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bienvenue dans le podcast de la terre à l'assiette payer des gens pour les regarder travailler faire les ponts je pense que dans nos métiers ça ne fonctionne plus il tentait que ça a pu fonctionner un jour une émission présentée par christian Regouby
- Christian
Alors aujourd'hui, je reçois Jean-Gabriel Deboeil, restaurateur de conviction, propriétaire de Chez Georges, situé au 1 rue du Meil, dans le deuxième arrondissement, et reconnu par le Collège Culinaire de France depuis 2015. C'est extraordinaire Jean-Gabriel, parce que tu fais partie des pionniers, des premiers membres du Collège Culinaire de France, et tu as une identité qui se confond avec celle de ton restaurant. C'est quoi cette histoire de... de restaurant, la manière dont tu vis le restaurant.
- Jean-Gabriel
Oui, alors tu parles d'identité. Bonjour Christian. Bonjour. Oui, alors, moi j'ai théorisé ça il y a quelques années, c'est la notion d'incarnation. Alors moi j'ai une théorie sur la restauration. C'est que de la sandwicherie aux trois étoiles Michelin, tous les lieux qui sont incarnés avec un patron qui est présent et qui signe en bas de la page sur ses engagements, pour autant, sans avoir l'obsession de plaire à tout. tout le monde, j'ai le sentiment qu'ils s'en sortent un peu mieux que les autres et que, pour employer un terme un peu trivial, ils surperforment. Et ça fonctionne plutôt pas mal, même dans des périodes un petit peu complexes. donc la notion d'incarnation ça reste un métier d'artisanat avec une équipe à animer un collectif au coeur du process et puis une clientèle et donc voilà le concept est assez simple d'autant plus que moi j'avais j'ai tenté l'expérience oui c'est ça qui est intéressant c'est que t'as pas enfin
- Christian
tu as toujours eu cette notion de l'identité, c'est-à-dire des lieux qui représentent, qui ont une âme. Mais au départ, tu en as eu plusieurs.
- Jean-Gabriel
Tout à fait. J'en ai eu donc cinq qui, à chaque fois, avaient effectivement une identité, puisque moi, je n'ai rien créé. Je n'ai pas ce mérite-là. Mais j'ai repris des institutions parce que j'étais fasciné par la dimension institutionnelle, historique des lieux. L'âme qu'ils pouvaient avoir et l'histoire que les lieux pouvaient raconter. Donc voilà, en tout cas j'ai tenté l'expérience d'essayer de gérer et d'administrer plusieurs sites en même temps avec des identités fortes. Et je constatais qu'à chaque fois que je reprenais une affaire, je diluais l'expérience et la façon dont je pouvais moi-même m'impliquer dans l'affaire, suivre mes équipes, sourcer les produits et être capable quotidiennement de satisfaire mes clients. Donc rétrospectivement c'est assez... c'est amusant. Quand je suis passé de 5 à 1 de nouveau juste après le Covid, j'ai constaté que finalement, j'exerçais mon métier avec plénitude, avec un seul établissement. Et je te dis, à chaque fois que j'en prenais un, je m'apercevais que finalement, rétrospectivement, je faisais moins bien.
- Christian
C'est extraordinaire parce qu'effectivement, tu incarnes, alors pour le coup, vraiment profondément, cette notion d'artisanat, c'est-à-dire à la fois de l'esprit d'un lieu, ça a toujours été... quand même ton fil conducteur, mais avec l'esprit de ceux qui s'y trouvent, à commencer par celui ou celle qui anime ce lieu. Donc l'esprit de ceux qui s'y trouvent, il y a une sorte en t'écoutant, j'ai l'impression qu'il y a une sorte de capillarité entre ces lieux qui ont un esprit extrêmement fort, un supplément d'âme si on peut dire, et la manière dont tu gères, on va en parler tout à l'heure parce que c'est complexe, l'équipe, et la relation avec les clients et en amont bien évidemment ceux qui amènent les produits. Donc c'est une totalité qui est assez étonnante. Donc cette identité je crois qu'elle est vraiment intéressante. En regardant ce qui avait été dit sur tes restaurants, c'est assez intéressant parce qu'il y a une transformation me semble-t-il qui se fait quand on rentre dans ces lieux. Et je prends cet exemple célèbre que j'avais lu te concernant. Il disait que, c'est la presse qui disait, on y croise quelquefois Steven Spielberg qui a troqué sa casquette de baseball pour une casquette de chasseur. Parce que le lieu lui permet de se fondre dans son décor. J'ai trouvé ça magnifique. Et c'est ton esprit, c'est ce que tu développes toujours.
- Jean-Gabriel
Oui, alors sur la notion d'équipe, moi j'enfonce des portes ouvertes. Mais bon, effectivement, métier d'artisanat... Je vais dire la restauration, en tout cas moi c'est la grande leçon aujourd'hui à 50 ans, c'est la notion d'un collectif, un patron de restaurant, c'est un petit peu un coach, et à l'échelle d'autres secteurs d'activité. On est un petit peu sur les mêmes registres. Alors, c'est vrai que la notion d'identité, moi, j'ai repris des lieux historiques. Alors, sur l'exemple de Spielberg ou d'autres, c'est vrai que quand on a notamment une clientèle étrangère qui vient à Paris, ils veulent vivre. aujourd'hui, ce qui est à la mode, le terme d'expérience client. Et donc, ils veulent vivre une expérience client où ils ont le sentiment vraiment d'être dans un Paris, un Paris authentique, pas un Paris fake, avec une histoire, avec un lieu où les murs parlent. Alors, peut-être que Steven Spielberg ou d'autres, en tout cas, quand ils viennent chez Georges Rudumay ou d'autres, il y a des très belles institutions à Paris, heureusement, ils ont le sentiment de vivre ça. Et je crois que ça les amuse d'aller dans des restaurants qu'ils n'ont pas chez eux par ailleurs.
- Christian
On va aller sur notamment comment... tu fais vivre ça avec ton équipe justement, il y a une démarche aussi particulière, mais avant on va lancer notre Toc toc,
- Jean-Gabriel
qui est là ? Toc toc, qui est là ?
- Christian
Alors Jean-Gabriel, si t'étais un vignoble, tu serais quoi ?
- Jean-Gabriel
Bah mon vignoble.
- Christian
Ah, ton vignoble !
- Jean-Gabriel
Oui, j'ai tenté l'expérience aussi. Donc il y a la même démarche d'incarnation. J'ai un petit vignoble à Chénasse. Donc en face de Moulin-en-Vent, qui est le syncrétisme heureux entre l'extrême sud de la Bourgogne, là où le Gamay, quand il est bien fait, pinote, et puis la vallée du Rhône septentrional, le Rhône-Nord, avec cette petite caractéristique épicée.
- Christian
Si tu étais un accessoire de cuisine ?
- Jean-Gabriel
Un tamis.
- Christian
Ah, c'est très intéressant et très symbolique. Si tu étais une région ?
- Jean-Gabriel
Le Jura.
- Christian
Et si tu étais un autre cuisinier ? Ou un cuisinier, puisque...
- Jean-Gabriel
Vivant ?
- Christian
Oui, vivant ou mort, peu importe. Qui t'inspire ou qui...
- Jean-Gabriel
Les cuisiniers qui sont de très haut niveau, qui incarnent cet esprit français, qui sont présents quotidiennement dans leur cuisine, je pense à Gagné ou à Savoie.
- Christian
Allons un peu plus loin maintenant, effectivement. Il faudra qu'on parle tout à l'heure de... Ça me vient à l'esprit de quelque chose, quand on parle d'incarnation, et je pense que tu portes ça en toi, même si ça semble... à côté de la cuisine, c'est l'art. Je voudrais que tu m'en parles tout à l'heure parce que je pense qu'il y a beaucoup de correspondances par rapport à ça. Aujourd'hui, artisan, militant de la qualité, avec tout ce que tu portes, la recherche authentique, le recentrage sur un lieu que tu habites d'une certaine façon, qu'est-ce que ça veut dire aujourd'hui et quelle est la difficulté qu'on peut rencontrer et les satisfactions au niveau d'une équipe ? Qu'est-ce qu'il faut faire pour... partager ça ?
- Jean-Gabriel
On est dans des bouleversements sociaux et managériaux, donc il faut finalement des choses assez simples. Moi, ce que je constate, c'est que un propriétaire de restaurant doit faire valoir des valeurs à mon sens d'exemplarité et motricité. On arrive à un virage où la financiarisation de nos métiers va commencer à mon sens. à se poser des vraies questions sur l'efficience et la capacité de pouvoir faire tourner à long terme des restaurants qui tiennent la route. Je pense que les patrons doivent faire valoir ces valeurs d'exemplarité. Donc être au travail, je pense qu'aujourd'hui avec toute cette jeune génération, payer des gens pour les regarder travailler et faire les comptes, je pense que dans nos métiers ça ne fonctionne plus. Si tant est que ça a pu fonctionner un jour, l'exemplarité, la motricité, plus que jamais, vous êtes légitime dans un restaurant si vous travaillez avec votre équipe. On fait des erreurs tous les jours et tout, mais quand on est tous dans le même bain, à être aussi capable d'avoir une vision à l'échelle de sa petite affaire et développer des objectifs communs, voilà qui est important. Après, il y a aussi le... L'idée qu'on puisse trouver, lorsqu'on fait le casting d'un restaurant, j'aime bien prendre cette expression, qu'il puisse ensuite y avoir des affinités électives, et qu'on ait le sentiment de vivre la même expérience et de vouloir partager la même chose.
- Christian
Est-ce que tu as senti une différence entre là où tu étais quelque part, même si tu étais habité par cette authenticité, mais tu étais quand même un homme d'affaires avec plusieurs établissements, et maintenant tu en as un, qu'est-ce que ça veut dire sur le... plan de la réflexion et du modèle économique et du développement économique ?
- Jean-Gabriel
Alors moi je me suis complètement planté, c'est à dire que j'ai, si tu veux dans la vie d'un homme on avance, on avance et puis sur le tard on finit, j'espère pas trop tard, par comprendre qui on est, comment on fonctionne. Donc... Moi j'ai peut-être cru que... ou j'ai voulu me prouver je ne sais quoi, mais force est de constater que finalement je n'ai jamais autant été heureux que quand j'étais un marchand de soupe à exploiter mon petit restaurant, tout ça. Finalement j'étais pas très très à l'aise dans ce rôle, entre guillemets, d'homme d'affaires, toute proportion gardée. Donc moi j'étais pas très à l'aise parce que c'est un autre métier. J'ai un... Un confrère à Paris, c'est l'exemple qui est intéressant, je ne vais pas le citer, mais qui me disait aujourd'hui, lui il fait des restaurants où parfois, dans ces restaurants, il n'y a même plus de service. Plus de service. C'est-à-dire que 80% de l'activité du restaurant, c'est de l'événementiel. D'accord, donc on reçoit des gens midi et soir, des privatisations, moi je refuse, tous les groupes, toutes les privatisations, je laisse la priorité à la clientèle individuelle. Je veux que ce soit cette expérience qui soit vécue. Donc c'est absolument fascinant, c'est-à-dire qu'on développe des restaurants. ont aujourd'hui, par exemple sur les centrales de réservation, moi c'est quelque chose qui me heurte mais je vais parler comme un vieux réac, un vieux con, mais moi j'apprécie encore qu'il puisse y avoir ce lien humain, qu'il y ait quelqu'un au téléphone, même si on est injoignable, que tout soit pas digitalisé, voilà, bon c'est des... voilà, et en tout cas c'est en phase avec la notion d'artisanat.
- Christian
C'est drôle parce que au collège qui vient de France, tu le dis avec recul et modestie, je suis peut-être réac et vieux con, mais pas du tout, c'est qu'en fin de compte, On le constate profondément dans le travail du Collège Culinaire de France. C'est l'avenir. Ce que tu dis, ce n'est pas le passé, ce n'est pas une réaction, c'est l'avenir. C'est-à-dire, c'est l'avenir qui crée de la valeur humaine. Là où, je le disais l'autre fois, en fait, où on est de plus en plus connecté, mais de moins en moins relié. Et en fait, il y a une épidémie de solitude. Donc, la liberté est à ce prix. La liberté est à ce prix parce que plus on facilite la vie de chacun et chacune, plus on est esclave. Donc, on le voit bien ça et on le constate. très concrètement au sein du collège. En revanche, juste une petite remarque sur ta vision des choses sur la proximité et pas d'événementiel. Je crois que là, tu dis pas d'ailleurs de façon négative, mais il y a des possibilités tous azimuts. Ici, nous sommes au patio opéra, où la conception même de la personne qui sera interviewée dans un de nos podcasts est de concevoir l'événementiel. Parce qu'elle vient de l'événementiel. Elle vient du cinéma, etc. Sauf que tu as dit un mot qui me semble très important, c'est le mot de métier. Quel est ton métier ? Et l'important, c'est au beau sens du terme, au sens artisanal du terme. On n'a pas une profession, on a un métier. Et toi, tu as bien défini ton métier qui te correspond et correspond à ton identité.
- Jean-Gabriel
C'est ce que j'allais te dire. Ce sont des métiers différents. Donc ça dépend quel métier on veut faire et qu'est-ce qu'on exerce comme métier. Oui, on connaît bien ces sujets qu'on a abordés plusieurs fois.
- Christian
Oui, passionnant d'ailleurs.
- Jean-Gabriel
Mais tu vois, il y a une chose qui est assez amusante. Moi, je travaille encore avec un cahier de réservation, avec une gomme et un crayon. Et donc, c'est un espèce de barnum absolu, puisqu'on a la chance d'être complet tous les jours, midi et soir. Et donc, si tu veux, il y a des codes couleurs, tout ça. Les clients qui rentrent dans le restaurant aujourd'hui, à l'ère d'Instagram, les prennent en photo et me regardent comme... Comme si... C'est Hibernatus, si tu veux. Le mec qui s'est réveillé, qui était au 19e siècle, et qui s'est réveillé dans un cube de glace. Et ils le prennent en fauteuil, ils disent Mais il y a encore des gens qui travaillent comme ça
- Christian
Et c'est génial, parce que ça recentre sur l'humain, sur ce qu'est notre valeur ajoutée.
- Jean-Gabriel
La notion du lien, oui.
- Christian
On va lancer fromage ou dessert ?
- Jean-Gabriel
C'est fromage ou dessert ?
- Christian
Alors justement, est-ce que tu es plutôt fromage ou dessert ?
- Jean-Gabriel
Fromage.
- Christian
Fromage. Est-ce que tu es plutôt ville ou campagne ?
- Jean-Gabriel
J'adore la... Je ne comprends pas le concept de vouloir chercher la campagne à la ville et la ville à la campagne. Donc à Paris... je suis très urbain, j'aime aller boire le café, acheter les journaux cette promiscuité et tout faire à pied et la campagne, j'aime la campagne quand elle est vraiment campagne.
- Christian
Travail ou vacances ?
- Jean-Gabriel
Alors moi j'ai un... problème avec les vacances. Je crois qu'on aura l'éternité pour se reposer. Je me fais chier en vacances très très vite. Et voilà, je crois que ce qui anime la vie d'un homme ou d'une femme, c'est les projets et la croyance. Même ne pas croire est un acte de croyance en soi. Et voilà, les vacances, non.
- Christian
Mais tu as raison, d'ailleurs, c'est le mot qu'on met derrière. Vacances, ça veut dire justement être en vacances de quoi que ce soit. Et personnellement, je te rejoins totalement puisque j'ai dit je ne travaille jamais en fait. Il y a un tel plaisir, une telle passion dans ce qu'on fait, qu'on n'a pas l'impression d'être en travail.
- Jean-Gabriel
Oui, alors ce que tu dis est très juste, étymologiquement c'est être vacant. Donc moi finalement j'arrive à être en vacances à Paris sur des séquences très très courtes et la punition tu me mets sur une plage, sur une île déserte. C'est une punition absolue.
- Christian
Temps court ou temps long ?
- Jean-Gabriel
Temps long, bien sûr.
- Christian
Compétition ou coopération ?
- Jean-Gabriel
Je ne suis absolument pas compète, donc coopération.
- Christian
Entrepreneur ou salarié ?
- Jean-Gabriel
C'est une question fondamentale, parce que je crois qu'on ne va plus pouvoir les mettre en opposition longtemps, mais évidemment dans mon cas, entrepreneuriat.
- Christian
Mais je crois qu'effectivement, même les salariés vont devenir au moins entrepreneurs d'eux-mêmes. Au moins.
- Jean-Gabriel
Oui, oui.
- Christian
Merci. Merci, alors... Alors, dernier volet de notre échange passionnant, c'est que tout ça dit quoi sur une certaine vision du monde, une certaine vision de la société, une certaine vision de toi-même ? Et c'est là où c'est intéressant, c'est de reconnecter aussi avec un domaine qui paraît très incongru dans la manière dont tu te définis, c'est l'art. Mais qui, je pense, ne l'est pas tant que ça, incongru par rapport à ça. Tu peux nous en dire deux mots ?
- Jean-Gabriel
Oui, alors c'est une autre activité que j'ai. Je suis passionné d'histoire de l'art. Aujourd'hui, mes lectures se concentrent exclusivement là-dessus. Je pense que si on a le... C'est tout mon temps libre, c'est mes nuits. C'est vrai que je développe une activité, je gère une collection, tout ça, c'est une passion. J'ai une passion enfant pour la bibliophilie, j'ai perdu mes parents jeunes. Et le lien que j'ai pu préserver au départ de mon père, c'est sa bibliothèque. Et également la bibliothèque de mon grand-père. Et j'ai continué, j'ai acheté des livres, et les livres m'ont amené à la photographie, au dessin, à la gravure. Aujourd'hui je fais tableau, dessin, sculpture. Et c'est une activité à part entière, mais tu as dû regarder un peu à gauche à droite. Je ne sais pas trop quoi dire, parce que là on est dans le domaine de l'émotion, ce qui est important est d'avoir le sentiment aussi de résister. Aujourd'hui on fait cette émission, c'est un jour particulier, donc on se raccroche finalement à des choses qui nous animent, et qui sont porteuses d'espoir.
- Christian
Moi le lien que j'ai vu c'est le domaine sensible, l'intangible. et où un restaurant c'est quand même quelque chose de très concret à plein de niveaux mais il y a énormément d'intangibles et tu l'as dit magnifiquement et je pense qu'il y a vraiment cette correspondance en tout cas cette consonance si on peut dire entre les deux entre les deux univers et ça explique aussi la façon dont tu abordes le restaurant. On va terminer sur un dernier élément qu'on appelle le pot de moutarde
- Jean-Gabriel
La moutarde me montonnait.
- Christian
Là, c'est de te demander, il y a forcément dans tout ce qui nous entoure, dans le métier, mais peut-être même au-delà, la moutarde qui te montonnait de temps en temps, ton coup de gueule, ça serait sur quoi ?
- Jean-Gabriel
Il y en a beaucoup.
- Christian
Oui, je sais, c'est pour ça que je te connais sans.
- Jean-Gabriel
Il y en a beaucoup, mais... Je pense que si ce podcast s'adresse à des gens de métier, ce ne serait pas un coup de gueule, mais ce serait une réaction par rapport au vrai défi qui va être le nôtre. Moi, ça fait 30 ans que je fais ce métier. Le vrai défi, c'est les ressources humaines, c'est les équipes, c'est les femmes et les hommes qui font ce métier et sans qui on ne peut rien faire.
- Christian
On ne peut plus les aborder de la même manière.
- Jean-Gabriel
Voilà, donc aujourd'hui, les paradigmes, enfin les choses ont changé de façon absolument incroyable. Je ne sais pas. pas un coup de gueule mais c'est un défi et il va falloir qu'on accélère, qu'on comprenne mieux la façon dont les mentalités ont évolué, dans la façon dont les choses se passent parce que sinon cette financiarisation va lever des millions pour ouvrir 6 ou 7 restaurants par jour à Paris. Mais avec qui ? Avec qui pour les faire vivre, avec qui pour faire un travail de qualité, un accueil de qualité et partager des moments de coexistence au sein des équipes, des moments valorisants. Donc ça c'est un vrai sujet et il y a encore des résistances.
- Christian
importante parce qu'on n'a pas encore tout à fait à mon sens compris ce qui est en train de se passer on est au coeur de l'enjeu de l'enjeu de nos sociétés puis ce 7,7 boulimie quantitative et entre guillemets innovante avec cette dictature de l'immédiateté elle détruit dans la durée alors que la démarche humaine dont on a parlé là pendant cet échange, elle construit durablement. Simplement, c'est en ça que je pense que c'est un avenir et c'est en ça que ça nous réunit au sein du Collège Culinaire de France à travers toute la réflexion et les actions que nous menons ensemble. Écoute, je te remercie d'avoir pris le temps de passer ce moment entre nous. Je crois que ça va intéresser beaucoup de nos auditeurs dans la profession, mais sans doute en dehors de la profession aussi. Je crois que ça mène à réflexion. on va aller simplement sur un dernier élément, si tu pouvais avoir pour nos auditeurs une adresse de restaurant qui te paraît indépendamment évidemment de chez Georges rue du Maïl mais qui toi un restaurant que t'aimes bien dans tes goûts et puis peut-être un produit qui t'interpelle aussi ou un producteur qui t'interpelle
- Jean-Gabriel
Pas très loin du 4 septembre, il y a un restaurant, alors c'est un restaurant, je crois qu'il y a une étoile, oui il y en a deux, je dirais, j'aime bien, je ne vais pas rester dans le traditionnel français, parce que je trouve qu'il y a une ouverture, voilà. Donc il y a un restaurant japonais qui s'appelle Yoshinaga, là un maître qui travaille... et les sushis, je trouve qu'il y a une conception du métier, de la tradition qui est absolument phénoménale. J'ai eu la chance de pouvoir y aller et je crois pouvoir dire que je n'avais jamais mangé de sushi de ma vie avant cette expérience. C'est une expérience onéreuse mais voilà, qui montre la spécificité de la notion de métier. Donc ça c'est fascinant. Il y en a un autre que je trouve fabuleux, c'est un jeune chef étoilé qui n'est pas très loin de chez Georges aussi qui s'appelle Omar Diab. A mon sens c'est un des chefs les plus les plus talentueux de sa génération.
- Christian
Merci. Et un produit qui te tient à l'esprit ?
- Jean-Gabriel
J'ai une passion pour le pâté en croûte.
- Christian
Merci Jean-Gabriel et à très vite bien sûr, puisqu'on se retrouve régulièrement au sein du collège et aussi au sein de Manger Citoyen où tu as été un des premiers promoteurs pour justement apporter et aider à ce que manger veut dire. Comme dit Michel Guérard, il faudrait... apprendre à manger comme on apprend à lire à l'école.
- Jean-Gabriel
Oui, mais moi je me souviens de la notion d'engagement à l'époque, j'avais comme parrain Alain Dutournier, j'aurais pu le citer comme chef, personnage extraordinaire. C'est la notion de rentrer, je suis rentré dans le Collège Culinaire de France Manger Citoyen pour rentrer en résistance. Et aussi pour acter fondamentalement une démarche politique, citoyenne. C'est ça qui est important, c'est pas simplement un collectif de restaurateurs. Il y a des choses à défendre et moi, c'est pour ça qu'en 2015, j'ai choisi cette voie-là.
- Christian
Merci à toi et merci pour tout ce que tu fais.
- Jean-Gabriel
Merci à toi, Christian. Vous venez de déguster un épisode de La Terre à la Tinte, le podcast qui vous donne envie de bien manger. Nous espérons que vous avez passé un agréable moment en notre compagnie. Si ce podcast vous a régalé, soutenez-nous en lui donnant un maximum d'étoiles, comme un grand chef, et en vous abonnant. Vous avez envie d'en savoir plus sur les actions du Collège Culinaire de France et sur le mouvement Manger Citoyen ? Suivez-nous sur les réseaux sociaux et sur notre site internet. A très vite pour un prochain épisode. Ah oui, et évidemment, l'édition, elle est pour nous.