser. Et là, je l'ai vraiment ressenti à ce moment-là. Je ne pensais pas y arriver toute seule. J'y suis arrivée grâce à mon équipe. Là, la SLA me prend vraiment à me sortir de... Je ne dis pas que j'étais dans une zone de confort avant, parce que j'ai toujours aimé sortir de ma zone de confort. Mais là, elle me repousse dans mes retranchements, complètement.

  • Speaker #0

    Alors, quand tu dis retranchements, tu veux dire quoi ?

  • Speaker #1

    Eh bien, par exemple, ce qu'on fait là, toi et moi, en podcast. Je ne pensais pas en être capable. Un jour, en tout cas, je n'aurais jamais pensé parler de moi comme ça. d'exposer ma vie, je suis quelqu'un d'assez réservée, je n'étais pas vraiment sur les réseaux sociaux. Et là, j'ai une page Instagram où j'ai quasiment aujourd'hui 4500 abonnés. C'est incroyable le nombre de personnes qui s'abonnent à ma page. Et je me mets à nu finalement, comme si je me découvrais à des milliers de gens que je ne connais pas, à qui j'explique ma vie. Ce n'était pas évident.

  • Speaker #0

    Et là, aujourd'hui, comment ça fait ?

  • Speaker #1

    Eh bien, aujourd'hui, ça me fait toujours pareil. Je ne m'y habitue pas, mais je suis contente, en fait. Je suis contente qu'on puisse parler de cette maladie. Je suis contente que les gens s'y intéressent. Et c'est ce que je voulais dès le départ, c'était en parler.

  • Speaker #0

    Tu as fait combien de télé en un an à peu près ?

  • Speaker #1

    Je n'ai pas compté. J'ai fait un tout petit peu de radio, radio locale sur Annecy. Il y a eu le magazine de la santé. Il y a eu TV7 Gironde. Là, ce sera TV8 Montblanc cette semaine. Vous êtes formidable également sur France 3 Occitanie.

  • Speaker #0

    Paris Match.

  • Speaker #1

    Oui, il y a eu Paris Match. Paris Match, incroyable. parce que j'étais avec toute mon équipe ce jour-là on était à Paris pour partir en Laponie et ils m'ont accompagnée dans le studio de Paris Match et ils étaient devant moi et c'est un super souvenir et c'est une vidéo qui a aujourd'hui plus de 530 000 vues c'est incroyable de se dire qu'un demi-million de personnes a écouté mon témoignage c'est intimidant mais c'est extra, vraiment je suis ravie

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui te ravit le plus ?

  • Speaker #1

    De faire connaître de la maladie déjà dans un premier temps. Parce qu'on ne peut pas ramener de l'argent, la recherche ne peut pas avancer si les gens ne s'y intéressent pas. Donc déjà, premièrement, faire connaître la maladie. Deuxièmement, forcément, ramener des fonds. Ces fonds, moi je les reverse à la RSLA, à l'Association pour la Recherche de la SLA. Ils vont pour des projets de recherche.

  • Speaker #0

    Alors je me demandais, parce que je t'ai vue évidemment, parce que j'aime bien te suivre. Mais à chaque fois, on te répète la même chose, des choses pas très agréables sur la maladie.

  • Speaker #1

    Oui, c'est sûr que ça mérite une protection parce que je suis quelqu'un d'hypersensible et tout m'atteint finalement. Comme m'a dit mon neurologue, il m'a dit, mademoiselle Vivier, je connais la SLA, je ne connais pas la vôtre. Donc ça, ça m'a fait du bien d'entendre ça. Et je me dis que chacun sa SLA finalement et que je me protège en me disant que mon évolution, elle est lente. que je vais y arriver, que je vais m'en sortir. J'essaye de me protéger comme ça. Ce n'est pas évident pour moi de voir des personnes en fauteuil roulant. Ce n'est pas du tout évident, vraiment. Ce n'est pas facile parce que votre cerveau, il vous dit malgré tout que c'est une maladie que tu as et que c'est peut-être ton issue. Et ça, c'est vraiment quelque chose qui est très dur parfois, par moments. C'est un peu difficile aussi de le dire et de l'avouer, mais je suis honnête.

  • Speaker #0

    Tu dis que c'est difficile, du coup, tu as envie de faire quoi, de t'éloigner ?

  • Speaker #1

    Non, mais par contre, je me mets dans ma petite bulle avant de faire quoi que ce soit. Je me mets dans une petite bulle de protection et ensuite, je vais vers ces gens-là. Parce que j'ai envie de leur apporter mon soutien, parce que mon combat, c'est aussi pour eux que je le mène. Mais ce n'est pas simple, non.

  • Speaker #0

    Parfois, quand je te vois... À la télévision ou même là, quand je te vois en vrai, tu as l'air d'un ange, comme si tu prenais un peu de distance. Est-ce que c'est ça ta bulle ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense que c'est mon moyen de protection. C'est ma soupape de sécurité, je pense. Et si je vais bien aujourd'hui, c'est parce que je médite, on va dire ça, et je me crée cette petite bulle de protection. Je prends soin de moi.

  • Speaker #0

    Quand tu as des coups de mousse qui, j'imagine, arrivent des fois, justement, comment tu fais pour les traverser ? Comment tu fais pour les dépasser ?

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr que ça arrive. Même si je suis bien entourée, de toute façon, c'est comme tout le monde. De toute façon, il y a des moments où ce n'est pas forcément toujours la fête. Souvent, j'écris mes pensées sur un bout de papier, mes pensées négatives, forcément, et je les brûle. C'est un... C'est un petit rituel que j'ai trouvé. Je me cuisine quelque chose à manger que j'aime bien. Un peu de chocolat noir, ça fait du bien. Parfois même je pleure parce que ça fait du bien aussi. Je vais marcher, je vais prendre l'air. Et je me concentre sur mes projets. Parce que ça c'est vraiment thérapeutique chez moi. Les projets c'est un médicament. Oui je peux être vraiment très en bas par contre. Mais ça ne dure pas.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui peut te mettre en bas, par exemple ?

  • Speaker #1

    La colère, je pense. La colère peut me mettre dans un mood un petit peu noir quand je n'arrive pas à faire des choses parce que je n'ai qu'une main. Il y a des moments comme ça qui me disent T'as la SLA, n'oublie pas, elle est là. Il y a des moments où c'est compliqué pour boutonner un jean. C'est tout bête, mais c'est énervant. Et c'est ça, plus ça, plus ça, plus je fais tomber une assiette, je fais tomber quelque chose parce que je l'ai mal tenue. Ouais, voilà, il y a des moments comme ça, de toute façon.

  • Speaker #0

    Le jour où tu as eu le diagnostic, est-ce que tu as eu des sentiments comme ça, de colère, d'injustice ?

  • Speaker #1

    Non, je n'ai pas eu la colère tout de suite. Non. J'ai eu la tristesse, mais pas la colère que j'ai eue après. C'est agaçant, en fait. C'est agaçant. Moi qui ai l'habitude de tout faire toute seule et d'aller vite et d'aller comme je veux, etc. Tout est beaucoup plus lent. Quand je donne un horaire à des amis pour un repas ou pour un rendez-vous, il faut que je prévoie maintenant du temps. Ce n'est plus le temps que j'avais avant. Là, il faut doubler.

  • Speaker #0

    Est-ce que, paradoxalement, la lenteur t'apporte des choses ?

  • Speaker #1

    Eh bien oui, elle me dit ralenti. Ça ne sert à rien de speeder comme ça. Elle remet un petit peu l'aiguille au milieu du village, on va dire. Oui, oui, elle me dit ralenti. Prends le temps de vivre.

  • Speaker #0

    Alors c'est quoi le temps de vivre ? Qu'est-ce qu'on fait quand on prend le temps de vivre ?

  • Speaker #1

    C'est admirer le ciel quand on va se balader. Je vais beaucoup me balader au bord du lac d'Annecy. Admirer la beauté du lac avec les petits clapotis de l'eau. Peut-être qu'avant je ne le voyais pas. Je le voyais mais sans le voir peut-être. Prendre le temps de marcher. Prendre le temps d'être en pleine conscience en fait. Marcher, ce n'est pas marcher. C'est dérouler un pied après l'autre. Écouter le bruit du gravier. Quand on marche sur du gravier par exemple. Écouter le bruit de l'air quand on marche dans un champ. Écouter le vent. qui souffle sur les feuilles d'un arbre. C'est toutes des choses comme ça qui sont beaucoup plus importantes maintenant.

  • Speaker #0

    On part de l'esthétique et puis tout à coup, on est dans l'être. Néanmoins, est-ce que le handicap est quelque chose d'acceptable aujourd'hui par rapport à l'image qu'on aimerait avoir ?

  • Speaker #1

    C'est toujours un peu... bizarre. Par exemple, j'ai reçu il y a 15 jours ma carte pour le stationnement handicapé. Alors, je suis très contente parce que je me dis que dans cette maladie, vu la gravité de la chose, si on peut avoir une petite récompense et donc de ne pas chercher trois heures une place sur un parking, franchement, c'est hyper appréciable. Après, quand je l'ai reçu, quand vous avez la... Votre visage en photo sur cette carte, c'est pas simple. Ça m'a fait bizarre, ça m'a choquée même presque. Il a fallu un peu de temps, je la regarde pas de toute façon. Je l'ai mis sur mon pare-brise, je la regarde pas. Mais oui, non, c'est pas... Il y a pas bien le choix, de toute façon, c'est comme ça. Je l'appelle pas le handicap, en tout cas, j'aime pas ce mot.

  • Speaker #0

    Comment tu l'appelles ?

  • Speaker #1

    Je l'appelle une autre façon de vivre. Mon message à faire passer, peut-être que depuis que j'ai la SLA, et peut-être inconsciemment d'exprimer à mon entourage, ou alors à ceux qui ne me connaissent pas, que réveillez-vous, en fait, réveillez-vous. Parce que, ok, moi, ma vie, je ne sais pas trop ce qu'elle va être de par ma maladie, mais quelqu'un comme toi qui va bien, qui est en bonne santé, qui te dit que demain, tu seras encore là, on n'en sait rien. Il faut vivre les choses maintenant, tout de suite, il ne faut pas attendre. Il ne faut pas attendre le bon moment, il ne faut pas attendre... Non, maintenant.

  • Speaker #0

    Dans le prochain épisode, vous retrouverez Lorène Vivier, Le pouvoir de la bulle, partie 2. Restez à l'écoute de notre podcast, La vie est belle, SLA, et abonnez-vous sur votre plateforme préférée.

Description

Lorène, jeune femme de 37 ans, avait un travail, des joies et des galères. Sa vie était faite de projets, ceux d’une jeune fille de son âge, rencontrer quelqu’un de bien, avoir des enfants… L’annonce du diagnostic a tout chamboulé dans son existence.  Il lui aura fallu un peu de temps pour récupérer de cette annonce. Après la tristesse du début et la colère, est venu le temps de l’acceptation et de l’adaptation.



Ne manquez aucun nouvel épisode de La vie est belle, essaie-la ! en vous abonnant dès maintenant sur votre plateforme de podcasts préférée et retrouvez un nouvel épisode un samedi sur deux.


Nous remercions chaleureusement toutes les personnes qui ont participé à cette première saison : personnes malades, aidants, proches, professionnels de santé.


Un immense merci également à la Fondation d'entreprise IRCEM pour son précieux soutien, ainsi qu'à l’Agence CosaVostra pour la réalisation du visuel du podcast.


Ce podcast de l'ARLSA a été réalisé par Natacha Sels, la post-production est de Bertrand Chaumeton.

 

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Bonne écoute !


Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    La vie est belle, essaie-la ! (SLA) , le podcast de l'ARSLA, qui met en lumière des personnes confrontées à la SLA et des professionnels engagés.

  • Speaker #1

    Je voulais vraiment transformer cette nouvelle complètement horrible, on va dire, en pépite finalement, et en faire un truc de génial en fait.

  • Speaker #0

    Lorène Vivier, le pouvoir de la bulle, partie 1, le 9 novembre 2022. À l'âge de 35 ans, Lorène Vivier a été diagnostiquée porteuse d'une SLA. Aujourd'hui, elle met toute son énergie à donner une couverture médiatique à la maladie afin de colelcter des fonds pour la recherche. Aidée en cela par celui qu'elle appelle son ange gardien, Pascal Bataille. Nous nous sommes donnés rendez-vous à son domicile situé dans la ville d'Annecy. J'y découvre une véritable équilibriste qui s'évertue à tenir la maladie à bonne distance pour vivre pleinement. Comme ces bijoux précieux, elle brille de multiples facettes, entre légèreté et infinie sagesse. Nous parlerons aussi bien de sa nouvelle vie sous les projecteurs que de son quotidien transformé par la maladie, de sa SLA un peu différente, de l'amour, de la pleine conscience et de l'étonnant pouvoir de la bulle dont vous découvrirez les effets dans les deux épisodes. Je vous propose d'écouter son témoignage. J'ai envie de le dire tout de suite, le titre qu'on a choisi pour le podcast, il vient de toi. Est-ce que tu peux le redire ?

  • Speaker #1

    La vie est belle, essaie-la ! SLA, je l'ai choisi, c'est parti de trois lettres, qui étaient S-L-A pour la sclérose latérale amyotrophique. Et je l'ai transformé en une phrase beaucoup plus jolie, c'est-à-dire la vie est belle, essaie-la.

  • Speaker #0

    Alors comment tu l'essayes la vie en ce moment ?

  • Speaker #1

    Eh bien, je l'essaye pleinement, c'est-à-dire qu'elle m'offre plein d'opportunités en ce moment. Depuis mon diagnostic, je vis des moments exceptionnels et hors du commun, on peut le dire, par rapport en tout cas à la vie que j'avais avant, qui était pourtant bien. J'aimais beaucoup ma vie avant aussi, mais là, elle me fait complètement sortir de ma zone de confort.

  • Speaker #0

    J'ai envie de savoir, qu'est-ce que c'était ta vie d'avant ?

  • Speaker #1

    Ma vie d'avant, c'était Lorène avec son travail, sa petite vie, ses projets, ses galères, ses joies.

  • Speaker #0

    Quels étaient tes projets, puisque tu parles de projets ?

  • Speaker #1

    Les projets qu'une jeune femme de 30 ans pouvait avoir, c'est-à-dire rencontrer quelqu'un de bien, créer une famille. Des projets qu'on peut avoir à mon âge en tout cas, et qui ont été complètement chamboulés à l'annonce du diagnostic. mais j'aime beaucoup ma vie aujourd'hui et elle a beaucoup de sens, beaucoup plus qu'avant même

  • Speaker #0

    Quand tu as eu le diagnostic, comment tu as réagi d'abord et puis comment tu es arrivée à vivre une vie avec du sens et dont tu parles là en disant qu'elle te plaît beaucoup ?

  • Speaker #1

    Quand j'ai eu mon diagnostic, je pense qu'il m'a fallu entre dix jours et un mois environ pour atterrir, pour savoir vraiment ce qui s'était passé Sur le moment, je ne connaissais pas la maladie, en fait. Le neurologue m'a expliqué un petit peu ce que c'était, ce qu'il en était, ce que ça faisait dans le corps, etc. Mais je n'ai pas su la gravité de la maladie tout de suite. Il ne m'a pas dit. Il m'a dit que c'était neurodégénératif, que ça ne se guérissait pas aujourd'hui. Je garde l'espoir qu'il y ait un traitement un jour. Mais en tout cas, il m'a demandé de vivre normalement. Il m'a dit, est-ce que vous voulez que je vous l'écrive en rouge ? J'ai dit oui, je veux bien écriver le mot en rouge. Donc il me l'a écrit sur la feuille où il m'avait expliqué, il m'avait fait un schéma du cerveau, de la moelle épinière, des muscles, etc. pour m'expliquer le fonctionnement de cette dégénérescence des motoneurones. Et voilà, après je suis sortie de l'hôpital ce jour-là avec mes parents. J'ai passé une petite semaine chez eux. Je suis ensuite... J'ai rentré chez moi, j'ai repris le travail au bout de dix jours. J'ai repris le travail machinalement.

  • Speaker #0

    Tu es retournée travailler, un peu comme si de rien n'était. Comment ça s'est passé dans ta tête ?

  • Speaker #1

    Je n'ai pas réalisé tout de suite, non. C'est de par mes amis qui se sont renseignés forcément. Ils m'ont dit qu'est-ce qu'il t'a dit le neurologue ? Comment ça s'est passé ? Tu es trois jours à l'hôpital. Et je leur ai dit, ben voilà, ils m'ont annoncé une sclérose latérale amyotrophique, donc forcément les gens ils tapent tout de suite sur Internet. Et c'est flippant, quand on regarde sur Google, c'est pas très glorieux en tout cas. Et c'est eux qui étaient plus choqués que moi finalement, parce que moi je m'étais pas renseignée plus que ça.

  • Speaker #0

    Toi tu l'avais pas fait, de taper sur Internet ?

  • Speaker #1

    Non, je n'avais pas forcément eu envie et pas envie de dramatiser.

  • Speaker #0

    Donc en fait, tu avais retenu une seule chose de ton médecin, c'est continuer à vivre normalement.

  • Speaker #1

    Oui, exactement, continuer à vivre. Et puis pour moi, rien n'était grave à ne pas avoir de force dans la main, finalement. Comment ça pouvait engendrer une maladie aussi terrible ? Et c'est plus tard que j'ai pris conscience un petit peu. Donc, j'ai travaillé encore six mois plus tard. Je travaillais dans une parfumerie à l'époque. Je travaillais chez Clarins dans une parfumerie. J'ai toujours été passionnée par ce que je faisais depuis tout le temps. Mais se battre pour rapporter un chiffre d'affaires ne m'intéressait plus. Je voulais vraiment transformer cette nouvelle complètement horrible, on va dire. En pépite, finalement. Mais ça a pris quelque temps, ça a pris quelques mois, je dirais. Je me suis dit, mince, quel est mon avenir aujourd'hui ? Comment ça va se passer ? Je ne suis pas quelqu'un qui me laisse aller. Et puis un jour, je me suis réveillée et je me suis dit, attends, on va en faire un truc de génial, en fait. Je me suis dit, cette maladie, on n'en entend pas parler. Elle est trop dans le silence, elle est trop dans l'ombre. J'ai envie de la mettre en lumière. Donc j'ai ouvert mon téléphone. J'ai regardé dans mon répertoire téléphonique. Je n'en ai pas 36 personnes qui sont médiatisées. J'en avais qu'une, Pascal Bataille, mon ancien employeur, avec qui j'ai gardé contact. Et j'ai décidé d'aller passer une semaine au Cap-Ferret toute seule, me reposer, d'aller sur Arcachon. Et je savais très bien qu'il était dans le coin. Je l'ai appelé, je lui ai dit, Pascal, je suis dans le coin, j'ai promis de vous appeler le jour où je reviendrai au Cap-Ferret. c'est-à-dire huit ans après, parce que j'avais travaillé avec lui en 2015. Et je lui ai demandé s'il était sur place. Et il m'a dit, écoutez, on peut se rejoindre. Je suis à Bordeaux tel jour, telle heure. Et je lui ai expliqué ma vie. Puis je lui ai raconté aussi mon diagnostic. Et je lui ai demandé s'il pouvait m'aider à la médiatiser.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu peux me parler de la relation qui s'est créée entre vous ?

  • Speaker #1

    C'est comme un grand frère. Je ne saurais pas expliquer, mais... C'est vraiment un ange gardien qui veille sur moi, qui m'explique comment ça se passe. Parce que moi, je ne suis pas du métier. Lui, il travaille beaucoup à la télévision, à la radio. Il a l'habitude de tout ce qui est les journalistes. Qu'est-ce qu'il faut dire ? Qu'est-ce qu'il ne faut pas dire ? Il y a des choses pour me protéger aussi. Je ne le remercierai jamais assez. Je vis des moments que je n'aurais jamais vécu avant. J'ai assisté l'année dernière au tournage de la série Ici tout commence Peut-être que tu connais sur TF1. C'est une série qui est quotidienne sur TF1 à 18h30 et une série que je regarde depuis le confinement. Le confinement a eu raison de moi là-dessus, moi qui n'étais pas très série. Je me suis prise au jeu, j'aime beaucoup, et j'ai pu être sur le plateau de tournage, avoir les acteurs à côté de moi, etc., parler de tout ça. Et moi, mon but, c'était de proposer un scénario d'un personnage qui a la SLA. Voilà, parce que le Ici, tout commence c'est une série sur le... La cuisine, en fait, c'est des jeunes gens qui apprennent à être chef cuisinier. Et moi, comme j'ai du mal à cuisiner toute seule, à couper, à éplucher, à émincer, etc., je me suis dit pourquoi pas qu'il y ait un jeune, parce que je tiens vraiment que ce soit une personne jeune qui ait les mêmes symptômes que moi. Donc je lui ai suggéré ça et on verra bien. Mais voilà, j'ai trouvé ça super. Je n'y serais jamais allée, je pense. Autrement, il y a plein de choses comme ça que je n'aurais jamais fait. C'est un passe-droit, on va dire, pour une vie incroyable, quelque part. C'est fou à dire. C'est fou à dire qu'une maladie comme ça peut vous emmener dans une sphère hyper magique.

  • Speaker #0

    Oui, c'est un peu une vie de paillettes et de stars.

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça. Ce n'était pas du tout mon environnement jusqu'à présent. Je suis trop contente. C'est super, oui. Je suis ravie, puis les gens m'aident à chaque fois. Je rencontre, en Laponie, j'ai rencontré Marine L'Orphelin, l'ancienne Miss France. J'ai rencontré Claude D'Artois, un ancien de Koh Lanta. C'est Claude d'ailleurs qui a eu l'envie de faire un Fort Boyard.

  • Speaker #0

    Alors c'est une vie, comment tu pourrais dire, excitante, passionnante ?

  • Speaker #1

    Ah oui, passionnante, ça c'est sûr, passionnante, impressionnante. Je me dis que ce n'est quand même pas la vie de tout le monde. et je me sens hyper privilégiée.

  • Speaker #0

    Aujourd'hui, au niveau des symptômes, est-ce qu'il y a des choses qui ont vraiment évolué ? Parce qu'en fait, ça fait un an et demi à peu près.

  • Speaker #1

    Oui, ça fait un an et demi. Oui, j'ai une perte de force progressive dans la main, dans le bras, une atrophie des muscles également dans la main, dans l'épaule, dans l'homoplate. Et ça devient un peu fatigant au quotidien parce qu'il faut des muscles pour porter un bras. Et quand il n'y en a plus, le bras pèse très lourd. Mais bon, on vit avec.

  • Speaker #0

    Comment tu t'adaptes ? Comment tu t'adaptes à ces modifications, ces changements, cette évolution ?

  • Speaker #1

    Je m'adapte avec des petites techniques au quotidien. Je demande de l'aide maintenant, parce que je suis quelqu'un qui est très indépendante et très autonome, et je demandais rarement de l'aide. Maintenant, je n'ai plus le choix. Ne serait-ce qu'un truc tout bête, ouvrir un... J'ai des amis qui me font des conserves, ou mes parents qui me font des conserves de tomates, de légumes, des choses comme ça. Quand c'est fermé à chaud, c'est impossible d'ouvrir. C'est très dur en tout cas. Donc je vais toquer chez ma voisine et elle m'ouvre mes peaux. Voilà, c'est des moments comme ça.

  • Speaker #0

    Est-ce que tu as des droits à des aides particulières ?

  • Speaker #1

    Alors oui, j'ai su la semaine passée d'ailleurs que j'avais droit. La MDPH m'accorde le droit d'avoir une personne qui viendra. Ça n'a pas encore commencé, mais elle va venir prochainement, deux heures par jour. pour de l'aide culinaire, par exemple. Et cette personne, pourquoi pas, m'aidera à porter mes courses, par exemple, et m'aidera à éplucher mes légumes, les couper, me les mettre dans des boîtes au frais ou au congélateur et que moi, ensuite, j'ai plus qu'à les faire cuire ou les réduire en purée, en soupe, en gratin, je ne sais pas. Mais ça va me soulager. Et puis, je pense que c'est bien parce qu'effectivement, j'ai mes parents, j'ai ma sœur, mes copines qui me proposent de l'aide. Mais alors c'est très sympa, effectivement, des fois on fait des apéros, atelier légumes avec mes copines, mais à un moment donné, c'est pas leur rôle, quoi. J'ai, voilà, j'ai une amie qui vient régulièrement me changer mes draps, parce que c'est pas évident quand on a qu'une main, changer une housse de couette. Déjà, quand on a ses deux mains, c'est pénible. Mais là, c'est juste, enfin, je mets trois heures à le faire et au bout d'un moment, je m'énerve et voilà. Donc du coup, elle vient m'aider. C'est très gentil de sa part, évidemment, mais ce n'est pas son rôle. J'ai envie de lui garder son rôle de copine, ce n'est pas une aidante.

  • Speaker #0

    Mais par contre, tu disais que tu n'avais pas droit à des aides ménagères qui pourraient t'aider justement dans ce genre de choses.

  • Speaker #1

    Eh bien non, apparemment, ce n'est pas au programme. Donc on m'a fait remplir un dossier pour la CAF afin d'obtenir une petite prime. Et avec cette petite prime, je pourrais payer une personne qui viendrait faire mon ménage. C'est ce que je vais faire. De toute façon, je n'ai plus le choix.

  • Speaker #0

    Je vois que sur ton pull, il y a marqué amour Est-ce que tu es une midinette, une fleur bleue, une grande amoureuse ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense que je rêve de rencontrer quelqu'un qui puisse partager ma vie maintenant. Parce que... Je crois que c'est ce qui me manque le plus, là. Oui.

  • Speaker #0

    Donc, tu as toujours le projet de fonder une famille, en fait ?

  • Speaker #1

    On va dire que ça, c'était mon projet avant mon diagnostic. Là, les choses ont beaucoup changé. Et ça ne fait plus partie de mes projets aujourd'hui, en tout cas. Non, je ne pense pas. Parce que la maladie me demande beaucoup d'énergie, beaucoup d'énergie mentale et physique. Et je crois que j'aime bien ma vie comme elle est là. Parce qu'il faut de l'énergie pour avoir un enfant, pour l'élever, etc. Je regarde un peu mon entourage et je ne sais pas si je m'en sentirais capable aujourd'hui.

  • Speaker #0

    Et alors, l'amour, ça pourrait être ? Comment, aujourd'hui ?

  • Speaker #1

    Alors là, grande question. Moi qui suis très idéaliste, pour une fois, j'essaye de ne rien attendre et de ne rien espérer. Je suis toujours une grande rêveuse. De toute façon, ça, ça fait partie de moi. C'est comme respirer, ça fait partie de moi. Je ne peux pas m'en empêcher. Mais j'essaye de ne plus vraiment attendre. On verra bien quand ça se présentera, si ça se présente. Parce que c'est aussi un gros sujet. C'est vrai. En tout cas, j'espère que ce sera quelqu'un qui sache déjà ma maladie. Je ne voudrais pas avoir à expliquer à quelqu'un mon diagnostic, etc. Peut-être que j'ai, au fond de moi, peur du rejet, peut-être. Ce n'est pas évident. Moi, je ne sais pas comment je réagirais si je rencontrais quelqu'un qui m'explique son diagnostic. Je ne sais pas comment je réagirais. Mais en tout cas, il faudra qu'il ait de bonnes épaules. Et je laisse faire les choses parce que je me dis que la vie est bien faite et si ça doit se faire, la vie me mettra sur le chemin de quelqu'un.

  • Speaker #0

    Alors justement, j'ai l'impression que tu as une forme, mais peut-être que je me trompe, de SLA un petit peu différente, ou en tout cas lente. Est-ce que tu peux m'en dire plus ?

  • Speaker #1

    Alors oui, j'ai la chance dans mon malheur d'avoir une SLA lente, de par le taux de neurofilaments que les personnes ont détecté lors de ma ponction lombaire. Et j'ai aussi un gène unique au monde. C'est-à-dire que j'ai un gène que l'on ne connaît pas en France et que l'on ne connaît pas sur cette planète.

  • Speaker #0

    Alors, un gène juste pour toi ?

  • Speaker #1

    J'ai un gène juste pour moi, oui, exactement, que les chercheurs ne connaissent pas. Ils m'ont demandé de faire des examens supplémentaires récemment pour qu'ils puissent travailler sur ce gène-là, qui serait responsable de la SLA. C'est un gène que j'ai eu à ma naissance. Mes deux parents ne sont pas concernés. Je suis née avec ce gène-là et je l'ai déclaré à 35 ans. Donc, c'est aussi une forme lente, apparemment. Là, je vais rencontrer un chercheur prochainement.

  • Speaker #0

    Qui t'en dira plus sur ce gène ?

  • Speaker #1

    Oui, qui va m'en dire plus. En tout cas, on va essayer de creuser là-dessus.

  • Speaker #0

    Est-ce que ce gène-là, on connaît son évolution ? Ou peut-être pas ?

  • Speaker #1

    Non, il est inconnu pour le moment. Aucune idée. Non, je ne sais pas. Mais en tout cas, quand...

  • Speaker #0

    Comment ça s'appelle ?

  • Speaker #1

    Je n'ai pas le nom là, je ne me souviens plus.

  • Speaker #0

    Est-ce que ça te permet peut-être d'avoir un espoir plus grand devant l'inconnu que ça te procure ? Ça permet de tout imaginer ?

  • Speaker #1

    Oui, je me souviens que quand mon neurologue me l'avait annoncé, que j'avais ce gène-là, j'étais dans une pièce à l'hôpital de Lyon. Moi, je crois au signe de la vie, de toute façon. Il y a un rayon de lumière, un rayon de soleil qui est venu inonder la pièce à ce moment-là, au moment où il me l'a dit. Il me dit écoutez, voilà, vous avez ce gène-là, mais je crois que je préfère avoir ce gène-là plutôt qu'un gène qu'on connaît et dont l'issue est beaucoup plus sombre, on va dire. Là, il me reste une petite part d'espoir. Je suis sûre, moi je suis sûre qu'on va trouver quelque chose. Je reste positive et j'ai actionné mon cerveau de façon, je l'ai vraiment formaté de façon positive. Parce qu'on est ce qu'on pense, de toute façon, donc j'ai cet espoir-là en tout cas.

  • Speaker #0

    Donc l'idée, c'est que tu engendres quelque chose de positif avec ta pensée, c'est ça ?

  • Speaker #1

    Oui, c'est ça, oui.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce que tu as appris avec cette maladie sur toi ?

  • Speaker #1

    Eh bien, là, pas plus tard que janvier dernier, j'étais en Laponie pour un raid des fidèles. Et j'ai appris à me dépasser physiquement. Je ne pensais pas y arriver parce que le défi était de... Il y avait trois épreuves sur trois matinées. Il y avait 15 kilomètres de trail par un froid à moins 20, moins 25 degrés. Il y avait du ski de fond. J'en ai fait que très peu dans ma vie et je déteste le ski, vraiment, je déteste. Et il y avait une épreuve de fat bike, donc c'est le vélo à gros pneus. On avait un vélo pour deux, Pascal, Bataille et moi-même. Et oui, c'est vrai que la vie nous permet de nous dépasser. Et là, je l'ai vraiment ressenti à ce moment-là. Je ne pensais pas y arriver toute seule. J'y suis arrivée grâce à mon équipe. Là, la SLA me prend vraiment à me sortir de... Je ne dis pas que j'étais dans une zone de confort avant, parce que j'ai toujours aimé sortir de ma zone de confort. Mais là, elle me repousse dans mes retranchements, complètement.

  • Speaker #0

    Alors, quand tu dis retranchements, tu veux dire quoi ?

  • Speaker #1

    Eh bien, par exemple, ce qu'on fait là, toi et moi, en podcast. Je ne pensais pas en être capable. Un jour, en tout cas, je n'aurais jamais pensé parler de moi comme ça. d'exposer ma vie, je suis quelqu'un d'assez réservée, je n'étais pas vraiment sur les réseaux sociaux. Et là, j'ai une page Instagram où j'ai quasiment aujourd'hui 4500 abonnés. C'est incroyable le nombre de personnes qui s'abonnent à ma page. Et je me mets à nu finalement, comme si je me découvrais à des milliers de gens que je ne connais pas, à qui j'explique ma vie. Ce n'était pas évident.

  • Speaker #0

    Et là, aujourd'hui, comment ça fait ?

  • Speaker #1

    Eh bien, aujourd'hui, ça me fait toujours pareil. Je ne m'y habitue pas, mais je suis contente, en fait. Je suis contente qu'on puisse parler de cette maladie. Je suis contente que les gens s'y intéressent. Et c'est ce que je voulais dès le départ, c'était en parler.

  • Speaker #0

    Tu as fait combien de télé en un an à peu près ?

  • Speaker #1

    Je n'ai pas compté. J'ai fait un tout petit peu de radio, radio locale sur Annecy. Il y a eu le magazine de la santé. Il y a eu TV7 Gironde. Là, ce sera TV8 Montblanc cette semaine. Vous êtes formidable également sur France 3 Occitanie.

  • Speaker #0

    Paris Match.

  • Speaker #1

    Oui, il y a eu Paris Match. Paris Match, incroyable. parce que j'étais avec toute mon équipe ce jour-là on était à Paris pour partir en Laponie et ils m'ont accompagnée dans le studio de Paris Match et ils étaient devant moi et c'est un super souvenir et c'est une vidéo qui a aujourd'hui plus de 530 000 vues c'est incroyable de se dire qu'un demi-million de personnes a écouté mon témoignage c'est intimidant mais c'est extra, vraiment je suis ravie

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui te ravit le plus ?

  • Speaker #1

    De faire connaître de la maladie déjà dans un premier temps. Parce qu'on ne peut pas ramener de l'argent, la recherche ne peut pas avancer si les gens ne s'y intéressent pas. Donc déjà, premièrement, faire connaître la maladie. Deuxièmement, forcément, ramener des fonds. Ces fonds, moi je les reverse à la RSLA, à l'Association pour la Recherche de la SLA. Ils vont pour des projets de recherche.

  • Speaker #0

    Alors je me demandais, parce que je t'ai vue évidemment, parce que j'aime bien te suivre. Mais à chaque fois, on te répète la même chose, des choses pas très agréables sur la maladie.

  • Speaker #1

    Oui, c'est sûr que ça mérite une protection parce que je suis quelqu'un d'hypersensible et tout m'atteint finalement. Comme m'a dit mon neurologue, il m'a dit, mademoiselle Vivier, je connais la SLA, je ne connais pas la vôtre. Donc ça, ça m'a fait du bien d'entendre ça. Et je me dis que chacun sa SLA finalement et que je me protège en me disant que mon évolution, elle est lente. que je vais y arriver, que je vais m'en sortir. J'essaye de me protéger comme ça. Ce n'est pas évident pour moi de voir des personnes en fauteuil roulant. Ce n'est pas du tout évident, vraiment. Ce n'est pas facile parce que votre cerveau, il vous dit malgré tout que c'est une maladie que tu as et que c'est peut-être ton issue. Et ça, c'est vraiment quelque chose qui est très dur parfois, par moments. C'est un peu difficile aussi de le dire et de l'avouer, mais je suis honnête.

  • Speaker #0

    Tu dis que c'est difficile, du coup, tu as envie de faire quoi, de t'éloigner ?

  • Speaker #1

    Non, mais par contre, je me mets dans ma petite bulle avant de faire quoi que ce soit. Je me mets dans une petite bulle de protection et ensuite, je vais vers ces gens-là. Parce que j'ai envie de leur apporter mon soutien, parce que mon combat, c'est aussi pour eux que je le mène. Mais ce n'est pas simple, non.

  • Speaker #0

    Parfois, quand je te vois... À la télévision ou même là, quand je te vois en vrai, tu as l'air d'un ange, comme si tu prenais un peu de distance. Est-ce que c'est ça ta bulle ?

  • Speaker #1

    Oui, je pense que c'est mon moyen de protection. C'est ma soupape de sécurité, je pense. Et si je vais bien aujourd'hui, c'est parce que je médite, on va dire ça, et je me crée cette petite bulle de protection. Je prends soin de moi.

  • Speaker #0

    Quand tu as des coups de mousse qui, j'imagine, arrivent des fois, justement, comment tu fais pour les traverser ? Comment tu fais pour les dépasser ?

  • Speaker #1

    Oui, bien sûr que ça arrive. Même si je suis bien entourée, de toute façon, c'est comme tout le monde. De toute façon, il y a des moments où ce n'est pas forcément toujours la fête. Souvent, j'écris mes pensées sur un bout de papier, mes pensées négatives, forcément, et je les brûle. C'est un... C'est un petit rituel que j'ai trouvé. Je me cuisine quelque chose à manger que j'aime bien. Un peu de chocolat noir, ça fait du bien. Parfois même je pleure parce que ça fait du bien aussi. Je vais marcher, je vais prendre l'air. Et je me concentre sur mes projets. Parce que ça c'est vraiment thérapeutique chez moi. Les projets c'est un médicament. Oui je peux être vraiment très en bas par contre. Mais ça ne dure pas.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qui peut te mettre en bas, par exemple ?

  • Speaker #1

    La colère, je pense. La colère peut me mettre dans un mood un petit peu noir quand je n'arrive pas à faire des choses parce que je n'ai qu'une main. Il y a des moments comme ça qui me disent T'as la SLA, n'oublie pas, elle est là. Il y a des moments où c'est compliqué pour boutonner un jean. C'est tout bête, mais c'est énervant. Et c'est ça, plus ça, plus ça, plus je fais tomber une assiette, je fais tomber quelque chose parce que je l'ai mal tenue. Ouais, voilà, il y a des moments comme ça, de toute façon.

  • Speaker #0

    Le jour où tu as eu le diagnostic, est-ce que tu as eu des sentiments comme ça, de colère, d'injustice ?

  • Speaker #1

    Non, je n'ai pas eu la colère tout de suite. Non. J'ai eu la tristesse, mais pas la colère que j'ai eue après. C'est agaçant, en fait. C'est agaçant. Moi qui ai l'habitude de tout faire toute seule et d'aller vite et d'aller comme je veux, etc. Tout est beaucoup plus lent. Quand je donne un horaire à des amis pour un repas ou pour un rendez-vous, il faut que je prévoie maintenant du temps. Ce n'est plus le temps que j'avais avant. Là, il faut doubler.

  • Speaker #0

    Est-ce que, paradoxalement, la lenteur t'apporte des choses ?

  • Speaker #1

    Eh bien oui, elle me dit ralenti. Ça ne sert à rien de speeder comme ça. Elle remet un petit peu l'aiguille au milieu du village, on va dire. Oui, oui, elle me dit ralenti. Prends le temps de vivre.

  • Speaker #0

    Alors c'est quoi le temps de vivre ? Qu'est-ce qu'on fait quand on prend le temps de vivre ?

  • Speaker #1

    C'est admirer le ciel quand on va se balader. Je vais beaucoup me balader au bord du lac d'Annecy. Admirer la beauté du lac avec les petits clapotis de l'eau. Peut-être qu'avant je ne le voyais pas. Je le voyais mais sans le voir peut-être. Prendre le temps de marcher. Prendre le temps d'être en pleine conscience en fait. Marcher, ce n'est pas marcher. C'est dérouler un pied après l'autre. Écouter le bruit du gravier. Quand on marche sur du gravier par exemple. Écouter le bruit de l'air quand on marche dans un champ. Écouter le vent. qui souffle sur les feuilles d'un arbre. C'est toutes des choses comme ça qui sont beaucoup plus importantes maintenant.

  • Speaker #0

    On part de l'esthétique et puis tout à coup, on est dans l'être. Néanmoins, est-ce que le handicap est quelque chose d'acceptable aujourd'hui par rapport à l'image qu'on aimerait avoir ?

  • Speaker #1

    C'est toujours un peu... bizarre. Par exemple, j'ai reçu il y a 15 jours ma carte pour le stationnement handicapé. Alors, je suis très contente parce que je me dis que dans cette maladie, vu la gravité de la chose, si on peut avoir une petite récompense et donc de ne pas chercher trois heures une place sur un parking, franchement, c'est hyper appréciable. Après, quand je l'ai reçu, quand vous avez la... Votre visage en photo sur cette carte, c'est pas simple. Ça m'a fait bizarre, ça m'a choquée même presque. Il a fallu un peu de temps, je la regarde pas de toute façon. Je l'ai mis sur mon pare-brise, je la regarde pas. Mais oui, non, c'est pas... Il y a pas bien le choix, de toute façon, c'est comme ça. Je l'appelle pas le handicap, en tout cas, j'aime pas ce mot.

  • Speaker #0

    Comment tu l'appelles ?

  • Speaker #1

    Je l'appelle une autre façon de vivre. Mon message à faire passer, peut-être que depuis que j'ai la SLA, et peut-être inconsciemment d'exprimer à mon entourage, ou alors à ceux qui ne me connaissent pas, que réveillez-vous, en fait, réveillez-vous. Parce que, ok, moi, ma vie, je ne sais pas trop ce qu'elle va être de par ma maladie, mais quelqu'un comme toi qui va bien, qui est en bonne santé, qui te dit que demain, tu seras encore là, on n'en sait rien. Il faut vivre les choses maintenant, tout de suite, il ne faut pas attendre. Il ne faut pas attendre le bon moment, il ne faut pas attendre... Non, maintenant.

  • Speaker #0

    Dans le prochain épisode, vous retrouverez Lorène Vivier, Le pouvoir de la bulle, partie 2. Restez à l'écoute de notre podcast, La vie est belle, SLA, et abonnez-vous sur votre plateforme préférée.

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