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Un café au comptoir - masterclass art, littérature et création

Giulia Foïs au café Wanted Paris

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48min |21/07/2024
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Giulia Foïs au café Wanted Paris

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Description

J'ai eu la chance d'interviewer la journaliste féministe Giulia Foïs au café Wanted Paris 46Bis Rue de Meaux, 75019 Paris


Mon invitée du jour est journaliste, productrice de radio, chroniqueuse et… féministe.

 

Et en plus ce  n'est même pas un gros mot.

 

Moi je suis super content de l’accueillir parce que sa voix a rythmé un bon nombre  de mes réveils quand elle officiait dans les matinales de France Inter, une époque où je ne connaissais pas vraiment le mot que j'ai cité un peu plus haut , celui de… féministe.

 

Vous trouvez que j’insiste ? Attendez un peu pour juger ...Ainsi mon invitée a tenu pendant quelques années une chronique dans  le magazine Marie Claire, une chronique appelée… FÉMINISTE TA MÈRE.

 

Si vous pensez qu’on parle trop du féminisme, peut-être allez  vous devoir changer de podcast, parce que le sujet le plus souvent traité par la personne que je reçois est celui du .. féminisme 

 

Dans Allo Giulia pour le magazine ELLE, cette spécialiste des questions de genre s’est attaquée à celles que se sont posées  les femmes de la génération Me Too et pas seulement les femmes  d’ailleurs mais toujours sous un angle… féministe.

 

Parfois quand elle se présente, elle se décrit comme vivante, survivante et supervivante. Pourquoi ?  On trouvera peut être la réponse dans les  deux livres dans lesquels elle a raconté ce que  c'est que de vivre le patricarcat dans sa propre chair, en deux mots, et sans tergiverser, le viol. 



Féministe donc, solidaire du mouvement metoo elle se lève, engage le combat, celui d’une lutte nécessaire pour une société plus juste et pour cela elle prend la parole. D’ailleurs selon elle « la parole est la seule arme qu’elle ait ». Et croyez-moi, elle sait s'en servir et viser juste. Du reste Vous l'avouerai je  , j’ai même un peu peur de l’interviewer tant son expérience en la matière est impressionnante mais surtout tant son engagement féministe me fait sentir merdeux. Oui merdeux comme quelqu’un qui a un jour merdé, par  un geste, une parole, une réflexion ou une blague sexiste qu'il aurait adressé à une personne du genre féminin sans même en percevoir la dimension problématique, ce qui est presque plus grave. Heureusement, dans son dernier ouvrage ce que le féminisme m’a fait »  qui vient compléter le précédent intitulé « je suis une sur deux » - j’y ai lu que les hommes ont leur place dans les combats pour une société égalitaire. De plus, en interview elle dit que les mecs ont le devoir de  s’engager davantage… pour eux-mêmes !

 

Alors je vais essayer d’être à la hauteur de l’être humain que je veux être et partir à la rencontre de celle qui se présente parfois avec humour comme « Journaliste – Société, intimité, féminité, virilité, liberté, égalité, sexualité, et plein d'autres trucs en ité. Sauf Nativité »

 

bonne écoute !


Emission présenté par Alexis Himeros

https://instagram.com/alexishimeros


Avec Giulia Foïs

https://www.instagram.com/giuliafois75



merci au Wanted Paris
https://www.facebook.com/WantedParisHalleSecretan/
https://www.instagram.com/wanted_paris/



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, je suis Alexis Iméros et vous écoutez Un Café au Comptoir.

  • Speaker #1

    Un café au comptoir. Un café au comptoir.

  • Speaker #0

    Mon invité du jour est journaliste, productrice de radio, chroniqueuse et féministe. Et en plus... Ce n'est même pas un gros mot. Moi, je suis super content de l'accueillir parce que sa voix a rythmé un bon nombre de mes réveils quand elle officiait dans les matinales de France Inter, une époque où je ne connaissais pas vraiment le mot que j'ai cité un peu plus haut, celui de féministe. Vous trouvez que j'insiste ? Attendez pour juger. Ainsi, mon invité a tenu pendant quelques années une chronique dans le magazine Marie-Claire, une chronique appelée Féministe, ta mère. Si vous pensez qu'on parle trop du féminisme, peut-être que vous allez devoir changer de podcast, parce que le sujet le plus souvent traité par la personne que je reçois est celui du... féminisme. Dans Allô Julia, pour le magazine Elle, cette spécialiste des questions de genre s'est attaquée à celles que se sont posées les femmes de la génération MeToo, et pas seulement les femmes d'ailleurs, mais toujours sous un angle féministe. Parfois quand elle se présente, elle se décrit comme vivante, survivante et supervivante. Pourquoi ? On trouvera peut-être la réponse dans les deux livres dans lesquels elle a raconté ce que c'est de vivre le patriarcat dans sa propre chair, en deux mots et sans tergiverser le viol. Féministe donc, solidaire du mouvement MeToo, elle se lève, engage le combat, celui d'une lutte nécessaire pour une société plus juste, et pour cela elle prend la parole. D'ailleurs, selon elle, la parole est la seule arme qu'elle ait, et croyez-moi, elle sait s'en servir et viser juste. Du reste, vous l'avouerez, j'ai même un peu peur de l'interviewer, tant son expérience en la matière est impressionnante, mais surtout tant son engagement féministe me fait sentir merdeux. Oui. Merdeux, comme quelqu'un qui a un jour merdé par un geste, une parole, une réflexion ou une blague sexiste qu'il aurait adressé à une personne du genre féminin, sans même en percevoir la dimension problématique, ce qui est presque plus grave. Heureusement, dans son dernier ouvrage, Ce que le féminisme m'a fait qui vient compléter le précédent intitulé Je suis une sur deux j'y ai lu que les hommes ont leur place dans les combats pour une société égalitaire. Et de plus, en interview, elle dit que les mecs ont le devoir de s'engager davantage pour eux-mêmes. Alors, je vais tenter d'être... À la hauteur de l'être humain que je veux être et partir à la rencontre de celles qui se présentent parfois avec humour. Comme journaliste, société, intimité, féminité, virilité, liberté, égalité, sexualité, plein de trucs en IT sauf nativité. Nous sommes donc à Paris dans le 19e arrondissement au café Wanted. Et je vais prendre avec elle un café au comptoir. Bonjour Julia Foyce.

  • Speaker #1

    Mais bonjour !

  • Speaker #0

    À la page 111 de votre livre, il est écrit à chaque proposition d'interview, je dis oui. Je n'ai pas toujours envie, mais je le fais. dont acte, parce que vous êtes ici. Qu'est-ce qui fait qu'en 2024, à l'heure où le mot féministe est dans toutes les conversations, est dans toute la société, omniprésent dans la communication, dans la publicité, on peut vraiment penser, malgré tout, que la parole féministe, elle est toujours en sursis.

  • Speaker #1

    Moi, c'est un mot que j'adore. J'entendais votre portrait, je l'ai trouvé... Très chouette d'ailleurs et je vous en remercie. Merci à vous. Quand je dis que je dis toujours oui aux interviews, mais que j'y vais parfois à reculons, c'est quand je sais que la parole que je vais devoir prendre va être sur un sujet qui ne correspond pas au meilleur chapitre de mon histoire, qui est ce viol. Moi, j'aurais envie évidemment de parler d'autre chose. J'aurais envie de parler de mes fils que j'adore. J'aurais envie de parler de la cuisson des pâtes que je maîtrise à la perfection. Et en même temps... Et évidemment qu'on m'interroge aussi là-dessus. Et évidemment que c'est nécessaire parce que sur le sujet, on a une seule arme, en fait, c'est la parole. Donc j'y vais. J'y vais, mais à chaque fois, je me dis, putain, le jour où on m'interrogera sur autre chose, c'est qu'on aura gagné. Ce jour-là n'est pas encore arrivé parce qu'effectivement, les droits des femmes sont loin d'être acquis. On le voit, on voit ce qui se passe sur l'IVG et sur la contraception aux Etats-Unis. On a vu ce qui s'est passé en Pologne, de tous les côtés. s'est attaquée. C'est de Beauvoir qui disait qu'il fallait rester vigilante une vie durant et elle a raison. C'est-à-dire qu'on fait face, on a... Allez, si on prend le combat des suffragettes, on a un siècle et demi de féminisme face à des millénaires de patriarcat. On est entravés, empêchés, de tous les côtés écrasés par une charge mentale, émotionnelle, domestique, affective qui fait que le rapport de force est toujours aussi déséquilibré et pourtant on va au combat. Pourtant on va au front parce qu'on est convaincus et je suis convaincue que le projet que l'on... porte et celui d'une société qui sera meilleure pour toutes et pour tous. Donc on y va, mais en ayant conscience, c'est drôle ce combat parce qu'on y met toutes nos forces, j'y mets toutes les miennes, en sachant très bien que je ne serai peut-être pas de ce monde, le jour où on aura gagné. Je sais qu'on gagnera, je sais que le sens de l'histoire est celui-là, mais je ne sais même pas si je serai là pour le voir. Et en attendant, je sais que, comme toutes les féministes, j'aurais pris des sauts de merde sur la gueule. Donc, pour y aller, dans ce combat, il faut avoir un moteur archi-puissant.

  • Speaker #0

    J'ai lu également dans votre livre que dans 286 ans, on aura atteint l'égalité homme-femme, source de l'ONU. C'est un petit bout de temps.

  • Speaker #1

    Je vous dis, je ne sais même pas si je serai là pour le voir. Quand je dis que le sens de l'histoire est le nôtre, en fait, il faut se représenter les choses d'un point de vue macro. Si vous partez de la Révolution française, où on a promis l'abolition des privilèges, l'instauration d'une démocratie, comment dire, ce combat a porté ses fruits pour la moitié de la population. Et puis un jour, on a écrit suffrage universel, parce que ça y est, les citoyens avaient le droit de voter, mais je dis bien les citoyens, pas les citoyennes, parce qu'en fait, ça s'est appelé suffrage universel masculin. Donc cette énorme mascarade a fonctionné pendant trois siècles. où on a pu se raconter que l'universel, c'était le masculin. Le féminisme, c'est quoi ? C'est la deuxième moitié de cette révolution, c'est le parachèvement de cette révolution, et c'est l'abolition de tous les privilèges. Et donc aussi des privilèges masculins, pour qu'enfin on jouisse d'une égalité parfaite en droit. Je ne parle pas d'une indifférenciation des genres, je parle d'une égalité en droit, forcée de constater qu'on n'y est pas, malheureusement pas du tout. Est-ce que... Est-ce que l'ampleur du chantier me désespère parfois, mais pas souvent ? Est-ce que la perspective de ne pas être là le jour où on aura gagné me décourage ? Non. Non, je crois que je ne serais pas moi aujourd'hui si je n'étais pas féministe et si je n'étais pas dans ce combat-là. C'est un combat qui vous donne une colonne vertébrale et qui donne du sens aux choses que vous faites, donc c'est quand même pas mal.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'on dit aux hommes qui ont un sentiment ? de déclassement. Je souris parce que j'ai vu votre grimace et qu'on fait une émission en audio qui ont ce sentiment de déclassement et qui s'engagent dans des luttes, à mon sens, totalement incompréhensibles. Je pense aux masculinistes.

  • Speaker #1

    Je trouve qu'ils ont le mérite de montrer sans aucune contestation possible la raison pour laquelle on doit se bagarrer, la raison pour laquelle il faut être féministe. Donc ils ont au moins ce mérite-là, c'est qu'ils sortent du bois et qu'on voit très bien qui on a en face. Qu'ils maximalisent une résistance que l'on trouve en revanche partout, à des degrés moindres, heureusement, mais partout. C'est Virginia Woolf qui disait que la résistance au féminisme est au moins aussi intéressante à étudier que le féminisme lui-même. Quand vous voyez les réactions outrées, la colère, déclenchée par des déclarations de Sandrine Rousseau sur la côte de bœuf. On se parle d'une côte de bœuf.

  • Speaker #0

    Le barbecue,

  • Speaker #1

    c'est ça ? Ça les a rendus fous. Donc là, on se dit, ok, en fait, on a touché un nerf. Il y a quelque chose qui s'est passé là. Et effectivement, sur la question du féminisme, c'est vraiment marrant de constater à quel point, en fait, on touche à des choses très archaïques. On appuie sur des nerfs et donc ça gueule de façon totale. irrationnel c'est à dire que ça continue de se raconter que par exemple on voudrait grand remplacer les hommes que par exemple ce qu'on veut c'est une pluie de couilles sur la planète terre que on est les hommes et que c'est pour ça qu'on se bagarre en fait si vous regardez le plateau télé les débats sur cette question là l'hystérie elle est de quel côté dire que les meufs moi je les trouve toujours extrêmement calme posé elle apporte des chiffres elle apporte des faits et en fait et en face on a des mecs qui beuglent et qui éructe Parce qu'on est en train de leur retirer leurs privilèges, ça les rend fous. Mais ça les rend fous, c'est-à-dire qu'ils ont quitté toute rationalité. Je pense à Emmanuel Todd, je pense à Finkelkraut, je pense à tous ces mecs-là qui sont censés être des sommités intellectuelles et qui perdent pied, quoi. C'est hallucinant. Et en fait, ce n'est plus les intellos qui parlent dans ces cas-là, c'est les petits garçons. Tout à coup, c'est...

  • Speaker #0

    C'est une régression de leur part. Mais peut-être que ce n'est pas ça le plus grave, parce que... Tout le respect que je peux avoir pour des personnes comme Emmanuel Todd ou comme Viggold Crote, pour l'ensemble de ce qu'ils ont pu faire, malgré tout, je pense, leur œuvre littéraire, malgré tout, j'ai l'impression qu'ils sont insignifiants. En fait, leur parole est plutôt insignifiante. Mais le réel danger, c'est plutôt des générations plus jeunes qui, eux, ont accès à des médias comme TikTok, comme Instagram, et qui maîtrisent mieux tous ces relais-là.

  • Speaker #1

    Oui, alors moi, je pense souvent, il y a eu un... un attentat masculiniste en préparation, je crois, à Bordeaux, qui a été déjoué. Moi, je pense que ça finira par arriver. Et que le pire, c'est qu'on dira que c'est de la faute des féministes, parce qu'elles ont déclenché la colère masculine. Et comme d'habitude, on ne pointera jamais celui qui a tué, mais on responsabilisera les femmes. Ce sera à elles de se justifier. Vous avez gueulé, vous les avez rendus fous, ils ont pris peur, ils se sont sentis déclassés, comme vous dites, et donc ils ont tué. Ça arrivera. C'est déjà arrivé dans l'histoire. Ça arrivera de nouveau. Ça, c'est quelque chose auquel je pense souvent. Je me dis, un jour, il y en a un qui va passer à l'acte. Il y a une violence contre les femmes qui est hallucinante. Dans ce pays et puis dans le monde entier en fait, c'est-à-dire que le patriarcat s'est quand même construit sur l'écrasement de la moitié de l'humanité. Les religions se sont fait le relais, on ne sait pas qui a alimenté qui, les hommes ou la religion, mais l'un dans l'autre ils se sont serrés la main très fort pour nous écraser bien comme il faut. Et s'ils nous ont écrasé bien comme il faut, je crois que c'est parce qu'ils ont une trouille bleue. de ce qu'on peut faire en fait, de ce qu'on peut être. Et puis parce que l'être humain se raconte qu'il n'est jamais plus lui-même que quand il écrase l'autre, c'est-à-dire qu'il ne pourrait coexister, il faudrait qu'il soit au-dessus. Et ça, ça dure depuis la nuit des temps. Donc moi ça me fait doucement rigoler, ou ça me met dans une colère noire suivant les jours, quand j'entends que les féministes font la guerre aux hommes. On se parle de quoi en fait ? On se parle de quelle guerre ? C'est-à-dire qui ? meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint, qui subit une tentative de viol toutes les sept minutes, qui est cogné, harcelé, humilié tous les jours, 230 000 victimes de violences conjugales par an, 230 000, une femme sur cinq, harcelée au travail, qui fait la guerre à qui, qui est violent avec qui ? Je crois qu'on a à peu près la réponse.

  • Speaker #0

    Est-ce que le féminisme, ce n'est pas également une lutte contre le capitalisme ?

  • Speaker #1

    Bien sûr que si, parce que ça obéit à la même logique, c'est-à-dire que le capitalisme, c'est l'exploitation de toutes les ressources possibles pour atteindre des objectifs qui sont toujours de l'ordre de la production et de la performance. C'est une logique extrêmement masculine. Alors, je ne dis pas que tous les hommes sont dans cette logique-là, je parle du masculin, de la construction du masculin, qui est fondée sur l'écrasement de l'autre. Et si vous prenez la question des tâches ménagères, par exemple, on dit beaucoup Waouh, ça a quand même vachement avancé ! Sans déconner, moi, il n'y a pas une chronique que j'ai faite sur les tâches ménagères sans recevoir un mail de quelqu'un qui me disait Pardon, moi, j'ai débarrassé la table hier, quoi. Wow, super, super. C'est-à-dire qu'en fait, les mecs font 5 minutes de tâches ménagères, il faudrait leur faire une espèce de holà, des drapeaux, des banderoles, etc. quand nous, on fait ça tous les jours et que tout le monde trouve ça normal. Sur la question des tâches ménagères, il y a eu un progrès, c'est vrai. En 20 ans, les hommes ont consacré une minute de plus par jour aux tâches domestiques. Bravo ! N'empêche que, on est quand même toujours sur un rapport de 20-80, c'est-à-dire que c'est les femmes qui se sont tout simplement, elles ont obtenu le droit de travailler, mais elles se sont tout simplement rajoutées une deuxième journée.

  • Speaker #0

    Je suis désolé de vous couper, c'est anecdotique, est-ce que c'est pas juste l'arbre qui cache la forêt, le sujet des tâches ménagères ?

  • Speaker #1

    Alors c'est pas que anecdotique parce que ça nous alienne beaucoup, c'est-à-dire que même moi, je vais par exemple... Enfin moi j'ai un... Un compagnon, heureusement, parce que sinon il serait plus vivant, qui fait largement plus que tous les mecs que je peux croiser dans mon entourage. N'empêche que, à cause de cette putain de chasse aux mammouths, il y a une différence essentielle entre lui et moi, c'est qu'il va s'occuper de la maison une fois que son travail est fait. Moi, je vais me mettre au travail quand tout est réglé dans la maison. Et ça, ça entrave. L'écriture de ce bouquin a été super difficile parce que... Parce que j'ai deux garçons qui sont petits, et que comme je vous dis, ma priorité c'est celle-là, c'est les garçons, c'est la maison, il faut que ça tourne, etc. Je me mettais à travailler très très tard, et crever en fait. Et c'est pour ça que la plupart des autrices féministes n'ont pas d'enfants, ou sont lesbiennes, il n'y a pas de secret, c'est-à-dire que nous, les femmes hétéros, on est élevées pour prendre soin de l'autre. Donc on fera toujours passer l'autre avant. Donc la création de type artistique, littéraire, etc. Ça passe bien après. Donc non, c'est pas anecdotique. C'est vraiment du concret, en fait. Mon féminisme, à moi, il est extrêmement concret. C'est quelque chose de très incarné. Et pour en venir à la question du capitalisme, si on a pu se dégager quelques heures pour travailler, pour créer, parce qu'on va pas se mentir, c'est quand même hyper agréable de bosser. Quand on fait un boulot qui nous plaît, on apprend des choses, on rencontre des gens, on y trouve du sens, on y trouve de la reconnaissance. Enfin, je veux dire, moi, j'adore bosser. J'adore. Si j'ai pu me dégager du temps, c'est parce que j'ai délégué. Mais j'ai pas délégué à mon mec, en fait. C'est parce que j'ai des nounous. Enfin, des nounous. Une nounou, des baby-sitters, parce que j'ai une femme de ménage. Et c'est qui ? C'est des femmes beaucoup plus précaires que moi et en général des femmes racisées. Donc en fait, le capitalisme c'est ça aussi. C'est-à-dire que pour que quelques-uns s'en sortent, il faut écraser tous les autres. Donc la lutte contre le masculinisme flirte avec la lutte contre, pas forcément le capitalisme, mais en tout cas le libéralisme, parce que tout ça, ça marche ensemble. Et l'exploitation des ressources de la planète, c'est pareil. C'est-à-dire que c'est aussi pour ça que... les leaders politiques les plus féministes sont chez Europe Écologie Les Verts. Tout ça marche ensemble. C'est l'idée. Quel monde on veut ? Est-ce qu'on veut un monde pyramidal, construit sur une espèce de hiérarchie des normes, où quand on est tout en haut de la pyramide, on a le droit d'écraser tous les autres ? Ou est-ce qu'on essaye de travailler à un monde un peu plus paritaire, un peu plus divers, un peu plus ouvert ? Moi, je sais de quel côté je me trouve.

  • Speaker #0

    Est-ce que, quand on voit certaines autrices, je pense à Virginie Despentes, qui vont quelquefois annoncer que même leur sexualité change parce que c'est leur manière de lutter pour le féminisme. Quelle est votre idée là-dessus ?

  • Speaker #1

    Moi je la comprends. Il se trouve que moi je suis actuellement en couple hétéro, que j'ai toujours été en couple hétéro, que mon compagnon, j'en suis encore très amoureuse. Donc... je vais pas le quitter pour une femme par principe. Évidemment que non. Maintenant, je comprends très bien ce mouvement-là de toutes ces femmes et du lesbianisme politique, je le comprends très bien, pour plein de raisons. La première, si on se parle juste d'intimité, quand vous voyez le taux de satisfaction sexuelle des lesbiennes, franchement, il fait rêver. Et ça, pourquoi ? Parce que pendant des années, on a fait croire aux femmes que l'orgasme clitoridien était un orgasme de petite fille, que le seul qui valait, c'était l'orgasme vaginal, et ça, c'est aussi une vaste blague. C'est-à-dire que même dans notre pieu, le patriarcat s'est enfoncé pour nous faire croire que la seule sexualité valable, c'était celle qui consistait à pénétrer une chatte par une bite. Donc, ce que les nanas disent, mais Ovidie le dit très bien aussi, c'est Eh, les gars, en fait, la blague, c'est que ça se passe pas du tout comme ça ! Et le problème qu'on a aussi, c'est que si la sexualité est phallocentrée et uniquement pénétrative, alors elle commence. avec la pénétration et s'arrête avec l'éjaculation masculine. Pareil, spoiler les gars, en fait, chez nous ça ne se passe pas du tout comme ça. Donc ce malentendu au lit, soit on a l'énergie de le dissiper avec son compagnon, soit en fait on se lève et on se casse. C'est aussi simple que ça. Donc bien sûr que je le comprends et je dirais même qu'on peut l'étendre à toutes les sphères de la vie à deux parce que, encore une fois, même chez moi où globalement... ça se passe bien, il y a des petites éruptions de patriarcat chez mon mec, et il y a chez moi des moments où je me censure, je m'interdis des choses, etc. et où je me giflerais, je me dis mais merde en fait, t'as le droit, vas-y. Donc on est héritier d'une histoire. Donc forcément, elle nous rattrape, même dans les couples les plus ouverts ou les plus égalitaires, ce que vous voulez, ça nous rattrape. Je peux comprendre qu'on soit fatigué de ça, évidemment. Et c'est d'ailleurs pour ça que les féministes font peur. Parce que les féministes, en gros, ce qu'elles disent, c'est... Alors en fait, soit on change les règles du couple hétérosexuel, et effectivement vous y trouverez un peu moins votre compte, soit en fait on va se mettre en couple avec des femmes. Donc évidemment que ça ne réjouit pas grand monde, ça. Chez les mecs hétéros, je veux dire.

  • Speaker #0

    On va faire un petit vrai ou faux. Un quai-fé ou contre-vraie. Julia Foy, ce vrai ou faux. Au concours du Centre de formation des journalistes, à l'été 1998, vous avez porté un pantalon cargo, un Marcel et des tongs.

  • Speaker #1

    Oh ouais, la honte, la honte. Alors, ce qui est marrant, c'est que la secrétaire du CFJ, Michèle Martin, Michmart, si tu m'entends, elle m'en parle encore. En fait, je suis allée à ce concours en touriste, quoi. C'est la honte, c'est la honte. En fait, je prépare ce concours, je me dis... La vocation m'est venue très tard. Moi, je rendais ouf mon frère qui lui était polytechnicien. Ça vous donne une idée du personnage. Moi, je disais, en fait, mon ambition dans la vie, c'est d'être heureuse de me lever le matin. En fait, ça a l'air anodin, mais c'est la chose la plus importante qui soit. Ça veut dire être au bon endroit. Et ça, c'est parfois le combat de toute une vie. Mais comment ça allait se traduire, je ne savais pas. Moi, je voulais faire une maîtrise sur Balzac. Mon frère me disait, mais ça va servir à quoi ? Et moi, je disais, on n'est pas obligé de faire des choses utiles. Je vais le faire parce que j'ai envie de le faire. Et pendant l'année, je me suis dit, tiens, en fait, j'aime bien écrire. J'aime bien les gens. J'ai envie d'un truc où je ne suis pas enfermée dans un bureau, etc. Tiens, si je devenais journaliste. Bon, là, ce que je vais faire, j'avais un plan. Tous les plans sont faits pour être déjoués, mais mon plan, c'était, je passe une seule école, parce qu'il n'y avait pas d'anal à l'époque. Donc au moins, je sais comment ça se passe dans les écoles. Derrière, je me fais un an de stage, parce que je n'étais pas débile non plus. Je n'avais pas ouvert un journal de ma vie, et je n'avais pas posé les pieds dans une rédac de ma vie. Donc je savais que j'avais des grosses lacunes. Je me dis, je me passe une année à me préparer, et après, je passe toutes les écoles. Et en fait, de façon hallucinante, j'ai été prise à l'oral. Je n'ai même pas compris ce qui s'était passé. Et donc, je suis arrivée à l'oral en tongs et en pantalons de cargo parce que je me suis dit, de toute façon, je ne l'aurai pas. Donc, je ne vais pas faire un effort vestimentaire. Vous n'êtes pas dans l'export. Et en fait, j'ai été prise... Alors, attention, j'ai été prise sixième sur les listes d'attente et avec un sentiment d'imposture qui ne m'a pas quitté pendant dix ans. Donc après, je l'ai payée, mais alors, bien comme il faut. Mais je pense que j'ai vraiment été à la fois reçue sur un malentendu et en même temps, ce métier m'allait bien.

  • Speaker #0

    Vrai ou faux, vous avez fait votre première manif dans le ventre de votre mère.

  • Speaker #1

    Oui, ma mère, dont je parle beaucoup dans le livre, avec qui je m'engueule beaucoup sur les questions féministes, je lui dois quand même une chose, c'est que la graine de la révolte, c'est elle qui l'a plantée. Très clairement. Mon père était... J'adorais mon père, j'étais très très proche de lui. Mais mon père n'attendait pas grand-chose de l'humanité. Lui, ce qu'il aimait, c'était ses livres et ses enfants. Et pour le reste, il était un peu... Il était cherché en physique, il était un peu dans sa bulle. Ma mère, elle était convaincue que le monde, on pouvait le changer. Et qu'il fallait même tout faire pour ça. Elle avait été psy au planning familial. Elle a fait 68, elle a fait la manifestation de la rue de Charonne. Elle a toujours manifesté ma mère. Donc, je le dis ironiquement, mais pas que. Je pense que vraiment, mes premières manifs, c'était dans son ventre, très clairement.

  • Speaker #0

    Vrai ou faux, après avoir enregistré une émission de radio, vous avez faim ?

  • Speaker #1

    Oh putain, oui. Pardon. Non mais moi je suis un ventre en fait, c'est-à-dire que j'ai l'air de parler comme ça, de brasser des concepts, etc. Pas du tout. Moi, il faut me nourrir, il faut nourrir la bête, sinon je ne suis pas capable de produire quoi que ce soit. J'ai encore rien. Ne vous inquiétez pas, je vais commander après. Et effectivement, pendant une émission, en fait moi je donne tout pendant une heure, mais je suis à donf. Je suis vraiment à donf. Et du coup, quand je sors de là, ma première phrase, et l'équipe avec laquelle je travaille se marre, parce que ma première phrase c'est toujours Oh, j'ai faim ! Systématiquement, donc oui. Et par ailleurs, j'aime manger, donc... J'ai renoncé à ma taille 36 il y a bien longtemps pour pouvoir me resservir de pâtes quand j'en avais envie.

  • Speaker #0

    Que vous savez cuire à la perfection.

  • Speaker #1

    Ah bah oui, non mais parce que ça, j'ai le bon ustensile. Je vous en parlerai peut-être une autre fois, mais il faut le bon ustensile, sinon on n'y arrive pas.

  • Speaker #0

    C'est à la vapeur un truc comme ça ?

  • Speaker #1

    C'est pas un truc comme ça les pâtes. C'est pas un truc comme ça les pâtes, on dit pas c'est un truc comme ça. Ça c'est non.

  • Speaker #0

    Ça fait pour une question.

  • Speaker #1

    Ah oui, je peux devenir violente. Il y a des sujets avec lesquels je déconne pas, c'est les créoles et les pâtes. Ça c'est clair que non. En fait, il faut avoir une passoire intégrée à la casserole, ce qui fait que quand les pâtes... arrive à deux minutes de la fin de cuisson parce que la cuisson se termine dans la sauce de pâte bien évidemment tous les italiens le savent en fait vous soulevez votre passoire et vous jeter directement dans la sauce qui fait qu'il n'y a pas ce moment de passage dans l'évier où les pattes ont le temps d'être saisie par le froid et là c'est foutu je vous ai livré le point le plus important de cette interview c'est celui là

  • Speaker #0

    J'ai lu ça je ne peux pas le croire mais vrai ou faux Vous pouvez vous lever à 4h du matin pour soigner les panaries de vos amis. Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?

  • Speaker #1

    C'est un peu une vanne, mais pas que. C'est vrai que je suis, je crois, alors moins depuis que j'ai des enfants, j'ai été élevée par mes parents dans l'empathie. Je crois que l'empathie, c'est la plus grande des forces, celle de la capacité de se mettre à la place de l'autre. Et l'attention à l'autre, en fait. Le fait de pouvoir prendre soin de l'autre, c'est quelque chose qui est... que je fais aussi, je crois que je fais avec mes enfants, que je fais avec mon mec, que je fais un peu avec tout le monde, mais je ne suis pas la seule à faire ça. Mais c'est vrai que j'ai un truc, moi, ma mère était comme ça. Si une copine m'appelle parce que ça ne va pas, je déclenche le plan hors sec. C'est-à-dire que je ne lui dis pas, on s'en reparle demain. Je ne lui dis pas, oh, ça va, ce n'est pas grave. Je dis, OK, j'arrive. Alors, attends, je vais mobiliser qui ? De qui est-ce qu'on a besoin dans cette histoire ? Problème, bon, solution, bon, action. Voilà, quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit, elles savent qu'elles peuvent m'appeler, je suis là.

  • Speaker #0

    Et les pâtes à la fin.

  • Speaker #1

    Évidemment ! Non, par exemple, alors je pense à cette amie-là. La vanne est venue avec une copine à moi qui bosse à l'IB maintenant, que j'adore, qui était au CFJ avec moi. On en rigole souvent, mais il y a eu toute une période de sa vie où ça n'allait pas. Moi, j'habitais à côté de l'IB et le midi, elle venait prendre des bains chez moi. Si vous essayez de faire du bien, viens prendre un bain. Et là, on ne parlait pas, c'était une taiseuse à l'époque. Et évidemment que je respectais ça. Mais par contre, il y avait un truc de douceur à lui faire couler l'eau d'un bain bien chaud, lui mettre un peu de bain moussant, justement ne lui poser aucune question, mais qu'elle ait une demi-heure pour prendre un bain au milieu de sa journée. Et c'est avec elle que cette vanne m'est venue. Je ne sais plus qui l'a faite cette vanne du panarien à 4h du mat, mais ça vient d'elle. Ça vient de notre amitié.

  • Speaker #0

    J'ai essayé de faire ça pendant longtemps, quand j'avais des amis qui n'allaient pas bien. Je leur disais, viens prendre un bain à la maison. Mais elles me prenaient toutes pour un pervers.

  • Speaker #1

    Voilà. Valait mieux. Venant de moi, ça passait mieux.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Vrai ou faux ? Et là, on va entrer encore un peu plus dans le vif du sujet de ce livre dont je parle juste ensuite. On a un souci dans la construction du masculin.

  • Speaker #1

    Clairement. Très clairement, et il faut vite qu'on s'en débarrasse parce que c'est... Regardez, les hommes sont responsables de 85 à 95% des homicides, que ce soit les féminicides, que ce soit les accidents de la route. La plupart des 9 fois sur 10, les violences, c'est eux. Donc on a tous un souci parce que personne n'a envie de vivre dans une société qui est violente avec des morts sur la route et avec des morts dans la rue, avec ce que vous voulez. Donc, soit on se dit que c'est dans les gènes de l'homme et c'est comme ça, et on ne fait rien, soit on se dit qu'en fait, peut-être qu'il y a un truc qu'on appelle culture d'un masculin toxique ou quelque chose comme ça, et on s'y attaque. Et on essaie de comprendre ce qui, dans l'éducation qu'on fait aux garçons, autorise, voire encourage, ce genre de comportement délétère, encore une fois, pour tout le monde. Et moi, j'ai deux petits garçons, et je me rends compte que c'est... une interrogation de presque tous les jours. Ça ne veut pas dire que tous les jours, je me prends la tête à me dire comment j'en fais les mecs bien. Mais c'est quelque chose qui sous-tend très fortement l'éducation que je leur donne. Et je vous donne juste un exemple. J'ai un peu merdé parce que mon fils aîné a quatre amoureuses. Donc là, il y a un truc que j'ai dû louper sur la polygamie. Bon, je vais me rattraper. Mais donc, il a quatre amoureuses. Et en fait, l'une d'elles est toute petite et toute chétive. Et lui, c'est une espèce d'armoire à glace. Et en fait, il est dans la cour de l'école et il veut l'embrasser. Et en fait... Il l'embrasse. Et en fait, j'ai eu ce premier réflexe de maman italienne. Je me dis, ça, c'est un mec invrais. Mais je l'ai eu un quart de seconde. J'ai attrapé sa capuche, je l'ai tirée en arrière. Je lui ai dit, est-ce que tu lui as demandé si elle était d'accord, en fait ? Parce que ça commence là. Et hier, dans la rue, j'étais hyper contente parce qu'on se baladait. Après, mon fils, il me fait marrer parce qu'il draguerait un lampadaire, mais vraiment. Et on passe à côté d'une gamine. Il a peur de rien, il doute de rien. On passe à côté d'une gamine. Il regarde, il fait, je peux te faire un bisou ? Et bon, elle a dit non, et du coup, il n'a pas fait de bisous. J'ai dit, bon, voilà, ça, c'est gagné, c'est acté. Et ça passe par là. Et il faut absolument le faire, parce qu'on ne peut pas pleurer sur le nombre de féminicides qu'on a en France et qui n'est franchement pas... On n'a pas de quoi être fiers, très clairement. Et en même temps, ne pas se poser la question de comment tout ça arrive. Et tout ça arrive à cause de l'éducation des garçons.

  • Speaker #0

    Comment il est né ce livre, ce que le féminisme m'a fait, que vous venez de sortir chez Flammarion, et qui est une sorte de suite, de réponse au précédent livre, Je suis une sur deux ?

  • Speaker #1

    Alors, Je suis une sur deux, c'est 20 ans de gestation, c'est l'envie de raconter cette histoire, le viol mais aussi l'acquittement, il y a eu procès dans mon cas. C'est quelque chose de... Je dirais la démarche, elle est presque solennelle en fait. Ce que le féminisme m'a fait est né d'un fou rire dans ma cuisine où en fait c'était un jour... En fait c'était une journée de merde, vous savez, mais pas une journée de merde grave, mais que des trucs qui vont pas en fait. Ça marche pas, y'a rien qui marche. Moi y'a des moments où je rends l'antenne en fait, j'ai dit bon ok elle me saoule cette journée, je me cale sur mon fauteuil et puis je me mets comme tout le monde à scroller et là je tombe sur une vidéo sur Twitter où une nana qui a une trentaine d'années... dit Moi, quand je suis rentrée en féminisme, rien que l'expression m'a fait halluciner, comme si on rentrait dans les ordres, j'y ai vu une promesse de bonheur. Alors j'ai fait tout ce qu'elles m'ont demandé de faire. Je me suis même, j'ai même arrêté de me maquiller puisqu'elles interdisent de se maquiller. Vous pouvez me regarder, vous voyez comme c'est vrai. J'ai arrêté de me maquiller alors que j'adore ça. Et aujourd'hui, j'ai 30 ans, j'ai pas de mec et j'ai pas d'enfant et j'ai raté ma vie. Et en fait, j'explose de rire. Puis après, je me dis Putain, mais... Ça veut dire qu'en 2024, une nana qui a 30 ans, qui n'a pas de mec, qui n'a pas d'enfant, croit encore qu'elle a raté sa vie, si elle n'existe pas par elle-même en fait. C'est-à-dire que les femmes, on considère qu'on existe parce qu'on est femme de ou mère de, et tout à coup, elle toute seule, elle n'existe pas. Je me suis dit qu'est-ce qu'on a raté ? et juste après, je me suis dit mais moi, il m'a fait quoi le féminisme ? Il m'a fait quoi ? Et ça m'a travaillé toute la journée. La première réponse, c'était il m'a fait du bien Et je me suis dit que si je voulais en faire un livre, il fallait que je développe un peu plus.

  • Speaker #0

    C'est un peu... Il y a écrit dans ce livre, une femme sans homme, c'est comme un poisson sans bicyclette.

  • Speaker #1

    J'adore celle-là.

  • Speaker #0

    Vous l'avez trouvée où ?

  • Speaker #1

    Alors, on dit que c'est Gloria Steinem qui l'a dit. Mais elle-même disait qu'elle l'avait empruntée à quelqu'un d'autre. Donc on ne sait pas. Mais en tout cas, c'est une phrase féministe assez connue.

  • Speaker #0

    C'est du socialisme.

  • Speaker #1

    Et elle est géniale cette phrase. Parce qu'en fait, il y a cette espèce d'idée que nous n'existerions jamais pour nous-mêmes. Vous pouvez faire un essai. Vous pouvez regarder dans l'espace public, une femme assise sur un banc, ça n'existe pas. Pourquoi ? Parce que c'est très bien qu'un mec va s'asseoir assez rapidement. Parce qu'une femme ne peut pas être seule. Une femme est forcément dans la tente de quelque chose et préférablement d'un homme. Là où des mecs seuls à des terrasses de café ou sur des bancs, vous en avez plein. Nous on n'a pas d'existence autre que dédiée à l'autre. Je veux dire, jusqu'au code Napoléon où il était écrit qu'on passait de la tutelle d'un père, celle d'un mari, on a mis des décennies à s'en affranchir mais évidemment il reste encore quelque chose. Donc nous on nous colle un poupon dans les bras quand on a, allez, deux heures et demie de vie et on comprend très vite qu'il va d'abord falloir prendre soin de l'autre avant d'exister par soi-même. Et ça, le féminisme vous apprend ça et vous apprend à vous... détachée de ça et à vous couper petit à petit toutes vos chaînes et à exister pour vous-même. Ça ne veut pas dire égoïstement, ça veut dire comme les mecs le font pour eux-mêmes.

  • Speaker #0

    Et une femme seule, souvent dans les cafés, en tout cas au début du XXe, c'était une prostituée.

  • Speaker #1

    Ouais, et puis même maintenant, vous le voyez assez peu. Moi, je vais dans un café seule quand j'ai quelque chose à faire. Je prends un ordi. J'ai quelque chose à faire.

  • Speaker #0

    Il y a un motif.

  • Speaker #1

    Ouais. Alors que des mecs qui squattent l'espace public tout seuls, il y en a plein ! Alors en général ils ont beaucoup moins de choses à faire parce qu'on revient aux tâches ménagères. Ils n'ont pas cette to-do list mentale dont on raye chaque item, mais vite, vite, vite, il y a un nouvel item qui vient se rajouter. Donc ils ont quand même beaucoup plus de temps pour eux. Et ça c'est pas mon délire féministe, je veux dire, toutes les études le disent, ils ont du temps pour eux. Et l'espace public leur appartient. Il y a un test à faire qui est hyper marrant, que je recommande à tout le monde, enfin qui est marrant mais... Que je recommande aux nanas mais pas de le faire trop trop longtemps parce que ça fait mal. En fait... Les trottoirs sont petits, notamment à Paris, mais aussi parce que l'espace public a été pensé pour des hommes et par des hommes. Les urbanistes ont longtemps été des mecs, donc les trottoirs sont tout petits, donc avec les poussettes, on peut toujours courir pour passer. Mais ça provoque aussi autre chose, c'est que quand vous vous baladez dans la rue, s'il y a un mec et une nana qui marchent l'un vers l'autre, vous regarderez, si la femme ne s'écarte pas, il se rende dedans, parce que le mec jamais ne fera un pas de côté. Jamais. L'espace public est à lui. Regardez, il pisse, il crache. Qui fait ça ? Chez les gonzesses. À part une nana qui serait totalement marginalisée, ça n'arrive pas. Vous ne voyez pas une nana soulever sa jupe et se mettre à pisser par terre ou même à cracher ? Les mecs, si. Encore une fois, je ne dis pas que tous les mecs le font. Je dis que par contre, quand il y a un crachat par terre, ça vient d'un mec et pas d'une nana. Pourquoi ? Parce que l'espace public lui appartient. Pas à nous. Enfin, lui appartenait.

  • Speaker #0

    Comment elle s'est faite l'écriture du livre ? J'entends, vous aviez dit tout à l'heure que c'était difficile. Oui. que c'était dans le peu de temps qu'il vous restait pour cela.

  • Speaker #1

    Ça s'est fait avec des sacs de sable devant la porte. Virginia Woolf a écrit ce livre incroyable sur une chambre à soi et elle dit que pour pouvoir créer, produire et donc exister par elle-même et pour elle-même, une femme doit impérativement avoir une chambre à soi, c'est-à-dire un espace à elle, très clairement. Moi, j'ai longtemps voulu avoir un studio ici pour pouvoir bosser.

  • Speaker #0

    Une cuir sonnière ?

  • Speaker #1

    Voilà, vous avez exactement le même réflexe que mon mec C'est fou, c'est fou C'est-à-dire que cet espace-là, il faudrait qu'il soit peuplé par un homme Je ne peux pas l'occuper seule Il faut que je sois en attente d'un mec qui arriverait J'ai utilisé ce mot-là à la dessin Ouais, mais n'empêche que le réflexe, il est là C'est-à-dire que mon mec, tout de suite, au début, croyait vraiment que je voulais recevoir des amants L'idée qu'une femme puisse être bien avec elle-même Et aimer passer du temps seule sans avoir à s'occuper des autres Putain, mais ça c'est une idée qui est toujours... pas rentrer quoi moi je voulais juste un bureau pour moi pourquoi parce que si mon bureau il est dans l'espace commun évidemment que toutes les quarts de seconde je vais être rappelé et pire éduqué comme je l'étais comme toutes les femmes de ma génération je vais même devancé les cris et les appels donc attention on dit beaucoup si les femmes sont écrasés par les tâches domestiques c'est qu'elles savent pas délégués non non non par ailleurs On a du mal à déléguer, mais dans un second temps, à un moment donné, si on veut s'attaquer aux violences masculines et à la construction du masculin, il va falloir nommer les choses et désigner les premiers responsables. Les premiers responsables, c'est quand même, pardon, la plupart des mecs à la maison, ils n'en branlent pas une. Et que ça leur va très bien comme ça.

  • Speaker #0

    Oui, mais on offre des fleurs.

  • Speaker #1

    Voilà, le 8 mars. Vous savez qu'en Italie, on offre des fleurs aux mères, le 8 mars. Moi, je te les ferais bouffer par les narines, les bouquets de mimosa, là. Moi, je voulais donc un bureau. Je ne l'ai pas pour faute de moyens et de tout ça. Donc, je bosse chez moi. Mais effectivement, comme je vous ai dit, je dois régler d'abord tout le domestique avant de me sentir autorisée. Alors, il y a une part de moi qui devrait me sentir autorisée. Bien sûr. Puis il y a le monde autour qui m'explique quand même que mon rôle premier, c'est d'être mère. Ça me va, j'adore être mère. Mais je vous donne un exemple. Il y a un espace commun, le salon. Il y a dans cet espace commun, deux adultes, deux enfants. Il y a un adulte qui est en train de bouquiner sur le canapé. Il y a l'autre adulte qui a quatre pattes en train de ramasser des Legos sous le meuble de la télé. À votre avis, qui fait quoi ? En toute honnêteté.

  • Speaker #0

    On le lit dans votre livre.

  • Speaker #1

    Ouais, mais parce que c'est vrai. Parce que c'est vrai. C'est-à-dire que... je ne m'autorise pas à prendre cette peau sur le canapé si mes gamins sont dans la pièce je vais être avec eux je vais pas le prendre cet espace pour moi mais pourquoi pas juste parce que je suis débile et que je me charge d'un truc que j'aurais pas à faire il ya un monde autour de moi il ya une culture et elle est millénaire et elle me dit quoi elle me dit que si moi je prends cinq minutes pour moi je suis une mauvaise mère alors que si mon mec prend cinq minutes pour jouer avec les enfants c'est un héros donc lui il a tout intérêt à le faire que moi c'est un peu plus compliqué Donc j'ai le choix et en même temps je ne l'ai pas. Donc la seule solution en réalité c'est effectivement d'avoir une chambre à soi, d'avoir un espace à soi et d'être dans un espace temps où vous êtes seul. Le problème c'est que cet espace temps il est difficile à se créer et à maintenir. D'où les sacs de sable devant la porte parce que vraiment il faut des défenses mais autour de vous même aussi. C'est à dire de vous interdire de sortir de votre bureau. Non tout va bien les gamins ils vont se gérer. il n'y a pas de problème. Mais aussi pour les autres, de dire non, vous ne venez pas me demander, par exemple, toi, tu ne me demandes pas où est ton doudou et tu le cherches, mais toi, mec, tu ne me demandes pas où sont les clés de la bagnole et tu les cherches, en fait.

  • Speaker #0

    J'avais entendu Bégaudeau dire qu'écrire, c'était un loisir bourgeois. C'est aussi pour cela que c'était parce qu'il fallait consacrer beaucoup de temps à cela pour créer quelque chose, créer du roman et que finalement... dans les textes courts où c'était plus simple quand on avait peu de temps à faire cela. Et vous, on voit que dans ce livre, il y a des petits textes courts qui viennent ponctuer finalement la narration du fil de ce récit qui n'est pas un roman, qui est vraiment un récit. Et donc, il y a ce personnage, votre mère, qui revient régulièrement. Ce qui est intéressant, c'est de se dire finalement, la place de la mère, souvent, il y a des auteurs qui vont... taper gentiment sur leur mère. Mais est-ce que c'est parce qu'elle est plus impliquée dans l'éducation des enfants, en général ?

  • Speaker #1

    C'est-à-dire que les mères, on porte le bob, quoi qu'il arrive, on porte le chapeau. C'est-à-dire que quoi qu'il arrive, ça va être de notre faute, mais aussi parce qu'on est en première ligne, parce que le lien avec l'enfant est organique, parce que c'est le tout premier lien, et parce que c'est bien pratique, parce que du coup, tout le monde a pu dire qu'en gros, quand ça déconnait, c'était que la mère était responsable. Donc oui, elle a cette place de premier plan. qui n'est pas forcément un cadeau. Et puis, ce qui est marrant, c'est qu'on vit dans une société où, en gros, quand tout va bien, la mère va devoir tout, globalement, s'occuper, encore une fois, répartition des tâches domestiques, mais même si vous prenez les premiers mois d'un bébé. La nuit, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais les mecs sont frappés d'une espèce de surdité nocturne que la médecine n'explique pas. Et qui fait que, hop, il écrit le bébé. Ils ne les ont pas entendus, dis donc ! Nous, on les entend, parce qu'on n'a pas le choix. Parce qu'on a été élevés comme ça. Parce qu'encore une fois, un père qui ne se lève pas, c'est normal, il est fatigué, il a du travail. Une mère qui ne se lève pas, eh oh, t'es en congé mat ! Sachant que dans cette formule de congé maternité, il y a quand même un truc qui ne va pas. Il faut avoir vécu en tête à tête avec un bébé pendant deux mois pour comprendre que même la formule, c'est du foutage de gueule, en fait. On aura ce problème-là, de place des uns et des autres dans l'éducation des enfants, tant qu'on n'aura pas de congé paternité équivalent. pour les deux, de congés maternités et de congés paternités qui soient équivalents. Pour l'instant, on n'y est pas. Donc pour l'instant, c'est la mère qui est en première ligne. Le congé maternité, c'est le moment où se prennent tous les plis. Exemple à la con, mais c'est elle qui commence à l'emmener chez le pédiatre. Donc c'est elle qui va continuer. Parce qu'elle a l'adresse, parce qu'elle a les codes, parce qu'elle connaît le tout-bib. Donc tout est plus simple. Donc les plis se prennent là. C'est ça absolument qu'il faut pouvoir réformer pour que, dès le départ, on ait une égalité femmes-hommes sur cette question-là. pour la joie de la parentalité comme pour le merdier de la parentalité. Parce que l'énorme arnaque, elle est là. De toute façon, on se fait bananer quoi qu'il arrive, sauf quand on devient féministe et quand on se dit que ce monde là, on va le changer. En gros, c'est la mère qui taffe au début. Mais par contre, on va lui expliquer que le père est tout puissant. Le père tout puissant, il se barre dès qu'il y a un handicap, dès qu'il y a une maladie, dès qu'il y a des trucs qui se mettent à déconner. Mais par contre, On l'a entendu au moment du mariage pour tous, un papa, une maman, on ne ment pas aux enfants, blablabla. Il fallait que le père soit présent. Par contre, la nuit, ce n'est pas la peine que le père soit présent. Donc, il l'est symboliquement, il est dans la loi. On a un mal fou, par exemple, à retirer l'autorité parentale à un père violent. Un mal fou, parce qu'il est le père et que cette loi, quoi qu'il arrive, est inattaquable. Je vous donne un exemple. Mon mec, moi j'ai fait mon premier enfant, il est issu d'une PMA. Donc, je l'ai fait toute seule. Puis, il se trouve que j'ai rencontré mon mec, que mon mec et mon fils se sont choisis, aimés. Et qu'à un moment donné, on s'est dit, bon... Il faudrait peut-être régulariser tout ça parce que si il m'arrive un truc, mon mec n'est rien pour Isaac, alors que dans la vie de tous les jours, il est beaucoup de choses pour Isaac, il est son père. Et bien en France, quel que soit... Ça peut avoir lieu, mais sept ans après la naissance, en l'occurrence c'était sept ans après la naissance, Franck n'avait qu'à aller en mairie et dire je suis son père. Ah ok, très bien, vous signez là. C'est-à-dire que la mère n'existe pas symboliquement, la mère n'existe pas, elle est là. Pour changer les couches, elle est là pour récupérer les gosses à l'école en urgence quand ils ont 38. Mais par contre, n'importe quel mec peut se présenter dans n'importe quelle mairie pour dire je suis le père et la mère n'a pas son mot à dire. Rien. Donc on a peut-être un petit souci là aussi.

  • Speaker #0

    Je vais revenir sur le sujet de votre mère, si ça ne vous embête pas. Et elle l'a pris comment finalement, la lecture du livre ?

  • Speaker #1

    Ma mère, elle est folle, donc ma mère, elle a adoré. En fait, ma mère, elle est... Elle est une espèce de déni très protecteur de tout. Et en fait, elle était hyper contente que je parle d'elle. Donc, salut à la vidéo. Salut à la vidéo. Très bien. Moi, j'ai flippé parce que je me suis dit, comment elle va prendre les choses ? Après, en leur lisant, je trouve qu'avec le recul, je trouve qu'on sent aussi l'amour que j'ai pour elle. Et il est profond, l'amour-là. L'admiration. Oui, l'admiration aussi. Je lui dédie quand même ce livre. Mais maintenant, je pense que quand... Qui aime bien s'engueule bien. Et on est au moins dans une famille où on se dit les choses. Et oui, les portes claquent, mais cinq minutes après, on se dit je t'aime, donc ça va.

  • Speaker #0

    C'est une comédie italienne ?

  • Speaker #1

    L'enfer, mais l'enfer ! On est séfarades d'un côté, italiens de l'autre. Donc tout ce qui est nuance et modération, c'est pas nous. Très clairement. Tout ce qui est calme et... Non, ça n'existe pas. Il y a un niveau de décibels moyen qui est assez élevé. Il y a un niveau de bordel, ouais, qui est assez élevé, mais c'est joyeux.

  • Speaker #0

    On va finir l'émission. On est dans un café, on est ici au One Feed, dans le Jays North Ham, arrondissement. Et je vais vous poser trois questions sur l'univers du café. Une question qui va être d'abord un peu sur, justement, le café, parce que je vois que vous buvez du café. Est-ce que, d'après vous, un expresso contient beaucoup plus de caféine qu'un allongé ?

  • Speaker #1

    J'en ai pas la moindre idée, mais j'ai un truc. En fait, je suis un peu... Je suis un peu bizarre sur les questions d'hygiène de vie. Vraiment, je suis très étrange parce que je fais 5 heures de sport par semaine, ça, il n'y a pas de problème. Là,

  • Speaker #0

    vous avez le café et la clope.

  • Speaker #1

    Café, clope. Et je sais, dans un coin de ma tête, j'ai vaguement l'idée que ce n'est pas hyper bon pour la santé. Mais je crois que pour l'instant, je m'en contrecogne. Je ne devrais pas. Vraiment, je ne devrais pas si je veux survivre. Mais peut-être que je me crois un peu immortelle, en fait. Mais donc, non, je ne sais pas. Est-ce que vous avez la réponse, vous ?

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr, j'ai la réponse.

  • Speaker #1

    Il y a plus de caféine où ?

  • Speaker #0

    La caféine se diffuse dans les américanos.

  • Speaker #1

    Donc il y en a plus. Je savais que c'était dégueulasse. En fait, ce qu'il faut, c'est des cafés serrés. Voilà, point à l'italienne. Terminé. Question pliée.

  • Speaker #0

    J'ai deux autres questions. J'ai essayé vraiment de trouver comment on pouvait allier féminisme et bistrot, café. Qu'est-ce que... Qu'est-ce que la grève du vin en 1933 ?

  • Speaker #1

    La grève du vin ?

  • Speaker #0

    Oui, la grève du vin.

  • Speaker #1

    C'est quoi ? Vous ne savez pas ? Ben non.

  • Speaker #0

    C'est génial. La grève du vin... en 1933, était une action de protestation menée par le mouvement féministe français, la française, à Vente-Pas, pour réclamer le droit de vote des femmes. Les femmes ont été invitées à ne pas acheter de vin pendant une semaine du 26 mars au 2 avril. Parce qu'en fait, le vin, c'était un véritable moteur économique en France à cette époque. On est dans les années 30. Et ça n'a pas eu un effet immédiat. Mais c'est vrai que les femmes ont obtenu le droit de vote en 44, à partir de la guerre.

  • Speaker #1

    Moi, je trouve que les féministes, déjà, elles ont le don pour rendre notre vie plus joyeuse, plus piquante et plus bordélique, mis à part le fait qu'elles ont un vrai projet politique et une vraie utopie politique qui est foutument intéressante et à laquelle on gagnerait tous à s'intéresser. Mais elles ont aussi ce sens de l'action collective et ça, je les trouve assez géniales pour ça. Déjà, elles sont drôles. Vous citiez tout à l'heure le slogan de Gloria Steinem, mais je pourrais vous en citer plein d'autres. En fait, les slogans féministes sont très, très drôles. Elles ont la créativité de toutes celles et de tous ceux avec qui on met les bâtons dans les roues. Donc, en fait, elles sont assez géniales en drôlerie. Quand vous regardez les mouvements... Ce qu'ils ont pu produire comme action et comme slogan, c'est très très drôle. Et je pense qu'il serait temps de ressonger à ce type de mouvement-là. Si je vous dis grève des femmes le 8 mars prochain, c'est une possibilité à laquelle il faudrait peut-être toutes et tous commencer à réfléchir. Et je parle très sérieusement. C'est-à-dire que là, au moment où je vous parle, je vous le dis, peut-être, peut-être.

  • Speaker #0

    De faire grève.

  • Speaker #1

    Peut-être qu'il y aura une grève des femmes le 8 mars. Peut-être.

  • Speaker #0

    D'ailleurs, grève, je vais sur ma dernière question. Qu'est-ce que le bistrot de la grève ?

  • Speaker #1

    C'est quoi ? Je ne sais pas moi.

  • Speaker #0

    Génial.

  • Speaker #1

    Moi je vous écoute.

  • Speaker #0

    C'était une émission de radio pirate diffusée pendant la grève historique des techniciens et des producteurs de la maison de la radio.

  • Speaker #1

    Non, non, non, ils ne font jamais grève, ce n'est pas vrai. Non, il n'y a pas de mouvement.

  • Speaker #0

    Dans les années 60. Animé par le journaliste et écrivain François Cavana. L'émission était diffusée tous les soirs en direct des studios occupés, c'est une sorte de talk show improvisé, où les grévistes, leur soutien, venaient diffuser, discuter, échanger des idées et boire un verre, ce qui se faisait peu à l'époque, de dire ouais vraiment à l'antenne.

  • Speaker #1

    Ah c'est bien non ? J'adore l'idée.

  • Speaker #0

    Et ça a fait avancer la cause des grévistes.

  • Speaker #1

    Et bien avec la grève qui se profile, avec cette histoire de fusion, peut-être qu'on devrait reproduire ça, peut-être qu'on devrait le faire aussi, squatter les studios et faire l'émission.

  • Speaker #0

    Une émission pirate !

  • Speaker #1

    Exactement, je vais le suggérer au comité de grève de Radio France. Non, sans déconner, s'ils continuent avec ce projet de fusion, c'est ce qu'ils vont se prendre dans les dents et ils le savent. Donc, préparez-vous à entendre.

  • Speaker #0

    Aimerait davantage.

  • Speaker #1

    Non, mais alors, pour le coup, sur cette grève-là, sur le mouvement de protestation, sur la fusion, les auditeurs sont avec nous. Les auditeurs et les auditrices sont clairement avec nous. Je crois qu'ils sont prêts à se prendre des semaines de playlist pour que cette fusion n'ait pas lieu, parce qu'elle est un non-sens complet, justifié par bien. C'est encore une preuve d'incompétence notoire de ceux qui nous gouvernent. Et moi, je suis affligée par sept ans de politique confiée à des incompétents qui ne connaissent pas leur dossier. Mais vraiment pas. Ils ne bossent pas. Ils ne bossent pas parce qu'en italien, on dit qu'ils ont la puzzalnazza, la puanteur au nez. C'est-à-dire qu'ils sont des espèces d'arrogance de ces gens qui pensent avoir tout pigé. Alors qu'en fait, ils n'ont même pas le début. d'une compréhension du monde qui soit à peu près juste et honnête. Donc comme je le dis souvent, on n'a pas le cul sorti des ronces, mais on s'y attaque.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup Julia Foyce.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

  • Speaker #0

    On va prendre un café au comptoir. Je rappelle le titre de votre dernier livre, un récit, Ce que le féminisme m'a fait chez Flammarion.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Vous avez écouté un café au comptoir. Petit mot habituel de chaque fin de podcast, allez sur Apple Podcast, mettez 5 étoiles, c'est encore mieux. Et puis surtout, laissez-nous un petit mot. pour expliquer comment c'était bien ce podcast, comment vous l'avez aimé. Vous mettez n'importe quel pseudo, on s'en fout. En tout cas, ça nous offre de la visibilité. Allez partager ce podcast avec vos amis, vos collègues, votre famille, qui vous voulez. En tout cas, merci d'être ici et à très, très, très, très bientôt pour un nouveau café.

Description

J'ai eu la chance d'interviewer la journaliste féministe Giulia Foïs au café Wanted Paris 46Bis Rue de Meaux, 75019 Paris


Mon invitée du jour est journaliste, productrice de radio, chroniqueuse et… féministe.

 

Et en plus ce  n'est même pas un gros mot.

 

Moi je suis super content de l’accueillir parce que sa voix a rythmé un bon nombre  de mes réveils quand elle officiait dans les matinales de France Inter, une époque où je ne connaissais pas vraiment le mot que j'ai cité un peu plus haut , celui de… féministe.

 

Vous trouvez que j’insiste ? Attendez un peu pour juger ...Ainsi mon invitée a tenu pendant quelques années une chronique dans  le magazine Marie Claire, une chronique appelée… FÉMINISTE TA MÈRE.

 

Si vous pensez qu’on parle trop du féminisme, peut-être allez  vous devoir changer de podcast, parce que le sujet le plus souvent traité par la personne que je reçois est celui du .. féminisme 

 

Dans Allo Giulia pour le magazine ELLE, cette spécialiste des questions de genre s’est attaquée à celles que se sont posées  les femmes de la génération Me Too et pas seulement les femmes  d’ailleurs mais toujours sous un angle… féministe.

 

Parfois quand elle se présente, elle se décrit comme vivante, survivante et supervivante. Pourquoi ?  On trouvera peut être la réponse dans les  deux livres dans lesquels elle a raconté ce que  c'est que de vivre le patricarcat dans sa propre chair, en deux mots, et sans tergiverser, le viol. 



Féministe donc, solidaire du mouvement metoo elle se lève, engage le combat, celui d’une lutte nécessaire pour une société plus juste et pour cela elle prend la parole. D’ailleurs selon elle « la parole est la seule arme qu’elle ait ». Et croyez-moi, elle sait s'en servir et viser juste. Du reste Vous l'avouerai je  , j’ai même un peu peur de l’interviewer tant son expérience en la matière est impressionnante mais surtout tant son engagement féministe me fait sentir merdeux. Oui merdeux comme quelqu’un qui a un jour merdé, par  un geste, une parole, une réflexion ou une blague sexiste qu'il aurait adressé à une personne du genre féminin sans même en percevoir la dimension problématique, ce qui est presque plus grave. Heureusement, dans son dernier ouvrage ce que le féminisme m’a fait »  qui vient compléter le précédent intitulé « je suis une sur deux » - j’y ai lu que les hommes ont leur place dans les combats pour une société égalitaire. De plus, en interview elle dit que les mecs ont le devoir de  s’engager davantage… pour eux-mêmes !

 

Alors je vais essayer d’être à la hauteur de l’être humain que je veux être et partir à la rencontre de celle qui se présente parfois avec humour comme « Journaliste – Société, intimité, féminité, virilité, liberté, égalité, sexualité, et plein d'autres trucs en ité. Sauf Nativité »

 

bonne écoute !


Emission présenté par Alexis Himeros

https://instagram.com/alexishimeros


Avec Giulia Foïs

https://www.instagram.com/giuliafois75



merci au Wanted Paris
https://www.facebook.com/WantedParisHalleSecretan/
https://www.instagram.com/wanted_paris/



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, je suis Alexis Iméros et vous écoutez Un Café au Comptoir.

  • Speaker #1

    Un café au comptoir. Un café au comptoir.

  • Speaker #0

    Mon invité du jour est journaliste, productrice de radio, chroniqueuse et féministe. Et en plus... Ce n'est même pas un gros mot. Moi, je suis super content de l'accueillir parce que sa voix a rythmé un bon nombre de mes réveils quand elle officiait dans les matinales de France Inter, une époque où je ne connaissais pas vraiment le mot que j'ai cité un peu plus haut, celui de féministe. Vous trouvez que j'insiste ? Attendez pour juger. Ainsi, mon invité a tenu pendant quelques années une chronique dans le magazine Marie-Claire, une chronique appelée Féministe, ta mère. Si vous pensez qu'on parle trop du féminisme, peut-être que vous allez devoir changer de podcast, parce que le sujet le plus souvent traité par la personne que je reçois est celui du... féminisme. Dans Allô Julia, pour le magazine Elle, cette spécialiste des questions de genre s'est attaquée à celles que se sont posées les femmes de la génération MeToo, et pas seulement les femmes d'ailleurs, mais toujours sous un angle féministe. Parfois quand elle se présente, elle se décrit comme vivante, survivante et supervivante. Pourquoi ? On trouvera peut-être la réponse dans les deux livres dans lesquels elle a raconté ce que c'est de vivre le patriarcat dans sa propre chair, en deux mots et sans tergiverser le viol. Féministe donc, solidaire du mouvement MeToo, elle se lève, engage le combat, celui d'une lutte nécessaire pour une société plus juste, et pour cela elle prend la parole. D'ailleurs, selon elle, la parole est la seule arme qu'elle ait, et croyez-moi, elle sait s'en servir et viser juste. Du reste, vous l'avouerez, j'ai même un peu peur de l'interviewer, tant son expérience en la matière est impressionnante, mais surtout tant son engagement féministe me fait sentir merdeux. Oui. Merdeux, comme quelqu'un qui a un jour merdé par un geste, une parole, une réflexion ou une blague sexiste qu'il aurait adressé à une personne du genre féminin, sans même en percevoir la dimension problématique, ce qui est presque plus grave. Heureusement, dans son dernier ouvrage, Ce que le féminisme m'a fait qui vient compléter le précédent intitulé Je suis une sur deux j'y ai lu que les hommes ont leur place dans les combats pour une société égalitaire. Et de plus, en interview, elle dit que les mecs ont le devoir de s'engager davantage pour eux-mêmes. Alors, je vais tenter d'être... À la hauteur de l'être humain que je veux être et partir à la rencontre de celles qui se présentent parfois avec humour. Comme journaliste, société, intimité, féminité, virilité, liberté, égalité, sexualité, plein de trucs en IT sauf nativité. Nous sommes donc à Paris dans le 19e arrondissement au café Wanted. Et je vais prendre avec elle un café au comptoir. Bonjour Julia Foyce.

  • Speaker #1

    Mais bonjour !

  • Speaker #0

    À la page 111 de votre livre, il est écrit à chaque proposition d'interview, je dis oui. Je n'ai pas toujours envie, mais je le fais. dont acte, parce que vous êtes ici. Qu'est-ce qui fait qu'en 2024, à l'heure où le mot féministe est dans toutes les conversations, est dans toute la société, omniprésent dans la communication, dans la publicité, on peut vraiment penser, malgré tout, que la parole féministe, elle est toujours en sursis.

  • Speaker #1

    Moi, c'est un mot que j'adore. J'entendais votre portrait, je l'ai trouvé... Très chouette d'ailleurs et je vous en remercie. Merci à vous. Quand je dis que je dis toujours oui aux interviews, mais que j'y vais parfois à reculons, c'est quand je sais que la parole que je vais devoir prendre va être sur un sujet qui ne correspond pas au meilleur chapitre de mon histoire, qui est ce viol. Moi, j'aurais envie évidemment de parler d'autre chose. J'aurais envie de parler de mes fils que j'adore. J'aurais envie de parler de la cuisson des pâtes que je maîtrise à la perfection. Et en même temps... Et évidemment qu'on m'interroge aussi là-dessus. Et évidemment que c'est nécessaire parce que sur le sujet, on a une seule arme, en fait, c'est la parole. Donc j'y vais. J'y vais, mais à chaque fois, je me dis, putain, le jour où on m'interrogera sur autre chose, c'est qu'on aura gagné. Ce jour-là n'est pas encore arrivé parce qu'effectivement, les droits des femmes sont loin d'être acquis. On le voit, on voit ce qui se passe sur l'IVG et sur la contraception aux Etats-Unis. On a vu ce qui s'est passé en Pologne, de tous les côtés. s'est attaquée. C'est de Beauvoir qui disait qu'il fallait rester vigilante une vie durant et elle a raison. C'est-à-dire qu'on fait face, on a... Allez, si on prend le combat des suffragettes, on a un siècle et demi de féminisme face à des millénaires de patriarcat. On est entravés, empêchés, de tous les côtés écrasés par une charge mentale, émotionnelle, domestique, affective qui fait que le rapport de force est toujours aussi déséquilibré et pourtant on va au combat. Pourtant on va au front parce qu'on est convaincus et je suis convaincue que le projet que l'on... porte et celui d'une société qui sera meilleure pour toutes et pour tous. Donc on y va, mais en ayant conscience, c'est drôle ce combat parce qu'on y met toutes nos forces, j'y mets toutes les miennes, en sachant très bien que je ne serai peut-être pas de ce monde, le jour où on aura gagné. Je sais qu'on gagnera, je sais que le sens de l'histoire est celui-là, mais je ne sais même pas si je serai là pour le voir. Et en attendant, je sais que, comme toutes les féministes, j'aurais pris des sauts de merde sur la gueule. Donc, pour y aller, dans ce combat, il faut avoir un moteur archi-puissant.

  • Speaker #0

    J'ai lu également dans votre livre que dans 286 ans, on aura atteint l'égalité homme-femme, source de l'ONU. C'est un petit bout de temps.

  • Speaker #1

    Je vous dis, je ne sais même pas si je serai là pour le voir. Quand je dis que le sens de l'histoire est le nôtre, en fait, il faut se représenter les choses d'un point de vue macro. Si vous partez de la Révolution française, où on a promis l'abolition des privilèges, l'instauration d'une démocratie, comment dire, ce combat a porté ses fruits pour la moitié de la population. Et puis un jour, on a écrit suffrage universel, parce que ça y est, les citoyens avaient le droit de voter, mais je dis bien les citoyens, pas les citoyennes, parce qu'en fait, ça s'est appelé suffrage universel masculin. Donc cette énorme mascarade a fonctionné pendant trois siècles. où on a pu se raconter que l'universel, c'était le masculin. Le féminisme, c'est quoi ? C'est la deuxième moitié de cette révolution, c'est le parachèvement de cette révolution, et c'est l'abolition de tous les privilèges. Et donc aussi des privilèges masculins, pour qu'enfin on jouisse d'une égalité parfaite en droit. Je ne parle pas d'une indifférenciation des genres, je parle d'une égalité en droit, forcée de constater qu'on n'y est pas, malheureusement pas du tout. Est-ce que... Est-ce que l'ampleur du chantier me désespère parfois, mais pas souvent ? Est-ce que la perspective de ne pas être là le jour où on aura gagné me décourage ? Non. Non, je crois que je ne serais pas moi aujourd'hui si je n'étais pas féministe et si je n'étais pas dans ce combat-là. C'est un combat qui vous donne une colonne vertébrale et qui donne du sens aux choses que vous faites, donc c'est quand même pas mal.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'on dit aux hommes qui ont un sentiment ? de déclassement. Je souris parce que j'ai vu votre grimace et qu'on fait une émission en audio qui ont ce sentiment de déclassement et qui s'engagent dans des luttes, à mon sens, totalement incompréhensibles. Je pense aux masculinistes.

  • Speaker #1

    Je trouve qu'ils ont le mérite de montrer sans aucune contestation possible la raison pour laquelle on doit se bagarrer, la raison pour laquelle il faut être féministe. Donc ils ont au moins ce mérite-là, c'est qu'ils sortent du bois et qu'on voit très bien qui on a en face. Qu'ils maximalisent une résistance que l'on trouve en revanche partout, à des degrés moindres, heureusement, mais partout. C'est Virginia Woolf qui disait que la résistance au féminisme est au moins aussi intéressante à étudier que le féminisme lui-même. Quand vous voyez les réactions outrées, la colère, déclenchée par des déclarations de Sandrine Rousseau sur la côte de bœuf. On se parle d'une côte de bœuf.

  • Speaker #0

    Le barbecue,

  • Speaker #1

    c'est ça ? Ça les a rendus fous. Donc là, on se dit, ok, en fait, on a touché un nerf. Il y a quelque chose qui s'est passé là. Et effectivement, sur la question du féminisme, c'est vraiment marrant de constater à quel point, en fait, on touche à des choses très archaïques. On appuie sur des nerfs et donc ça gueule de façon totale. irrationnel c'est à dire que ça continue de se raconter que par exemple on voudrait grand remplacer les hommes que par exemple ce qu'on veut c'est une pluie de couilles sur la planète terre que on est les hommes et que c'est pour ça qu'on se bagarre en fait si vous regardez le plateau télé les débats sur cette question là l'hystérie elle est de quel côté dire que les meufs moi je les trouve toujours extrêmement calme posé elle apporte des chiffres elle apporte des faits et en fait et en face on a des mecs qui beuglent et qui éructe Parce qu'on est en train de leur retirer leurs privilèges, ça les rend fous. Mais ça les rend fous, c'est-à-dire qu'ils ont quitté toute rationalité. Je pense à Emmanuel Todd, je pense à Finkelkraut, je pense à tous ces mecs-là qui sont censés être des sommités intellectuelles et qui perdent pied, quoi. C'est hallucinant. Et en fait, ce n'est plus les intellos qui parlent dans ces cas-là, c'est les petits garçons. Tout à coup, c'est...

  • Speaker #0

    C'est une régression de leur part. Mais peut-être que ce n'est pas ça le plus grave, parce que... Tout le respect que je peux avoir pour des personnes comme Emmanuel Todd ou comme Viggold Crote, pour l'ensemble de ce qu'ils ont pu faire, malgré tout, je pense, leur œuvre littéraire, malgré tout, j'ai l'impression qu'ils sont insignifiants. En fait, leur parole est plutôt insignifiante. Mais le réel danger, c'est plutôt des générations plus jeunes qui, eux, ont accès à des médias comme TikTok, comme Instagram, et qui maîtrisent mieux tous ces relais-là.

  • Speaker #1

    Oui, alors moi, je pense souvent, il y a eu un... un attentat masculiniste en préparation, je crois, à Bordeaux, qui a été déjoué. Moi, je pense que ça finira par arriver. Et que le pire, c'est qu'on dira que c'est de la faute des féministes, parce qu'elles ont déclenché la colère masculine. Et comme d'habitude, on ne pointera jamais celui qui a tué, mais on responsabilisera les femmes. Ce sera à elles de se justifier. Vous avez gueulé, vous les avez rendus fous, ils ont pris peur, ils se sont sentis déclassés, comme vous dites, et donc ils ont tué. Ça arrivera. C'est déjà arrivé dans l'histoire. Ça arrivera de nouveau. Ça, c'est quelque chose auquel je pense souvent. Je me dis, un jour, il y en a un qui va passer à l'acte. Il y a une violence contre les femmes qui est hallucinante. Dans ce pays et puis dans le monde entier en fait, c'est-à-dire que le patriarcat s'est quand même construit sur l'écrasement de la moitié de l'humanité. Les religions se sont fait le relais, on ne sait pas qui a alimenté qui, les hommes ou la religion, mais l'un dans l'autre ils se sont serrés la main très fort pour nous écraser bien comme il faut. Et s'ils nous ont écrasé bien comme il faut, je crois que c'est parce qu'ils ont une trouille bleue. de ce qu'on peut faire en fait, de ce qu'on peut être. Et puis parce que l'être humain se raconte qu'il n'est jamais plus lui-même que quand il écrase l'autre, c'est-à-dire qu'il ne pourrait coexister, il faudrait qu'il soit au-dessus. Et ça, ça dure depuis la nuit des temps. Donc moi ça me fait doucement rigoler, ou ça me met dans une colère noire suivant les jours, quand j'entends que les féministes font la guerre aux hommes. On se parle de quoi en fait ? On se parle de quelle guerre ? C'est-à-dire qui ? meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint, qui subit une tentative de viol toutes les sept minutes, qui est cogné, harcelé, humilié tous les jours, 230 000 victimes de violences conjugales par an, 230 000, une femme sur cinq, harcelée au travail, qui fait la guerre à qui, qui est violent avec qui ? Je crois qu'on a à peu près la réponse.

  • Speaker #0

    Est-ce que le féminisme, ce n'est pas également une lutte contre le capitalisme ?

  • Speaker #1

    Bien sûr que si, parce que ça obéit à la même logique, c'est-à-dire que le capitalisme, c'est l'exploitation de toutes les ressources possibles pour atteindre des objectifs qui sont toujours de l'ordre de la production et de la performance. C'est une logique extrêmement masculine. Alors, je ne dis pas que tous les hommes sont dans cette logique-là, je parle du masculin, de la construction du masculin, qui est fondée sur l'écrasement de l'autre. Et si vous prenez la question des tâches ménagères, par exemple, on dit beaucoup Waouh, ça a quand même vachement avancé ! Sans déconner, moi, il n'y a pas une chronique que j'ai faite sur les tâches ménagères sans recevoir un mail de quelqu'un qui me disait Pardon, moi, j'ai débarrassé la table hier, quoi. Wow, super, super. C'est-à-dire qu'en fait, les mecs font 5 minutes de tâches ménagères, il faudrait leur faire une espèce de holà, des drapeaux, des banderoles, etc. quand nous, on fait ça tous les jours et que tout le monde trouve ça normal. Sur la question des tâches ménagères, il y a eu un progrès, c'est vrai. En 20 ans, les hommes ont consacré une minute de plus par jour aux tâches domestiques. Bravo ! N'empêche que, on est quand même toujours sur un rapport de 20-80, c'est-à-dire que c'est les femmes qui se sont tout simplement, elles ont obtenu le droit de travailler, mais elles se sont tout simplement rajoutées une deuxième journée.

  • Speaker #0

    Je suis désolé de vous couper, c'est anecdotique, est-ce que c'est pas juste l'arbre qui cache la forêt, le sujet des tâches ménagères ?

  • Speaker #1

    Alors c'est pas que anecdotique parce que ça nous alienne beaucoup, c'est-à-dire que même moi, je vais par exemple... Enfin moi j'ai un... Un compagnon, heureusement, parce que sinon il serait plus vivant, qui fait largement plus que tous les mecs que je peux croiser dans mon entourage. N'empêche que, à cause de cette putain de chasse aux mammouths, il y a une différence essentielle entre lui et moi, c'est qu'il va s'occuper de la maison une fois que son travail est fait. Moi, je vais me mettre au travail quand tout est réglé dans la maison. Et ça, ça entrave. L'écriture de ce bouquin a été super difficile parce que... Parce que j'ai deux garçons qui sont petits, et que comme je vous dis, ma priorité c'est celle-là, c'est les garçons, c'est la maison, il faut que ça tourne, etc. Je me mettais à travailler très très tard, et crever en fait. Et c'est pour ça que la plupart des autrices féministes n'ont pas d'enfants, ou sont lesbiennes, il n'y a pas de secret, c'est-à-dire que nous, les femmes hétéros, on est élevées pour prendre soin de l'autre. Donc on fera toujours passer l'autre avant. Donc la création de type artistique, littéraire, etc. Ça passe bien après. Donc non, c'est pas anecdotique. C'est vraiment du concret, en fait. Mon féminisme, à moi, il est extrêmement concret. C'est quelque chose de très incarné. Et pour en venir à la question du capitalisme, si on a pu se dégager quelques heures pour travailler, pour créer, parce qu'on va pas se mentir, c'est quand même hyper agréable de bosser. Quand on fait un boulot qui nous plaît, on apprend des choses, on rencontre des gens, on y trouve du sens, on y trouve de la reconnaissance. Enfin, je veux dire, moi, j'adore bosser. J'adore. Si j'ai pu me dégager du temps, c'est parce que j'ai délégué. Mais j'ai pas délégué à mon mec, en fait. C'est parce que j'ai des nounous. Enfin, des nounous. Une nounou, des baby-sitters, parce que j'ai une femme de ménage. Et c'est qui ? C'est des femmes beaucoup plus précaires que moi et en général des femmes racisées. Donc en fait, le capitalisme c'est ça aussi. C'est-à-dire que pour que quelques-uns s'en sortent, il faut écraser tous les autres. Donc la lutte contre le masculinisme flirte avec la lutte contre, pas forcément le capitalisme, mais en tout cas le libéralisme, parce que tout ça, ça marche ensemble. Et l'exploitation des ressources de la planète, c'est pareil. C'est-à-dire que c'est aussi pour ça que... les leaders politiques les plus féministes sont chez Europe Écologie Les Verts. Tout ça marche ensemble. C'est l'idée. Quel monde on veut ? Est-ce qu'on veut un monde pyramidal, construit sur une espèce de hiérarchie des normes, où quand on est tout en haut de la pyramide, on a le droit d'écraser tous les autres ? Ou est-ce qu'on essaye de travailler à un monde un peu plus paritaire, un peu plus divers, un peu plus ouvert ? Moi, je sais de quel côté je me trouve.

  • Speaker #0

    Est-ce que, quand on voit certaines autrices, je pense à Virginie Despentes, qui vont quelquefois annoncer que même leur sexualité change parce que c'est leur manière de lutter pour le féminisme. Quelle est votre idée là-dessus ?

  • Speaker #1

    Moi je la comprends. Il se trouve que moi je suis actuellement en couple hétéro, que j'ai toujours été en couple hétéro, que mon compagnon, j'en suis encore très amoureuse. Donc... je vais pas le quitter pour une femme par principe. Évidemment que non. Maintenant, je comprends très bien ce mouvement-là de toutes ces femmes et du lesbianisme politique, je le comprends très bien, pour plein de raisons. La première, si on se parle juste d'intimité, quand vous voyez le taux de satisfaction sexuelle des lesbiennes, franchement, il fait rêver. Et ça, pourquoi ? Parce que pendant des années, on a fait croire aux femmes que l'orgasme clitoridien était un orgasme de petite fille, que le seul qui valait, c'était l'orgasme vaginal, et ça, c'est aussi une vaste blague. C'est-à-dire que même dans notre pieu, le patriarcat s'est enfoncé pour nous faire croire que la seule sexualité valable, c'était celle qui consistait à pénétrer une chatte par une bite. Donc, ce que les nanas disent, mais Ovidie le dit très bien aussi, c'est Eh, les gars, en fait, la blague, c'est que ça se passe pas du tout comme ça ! Et le problème qu'on a aussi, c'est que si la sexualité est phallocentrée et uniquement pénétrative, alors elle commence. avec la pénétration et s'arrête avec l'éjaculation masculine. Pareil, spoiler les gars, en fait, chez nous ça ne se passe pas du tout comme ça. Donc ce malentendu au lit, soit on a l'énergie de le dissiper avec son compagnon, soit en fait on se lève et on se casse. C'est aussi simple que ça. Donc bien sûr que je le comprends et je dirais même qu'on peut l'étendre à toutes les sphères de la vie à deux parce que, encore une fois, même chez moi où globalement... ça se passe bien, il y a des petites éruptions de patriarcat chez mon mec, et il y a chez moi des moments où je me censure, je m'interdis des choses, etc. et où je me giflerais, je me dis mais merde en fait, t'as le droit, vas-y. Donc on est héritier d'une histoire. Donc forcément, elle nous rattrape, même dans les couples les plus ouverts ou les plus égalitaires, ce que vous voulez, ça nous rattrape. Je peux comprendre qu'on soit fatigué de ça, évidemment. Et c'est d'ailleurs pour ça que les féministes font peur. Parce que les féministes, en gros, ce qu'elles disent, c'est... Alors en fait, soit on change les règles du couple hétérosexuel, et effectivement vous y trouverez un peu moins votre compte, soit en fait on va se mettre en couple avec des femmes. Donc évidemment que ça ne réjouit pas grand monde, ça. Chez les mecs hétéros, je veux dire.

  • Speaker #0

    On va faire un petit vrai ou faux. Un quai-fé ou contre-vraie. Julia Foy, ce vrai ou faux. Au concours du Centre de formation des journalistes, à l'été 1998, vous avez porté un pantalon cargo, un Marcel et des tongs.

  • Speaker #1

    Oh ouais, la honte, la honte. Alors, ce qui est marrant, c'est que la secrétaire du CFJ, Michèle Martin, Michmart, si tu m'entends, elle m'en parle encore. En fait, je suis allée à ce concours en touriste, quoi. C'est la honte, c'est la honte. En fait, je prépare ce concours, je me dis... La vocation m'est venue très tard. Moi, je rendais ouf mon frère qui lui était polytechnicien. Ça vous donne une idée du personnage. Moi, je disais, en fait, mon ambition dans la vie, c'est d'être heureuse de me lever le matin. En fait, ça a l'air anodin, mais c'est la chose la plus importante qui soit. Ça veut dire être au bon endroit. Et ça, c'est parfois le combat de toute une vie. Mais comment ça allait se traduire, je ne savais pas. Moi, je voulais faire une maîtrise sur Balzac. Mon frère me disait, mais ça va servir à quoi ? Et moi, je disais, on n'est pas obligé de faire des choses utiles. Je vais le faire parce que j'ai envie de le faire. Et pendant l'année, je me suis dit, tiens, en fait, j'aime bien écrire. J'aime bien les gens. J'ai envie d'un truc où je ne suis pas enfermée dans un bureau, etc. Tiens, si je devenais journaliste. Bon, là, ce que je vais faire, j'avais un plan. Tous les plans sont faits pour être déjoués, mais mon plan, c'était, je passe une seule école, parce qu'il n'y avait pas d'anal à l'époque. Donc au moins, je sais comment ça se passe dans les écoles. Derrière, je me fais un an de stage, parce que je n'étais pas débile non plus. Je n'avais pas ouvert un journal de ma vie, et je n'avais pas posé les pieds dans une rédac de ma vie. Donc je savais que j'avais des grosses lacunes. Je me dis, je me passe une année à me préparer, et après, je passe toutes les écoles. Et en fait, de façon hallucinante, j'ai été prise à l'oral. Je n'ai même pas compris ce qui s'était passé. Et donc, je suis arrivée à l'oral en tongs et en pantalons de cargo parce que je me suis dit, de toute façon, je ne l'aurai pas. Donc, je ne vais pas faire un effort vestimentaire. Vous n'êtes pas dans l'export. Et en fait, j'ai été prise... Alors, attention, j'ai été prise sixième sur les listes d'attente et avec un sentiment d'imposture qui ne m'a pas quitté pendant dix ans. Donc après, je l'ai payée, mais alors, bien comme il faut. Mais je pense que j'ai vraiment été à la fois reçue sur un malentendu et en même temps, ce métier m'allait bien.

  • Speaker #0

    Vrai ou faux, vous avez fait votre première manif dans le ventre de votre mère.

  • Speaker #1

    Oui, ma mère, dont je parle beaucoup dans le livre, avec qui je m'engueule beaucoup sur les questions féministes, je lui dois quand même une chose, c'est que la graine de la révolte, c'est elle qui l'a plantée. Très clairement. Mon père était... J'adorais mon père, j'étais très très proche de lui. Mais mon père n'attendait pas grand-chose de l'humanité. Lui, ce qu'il aimait, c'était ses livres et ses enfants. Et pour le reste, il était un peu... Il était cherché en physique, il était un peu dans sa bulle. Ma mère, elle était convaincue que le monde, on pouvait le changer. Et qu'il fallait même tout faire pour ça. Elle avait été psy au planning familial. Elle a fait 68, elle a fait la manifestation de la rue de Charonne. Elle a toujours manifesté ma mère. Donc, je le dis ironiquement, mais pas que. Je pense que vraiment, mes premières manifs, c'était dans son ventre, très clairement.

  • Speaker #0

    Vrai ou faux, après avoir enregistré une émission de radio, vous avez faim ?

  • Speaker #1

    Oh putain, oui. Pardon. Non mais moi je suis un ventre en fait, c'est-à-dire que j'ai l'air de parler comme ça, de brasser des concepts, etc. Pas du tout. Moi, il faut me nourrir, il faut nourrir la bête, sinon je ne suis pas capable de produire quoi que ce soit. J'ai encore rien. Ne vous inquiétez pas, je vais commander après. Et effectivement, pendant une émission, en fait moi je donne tout pendant une heure, mais je suis à donf. Je suis vraiment à donf. Et du coup, quand je sors de là, ma première phrase, et l'équipe avec laquelle je travaille se marre, parce que ma première phrase c'est toujours Oh, j'ai faim ! Systématiquement, donc oui. Et par ailleurs, j'aime manger, donc... J'ai renoncé à ma taille 36 il y a bien longtemps pour pouvoir me resservir de pâtes quand j'en avais envie.

  • Speaker #0

    Que vous savez cuire à la perfection.

  • Speaker #1

    Ah bah oui, non mais parce que ça, j'ai le bon ustensile. Je vous en parlerai peut-être une autre fois, mais il faut le bon ustensile, sinon on n'y arrive pas.

  • Speaker #0

    C'est à la vapeur un truc comme ça ?

  • Speaker #1

    C'est pas un truc comme ça les pâtes. C'est pas un truc comme ça les pâtes, on dit pas c'est un truc comme ça. Ça c'est non.

  • Speaker #0

    Ça fait pour une question.

  • Speaker #1

    Ah oui, je peux devenir violente. Il y a des sujets avec lesquels je déconne pas, c'est les créoles et les pâtes. Ça c'est clair que non. En fait, il faut avoir une passoire intégrée à la casserole, ce qui fait que quand les pâtes... arrive à deux minutes de la fin de cuisson parce que la cuisson se termine dans la sauce de pâte bien évidemment tous les italiens le savent en fait vous soulevez votre passoire et vous jeter directement dans la sauce qui fait qu'il n'y a pas ce moment de passage dans l'évier où les pattes ont le temps d'être saisie par le froid et là c'est foutu je vous ai livré le point le plus important de cette interview c'est celui là

  • Speaker #0

    J'ai lu ça je ne peux pas le croire mais vrai ou faux Vous pouvez vous lever à 4h du matin pour soigner les panaries de vos amis. Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?

  • Speaker #1

    C'est un peu une vanne, mais pas que. C'est vrai que je suis, je crois, alors moins depuis que j'ai des enfants, j'ai été élevée par mes parents dans l'empathie. Je crois que l'empathie, c'est la plus grande des forces, celle de la capacité de se mettre à la place de l'autre. Et l'attention à l'autre, en fait. Le fait de pouvoir prendre soin de l'autre, c'est quelque chose qui est... que je fais aussi, je crois que je fais avec mes enfants, que je fais avec mon mec, que je fais un peu avec tout le monde, mais je ne suis pas la seule à faire ça. Mais c'est vrai que j'ai un truc, moi, ma mère était comme ça. Si une copine m'appelle parce que ça ne va pas, je déclenche le plan hors sec. C'est-à-dire que je ne lui dis pas, on s'en reparle demain. Je ne lui dis pas, oh, ça va, ce n'est pas grave. Je dis, OK, j'arrive. Alors, attends, je vais mobiliser qui ? De qui est-ce qu'on a besoin dans cette histoire ? Problème, bon, solution, bon, action. Voilà, quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit, elles savent qu'elles peuvent m'appeler, je suis là.

  • Speaker #0

    Et les pâtes à la fin.

  • Speaker #1

    Évidemment ! Non, par exemple, alors je pense à cette amie-là. La vanne est venue avec une copine à moi qui bosse à l'IB maintenant, que j'adore, qui était au CFJ avec moi. On en rigole souvent, mais il y a eu toute une période de sa vie où ça n'allait pas. Moi, j'habitais à côté de l'IB et le midi, elle venait prendre des bains chez moi. Si vous essayez de faire du bien, viens prendre un bain. Et là, on ne parlait pas, c'était une taiseuse à l'époque. Et évidemment que je respectais ça. Mais par contre, il y avait un truc de douceur à lui faire couler l'eau d'un bain bien chaud, lui mettre un peu de bain moussant, justement ne lui poser aucune question, mais qu'elle ait une demi-heure pour prendre un bain au milieu de sa journée. Et c'est avec elle que cette vanne m'est venue. Je ne sais plus qui l'a faite cette vanne du panarien à 4h du mat, mais ça vient d'elle. Ça vient de notre amitié.

  • Speaker #0

    J'ai essayé de faire ça pendant longtemps, quand j'avais des amis qui n'allaient pas bien. Je leur disais, viens prendre un bain à la maison. Mais elles me prenaient toutes pour un pervers.

  • Speaker #1

    Voilà. Valait mieux. Venant de moi, ça passait mieux.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Vrai ou faux ? Et là, on va entrer encore un peu plus dans le vif du sujet de ce livre dont je parle juste ensuite. On a un souci dans la construction du masculin.

  • Speaker #1

    Clairement. Très clairement, et il faut vite qu'on s'en débarrasse parce que c'est... Regardez, les hommes sont responsables de 85 à 95% des homicides, que ce soit les féminicides, que ce soit les accidents de la route. La plupart des 9 fois sur 10, les violences, c'est eux. Donc on a tous un souci parce que personne n'a envie de vivre dans une société qui est violente avec des morts sur la route et avec des morts dans la rue, avec ce que vous voulez. Donc, soit on se dit que c'est dans les gènes de l'homme et c'est comme ça, et on ne fait rien, soit on se dit qu'en fait, peut-être qu'il y a un truc qu'on appelle culture d'un masculin toxique ou quelque chose comme ça, et on s'y attaque. Et on essaie de comprendre ce qui, dans l'éducation qu'on fait aux garçons, autorise, voire encourage, ce genre de comportement délétère, encore une fois, pour tout le monde. Et moi, j'ai deux petits garçons, et je me rends compte que c'est... une interrogation de presque tous les jours. Ça ne veut pas dire que tous les jours, je me prends la tête à me dire comment j'en fais les mecs bien. Mais c'est quelque chose qui sous-tend très fortement l'éducation que je leur donne. Et je vous donne juste un exemple. J'ai un peu merdé parce que mon fils aîné a quatre amoureuses. Donc là, il y a un truc que j'ai dû louper sur la polygamie. Bon, je vais me rattraper. Mais donc, il a quatre amoureuses. Et en fait, l'une d'elles est toute petite et toute chétive. Et lui, c'est une espèce d'armoire à glace. Et en fait, il est dans la cour de l'école et il veut l'embrasser. Et en fait... Il l'embrasse. Et en fait, j'ai eu ce premier réflexe de maman italienne. Je me dis, ça, c'est un mec invrais. Mais je l'ai eu un quart de seconde. J'ai attrapé sa capuche, je l'ai tirée en arrière. Je lui ai dit, est-ce que tu lui as demandé si elle était d'accord, en fait ? Parce que ça commence là. Et hier, dans la rue, j'étais hyper contente parce qu'on se baladait. Après, mon fils, il me fait marrer parce qu'il draguerait un lampadaire, mais vraiment. Et on passe à côté d'une gamine. Il a peur de rien, il doute de rien. On passe à côté d'une gamine. Il regarde, il fait, je peux te faire un bisou ? Et bon, elle a dit non, et du coup, il n'a pas fait de bisous. J'ai dit, bon, voilà, ça, c'est gagné, c'est acté. Et ça passe par là. Et il faut absolument le faire, parce qu'on ne peut pas pleurer sur le nombre de féminicides qu'on a en France et qui n'est franchement pas... On n'a pas de quoi être fiers, très clairement. Et en même temps, ne pas se poser la question de comment tout ça arrive. Et tout ça arrive à cause de l'éducation des garçons.

  • Speaker #0

    Comment il est né ce livre, ce que le féminisme m'a fait, que vous venez de sortir chez Flammarion, et qui est une sorte de suite, de réponse au précédent livre, Je suis une sur deux ?

  • Speaker #1

    Alors, Je suis une sur deux, c'est 20 ans de gestation, c'est l'envie de raconter cette histoire, le viol mais aussi l'acquittement, il y a eu procès dans mon cas. C'est quelque chose de... Je dirais la démarche, elle est presque solennelle en fait. Ce que le féminisme m'a fait est né d'un fou rire dans ma cuisine où en fait c'était un jour... En fait c'était une journée de merde, vous savez, mais pas une journée de merde grave, mais que des trucs qui vont pas en fait. Ça marche pas, y'a rien qui marche. Moi y'a des moments où je rends l'antenne en fait, j'ai dit bon ok elle me saoule cette journée, je me cale sur mon fauteuil et puis je me mets comme tout le monde à scroller et là je tombe sur une vidéo sur Twitter où une nana qui a une trentaine d'années... dit Moi, quand je suis rentrée en féminisme, rien que l'expression m'a fait halluciner, comme si on rentrait dans les ordres, j'y ai vu une promesse de bonheur. Alors j'ai fait tout ce qu'elles m'ont demandé de faire. Je me suis même, j'ai même arrêté de me maquiller puisqu'elles interdisent de se maquiller. Vous pouvez me regarder, vous voyez comme c'est vrai. J'ai arrêté de me maquiller alors que j'adore ça. Et aujourd'hui, j'ai 30 ans, j'ai pas de mec et j'ai pas d'enfant et j'ai raté ma vie. Et en fait, j'explose de rire. Puis après, je me dis Putain, mais... Ça veut dire qu'en 2024, une nana qui a 30 ans, qui n'a pas de mec, qui n'a pas d'enfant, croit encore qu'elle a raté sa vie, si elle n'existe pas par elle-même en fait. C'est-à-dire que les femmes, on considère qu'on existe parce qu'on est femme de ou mère de, et tout à coup, elle toute seule, elle n'existe pas. Je me suis dit qu'est-ce qu'on a raté ? et juste après, je me suis dit mais moi, il m'a fait quoi le féminisme ? Il m'a fait quoi ? Et ça m'a travaillé toute la journée. La première réponse, c'était il m'a fait du bien Et je me suis dit que si je voulais en faire un livre, il fallait que je développe un peu plus.

  • Speaker #0

    C'est un peu... Il y a écrit dans ce livre, une femme sans homme, c'est comme un poisson sans bicyclette.

  • Speaker #1

    J'adore celle-là.

  • Speaker #0

    Vous l'avez trouvée où ?

  • Speaker #1

    Alors, on dit que c'est Gloria Steinem qui l'a dit. Mais elle-même disait qu'elle l'avait empruntée à quelqu'un d'autre. Donc on ne sait pas. Mais en tout cas, c'est une phrase féministe assez connue.

  • Speaker #0

    C'est du socialisme.

  • Speaker #1

    Et elle est géniale cette phrase. Parce qu'en fait, il y a cette espèce d'idée que nous n'existerions jamais pour nous-mêmes. Vous pouvez faire un essai. Vous pouvez regarder dans l'espace public, une femme assise sur un banc, ça n'existe pas. Pourquoi ? Parce que c'est très bien qu'un mec va s'asseoir assez rapidement. Parce qu'une femme ne peut pas être seule. Une femme est forcément dans la tente de quelque chose et préférablement d'un homme. Là où des mecs seuls à des terrasses de café ou sur des bancs, vous en avez plein. Nous on n'a pas d'existence autre que dédiée à l'autre. Je veux dire, jusqu'au code Napoléon où il était écrit qu'on passait de la tutelle d'un père, celle d'un mari, on a mis des décennies à s'en affranchir mais évidemment il reste encore quelque chose. Donc nous on nous colle un poupon dans les bras quand on a, allez, deux heures et demie de vie et on comprend très vite qu'il va d'abord falloir prendre soin de l'autre avant d'exister par soi-même. Et ça, le féminisme vous apprend ça et vous apprend à vous... détachée de ça et à vous couper petit à petit toutes vos chaînes et à exister pour vous-même. Ça ne veut pas dire égoïstement, ça veut dire comme les mecs le font pour eux-mêmes.

  • Speaker #0

    Et une femme seule, souvent dans les cafés, en tout cas au début du XXe, c'était une prostituée.

  • Speaker #1

    Ouais, et puis même maintenant, vous le voyez assez peu. Moi, je vais dans un café seule quand j'ai quelque chose à faire. Je prends un ordi. J'ai quelque chose à faire.

  • Speaker #0

    Il y a un motif.

  • Speaker #1

    Ouais. Alors que des mecs qui squattent l'espace public tout seuls, il y en a plein ! Alors en général ils ont beaucoup moins de choses à faire parce qu'on revient aux tâches ménagères. Ils n'ont pas cette to-do list mentale dont on raye chaque item, mais vite, vite, vite, il y a un nouvel item qui vient se rajouter. Donc ils ont quand même beaucoup plus de temps pour eux. Et ça c'est pas mon délire féministe, je veux dire, toutes les études le disent, ils ont du temps pour eux. Et l'espace public leur appartient. Il y a un test à faire qui est hyper marrant, que je recommande à tout le monde, enfin qui est marrant mais... Que je recommande aux nanas mais pas de le faire trop trop longtemps parce que ça fait mal. En fait... Les trottoirs sont petits, notamment à Paris, mais aussi parce que l'espace public a été pensé pour des hommes et par des hommes. Les urbanistes ont longtemps été des mecs, donc les trottoirs sont tout petits, donc avec les poussettes, on peut toujours courir pour passer. Mais ça provoque aussi autre chose, c'est que quand vous vous baladez dans la rue, s'il y a un mec et une nana qui marchent l'un vers l'autre, vous regarderez, si la femme ne s'écarte pas, il se rende dedans, parce que le mec jamais ne fera un pas de côté. Jamais. L'espace public est à lui. Regardez, il pisse, il crache. Qui fait ça ? Chez les gonzesses. À part une nana qui serait totalement marginalisée, ça n'arrive pas. Vous ne voyez pas une nana soulever sa jupe et se mettre à pisser par terre ou même à cracher ? Les mecs, si. Encore une fois, je ne dis pas que tous les mecs le font. Je dis que par contre, quand il y a un crachat par terre, ça vient d'un mec et pas d'une nana. Pourquoi ? Parce que l'espace public lui appartient. Pas à nous. Enfin, lui appartenait.

  • Speaker #0

    Comment elle s'est faite l'écriture du livre ? J'entends, vous aviez dit tout à l'heure que c'était difficile. Oui. que c'était dans le peu de temps qu'il vous restait pour cela.

  • Speaker #1

    Ça s'est fait avec des sacs de sable devant la porte. Virginia Woolf a écrit ce livre incroyable sur une chambre à soi et elle dit que pour pouvoir créer, produire et donc exister par elle-même et pour elle-même, une femme doit impérativement avoir une chambre à soi, c'est-à-dire un espace à elle, très clairement. Moi, j'ai longtemps voulu avoir un studio ici pour pouvoir bosser.

  • Speaker #0

    Une cuir sonnière ?

  • Speaker #1

    Voilà, vous avez exactement le même réflexe que mon mec C'est fou, c'est fou C'est-à-dire que cet espace-là, il faudrait qu'il soit peuplé par un homme Je ne peux pas l'occuper seule Il faut que je sois en attente d'un mec qui arriverait J'ai utilisé ce mot-là à la dessin Ouais, mais n'empêche que le réflexe, il est là C'est-à-dire que mon mec, tout de suite, au début, croyait vraiment que je voulais recevoir des amants L'idée qu'une femme puisse être bien avec elle-même Et aimer passer du temps seule sans avoir à s'occuper des autres Putain, mais ça c'est une idée qui est toujours... pas rentrer quoi moi je voulais juste un bureau pour moi pourquoi parce que si mon bureau il est dans l'espace commun évidemment que toutes les quarts de seconde je vais être rappelé et pire éduqué comme je l'étais comme toutes les femmes de ma génération je vais même devancé les cris et les appels donc attention on dit beaucoup si les femmes sont écrasés par les tâches domestiques c'est qu'elles savent pas délégués non non non par ailleurs On a du mal à déléguer, mais dans un second temps, à un moment donné, si on veut s'attaquer aux violences masculines et à la construction du masculin, il va falloir nommer les choses et désigner les premiers responsables. Les premiers responsables, c'est quand même, pardon, la plupart des mecs à la maison, ils n'en branlent pas une. Et que ça leur va très bien comme ça.

  • Speaker #0

    Oui, mais on offre des fleurs.

  • Speaker #1

    Voilà, le 8 mars. Vous savez qu'en Italie, on offre des fleurs aux mères, le 8 mars. Moi, je te les ferais bouffer par les narines, les bouquets de mimosa, là. Moi, je voulais donc un bureau. Je ne l'ai pas pour faute de moyens et de tout ça. Donc, je bosse chez moi. Mais effectivement, comme je vous ai dit, je dois régler d'abord tout le domestique avant de me sentir autorisée. Alors, il y a une part de moi qui devrait me sentir autorisée. Bien sûr. Puis il y a le monde autour qui m'explique quand même que mon rôle premier, c'est d'être mère. Ça me va, j'adore être mère. Mais je vous donne un exemple. Il y a un espace commun, le salon. Il y a dans cet espace commun, deux adultes, deux enfants. Il y a un adulte qui est en train de bouquiner sur le canapé. Il y a l'autre adulte qui a quatre pattes en train de ramasser des Legos sous le meuble de la télé. À votre avis, qui fait quoi ? En toute honnêteté.

  • Speaker #0

    On le lit dans votre livre.

  • Speaker #1

    Ouais, mais parce que c'est vrai. Parce que c'est vrai. C'est-à-dire que... je ne m'autorise pas à prendre cette peau sur le canapé si mes gamins sont dans la pièce je vais être avec eux je vais pas le prendre cet espace pour moi mais pourquoi pas juste parce que je suis débile et que je me charge d'un truc que j'aurais pas à faire il ya un monde autour de moi il ya une culture et elle est millénaire et elle me dit quoi elle me dit que si moi je prends cinq minutes pour moi je suis une mauvaise mère alors que si mon mec prend cinq minutes pour jouer avec les enfants c'est un héros donc lui il a tout intérêt à le faire que moi c'est un peu plus compliqué Donc j'ai le choix et en même temps je ne l'ai pas. Donc la seule solution en réalité c'est effectivement d'avoir une chambre à soi, d'avoir un espace à soi et d'être dans un espace temps où vous êtes seul. Le problème c'est que cet espace temps il est difficile à se créer et à maintenir. D'où les sacs de sable devant la porte parce que vraiment il faut des défenses mais autour de vous même aussi. C'est à dire de vous interdire de sortir de votre bureau. Non tout va bien les gamins ils vont se gérer. il n'y a pas de problème. Mais aussi pour les autres, de dire non, vous ne venez pas me demander, par exemple, toi, tu ne me demandes pas où est ton doudou et tu le cherches, mais toi, mec, tu ne me demandes pas où sont les clés de la bagnole et tu les cherches, en fait.

  • Speaker #0

    J'avais entendu Bégaudeau dire qu'écrire, c'était un loisir bourgeois. C'est aussi pour cela que c'était parce qu'il fallait consacrer beaucoup de temps à cela pour créer quelque chose, créer du roman et que finalement... dans les textes courts où c'était plus simple quand on avait peu de temps à faire cela. Et vous, on voit que dans ce livre, il y a des petits textes courts qui viennent ponctuer finalement la narration du fil de ce récit qui n'est pas un roman, qui est vraiment un récit. Et donc, il y a ce personnage, votre mère, qui revient régulièrement. Ce qui est intéressant, c'est de se dire finalement, la place de la mère, souvent, il y a des auteurs qui vont... taper gentiment sur leur mère. Mais est-ce que c'est parce qu'elle est plus impliquée dans l'éducation des enfants, en général ?

  • Speaker #1

    C'est-à-dire que les mères, on porte le bob, quoi qu'il arrive, on porte le chapeau. C'est-à-dire que quoi qu'il arrive, ça va être de notre faute, mais aussi parce qu'on est en première ligne, parce que le lien avec l'enfant est organique, parce que c'est le tout premier lien, et parce que c'est bien pratique, parce que du coup, tout le monde a pu dire qu'en gros, quand ça déconnait, c'était que la mère était responsable. Donc oui, elle a cette place de premier plan. qui n'est pas forcément un cadeau. Et puis, ce qui est marrant, c'est qu'on vit dans une société où, en gros, quand tout va bien, la mère va devoir tout, globalement, s'occuper, encore une fois, répartition des tâches domestiques, mais même si vous prenez les premiers mois d'un bébé. La nuit, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais les mecs sont frappés d'une espèce de surdité nocturne que la médecine n'explique pas. Et qui fait que, hop, il écrit le bébé. Ils ne les ont pas entendus, dis donc ! Nous, on les entend, parce qu'on n'a pas le choix. Parce qu'on a été élevés comme ça. Parce qu'encore une fois, un père qui ne se lève pas, c'est normal, il est fatigué, il a du travail. Une mère qui ne se lève pas, eh oh, t'es en congé mat ! Sachant que dans cette formule de congé maternité, il y a quand même un truc qui ne va pas. Il faut avoir vécu en tête à tête avec un bébé pendant deux mois pour comprendre que même la formule, c'est du foutage de gueule, en fait. On aura ce problème-là, de place des uns et des autres dans l'éducation des enfants, tant qu'on n'aura pas de congé paternité équivalent. pour les deux, de congés maternités et de congés paternités qui soient équivalents. Pour l'instant, on n'y est pas. Donc pour l'instant, c'est la mère qui est en première ligne. Le congé maternité, c'est le moment où se prennent tous les plis. Exemple à la con, mais c'est elle qui commence à l'emmener chez le pédiatre. Donc c'est elle qui va continuer. Parce qu'elle a l'adresse, parce qu'elle a les codes, parce qu'elle connaît le tout-bib. Donc tout est plus simple. Donc les plis se prennent là. C'est ça absolument qu'il faut pouvoir réformer pour que, dès le départ, on ait une égalité femmes-hommes sur cette question-là. pour la joie de la parentalité comme pour le merdier de la parentalité. Parce que l'énorme arnaque, elle est là. De toute façon, on se fait bananer quoi qu'il arrive, sauf quand on devient féministe et quand on se dit que ce monde là, on va le changer. En gros, c'est la mère qui taffe au début. Mais par contre, on va lui expliquer que le père est tout puissant. Le père tout puissant, il se barre dès qu'il y a un handicap, dès qu'il y a une maladie, dès qu'il y a des trucs qui se mettent à déconner. Mais par contre, On l'a entendu au moment du mariage pour tous, un papa, une maman, on ne ment pas aux enfants, blablabla. Il fallait que le père soit présent. Par contre, la nuit, ce n'est pas la peine que le père soit présent. Donc, il l'est symboliquement, il est dans la loi. On a un mal fou, par exemple, à retirer l'autorité parentale à un père violent. Un mal fou, parce qu'il est le père et que cette loi, quoi qu'il arrive, est inattaquable. Je vous donne un exemple. Mon mec, moi j'ai fait mon premier enfant, il est issu d'une PMA. Donc, je l'ai fait toute seule. Puis, il se trouve que j'ai rencontré mon mec, que mon mec et mon fils se sont choisis, aimés. Et qu'à un moment donné, on s'est dit, bon... Il faudrait peut-être régulariser tout ça parce que si il m'arrive un truc, mon mec n'est rien pour Isaac, alors que dans la vie de tous les jours, il est beaucoup de choses pour Isaac, il est son père. Et bien en France, quel que soit... Ça peut avoir lieu, mais sept ans après la naissance, en l'occurrence c'était sept ans après la naissance, Franck n'avait qu'à aller en mairie et dire je suis son père. Ah ok, très bien, vous signez là. C'est-à-dire que la mère n'existe pas symboliquement, la mère n'existe pas, elle est là. Pour changer les couches, elle est là pour récupérer les gosses à l'école en urgence quand ils ont 38. Mais par contre, n'importe quel mec peut se présenter dans n'importe quelle mairie pour dire je suis le père et la mère n'a pas son mot à dire. Rien. Donc on a peut-être un petit souci là aussi.

  • Speaker #0

    Je vais revenir sur le sujet de votre mère, si ça ne vous embête pas. Et elle l'a pris comment finalement, la lecture du livre ?

  • Speaker #1

    Ma mère, elle est folle, donc ma mère, elle a adoré. En fait, ma mère, elle est... Elle est une espèce de déni très protecteur de tout. Et en fait, elle était hyper contente que je parle d'elle. Donc, salut à la vidéo. Salut à la vidéo. Très bien. Moi, j'ai flippé parce que je me suis dit, comment elle va prendre les choses ? Après, en leur lisant, je trouve qu'avec le recul, je trouve qu'on sent aussi l'amour que j'ai pour elle. Et il est profond, l'amour-là. L'admiration. Oui, l'admiration aussi. Je lui dédie quand même ce livre. Mais maintenant, je pense que quand... Qui aime bien s'engueule bien. Et on est au moins dans une famille où on se dit les choses. Et oui, les portes claquent, mais cinq minutes après, on se dit je t'aime, donc ça va.

  • Speaker #0

    C'est une comédie italienne ?

  • Speaker #1

    L'enfer, mais l'enfer ! On est séfarades d'un côté, italiens de l'autre. Donc tout ce qui est nuance et modération, c'est pas nous. Très clairement. Tout ce qui est calme et... Non, ça n'existe pas. Il y a un niveau de décibels moyen qui est assez élevé. Il y a un niveau de bordel, ouais, qui est assez élevé, mais c'est joyeux.

  • Speaker #0

    On va finir l'émission. On est dans un café, on est ici au One Feed, dans le Jays North Ham, arrondissement. Et je vais vous poser trois questions sur l'univers du café. Une question qui va être d'abord un peu sur, justement, le café, parce que je vois que vous buvez du café. Est-ce que, d'après vous, un expresso contient beaucoup plus de caféine qu'un allongé ?

  • Speaker #1

    J'en ai pas la moindre idée, mais j'ai un truc. En fait, je suis un peu... Je suis un peu bizarre sur les questions d'hygiène de vie. Vraiment, je suis très étrange parce que je fais 5 heures de sport par semaine, ça, il n'y a pas de problème. Là,

  • Speaker #0

    vous avez le café et la clope.

  • Speaker #1

    Café, clope. Et je sais, dans un coin de ma tête, j'ai vaguement l'idée que ce n'est pas hyper bon pour la santé. Mais je crois que pour l'instant, je m'en contrecogne. Je ne devrais pas. Vraiment, je ne devrais pas si je veux survivre. Mais peut-être que je me crois un peu immortelle, en fait. Mais donc, non, je ne sais pas. Est-ce que vous avez la réponse, vous ?

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr, j'ai la réponse.

  • Speaker #1

    Il y a plus de caféine où ?

  • Speaker #0

    La caféine se diffuse dans les américanos.

  • Speaker #1

    Donc il y en a plus. Je savais que c'était dégueulasse. En fait, ce qu'il faut, c'est des cafés serrés. Voilà, point à l'italienne. Terminé. Question pliée.

  • Speaker #0

    J'ai deux autres questions. J'ai essayé vraiment de trouver comment on pouvait allier féminisme et bistrot, café. Qu'est-ce que... Qu'est-ce que la grève du vin en 1933 ?

  • Speaker #1

    La grève du vin ?

  • Speaker #0

    Oui, la grève du vin.

  • Speaker #1

    C'est quoi ? Vous ne savez pas ? Ben non.

  • Speaker #0

    C'est génial. La grève du vin... en 1933, était une action de protestation menée par le mouvement féministe français, la française, à Vente-Pas, pour réclamer le droit de vote des femmes. Les femmes ont été invitées à ne pas acheter de vin pendant une semaine du 26 mars au 2 avril. Parce qu'en fait, le vin, c'était un véritable moteur économique en France à cette époque. On est dans les années 30. Et ça n'a pas eu un effet immédiat. Mais c'est vrai que les femmes ont obtenu le droit de vote en 44, à partir de la guerre.

  • Speaker #1

    Moi, je trouve que les féministes, déjà, elles ont le don pour rendre notre vie plus joyeuse, plus piquante et plus bordélique, mis à part le fait qu'elles ont un vrai projet politique et une vraie utopie politique qui est foutument intéressante et à laquelle on gagnerait tous à s'intéresser. Mais elles ont aussi ce sens de l'action collective et ça, je les trouve assez géniales pour ça. Déjà, elles sont drôles. Vous citiez tout à l'heure le slogan de Gloria Steinem, mais je pourrais vous en citer plein d'autres. En fait, les slogans féministes sont très, très drôles. Elles ont la créativité de toutes celles et de tous ceux avec qui on met les bâtons dans les roues. Donc, en fait, elles sont assez géniales en drôlerie. Quand vous regardez les mouvements... Ce qu'ils ont pu produire comme action et comme slogan, c'est très très drôle. Et je pense qu'il serait temps de ressonger à ce type de mouvement-là. Si je vous dis grève des femmes le 8 mars prochain, c'est une possibilité à laquelle il faudrait peut-être toutes et tous commencer à réfléchir. Et je parle très sérieusement. C'est-à-dire que là, au moment où je vous parle, je vous le dis, peut-être, peut-être.

  • Speaker #0

    De faire grève.

  • Speaker #1

    Peut-être qu'il y aura une grève des femmes le 8 mars. Peut-être.

  • Speaker #0

    D'ailleurs, grève, je vais sur ma dernière question. Qu'est-ce que le bistrot de la grève ?

  • Speaker #1

    C'est quoi ? Je ne sais pas moi.

  • Speaker #0

    Génial.

  • Speaker #1

    Moi je vous écoute.

  • Speaker #0

    C'était une émission de radio pirate diffusée pendant la grève historique des techniciens et des producteurs de la maison de la radio.

  • Speaker #1

    Non, non, non, ils ne font jamais grève, ce n'est pas vrai. Non, il n'y a pas de mouvement.

  • Speaker #0

    Dans les années 60. Animé par le journaliste et écrivain François Cavana. L'émission était diffusée tous les soirs en direct des studios occupés, c'est une sorte de talk show improvisé, où les grévistes, leur soutien, venaient diffuser, discuter, échanger des idées et boire un verre, ce qui se faisait peu à l'époque, de dire ouais vraiment à l'antenne.

  • Speaker #1

    Ah c'est bien non ? J'adore l'idée.

  • Speaker #0

    Et ça a fait avancer la cause des grévistes.

  • Speaker #1

    Et bien avec la grève qui se profile, avec cette histoire de fusion, peut-être qu'on devrait reproduire ça, peut-être qu'on devrait le faire aussi, squatter les studios et faire l'émission.

  • Speaker #0

    Une émission pirate !

  • Speaker #1

    Exactement, je vais le suggérer au comité de grève de Radio France. Non, sans déconner, s'ils continuent avec ce projet de fusion, c'est ce qu'ils vont se prendre dans les dents et ils le savent. Donc, préparez-vous à entendre.

  • Speaker #0

    Aimerait davantage.

  • Speaker #1

    Non, mais alors, pour le coup, sur cette grève-là, sur le mouvement de protestation, sur la fusion, les auditeurs sont avec nous. Les auditeurs et les auditrices sont clairement avec nous. Je crois qu'ils sont prêts à se prendre des semaines de playlist pour que cette fusion n'ait pas lieu, parce qu'elle est un non-sens complet, justifié par bien. C'est encore une preuve d'incompétence notoire de ceux qui nous gouvernent. Et moi, je suis affligée par sept ans de politique confiée à des incompétents qui ne connaissent pas leur dossier. Mais vraiment pas. Ils ne bossent pas. Ils ne bossent pas parce qu'en italien, on dit qu'ils ont la puzzalnazza, la puanteur au nez. C'est-à-dire qu'ils sont des espèces d'arrogance de ces gens qui pensent avoir tout pigé. Alors qu'en fait, ils n'ont même pas le début. d'une compréhension du monde qui soit à peu près juste et honnête. Donc comme je le dis souvent, on n'a pas le cul sorti des ronces, mais on s'y attaque.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup Julia Foyce.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

  • Speaker #0

    On va prendre un café au comptoir. Je rappelle le titre de votre dernier livre, un récit, Ce que le féminisme m'a fait chez Flammarion.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Vous avez écouté un café au comptoir. Petit mot habituel de chaque fin de podcast, allez sur Apple Podcast, mettez 5 étoiles, c'est encore mieux. Et puis surtout, laissez-nous un petit mot. pour expliquer comment c'était bien ce podcast, comment vous l'avez aimé. Vous mettez n'importe quel pseudo, on s'en fout. En tout cas, ça nous offre de la visibilité. Allez partager ce podcast avec vos amis, vos collègues, votre famille, qui vous voulez. En tout cas, merci d'être ici et à très, très, très, très bientôt pour un nouveau café.

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Description

J'ai eu la chance d'interviewer la journaliste féministe Giulia Foïs au café Wanted Paris 46Bis Rue de Meaux, 75019 Paris


Mon invitée du jour est journaliste, productrice de radio, chroniqueuse et… féministe.

 

Et en plus ce  n'est même pas un gros mot.

 

Moi je suis super content de l’accueillir parce que sa voix a rythmé un bon nombre  de mes réveils quand elle officiait dans les matinales de France Inter, une époque où je ne connaissais pas vraiment le mot que j'ai cité un peu plus haut , celui de… féministe.

 

Vous trouvez que j’insiste ? Attendez un peu pour juger ...Ainsi mon invitée a tenu pendant quelques années une chronique dans  le magazine Marie Claire, une chronique appelée… FÉMINISTE TA MÈRE.

 

Si vous pensez qu’on parle trop du féminisme, peut-être allez  vous devoir changer de podcast, parce que le sujet le plus souvent traité par la personne que je reçois est celui du .. féminisme 

 

Dans Allo Giulia pour le magazine ELLE, cette spécialiste des questions de genre s’est attaquée à celles que se sont posées  les femmes de la génération Me Too et pas seulement les femmes  d’ailleurs mais toujours sous un angle… féministe.

 

Parfois quand elle se présente, elle se décrit comme vivante, survivante et supervivante. Pourquoi ?  On trouvera peut être la réponse dans les  deux livres dans lesquels elle a raconté ce que  c'est que de vivre le patricarcat dans sa propre chair, en deux mots, et sans tergiverser, le viol. 



Féministe donc, solidaire du mouvement metoo elle se lève, engage le combat, celui d’une lutte nécessaire pour une société plus juste et pour cela elle prend la parole. D’ailleurs selon elle « la parole est la seule arme qu’elle ait ». Et croyez-moi, elle sait s'en servir et viser juste. Du reste Vous l'avouerai je  , j’ai même un peu peur de l’interviewer tant son expérience en la matière est impressionnante mais surtout tant son engagement féministe me fait sentir merdeux. Oui merdeux comme quelqu’un qui a un jour merdé, par  un geste, une parole, une réflexion ou une blague sexiste qu'il aurait adressé à une personne du genre féminin sans même en percevoir la dimension problématique, ce qui est presque plus grave. Heureusement, dans son dernier ouvrage ce que le féminisme m’a fait »  qui vient compléter le précédent intitulé « je suis une sur deux » - j’y ai lu que les hommes ont leur place dans les combats pour une société égalitaire. De plus, en interview elle dit que les mecs ont le devoir de  s’engager davantage… pour eux-mêmes !

 

Alors je vais essayer d’être à la hauteur de l’être humain que je veux être et partir à la rencontre de celle qui se présente parfois avec humour comme « Journaliste – Société, intimité, féminité, virilité, liberté, égalité, sexualité, et plein d'autres trucs en ité. Sauf Nativité »

 

bonne écoute !


Emission présenté par Alexis Himeros

https://instagram.com/alexishimeros


Avec Giulia Foïs

https://www.instagram.com/giuliafois75



merci au Wanted Paris
https://www.facebook.com/WantedParisHalleSecretan/
https://www.instagram.com/wanted_paris/



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, je suis Alexis Iméros et vous écoutez Un Café au Comptoir.

  • Speaker #1

    Un café au comptoir. Un café au comptoir.

  • Speaker #0

    Mon invité du jour est journaliste, productrice de radio, chroniqueuse et féministe. Et en plus... Ce n'est même pas un gros mot. Moi, je suis super content de l'accueillir parce que sa voix a rythmé un bon nombre de mes réveils quand elle officiait dans les matinales de France Inter, une époque où je ne connaissais pas vraiment le mot que j'ai cité un peu plus haut, celui de féministe. Vous trouvez que j'insiste ? Attendez pour juger. Ainsi, mon invité a tenu pendant quelques années une chronique dans le magazine Marie-Claire, une chronique appelée Féministe, ta mère. Si vous pensez qu'on parle trop du féminisme, peut-être que vous allez devoir changer de podcast, parce que le sujet le plus souvent traité par la personne que je reçois est celui du... féminisme. Dans Allô Julia, pour le magazine Elle, cette spécialiste des questions de genre s'est attaquée à celles que se sont posées les femmes de la génération MeToo, et pas seulement les femmes d'ailleurs, mais toujours sous un angle féministe. Parfois quand elle se présente, elle se décrit comme vivante, survivante et supervivante. Pourquoi ? On trouvera peut-être la réponse dans les deux livres dans lesquels elle a raconté ce que c'est de vivre le patriarcat dans sa propre chair, en deux mots et sans tergiverser le viol. Féministe donc, solidaire du mouvement MeToo, elle se lève, engage le combat, celui d'une lutte nécessaire pour une société plus juste, et pour cela elle prend la parole. D'ailleurs, selon elle, la parole est la seule arme qu'elle ait, et croyez-moi, elle sait s'en servir et viser juste. Du reste, vous l'avouerez, j'ai même un peu peur de l'interviewer, tant son expérience en la matière est impressionnante, mais surtout tant son engagement féministe me fait sentir merdeux. Oui. Merdeux, comme quelqu'un qui a un jour merdé par un geste, une parole, une réflexion ou une blague sexiste qu'il aurait adressé à une personne du genre féminin, sans même en percevoir la dimension problématique, ce qui est presque plus grave. Heureusement, dans son dernier ouvrage, Ce que le féminisme m'a fait qui vient compléter le précédent intitulé Je suis une sur deux j'y ai lu que les hommes ont leur place dans les combats pour une société égalitaire. Et de plus, en interview, elle dit que les mecs ont le devoir de s'engager davantage pour eux-mêmes. Alors, je vais tenter d'être... À la hauteur de l'être humain que je veux être et partir à la rencontre de celles qui se présentent parfois avec humour. Comme journaliste, société, intimité, féminité, virilité, liberté, égalité, sexualité, plein de trucs en IT sauf nativité. Nous sommes donc à Paris dans le 19e arrondissement au café Wanted. Et je vais prendre avec elle un café au comptoir. Bonjour Julia Foyce.

  • Speaker #1

    Mais bonjour !

  • Speaker #0

    À la page 111 de votre livre, il est écrit à chaque proposition d'interview, je dis oui. Je n'ai pas toujours envie, mais je le fais. dont acte, parce que vous êtes ici. Qu'est-ce qui fait qu'en 2024, à l'heure où le mot féministe est dans toutes les conversations, est dans toute la société, omniprésent dans la communication, dans la publicité, on peut vraiment penser, malgré tout, que la parole féministe, elle est toujours en sursis.

  • Speaker #1

    Moi, c'est un mot que j'adore. J'entendais votre portrait, je l'ai trouvé... Très chouette d'ailleurs et je vous en remercie. Merci à vous. Quand je dis que je dis toujours oui aux interviews, mais que j'y vais parfois à reculons, c'est quand je sais que la parole que je vais devoir prendre va être sur un sujet qui ne correspond pas au meilleur chapitre de mon histoire, qui est ce viol. Moi, j'aurais envie évidemment de parler d'autre chose. J'aurais envie de parler de mes fils que j'adore. J'aurais envie de parler de la cuisson des pâtes que je maîtrise à la perfection. Et en même temps... Et évidemment qu'on m'interroge aussi là-dessus. Et évidemment que c'est nécessaire parce que sur le sujet, on a une seule arme, en fait, c'est la parole. Donc j'y vais. J'y vais, mais à chaque fois, je me dis, putain, le jour où on m'interrogera sur autre chose, c'est qu'on aura gagné. Ce jour-là n'est pas encore arrivé parce qu'effectivement, les droits des femmes sont loin d'être acquis. On le voit, on voit ce qui se passe sur l'IVG et sur la contraception aux Etats-Unis. On a vu ce qui s'est passé en Pologne, de tous les côtés. s'est attaquée. C'est de Beauvoir qui disait qu'il fallait rester vigilante une vie durant et elle a raison. C'est-à-dire qu'on fait face, on a... Allez, si on prend le combat des suffragettes, on a un siècle et demi de féminisme face à des millénaires de patriarcat. On est entravés, empêchés, de tous les côtés écrasés par une charge mentale, émotionnelle, domestique, affective qui fait que le rapport de force est toujours aussi déséquilibré et pourtant on va au combat. Pourtant on va au front parce qu'on est convaincus et je suis convaincue que le projet que l'on... porte et celui d'une société qui sera meilleure pour toutes et pour tous. Donc on y va, mais en ayant conscience, c'est drôle ce combat parce qu'on y met toutes nos forces, j'y mets toutes les miennes, en sachant très bien que je ne serai peut-être pas de ce monde, le jour où on aura gagné. Je sais qu'on gagnera, je sais que le sens de l'histoire est celui-là, mais je ne sais même pas si je serai là pour le voir. Et en attendant, je sais que, comme toutes les féministes, j'aurais pris des sauts de merde sur la gueule. Donc, pour y aller, dans ce combat, il faut avoir un moteur archi-puissant.

  • Speaker #0

    J'ai lu également dans votre livre que dans 286 ans, on aura atteint l'égalité homme-femme, source de l'ONU. C'est un petit bout de temps.

  • Speaker #1

    Je vous dis, je ne sais même pas si je serai là pour le voir. Quand je dis que le sens de l'histoire est le nôtre, en fait, il faut se représenter les choses d'un point de vue macro. Si vous partez de la Révolution française, où on a promis l'abolition des privilèges, l'instauration d'une démocratie, comment dire, ce combat a porté ses fruits pour la moitié de la population. Et puis un jour, on a écrit suffrage universel, parce que ça y est, les citoyens avaient le droit de voter, mais je dis bien les citoyens, pas les citoyennes, parce qu'en fait, ça s'est appelé suffrage universel masculin. Donc cette énorme mascarade a fonctionné pendant trois siècles. où on a pu se raconter que l'universel, c'était le masculin. Le féminisme, c'est quoi ? C'est la deuxième moitié de cette révolution, c'est le parachèvement de cette révolution, et c'est l'abolition de tous les privilèges. Et donc aussi des privilèges masculins, pour qu'enfin on jouisse d'une égalité parfaite en droit. Je ne parle pas d'une indifférenciation des genres, je parle d'une égalité en droit, forcée de constater qu'on n'y est pas, malheureusement pas du tout. Est-ce que... Est-ce que l'ampleur du chantier me désespère parfois, mais pas souvent ? Est-ce que la perspective de ne pas être là le jour où on aura gagné me décourage ? Non. Non, je crois que je ne serais pas moi aujourd'hui si je n'étais pas féministe et si je n'étais pas dans ce combat-là. C'est un combat qui vous donne une colonne vertébrale et qui donne du sens aux choses que vous faites, donc c'est quand même pas mal.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'on dit aux hommes qui ont un sentiment ? de déclassement. Je souris parce que j'ai vu votre grimace et qu'on fait une émission en audio qui ont ce sentiment de déclassement et qui s'engagent dans des luttes, à mon sens, totalement incompréhensibles. Je pense aux masculinistes.

  • Speaker #1

    Je trouve qu'ils ont le mérite de montrer sans aucune contestation possible la raison pour laquelle on doit se bagarrer, la raison pour laquelle il faut être féministe. Donc ils ont au moins ce mérite-là, c'est qu'ils sortent du bois et qu'on voit très bien qui on a en face. Qu'ils maximalisent une résistance que l'on trouve en revanche partout, à des degrés moindres, heureusement, mais partout. C'est Virginia Woolf qui disait que la résistance au féminisme est au moins aussi intéressante à étudier que le féminisme lui-même. Quand vous voyez les réactions outrées, la colère, déclenchée par des déclarations de Sandrine Rousseau sur la côte de bœuf. On se parle d'une côte de bœuf.

  • Speaker #0

    Le barbecue,

  • Speaker #1

    c'est ça ? Ça les a rendus fous. Donc là, on se dit, ok, en fait, on a touché un nerf. Il y a quelque chose qui s'est passé là. Et effectivement, sur la question du féminisme, c'est vraiment marrant de constater à quel point, en fait, on touche à des choses très archaïques. On appuie sur des nerfs et donc ça gueule de façon totale. irrationnel c'est à dire que ça continue de se raconter que par exemple on voudrait grand remplacer les hommes que par exemple ce qu'on veut c'est une pluie de couilles sur la planète terre que on est les hommes et que c'est pour ça qu'on se bagarre en fait si vous regardez le plateau télé les débats sur cette question là l'hystérie elle est de quel côté dire que les meufs moi je les trouve toujours extrêmement calme posé elle apporte des chiffres elle apporte des faits et en fait et en face on a des mecs qui beuglent et qui éructe Parce qu'on est en train de leur retirer leurs privilèges, ça les rend fous. Mais ça les rend fous, c'est-à-dire qu'ils ont quitté toute rationalité. Je pense à Emmanuel Todd, je pense à Finkelkraut, je pense à tous ces mecs-là qui sont censés être des sommités intellectuelles et qui perdent pied, quoi. C'est hallucinant. Et en fait, ce n'est plus les intellos qui parlent dans ces cas-là, c'est les petits garçons. Tout à coup, c'est...

  • Speaker #0

    C'est une régression de leur part. Mais peut-être que ce n'est pas ça le plus grave, parce que... Tout le respect que je peux avoir pour des personnes comme Emmanuel Todd ou comme Viggold Crote, pour l'ensemble de ce qu'ils ont pu faire, malgré tout, je pense, leur œuvre littéraire, malgré tout, j'ai l'impression qu'ils sont insignifiants. En fait, leur parole est plutôt insignifiante. Mais le réel danger, c'est plutôt des générations plus jeunes qui, eux, ont accès à des médias comme TikTok, comme Instagram, et qui maîtrisent mieux tous ces relais-là.

  • Speaker #1

    Oui, alors moi, je pense souvent, il y a eu un... un attentat masculiniste en préparation, je crois, à Bordeaux, qui a été déjoué. Moi, je pense que ça finira par arriver. Et que le pire, c'est qu'on dira que c'est de la faute des féministes, parce qu'elles ont déclenché la colère masculine. Et comme d'habitude, on ne pointera jamais celui qui a tué, mais on responsabilisera les femmes. Ce sera à elles de se justifier. Vous avez gueulé, vous les avez rendus fous, ils ont pris peur, ils se sont sentis déclassés, comme vous dites, et donc ils ont tué. Ça arrivera. C'est déjà arrivé dans l'histoire. Ça arrivera de nouveau. Ça, c'est quelque chose auquel je pense souvent. Je me dis, un jour, il y en a un qui va passer à l'acte. Il y a une violence contre les femmes qui est hallucinante. Dans ce pays et puis dans le monde entier en fait, c'est-à-dire que le patriarcat s'est quand même construit sur l'écrasement de la moitié de l'humanité. Les religions se sont fait le relais, on ne sait pas qui a alimenté qui, les hommes ou la religion, mais l'un dans l'autre ils se sont serrés la main très fort pour nous écraser bien comme il faut. Et s'ils nous ont écrasé bien comme il faut, je crois que c'est parce qu'ils ont une trouille bleue. de ce qu'on peut faire en fait, de ce qu'on peut être. Et puis parce que l'être humain se raconte qu'il n'est jamais plus lui-même que quand il écrase l'autre, c'est-à-dire qu'il ne pourrait coexister, il faudrait qu'il soit au-dessus. Et ça, ça dure depuis la nuit des temps. Donc moi ça me fait doucement rigoler, ou ça me met dans une colère noire suivant les jours, quand j'entends que les féministes font la guerre aux hommes. On se parle de quoi en fait ? On se parle de quelle guerre ? C'est-à-dire qui ? meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint, qui subit une tentative de viol toutes les sept minutes, qui est cogné, harcelé, humilié tous les jours, 230 000 victimes de violences conjugales par an, 230 000, une femme sur cinq, harcelée au travail, qui fait la guerre à qui, qui est violent avec qui ? Je crois qu'on a à peu près la réponse.

  • Speaker #0

    Est-ce que le féminisme, ce n'est pas également une lutte contre le capitalisme ?

  • Speaker #1

    Bien sûr que si, parce que ça obéit à la même logique, c'est-à-dire que le capitalisme, c'est l'exploitation de toutes les ressources possibles pour atteindre des objectifs qui sont toujours de l'ordre de la production et de la performance. C'est une logique extrêmement masculine. Alors, je ne dis pas que tous les hommes sont dans cette logique-là, je parle du masculin, de la construction du masculin, qui est fondée sur l'écrasement de l'autre. Et si vous prenez la question des tâches ménagères, par exemple, on dit beaucoup Waouh, ça a quand même vachement avancé ! Sans déconner, moi, il n'y a pas une chronique que j'ai faite sur les tâches ménagères sans recevoir un mail de quelqu'un qui me disait Pardon, moi, j'ai débarrassé la table hier, quoi. Wow, super, super. C'est-à-dire qu'en fait, les mecs font 5 minutes de tâches ménagères, il faudrait leur faire une espèce de holà, des drapeaux, des banderoles, etc. quand nous, on fait ça tous les jours et que tout le monde trouve ça normal. Sur la question des tâches ménagères, il y a eu un progrès, c'est vrai. En 20 ans, les hommes ont consacré une minute de plus par jour aux tâches domestiques. Bravo ! N'empêche que, on est quand même toujours sur un rapport de 20-80, c'est-à-dire que c'est les femmes qui se sont tout simplement, elles ont obtenu le droit de travailler, mais elles se sont tout simplement rajoutées une deuxième journée.

  • Speaker #0

    Je suis désolé de vous couper, c'est anecdotique, est-ce que c'est pas juste l'arbre qui cache la forêt, le sujet des tâches ménagères ?

  • Speaker #1

    Alors c'est pas que anecdotique parce que ça nous alienne beaucoup, c'est-à-dire que même moi, je vais par exemple... Enfin moi j'ai un... Un compagnon, heureusement, parce que sinon il serait plus vivant, qui fait largement plus que tous les mecs que je peux croiser dans mon entourage. N'empêche que, à cause de cette putain de chasse aux mammouths, il y a une différence essentielle entre lui et moi, c'est qu'il va s'occuper de la maison une fois que son travail est fait. Moi, je vais me mettre au travail quand tout est réglé dans la maison. Et ça, ça entrave. L'écriture de ce bouquin a été super difficile parce que... Parce que j'ai deux garçons qui sont petits, et que comme je vous dis, ma priorité c'est celle-là, c'est les garçons, c'est la maison, il faut que ça tourne, etc. Je me mettais à travailler très très tard, et crever en fait. Et c'est pour ça que la plupart des autrices féministes n'ont pas d'enfants, ou sont lesbiennes, il n'y a pas de secret, c'est-à-dire que nous, les femmes hétéros, on est élevées pour prendre soin de l'autre. Donc on fera toujours passer l'autre avant. Donc la création de type artistique, littéraire, etc. Ça passe bien après. Donc non, c'est pas anecdotique. C'est vraiment du concret, en fait. Mon féminisme, à moi, il est extrêmement concret. C'est quelque chose de très incarné. Et pour en venir à la question du capitalisme, si on a pu se dégager quelques heures pour travailler, pour créer, parce qu'on va pas se mentir, c'est quand même hyper agréable de bosser. Quand on fait un boulot qui nous plaît, on apprend des choses, on rencontre des gens, on y trouve du sens, on y trouve de la reconnaissance. Enfin, je veux dire, moi, j'adore bosser. J'adore. Si j'ai pu me dégager du temps, c'est parce que j'ai délégué. Mais j'ai pas délégué à mon mec, en fait. C'est parce que j'ai des nounous. Enfin, des nounous. Une nounou, des baby-sitters, parce que j'ai une femme de ménage. Et c'est qui ? C'est des femmes beaucoup plus précaires que moi et en général des femmes racisées. Donc en fait, le capitalisme c'est ça aussi. C'est-à-dire que pour que quelques-uns s'en sortent, il faut écraser tous les autres. Donc la lutte contre le masculinisme flirte avec la lutte contre, pas forcément le capitalisme, mais en tout cas le libéralisme, parce que tout ça, ça marche ensemble. Et l'exploitation des ressources de la planète, c'est pareil. C'est-à-dire que c'est aussi pour ça que... les leaders politiques les plus féministes sont chez Europe Écologie Les Verts. Tout ça marche ensemble. C'est l'idée. Quel monde on veut ? Est-ce qu'on veut un monde pyramidal, construit sur une espèce de hiérarchie des normes, où quand on est tout en haut de la pyramide, on a le droit d'écraser tous les autres ? Ou est-ce qu'on essaye de travailler à un monde un peu plus paritaire, un peu plus divers, un peu plus ouvert ? Moi, je sais de quel côté je me trouve.

  • Speaker #0

    Est-ce que, quand on voit certaines autrices, je pense à Virginie Despentes, qui vont quelquefois annoncer que même leur sexualité change parce que c'est leur manière de lutter pour le féminisme. Quelle est votre idée là-dessus ?

  • Speaker #1

    Moi je la comprends. Il se trouve que moi je suis actuellement en couple hétéro, que j'ai toujours été en couple hétéro, que mon compagnon, j'en suis encore très amoureuse. Donc... je vais pas le quitter pour une femme par principe. Évidemment que non. Maintenant, je comprends très bien ce mouvement-là de toutes ces femmes et du lesbianisme politique, je le comprends très bien, pour plein de raisons. La première, si on se parle juste d'intimité, quand vous voyez le taux de satisfaction sexuelle des lesbiennes, franchement, il fait rêver. Et ça, pourquoi ? Parce que pendant des années, on a fait croire aux femmes que l'orgasme clitoridien était un orgasme de petite fille, que le seul qui valait, c'était l'orgasme vaginal, et ça, c'est aussi une vaste blague. C'est-à-dire que même dans notre pieu, le patriarcat s'est enfoncé pour nous faire croire que la seule sexualité valable, c'était celle qui consistait à pénétrer une chatte par une bite. Donc, ce que les nanas disent, mais Ovidie le dit très bien aussi, c'est Eh, les gars, en fait, la blague, c'est que ça se passe pas du tout comme ça ! Et le problème qu'on a aussi, c'est que si la sexualité est phallocentrée et uniquement pénétrative, alors elle commence. avec la pénétration et s'arrête avec l'éjaculation masculine. Pareil, spoiler les gars, en fait, chez nous ça ne se passe pas du tout comme ça. Donc ce malentendu au lit, soit on a l'énergie de le dissiper avec son compagnon, soit en fait on se lève et on se casse. C'est aussi simple que ça. Donc bien sûr que je le comprends et je dirais même qu'on peut l'étendre à toutes les sphères de la vie à deux parce que, encore une fois, même chez moi où globalement... ça se passe bien, il y a des petites éruptions de patriarcat chez mon mec, et il y a chez moi des moments où je me censure, je m'interdis des choses, etc. et où je me giflerais, je me dis mais merde en fait, t'as le droit, vas-y. Donc on est héritier d'une histoire. Donc forcément, elle nous rattrape, même dans les couples les plus ouverts ou les plus égalitaires, ce que vous voulez, ça nous rattrape. Je peux comprendre qu'on soit fatigué de ça, évidemment. Et c'est d'ailleurs pour ça que les féministes font peur. Parce que les féministes, en gros, ce qu'elles disent, c'est... Alors en fait, soit on change les règles du couple hétérosexuel, et effectivement vous y trouverez un peu moins votre compte, soit en fait on va se mettre en couple avec des femmes. Donc évidemment que ça ne réjouit pas grand monde, ça. Chez les mecs hétéros, je veux dire.

  • Speaker #0

    On va faire un petit vrai ou faux. Un quai-fé ou contre-vraie. Julia Foy, ce vrai ou faux. Au concours du Centre de formation des journalistes, à l'été 1998, vous avez porté un pantalon cargo, un Marcel et des tongs.

  • Speaker #1

    Oh ouais, la honte, la honte. Alors, ce qui est marrant, c'est que la secrétaire du CFJ, Michèle Martin, Michmart, si tu m'entends, elle m'en parle encore. En fait, je suis allée à ce concours en touriste, quoi. C'est la honte, c'est la honte. En fait, je prépare ce concours, je me dis... La vocation m'est venue très tard. Moi, je rendais ouf mon frère qui lui était polytechnicien. Ça vous donne une idée du personnage. Moi, je disais, en fait, mon ambition dans la vie, c'est d'être heureuse de me lever le matin. En fait, ça a l'air anodin, mais c'est la chose la plus importante qui soit. Ça veut dire être au bon endroit. Et ça, c'est parfois le combat de toute une vie. Mais comment ça allait se traduire, je ne savais pas. Moi, je voulais faire une maîtrise sur Balzac. Mon frère me disait, mais ça va servir à quoi ? Et moi, je disais, on n'est pas obligé de faire des choses utiles. Je vais le faire parce que j'ai envie de le faire. Et pendant l'année, je me suis dit, tiens, en fait, j'aime bien écrire. J'aime bien les gens. J'ai envie d'un truc où je ne suis pas enfermée dans un bureau, etc. Tiens, si je devenais journaliste. Bon, là, ce que je vais faire, j'avais un plan. Tous les plans sont faits pour être déjoués, mais mon plan, c'était, je passe une seule école, parce qu'il n'y avait pas d'anal à l'époque. Donc au moins, je sais comment ça se passe dans les écoles. Derrière, je me fais un an de stage, parce que je n'étais pas débile non plus. Je n'avais pas ouvert un journal de ma vie, et je n'avais pas posé les pieds dans une rédac de ma vie. Donc je savais que j'avais des grosses lacunes. Je me dis, je me passe une année à me préparer, et après, je passe toutes les écoles. Et en fait, de façon hallucinante, j'ai été prise à l'oral. Je n'ai même pas compris ce qui s'était passé. Et donc, je suis arrivée à l'oral en tongs et en pantalons de cargo parce que je me suis dit, de toute façon, je ne l'aurai pas. Donc, je ne vais pas faire un effort vestimentaire. Vous n'êtes pas dans l'export. Et en fait, j'ai été prise... Alors, attention, j'ai été prise sixième sur les listes d'attente et avec un sentiment d'imposture qui ne m'a pas quitté pendant dix ans. Donc après, je l'ai payée, mais alors, bien comme il faut. Mais je pense que j'ai vraiment été à la fois reçue sur un malentendu et en même temps, ce métier m'allait bien.

  • Speaker #0

    Vrai ou faux, vous avez fait votre première manif dans le ventre de votre mère.

  • Speaker #1

    Oui, ma mère, dont je parle beaucoup dans le livre, avec qui je m'engueule beaucoup sur les questions féministes, je lui dois quand même une chose, c'est que la graine de la révolte, c'est elle qui l'a plantée. Très clairement. Mon père était... J'adorais mon père, j'étais très très proche de lui. Mais mon père n'attendait pas grand-chose de l'humanité. Lui, ce qu'il aimait, c'était ses livres et ses enfants. Et pour le reste, il était un peu... Il était cherché en physique, il était un peu dans sa bulle. Ma mère, elle était convaincue que le monde, on pouvait le changer. Et qu'il fallait même tout faire pour ça. Elle avait été psy au planning familial. Elle a fait 68, elle a fait la manifestation de la rue de Charonne. Elle a toujours manifesté ma mère. Donc, je le dis ironiquement, mais pas que. Je pense que vraiment, mes premières manifs, c'était dans son ventre, très clairement.

  • Speaker #0

    Vrai ou faux, après avoir enregistré une émission de radio, vous avez faim ?

  • Speaker #1

    Oh putain, oui. Pardon. Non mais moi je suis un ventre en fait, c'est-à-dire que j'ai l'air de parler comme ça, de brasser des concepts, etc. Pas du tout. Moi, il faut me nourrir, il faut nourrir la bête, sinon je ne suis pas capable de produire quoi que ce soit. J'ai encore rien. Ne vous inquiétez pas, je vais commander après. Et effectivement, pendant une émission, en fait moi je donne tout pendant une heure, mais je suis à donf. Je suis vraiment à donf. Et du coup, quand je sors de là, ma première phrase, et l'équipe avec laquelle je travaille se marre, parce que ma première phrase c'est toujours Oh, j'ai faim ! Systématiquement, donc oui. Et par ailleurs, j'aime manger, donc... J'ai renoncé à ma taille 36 il y a bien longtemps pour pouvoir me resservir de pâtes quand j'en avais envie.

  • Speaker #0

    Que vous savez cuire à la perfection.

  • Speaker #1

    Ah bah oui, non mais parce que ça, j'ai le bon ustensile. Je vous en parlerai peut-être une autre fois, mais il faut le bon ustensile, sinon on n'y arrive pas.

  • Speaker #0

    C'est à la vapeur un truc comme ça ?

  • Speaker #1

    C'est pas un truc comme ça les pâtes. C'est pas un truc comme ça les pâtes, on dit pas c'est un truc comme ça. Ça c'est non.

  • Speaker #0

    Ça fait pour une question.

  • Speaker #1

    Ah oui, je peux devenir violente. Il y a des sujets avec lesquels je déconne pas, c'est les créoles et les pâtes. Ça c'est clair que non. En fait, il faut avoir une passoire intégrée à la casserole, ce qui fait que quand les pâtes... arrive à deux minutes de la fin de cuisson parce que la cuisson se termine dans la sauce de pâte bien évidemment tous les italiens le savent en fait vous soulevez votre passoire et vous jeter directement dans la sauce qui fait qu'il n'y a pas ce moment de passage dans l'évier où les pattes ont le temps d'être saisie par le froid et là c'est foutu je vous ai livré le point le plus important de cette interview c'est celui là

  • Speaker #0

    J'ai lu ça je ne peux pas le croire mais vrai ou faux Vous pouvez vous lever à 4h du matin pour soigner les panaries de vos amis. Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?

  • Speaker #1

    C'est un peu une vanne, mais pas que. C'est vrai que je suis, je crois, alors moins depuis que j'ai des enfants, j'ai été élevée par mes parents dans l'empathie. Je crois que l'empathie, c'est la plus grande des forces, celle de la capacité de se mettre à la place de l'autre. Et l'attention à l'autre, en fait. Le fait de pouvoir prendre soin de l'autre, c'est quelque chose qui est... que je fais aussi, je crois que je fais avec mes enfants, que je fais avec mon mec, que je fais un peu avec tout le monde, mais je ne suis pas la seule à faire ça. Mais c'est vrai que j'ai un truc, moi, ma mère était comme ça. Si une copine m'appelle parce que ça ne va pas, je déclenche le plan hors sec. C'est-à-dire que je ne lui dis pas, on s'en reparle demain. Je ne lui dis pas, oh, ça va, ce n'est pas grave. Je dis, OK, j'arrive. Alors, attends, je vais mobiliser qui ? De qui est-ce qu'on a besoin dans cette histoire ? Problème, bon, solution, bon, action. Voilà, quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit, elles savent qu'elles peuvent m'appeler, je suis là.

  • Speaker #0

    Et les pâtes à la fin.

  • Speaker #1

    Évidemment ! Non, par exemple, alors je pense à cette amie-là. La vanne est venue avec une copine à moi qui bosse à l'IB maintenant, que j'adore, qui était au CFJ avec moi. On en rigole souvent, mais il y a eu toute une période de sa vie où ça n'allait pas. Moi, j'habitais à côté de l'IB et le midi, elle venait prendre des bains chez moi. Si vous essayez de faire du bien, viens prendre un bain. Et là, on ne parlait pas, c'était une taiseuse à l'époque. Et évidemment que je respectais ça. Mais par contre, il y avait un truc de douceur à lui faire couler l'eau d'un bain bien chaud, lui mettre un peu de bain moussant, justement ne lui poser aucune question, mais qu'elle ait une demi-heure pour prendre un bain au milieu de sa journée. Et c'est avec elle que cette vanne m'est venue. Je ne sais plus qui l'a faite cette vanne du panarien à 4h du mat, mais ça vient d'elle. Ça vient de notre amitié.

  • Speaker #0

    J'ai essayé de faire ça pendant longtemps, quand j'avais des amis qui n'allaient pas bien. Je leur disais, viens prendre un bain à la maison. Mais elles me prenaient toutes pour un pervers.

  • Speaker #1

    Voilà. Valait mieux. Venant de moi, ça passait mieux.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Vrai ou faux ? Et là, on va entrer encore un peu plus dans le vif du sujet de ce livre dont je parle juste ensuite. On a un souci dans la construction du masculin.

  • Speaker #1

    Clairement. Très clairement, et il faut vite qu'on s'en débarrasse parce que c'est... Regardez, les hommes sont responsables de 85 à 95% des homicides, que ce soit les féminicides, que ce soit les accidents de la route. La plupart des 9 fois sur 10, les violences, c'est eux. Donc on a tous un souci parce que personne n'a envie de vivre dans une société qui est violente avec des morts sur la route et avec des morts dans la rue, avec ce que vous voulez. Donc, soit on se dit que c'est dans les gènes de l'homme et c'est comme ça, et on ne fait rien, soit on se dit qu'en fait, peut-être qu'il y a un truc qu'on appelle culture d'un masculin toxique ou quelque chose comme ça, et on s'y attaque. Et on essaie de comprendre ce qui, dans l'éducation qu'on fait aux garçons, autorise, voire encourage, ce genre de comportement délétère, encore une fois, pour tout le monde. Et moi, j'ai deux petits garçons, et je me rends compte que c'est... une interrogation de presque tous les jours. Ça ne veut pas dire que tous les jours, je me prends la tête à me dire comment j'en fais les mecs bien. Mais c'est quelque chose qui sous-tend très fortement l'éducation que je leur donne. Et je vous donne juste un exemple. J'ai un peu merdé parce que mon fils aîné a quatre amoureuses. Donc là, il y a un truc que j'ai dû louper sur la polygamie. Bon, je vais me rattraper. Mais donc, il a quatre amoureuses. Et en fait, l'une d'elles est toute petite et toute chétive. Et lui, c'est une espèce d'armoire à glace. Et en fait, il est dans la cour de l'école et il veut l'embrasser. Et en fait... Il l'embrasse. Et en fait, j'ai eu ce premier réflexe de maman italienne. Je me dis, ça, c'est un mec invrais. Mais je l'ai eu un quart de seconde. J'ai attrapé sa capuche, je l'ai tirée en arrière. Je lui ai dit, est-ce que tu lui as demandé si elle était d'accord, en fait ? Parce que ça commence là. Et hier, dans la rue, j'étais hyper contente parce qu'on se baladait. Après, mon fils, il me fait marrer parce qu'il draguerait un lampadaire, mais vraiment. Et on passe à côté d'une gamine. Il a peur de rien, il doute de rien. On passe à côté d'une gamine. Il regarde, il fait, je peux te faire un bisou ? Et bon, elle a dit non, et du coup, il n'a pas fait de bisous. J'ai dit, bon, voilà, ça, c'est gagné, c'est acté. Et ça passe par là. Et il faut absolument le faire, parce qu'on ne peut pas pleurer sur le nombre de féminicides qu'on a en France et qui n'est franchement pas... On n'a pas de quoi être fiers, très clairement. Et en même temps, ne pas se poser la question de comment tout ça arrive. Et tout ça arrive à cause de l'éducation des garçons.

  • Speaker #0

    Comment il est né ce livre, ce que le féminisme m'a fait, que vous venez de sortir chez Flammarion, et qui est une sorte de suite, de réponse au précédent livre, Je suis une sur deux ?

  • Speaker #1

    Alors, Je suis une sur deux, c'est 20 ans de gestation, c'est l'envie de raconter cette histoire, le viol mais aussi l'acquittement, il y a eu procès dans mon cas. C'est quelque chose de... Je dirais la démarche, elle est presque solennelle en fait. Ce que le féminisme m'a fait est né d'un fou rire dans ma cuisine où en fait c'était un jour... En fait c'était une journée de merde, vous savez, mais pas une journée de merde grave, mais que des trucs qui vont pas en fait. Ça marche pas, y'a rien qui marche. Moi y'a des moments où je rends l'antenne en fait, j'ai dit bon ok elle me saoule cette journée, je me cale sur mon fauteuil et puis je me mets comme tout le monde à scroller et là je tombe sur une vidéo sur Twitter où une nana qui a une trentaine d'années... dit Moi, quand je suis rentrée en féminisme, rien que l'expression m'a fait halluciner, comme si on rentrait dans les ordres, j'y ai vu une promesse de bonheur. Alors j'ai fait tout ce qu'elles m'ont demandé de faire. Je me suis même, j'ai même arrêté de me maquiller puisqu'elles interdisent de se maquiller. Vous pouvez me regarder, vous voyez comme c'est vrai. J'ai arrêté de me maquiller alors que j'adore ça. Et aujourd'hui, j'ai 30 ans, j'ai pas de mec et j'ai pas d'enfant et j'ai raté ma vie. Et en fait, j'explose de rire. Puis après, je me dis Putain, mais... Ça veut dire qu'en 2024, une nana qui a 30 ans, qui n'a pas de mec, qui n'a pas d'enfant, croit encore qu'elle a raté sa vie, si elle n'existe pas par elle-même en fait. C'est-à-dire que les femmes, on considère qu'on existe parce qu'on est femme de ou mère de, et tout à coup, elle toute seule, elle n'existe pas. Je me suis dit qu'est-ce qu'on a raté ? et juste après, je me suis dit mais moi, il m'a fait quoi le féminisme ? Il m'a fait quoi ? Et ça m'a travaillé toute la journée. La première réponse, c'était il m'a fait du bien Et je me suis dit que si je voulais en faire un livre, il fallait que je développe un peu plus.

  • Speaker #0

    C'est un peu... Il y a écrit dans ce livre, une femme sans homme, c'est comme un poisson sans bicyclette.

  • Speaker #1

    J'adore celle-là.

  • Speaker #0

    Vous l'avez trouvée où ?

  • Speaker #1

    Alors, on dit que c'est Gloria Steinem qui l'a dit. Mais elle-même disait qu'elle l'avait empruntée à quelqu'un d'autre. Donc on ne sait pas. Mais en tout cas, c'est une phrase féministe assez connue.

  • Speaker #0

    C'est du socialisme.

  • Speaker #1

    Et elle est géniale cette phrase. Parce qu'en fait, il y a cette espèce d'idée que nous n'existerions jamais pour nous-mêmes. Vous pouvez faire un essai. Vous pouvez regarder dans l'espace public, une femme assise sur un banc, ça n'existe pas. Pourquoi ? Parce que c'est très bien qu'un mec va s'asseoir assez rapidement. Parce qu'une femme ne peut pas être seule. Une femme est forcément dans la tente de quelque chose et préférablement d'un homme. Là où des mecs seuls à des terrasses de café ou sur des bancs, vous en avez plein. Nous on n'a pas d'existence autre que dédiée à l'autre. Je veux dire, jusqu'au code Napoléon où il était écrit qu'on passait de la tutelle d'un père, celle d'un mari, on a mis des décennies à s'en affranchir mais évidemment il reste encore quelque chose. Donc nous on nous colle un poupon dans les bras quand on a, allez, deux heures et demie de vie et on comprend très vite qu'il va d'abord falloir prendre soin de l'autre avant d'exister par soi-même. Et ça, le féminisme vous apprend ça et vous apprend à vous... détachée de ça et à vous couper petit à petit toutes vos chaînes et à exister pour vous-même. Ça ne veut pas dire égoïstement, ça veut dire comme les mecs le font pour eux-mêmes.

  • Speaker #0

    Et une femme seule, souvent dans les cafés, en tout cas au début du XXe, c'était une prostituée.

  • Speaker #1

    Ouais, et puis même maintenant, vous le voyez assez peu. Moi, je vais dans un café seule quand j'ai quelque chose à faire. Je prends un ordi. J'ai quelque chose à faire.

  • Speaker #0

    Il y a un motif.

  • Speaker #1

    Ouais. Alors que des mecs qui squattent l'espace public tout seuls, il y en a plein ! Alors en général ils ont beaucoup moins de choses à faire parce qu'on revient aux tâches ménagères. Ils n'ont pas cette to-do list mentale dont on raye chaque item, mais vite, vite, vite, il y a un nouvel item qui vient se rajouter. Donc ils ont quand même beaucoup plus de temps pour eux. Et ça c'est pas mon délire féministe, je veux dire, toutes les études le disent, ils ont du temps pour eux. Et l'espace public leur appartient. Il y a un test à faire qui est hyper marrant, que je recommande à tout le monde, enfin qui est marrant mais... Que je recommande aux nanas mais pas de le faire trop trop longtemps parce que ça fait mal. En fait... Les trottoirs sont petits, notamment à Paris, mais aussi parce que l'espace public a été pensé pour des hommes et par des hommes. Les urbanistes ont longtemps été des mecs, donc les trottoirs sont tout petits, donc avec les poussettes, on peut toujours courir pour passer. Mais ça provoque aussi autre chose, c'est que quand vous vous baladez dans la rue, s'il y a un mec et une nana qui marchent l'un vers l'autre, vous regarderez, si la femme ne s'écarte pas, il se rende dedans, parce que le mec jamais ne fera un pas de côté. Jamais. L'espace public est à lui. Regardez, il pisse, il crache. Qui fait ça ? Chez les gonzesses. À part une nana qui serait totalement marginalisée, ça n'arrive pas. Vous ne voyez pas une nana soulever sa jupe et se mettre à pisser par terre ou même à cracher ? Les mecs, si. Encore une fois, je ne dis pas que tous les mecs le font. Je dis que par contre, quand il y a un crachat par terre, ça vient d'un mec et pas d'une nana. Pourquoi ? Parce que l'espace public lui appartient. Pas à nous. Enfin, lui appartenait.

  • Speaker #0

    Comment elle s'est faite l'écriture du livre ? J'entends, vous aviez dit tout à l'heure que c'était difficile. Oui. que c'était dans le peu de temps qu'il vous restait pour cela.

  • Speaker #1

    Ça s'est fait avec des sacs de sable devant la porte. Virginia Woolf a écrit ce livre incroyable sur une chambre à soi et elle dit que pour pouvoir créer, produire et donc exister par elle-même et pour elle-même, une femme doit impérativement avoir une chambre à soi, c'est-à-dire un espace à elle, très clairement. Moi, j'ai longtemps voulu avoir un studio ici pour pouvoir bosser.

  • Speaker #0

    Une cuir sonnière ?

  • Speaker #1

    Voilà, vous avez exactement le même réflexe que mon mec C'est fou, c'est fou C'est-à-dire que cet espace-là, il faudrait qu'il soit peuplé par un homme Je ne peux pas l'occuper seule Il faut que je sois en attente d'un mec qui arriverait J'ai utilisé ce mot-là à la dessin Ouais, mais n'empêche que le réflexe, il est là C'est-à-dire que mon mec, tout de suite, au début, croyait vraiment que je voulais recevoir des amants L'idée qu'une femme puisse être bien avec elle-même Et aimer passer du temps seule sans avoir à s'occuper des autres Putain, mais ça c'est une idée qui est toujours... pas rentrer quoi moi je voulais juste un bureau pour moi pourquoi parce que si mon bureau il est dans l'espace commun évidemment que toutes les quarts de seconde je vais être rappelé et pire éduqué comme je l'étais comme toutes les femmes de ma génération je vais même devancé les cris et les appels donc attention on dit beaucoup si les femmes sont écrasés par les tâches domestiques c'est qu'elles savent pas délégués non non non par ailleurs On a du mal à déléguer, mais dans un second temps, à un moment donné, si on veut s'attaquer aux violences masculines et à la construction du masculin, il va falloir nommer les choses et désigner les premiers responsables. Les premiers responsables, c'est quand même, pardon, la plupart des mecs à la maison, ils n'en branlent pas une. Et que ça leur va très bien comme ça.

  • Speaker #0

    Oui, mais on offre des fleurs.

  • Speaker #1

    Voilà, le 8 mars. Vous savez qu'en Italie, on offre des fleurs aux mères, le 8 mars. Moi, je te les ferais bouffer par les narines, les bouquets de mimosa, là. Moi, je voulais donc un bureau. Je ne l'ai pas pour faute de moyens et de tout ça. Donc, je bosse chez moi. Mais effectivement, comme je vous ai dit, je dois régler d'abord tout le domestique avant de me sentir autorisée. Alors, il y a une part de moi qui devrait me sentir autorisée. Bien sûr. Puis il y a le monde autour qui m'explique quand même que mon rôle premier, c'est d'être mère. Ça me va, j'adore être mère. Mais je vous donne un exemple. Il y a un espace commun, le salon. Il y a dans cet espace commun, deux adultes, deux enfants. Il y a un adulte qui est en train de bouquiner sur le canapé. Il y a l'autre adulte qui a quatre pattes en train de ramasser des Legos sous le meuble de la télé. À votre avis, qui fait quoi ? En toute honnêteté.

  • Speaker #0

    On le lit dans votre livre.

  • Speaker #1

    Ouais, mais parce que c'est vrai. Parce que c'est vrai. C'est-à-dire que... je ne m'autorise pas à prendre cette peau sur le canapé si mes gamins sont dans la pièce je vais être avec eux je vais pas le prendre cet espace pour moi mais pourquoi pas juste parce que je suis débile et que je me charge d'un truc que j'aurais pas à faire il ya un monde autour de moi il ya une culture et elle est millénaire et elle me dit quoi elle me dit que si moi je prends cinq minutes pour moi je suis une mauvaise mère alors que si mon mec prend cinq minutes pour jouer avec les enfants c'est un héros donc lui il a tout intérêt à le faire que moi c'est un peu plus compliqué Donc j'ai le choix et en même temps je ne l'ai pas. Donc la seule solution en réalité c'est effectivement d'avoir une chambre à soi, d'avoir un espace à soi et d'être dans un espace temps où vous êtes seul. Le problème c'est que cet espace temps il est difficile à se créer et à maintenir. D'où les sacs de sable devant la porte parce que vraiment il faut des défenses mais autour de vous même aussi. C'est à dire de vous interdire de sortir de votre bureau. Non tout va bien les gamins ils vont se gérer. il n'y a pas de problème. Mais aussi pour les autres, de dire non, vous ne venez pas me demander, par exemple, toi, tu ne me demandes pas où est ton doudou et tu le cherches, mais toi, mec, tu ne me demandes pas où sont les clés de la bagnole et tu les cherches, en fait.

  • Speaker #0

    J'avais entendu Bégaudeau dire qu'écrire, c'était un loisir bourgeois. C'est aussi pour cela que c'était parce qu'il fallait consacrer beaucoup de temps à cela pour créer quelque chose, créer du roman et que finalement... dans les textes courts où c'était plus simple quand on avait peu de temps à faire cela. Et vous, on voit que dans ce livre, il y a des petits textes courts qui viennent ponctuer finalement la narration du fil de ce récit qui n'est pas un roman, qui est vraiment un récit. Et donc, il y a ce personnage, votre mère, qui revient régulièrement. Ce qui est intéressant, c'est de se dire finalement, la place de la mère, souvent, il y a des auteurs qui vont... taper gentiment sur leur mère. Mais est-ce que c'est parce qu'elle est plus impliquée dans l'éducation des enfants, en général ?

  • Speaker #1

    C'est-à-dire que les mères, on porte le bob, quoi qu'il arrive, on porte le chapeau. C'est-à-dire que quoi qu'il arrive, ça va être de notre faute, mais aussi parce qu'on est en première ligne, parce que le lien avec l'enfant est organique, parce que c'est le tout premier lien, et parce que c'est bien pratique, parce que du coup, tout le monde a pu dire qu'en gros, quand ça déconnait, c'était que la mère était responsable. Donc oui, elle a cette place de premier plan. qui n'est pas forcément un cadeau. Et puis, ce qui est marrant, c'est qu'on vit dans une société où, en gros, quand tout va bien, la mère va devoir tout, globalement, s'occuper, encore une fois, répartition des tâches domestiques, mais même si vous prenez les premiers mois d'un bébé. La nuit, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais les mecs sont frappés d'une espèce de surdité nocturne que la médecine n'explique pas. Et qui fait que, hop, il écrit le bébé. Ils ne les ont pas entendus, dis donc ! Nous, on les entend, parce qu'on n'a pas le choix. Parce qu'on a été élevés comme ça. Parce qu'encore une fois, un père qui ne se lève pas, c'est normal, il est fatigué, il a du travail. Une mère qui ne se lève pas, eh oh, t'es en congé mat ! Sachant que dans cette formule de congé maternité, il y a quand même un truc qui ne va pas. Il faut avoir vécu en tête à tête avec un bébé pendant deux mois pour comprendre que même la formule, c'est du foutage de gueule, en fait. On aura ce problème-là, de place des uns et des autres dans l'éducation des enfants, tant qu'on n'aura pas de congé paternité équivalent. pour les deux, de congés maternités et de congés paternités qui soient équivalents. Pour l'instant, on n'y est pas. Donc pour l'instant, c'est la mère qui est en première ligne. Le congé maternité, c'est le moment où se prennent tous les plis. Exemple à la con, mais c'est elle qui commence à l'emmener chez le pédiatre. Donc c'est elle qui va continuer. Parce qu'elle a l'adresse, parce qu'elle a les codes, parce qu'elle connaît le tout-bib. Donc tout est plus simple. Donc les plis se prennent là. C'est ça absolument qu'il faut pouvoir réformer pour que, dès le départ, on ait une égalité femmes-hommes sur cette question-là. pour la joie de la parentalité comme pour le merdier de la parentalité. Parce que l'énorme arnaque, elle est là. De toute façon, on se fait bananer quoi qu'il arrive, sauf quand on devient féministe et quand on se dit que ce monde là, on va le changer. En gros, c'est la mère qui taffe au début. Mais par contre, on va lui expliquer que le père est tout puissant. Le père tout puissant, il se barre dès qu'il y a un handicap, dès qu'il y a une maladie, dès qu'il y a des trucs qui se mettent à déconner. Mais par contre, On l'a entendu au moment du mariage pour tous, un papa, une maman, on ne ment pas aux enfants, blablabla. Il fallait que le père soit présent. Par contre, la nuit, ce n'est pas la peine que le père soit présent. Donc, il l'est symboliquement, il est dans la loi. On a un mal fou, par exemple, à retirer l'autorité parentale à un père violent. Un mal fou, parce qu'il est le père et que cette loi, quoi qu'il arrive, est inattaquable. Je vous donne un exemple. Mon mec, moi j'ai fait mon premier enfant, il est issu d'une PMA. Donc, je l'ai fait toute seule. Puis, il se trouve que j'ai rencontré mon mec, que mon mec et mon fils se sont choisis, aimés. Et qu'à un moment donné, on s'est dit, bon... Il faudrait peut-être régulariser tout ça parce que si il m'arrive un truc, mon mec n'est rien pour Isaac, alors que dans la vie de tous les jours, il est beaucoup de choses pour Isaac, il est son père. Et bien en France, quel que soit... Ça peut avoir lieu, mais sept ans après la naissance, en l'occurrence c'était sept ans après la naissance, Franck n'avait qu'à aller en mairie et dire je suis son père. Ah ok, très bien, vous signez là. C'est-à-dire que la mère n'existe pas symboliquement, la mère n'existe pas, elle est là. Pour changer les couches, elle est là pour récupérer les gosses à l'école en urgence quand ils ont 38. Mais par contre, n'importe quel mec peut se présenter dans n'importe quelle mairie pour dire je suis le père et la mère n'a pas son mot à dire. Rien. Donc on a peut-être un petit souci là aussi.

  • Speaker #0

    Je vais revenir sur le sujet de votre mère, si ça ne vous embête pas. Et elle l'a pris comment finalement, la lecture du livre ?

  • Speaker #1

    Ma mère, elle est folle, donc ma mère, elle a adoré. En fait, ma mère, elle est... Elle est une espèce de déni très protecteur de tout. Et en fait, elle était hyper contente que je parle d'elle. Donc, salut à la vidéo. Salut à la vidéo. Très bien. Moi, j'ai flippé parce que je me suis dit, comment elle va prendre les choses ? Après, en leur lisant, je trouve qu'avec le recul, je trouve qu'on sent aussi l'amour que j'ai pour elle. Et il est profond, l'amour-là. L'admiration. Oui, l'admiration aussi. Je lui dédie quand même ce livre. Mais maintenant, je pense que quand... Qui aime bien s'engueule bien. Et on est au moins dans une famille où on se dit les choses. Et oui, les portes claquent, mais cinq minutes après, on se dit je t'aime, donc ça va.

  • Speaker #0

    C'est une comédie italienne ?

  • Speaker #1

    L'enfer, mais l'enfer ! On est séfarades d'un côté, italiens de l'autre. Donc tout ce qui est nuance et modération, c'est pas nous. Très clairement. Tout ce qui est calme et... Non, ça n'existe pas. Il y a un niveau de décibels moyen qui est assez élevé. Il y a un niveau de bordel, ouais, qui est assez élevé, mais c'est joyeux.

  • Speaker #0

    On va finir l'émission. On est dans un café, on est ici au One Feed, dans le Jays North Ham, arrondissement. Et je vais vous poser trois questions sur l'univers du café. Une question qui va être d'abord un peu sur, justement, le café, parce que je vois que vous buvez du café. Est-ce que, d'après vous, un expresso contient beaucoup plus de caféine qu'un allongé ?

  • Speaker #1

    J'en ai pas la moindre idée, mais j'ai un truc. En fait, je suis un peu... Je suis un peu bizarre sur les questions d'hygiène de vie. Vraiment, je suis très étrange parce que je fais 5 heures de sport par semaine, ça, il n'y a pas de problème. Là,

  • Speaker #0

    vous avez le café et la clope.

  • Speaker #1

    Café, clope. Et je sais, dans un coin de ma tête, j'ai vaguement l'idée que ce n'est pas hyper bon pour la santé. Mais je crois que pour l'instant, je m'en contrecogne. Je ne devrais pas. Vraiment, je ne devrais pas si je veux survivre. Mais peut-être que je me crois un peu immortelle, en fait. Mais donc, non, je ne sais pas. Est-ce que vous avez la réponse, vous ?

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr, j'ai la réponse.

  • Speaker #1

    Il y a plus de caféine où ?

  • Speaker #0

    La caféine se diffuse dans les américanos.

  • Speaker #1

    Donc il y en a plus. Je savais que c'était dégueulasse. En fait, ce qu'il faut, c'est des cafés serrés. Voilà, point à l'italienne. Terminé. Question pliée.

  • Speaker #0

    J'ai deux autres questions. J'ai essayé vraiment de trouver comment on pouvait allier féminisme et bistrot, café. Qu'est-ce que... Qu'est-ce que la grève du vin en 1933 ?

  • Speaker #1

    La grève du vin ?

  • Speaker #0

    Oui, la grève du vin.

  • Speaker #1

    C'est quoi ? Vous ne savez pas ? Ben non.

  • Speaker #0

    C'est génial. La grève du vin... en 1933, était une action de protestation menée par le mouvement féministe français, la française, à Vente-Pas, pour réclamer le droit de vote des femmes. Les femmes ont été invitées à ne pas acheter de vin pendant une semaine du 26 mars au 2 avril. Parce qu'en fait, le vin, c'était un véritable moteur économique en France à cette époque. On est dans les années 30. Et ça n'a pas eu un effet immédiat. Mais c'est vrai que les femmes ont obtenu le droit de vote en 44, à partir de la guerre.

  • Speaker #1

    Moi, je trouve que les féministes, déjà, elles ont le don pour rendre notre vie plus joyeuse, plus piquante et plus bordélique, mis à part le fait qu'elles ont un vrai projet politique et une vraie utopie politique qui est foutument intéressante et à laquelle on gagnerait tous à s'intéresser. Mais elles ont aussi ce sens de l'action collective et ça, je les trouve assez géniales pour ça. Déjà, elles sont drôles. Vous citiez tout à l'heure le slogan de Gloria Steinem, mais je pourrais vous en citer plein d'autres. En fait, les slogans féministes sont très, très drôles. Elles ont la créativité de toutes celles et de tous ceux avec qui on met les bâtons dans les roues. Donc, en fait, elles sont assez géniales en drôlerie. Quand vous regardez les mouvements... Ce qu'ils ont pu produire comme action et comme slogan, c'est très très drôle. Et je pense qu'il serait temps de ressonger à ce type de mouvement-là. Si je vous dis grève des femmes le 8 mars prochain, c'est une possibilité à laquelle il faudrait peut-être toutes et tous commencer à réfléchir. Et je parle très sérieusement. C'est-à-dire que là, au moment où je vous parle, je vous le dis, peut-être, peut-être.

  • Speaker #0

    De faire grève.

  • Speaker #1

    Peut-être qu'il y aura une grève des femmes le 8 mars. Peut-être.

  • Speaker #0

    D'ailleurs, grève, je vais sur ma dernière question. Qu'est-ce que le bistrot de la grève ?

  • Speaker #1

    C'est quoi ? Je ne sais pas moi.

  • Speaker #0

    Génial.

  • Speaker #1

    Moi je vous écoute.

  • Speaker #0

    C'était une émission de radio pirate diffusée pendant la grève historique des techniciens et des producteurs de la maison de la radio.

  • Speaker #1

    Non, non, non, ils ne font jamais grève, ce n'est pas vrai. Non, il n'y a pas de mouvement.

  • Speaker #0

    Dans les années 60. Animé par le journaliste et écrivain François Cavana. L'émission était diffusée tous les soirs en direct des studios occupés, c'est une sorte de talk show improvisé, où les grévistes, leur soutien, venaient diffuser, discuter, échanger des idées et boire un verre, ce qui se faisait peu à l'époque, de dire ouais vraiment à l'antenne.

  • Speaker #1

    Ah c'est bien non ? J'adore l'idée.

  • Speaker #0

    Et ça a fait avancer la cause des grévistes.

  • Speaker #1

    Et bien avec la grève qui se profile, avec cette histoire de fusion, peut-être qu'on devrait reproduire ça, peut-être qu'on devrait le faire aussi, squatter les studios et faire l'émission.

  • Speaker #0

    Une émission pirate !

  • Speaker #1

    Exactement, je vais le suggérer au comité de grève de Radio France. Non, sans déconner, s'ils continuent avec ce projet de fusion, c'est ce qu'ils vont se prendre dans les dents et ils le savent. Donc, préparez-vous à entendre.

  • Speaker #0

    Aimerait davantage.

  • Speaker #1

    Non, mais alors, pour le coup, sur cette grève-là, sur le mouvement de protestation, sur la fusion, les auditeurs sont avec nous. Les auditeurs et les auditrices sont clairement avec nous. Je crois qu'ils sont prêts à se prendre des semaines de playlist pour que cette fusion n'ait pas lieu, parce qu'elle est un non-sens complet, justifié par bien. C'est encore une preuve d'incompétence notoire de ceux qui nous gouvernent. Et moi, je suis affligée par sept ans de politique confiée à des incompétents qui ne connaissent pas leur dossier. Mais vraiment pas. Ils ne bossent pas. Ils ne bossent pas parce qu'en italien, on dit qu'ils ont la puzzalnazza, la puanteur au nez. C'est-à-dire qu'ils sont des espèces d'arrogance de ces gens qui pensent avoir tout pigé. Alors qu'en fait, ils n'ont même pas le début. d'une compréhension du monde qui soit à peu près juste et honnête. Donc comme je le dis souvent, on n'a pas le cul sorti des ronces, mais on s'y attaque.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup Julia Foyce.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

  • Speaker #0

    On va prendre un café au comptoir. Je rappelle le titre de votre dernier livre, un récit, Ce que le féminisme m'a fait chez Flammarion.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Vous avez écouté un café au comptoir. Petit mot habituel de chaque fin de podcast, allez sur Apple Podcast, mettez 5 étoiles, c'est encore mieux. Et puis surtout, laissez-nous un petit mot. pour expliquer comment c'était bien ce podcast, comment vous l'avez aimé. Vous mettez n'importe quel pseudo, on s'en fout. En tout cas, ça nous offre de la visibilité. Allez partager ce podcast avec vos amis, vos collègues, votre famille, qui vous voulez. En tout cas, merci d'être ici et à très, très, très, très bientôt pour un nouveau café.

Description

J'ai eu la chance d'interviewer la journaliste féministe Giulia Foïs au café Wanted Paris 46Bis Rue de Meaux, 75019 Paris


Mon invitée du jour est journaliste, productrice de radio, chroniqueuse et… féministe.

 

Et en plus ce  n'est même pas un gros mot.

 

Moi je suis super content de l’accueillir parce que sa voix a rythmé un bon nombre  de mes réveils quand elle officiait dans les matinales de France Inter, une époque où je ne connaissais pas vraiment le mot que j'ai cité un peu plus haut , celui de… féministe.

 

Vous trouvez que j’insiste ? Attendez un peu pour juger ...Ainsi mon invitée a tenu pendant quelques années une chronique dans  le magazine Marie Claire, une chronique appelée… FÉMINISTE TA MÈRE.

 

Si vous pensez qu’on parle trop du féminisme, peut-être allez  vous devoir changer de podcast, parce que le sujet le plus souvent traité par la personne que je reçois est celui du .. féminisme 

 

Dans Allo Giulia pour le magazine ELLE, cette spécialiste des questions de genre s’est attaquée à celles que se sont posées  les femmes de la génération Me Too et pas seulement les femmes  d’ailleurs mais toujours sous un angle… féministe.

 

Parfois quand elle se présente, elle se décrit comme vivante, survivante et supervivante. Pourquoi ?  On trouvera peut être la réponse dans les  deux livres dans lesquels elle a raconté ce que  c'est que de vivre le patricarcat dans sa propre chair, en deux mots, et sans tergiverser, le viol. 



Féministe donc, solidaire du mouvement metoo elle se lève, engage le combat, celui d’une lutte nécessaire pour une société plus juste et pour cela elle prend la parole. D’ailleurs selon elle « la parole est la seule arme qu’elle ait ». Et croyez-moi, elle sait s'en servir et viser juste. Du reste Vous l'avouerai je  , j’ai même un peu peur de l’interviewer tant son expérience en la matière est impressionnante mais surtout tant son engagement féministe me fait sentir merdeux. Oui merdeux comme quelqu’un qui a un jour merdé, par  un geste, une parole, une réflexion ou une blague sexiste qu'il aurait adressé à une personne du genre féminin sans même en percevoir la dimension problématique, ce qui est presque plus grave. Heureusement, dans son dernier ouvrage ce que le féminisme m’a fait »  qui vient compléter le précédent intitulé « je suis une sur deux » - j’y ai lu que les hommes ont leur place dans les combats pour une société égalitaire. De plus, en interview elle dit que les mecs ont le devoir de  s’engager davantage… pour eux-mêmes !

 

Alors je vais essayer d’être à la hauteur de l’être humain que je veux être et partir à la rencontre de celle qui se présente parfois avec humour comme « Journaliste – Société, intimité, féminité, virilité, liberté, égalité, sexualité, et plein d'autres trucs en ité. Sauf Nativité »

 

bonne écoute !


Emission présenté par Alexis Himeros

https://instagram.com/alexishimeros


Avec Giulia Foïs

https://www.instagram.com/giuliafois75



merci au Wanted Paris
https://www.facebook.com/WantedParisHalleSecretan/
https://www.instagram.com/wanted_paris/



Hébergé par Ausha. Visitez ausha.co/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.

Transcription

  • Speaker #0

    Bonjour, je suis Alexis Iméros et vous écoutez Un Café au Comptoir.

  • Speaker #1

    Un café au comptoir. Un café au comptoir.

  • Speaker #0

    Mon invité du jour est journaliste, productrice de radio, chroniqueuse et féministe. Et en plus... Ce n'est même pas un gros mot. Moi, je suis super content de l'accueillir parce que sa voix a rythmé un bon nombre de mes réveils quand elle officiait dans les matinales de France Inter, une époque où je ne connaissais pas vraiment le mot que j'ai cité un peu plus haut, celui de féministe. Vous trouvez que j'insiste ? Attendez pour juger. Ainsi, mon invité a tenu pendant quelques années une chronique dans le magazine Marie-Claire, une chronique appelée Féministe, ta mère. Si vous pensez qu'on parle trop du féminisme, peut-être que vous allez devoir changer de podcast, parce que le sujet le plus souvent traité par la personne que je reçois est celui du... féminisme. Dans Allô Julia, pour le magazine Elle, cette spécialiste des questions de genre s'est attaquée à celles que se sont posées les femmes de la génération MeToo, et pas seulement les femmes d'ailleurs, mais toujours sous un angle féministe. Parfois quand elle se présente, elle se décrit comme vivante, survivante et supervivante. Pourquoi ? On trouvera peut-être la réponse dans les deux livres dans lesquels elle a raconté ce que c'est de vivre le patriarcat dans sa propre chair, en deux mots et sans tergiverser le viol. Féministe donc, solidaire du mouvement MeToo, elle se lève, engage le combat, celui d'une lutte nécessaire pour une société plus juste, et pour cela elle prend la parole. D'ailleurs, selon elle, la parole est la seule arme qu'elle ait, et croyez-moi, elle sait s'en servir et viser juste. Du reste, vous l'avouerez, j'ai même un peu peur de l'interviewer, tant son expérience en la matière est impressionnante, mais surtout tant son engagement féministe me fait sentir merdeux. Oui. Merdeux, comme quelqu'un qui a un jour merdé par un geste, une parole, une réflexion ou une blague sexiste qu'il aurait adressé à une personne du genre féminin, sans même en percevoir la dimension problématique, ce qui est presque plus grave. Heureusement, dans son dernier ouvrage, Ce que le féminisme m'a fait qui vient compléter le précédent intitulé Je suis une sur deux j'y ai lu que les hommes ont leur place dans les combats pour une société égalitaire. Et de plus, en interview, elle dit que les mecs ont le devoir de s'engager davantage pour eux-mêmes. Alors, je vais tenter d'être... À la hauteur de l'être humain que je veux être et partir à la rencontre de celles qui se présentent parfois avec humour. Comme journaliste, société, intimité, féminité, virilité, liberté, égalité, sexualité, plein de trucs en IT sauf nativité. Nous sommes donc à Paris dans le 19e arrondissement au café Wanted. Et je vais prendre avec elle un café au comptoir. Bonjour Julia Foyce.

  • Speaker #1

    Mais bonjour !

  • Speaker #0

    À la page 111 de votre livre, il est écrit à chaque proposition d'interview, je dis oui. Je n'ai pas toujours envie, mais je le fais. dont acte, parce que vous êtes ici. Qu'est-ce qui fait qu'en 2024, à l'heure où le mot féministe est dans toutes les conversations, est dans toute la société, omniprésent dans la communication, dans la publicité, on peut vraiment penser, malgré tout, que la parole féministe, elle est toujours en sursis.

  • Speaker #1

    Moi, c'est un mot que j'adore. J'entendais votre portrait, je l'ai trouvé... Très chouette d'ailleurs et je vous en remercie. Merci à vous. Quand je dis que je dis toujours oui aux interviews, mais que j'y vais parfois à reculons, c'est quand je sais que la parole que je vais devoir prendre va être sur un sujet qui ne correspond pas au meilleur chapitre de mon histoire, qui est ce viol. Moi, j'aurais envie évidemment de parler d'autre chose. J'aurais envie de parler de mes fils que j'adore. J'aurais envie de parler de la cuisson des pâtes que je maîtrise à la perfection. Et en même temps... Et évidemment qu'on m'interroge aussi là-dessus. Et évidemment que c'est nécessaire parce que sur le sujet, on a une seule arme, en fait, c'est la parole. Donc j'y vais. J'y vais, mais à chaque fois, je me dis, putain, le jour où on m'interrogera sur autre chose, c'est qu'on aura gagné. Ce jour-là n'est pas encore arrivé parce qu'effectivement, les droits des femmes sont loin d'être acquis. On le voit, on voit ce qui se passe sur l'IVG et sur la contraception aux Etats-Unis. On a vu ce qui s'est passé en Pologne, de tous les côtés. s'est attaquée. C'est de Beauvoir qui disait qu'il fallait rester vigilante une vie durant et elle a raison. C'est-à-dire qu'on fait face, on a... Allez, si on prend le combat des suffragettes, on a un siècle et demi de féminisme face à des millénaires de patriarcat. On est entravés, empêchés, de tous les côtés écrasés par une charge mentale, émotionnelle, domestique, affective qui fait que le rapport de force est toujours aussi déséquilibré et pourtant on va au combat. Pourtant on va au front parce qu'on est convaincus et je suis convaincue que le projet que l'on... porte et celui d'une société qui sera meilleure pour toutes et pour tous. Donc on y va, mais en ayant conscience, c'est drôle ce combat parce qu'on y met toutes nos forces, j'y mets toutes les miennes, en sachant très bien que je ne serai peut-être pas de ce monde, le jour où on aura gagné. Je sais qu'on gagnera, je sais que le sens de l'histoire est celui-là, mais je ne sais même pas si je serai là pour le voir. Et en attendant, je sais que, comme toutes les féministes, j'aurais pris des sauts de merde sur la gueule. Donc, pour y aller, dans ce combat, il faut avoir un moteur archi-puissant.

  • Speaker #0

    J'ai lu également dans votre livre que dans 286 ans, on aura atteint l'égalité homme-femme, source de l'ONU. C'est un petit bout de temps.

  • Speaker #1

    Je vous dis, je ne sais même pas si je serai là pour le voir. Quand je dis que le sens de l'histoire est le nôtre, en fait, il faut se représenter les choses d'un point de vue macro. Si vous partez de la Révolution française, où on a promis l'abolition des privilèges, l'instauration d'une démocratie, comment dire, ce combat a porté ses fruits pour la moitié de la population. Et puis un jour, on a écrit suffrage universel, parce que ça y est, les citoyens avaient le droit de voter, mais je dis bien les citoyens, pas les citoyennes, parce qu'en fait, ça s'est appelé suffrage universel masculin. Donc cette énorme mascarade a fonctionné pendant trois siècles. où on a pu se raconter que l'universel, c'était le masculin. Le féminisme, c'est quoi ? C'est la deuxième moitié de cette révolution, c'est le parachèvement de cette révolution, et c'est l'abolition de tous les privilèges. Et donc aussi des privilèges masculins, pour qu'enfin on jouisse d'une égalité parfaite en droit. Je ne parle pas d'une indifférenciation des genres, je parle d'une égalité en droit, forcée de constater qu'on n'y est pas, malheureusement pas du tout. Est-ce que... Est-ce que l'ampleur du chantier me désespère parfois, mais pas souvent ? Est-ce que la perspective de ne pas être là le jour où on aura gagné me décourage ? Non. Non, je crois que je ne serais pas moi aujourd'hui si je n'étais pas féministe et si je n'étais pas dans ce combat-là. C'est un combat qui vous donne une colonne vertébrale et qui donne du sens aux choses que vous faites, donc c'est quand même pas mal.

  • Speaker #0

    Qu'est-ce qu'on dit aux hommes qui ont un sentiment ? de déclassement. Je souris parce que j'ai vu votre grimace et qu'on fait une émission en audio qui ont ce sentiment de déclassement et qui s'engagent dans des luttes, à mon sens, totalement incompréhensibles. Je pense aux masculinistes.

  • Speaker #1

    Je trouve qu'ils ont le mérite de montrer sans aucune contestation possible la raison pour laquelle on doit se bagarrer, la raison pour laquelle il faut être féministe. Donc ils ont au moins ce mérite-là, c'est qu'ils sortent du bois et qu'on voit très bien qui on a en face. Qu'ils maximalisent une résistance que l'on trouve en revanche partout, à des degrés moindres, heureusement, mais partout. C'est Virginia Woolf qui disait que la résistance au féminisme est au moins aussi intéressante à étudier que le féminisme lui-même. Quand vous voyez les réactions outrées, la colère, déclenchée par des déclarations de Sandrine Rousseau sur la côte de bœuf. On se parle d'une côte de bœuf.

  • Speaker #0

    Le barbecue,

  • Speaker #1

    c'est ça ? Ça les a rendus fous. Donc là, on se dit, ok, en fait, on a touché un nerf. Il y a quelque chose qui s'est passé là. Et effectivement, sur la question du féminisme, c'est vraiment marrant de constater à quel point, en fait, on touche à des choses très archaïques. On appuie sur des nerfs et donc ça gueule de façon totale. irrationnel c'est à dire que ça continue de se raconter que par exemple on voudrait grand remplacer les hommes que par exemple ce qu'on veut c'est une pluie de couilles sur la planète terre que on est les hommes et que c'est pour ça qu'on se bagarre en fait si vous regardez le plateau télé les débats sur cette question là l'hystérie elle est de quel côté dire que les meufs moi je les trouve toujours extrêmement calme posé elle apporte des chiffres elle apporte des faits et en fait et en face on a des mecs qui beuglent et qui éructe Parce qu'on est en train de leur retirer leurs privilèges, ça les rend fous. Mais ça les rend fous, c'est-à-dire qu'ils ont quitté toute rationalité. Je pense à Emmanuel Todd, je pense à Finkelkraut, je pense à tous ces mecs-là qui sont censés être des sommités intellectuelles et qui perdent pied, quoi. C'est hallucinant. Et en fait, ce n'est plus les intellos qui parlent dans ces cas-là, c'est les petits garçons. Tout à coup, c'est...

  • Speaker #0

    C'est une régression de leur part. Mais peut-être que ce n'est pas ça le plus grave, parce que... Tout le respect que je peux avoir pour des personnes comme Emmanuel Todd ou comme Viggold Crote, pour l'ensemble de ce qu'ils ont pu faire, malgré tout, je pense, leur œuvre littéraire, malgré tout, j'ai l'impression qu'ils sont insignifiants. En fait, leur parole est plutôt insignifiante. Mais le réel danger, c'est plutôt des générations plus jeunes qui, eux, ont accès à des médias comme TikTok, comme Instagram, et qui maîtrisent mieux tous ces relais-là.

  • Speaker #1

    Oui, alors moi, je pense souvent, il y a eu un... un attentat masculiniste en préparation, je crois, à Bordeaux, qui a été déjoué. Moi, je pense que ça finira par arriver. Et que le pire, c'est qu'on dira que c'est de la faute des féministes, parce qu'elles ont déclenché la colère masculine. Et comme d'habitude, on ne pointera jamais celui qui a tué, mais on responsabilisera les femmes. Ce sera à elles de se justifier. Vous avez gueulé, vous les avez rendus fous, ils ont pris peur, ils se sont sentis déclassés, comme vous dites, et donc ils ont tué. Ça arrivera. C'est déjà arrivé dans l'histoire. Ça arrivera de nouveau. Ça, c'est quelque chose auquel je pense souvent. Je me dis, un jour, il y en a un qui va passer à l'acte. Il y a une violence contre les femmes qui est hallucinante. Dans ce pays et puis dans le monde entier en fait, c'est-à-dire que le patriarcat s'est quand même construit sur l'écrasement de la moitié de l'humanité. Les religions se sont fait le relais, on ne sait pas qui a alimenté qui, les hommes ou la religion, mais l'un dans l'autre ils se sont serrés la main très fort pour nous écraser bien comme il faut. Et s'ils nous ont écrasé bien comme il faut, je crois que c'est parce qu'ils ont une trouille bleue. de ce qu'on peut faire en fait, de ce qu'on peut être. Et puis parce que l'être humain se raconte qu'il n'est jamais plus lui-même que quand il écrase l'autre, c'est-à-dire qu'il ne pourrait coexister, il faudrait qu'il soit au-dessus. Et ça, ça dure depuis la nuit des temps. Donc moi ça me fait doucement rigoler, ou ça me met dans une colère noire suivant les jours, quand j'entends que les féministes font la guerre aux hommes. On se parle de quoi en fait ? On se parle de quelle guerre ? C'est-à-dire qui ? meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint, qui subit une tentative de viol toutes les sept minutes, qui est cogné, harcelé, humilié tous les jours, 230 000 victimes de violences conjugales par an, 230 000, une femme sur cinq, harcelée au travail, qui fait la guerre à qui, qui est violent avec qui ? Je crois qu'on a à peu près la réponse.

  • Speaker #0

    Est-ce que le féminisme, ce n'est pas également une lutte contre le capitalisme ?

  • Speaker #1

    Bien sûr que si, parce que ça obéit à la même logique, c'est-à-dire que le capitalisme, c'est l'exploitation de toutes les ressources possibles pour atteindre des objectifs qui sont toujours de l'ordre de la production et de la performance. C'est une logique extrêmement masculine. Alors, je ne dis pas que tous les hommes sont dans cette logique-là, je parle du masculin, de la construction du masculin, qui est fondée sur l'écrasement de l'autre. Et si vous prenez la question des tâches ménagères, par exemple, on dit beaucoup Waouh, ça a quand même vachement avancé ! Sans déconner, moi, il n'y a pas une chronique que j'ai faite sur les tâches ménagères sans recevoir un mail de quelqu'un qui me disait Pardon, moi, j'ai débarrassé la table hier, quoi. Wow, super, super. C'est-à-dire qu'en fait, les mecs font 5 minutes de tâches ménagères, il faudrait leur faire une espèce de holà, des drapeaux, des banderoles, etc. quand nous, on fait ça tous les jours et que tout le monde trouve ça normal. Sur la question des tâches ménagères, il y a eu un progrès, c'est vrai. En 20 ans, les hommes ont consacré une minute de plus par jour aux tâches domestiques. Bravo ! N'empêche que, on est quand même toujours sur un rapport de 20-80, c'est-à-dire que c'est les femmes qui se sont tout simplement, elles ont obtenu le droit de travailler, mais elles se sont tout simplement rajoutées une deuxième journée.

  • Speaker #0

    Je suis désolé de vous couper, c'est anecdotique, est-ce que c'est pas juste l'arbre qui cache la forêt, le sujet des tâches ménagères ?

  • Speaker #1

    Alors c'est pas que anecdotique parce que ça nous alienne beaucoup, c'est-à-dire que même moi, je vais par exemple... Enfin moi j'ai un... Un compagnon, heureusement, parce que sinon il serait plus vivant, qui fait largement plus que tous les mecs que je peux croiser dans mon entourage. N'empêche que, à cause de cette putain de chasse aux mammouths, il y a une différence essentielle entre lui et moi, c'est qu'il va s'occuper de la maison une fois que son travail est fait. Moi, je vais me mettre au travail quand tout est réglé dans la maison. Et ça, ça entrave. L'écriture de ce bouquin a été super difficile parce que... Parce que j'ai deux garçons qui sont petits, et que comme je vous dis, ma priorité c'est celle-là, c'est les garçons, c'est la maison, il faut que ça tourne, etc. Je me mettais à travailler très très tard, et crever en fait. Et c'est pour ça que la plupart des autrices féministes n'ont pas d'enfants, ou sont lesbiennes, il n'y a pas de secret, c'est-à-dire que nous, les femmes hétéros, on est élevées pour prendre soin de l'autre. Donc on fera toujours passer l'autre avant. Donc la création de type artistique, littéraire, etc. Ça passe bien après. Donc non, c'est pas anecdotique. C'est vraiment du concret, en fait. Mon féminisme, à moi, il est extrêmement concret. C'est quelque chose de très incarné. Et pour en venir à la question du capitalisme, si on a pu se dégager quelques heures pour travailler, pour créer, parce qu'on va pas se mentir, c'est quand même hyper agréable de bosser. Quand on fait un boulot qui nous plaît, on apprend des choses, on rencontre des gens, on y trouve du sens, on y trouve de la reconnaissance. Enfin, je veux dire, moi, j'adore bosser. J'adore. Si j'ai pu me dégager du temps, c'est parce que j'ai délégué. Mais j'ai pas délégué à mon mec, en fait. C'est parce que j'ai des nounous. Enfin, des nounous. Une nounou, des baby-sitters, parce que j'ai une femme de ménage. Et c'est qui ? C'est des femmes beaucoup plus précaires que moi et en général des femmes racisées. Donc en fait, le capitalisme c'est ça aussi. C'est-à-dire que pour que quelques-uns s'en sortent, il faut écraser tous les autres. Donc la lutte contre le masculinisme flirte avec la lutte contre, pas forcément le capitalisme, mais en tout cas le libéralisme, parce que tout ça, ça marche ensemble. Et l'exploitation des ressources de la planète, c'est pareil. C'est-à-dire que c'est aussi pour ça que... les leaders politiques les plus féministes sont chez Europe Écologie Les Verts. Tout ça marche ensemble. C'est l'idée. Quel monde on veut ? Est-ce qu'on veut un monde pyramidal, construit sur une espèce de hiérarchie des normes, où quand on est tout en haut de la pyramide, on a le droit d'écraser tous les autres ? Ou est-ce qu'on essaye de travailler à un monde un peu plus paritaire, un peu plus divers, un peu plus ouvert ? Moi, je sais de quel côté je me trouve.

  • Speaker #0

    Est-ce que, quand on voit certaines autrices, je pense à Virginie Despentes, qui vont quelquefois annoncer que même leur sexualité change parce que c'est leur manière de lutter pour le féminisme. Quelle est votre idée là-dessus ?

  • Speaker #1

    Moi je la comprends. Il se trouve que moi je suis actuellement en couple hétéro, que j'ai toujours été en couple hétéro, que mon compagnon, j'en suis encore très amoureuse. Donc... je vais pas le quitter pour une femme par principe. Évidemment que non. Maintenant, je comprends très bien ce mouvement-là de toutes ces femmes et du lesbianisme politique, je le comprends très bien, pour plein de raisons. La première, si on se parle juste d'intimité, quand vous voyez le taux de satisfaction sexuelle des lesbiennes, franchement, il fait rêver. Et ça, pourquoi ? Parce que pendant des années, on a fait croire aux femmes que l'orgasme clitoridien était un orgasme de petite fille, que le seul qui valait, c'était l'orgasme vaginal, et ça, c'est aussi une vaste blague. C'est-à-dire que même dans notre pieu, le patriarcat s'est enfoncé pour nous faire croire que la seule sexualité valable, c'était celle qui consistait à pénétrer une chatte par une bite. Donc, ce que les nanas disent, mais Ovidie le dit très bien aussi, c'est Eh, les gars, en fait, la blague, c'est que ça se passe pas du tout comme ça ! Et le problème qu'on a aussi, c'est que si la sexualité est phallocentrée et uniquement pénétrative, alors elle commence. avec la pénétration et s'arrête avec l'éjaculation masculine. Pareil, spoiler les gars, en fait, chez nous ça ne se passe pas du tout comme ça. Donc ce malentendu au lit, soit on a l'énergie de le dissiper avec son compagnon, soit en fait on se lève et on se casse. C'est aussi simple que ça. Donc bien sûr que je le comprends et je dirais même qu'on peut l'étendre à toutes les sphères de la vie à deux parce que, encore une fois, même chez moi où globalement... ça se passe bien, il y a des petites éruptions de patriarcat chez mon mec, et il y a chez moi des moments où je me censure, je m'interdis des choses, etc. et où je me giflerais, je me dis mais merde en fait, t'as le droit, vas-y. Donc on est héritier d'une histoire. Donc forcément, elle nous rattrape, même dans les couples les plus ouverts ou les plus égalitaires, ce que vous voulez, ça nous rattrape. Je peux comprendre qu'on soit fatigué de ça, évidemment. Et c'est d'ailleurs pour ça que les féministes font peur. Parce que les féministes, en gros, ce qu'elles disent, c'est... Alors en fait, soit on change les règles du couple hétérosexuel, et effectivement vous y trouverez un peu moins votre compte, soit en fait on va se mettre en couple avec des femmes. Donc évidemment que ça ne réjouit pas grand monde, ça. Chez les mecs hétéros, je veux dire.

  • Speaker #0

    On va faire un petit vrai ou faux. Un quai-fé ou contre-vraie. Julia Foy, ce vrai ou faux. Au concours du Centre de formation des journalistes, à l'été 1998, vous avez porté un pantalon cargo, un Marcel et des tongs.

  • Speaker #1

    Oh ouais, la honte, la honte. Alors, ce qui est marrant, c'est que la secrétaire du CFJ, Michèle Martin, Michmart, si tu m'entends, elle m'en parle encore. En fait, je suis allée à ce concours en touriste, quoi. C'est la honte, c'est la honte. En fait, je prépare ce concours, je me dis... La vocation m'est venue très tard. Moi, je rendais ouf mon frère qui lui était polytechnicien. Ça vous donne une idée du personnage. Moi, je disais, en fait, mon ambition dans la vie, c'est d'être heureuse de me lever le matin. En fait, ça a l'air anodin, mais c'est la chose la plus importante qui soit. Ça veut dire être au bon endroit. Et ça, c'est parfois le combat de toute une vie. Mais comment ça allait se traduire, je ne savais pas. Moi, je voulais faire une maîtrise sur Balzac. Mon frère me disait, mais ça va servir à quoi ? Et moi, je disais, on n'est pas obligé de faire des choses utiles. Je vais le faire parce que j'ai envie de le faire. Et pendant l'année, je me suis dit, tiens, en fait, j'aime bien écrire. J'aime bien les gens. J'ai envie d'un truc où je ne suis pas enfermée dans un bureau, etc. Tiens, si je devenais journaliste. Bon, là, ce que je vais faire, j'avais un plan. Tous les plans sont faits pour être déjoués, mais mon plan, c'était, je passe une seule école, parce qu'il n'y avait pas d'anal à l'époque. Donc au moins, je sais comment ça se passe dans les écoles. Derrière, je me fais un an de stage, parce que je n'étais pas débile non plus. Je n'avais pas ouvert un journal de ma vie, et je n'avais pas posé les pieds dans une rédac de ma vie. Donc je savais que j'avais des grosses lacunes. Je me dis, je me passe une année à me préparer, et après, je passe toutes les écoles. Et en fait, de façon hallucinante, j'ai été prise à l'oral. Je n'ai même pas compris ce qui s'était passé. Et donc, je suis arrivée à l'oral en tongs et en pantalons de cargo parce que je me suis dit, de toute façon, je ne l'aurai pas. Donc, je ne vais pas faire un effort vestimentaire. Vous n'êtes pas dans l'export. Et en fait, j'ai été prise... Alors, attention, j'ai été prise sixième sur les listes d'attente et avec un sentiment d'imposture qui ne m'a pas quitté pendant dix ans. Donc après, je l'ai payée, mais alors, bien comme il faut. Mais je pense que j'ai vraiment été à la fois reçue sur un malentendu et en même temps, ce métier m'allait bien.

  • Speaker #0

    Vrai ou faux, vous avez fait votre première manif dans le ventre de votre mère.

  • Speaker #1

    Oui, ma mère, dont je parle beaucoup dans le livre, avec qui je m'engueule beaucoup sur les questions féministes, je lui dois quand même une chose, c'est que la graine de la révolte, c'est elle qui l'a plantée. Très clairement. Mon père était... J'adorais mon père, j'étais très très proche de lui. Mais mon père n'attendait pas grand-chose de l'humanité. Lui, ce qu'il aimait, c'était ses livres et ses enfants. Et pour le reste, il était un peu... Il était cherché en physique, il était un peu dans sa bulle. Ma mère, elle était convaincue que le monde, on pouvait le changer. Et qu'il fallait même tout faire pour ça. Elle avait été psy au planning familial. Elle a fait 68, elle a fait la manifestation de la rue de Charonne. Elle a toujours manifesté ma mère. Donc, je le dis ironiquement, mais pas que. Je pense que vraiment, mes premières manifs, c'était dans son ventre, très clairement.

  • Speaker #0

    Vrai ou faux, après avoir enregistré une émission de radio, vous avez faim ?

  • Speaker #1

    Oh putain, oui. Pardon. Non mais moi je suis un ventre en fait, c'est-à-dire que j'ai l'air de parler comme ça, de brasser des concepts, etc. Pas du tout. Moi, il faut me nourrir, il faut nourrir la bête, sinon je ne suis pas capable de produire quoi que ce soit. J'ai encore rien. Ne vous inquiétez pas, je vais commander après. Et effectivement, pendant une émission, en fait moi je donne tout pendant une heure, mais je suis à donf. Je suis vraiment à donf. Et du coup, quand je sors de là, ma première phrase, et l'équipe avec laquelle je travaille se marre, parce que ma première phrase c'est toujours Oh, j'ai faim ! Systématiquement, donc oui. Et par ailleurs, j'aime manger, donc... J'ai renoncé à ma taille 36 il y a bien longtemps pour pouvoir me resservir de pâtes quand j'en avais envie.

  • Speaker #0

    Que vous savez cuire à la perfection.

  • Speaker #1

    Ah bah oui, non mais parce que ça, j'ai le bon ustensile. Je vous en parlerai peut-être une autre fois, mais il faut le bon ustensile, sinon on n'y arrive pas.

  • Speaker #0

    C'est à la vapeur un truc comme ça ?

  • Speaker #1

    C'est pas un truc comme ça les pâtes. C'est pas un truc comme ça les pâtes, on dit pas c'est un truc comme ça. Ça c'est non.

  • Speaker #0

    Ça fait pour une question.

  • Speaker #1

    Ah oui, je peux devenir violente. Il y a des sujets avec lesquels je déconne pas, c'est les créoles et les pâtes. Ça c'est clair que non. En fait, il faut avoir une passoire intégrée à la casserole, ce qui fait que quand les pâtes... arrive à deux minutes de la fin de cuisson parce que la cuisson se termine dans la sauce de pâte bien évidemment tous les italiens le savent en fait vous soulevez votre passoire et vous jeter directement dans la sauce qui fait qu'il n'y a pas ce moment de passage dans l'évier où les pattes ont le temps d'être saisie par le froid et là c'est foutu je vous ai livré le point le plus important de cette interview c'est celui là

  • Speaker #0

    J'ai lu ça je ne peux pas le croire mais vrai ou faux Vous pouvez vous lever à 4h du matin pour soigner les panaries de vos amis. Qu'est-ce que c'est que cette histoire ?

  • Speaker #1

    C'est un peu une vanne, mais pas que. C'est vrai que je suis, je crois, alors moins depuis que j'ai des enfants, j'ai été élevée par mes parents dans l'empathie. Je crois que l'empathie, c'est la plus grande des forces, celle de la capacité de se mettre à la place de l'autre. Et l'attention à l'autre, en fait. Le fait de pouvoir prendre soin de l'autre, c'est quelque chose qui est... que je fais aussi, je crois que je fais avec mes enfants, que je fais avec mon mec, que je fais un peu avec tout le monde, mais je ne suis pas la seule à faire ça. Mais c'est vrai que j'ai un truc, moi, ma mère était comme ça. Si une copine m'appelle parce que ça ne va pas, je déclenche le plan hors sec. C'est-à-dire que je ne lui dis pas, on s'en reparle demain. Je ne lui dis pas, oh, ça va, ce n'est pas grave. Je dis, OK, j'arrive. Alors, attends, je vais mobiliser qui ? De qui est-ce qu'on a besoin dans cette histoire ? Problème, bon, solution, bon, action. Voilà, quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit, elles savent qu'elles peuvent m'appeler, je suis là.

  • Speaker #0

    Et les pâtes à la fin.

  • Speaker #1

    Évidemment ! Non, par exemple, alors je pense à cette amie-là. La vanne est venue avec une copine à moi qui bosse à l'IB maintenant, que j'adore, qui était au CFJ avec moi. On en rigole souvent, mais il y a eu toute une période de sa vie où ça n'allait pas. Moi, j'habitais à côté de l'IB et le midi, elle venait prendre des bains chez moi. Si vous essayez de faire du bien, viens prendre un bain. Et là, on ne parlait pas, c'était une taiseuse à l'époque. Et évidemment que je respectais ça. Mais par contre, il y avait un truc de douceur à lui faire couler l'eau d'un bain bien chaud, lui mettre un peu de bain moussant, justement ne lui poser aucune question, mais qu'elle ait une demi-heure pour prendre un bain au milieu de sa journée. Et c'est avec elle que cette vanne m'est venue. Je ne sais plus qui l'a faite cette vanne du panarien à 4h du mat, mais ça vient d'elle. Ça vient de notre amitié.

  • Speaker #0

    J'ai essayé de faire ça pendant longtemps, quand j'avais des amis qui n'allaient pas bien. Je leur disais, viens prendre un bain à la maison. Mais elles me prenaient toutes pour un pervers.

  • Speaker #1

    Voilà. Valait mieux. Venant de moi, ça passait mieux.

  • Speaker #0

    Bien sûr. Vrai ou faux ? Et là, on va entrer encore un peu plus dans le vif du sujet de ce livre dont je parle juste ensuite. On a un souci dans la construction du masculin.

  • Speaker #1

    Clairement. Très clairement, et il faut vite qu'on s'en débarrasse parce que c'est... Regardez, les hommes sont responsables de 85 à 95% des homicides, que ce soit les féminicides, que ce soit les accidents de la route. La plupart des 9 fois sur 10, les violences, c'est eux. Donc on a tous un souci parce que personne n'a envie de vivre dans une société qui est violente avec des morts sur la route et avec des morts dans la rue, avec ce que vous voulez. Donc, soit on se dit que c'est dans les gènes de l'homme et c'est comme ça, et on ne fait rien, soit on se dit qu'en fait, peut-être qu'il y a un truc qu'on appelle culture d'un masculin toxique ou quelque chose comme ça, et on s'y attaque. Et on essaie de comprendre ce qui, dans l'éducation qu'on fait aux garçons, autorise, voire encourage, ce genre de comportement délétère, encore une fois, pour tout le monde. Et moi, j'ai deux petits garçons, et je me rends compte que c'est... une interrogation de presque tous les jours. Ça ne veut pas dire que tous les jours, je me prends la tête à me dire comment j'en fais les mecs bien. Mais c'est quelque chose qui sous-tend très fortement l'éducation que je leur donne. Et je vous donne juste un exemple. J'ai un peu merdé parce que mon fils aîné a quatre amoureuses. Donc là, il y a un truc que j'ai dû louper sur la polygamie. Bon, je vais me rattraper. Mais donc, il a quatre amoureuses. Et en fait, l'une d'elles est toute petite et toute chétive. Et lui, c'est une espèce d'armoire à glace. Et en fait, il est dans la cour de l'école et il veut l'embrasser. Et en fait... Il l'embrasse. Et en fait, j'ai eu ce premier réflexe de maman italienne. Je me dis, ça, c'est un mec invrais. Mais je l'ai eu un quart de seconde. J'ai attrapé sa capuche, je l'ai tirée en arrière. Je lui ai dit, est-ce que tu lui as demandé si elle était d'accord, en fait ? Parce que ça commence là. Et hier, dans la rue, j'étais hyper contente parce qu'on se baladait. Après, mon fils, il me fait marrer parce qu'il draguerait un lampadaire, mais vraiment. Et on passe à côté d'une gamine. Il a peur de rien, il doute de rien. On passe à côté d'une gamine. Il regarde, il fait, je peux te faire un bisou ? Et bon, elle a dit non, et du coup, il n'a pas fait de bisous. J'ai dit, bon, voilà, ça, c'est gagné, c'est acté. Et ça passe par là. Et il faut absolument le faire, parce qu'on ne peut pas pleurer sur le nombre de féminicides qu'on a en France et qui n'est franchement pas... On n'a pas de quoi être fiers, très clairement. Et en même temps, ne pas se poser la question de comment tout ça arrive. Et tout ça arrive à cause de l'éducation des garçons.

  • Speaker #0

    Comment il est né ce livre, ce que le féminisme m'a fait, que vous venez de sortir chez Flammarion, et qui est une sorte de suite, de réponse au précédent livre, Je suis une sur deux ?

  • Speaker #1

    Alors, Je suis une sur deux, c'est 20 ans de gestation, c'est l'envie de raconter cette histoire, le viol mais aussi l'acquittement, il y a eu procès dans mon cas. C'est quelque chose de... Je dirais la démarche, elle est presque solennelle en fait. Ce que le féminisme m'a fait est né d'un fou rire dans ma cuisine où en fait c'était un jour... En fait c'était une journée de merde, vous savez, mais pas une journée de merde grave, mais que des trucs qui vont pas en fait. Ça marche pas, y'a rien qui marche. Moi y'a des moments où je rends l'antenne en fait, j'ai dit bon ok elle me saoule cette journée, je me cale sur mon fauteuil et puis je me mets comme tout le monde à scroller et là je tombe sur une vidéo sur Twitter où une nana qui a une trentaine d'années... dit Moi, quand je suis rentrée en féminisme, rien que l'expression m'a fait halluciner, comme si on rentrait dans les ordres, j'y ai vu une promesse de bonheur. Alors j'ai fait tout ce qu'elles m'ont demandé de faire. Je me suis même, j'ai même arrêté de me maquiller puisqu'elles interdisent de se maquiller. Vous pouvez me regarder, vous voyez comme c'est vrai. J'ai arrêté de me maquiller alors que j'adore ça. Et aujourd'hui, j'ai 30 ans, j'ai pas de mec et j'ai pas d'enfant et j'ai raté ma vie. Et en fait, j'explose de rire. Puis après, je me dis Putain, mais... Ça veut dire qu'en 2024, une nana qui a 30 ans, qui n'a pas de mec, qui n'a pas d'enfant, croit encore qu'elle a raté sa vie, si elle n'existe pas par elle-même en fait. C'est-à-dire que les femmes, on considère qu'on existe parce qu'on est femme de ou mère de, et tout à coup, elle toute seule, elle n'existe pas. Je me suis dit qu'est-ce qu'on a raté ? et juste après, je me suis dit mais moi, il m'a fait quoi le féminisme ? Il m'a fait quoi ? Et ça m'a travaillé toute la journée. La première réponse, c'était il m'a fait du bien Et je me suis dit que si je voulais en faire un livre, il fallait que je développe un peu plus.

  • Speaker #0

    C'est un peu... Il y a écrit dans ce livre, une femme sans homme, c'est comme un poisson sans bicyclette.

  • Speaker #1

    J'adore celle-là.

  • Speaker #0

    Vous l'avez trouvée où ?

  • Speaker #1

    Alors, on dit que c'est Gloria Steinem qui l'a dit. Mais elle-même disait qu'elle l'avait empruntée à quelqu'un d'autre. Donc on ne sait pas. Mais en tout cas, c'est une phrase féministe assez connue.

  • Speaker #0

    C'est du socialisme.

  • Speaker #1

    Et elle est géniale cette phrase. Parce qu'en fait, il y a cette espèce d'idée que nous n'existerions jamais pour nous-mêmes. Vous pouvez faire un essai. Vous pouvez regarder dans l'espace public, une femme assise sur un banc, ça n'existe pas. Pourquoi ? Parce que c'est très bien qu'un mec va s'asseoir assez rapidement. Parce qu'une femme ne peut pas être seule. Une femme est forcément dans la tente de quelque chose et préférablement d'un homme. Là où des mecs seuls à des terrasses de café ou sur des bancs, vous en avez plein. Nous on n'a pas d'existence autre que dédiée à l'autre. Je veux dire, jusqu'au code Napoléon où il était écrit qu'on passait de la tutelle d'un père, celle d'un mari, on a mis des décennies à s'en affranchir mais évidemment il reste encore quelque chose. Donc nous on nous colle un poupon dans les bras quand on a, allez, deux heures et demie de vie et on comprend très vite qu'il va d'abord falloir prendre soin de l'autre avant d'exister par soi-même. Et ça, le féminisme vous apprend ça et vous apprend à vous... détachée de ça et à vous couper petit à petit toutes vos chaînes et à exister pour vous-même. Ça ne veut pas dire égoïstement, ça veut dire comme les mecs le font pour eux-mêmes.

  • Speaker #0

    Et une femme seule, souvent dans les cafés, en tout cas au début du XXe, c'était une prostituée.

  • Speaker #1

    Ouais, et puis même maintenant, vous le voyez assez peu. Moi, je vais dans un café seule quand j'ai quelque chose à faire. Je prends un ordi. J'ai quelque chose à faire.

  • Speaker #0

    Il y a un motif.

  • Speaker #1

    Ouais. Alors que des mecs qui squattent l'espace public tout seuls, il y en a plein ! Alors en général ils ont beaucoup moins de choses à faire parce qu'on revient aux tâches ménagères. Ils n'ont pas cette to-do list mentale dont on raye chaque item, mais vite, vite, vite, il y a un nouvel item qui vient se rajouter. Donc ils ont quand même beaucoup plus de temps pour eux. Et ça c'est pas mon délire féministe, je veux dire, toutes les études le disent, ils ont du temps pour eux. Et l'espace public leur appartient. Il y a un test à faire qui est hyper marrant, que je recommande à tout le monde, enfin qui est marrant mais... Que je recommande aux nanas mais pas de le faire trop trop longtemps parce que ça fait mal. En fait... Les trottoirs sont petits, notamment à Paris, mais aussi parce que l'espace public a été pensé pour des hommes et par des hommes. Les urbanistes ont longtemps été des mecs, donc les trottoirs sont tout petits, donc avec les poussettes, on peut toujours courir pour passer. Mais ça provoque aussi autre chose, c'est que quand vous vous baladez dans la rue, s'il y a un mec et une nana qui marchent l'un vers l'autre, vous regarderez, si la femme ne s'écarte pas, il se rende dedans, parce que le mec jamais ne fera un pas de côté. Jamais. L'espace public est à lui. Regardez, il pisse, il crache. Qui fait ça ? Chez les gonzesses. À part une nana qui serait totalement marginalisée, ça n'arrive pas. Vous ne voyez pas une nana soulever sa jupe et se mettre à pisser par terre ou même à cracher ? Les mecs, si. Encore une fois, je ne dis pas que tous les mecs le font. Je dis que par contre, quand il y a un crachat par terre, ça vient d'un mec et pas d'une nana. Pourquoi ? Parce que l'espace public lui appartient. Pas à nous. Enfin, lui appartenait.

  • Speaker #0

    Comment elle s'est faite l'écriture du livre ? J'entends, vous aviez dit tout à l'heure que c'était difficile. Oui. que c'était dans le peu de temps qu'il vous restait pour cela.

  • Speaker #1

    Ça s'est fait avec des sacs de sable devant la porte. Virginia Woolf a écrit ce livre incroyable sur une chambre à soi et elle dit que pour pouvoir créer, produire et donc exister par elle-même et pour elle-même, une femme doit impérativement avoir une chambre à soi, c'est-à-dire un espace à elle, très clairement. Moi, j'ai longtemps voulu avoir un studio ici pour pouvoir bosser.

  • Speaker #0

    Une cuir sonnière ?

  • Speaker #1

    Voilà, vous avez exactement le même réflexe que mon mec C'est fou, c'est fou C'est-à-dire que cet espace-là, il faudrait qu'il soit peuplé par un homme Je ne peux pas l'occuper seule Il faut que je sois en attente d'un mec qui arriverait J'ai utilisé ce mot-là à la dessin Ouais, mais n'empêche que le réflexe, il est là C'est-à-dire que mon mec, tout de suite, au début, croyait vraiment que je voulais recevoir des amants L'idée qu'une femme puisse être bien avec elle-même Et aimer passer du temps seule sans avoir à s'occuper des autres Putain, mais ça c'est une idée qui est toujours... pas rentrer quoi moi je voulais juste un bureau pour moi pourquoi parce que si mon bureau il est dans l'espace commun évidemment que toutes les quarts de seconde je vais être rappelé et pire éduqué comme je l'étais comme toutes les femmes de ma génération je vais même devancé les cris et les appels donc attention on dit beaucoup si les femmes sont écrasés par les tâches domestiques c'est qu'elles savent pas délégués non non non par ailleurs On a du mal à déléguer, mais dans un second temps, à un moment donné, si on veut s'attaquer aux violences masculines et à la construction du masculin, il va falloir nommer les choses et désigner les premiers responsables. Les premiers responsables, c'est quand même, pardon, la plupart des mecs à la maison, ils n'en branlent pas une. Et que ça leur va très bien comme ça.

  • Speaker #0

    Oui, mais on offre des fleurs.

  • Speaker #1

    Voilà, le 8 mars. Vous savez qu'en Italie, on offre des fleurs aux mères, le 8 mars. Moi, je te les ferais bouffer par les narines, les bouquets de mimosa, là. Moi, je voulais donc un bureau. Je ne l'ai pas pour faute de moyens et de tout ça. Donc, je bosse chez moi. Mais effectivement, comme je vous ai dit, je dois régler d'abord tout le domestique avant de me sentir autorisée. Alors, il y a une part de moi qui devrait me sentir autorisée. Bien sûr. Puis il y a le monde autour qui m'explique quand même que mon rôle premier, c'est d'être mère. Ça me va, j'adore être mère. Mais je vous donne un exemple. Il y a un espace commun, le salon. Il y a dans cet espace commun, deux adultes, deux enfants. Il y a un adulte qui est en train de bouquiner sur le canapé. Il y a l'autre adulte qui a quatre pattes en train de ramasser des Legos sous le meuble de la télé. À votre avis, qui fait quoi ? En toute honnêteté.

  • Speaker #0

    On le lit dans votre livre.

  • Speaker #1

    Ouais, mais parce que c'est vrai. Parce que c'est vrai. C'est-à-dire que... je ne m'autorise pas à prendre cette peau sur le canapé si mes gamins sont dans la pièce je vais être avec eux je vais pas le prendre cet espace pour moi mais pourquoi pas juste parce que je suis débile et que je me charge d'un truc que j'aurais pas à faire il ya un monde autour de moi il ya une culture et elle est millénaire et elle me dit quoi elle me dit que si moi je prends cinq minutes pour moi je suis une mauvaise mère alors que si mon mec prend cinq minutes pour jouer avec les enfants c'est un héros donc lui il a tout intérêt à le faire que moi c'est un peu plus compliqué Donc j'ai le choix et en même temps je ne l'ai pas. Donc la seule solution en réalité c'est effectivement d'avoir une chambre à soi, d'avoir un espace à soi et d'être dans un espace temps où vous êtes seul. Le problème c'est que cet espace temps il est difficile à se créer et à maintenir. D'où les sacs de sable devant la porte parce que vraiment il faut des défenses mais autour de vous même aussi. C'est à dire de vous interdire de sortir de votre bureau. Non tout va bien les gamins ils vont se gérer. il n'y a pas de problème. Mais aussi pour les autres, de dire non, vous ne venez pas me demander, par exemple, toi, tu ne me demandes pas où est ton doudou et tu le cherches, mais toi, mec, tu ne me demandes pas où sont les clés de la bagnole et tu les cherches, en fait.

  • Speaker #0

    J'avais entendu Bégaudeau dire qu'écrire, c'était un loisir bourgeois. C'est aussi pour cela que c'était parce qu'il fallait consacrer beaucoup de temps à cela pour créer quelque chose, créer du roman et que finalement... dans les textes courts où c'était plus simple quand on avait peu de temps à faire cela. Et vous, on voit que dans ce livre, il y a des petits textes courts qui viennent ponctuer finalement la narration du fil de ce récit qui n'est pas un roman, qui est vraiment un récit. Et donc, il y a ce personnage, votre mère, qui revient régulièrement. Ce qui est intéressant, c'est de se dire finalement, la place de la mère, souvent, il y a des auteurs qui vont... taper gentiment sur leur mère. Mais est-ce que c'est parce qu'elle est plus impliquée dans l'éducation des enfants, en général ?

  • Speaker #1

    C'est-à-dire que les mères, on porte le bob, quoi qu'il arrive, on porte le chapeau. C'est-à-dire que quoi qu'il arrive, ça va être de notre faute, mais aussi parce qu'on est en première ligne, parce que le lien avec l'enfant est organique, parce que c'est le tout premier lien, et parce que c'est bien pratique, parce que du coup, tout le monde a pu dire qu'en gros, quand ça déconnait, c'était que la mère était responsable. Donc oui, elle a cette place de premier plan. qui n'est pas forcément un cadeau. Et puis, ce qui est marrant, c'est qu'on vit dans une société où, en gros, quand tout va bien, la mère va devoir tout, globalement, s'occuper, encore une fois, répartition des tâches domestiques, mais même si vous prenez les premiers mois d'un bébé. La nuit, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais les mecs sont frappés d'une espèce de surdité nocturne que la médecine n'explique pas. Et qui fait que, hop, il écrit le bébé. Ils ne les ont pas entendus, dis donc ! Nous, on les entend, parce qu'on n'a pas le choix. Parce qu'on a été élevés comme ça. Parce qu'encore une fois, un père qui ne se lève pas, c'est normal, il est fatigué, il a du travail. Une mère qui ne se lève pas, eh oh, t'es en congé mat ! Sachant que dans cette formule de congé maternité, il y a quand même un truc qui ne va pas. Il faut avoir vécu en tête à tête avec un bébé pendant deux mois pour comprendre que même la formule, c'est du foutage de gueule, en fait. On aura ce problème-là, de place des uns et des autres dans l'éducation des enfants, tant qu'on n'aura pas de congé paternité équivalent. pour les deux, de congés maternités et de congés paternités qui soient équivalents. Pour l'instant, on n'y est pas. Donc pour l'instant, c'est la mère qui est en première ligne. Le congé maternité, c'est le moment où se prennent tous les plis. Exemple à la con, mais c'est elle qui commence à l'emmener chez le pédiatre. Donc c'est elle qui va continuer. Parce qu'elle a l'adresse, parce qu'elle a les codes, parce qu'elle connaît le tout-bib. Donc tout est plus simple. Donc les plis se prennent là. C'est ça absolument qu'il faut pouvoir réformer pour que, dès le départ, on ait une égalité femmes-hommes sur cette question-là. pour la joie de la parentalité comme pour le merdier de la parentalité. Parce que l'énorme arnaque, elle est là. De toute façon, on se fait bananer quoi qu'il arrive, sauf quand on devient féministe et quand on se dit que ce monde là, on va le changer. En gros, c'est la mère qui taffe au début. Mais par contre, on va lui expliquer que le père est tout puissant. Le père tout puissant, il se barre dès qu'il y a un handicap, dès qu'il y a une maladie, dès qu'il y a des trucs qui se mettent à déconner. Mais par contre, On l'a entendu au moment du mariage pour tous, un papa, une maman, on ne ment pas aux enfants, blablabla. Il fallait que le père soit présent. Par contre, la nuit, ce n'est pas la peine que le père soit présent. Donc, il l'est symboliquement, il est dans la loi. On a un mal fou, par exemple, à retirer l'autorité parentale à un père violent. Un mal fou, parce qu'il est le père et que cette loi, quoi qu'il arrive, est inattaquable. Je vous donne un exemple. Mon mec, moi j'ai fait mon premier enfant, il est issu d'une PMA. Donc, je l'ai fait toute seule. Puis, il se trouve que j'ai rencontré mon mec, que mon mec et mon fils se sont choisis, aimés. Et qu'à un moment donné, on s'est dit, bon... Il faudrait peut-être régulariser tout ça parce que si il m'arrive un truc, mon mec n'est rien pour Isaac, alors que dans la vie de tous les jours, il est beaucoup de choses pour Isaac, il est son père. Et bien en France, quel que soit... Ça peut avoir lieu, mais sept ans après la naissance, en l'occurrence c'était sept ans après la naissance, Franck n'avait qu'à aller en mairie et dire je suis son père. Ah ok, très bien, vous signez là. C'est-à-dire que la mère n'existe pas symboliquement, la mère n'existe pas, elle est là. Pour changer les couches, elle est là pour récupérer les gosses à l'école en urgence quand ils ont 38. Mais par contre, n'importe quel mec peut se présenter dans n'importe quelle mairie pour dire je suis le père et la mère n'a pas son mot à dire. Rien. Donc on a peut-être un petit souci là aussi.

  • Speaker #0

    Je vais revenir sur le sujet de votre mère, si ça ne vous embête pas. Et elle l'a pris comment finalement, la lecture du livre ?

  • Speaker #1

    Ma mère, elle est folle, donc ma mère, elle a adoré. En fait, ma mère, elle est... Elle est une espèce de déni très protecteur de tout. Et en fait, elle était hyper contente que je parle d'elle. Donc, salut à la vidéo. Salut à la vidéo. Très bien. Moi, j'ai flippé parce que je me suis dit, comment elle va prendre les choses ? Après, en leur lisant, je trouve qu'avec le recul, je trouve qu'on sent aussi l'amour que j'ai pour elle. Et il est profond, l'amour-là. L'admiration. Oui, l'admiration aussi. Je lui dédie quand même ce livre. Mais maintenant, je pense que quand... Qui aime bien s'engueule bien. Et on est au moins dans une famille où on se dit les choses. Et oui, les portes claquent, mais cinq minutes après, on se dit je t'aime, donc ça va.

  • Speaker #0

    C'est une comédie italienne ?

  • Speaker #1

    L'enfer, mais l'enfer ! On est séfarades d'un côté, italiens de l'autre. Donc tout ce qui est nuance et modération, c'est pas nous. Très clairement. Tout ce qui est calme et... Non, ça n'existe pas. Il y a un niveau de décibels moyen qui est assez élevé. Il y a un niveau de bordel, ouais, qui est assez élevé, mais c'est joyeux.

  • Speaker #0

    On va finir l'émission. On est dans un café, on est ici au One Feed, dans le Jays North Ham, arrondissement. Et je vais vous poser trois questions sur l'univers du café. Une question qui va être d'abord un peu sur, justement, le café, parce que je vois que vous buvez du café. Est-ce que, d'après vous, un expresso contient beaucoup plus de caféine qu'un allongé ?

  • Speaker #1

    J'en ai pas la moindre idée, mais j'ai un truc. En fait, je suis un peu... Je suis un peu bizarre sur les questions d'hygiène de vie. Vraiment, je suis très étrange parce que je fais 5 heures de sport par semaine, ça, il n'y a pas de problème. Là,

  • Speaker #0

    vous avez le café et la clope.

  • Speaker #1

    Café, clope. Et je sais, dans un coin de ma tête, j'ai vaguement l'idée que ce n'est pas hyper bon pour la santé. Mais je crois que pour l'instant, je m'en contrecogne. Je ne devrais pas. Vraiment, je ne devrais pas si je veux survivre. Mais peut-être que je me crois un peu immortelle, en fait. Mais donc, non, je ne sais pas. Est-ce que vous avez la réponse, vous ?

  • Speaker #0

    Oui, bien sûr, j'ai la réponse.

  • Speaker #1

    Il y a plus de caféine où ?

  • Speaker #0

    La caféine se diffuse dans les américanos.

  • Speaker #1

    Donc il y en a plus. Je savais que c'était dégueulasse. En fait, ce qu'il faut, c'est des cafés serrés. Voilà, point à l'italienne. Terminé. Question pliée.

  • Speaker #0

    J'ai deux autres questions. J'ai essayé vraiment de trouver comment on pouvait allier féminisme et bistrot, café. Qu'est-ce que... Qu'est-ce que la grève du vin en 1933 ?

  • Speaker #1

    La grève du vin ?

  • Speaker #0

    Oui, la grève du vin.

  • Speaker #1

    C'est quoi ? Vous ne savez pas ? Ben non.

  • Speaker #0

    C'est génial. La grève du vin... en 1933, était une action de protestation menée par le mouvement féministe français, la française, à Vente-Pas, pour réclamer le droit de vote des femmes. Les femmes ont été invitées à ne pas acheter de vin pendant une semaine du 26 mars au 2 avril. Parce qu'en fait, le vin, c'était un véritable moteur économique en France à cette époque. On est dans les années 30. Et ça n'a pas eu un effet immédiat. Mais c'est vrai que les femmes ont obtenu le droit de vote en 44, à partir de la guerre.

  • Speaker #1

    Moi, je trouve que les féministes, déjà, elles ont le don pour rendre notre vie plus joyeuse, plus piquante et plus bordélique, mis à part le fait qu'elles ont un vrai projet politique et une vraie utopie politique qui est foutument intéressante et à laquelle on gagnerait tous à s'intéresser. Mais elles ont aussi ce sens de l'action collective et ça, je les trouve assez géniales pour ça. Déjà, elles sont drôles. Vous citiez tout à l'heure le slogan de Gloria Steinem, mais je pourrais vous en citer plein d'autres. En fait, les slogans féministes sont très, très drôles. Elles ont la créativité de toutes celles et de tous ceux avec qui on met les bâtons dans les roues. Donc, en fait, elles sont assez géniales en drôlerie. Quand vous regardez les mouvements... Ce qu'ils ont pu produire comme action et comme slogan, c'est très très drôle. Et je pense qu'il serait temps de ressonger à ce type de mouvement-là. Si je vous dis grève des femmes le 8 mars prochain, c'est une possibilité à laquelle il faudrait peut-être toutes et tous commencer à réfléchir. Et je parle très sérieusement. C'est-à-dire que là, au moment où je vous parle, je vous le dis, peut-être, peut-être.

  • Speaker #0

    De faire grève.

  • Speaker #1

    Peut-être qu'il y aura une grève des femmes le 8 mars. Peut-être.

  • Speaker #0

    D'ailleurs, grève, je vais sur ma dernière question. Qu'est-ce que le bistrot de la grève ?

  • Speaker #1

    C'est quoi ? Je ne sais pas moi.

  • Speaker #0

    Génial.

  • Speaker #1

    Moi je vous écoute.

  • Speaker #0

    C'était une émission de radio pirate diffusée pendant la grève historique des techniciens et des producteurs de la maison de la radio.

  • Speaker #1

    Non, non, non, ils ne font jamais grève, ce n'est pas vrai. Non, il n'y a pas de mouvement.

  • Speaker #0

    Dans les années 60. Animé par le journaliste et écrivain François Cavana. L'émission était diffusée tous les soirs en direct des studios occupés, c'est une sorte de talk show improvisé, où les grévistes, leur soutien, venaient diffuser, discuter, échanger des idées et boire un verre, ce qui se faisait peu à l'époque, de dire ouais vraiment à l'antenne.

  • Speaker #1

    Ah c'est bien non ? J'adore l'idée.

  • Speaker #0

    Et ça a fait avancer la cause des grévistes.

  • Speaker #1

    Et bien avec la grève qui se profile, avec cette histoire de fusion, peut-être qu'on devrait reproduire ça, peut-être qu'on devrait le faire aussi, squatter les studios et faire l'émission.

  • Speaker #0

    Une émission pirate !

  • Speaker #1

    Exactement, je vais le suggérer au comité de grève de Radio France. Non, sans déconner, s'ils continuent avec ce projet de fusion, c'est ce qu'ils vont se prendre dans les dents et ils le savent. Donc, préparez-vous à entendre.

  • Speaker #0

    Aimerait davantage.

  • Speaker #1

    Non, mais alors, pour le coup, sur cette grève-là, sur le mouvement de protestation, sur la fusion, les auditeurs sont avec nous. Les auditeurs et les auditrices sont clairement avec nous. Je crois qu'ils sont prêts à se prendre des semaines de playlist pour que cette fusion n'ait pas lieu, parce qu'elle est un non-sens complet, justifié par bien. C'est encore une preuve d'incompétence notoire de ceux qui nous gouvernent. Et moi, je suis affligée par sept ans de politique confiée à des incompétents qui ne connaissent pas leur dossier. Mais vraiment pas. Ils ne bossent pas. Ils ne bossent pas parce qu'en italien, on dit qu'ils ont la puzzalnazza, la puanteur au nez. C'est-à-dire qu'ils sont des espèces d'arrogance de ces gens qui pensent avoir tout pigé. Alors qu'en fait, ils n'ont même pas le début. d'une compréhension du monde qui soit à peu près juste et honnête. Donc comme je le dis souvent, on n'a pas le cul sorti des ronces, mais on s'y attaque.

  • Speaker #0

    Merci beaucoup Julia Foyce.

  • Speaker #1

    Merci à vous.

  • Speaker #0

    On va prendre un café au comptoir. Je rappelle le titre de votre dernier livre, un récit, Ce que le féminisme m'a fait chez Flammarion.

  • Speaker #1

    Merci beaucoup.

  • Speaker #0

    Vous avez écouté un café au comptoir. Petit mot habituel de chaque fin de podcast, allez sur Apple Podcast, mettez 5 étoiles, c'est encore mieux. Et puis surtout, laissez-nous un petit mot. pour expliquer comment c'était bien ce podcast, comment vous l'avez aimé. Vous mettez n'importe quel pseudo, on s'en fout. En tout cas, ça nous offre de la visibilité. Allez partager ce podcast avec vos amis, vos collègues, votre famille, qui vous voulez. En tout cas, merci d'être ici et à très, très, très, très bientôt pour un nouveau café.

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